Mireille Miailhe - Info juive

Transcription

Mireille Miailhe - Info juive
ARTS
Mireille Glodek-Miailhe
Une flamme artistique toujours vaillante
M
ané-Katz lui a offert
son premier chevalet. Des personnalités éminentes
ont favorisé la
passion pour la
peinture de la petite juive née à Paris de
parents venus de l’Est, entre Pologne et
Russie. Des mentors célèbres ont encadré
une flamme artistique toujours debout. Il
faut si peu de choses pour dire le monde
militant qui gravite autour du cercle
familial. L’euphorie des belles journées
de 1936 se chante encore en yiddish. La
victoire du Front populaire est celle de
ces travailleurs qui, autour de la
République, se bâtissent “leur » paradis.
La laïcité se vit en chanson dans les
Auberges de jeunesse. Avec cette jeunesse
rieuse, Mireille va à la découverte des
cultures et des peuples. Paris nargue alors
les bras qui saluent le sombre qui défile
aux Jeux olympiques de Berlin.
Quand il déjeune à la maison, ManéKatz répète les bons mots de Chagall et
corrige ses premières toiles. L’orage qui
éclate éparpille la famille aux quatre coins
du pays. Mireille trouve un refuge à
Banyuls. Le grand Maillol lui accorde
l’hospitalité grâce à la complicité de
Diana Verny, une amie des Auberges,
devenue la muse et le modèle du
sculpteur. La biographie de Mireille
retient le récit de la rencontre et les
cartons, les traits de l’artiste. Après
Maillol, Aragon prend la pose devant elle.
Le pape des Lettr es françaises évoque
dans son roman, Blanche ou l’oubli
(Gallimard, 1967) : “une belle femmepeintre, d’un très grand talent, dont la
peinture me plait au-delà de ce qu’on en
exprime”.
Il salue la belle vigueur qui entraîne le
fusain ou la brosse et qui, avec naturel,
exalte l’engagement tonifié pendant la
Résistance. Mireille dessine pour les
Lettr es françaises, l’Action et Notr e
combat. Son visage éclaire les affiches
de propagande du Parti. Avec Irène JoliotCurie, Lucie Aubrac, Paule Langevin,
Lucie Bellon… elle est de l’avant-garde
des “Femmes savantes, artistes et
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PAR MAURICE ARAMA
intellectuelles” qui combattent pour la
Paix et saluent les avancées de la RDA…
On n’abandonne pas en cours de route
un engagement noué dans le maquis.
Remontent toujours à la surface, les
opérations avec les FFI, les figures
emblématiques de la Résistance : Ravanel
(Serge Asher), Jean Pierre Vernant,
Jeanne Modigliani, la fille d’Amedeo,
Jean Cassou, le futur patron du musée
national d’Art moderne, les Picard et tous
Mireille Glodek-Miailhe
ceux qui à Toulouse, Saint-Gaudens,
Cumminges ou l’Isle-en-Didon, étaient
l’armée des Ombres. La ville de La
Courneuve conserve plusieurs oeuvres
de “l’agent de liaison” recherché par la
Gestapo.
Des secrets percent
L’atelier parisien et celui de Cabrespine
abritent la peinture exubérante et
volontaire de Mireille Glodek-Miailhe.
Des couleurs chatoyantes habillent des
formes rugueuses. Des secrets percent.
Ils soulèvent le couvercle de la militante
engagée que Maurice Thorez félicite pour
“sa magnifique contribution à notre lutte
contre le colonialisme et pour
l’indépendance des peuples”. C’est que
Mireille revient d’une mission en Algérie
(avec Boris Taslitzky). Le Parti organise «
un grand événement culturel » et loue
pour la circonstance, la galerie André
Weil, avenue Matignon. Le Paris
“engagé” fait bon accueil au regard qui
a vrillé la réalité algérienne. L’exposition
fait scandale. Mireille se contente de
répondre : “J’ai tenté de transcrire ce que
j’avais vu”.
Mireille Glodek-Miailhe a trouvé sa
place sur les cimaises des principales
expositions. Des galeries lui ouvrent les
portes. Elle enseigne à l’Ecole Nationale
Supérieure des Arts Décoratifs de la rue
d’Ulm. Elle exécute des lithographies et
des illustrations pour Francis Jourdain
(Amour de Paris) ou Pierre Gamarra (La
Rose des Karpathes). Quand George
Besson lui remet le célèbre prix Fénéon
en 1950, il accompagne la remise d’un
jugement dont les mots résonnent par leur
justesse : “Elle est elle-même et si
extraordinaire que cela puisse paraître,
ses hésitations, mieux qu’une virtuosité
prématurée, laissent entrevoir des
développements picturaux et formels
possibles… Elle n’a fait les poches ni à
Bonnard, ni à Matisse, ni à Picasso…”
Une édition intelligente invite à entrer
dans l’univers de Mireille GlodekMiailhe. Des cahiers thématiques
parcourent une œuvre prolixe. Les
principaux thèmes retenus : les veuves,
les maternités, l’Algérie, les portraits…
sont rendus par la lithographie, le dessin,
la peinture. Des œuvres monumentales
sont à voir dans la cité. La peinture qui
depuis 1962 orne le groupe scolaire Paul
Eluard à Blanc Mesnil, a été exécutée en
émaux de lave de Volvic.
M.A
—
M i reille Glodek Miailhe. Œuvres. Un
ouvrage sur la vie, l’oeuvre et l’engagement
d’une artiste témoin de son temps. Edition
établie par Florence et Manuelle Miailhe.
Textes de Pascale Froment et Isabelle RollinRoyer. 280 pages, 600 œuvres reproduites
B i ro éditeur, 11 rue des Arquebusiers,
F 75003 Paris. 45 €
Un site sur la toile rend hommage au
travail de cette artiste hors normes.
www.mireilleglodekmiailhe.com