l`eau - Source

Transcription

l`eau - Source
Vieux-la-Romaine
musée & sites archéologiques
13 chemin Haussé
14 930 Vieux
Tel : 02 31 71 10 20
Fax : 02 31 71 10 25
[email protected]
Société &
environnement
dans le monde romain
Société et environnement
dans le monde romain
Un exemple régional :
Vieux-la-Romaine
La gestion de l’espace, la maîtrise du territoire constituent
des données essentielles pour les
sociétés. Le monde romain
représente un des exemples le
plus accompli en ce qui concerne
la gestion des ressources au service d’une population nombreuse et organisée. Ces hommes se
sont trouvés confrontés à de
multiples problèmes qui sont
encore aujourd’hui les nôtres et
qu’ils ont appris à résoudre. La
connaissance de leurs préoccupations peut servir de point de
départ à une réflexion sur nos
sociétés modernes.
Conseil général du Calvados
Service d’Archéologie
Musée et sites archéologiques, Vieux-la-Romaine.
Parcours-enquête conçu et réalisé par
Laurence ALEXANDRA du service éducatif.
Conception graphique : Marie-Anne ROHMER, (S.D.A.C.).
Printemps 2008
Photo de couverture :
Synthèse
Les similitudes entre le monde romain et l’Union Européenne sur les
questions de l’eau sont grandes. Naturellement, les réponses apportées, si
elles découlent d’objectifs communs, présentent des différences en fonction des
technologies propres à chaque époque.
Montrer qu’aujourd’hui, offrir de l’eau à tous et gérer les ressources tout en
préservant l’environnement constituent les grands enjeux de notre monde
contemporain.
Ce travail peut être suivi d’une visite à la roselière de Vieux, première expérience dans le département de traitement et épuration
des eaux par un moyen naturel.
De l’étude
de la ressource en eau
et de sa gestion
dans la cité romaine d’Aregenua
aux directives européennes
Le problème de la gestion de l’eau, devenu crucial à notre époque est un de
ceux auxquels les Romains avaient su apporter des réponses, tant en ville
qu’à la campagne. L’eau joue un rôle clé dans la structure des villes. Sous
la République romaine, l’extension de Rome a entraîné un certain nombre
de problèmes, notamment en raison de l’écoulement des égouts d’eaux usées
brutes dans les rivières. Déjà, le monde romain devait trouver des solutions
pour mettre un terme à la contamination de l’eau potable et au développement de maladies, pour offrir de l’eau à tous et en grande quantité. Il lui
a fallu développer des techniques d’adduction, d’évacuation, de transformation des ressources.
I. Les besoins en eau
A partir de la visite des salles du musée, de l’image de
couverture et de la lecture des différents documents,
compléter le tableau suivant en indiquant les objets
ou lieux qui montrent l’utilisation de l’eau dans la cité.
Document 1
- Marcus Vitruvius Pollio ou VITRUVE. Architecte romain qui vécut au
Ier siècle av. J.-C., il a rédigé une sorte d’encyclopédie, De Architectura, qui
reprend les techniques connues de l’Antiquité.
« Ctesibius, natif d’Alexandrie, était fils d’un barbier ; il naquit avec un esprit tellement
inventif, qu’il excellait entre tous aux mécaniques, pour lesquels il avait une forte inclination. […] Il fut le premier qui inventa les machines hydrauliques, comme aussi tous les
automates qui se font par l’impulsion des eaux renfermées, les machines qui sont fondées
sur la force du cercle ou sur celle du levier, et plusieurs autres et belles inventions, mais
principalement les horloges qui se font par le moyen de l’eau. Pour faire réussir ces machines, il perça une lame d’or ou une pierre précieuse, et il choisit ces matières parce qu’elles
ne sont pas capables d’être usées par le passage continuel de l’eau, ni sujettes à engendrer
des ordures qui puissent boucher l’ouverture. Cela étant fait, l’eau qui coule également par
ce petit trou fait monter un morceau de liège sur lequel est une règle avec des roues également dentelées, en sorte que par le moyen de ses dents, dont l’une pousse l’autre, ces roues
tournent fort lentement. […] On fait aussi des horloges en marquant les heures sur des
colonnes ou sur des pilastres, et une petite figure montre ces heures avec une baguette tout
le jour, à mesure qu’elle s’élève de bas en haut. »
Livre IX, traduction nouvelle par M.Ch.L. Maufras,
C.L.F. Panckoucke, 1847
- Sextus Julius Frontinus ou FRONTIN. En 97, ce haut dignitaire romain est élevé
au rang de curator aquarum, soit administrateur principal des eaux de Rome, poste prestigieux tant les besoins en eaux revêtaient une importance considérable aussi bien pour la vie
privée des citoyens que pour la vie publique. Voici un extrait de son œuvre, De aquaeductu
urbis romae, édition Les Belles Lettres, 1944, sorte de livre d’instructions pour ses successeurs
sur l’étendue des connaissances des Romains dans le domaine de l’eau.
«- Pour améliorer la qualité des eaux, il convient de séparer les eaux de différents
aqueducs et de diversifier les changements de prise d’eaux. Le jardin sera arrosé
avec des eaux de moindre qualité aussi destinées à des services secondaires.
- Seul l’empereur est autorisé à délivrer une concession pour l’usage de l’eau.
Le curator doit veiller à ce que personne ne prenne de l’eau appartenant à l’État, et que
personne n’excède la quantité d’eau qui lui a été attribué dans la concession.
- le propriétaire de terres limitées par des aqueducs ne peut empêcher la pénétration
dans sa propriété, d’équipes appelées à y travailler pour les conserver où les réparer.
- les propriétaires doivent respecter une distance de 15 pieds entre les sources et les
aqueducs pour planter des arbres, construire des bâtiments ou des sépultures sous
peine d’une amende de 10 000 sesterces.
- une amende de 100 000 sesterces pour quiconque est coupable d’avoir interrompu
ou diminué l’afflux de l’eau dans la ville par une destruction des installations, avec
obligation de remettre les installations en état.
- 10 000 sesterces d’amende pour toute pollution de l’eau à usage public »
Et encore dans Vitruve :
« on pourra connaître par plusieurs observations quelle est la qualité des eaux. Car si elles
coulent à découvert sur la terre, avant que de les enfermer pour les conduire, il faudra considérer quelle est l’habitude du corps des habitants du lieu. S’ils sont robustes et de bonne couleur, et qu’ils ne soient sujets ni aux maux de jambe ni aux fluxions sur les yeux, on sera assuré de la bonté des eaux, comme aussi lorsqu’une fontaine étant nouvellement découverte, si
des gouttes de son eau étant jeté sur du cuivre de Corinthe, ou sur d’autre bon cuivre, n’y font
point de tâche, c’est une marque que l’eau est très bonne.
Cela se connaîtra encore si l’eau après avoir été bouillie ne laisse au fond du vase aucun sable
ou limon ; et si l’on remarque que les légumes bouillis dans cette eau se cuisent promptement.
Enfin on connaîtra qu’elle est légère et très bonne, si étant claire et belle dans sa source,
elle ne gâte point les lieux où elle passe, en y engendrant de la mousse, des joncs ou d’autres saletés. »
Livre VIII, op. cit.
Directive du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un
cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau.
L’eau n’est pas un bien marchand comme les autres mais un patrimoine qu’il faut protéger,
défendre et traiter comme tel.
Article 1.
La présente directive a pour objet d’établir un cadre pour la protection des eaux intérieures
de surface, des eaux de transition, des eaux côtières et des eaux souterraines qui,
A) prévienne toute dégradation supplémentaire, préserve et améliore l’état des écosystèmes aquatiques ainsi que, en ce qui concerne leurs besoins en eau, des écosystèmes terrestres et des zones humides qui en dépendent directement ;
B) promeuve une utilisation durable de l’eau, fondée sur la protection à long terme des
ressources en eau disponibles ;
C) vise à renforcer la protection de l’environnement aquatique ainsi qu’à l’améliorer,
notamment par des mesures spécifiques conçues pour réduire progressivement les rejets,
émissions et pertes de substances prioritaires, et l’arrêt ou la suppression progressive des
rejets émissions et pertes de substances dangereuses prioritaires ;
D) assure la réduction progressive de la pollution des eaux souterraines et prévienne
l’aggravation de leur pollution ;
E) contribue à atténuer les effets des inondations et des sécheresses et contribue ainsi :
- à assurer un approvisionnement suffisant en eau de surface et en eau souterraine de
bonne qualité pour les besoins d’une utilisation durable, équilibrée et équitable de l’eau,
- à réduire sensiblement la pollution des eaux souterraines,
- à protéger les eaux territoriales et marines….
Article 5.
Chaque État membre veille à ce que, pour chaque district hydrographique
- une analyse de ses caractéristiques
- une étude des incidences de l’activité humaine sur l’état des eaux de surface et des
eaux souterraines, et
- une analyse économique de l’utilisation de l’eau
Soient entreprises conformément aux spécifications techniques énoncées dans le présent traité.
Article 9.
Les Etats membres veillent à ce que la politique de tarification de l’eau incite les usagers à
utiliser les ressources de façon efficace… que les différents usagers contribuent de manière
appropriée à la récupération des coûts des services de l’eau compte tenu du principe pollueur-payeur.
Il est nécessaire d’assurer la mise en œuvre correcte des dispositions d’application de la présente directive dans l’ensemble de la communauté au moyen de sanctions appropriées prévues dans la législation des États membres. Il y a lieu que ces sanctions soient effectives,
proportionnées et dissuasives.
Tableau de sélection et de confrontation des informations
Analyse des besoins
Usage domestique
- boisson
- alimentation
- hygiène corporelle
- nettoyage de la maison
- bassin d’agrément
Usage public,
embellissement
de la cité
- embellissement
- thermes
- latrines publiques
- évacuation des eaux
usagées
Artisanat, métier
- Tisserand, teinturier
(foulon)
- agriculture
- pêche
Vie politique et religieuse
- prestige de la cité
- prestige personnel et
politique
- culte à certaines divinités.
Sélections d’objets
L’eau servait également pour des spectacles nautiques (naumachies) ou encore à faire de la musique avec des orgues hydrauliques (cité par Vitruve dans son De Architecura), sans oublier que l’eau
est aussi utilisée pour la sécurité avec la création de corps de
sapeurs-pompiers (cohortes urbaines).
Quelle analyse peut-on faire de ces besoins en eau ?
Nos besoins actuels, en France sont aussi importants et variés.
Répartition de la consommation moyenne d’eau potable, en France, par jour/hab.
nombre
de litres
50
40
30
20
10
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
1 : boisson - 2 : cuisine - 3 : voiture/jardin - 4 : vaisselles - 5 : linges - 6 : sanitaires - 7 : bain/douches
8 : divers - 9 : entretien extérieur - 10 : bâtiments publics - 11 : équipements sportifs
alimentation
hygiène, nettoyage
agriculture
Interrogations
sur les législations
Qui se charge de fournir
et préserver les ressources
en eau ? D’entretenir les
réseaux hydrauliques ?
Comment fournir
une eau de qualité ?
Quelles sont les
exigences ?
Comment expliquer
le coût de l’eau ?
Quelles sont les
infractions possibles
à ces législations ?
Que risquent les
contrevenants ?
Directive du
Parlement européen
Monde romain
antique
III. Offrir à tous
une eau de qualité
Denys d’Halicarnasse. Historien grec né vers 54 av. J.-C., se rend à Rome
en 29 av.J.-C. et y rédige une histoire de la ville depuis sa fondation Les
Antiquités romaines. Cet ouvrage comporte notamment des descriptions
des infrastructures du monde romain.
« Pour moi, au rang des trois plus magnifiques œuvres romaines par lesquelles
apparaît le mieux la grandeur de l’Empire, je place les aqueducs, les voies puis les égouts,
non seulement en raison de leur utilité, mais aussi à cause des dépenses qu’elles ont entraînées. »
L’admiration de Denys d’Halicarnasse pour les réseaux hydrauliques
romains salue les prouesses réalisées dans le monde antique pour offrir à
tous une eau en abondance et de bonne qualité. Cette exigence romaine
reste d’actualité. Ainsi, les règles européennes de l’économie hydrique sont
dans une certaine mesure analogues aux normes en vigueur appliquées
dans le monde romain.
Comparer le monde romain antique et les normes
européennes sur l’usage de l’eau (page suivante) en
complétant le tableau ci-contre.
La consommation moyenne d’eau potable en France est pour 2007 de 200 litres
par jour et par habitant dont 137 litres pour la consommation domestique.
Consommation d’eau en France par secteur d’activité.
énergie : 3%
eau potable : 24%
agriculture : 68%
industrie : 5%
En comparant avec notre consommation actuelle,
quelles similitudes et différences pouvez-vous voir
entre les deux périodes ? (Importance de l’eau selon les secteurs,
quantités nécessaires selon les besoins, besoins nouveaux etc…)
II. L’eau au cœur de
l’organisation de la
cité d’Aregenua
- Caius Plinus Secundus ou PLINE L’ANCIEN. Cet homme du Ier siècle
après J.-C. a compilé dans L’Histoire naturelle (37 volumes), la somme des
connaissances scientifiques, techniques, humaines, sociales ou encore géographiques de son temps.
« Ce sont les eaux qui font la ville »
«…l’aqueduc… si l’on évalue avec exactitude le volume des eaux qu’il déverse sur
les places publiques, dans les bains, les piscines, les canaux, les maisons, les jardins, les propriétés de banlieue, et si l’on considère aussi les distances parcourues par le courant d’eau,
les arcs élevés, la percée des montagnes, le comblement des vallées, on conviendra que
jamais le monde entier n’a présenté plus grande merveille. »
Pline l’Ancien, Histoire naturelle,
livre XXXI, Paris, Dubochet, 1848-1850, édition Émile Littré.
« ... il (l’aqueduc) sera arrivé au pied des murailles de la ville, on construira un bassin près
duquel on placera trois réservoirs. De ce bassin, trois robinets seront disposés sur la même
ligne au dessus des réservoirs, de manière que si l’eau vient à être trop abondante dans ceux
des extrémités, elle puisse tomber dans celui du centre.
Ainsi, de ce réservoir du milieu partiront des tuyaux qui enverront l’eau dans tous les lavoirs
et dans les fontaines jaillissantes ; le second bassin fournira l’eau des bains, qui chaque
année, assureront un revenu au peuple ; le troisième approvisionnera les maisons des particuliers. Voici la raison de cette distribution : l’eau ne manquera point pour les besoins
publics, puisque les conduits particuliers qui la prendront au réservoir empêcheront qu’elle ne puisse être détournée ; et les citoyens qui voudront avoir de l’eau chez eux payeront au
receveur un impôt qui servira à l’entretien des aqueducs. »
Vitruve, De Architectura,
livre VIII, op.cit.
N
L’eau et la Maison au Grand Péristyle
Plan : M-A Rohmer, (S.D.A.C.)
La visite de la Maison
au Grand Péristyle
Même si l’on ignore qui était le propriétaire de cette maison, on peut penser qu’il
avait un niveau de vie élevé compte tenu de la taille de sa maison, de sa décoration mais aussi du fait qu’elle soit reliée au réseau hydraulique urbain. L’eau courante était présente dans un certain nombre de pièces et constituait également
un élément décoratif dans le jardin intérieur, marque du prestige et de la richesse du propriétaire.
A partir de la visite du musée et du site de la Maison
au Grand Péristyle, repérez sur le plan un certain
nombre d’éléments ayant un rapport avec l’eau :
- 2 puits (alimentés par les nappes phréatiques)
- 1 bassin polylobé
- 1 bassin périphérique avec angles en quart-de-rond
(originellement doté de jets d’eau sous pression)
- les latrines
- la salle de bain
- le canal d’évacuation des eaux usagées (égouts longeant
le côté est de la maison)
Représentation du bassin d’alimentation en eaux d’après Vitruve.
LALANCE, Deux monuments messins de l’époque gallo-romaine, I L’aqueduc, 1923, p.16.
A partir du plan de la ville, des éléments exposés sur l‘eau
dans le musée et des extraits de Pline l‘Ancien et de Vitruve,
répondre aux questions suivantes :
- D’où vient l’eau ?
- Comment est-elle distribuée ?
- Qu’est-ce qui compose le réseau
d’alimentation (réseau hydraulique) et
d’évacuation des eaux usées ?
- Pourquoi la présence de l’eau est-elle
un signe de richesse pour la cité ?
Pour des particuliers ?
Compléter le plan suivant en repérant :
- par un tracé bleu : la Guigne, les aqueducs, les puits.
- par un figuré de surface les lieux privés ou publics
alimentés en eau.
Le site d’Aregenua
Plan : J-Y Lelièvre, ( S.D.A.C.)
En examinant le croquis ci-contre sur le cycle de l’eau
potable dans nos villes industrielles, dites quels éléments manquent à Aregenua et pourquoi l’eau de la
Guigne n’était-elle pas captée ?
distribution
retour à
l’environnement
collecte
et dépollution
production
bassin d’épuration
captage
Croquis du cycle de l’eau potable