SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL

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SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS
180, boulevard Haussmann - 75008 PARIS
Téléphone : 01.53.89.32.00 - Télécopie : 01.53.89.32.38
Dossier n° 3900
M. Jacques M,
masseur-kinésithérapeute
Séance du 30 juin 2004
Lecture du 30 août 2004
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE
DES MEDECINS,
Vu, enregistrés au secrétariat de la section des assurances sociales du
Conseil national de l'Ordre des médecins le 24 février 2004 et le 26 avril 2004, la requête
et le mémoire présentés pour M. Jacques M, masseur-kinésithérapeute, tendant à
l’annulation d’une décision, en date du 14 janvier 2004, par laquelle la section des
assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des médecins de Rhône-Alpes,
statuant sur les plaintes de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme, dont le
siège est avenue du Président Herriot, B.P. 1000, 26024 VALENCE CEDEX et du
médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Valence, dont l'adresse postale est
B.P. 1030, 26010 VALENCE CEDEX, lui a infligé la sanction de l’interdiction du droit de
donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de six mois avec le bénéfice du
sursis pendant quatre mois,
par les motifs que la facturation d’actes non effectués par lui pendant sa
période d’hospitalisation du 2 au 5 janvier 2001, provient de ce qu’il a omis de barrer son
nom pour indiquer le nom de son remplaçant sur les feuilles de soins, le témoignage de
M. A… étant critiquable, M. B, le remplaçant, attestant avoir traité M. A.. pendant douze
séances ; que M. M ayant déjà été entendu par la commission socioprofessionnelle sur
les mêmes faits de méconnaissance de la nomenclature, sans suite après cette audition,
il ne saurait être jugé une deuxième fois, pour les mêmes faits d’hyperactivité ; que
l’analyse de l’activité pour la période du 25 au 27 octobre 2000 n’est pas détaillée en
fonction des actes ; que les témoignages qu’il produit lui sont favorables ; que le centre E
et son cabinet disposent chacune d’une entrée différente (rue P et avenue V) ; qu’il n’y a
aucun risque de confusion entre les deux activités (attestations) ; que l’amnistie doit être
accordée ; que M. M n’a jamais incité les clients d’E à bénéficier des prestations de la
sécurité sociale ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 21 juin 2004, le mémoire en défense,
présenté par le médecin-conseil chef de service de l'échelon local de Valence, tendant au
maintien de la sanction prononcée, par les mêmes moyens, en précisant que si M. B était
remplaçant pendant la période d’hospitalisation, il devait le signaler sur les feuilles de
soins de M. M ; que la commission socio-professionnelle départementale des masseurskinésithérapeutes a examiné un problème conventionnel (dépassement du seuil annuel
des coefficients AMK fixé par la convention), le service médical et la section des
assurances sociales ayant examiné la méconnaissance de la nomenclature générale des
actes professionnels (séances d’une durée inférieure à trente minutes) ; que M. M ne
saurait raccourcir la durée des séances en fonction de ses disponibilités (départ subit
d’un kinésithérapeute de son cabinet), les témoignages de la secrétaire et de la femme
de ménage de son cabinet, n’étant pas recevables (lien de subordination) ; que la
diminution de son activité annuelle depuis l’ouverture du centre de remise en forme ne
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correspond pas pour autant à une meilleure qualité de soins (témoignage d’une assurée
mécontente) ; que les risques de confusion entre le cabinet de kinésithérapie et le centre
de remise en forme sont décrits dans le constat d’huissier et dans le témoignage
spontané de Mme C… (les témoignages de la secrétaire et de la femme de ménage ne
peuvent, ici encore, être retenus) ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale et notamment ses articles L 145-1 à L 145-9
et R 145-4 à R 145-29 ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnis tie ;
Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement
des conseils de l'Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et
de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins ;
Vu le décret n° 96-879 du 8 octobre 1996 relatif au x actes professionnels et à
l'exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute ;
Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des
chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l'arrêté du
27 mars 1972 modifié ;
Vu la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes ;
Après avoir entendu en séance publique :
- M. TISSERAND, masseur-kinésithérapeute, en la lecture de son rapport ;
- M. Jacques M en ses explications orales ;
- Mme le Dr CADIER, médecin-conseil, en ses observations pour le service
médical de l’échelon local de Valence ;
- Mme DEROCLES, représentant la caisse primaire d'assurance maladie de
la Drôme, en ses observations ;
M. M ayant eu la parole en dernier ;
APRES EN AVOIR DELIBERE,
Considérant que le contrôle exercé par la caisse primaire d'assurance
maladie de la Drôme et par le médecin-conseil chef de service de l'échelon local de
Valence sur l’activité de M. Jacques M, masseur-kinésithérapeute, a porté sur les actes
de soins dispensés pendant la période comprise entre le 16 mai 2000 et le 3 juin 2002 ;
Sur le principe du non bis in idem
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Considérant que la commission socio-professionnelle départementale des
kinésithérapeutes a examiné la question du dépassement par M. M du seuil
conventionnel annuel des coefficients AMK, tandis que le service médical et, après lui la
section des assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des médecins de RhôneAlpes, ont examiné la question de la méconnaissance par M. M des dispositions
générales de la nomenclature générale des actes professionnels relatives à la durée des
séances de soins ; qu’ainsi, les deux procédures de saisine présentaient des différences
de nature, d’objet et d’effet ; que dès lors, M. M ne saurait soutenir qu’il serait jugé une
deuxième fois à raison des mêmes faits, et que le principe non bis in idem aurait été
méconnu, la commission n’ayant d’ailleurs pas donné suite ;
Sur le fond
Considérant, en premier lieu, que M. M a facturé à M. A…, qui a saisi la caisse
primaire d'assurance maladie de la Drôme d’une plainte, les douze séances de
kinésithérapie prescrites, alors qu’il n’a réalisé que deux séances, dix séances ayant donc
été présentées à tort au remboursement ;
Considérant, en second lieu, que M. M a facturé à tort quarante et une
séances de kinésithérapie concernant vingt-six assurés, ces actes, aux dates auxquels ils
ont été exécutés, le 3 janvier 2001, le 4 janvier 2001 et le 5 janvier 2001, n’ayant pu l’être
personnellement par lui, puisqu’il était hospitalisé à Lyon, et, ayant, en réalité été réalisés
par son remplaçant, M. Olivier B, M. M ayant négligé de barrer son nom et de porter le
nom du remplaçant sur les feuilles de soins ; qu’il a ainsi méconnu les dispositions de
l’article 5 alinéa c de la nomenclature générale des actes professionnels selon lesquelles
seuls les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical peuvent être pris en
charge ou remboursés ;
Considérant, en troisième lieu, que M. M, s’agissant du dossier 39, a facturé
des séances de rééducation en piscine, alors qu’elles n’avaient eu lieu en piscine qu’une
fois sur deux ;
Considérant, en quatrième lieu, que la pratique du cabinet de M. M consistait
à faire signer les assurés sur des feuilles de soins vierges, supprimant ainsi la faculté de
s’assurer de la conformité des informations mentionnées ensuite avec la réalité des actes
pratiqués ;
Considérant, en cinquième lieu, qu’il résulte de l’instruction, notamment des
constats d’huissier dressés le 6 novembre 2002 et le 25 mars 2003, de la plainte de
l’assurée, Mme C…, du témoignage de Mme Laure V…, ex-salariée du centre de remise
en forme E, que M. M exerce à la fois dans ce centre E et dans son cabinet dans des
conditions matérielles créant une totale confusion entre son activité libérale de masseurkinésithérapeute et son activité commerciale de remise en forme ; que les quelques
témoignages contraires produits par ce praticien qui émanent de sa secrétaire et de sa
femme de ménage, ne suffisent pas à contredire la solidité des trois attestations fournies
par les plaignants ; qu’en définitive, M. M a méconnu les dispositions de l’article 8,
paragraphe 1 de la convention nationale destinée à organiser les rapports entre les
kinésithérapeutes et les caisses d’assurance maladie ;
Considérant, en sixième lieu, que l’étude de l’activité de M. M pour les
journées des 25, 26 et 27 octobre 2000 révèle qu’il n’a pu dispenser personnellement des
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soins de qualité parce qu’il n’a pu respecter la durée de trente minutes par patient et par
séance prévue pour les actes de rééducation et de réadaptation fonctionnelles, par les
dispositions du Titre XIV de la nomenclature générale des actes professionnels ; c’est
ainsi que la durée théorique de travail par jour s’établit à vingt trois heures le 25 octobre
2000 (pour quarante six patients dont treize visités au domicile), à quatorze heures le 26
octobre 2000 (pour vingt huit patients dont sept visités à domicile) à vingt trois heures
trente minutes le 27 octobre 2000 (pour quarante sept patients dont treize visités à
domicile) ;
Considérant, en septième lieu, qu’à de nombreuses reprises, les soins ont été
commencés par M. M, avant l’expiration du délai de dix jours imposé par la nomenclature,
une telle pratique faisant courir à l’assuré social le risque de supporter seul le coût du
traitement en cas de refus de prise en charge par l’assurance maladie, quand il n’y a pas
d’application du système du tiers payant ;
Sur la sanction
Considérant que les faits reprochés à M. M sont des fautes au sens de l’article
L 145-1 du code de la sécurité sociale, susceptibles de justifier l’application de l’une des
sanctions énumérées à l’article L 145-2 du même code ; qu’ils sont, à raison de leur
gravité et de leur fréquence, contraires à l’honneur et à la probité et ne peuvent, donc,
bénéficier de l’amnistie édictée par l’article 11 de la loi du 6 août 2002 ;
Considérant qu’il convient dans les circonstances de l’affaire, de confirmer la
sanction édictée par les premiers juges en prononçant à l’encontre de M. Jacques M,
l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant six mois dont
quatre mois avec le bénéfice du sursis ;
Sur les frais de l’instance
Considérant, que dans les circonstances de l’affaire, il y a lieu, en application
de l’article R 145-28 du code de la sécurité sociale, de mettre les frais de l’instance à la
charge de M. M ;
PAR CES MOTIFS,
DECIDE:
Article 1er : La requête de M. Jacques M est rejetée.
Article 2 : La sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux
pendant six mois dont quatre mois avec le bénéfice du sursis, dans les conditions fixées à
l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale prononcée à l’encontre de M. M, par la
décision de la section des assurances sociales du conseil régional de l’Ordre des
médecins de Rhône-Alpes, en date du 14 janvier 2004, prendra effet, pour la partie non
assortie du sursis, le 1er décembre 2004 à 0 h et cessera de porter effet le 31 janvier
2005 à minuit.
Article 3 : Les frais de la présente instance s'élevant à 157 euros seront supportés par
M. M, masseur-kinésithérapeute, et devront être versés dans le délai d'un mois à compter
de la notification de la présente décision.
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Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. M, à la caisse primaire d'assurance
maladie de la Drôme, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Valence, à
la section des assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des médecins de
Rhône-Alpes, au directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Rhône-Alpes, au
chef du service régional de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale
agricoles de Rhône-Alpes, au ministre chargé de la sécurité sociale et au ministre chargé
de l'agriculture.
Délibéré dans la même composition qu'à l’audience du 30 juin 2004, où
siégeaient M. ALLUIN, Conseiller d'Etat honoraire, président ; M. VLEMINCKX’, masseurkinésithérapeute, membre titulaire, nommé par le ministre chargé de la sécurité sociale ;
M. le Dr AHR, membre titulaire, nommé par le Conseil national de l'Ordre des médecins ;
M. le Dr HECQUARD, membre titulaire, et Mme le Dr GUERY, membre suppléant,
nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.
Lu en séance publique le 30 août 2004.
LE CONSEILLER D'ETAT HONORAIRE
PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
DU
CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MEDECINS
G. ALLUIN
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER