Les stations WIM actuelles : des outils polyvalents pour les autorités

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Les stations WIM actuelles : des outils polyvalents pour les autorités
Les stations WIM actuelles :
des outils polyvalents pour les autorités
Introduction
Les infrastructures routières jouent un rôle structurant sur les aspects sociaux
(désenclavement) et économiques (85% du transport de marchandises se fait par
la route en France). Or, les 2 principales causes du vieillissement des
infrastructures sont l’eau sous toutes ses formes et la charge supportée
(essentiellement le transport de marchandises) [1]. Il est donc clair qu’une
observation plus fine du trafic de poids lourds permettra de mieux connaître les
poids transportés, les niveaux de surcharges et les axes routiers en danger.
C’est à cette fin d’observation que sont apparus en Europe les premières stations
de pesage en marche des véhicules à la fin des années 60. Les évolutions
successives, au niveau des capteurs, de l’électronique et des algorithmes de
traitement, permettent aujourd’hui de mesurer les poids avec précision [2].
Les stations WIM actuelles sont les descendantes directes de ces matériels. Mais
elles se sont enrichies d’une multitude de capteurs, pour fournir des données bien
plus complètes à des utilisateurs bien plus diversifiés. Regroupées en réseau, elles
donnent aujourd’hui les moyens aux autorités d’agir efficacement dans des
domaines aussi variés que le respect du code de la route et de la réglementation
sociale, la lutte contre la fraude, le trafic illicite et certaines formes de délinquance
organisée, la préservation des infrastructures et la sécurité routière.
Les stations WIM
Une station WIM est capable d’estimer le poids d’un véhicule sans le ralentir ni le
détourner de sa voie de circulation. Nous décrivons ici le principe de mesure de
ces stations, les classes de précision et les applications possibles.
Principe de mesure
Les stations WIM utilisent principalement des capteurs piézoélectriques pour peser
les essieux des véhicules en marche. Ce sont des capteurs rectilignes, implantés
dans la chaussée perpendiculairement au sens de circulation, juste sous la surface.
Leur partie sensible présente la propriété de se polariser électriquement lorsqu’on
lui applique une contrainte mécanique. Ainsi, une fois le capteur connecté à un
amplificateur de charge, le signal électrique obtenu au passage d’un essieu est
directement proportionnel au poids dynamique de l’essieu.
Il existe 3 technologies de capteurs piézoélectriques avec chacune ses avantages
et ses inconvénients :

Les piézo-polymères. Ces capteurs sont d’un faible coût, d’une grande
sensibilité et d’une mise en œuvre aisée. Cependant, le signal fourni varie
selon la position latérale des roues et dépend très fortement de la
température [3].
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

Les piézo-céramiques. Ces capteurs présentent une grande longueur et sont
difficilement transportable. Cependant, le signal fourni est de qualité
satisfaisante pour un prix correct.
Les piézo-quartz. Ces capteurs sont par construction moins sensibles que
les précédents à la déformation de la chaussée, à la position latérale et à la
température, mais d’une mise en œuvre plus compliquée et d’un prix élevé.
a
c
b
Figure 1 : (a) Piézo-polymère; (b) Piézo-céramique; (c) Piézo-quartz
Précision sur le poids
La norme américaine ASTM 1318 [4] et la prénorme européenne COST 323 [5]
définissent différentes classes de précision pour les stations WIM. Ces classes sont
toutes définies de manière statistique pour un niveau de confiance donné sur les
erreurs relatives des mesures. La norme ASTM 1318 fixe ce niveau à 95%, tandis
que la prénorme COST 323 le fait varier de 90% à 98% environ selon les conditions
d’essais. Cependant, pour des usages courant et des plans d’expérience standards
et prédéfinis, le niveau de confiance de 95% est généralement retenu. Cela signifie
qu’au minimum 95% des mesures produites par le système doivent atteindre la
précision attendue, et que jusqu’à 5% des mesures produites peuvent dépasser la
précision attendue.
Tableau 1 : Tolérances par rapport au poids statique de référence
(au niveau de confiance requis par les spécifications)
Norme
COST 323
ASTM 1318
Classe de précision A(5) B+(7) B(10) C(15) D+(20) Type III Type I Type II
Poids total
Groupe d’essieu
Essieu simple
Essieu de groupe
Roue
5%
7%
8%
10%
-
7%
10%
11%
14%
-
10%
13%
15%
20%
-
15%
18%
20%
25%
-
20%
23%
25%
30%
-
6%
10%
15%
20%
10%
15%
20%
25%
15%
20%
30%
-
Il est important de noter que les caractéristiques d’un site influent sur la précision
de la mesure du poids. C’est pour cette raison que la prénorme COST 323 précise
que le système de pesage en marche doit être installé dans une ligne droite (rayon
de courbure > 1000m) et en dehors des zones d’accélération, de freinage ou de
changement de voie de circulation. Elle précise également que la structure de
chaussée doit être homogène sous les capteurs, avec une bonne liaison mécanique
entre les couches. Enfin elle définit 3 classes de sites, avec des tolérances à
respecter sur la géométrie de la route et les caractéristiques de surface de la
chaussée, et elle exige que le site soit de classe « I Excellent » pour les stations
WIM qui visent une classe de précision A(5) et B+(7).
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Tableau 2 : Critères pour le choix d’un site selon COST 323
Classe du site
I Excellent
II Bon
III Acceptable
Pente longitudinale
Orniérage
Déflexion (dynamique)
< 1%
≤ 4mm
< 2%
≤ 7mm
< 2%
≤ 10mm
≤ 0.15mm
≤ 0.25mm
≤ 0.35mm
(charge 5t, chaussée bitumineuse)
Uni (index IRI)
< 1.3m/km < 2.6m/km
< 4m/km
Applications
Grâce aux capteurs piézoélectriques implantés dans la chaussée, les stations WIM
disposent d’informations précises sur les véhicules tels que le nombre d’essieux,
les distances entre essieux et les poids des essieux. Il est alors possible de classer
précisément les véhicules par catégorie : véhicule léger avec ou sans remorque,
camion avec ou sans remorque, bus, semi-remorques… Ainsi, les statistiques de
trafic élaborées par les stations WIM offrent aux gestionnaires d’infrastructure une
meilleure connaissance des flux de circulation [6].
Les données de poids collectées par les stations WIM permettent de calculer
l’agressivité réelle du trafic sur la chaussée. La prise en compte de l’impact des
poids lourds sur l’orniérage ou la fatigue des infrastructures permet de mieux
dimensionner les chaussées neuves ou les ouvrages d’art [7]. L’exploitation
périodique de ces données permet également au gestionnaire d’optimiser la
maintenance des infrastructures, du point de vue aussi bien de la planification des
travaux que de l’allocation des budgets. Enfin, la surveillance constante des
charges transportées est un élément de sécurité supplémentaire pour les ponts.
Les stations WIM actuelles
Les stations WIM ont profondément évolué avec le temps et répondent aujourd’hui
à des problématiques bien plus larges que la seule détection des charges. Nous
allons montrer comment elles sont devenues des outils polyvalents qui facilitent
et rendent plus efficace le travail de terrain réalisé par les agents de l’État
(contrôleurs des routes, douaniers, policiers).
Architecture générale
Les stations WIM actuelles sont constituées de capteurs (intrusifs et non-intrusifs)
et d’une armoire électronique de traitement reliée à un système de communication
Ethernet. Pour chaque passage de véhicule, un fichier individuel est constitué. Ce
fichier renferme des informations comme : l’heure et le lieu de passage du
véhicule, sa plaque minéralogique (et le pays d’origine), sa catégorie (véhicule
léger, poids lourds…), son poids détaillé (poids total, poids par essieu et par groupe
d’essieux), sa vitesse, ses dimensions (hauteur, largeur, longueur), sa position sur
la chaussée, le type de transport (si matières dangereuses)…
Ce fichier est généralement mis à disposition en temps réel pour les agents
présents sur le terrain, et parallèlement mis en base de données sur un serveur
central. Pour respecter les règles de vie privée, ce fichier n’est accessible qu’aux
personnels autorisés et pendant une durée limitée. Pour plus de sécurité, il peut
également être crypté et signé.
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Caméras
Gabarit
Station
Grille de capteurs intrusifs
Figure 2 : Exemple d’une station WIM actuelle installée en Belgique
Grille de capteurs intrusifs
Les stations WIM actuelles peuvent gérer plusieurs voies de circulation. Chaque
voie de circulation est équipée d’une grille de capteurs intrusifs dont la composition
varie selon les besoins :



Les boucles électromagnétiques sont sensibles à la masse métallique des
véhicules. Elles servent à détecter l’enveloppe des véhicules et sont utilisées
pour calculer leur longueur et pour déclencher la prise de vue des caméras.
Les capteurs piézoélectriques sont sensibles au passage des roues. Les
capteurs perpendiculaires à l’axe de circulation servent à calculer la vitesse
du véhicule et à peser les essieux. Les grilles sont équipées de capteurs
piézo-polymères, piézo-céramiques ou piézo-quartz selon le niveau de
précision souhaité sur le poids. Les capteurs installés en biais sont utilisés
pour discriminer les roues jumelées et déterminer la position latérale du
véhicule sur la chaussée. Ce sont souvent des capteurs piézo-polymères.
Le capteur de température sert à mesurer la température de chaussée et à
valider la gamme de fonctionnement des capteurs piézoélectriques.
Boucle de sortie
Capteurs
piézoélectriques
°C
Boucle d’attaque
Figure 3 : Exemple d’une grille de capteurs intrusifs
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Caméras
Les stations WIM actuelles peuvent être équipées de différentes caméras :


Les caméras contextuelles fournissent des images de ¾ face des véhicules,
en couleur le jour et en noir et blanc la nuit. Installées en bord de chaussée,
elles couvrent généralement 1 ou 2 voies de circulation. Elles permettent la
reconnaissance du véhicule aussi bien de jour que de nuit.
Les caméras ANPR (Automatic Number Plate Recognition) et DGR
(Dangerous Goods Recognition) sont utilisées pour identifier les véhicules
et les matières transportées. Elles sont généralement installées au-dessus
de chaque voie de circulation. En cas d’infraction, elles servent de preuve
pour interpeller ou verbaliser les contrevenants.
Gabarit
Les stations WIM actuelles peuvent être équipées de différents capteurs de gabarit:


Le télémètre laser à balayage permet de mesurer la hauteur et la largeur
des véhicules. Installé au-dessus de chaque voie de circulation, il est
également capable de reconstituer le profil des véhicules en 3D, afin
d’améliorer la détermination de leur catégorie.
La double barrière optique infrarouge est utilisée pour détecter les véhicules
qui dépassent la hauteur limite autorisée. Elle couvre toutes les voies de
circulation adjacentes d’un même sens de circulation.
Armoire électronique de traitement
L’armoire renferme toute l’intelligence des stations WIM. Elle intègre l’électronique
d’acquisition et l’unité centrale de traitement, ainsi que le moyen de
communication et les systèmes d’alimentation et de régulation thermique.
Performances attendues
L’estimation de la précision d’une station WIM nécessite un essai mené à partir de
véhicules de référence dont le poids statique est connu. Il parait évident qu’il est
plus facile d’obtenir une bonne performance après une calibration sur une journée
d’essai avec un nombre limité et prédéfini de véhicules, que sur une période de
plusieurs mois avec des véhicules issus du trafic. Pour tenir compte de ce
phénomène, la prénorme COST 323 définit des critères de reproductibilité sur les
véhicules pesés (r1 à R2) et de reproductibilité environnementale (I à III) et elle
impose un niveau de confiance minimum requis en fonction de ces critères. Ainsi,
plus les conditions de l’essai s’éloignent de celle du trafic réel, plus le niveau de
confiance minimum requis augmente.
Pour donner au lecteur une idée sur la précision des stations WIM actuelles, nous
allons nous focaliser ici sur les matériels proposés par la société STERELA reconnue
comme performante dans le domaine.
La société STERELA a installé et mis en service 29 stations WIM en France de 2007
à 2011, majoritairement sur le réseau autoroutier [8]. Toutes les stations équipées
d’une grille de capteurs intrusifs comprenant une ligne de capteurs piézo-quartz
respectent la classe de précision B(10) selon le COST 323 [9]. Cette précision est
stable dans le temps et valable pour l’ensemble du trafic, ce qui correspond aux
conditions de reproductibilité R2 (III) selon le COST 323.
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La société STERELA a également fait évaluer sa station GLOBAL-WIM avec une
grille de capteurs intrusifs comprenant deux lignes de capteurs piézo-quartz. En
France, les essais ont été réalisés sous le contrôle de la métrologie légale russe,
avec 33 véhicules issus du trafic et 2 véhicules loués de type C2 et T2S3. Ils se
sont étalés sur 7 jours répartis sur 3 mois, avec des poids totaux allant de 7.5t à
46t et des vitesses allant de 48 à 102 km/h. Les poids de référence ont été fournis
par un pèse-essieu statique homologué situé quelques km en aval du site et de
classe de précision IIII selon OIML R76 [10]. Au Brésil, les essais ont été réalisés
par le Lab Trans (Transportation and Logistics Laboratory) avec plus de 14 000
véhicules issus du trafic. Ils se sont étalés sur 7 mois, avec des poids totaux allant
de 7t à 81t et des vitesses allant de 14 à 99 km/h. Les poids de référence ont été
fournis par une bascule de pesage à basse vitesse située quelques km en aval du
site et testée selon les spécifications d’INMETRO (institut national de métrologie)
le 16 janvier 2015. La bascule présentait alors sur les mesures de poids total une
performance équivalente à la classe de précision 2 selon OIML R134 [11]. Le
tableau ci-dessous présente les précisions obtenues sur les 2 sites classés « I
Excellent » selon le COST323 :
Tableau 3 : Performance de la station GLOBAL-WIM avec 2 lignes piézo-quartz
Évaluation selon COST323
Nombre de véhicules pesés
Conditions de reproductibilité
Erreur moyenne sur le poids total
Écart type sur le poids total
Classe de précision sur le poids total
Niveau de confiance pour cette classe
France
33
R2 (II)
0.17%
2.47%
A(5)
89.4%
78
R1 (II)
-0.76%
2.45%
B+(7)
98.6%
Brésil
14 421
R2 (II)
3.99%
2.82%
B(10)
98.3%
Les applications terrain
Présélection des véhicules
La toute première application des stations WIM actuelles est la présélection des
véhicules en infraction. Les infractions qu’elles peuvent détecter sont nombreuses :
vitesse et surcharge au poids total selon la catégorie du véhicule (y compris
transport de matières dangereuses), surcharge à l’essieu selon le type d’essieu
(simple, tandem, tridem) et le type de roues (simples ou jumelées), dépassement
de hauteur, largeur ou longueur, circulation sur une voie ou plage horaire interdite.
Lorsqu’un véhicule est détecté en infraction, les stations WIM actuelles génèrent
automatiquement une alerte à destination des agents sur le terrain qui vont
intercepter le véhicule pour le contrôler. Cette interception est facilitée par
l’affichage de la plaque d’immatriculation et de la photo de ¾ face du véhicule.
Optimisation des contrôles manuels
Les statistiques élaborées par les stations WIM permettent d’identifier les plages
horaires où les infractions constatées sont les plus importantes. En optimisant ainsi
le planning des contrôles, et grâce à la présélection des véhicules en surcharge,
l’efficacité des contrôles manuels est passée en France de 25% à 96% [8].
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Les stations WIM actuelles peuvent également sécuriser les interceptions en pleine
voie en commandant des panneaux d’affichage dynamiques qui obligent les
véhicules à quitter la route pour rejoindre l’aire de contrôle. Cette commande
s’effectue soit en local, lorsque les stations sont proches de l’aire de contrôle, soit
à distance, après ré-identification dans le trafic grâce à une caméra ANPR des
véhicules en infraction sélectionnés par les contrôleurs [8].
Cette automatisation des interceptions libère des ressources humaines qui peuvent
être réaffectées aux tâches plus valorisantes de contrôle, aussi bien du code de la
route que de la réglementation sociale et de celle des transports (vérification du
temps de conduite et de repos, du travail dissimulé, des bons de transport…). Les
données fournies par les stations WIM actuelles, tant au niveau local qu’au niveau
national, sont alors autant d’informations précieuses qui aident les contrôleurs à
détecter les fraudes au limiteur de vitesse, au chronotachygraphe ou au cabotage.
Contrôle sanction automatisé
L’objectif ultime est de réaliser le Contrôle Sanction Automatisé (CSA) sur le poids.
C’est l’objet du projet « CSA surcharges » et de son expérimentation, lancé en
France par la Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer
(DGITM), piloté par l’IFSTTAR et réalisé avec le concours du CEREMA [3]. C’est
également l’objectif final du Service Public de la Wallonie (SPW) en Belgique, qui
souhaite faire homologuer les 5 stations WIM installées en 2015 sur son territoire.
L’enjeu majeur est de rendre les stations WIM conformes aux exigences de la
métrologie légale, qui impose que 100% des mesures produites soient inférieures
à l’erreur maximale tolérée. Pour ce faire, les stations WIM doivent éliminer de
leurs mesures produites toutes les valeurs jugées incertaines à partir de critères
de validation basés sur l’analyse du comportement dynamique des véhicules.
Les stations GLOBAL-WIM de STERELA intègrent déjà depuis plus de 2 ans ce type
de critères. Le tableau ci-dessous présente les résultats obtenus lors des 2
campagnes d’essais précédemment citées :
Tableau 4 : Évaluation des critères de validation de la station GLOBAL-WIM
Évaluation selon CSA
France
Véhicules
Nombre de véhicules
Erreur maximale tolérée
Erreur maximale
Nombre de faux positif
Tous
111
5%
6.01%
6
Brésil
Validés
61 (55%)
5%
3.88%
0
Tous
14 421
10%
107%
192
Validés
2 159 (15%)
10%
17.74%
35
À critères identiques, le pourcentage plus faible de véhicules validés au Brésil
s’explique par des oscillations importantes des véhicules liées à une « bosse » en
amont du site. Ces résultats sont plutôt encourageants, car ils montrent que les
critères de validation sont efficaces pour limiter l’erreur maximale sur les mesures
produites. Certes, ils doivent encore être améliorés pour éliminer tous les faux
positifs, mais ils laissent espérer qu’une homologation est possible.
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Les applications réseau
Si les applications de terrain sont déjà nombreuses, variées et prometteuses, les
applications réseaux le sont encore plus. Le maillage de tout un territoire avec des
stations WIM actuelles, et la centralisation des données sur un serveur, offre des
possibilités de « data mining » qui intéressent beaucoup les autorités.
Contrôle des transports terrestres
Les contrôleurs peuvent rechercher sur tout le territoire les véhicules qui
présentent des infractions récurrentes. Si le serveur central des stations WIM est
connecté à un Système d’Immatriculation des Véhicules (SIV), cela permet
d’identifier facilement les entreprises qui commettent le plus d’infraction et de
mieux cibler les plans de contrôle en entreprise. Il est également possible de
marquer ces véhicules dans une « black list », afin que dès qu’ils passent sur une
station WIM, ils soient automatiquement présélectionnés et contrôlés.
Les contrôleurs peuvent également rechercher des présomptions d’infraction aux
règles de cabotage, en comparant les données de poids horodatées d’un même
véhicule étranger de transport de marchandises à différents endroits du territoire.
Brigade judiciaire ou financière
La connexion du serveur central des stations WIM à un Système d’Immatriculation
des Véhicules (SIV) peut également intéresser d’autres autorités. Ainsi en Suisse,
la Police judiciaire se connecte à la base de données fédérale RIPOL pour identifier
les véhicules non assurés, les conducteurs titulaires d’un permis de conduire non
autorisé en Suisse ou encore les fausses déclarations de résidence.
Sécurité intérieure
La police, la gendarmerie et les douanes sont bien entendu intéressées par la
surveillance du trafic sur l’ensemble d’un territoire. Les informations recueillies par
les stations WIM actuelles peuvent les aider dans leur lutte contre le trafic illicite
(recherche de « Go Fast ») et certaines formes de délinquance organisée. La
connexion du serveur central des stations WIM au fichier des véhicules recherchés
par la Police serait encore un plus.
Les bénéfices sociétaux escomptés
Sécurité routière
En France, les poids lourds représentent seulement 1.8% du trafic, mais ils sont
responsables de 14% des personnes tuées sur la route [12]. Faire respecter les
limites maximales de charge, pouvoir contrôler la répartition gauche-droite des
charges pour éviter le renversement des véhicules articulés, contrôler les excès de
vitesse sont autant de possibilités offertes par les stations WIM actuelles pour
améliorer encore la sécurité des poids lourds sur nos routes.
Lutte contre la concurrence déloyale
Si une entreprise de transport de marchandises surcharge de 10% tous ses
camions de 40t, elle augmente de façon illicite sa capacité de chargement de près
de 16%. Elle réalise ainsi l’économie complète d’un camion tous les 6 camions en
circulation, soit une économie annuelle de près de 140 000 € pour un transport
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longue distance [13]. En collectant 24h/24 les plaques d’immatriculation des
véhicules en surcharge, les stations WIM actuelles donnent aux autorités les
moyens de cibler les entreprises incriminées et de lutter efficacement contre la
concurrence déloyale.
Préservation des infrastructures routières
La durée de vie théorique des chaussées est comprise entre 20 et 30 ans, selon la
classe de trafic cumulé de poids lourds. Quand on sait que sur une chaussée semirigide, le passage d’un essieu surchargé de 10% équivaut aux passages de 3
essieux normalement chargés [14], on comprend l’importance de réduire les
surcharges à l’essieu pour préserver la durée de vie des chaussées. En France,
l’exploitation régulière d’un réseau de 29 stations WIM de présélection des
véhicules a permis de diviser par 2 les surcharges constatées en moins de 5 ans.
Les freins à lever
Le maillage de tout un territoire avec un réseau de stations WIM actuelles peut
donc être extrêmement bénéfique pour les autorités. Néanmoins, certains freins à
sa réalisation existent encore, comme par exemple les enjeux financiers (comment
le financer ?) ou règlementaires (comment mettre en place la verbalisation
automatisée sur les surcharges ?). Nous expliquons ici en partie, comment lever
ces freins.
Quel mode de financement ?
Grâce à la présélection des véhicules et à l’optimisation des contrôles manuels, les
stations WIM actuelles contribuent à rendre les personnels en charge des contrôles
plus efficaces, donc plus rentables.
Comme les stations WIM actuelles intéressent différentes autorités, il est possible
d’envisager une action interministérielle visant à mutualiser les investissements
dans une solution globale unique qui rende service à tous.
À l’instar des concessions autoroutières, il est possible d’imaginer un modèle
d’exploitation B.O.T (Build Operate Transfer). Ce modèle est d’ailleurs déjà utilisé
dans certains pays comme le Brésil pour l’exploitation des aires de contrôle de
pesée. Son principal avantage est de limiter l’investissement pour les autorités
publiques.
À l’image de ce qui est en train de se mettre en place en Chine, au Kazakhstan ou
aux États-Unis, il est aussi possible d’introduire de manière systématique des
péages au poids réellement transporté. Ce péage est d’ailleurs plus juste que le
péage basé sur la classification des véhicules, puisqu’il fait payer l’usager en
proportion des dégradations qu’il génère.
Quelle procédure d’homologation ?
Le Contrôle Sanction Automatisé (CSA) des véhicules en surcharge doit certes
impliquer les organismes métrologiques, mais aussi et surtout les instances
législatives et judiciaires. C’est d’ailleurs ce que précise l’OIML dans ses
recommandations métrologiques internationales : « Les interprétations juridiques
des résultats de mesure, le choix des types de cinémomètres et les conditions dans
lesquelles ils sont utilisables sont laissés aux réglementations nationales. » [15].
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La certification OIML R134 [11] d’un matériel peut donc constituer une condition
nécessaire à la mise en place du CSA des véhicules en surcharge, mais elle n’est
pas une condition suffisante. Il est du ressort de chaque État de définir le cadre
légal à mettre en œuvre pour l’application du CSA. C’est d’ailleurs tout l’objet du
projet « CSA surcharges » lancé en France : s’assurer que le matériel est fiable du
point de vue métrologique, mais aussi et surtout définir la réglementation à mettre
en place et garantir que le matériel sera exploitable juridiquement.
Quelle gestion de la verbalisation ?
Contrairement aux systèmes de taxation des poids lourds (en France : taxe
environnementale dite « Écotaxe » ou taxe à l’essieu imposée par le Code des
Douanes), un système de verbalisation basé sur des stations WIM actuelles sera
mieux accepté par les professionnels du transport. En effet, verbaliser les
surcharges ne pénalise que les contrevenants, contrairement aux taxes qui
augmentent le coût du transport pour tous. Le risque de levée de bouclier contre
un tel projet est donc quasiment nul.
En revanche, la verbalisation devra s’appliquer à tous les véhicules, même ceux
en provenance de l’étranger. Pour s’assurer que le recouvrement des amendes est
effectif, il faudra signer des accords de poursuite transfrontalière avec les pays
concernés. Une autre solution pourra consister à identifier par leur plaque
minéralogique les poids lourds entrant sur le territoire national, et émettre des
alertes lorsque ces poids lourds ont des amendes à régulariser. Ainsi ils pourront
être interceptés par des forces de l’ordre en patrouille.
Conclusion
Les stations WIM actuelles sont bien des outils polyvalents pour les autorités. Les
freins à leur déploiement massif sont plus de nature règlementaire que technique
ou financière. Néanmoins, des expérimentations sont en cours pour démontrer que
les stations WIM actuelles peuvent être au contrôle du poids, ce que les radars
automatiques sont au contrôle des vitesses.
Références
[1] Livre blanc. (2014) Entretenir et préserver le patrimoine d’infrastructures de transport
: une exigence pour la France. IDDRIM, octobre, 28p.
[2] Leal, J. (2012) Evaluation of several piezoelectric WIM systems. ICWIM 6, Dallas, 4-7
juin.
[3] Cottineau, L-M., Hornych, P., Jacob, B., Schmidt, F., Dronneau, R., Klein, E. (2015)
Contrôle-sanction automatisé des surcharges par pesage en marche. AIPCR, Seoul, 2-6
novembre.
[4] ASTM E1318. (2009) Standard Specification for Highway Weigh-in-Motion (WIM)
Systems with User Requirements and Test Methods.
[5] Jacob, B., O’Brien, E., Jehaes, S. (2002) Weigh In Motion of road vehicles, final report
of COST 323. LCPC, Paris, 84p.
[6] Burnos, P. (2012) Automatic vehicle classification for WIM systems. ICWIM 6, Dallas,
4-7 juin.
[7] Schmidt, F., Glaeser, K-P., Hornych, P., Piau, J-M., Jacob, B. (2013) Impact des poids
lourds sur les infrastructures. Routes/Roads n°358, AIPCR, avril, 74-83.
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[8] Dolcemascolo, V., Hornych, P., Jacob, B., Schmidt, F., Klein, E. (2015) Surveillance du
trafic routier de poids lourds et des surcharges en France et applications. AIPCR, Seoul, 26 novembre.
[9] Debar, A. (2014) Recommandation de la société STERELA. DGITM, MEDDE, Paris, mars.
[10] OIML R76. (2006-F) Instrument de pesage à fonctionnement non automatique.
[11] OIML R134. (2006-F) Instruments à fonctionnement automatique pour le pesage des
véhicules routiers en mouvement et le mesurage des charges à l'essieu.
[12] ONISR. (2015) La sécurité routière en France, Bilan de l’accidentalité de l’année 2014.
Paris, 117p.
[13] Comité National Routier (2015). Indices & Statistiques, Longue distance 40t,
Référentiel prix de revient, Synthèse des coûts d’un véhicule. www.cnr.fr, août.
[14] NF-P 99-082. (1994) Dimensionnement des chaussées routières, Détermination des
trafics routiers pour le dimensionnement des structures de chaussées. www.afnor.org.
[15] OIML R91. (1990-F) Cinémomètres radar pour la mesure de la vitesse des véhicules.
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Brève biographie
Nom : GEROUDET
Prénom : Benoît
Fonction : Chef de produit ITS
Société : STERELA
Descriptif succinct du poste actuel :
Je travaille aujourd’hui au sein du département ITS de STERELA à la définition de
la gamme des produits, afin de répondre le mieux possible aux attentes du marché.
Les 2 principaux thèmes visés sont la « Route intelligente » et la « Smart City ».
Bref parcours professionnel :
Diplômé Ingénieur INSA LYON en 1991, je travaille dans le domaine de la route
depuis plus de 20 ans au sein de STERELA. D’abord ingénieur d’études, puis chef
de projet, j’ai participé au développement de nombreux produits de comptage
routier fixes et mobiles utilisant tous types de capteurs : tubes pneumatiques,
boucles électromagnétiques, magnétomètres, capteurs piézoélectriques… Membre
de l’International Society for Weigh-In-Motion (ISWIM) depuis 2007, je suis
également un expert du pesage dynamique en marche. Enfin, je suis membre de
la commission de normalisation BNTRA/CN08 travaillant sur les données routières,
leur élaboration et de leur stockage.
« Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 »
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