Compte rendu : Promessi sposi d`autore. Un cantiere
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Compte rendu : Promessi sposi d`autore. Un cantiere
M. Carini, «Compte rendu de Promessi sposi d’autore...» Atlante. Revue d’études romanes, 3, 2015, p. 170-172. ISSN 2426-394X 170 Compte rendu de Promessi sposi d’autore. Un cantiere letterario per Luchino Visconti, recueil de textes préparé par Salvatore Silvano Nigro et Silvia Moretti, Palerme, Sellerio, 2015, (192 pages). Michele Carini En 2007 Salvatore Silvano Nigro publiait le scénario de l’adaptation cinématographique des Fiancés par Giorgio Bassani (I promessi sposi. Un esperimento, Palerme, Sellerio, 2007) : en offrant cet écrit inédit, il esquissait les contours du débat auquel est maintenant consacré le recueil de textes Promessi sposi d’autore. Un cantiere letterario per Luchino Visconti, publié avec Silvia Moretti qui, sous sa direction, a consacré sa thèse de doctorat à ce même sujet. Le recueil s’articule autour du texte de l’adaptation de Bassani : dans une lettre datée du 27 décembre 1954, Guido Maggiorino Gatti, président-directeur général de Lux Film, demandait à un groupe d’intellectuels, parmi lesquels de nombreux écrivains, d’émettre un avis sur l’opportunité d’une nouvelle adaptation cinématographique des Fiancés. Cette adaptation aurait fait suite, entre autres, à celle de Mario Camerini de 1941, qui avait déjà été produite par Lux Film ; l’élément d’actualité suscitant à nouveau l’intérêt de la maison de production était l’important succès éditorial de la traduction anglaise de l’ouvrage de Manzoni (effectuée par Archibald Colquhoun), qui ouvrait l’horizon commercial du projet aux pays anglophones. La première partie du dossier publié par Nigro et Moretti comprend donc la lettre de Gatti et les réponses de Guglielmo Alberti, Giorgio Bassani, Riccardo Bacchelli, Marino Parenti et également de Colquhoun211. La deuxième partie du dossier rassemble les réactions à l’adaptation de Bassani. Aux noms de Moravia, Bacchelli et Colquhoun s’ajoutent ceux d’Emilio Cecchi et d’Antonio Baldini : malgré un certain nombre de difficultés, les remarques et les 211 Mario Soldati et Alberto Moravia répondent au sondage, mais leurs avis n’ont pas été retrouvés ; un témoignage des traces de celui du premier a été apporté par Colquhoun, alors que pour Moravia les éditeurs renvoient à un article publié dans le Corriere della Sera du 30 novembre 1952. Atlante. Revue d’études romanes, automne 2015 171 suggestions aboutissent au début de l’année 1956 à un découpage de l’argument en quarante-cinq passages, reproduit dans la troisième partie du dossier. Un essai de Salvatore Silvano Nigro introduit les documents et, en miroir, un texte de Silvia Moretti les suit. Se rattachant à des considérations déjà formulées à la marge de l’adaptation de Bassani dans le volume de 2007, Nigro souligne à nouveau l’importance de l’opération de Colquhoun, lequel avait significativement dédié sa traduction « Agli Italiani del secondo Risorgimento del 1943-1945 » (p. 14). La dédicace révèle une perception du roman manzonien partagée par d’autres intellectuels de l’époque, dont on retrouve des traces, par exemple, dans une lettre de Pietro Pancrazi à Piero Calamandrei (p. 15), ou parmi les témoignages de redécouverte des Fiancés de la part de Leone Ginzburg et de Bassani, détenus dans les prisons fascistes. À cela s’ajoute que la précédente réalisation cinématographique de Camerini, sous le fascisme, a justement souffert d’une sorte de stérilisation de l’engagement politique du roman, dont l’allégorie historique restait à l’arrière-plan. S. Moretti décrit ce contexte, en rappelant l’intervention de l’exégète manzonien Giancarlo Vigorelli au colloque sur le néoréalisme de décembre 1953 et le projet d’une adaptation sicilienne des Fiancés – laquelle, soumise à Lux Film, suscita l’opposition de Gatti. Les deux essais accompagnent la lecture des documents du recueil, revenant parfois sur les mêmes enjeux, mais surtout ils se complètent mutuellement ; ainsi, Nigro souligne comment les polémiques, soulevées par le boycottage de Senso à la quinzième Mostra de Venise, ont pu induire Lux Film, qui l’avait produit, à choisir les Fiancés comme nouveau sujet et Luchino Visconti comme réalisateur (p. 24) ; et Moretti suggère que la découverte, par Bassani, du chef-d’œuvre de Tomasi di Lampedusa a probablement déterminé le destin du projet inaccompli (p. 170). Les textes réunis présentent plusieurs motifs d’intérêt : au-delà de leur valeur documentaire sur le contexte culturel de l’Italie du milieu des années cinquante, ils permettent de développer un ensemble de réflexions qui touchent à la fois au domaine de la réécriture cinématographique, à la maîtrise variable du langage propre au septième art dont font preuve les intervenants dans le débat, et enfin à celui d’une Atlante. Revue d’études romanes, automne 2015 172 critique littéraire non strictement académique, appelée à s’exprimer sur une œuvre canonique mais selon une approche presque militante. Le recueil se termine sur un appendice de Nicolò Rossi documentant l’évolution du projet manzonien de Visconti vers une adaptation de l’histoire de Virginia de Leyla, la religieuse de Monza. Rossi explique comment, après un bout d’essai avec Sophia Loren en 1961, le projet aboutit à la pièce de théâtre écrite par Giovanni Testori et mise en scène par Visconti en 1967. Atlante. Revue d’études romanes, automne 2015