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24 heures | Mardi 5 juillet 2011
Culture
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Cinéma
Les gens
Montreux Jazz Festival
«Jeveuxcasserlesmurs»
Trente ans après
son concert fondateur,
le harpiste Andreas
Vollenweider revient à
Montreux jeudi. Exclusif
Décès
Le guitariste établi à Genève
est mort vendredi dernier
d’une crise cardiaque
Maître de la guitare jazz aux compositions
virtuoses et raffinées, Ahmad Mansour
est décédé vendredi 1er juillet en début de
soirée, à Genève, d’une crise cardiaque.
Etabli dans la Cité de Calvin depuis plusieurs années, le musicien était un pilier
des concerts organisés par l’Association
genevoise pour la musique improvisée
(AMR). Mais il se produisait régulièrement en Suisse romande et était souvent
venu animer les soirées du Club Chorus,
à Lausanne. Né le 7 juin 1960 à Téhéran,
Ahmad Mansour passe une partie de son
enfance en Suisse avant de s’envoler pour
Boston, où il suit les cours du Berklee
College of Music. Là, il perfectionne son
jeu de guitare auprès de John Abercrombie et de Mick Goodrick. En 1986, il s’établit à New York et commence une carrière
internationale.
François Barras Zurich
«Aux Etats-Unis, certains fans viennent à
mon concert avec leurs enfants, qu’ils ont
prénommés d’après une de mes chansons. Et qu’ils ont parfois conçus et mis au
monde sur ma musique.» La voix d’Andreas Vollenweider, d’habitude aussi paisible que le lac de Zurich qui baigne le
jardin de sa villa, trahit une pointe de
stupéfaction au moment de rappeler quelles passions son art a déchaînées. En une
vingtaine de disques, écoulés à 15 millions
d’exemplaires, le harpiste zurichois est
devenu une singulière pop star.
Le 11 juillet 1981, son concert au Montreux Jazz avait été le détonateur vers un
déploiement international qui mena
Vollenweider et sa troupe sur la route du
succès. Aujourd’hui, le bonhomme de
57 ans compose à son rythme ses nouvelles chansons depuis sa maison-studio, sélectionne ses concerts et offre des fraises
aux journalistes qui l’interrogent. «La
musique a toujours été synonyme de rencontres et de découvertes. Mon père,
Hans, était organiste. J’ai été tôt éduqué à
la musique classique, mais aussi aux sons
ethno que des amis de la famille nous
faisaient entendre. Bien sûr, j’écoutais
aussi du rock, les Beatles, Pink Floyd,
Roxy Music, mais aussi du jazz avec
Bitches Brew, de Miles Davis!»
Ahmad Mansour
avait animé
plusieurs soirées
du Club Chorus,
à Lausanne. DR
La harpe réinventée
Andreas Vollenweider laisse dériver ses
souvenirs. Trente ans après son fameux
concert, le Montreux Jazz l’honore jeudi
d’une soirée spéciale, au cours de laquelle il reviendra sur une carrière débutée vers 1975. Cette année-là, l’autodidacte jetait son dévolu sur l’instrument le
plus improbable. «Le bon côté des seventies, c’est que les gens étaient ouverts à
tout. Sauf à la harpe! Mes amis étaient
désolés pour moi.» Andreas s’accroche. Il
met au point un moyen d’amplifier chaque corde, gage d’une dynamique et
d’une profondeur inédites. «Sans cela, je
me serais lassé. La harpe, comparée au
piano, est trop limitée.»
Son instrument électroacoustique
sous le bras, il compose un premier disque, Eine Art Suite in XIII Teilen, en 1979.
S’y dessine la «patte» Vollenweider, soit
des plages instrumentales élégiaques,
tout en arpèges, parfois traversées par
une flûte de Pan. «J’appelle cela de la
musique pour films sans images.» Il y
savoure une langueur spatiale qui anticipe la musique lounge. Ses thèmes, marqués par le Sturm und Drang, précurseur
allemand du romantisme, et un lexique
mythologique à la touche ésotérique, catalogueront bientôt le Zurichois parmi les
chantres du New Age.
L’année de la révélation montreusienne paraît Behind The Garden – Behind
The Wall – Under The Tree, premier grand
succès commercial. Dans une caravane
de tournée digne des dieux rock, le Suisse
sillonne les Etats-Unis. «C’était génial!
Mon regret: ne pas en avoir profité plus.
J’avais des scrupules à le faire, tellement
tout cela était loin de mon éducation,
dans un environnement intellectuel et
socialiste. Je suis encore attaché à ces
valeurs.» Cheveux longs, tout de blanc
derrière sa harpe, tissant une musique
embaumée plus adéquate à une heure de
yoga qu’à un combat de catch, Andreas
Vollenweider devient un cliché de la tendance New Age. Le terme le fait bondir:
«Quelle horreur! J’avais déjà vendu des
millions de disques quand on a accolé
VC2
Contrôle qualité
Disparition
brutale
d’Ahmad
Mansour
Andreas Vollenweider chez lui, à Zurich: «Je veux développer le potentiel imaginatif de mes auditeurs.» ODILE MEYLAN
Andreas Vollenweider en dates
1953 Naît le 4 octobre, à Zurich, d’un père
compositeur et organiste.
1975 Multi-instrumentiste autodidacte,
il fait le choix d’une harpe, qu’il électrifie.
1981 Son concert au Montreux Jazz
fait sensation.
1984 Tournée outre-Atlantique prestigieuse. Deux ans plus tard, son 4e album,
Down To The Moon, se classe dans trois
hit-parades américains (classique, jazz
et pop) et reçoit un Grammy.
1989 Dancing With The Lion, nouveau
succès.
1994 Eolian Minstrel ose les voix sur une
musique traditionnellement instrumentale. Joue dans le «groupe» Pavarotti
and Friends. Concert au MJF.
1999 Retour vers un son plus ethno
avec Cosmopoly, qui invite notamment
Abdullah Ibrahim et Bobby McFerrin.
2010 Tournée à succès en Afrique du Sud,
avec notamment un concert dans une
prison du Cap.
2011 Après trente ans et 15 millions
d’albums vendus, retrouve la scène
du MJF.
«Ce fut comme un souffle»
U Souvenirs Un concert peut changer
une carrière. Celui qu’Andreas
Vollenweider et son batteur, Walter
Keiser, livrèrent au Montreux Jazz, le
11 juillet 1981, amplifia comme rarement
la renommée internationale du harpiste
de 28 ans, qui allait sortir son deuxième
album, Behind The Garden – Behind The
Wall – Under The Tree. «Nous avions
déjà donné des dizaines de concerts,
mais nous avons proposé à Montreux
une configuration sonore inédite.
Moi-même, je ne pouvais présager
de la puissance du résultat. Nous avons
commencé à jouer devant un public
curieux face à mon instrument…
exotique! Lorsque j’ai pincé les cordes
basses, ce fut comme un souffle.
Personne ne s’attendait à un son si
profond. J’étais littéralement transporté
par la musique! Ce fut une expérience
émotionnelle intense, partagée avec un
public international.» Directeur du MJF,
Claude Nobs se souvient d’un
Vollenweider anxieux: «Son concert
allait être filmé, ça lui mettait une
pression supplémentaire. Le public
était d’abord curieux face à cette
musique très éthérée, ainsi que par le
drôle d’aspect de mage du musicien.
Puis il a été absolument conquis.»
A la question de savoir pourquoi la
francophonie est restée relativement
imperméable à Vollenweider, Claude
Nobs a une réponse carrée: «La France
avait trop à faire avec la soupe de Jean
Michel Jarre pour recevoir la musique
exigeante de Vollenweider.» C’est dit.
systématiquement le New Age à ma musique. Ce fut une véritable contre-publicité:
de nombreux fans ne voulaient plus être
liés à cette mode. Je suis tout le contraire
d’un gourou!» Et de raconter comment il
opta pour des tuniques ocre après s’être
rendu compte que les spectateurs l’imitaient dans ses tenues blanches. «Ça n’a
pas manqué: mon public a immédiatement rougi!»
A l’étage, l’un de ses trois enfants salue
depuis la fenêtre. Andreas Vollenweider
les guide dans la musique sans les diriger.
Lui qui reconnaît que ses disques
n’auraient jamais existé sans hachisch
– «J’en fumais des tonnes» – se pose désormais en «promoteur de la lucidité,
l’orgasme le plus puissant qui soit».
Une conclusion logique pour cet artiste qui joue en psychologue, visant
moins le succès radio qu’une immersion
propice à la maïeutique et à l’introspection. «Je veux casser les murs, développer
le potentiel imaginatif de mes auditeurs,
révéler nos souvenirs enfouis et nos émotions perdues. J’ai reçu des lettres de fans
que ma musique a aidés.» On aimerait
objecter que cette démarche sonne New
Age, mais Andreas propose une fraise en
même temps qu’un sourire désarmant,
puis perd son regard dans l’étendue du
lac de Zurich.
Montreux Jazz Festival,
je 7 juillet (Miles Davis Hall, 20 h 30)
Rens.: 021 966 44 44
www.montreuxjazz.com
Tous les festivals de l’été sur
notre blog www.24heures.ch/
festivales-2011
L’Iranien prend la nationalité américaine en 1990. Il tourne dans le monde
entier avec son trio, qui comprend le bassiste Stomu Takeishi et le batteur Ted
Poor, deux piliers de la scène musicale
new-yorkaise. Ahmad Mansour a publié
une douzaine de CD, dont le magnifique
Free Speech, en 2007. Le 24 juin dernier,
le guitariste avait encore préparé les élèves de son atelier de jazz moderne, et
joué à leurs côtés lors d’un concert du
Festival de l’AMR, au parc des Cropettes,
à Genève. Luca Sabbatini
Deux
projections
gratuites
à Locarno
Cinéma
En attendant le programme
du Festival du film de Locarno,
qui sera dévoilé le 13 juillet,
les organisateurs pensent à la
population locale et aux touristes
Le Festival de Locarno innove en organisant pour la population et les touristes un
préfestival gratuit sur la Piazza Grande.
Au menu, deux soirées consacrées à deux
chefs-d’œuvre du septième art. Dimanche 31 juillet, la délicieuse Audrey
Hepburn illuminera l’écran avec Diamants sur canapé, de Blake Edwards.
Mardi 2 août, c’est le Rimini de la jeunesse
de Fellini qui revivra avec Amarcord.
Deux films soulignés par une partition
musicale extraordinaire. 24
Locarno, Piazza Grande
Di 31 juillet et ma 3 août,
www.pardo.ch

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