LIVRE BLANC SUR LE PRESENT ET L`AVENIR DE LA TUNISIE

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LIVRE BLANC SUR LE PRESENT ET L`AVENIR DE LA TUNISIE
LIVRE BLANC
SUR LE PRESENT ET L’AVENIR DE LA TUNISIE
21 Juin 2014
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Ce livre blanc a été rédigé par un groupe d’intellectuels et de penseurs tunisiens
indépendants lors d’une série de réunions qui ont eu lieu pendant la période allant d’Avril à
Juin 2014 à La Fondation Temimi pour la Recherche Scientifique et l’Information , et animées
par Mustapha Kamel Nabli.
Ce document traduit les résultats de débats et discussions riches ayant eu lieu entre des
penseurs de spécialités et orientations diverses. Le livre blanc a pour objectif de présenter
un diagnostic de la situation actuelle avec ses dimensions multiples et présenter des
orientations prospectives et des idées de solutions visant à la construction de l’Etat
démocratique, civique et moderne auquel aspire la Tunisie, et le dépassement des difficultés
de la transition démocratique. Ce document a une spécificité qui est d’aborder dans leur
interaction l’ensemble des aspects pertinents à la situation à savoir : historique,
civilisationnel, politique, sécuritaire, psychologique, social et économique.
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LE CITOYEN : ENTRE LA LASSITUDE ACTUELLE, LA PEUR DE L’AVENIR ET LA
DEGRADATION DE L’AUTORITÉ DE L’ETAT.
La Tunisie traverse actuellement une étape cruciale de son histoire, marquée par les graves
menaces multiformes qui visent l’Etat, son statut, ses fonctions et ses institutions. Ces
menaces sont d’une gravité telle qu’elles sont annonciatrices de l’affaiblissement de l’Etat et
de la disparition de la patrie elle-même.
La mise à mal de l’Etat en principe et en pratique se manifeste par l’état de démoralisation
dans lequel se trouve le citoyen tunisien, trois ans après la Révolution : la lassitude y dispute
la peur de l’avenir. Cette tension psychologique est devenue d’autant plus aiguë qu’elle a été
accompagnée d’une crise matérielle due à la faiblesse de l’économie, à l’inflation, au
tarissement de l’investissement, à l’accroissement du chômage, à la contraction de la classe
moyenne et à l’augmentation de la pauvreté.
Le Tunisien éprouve aujourd’hui une crainte réelle de voir son pays perdre les spécificités de
son identité politique, culturelle et civilisationnelle du fait de la multiplication des forces
œuvrant dans un silence perfide ou dans un vacarme hostile à dévaloriser l’identité
nationale en la fondant dans des entités dont le vernis idéologique illusoire est à la mesure
du sort désastreux qui est assurément le leur.
Ces tentatives s’inscrivent dans le cadre d’une récupération de la révolution accomplie par
les jeunes de l’école républicaine qui demandait le travail, la dignité et la liberté, et ce en
lui affectant deux nouveaux objectifs exclusifs: l’identité et l’islamisation. Comme si la
Tunisie n’était pas un pays dont l’enracinement anthropologique remonte à plus de 100 000
ans et dont l’existence en tant qu’entité politique remonte à plus de 3000 ans ; comme si la
Tunisie ne s’était pas enrichie de l’apport de tous ceux qui sont venus d’ailleurs, leur
empruntant ce qu’ils avaient de meilleur, mais restant fidèle à elle-même. La Tunisie a ainsi
pris le meilleur des arabes : la religion musulmane et leur langue. De ses contacts avec
l’Europe elle a retenu l’esprit des lumières et les droits de l’homme et du citoyen. C’est ainsi
que l’authenticité de la Tunisie s’est forgée, à travers l’histoire, naturellement fidèle aux
valeurs acquises, ouverte sur l’Autre lui empruntant sans peur aucune et sans en faire son
obligé, lui offrant généreusement de son Etre. C’est ainsi qu’elle est multidimensionnelle,
maghrébine, arabe, musulmane, méditerranéenne et africaine. C’est ainsi qu’elle justifie
d’une identité forte produit d’une expérience historique effective qui se déploie, depuis les
temps les plus reculés jusqu’à ce jour, dans un espace géographique principal allant des
palmiers du sud aux rivages du Cap Bon au nord-est.
Si par devoir, il est nécessaire de rendre hommage aux martyrs qui se sont sacrifiés pour les
nobles valeurs de la révolution, de soutenir leurs familles et de rappeler l’obligation de
prendre en charge ses blessés ; il est aussi indispensable de mettre en relief les dimensions
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historique, géographique, culturelle et psychologique de la révolution. Ces dimensions sont
au fondement de l’identité nationale et de l’Etat tunisien, idée présente dans les esprits et
institutions réelles et concrètes. C’est en s’attaquant à ses fondements que l’on prépare
l’effondrement de l’Etat. Le premier signe en a été donné par la profanation dont a été
l’objet le drapeau national au vu de tous. De manière moins visible, participent à la
destruction de l’Etat les tentatives visant à remettre en cause la double unification de la
Justice et de la législation qui est pourtant l’une des spécificités de la Tunisie depuis le début
du XXème siècle. C’est le seul pays arabe où il y a, à la fois, un seul juge et une seule loi pour
tous les citoyens. Ce que l’on appelle « finance islamique » participe de cette tentative de
déconstruction de l’Etat. En soumettant, dans le cadre d’un plan dont les objectifs sont
clairs et les étapes lentes à dessein, à nouveau le système financier et économique aux
fatwas, la voie s’ouvre au retour à un ordre judiciaire et législatif autre que celui de l’Etat
civil.
Si depuis des années, la corruption a affecté, à des fins politiques la Magistrature il faut
espérer que le juge tunisien saura remplir ses fonctions de sauvegarde des droits et des
libertés et ce, non seulement en recouvrant son entière indépendance mais aussi en veillant
à actualiser ses connaissances et à parfaire ses aptitudes professionnelles, garantes d’une
haute compétence dont nous avons aujourd’hui un besoin des plus pressants. En effet,
quand le système judiciaire sera réformé sur les plans éthique, scientifique et professionnel,
nous pourrons effectivement être rassurés au sujet de l’avenir de la Tunisie en tant que
patrie, Etat et révolution.
Cela signifie qu’il est aujourd’hui nécessaire de remettre à l’ordre du jour le concept d’Etat
de droit et des institutions qui a perdu de sa signification avant la révolution, tant il a été
galvaudé par un usage trompeur et qui, en outre, est tombé dans l’oubli après la révolution,
du fait de la marginalisation de l’Etat lui-même. Tout un chacun doit comprendre clairement
que l’Etat de droit et des institutions n’a de réalité que si, en premier lieu, l’Etat a
l’exclusivité de l’élaboration et de l’application des lois, que si, en second lieu, l’Etat luimême se soumet au Droit et que si, en troisième lieu, l’Etat garantit la protection de la
liberté et l’égalité citoyennes.
DES ACTIONS POLITIQUES ET DES PARTIS EN DIFFICULTÉS, UN LIEN SOCIAL
RELACHÉ ET DES VALEURS MORALES VACILLANTES.
Le Tunisien est pleinement conscient du caractère politique de la chose publique. En effet,
l’affaiblissement de l’Etat est d’une gravité extrême et il met en évidence la dimension
politique de la crise actuelle sur le double plan, pragmatique concret et théorique abstrait.
Pour se rendre compte que l’action politique a touché l’abyme, il suffit de considérer les
manquements dans la gestion des affaires publiques, l’incapacité de régler les conflits
sociaux et ceux qui ont marqué les rapports entre les partis.
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D’autres faits ne sont pas moins graves. Il en est ainsi des tentatives visant à mettre la main
sur l’école de la République et à semer le doute sur la valeur du Code du Statut Personnel et
de la mauvaise volonté mise à admettre le principe d’égalité entre l’homme et la femme. Il
en est également ainsi des tentatives visant à nous soustraire, au nom de spécificités
éphémères, de nos engagements internationaux relatifs aux Droits de l’Homme dans
l’universalité de leur acception et la totalité de leurs domaines d’application, droits qui sont
aujourd’hui constitutifs de la citoyenneté comme valeur civique et politique dont l’égalité
est l’essence et la liberté la condition. Il ne peut y avoir en effet de citoyenneté sans égalité
entre tous en droits et en devoirs et il ne saurait y avoir d’égalité sans liberté individuelle et
collective, à commencer par la liberté de pensée, de conscience et d’expression jusqu’aux
libertés politiques et sociales.
Nul n’est habilité à priver un concitoyen d’un droit, quel qu’il soit, qui lui a été attribué et
qui est garanti par la loi. Aucune légitimité ne saurait être attachée à une loi qui ne serait pas
l’expression de la liberté du citoyen. La liberté peut s’exprimer par des modalités différentes,
selon les régimes politiques, mais toujours dans un même dessein : la liberté elle-même.
Tous ces facteurs ont concouru à la création d’un climat général malsain qui aurait pu
conduire la Tunisie à une situation dommageable, n’était la forte mobilisation du peuple qui
a forcé celui qui fait la sourde oreille à entendre la voix de son attachement à la liberté et à
l’égalité en tant que valeurs constitutives de la citoyenneté et celle de l’affirmation de
fondre sa volonté dans celle de l’humanité tout entière. Il appartient à ce peuple
aujourd’hui d’adopter une attitude plus ferme et de manifester une détermination plus forte
pour défendre son identité civilisationnelle et culturelle, de préserver son droit au progrès
sur la voie de la liberté et de la rationalité et de s’armer des outils permettant de combattre
les trois ennemis de l’humanité que sont la pauvreté, l’ignorance et la maladie. Notre
combat est aujourd’hui un combat global pour la liberté politique, le développement
économique et le progrès civilisationnel. Aucun progrès ne peut se réaliser, en effet, sans la
maîtrise des sciences humaines et des sciences dites « dures » et sans la contribution à la
production du savoir. Il n’est plus question de se contenter d’être le récepteur, ou le
consommateur de ce qui a été légué par les anciens ou de ce que l’Autre produit.
Il était naturel de voir, ces temps derniers, la résurgence des tentatives visant à défaire
l’identité nationale et à dissoudre la substance et les valeurs de citoyenneté, se répercuter
en toute matière sur l’action publique. La chose est d’autant plus grave qu’elle intervient à
un moment historique décisif où nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, conscients
et volontaires à la fois, dans ce que nous entreprenons. Nous avons aussi dans cette
conjoncture un besoin impérieux de nous appuyer sur notre conviction que le travail est un
devoir moral et national et une nécessité économique, et ce afin de sauver le pays de cette
dévitalisation totale qui l’a atteint alors que la révolution avait fait naître l’espoir de
nouveaux rendez-vous avec l’histoire.
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L’altération de l’atmosphère nationale est sans doute devenue plus accusée en raison du
manque d’efficience des partis politiques inefficaces, parce que ne parvenant pas à jouer
leur rôle. Mus en général par des motifs plus subjectifs qu’objectifs, ils ne sont pas au niveau
des impératifs de la situation présente qui requiert, pour les besoins de son intelligence, de
la clarté et de la perspicacité. Elle requiert aussi de la confiance en soi et dans la Nation, elle
exige du labeur et de l’effort permanents pour enfin voir l’économie nationale rétablie et
pour redonner l’espoir de lendemains meilleurs aux jeunes au chômage. C’est là une mission
urgente que les partis existants ne sont pas en mesure de réaliser tant ils sont divisés et
leurs positions discordantes.
Si la Tunisie est en droit de se réjouir d’avoir inauguré une nouvelle ère pour la liberté de
pensée et d’expression, s’il est de son droit de se réjouir de l’affranchissement du
journalisme du joug qui l’a paralysé pendant de nombreuses années, elle est également en
droit d’attendre de la presse un effort plus grand pour susciter chez les citoyens une plus
forte prise de conscience des objectifs de la révolution et pour l’avertir des dangers, souvent
dissimulés derrière le principe de la liberté d’organisation, de pensée et d’expression, qui la
guettent ainsi que la patrie. Si le journaliste a le droit de veiller à défendre la déontologie de
son métier, il a aussi le devoir de veiller à défendre les valeurs de liberté, d’égalité et de
progrès.
Pour cette même raison, les associations de la société civile qui se sont assigné pour tâche la
défense des droits ne doivent pas oublier que les menaces pesant sur ceux-ci n’émanent pas
uniquement de l’Etat mais qu’il y a très souvent au sein de la société elle-même des forces
rétrogrades qu’il faut combattre par tous les moyens légitimes et notamment en suscitant la
prise de conscience et en répandant l’information. Il n’y a pas plus efficace que le Savoir
pour combattre l’ignorance et les Lumières pour annihiler l’obscurantisme.
Il n’échappe à personne que l’éparpillement des partis et la multiplication des
manifestations psychosociologiques négatives, en liaison avec la situation politique dans ses
deux dimensions, pratique et théorique, sont parmi les faits les plus dangereux conduisant –
d’une manière consciente ou pas – à la soumission, à l’acceptation de la dislocation de la
patrie et à la chute des Etats.
L’apparition de phénomènes qui ne font pas partie de l’histoire de notre pays en fournit la
meilleure preuve, comme la recrudescence des suicides et des actes de violence. Il s’agit
également du manque d’estime de soi, du désir d’exil, du reniement de l’identité nationale
tunisienne et de l’appartenance à la civilisation qui est la nôtre. Objectivement cette
évolution que l’Etat et le peuple vivent, en tant que réalités concrètes ou comme valeurs, est
dangereuse. Elle puise ses racines dans la désintégration du lien social, le vacillement des
valeurs morales, et la remise en cause des normes consensuelles et de la tolérance qui
caractérisent notre société, qui ont commencé bien avant la révolution.
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Aucun secteur de la vie nationale n’a été épargné par l’entreprise de corruption, y compris
les secteurs de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la culture. C’est la raison pour
laquelle le nivellement intellectuel, le dogmatisme et la stérilité existentielle et affective se
sont largement répandus. Beaucoup se sont résignés à la tentation du moindre effort, à la
fraude, aux moyens malhonnêtes pour s’élever le plus rapidement possible dans l’échelle
sociale, et au gain facile. D’une manière générale, beaucoup sont devenus plus prompts à
jouir de leurs « droits » qu’à s’acquitter de leurs devoirs alors qu’une conscience éclairée
relie indéfectiblement l’attachement aux valeurs, le souci de la préservation du droit à la
citoyenneté et à l’obligation d’assumer ses devoirs envers la patrie.
Ainsi, le développement de l’esprit d’opportunisme, notamment au lendemain des élections
du 23 octobre 2011, se situe – par ses principales caractéristiques, ses causes les plus
profondes et ses manifestations les plus visibles – dans la continuité de la période qui a
précédé la révolution. Cette continuité effective entre l’avant et l’après-révolution est
porteuse – et ce malgré la prétendue rupture avec ce passé – de lourdes menaces,
notamment dans des circonstances historiques très particulières où le peuple a repris
confiance en lui, se levant avec détermination pour défendre les acquis qui sont les siens,
faisant ainsi preuve, dans ce combat, d’une résistance acharnée qui a obligé certains à revoir
leurs calculs et à commencer à se livrer à une autocritique dont on peut escompter quelque
espoir.
LA CULTURE, LA NEUTRALITÉ POLITIQUE DE L’ECOLE ET LA COHESION
NATIONALE AU FONDEMENT DE LA CONSTRUCTION DE L’ETAT CIVIL ET
DEMOCRATIQUE
Cette révision ne saurait toutefois être véritablement efficace sans une rupture radicale avec
la volonté de porter atteinte à l’Etat de l’indépendance, à ses symboles et à ses réalisations.
Quelque modestes que ces dernières furent, elles permirent la réalisation des conditions
objectives de l’instauration d’une société démocratique et la transformation de l’Etat
national, et cela en dépit de l’autoritarisme qui l’a caractérisé et dont les aspects négatifs ne
peuvent être niés. C’est de l’épanouissement de cet Etat national démocratique que tout le
monde espère beaucoup. Aucun Tunisien n’est en droit de se prétendre plus patriote qu’un
autre Tunisien dès lors que le patriotisme, en tant que vertu morale, nous est commun. A cet
égard aucune surenchère ne saurait être admise.
Parce que le patriotisme est une valeur politique objective, la part qui nous en revient est
proportionnelle, en premier lieu, à notre souci de préserver les acquis accumulés par notre
pays tout au long de son histoire. Il s’agit en particulier de ceux réalisés depuis l’instauration
du régime républicain, en tête desquels l’édification d’un Etat civil moderne dont les bases
nous ont permis de nous inscrire dans notre temps ; de l’institution de l’école de la
République comme vecteur d’acquisition de la connaissance, et la promulgation du Code du
Statut Personnel. Cette part est proportionnelle, en second lieu, aux efforts que nous
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consentons pour réaliser les projets actuels du pays, en tête desquels l’accomplissement du
processus de transition démocratique. Elle est proportionnelle, en troisième lieu, à
l’abnégation dont nous saurons faire preuve en nous consacrant à la réalisation des
ambitions de notre pays pour l’avenir, le développement durable global constituant la plus
importante d’entre elles.
Les principaux facteurs qui obstruent cette voie sont à l’évidence la désintégration de la
cohésion nationale qui a commencé à se manifester il y a plusieurs années et qui s’est
aggravée depuis la révolution. Les raisons en sont, entre autres – en plus de la
marginalisation et de la pauvreté, surtout dans les régions de l’intérieur – l’anarchie qui sévit
dans les secteurs de l’éducation et de la culture, c’est- à -dire dans des secteurs vitaux
déterminant la conscience des peuples de leur existence historique et de leur statut comme
valeur suprême. C’est à ces conditions qu’ils sont en mesure d’aspirer au mieux être et de
poursuivre leur marche sur le chemin du progrès et de la prospérité. C’est pourquoi pour
faire face à cette anarchie – malgré ses causes profondes et ses manifestations multiples- il
convient de rester vigilant et déterminé.
Dans un monde où les injustices sont légion et où la tyrannie prend le dessus sur la justice et
l’égalité, il est de l’intérêt de la société tunisienne de déployer tout son génie afin de changer
les termes de cette équation et de changer sa vision du monde. Par la création intellectuelle
multiforme s’instaure une société innovante, une société créative, ouverte et développée ;
une société préservée de la violence, de l’intégrisme et du mépris de l’autre ; un monde à
mille lieues de la marchandisation et de la perversion de l’art; une société dans laquelle la
paix et la liberté seront devenues les valeurs les plus chères, car exigences de l’humanité.
L’art est en effet le moyen de la libération et l’expression de la sagesse, de la méditation et
de la connaissance. C’est la langue intime de l’humanité, inséparable de la vie et de la
liberté. La vitalité intellectuelle et la créativité artistique résident dans la préservation de la
mémoire collective. Elles se réalisent, dans la diversité et l’enracinement social et culturel
par l’innovation. Celle-ci stimule les capacités imaginatives, renforce la vie comme valeur,
et favorise la réconciliation entre l’Homme et la nature afin que se réalise l’équilibre spirituel
du monde.
Il n’y a pas mieux, qu’une scène de théâtre, une mélodie émouvante, un poème, une toile,
une image de cinéma, pour affiner le sens de l’esthétique. Par l’art les qualités de l’âme sont
sublimées, le Bien est recherché, et la volonté est incitée à l’accomplissement des devoirs
fussent-ils lourds. Mais y a-t-il un devoir, s’il n’est lourd ?
L’école est au cœur du processus de modernisation et du projet d’édification culturelle que
la Tunisie a initiés depuis près de deux siècles. L’école ne peut donc être tributaire des aléas
dus aux changements de majorités. Le responsable politique, dont les fonctions, dans un
régime démocratique d’alternance au pouvoir, sont toujours provisoires, doit se libérer des
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contingences; il se doit d’agir en ce domaine comme s’il occupait une place pérenne. C’est
notre école aujourd’hui qui détermine, en effet, ce que nous serons demain.
Pour préparer l’avenir, l’éducation, du jardin d’enfants jusqu’à l’université, doit rester à l’abri
des querelles partisanes et de la course vers le pouvoir. L’homme politique – qu’il soit
membre d’un parti ou non – se doit donc d’inscrire ses initiatives dans ce domaine dans la
continuité des traditions nationales bien établies. Il se doit de ne pas rompre ce qui fait
aujourd’hui la puissance des nations, à savoir le lien indissoluble entre le désir de
connaissance et le désir de liberté. Nul doute, en effet, que le savoir et la liberté
conditionnent l’accomplissement de notre humanité, et ce dans l’universalité de sa
conception sur le triple plan de la raison, de la morale et de la vie affective. Elles sont encore
parmi les valeurs nécessaires à la préparation de la jeunesse à la citoyenneté, et à une vie
civile démocratique exempte de discrimination en raison de la religion, du sexe, ou de
l’appartenance ethnique ou sociale. Elles sont, enfin, nécessaires à la formation des
compétences, répondant aux exigences de la révolution scientifique et technologique,
harmonisant la formation avec les besoins du marché de l’emploi, aptes à produire de la
richesse pour le bien être individuel et collectif. La place de l’école est au-dessus des partis,
des gouvernements et de la conjoncture; mais elle ne peut réussir dans ses desseins que si
elle fait preuve de lucidité quant à ses objectifs, que si elle intègre dans ses fonctions les
valeurs humaines, les exigences du vivre ensemble social, et la satisfaction du
développement économique. En un mot sans avoir pour sujet l’Etre humain. Parce qu’aucun
de ces aspects n’est plus important qu’un autre, l’action éducative peut réaliser un équilibre
entre l’homme, la nature et la technologie. C’est à cette condition qu’elle pourra éduquer le
citoyen de demain. A cet égard, l’apprentissage des langues a la même importance que celle
que requiert le devoir de faire en sorte de rendre la langue arabe capable de traduire les
valeurs du monde actuel, ses sciences et ses technologies et de contribuer véritablement à
leur développement. La maîtrise d’au moins une langue étrangère est donc nécessaire pour
pouvoir s’enrichir du point de vue des valeurs, du point de vue intellectuel et du point de vue
culturel.
L’extrême importance de la mission d’enseignement impose de dispenser aux éducateurs
une formation scientifique et professionnelle de haut niveau. De ce fait, il est impératif de
procéder à la révision des recrutements qui ont été opérés selon des procédures
défectueuses. Nul n’est en droit de faire fi dans le recrutement des éducateurs des critères
scientifiques et pédagogiques. Charger des incompétents de cette mission revient à sacrifier
des milliers de jeunes et des générations entières. C’est compromettre leur avenir et celui du
pays. Le service rendu à un individu ne peut justifier le tort fait à des milliers de citoyens. Il
faudra donc prendre des mesures urgentes et étudiées afin de traiter cette question de
manière à concilier l’intérêt des élèves, la réputation de l’enseignant et les droits de la
personne recrutée.
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L’impératif de la réforme doit aussi concerner l’Université. C’est une exigence de sa
contribution d’avant-garde au développement global qui est notre quête. Vu l’importance
qui s’attache à la mission éducative et au danger que représente le désordre qui y règne,
tous les contrevenants aux lois et à la réglementation en vigueur doivent, le plus vite
possible, être amenés à rendre compte à la Justice. C’est à cette condition que nous
pourrons préserver la jeunesse et son droit à une éducation solide dans sa fondation,
rationnelle dans ses choix. Ce sont là les conditions nécessaires à la formation d’une
personnalité bien structurée et bien équilibrée. Il est donc indispensable de prendre des
mesures urgentes consistant dans la fermeture de tous les établissements dits « éducatifs »
ouverts sans autorisation préalable, et/ou sans répondre aux conditions sanitaires et
pédagogiques, sans oublier ceux qui ne se conforment pas, dans leur lettre ou dans leur
esprit, aux programmes officiels de l’Etat. Tout changement apporté aux programmes
officiels doit donc être subordonné à l’obtention d’une autorisation administrative
spécifique. Les crèches, les jardins d’enfants, les écoles coraniques, les écoles primaires, les
collèges, les lycées et les facultés privées qui refusent de se soumettre au contrôle
sanitaire, pédagogique, scientifique et financier, ou qui ne disposent pas des cadres
éducatifs et administratifs habilités conformément aux exigences de la législation en vigueur
dans le secteur, doivent être fermés.
L’école tunisienne est une, qu’elle soit publique ou privée, et l’éducation en son sein a pour
fondement la fidélité exclusive à la patrie. Elle a pour obligation de servir de façon constante
l’acquisition du savoir dans ses manifestations les plus hautes, celle des valeurs morales,
religieuses et civiques et celle des compétences technologiques, qui permettent toutes
d’éduquer l’homme, d’éduquer le citoyen et de former les compétences productives
capables de s’assurer les moyens d’une vie digne.
Dans ce cadre, il est également nécessaire de condamner le terrorisme psychologique que
subissent de très nombreux jeunes – notamment dans des établissements éducatifs privés –
et qui fragilise leur personnalité. Ses principales caractéristiques sont le bourrage du crâne
qui empêche le développement des capacités intellectuelles et de l’esprit critique, qui les
conditionnent et les conduisent à croire à des légendes et qui, de ce fait, les préparent à
faire partie des phalanges prêtes à attenter à la sécurité de la patrie et des citoyens, et à
opérer à l’étranger. Le devoir national appelle également à sévir contre tous ceux qui, de
près ou de loin, explicitement ou implicitement se sont compromis en abusant de cette
jeunesse, soit en exploitant sa misère matérielle et sa faiblesse culturelle, soit en la
corrompant par l’argent, par le conditionnement idéologique d’une rhétorique spécieuse se
déployant notamment dans les mosquées et sur les places publiques.
Il appartient à l’Etat de combattre et de faire échec aux discours de haine tenus du haut de
chaires de lieux de culte que Dieu a recommandé d’édifier pour que son nom y soit
proclamé. L’Etat doit donc, et le plus tôt possible, étendre son autorité à toutes les
mosquées et à tous les lieux de culte. Il se doit, de récupérer les biens qui relèvent du
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domaine public et qui ont été indûment usurpés illégalement. Les hors-la-loi doivent rendre
compte de leur comportement conformément à la loi. A cet égard, la « célébration » de la
cession de la vénérable mosquée Zitouna à des intérêts privés est une affaire grave qui
appelle la plus grande fermeté à l’encontre de celui qui a abusé de ses pouvoirs. Il est pour
cette raison impossible d’accepter que cette situation perdure, quelles qu’en soient les
raisons. La restitution du bien à l’Etat ne saurait, cependant, se réduire au remplacement
d’un prêcheur par un autre prêcheur. Il est urgent que la sagesse l’emporte et que la voix de
la religion rassure les cœurs. En lieu et place, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, d’un
discours d’inspiration politicienne causant la ruine des âmes, les mosquées doivent être
exclusivement réservées à l’invocation de Dieu. La politique, elle, dispose de ses tribunes et
d’espaces qui sont à sa disposition et qui sont aujourd’hui nombreux et libres.
Toute action politique doit donc s’inscrire dans l’identité tunisienne, dans ses dimensions
spirituelle, affective, intellectuelle et culturelle, et doit se revendiquer d’une histoire
pluriséculaire que nul n’a le droit de réduire à une étape à l’exclusion des autres. Notre
authenticité est notre histoire, empreinte dès le début de l’époque de la renaissance, par la
soif du savoir toujours associée à la soif de liberté. Ce fut déjà le cas des réformateurs
tunisiens qui ont toujours considéré à toutes les étapes de la lutte nationale que la liberté
était inséparable du savoir et que la modernité était faite à la fois de valeurs concrètes et de
conceptions théoriques. C’est ainsi qu’il faut faire remarquer la concomitance dans les
années 1840 du décret abolissant l’esclavage et celui instituant l’école polytechnique du
Bardo. La même observation vaut pour la promulgation du Pacte fondamental en 1857,
l’élaboration de la Constitution de 1861 et la création du Collège Sadiki vers le milieu des
années 70 du XIXème siècle. Le même phénomène se reproduit dans les années 50 du
XXèmesiècle, lors de la promulgation du Code du Statut Personnel et qui a été accompagnée
par celle de la loi instituant l’unification de l’enseignement et la création de l’école
républicaine. Tout cela indique clairement que, chez le Tunisien, le rêve de liberté est
indissociable de la détermination à acquérir le savoir. La puissance des nations vient-elleaujourd’hui d’autre chose que de l’association forte entre la formation rationnelle des
esprits, l’apprentissage de l’art de bien gouverner et des volontés libres aptes à l’action
productive ?
UNE ACTION POLITIQUE AU SERVICE DES CHOIX CIVILISATIONNELS D’AVENIR…
ET DU RETABLISSEMENT DE LA CONFIANCE DANS LES INSTITUTIONS DE L’ETAT
Se dessine ainsi l’implication que l’action politique doit se conformer à l’exigence de fidélité
à l’essence de la patrie, aux exigences de l’étape actuelle et de la préparation de l’avenir. Les
difficultés bien réelles que rencontre le gouvernement issu du consensus national ne
sauraient l’empêcher d’être un gouvernement politique, même s’il n’est que provisoire et
n’est pas partisan. La gestion des affaires de l’Etat est en effet l’action politique par
excellence, même si cette action n’est pas consciente. L’action politique véritable ne réside
pas uniquement dans la gestion des conflits entre les partis et les forces sociales mais
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dépend de la conception globale que l’on peut avoir de ce qu’est la nation en tant que
valeur suprême et sa présence parmi les nations du monde. C’est dans cette perspective
générale que le gouvernement provisoire doit affronter les problèmes qui se posent et
rechercher les solutions adéquates.
L’action politique n’est donc pas réductible à l’établissement des équilibres financiers ni à la
mise en place de solutions de replâtrage. Elle consiste en la détermination consciente des
choix de civilisation, d’une planification rationnelle à même d’éclairer les voies de l’avenir et
de susciter l’espoir chez les Tunisiens. C’est ce dont ils ont besoin pour donner sens à la
souffrance qu’ils ont subie avant et après la révolution. Les peuples, en effet, n’acceptent de
faire des sacrifices que quand ils en voient la nécessité, et ne font preuve de patience face à
l’adversité que s’ils ont l’assurance que leur lutte est une lutte juste pour des valeurs et non
une querelle pour des privilèges. Il leur faut des choix audacieux autant que de nouveaux
rendez-vous avec l’histoire.
Parmi les signes patents de la faiblesse générale qui a atteint l’Etat, il n’est qu’à citer ce
qu’est devenue la diplomatie tunisienne dont les errements l’ont privée de son capital de
sérieux et lui ont fait perdre sa crédibilité et ses spécificités traditionnelles. Cette politique
s’interdit l’ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats – frères ou amis, proches
ou lointains – sauf pour prévaloir l’intérêt national et aider à la concorde entre tous. Dans
cette perspective la dimension économique est un facteur qui favorise l’action diplomatique
et renforce les liens entre les pays. Il n’y a donc ni renonciation aux principes, ni négligence
des intérêts propres.
Le climat politique général participe de la crise de l’Etat et l’aggrave. L’idée d’Etat, ses
valeurs, ses fonctions sont mises à mal par un processus de destruction dû à des dérives
partisanes et à des forces agissantes, mues soit selon un plan prémédité soit par une
appréciation erronée de la situation. Ces forces sont à l’origine de la destruction du lien
indéfectible fondamental qui fait d’un groupe d’individus un peuple, et qui fait de ce peuple
une nation disposant d’une identité propre au présent et à l’avenir.
Un observateur objectif peut noter, que le citoyen tunisien a perdu confiance dans les
institutions de son pays à tous les niveaux, depuis le chef de l’Etat jusqu’aux services
municipaux. Ces derniers sont entre les mains de « délégations spéciales » qui ont fait la
preuve de leur incompétence et de leur laxisme. Les rues se sont transformées en décharges
d’ordures, les constructions anarchiques ont fini par emporter le peu d’agrément que les
rues des villes pouvaient avoir. La tristesse du citoyen ne peut alors que croître, et son
désespoir face à la vie publique s’approfondir, de telle sorte qu’il se trouve lui-même conduit
à moins d’exigence allant jusqu’à la démission.
De ce fait, l’action politique a aujourd’hui pour mission prioritaire de redonner au citoyen la
confiance dans les institutions de l’Etat. Les institutions, quant à elles, doivent consentir tous
les efforts nécessaires afin de s’acquitter de leurs devoirs afin de mériter la confiance du
12
citoyen. Ce sont là deux conditions nécessaires à l’édification de l’Etat de droit et des
institutions.
LA NECESSITE DE REPANDRE L’ESPRIT DE CITOYENNETE ET LA CULTURE DE LA
PAIX ET DU REFUS DES DISSENSIONS
L’atmosphère générale a fait dévier l’Etat tunisien de ses valeurs fondamentales, et a
aggravé son incapacité de remplir ses fonctions sociales. Il appartient pourtant, dans ce
contexte, aux partis politiques de redoubler d’efforts et de se hisser davantage au niveau de
la responsabilité historique qui leur incombe. Il leur appartient de faire prendre conscience à
toutes les couches de la société tunisienne de l’importance de l’action politique et de la
nécessité d’y prendre part. Leur contribution est essentielle pour que le peuple assume
pendant cette étape décisive de son histoire contemporaine le rôle qui est le sien, et pour
que tout citoyen s’acquitte de ses devoirs professionnels et civiques de la meilleure manière.
Le premier de ces devoirs qui incombe à l’ensemble de la classe politique consiste à
répandre l’esprit civique et la culture de la paix et de la fraternité entre les citoyens en lieu
et place de la haine et de la dissension. Il n’y a en effet pas de place parmi nous pour la
culture du ressentiment ni pour la confusion entre notre quête de l’excellence par le labeur,
et ce que préconisent les idéologies de l’illusoire spécificité et de la maladie d’une identité
imaginaire et momifiée.
Tous les partis politiques doivent donc aujourd’hui clarifier leurs positions au sujet de la
violence en général, et du terrorisme en particulier. La simple condamnation formelle ou la
seule indignation est insuffisante. Il leur faut adopter une action éducative morale, civique et
politique qui soit de nature à aider leurs militants à comprendre les exigences du vivre
ensemble, et à les préserver des dangers de la haine et de l’extrémisme qui, souvent, se
cachent derrière les apparences de la piété et de l’obéissance aux recommandations divines
dont notamment « la commanderie du Bien et l’interdiction du mal ». Cette norme sert
souvent de prétexte pour forcer des citoyens et des citoyennes en particulier à adopter tel
ou tel type de comportement. Or, dans une société démocratique aucun citoyen n’a de
pouvoir à l’égard d’un autre citoyen, sauf dans le cadre des institutions de l’Etat et dans la
limite de ce qu’autorise la loi. Les partis politiques sont vivement appelés à recommander à
leurs militants de faire preuve de mesure dans leurs comportements, d’éviter tous les excès
dans les débats et dans l’expression de leurs opinions. A l’inverse de la dictature qui imposait
par la force l’ordre qui est le sien, la démocratie ne dispose, quant à elle, que des vertus de
ses citoyens pour s’instaurer, se développer et se renforcer.
Pour assumer aujourd’hui cette mission, il faut notamment empêcher le dévoiement du
tissu associatif en l’expurgeant des intrus qui ne sont pas dédiés à la patrie, mais qui
œuvrent à la réalisation d’autres desseins que ceux de la révolution. L’Etat est aujourd’hui
l’unique autorité qui a la responsabilité de la protection de la révolution contre toutes les
tentatives de récupération dont elle pourrait faire l’objet. Toutes les associations suspectes
13
doivent expliquer les sources de leur financement. Elles doivent aussi justifier de leur
domaine d’intervention. Elles doivent rendre compte des invitations faites à des
bonimenteurs et à des inventeurs d’affabulations tendant à endoctriner, au plan de la foi
comme à celui des choix politiques, des gens simples au seul bénéfice de telle ou telle partie.
Ces pratiques sont en rupture avec ce qui constitue le bon goût et l’attitude traditionnelle
du Tunisien qui a toujours été attaché à l’esprit des Lumières et à la rationalité. Le devoir
national appelle aussi à interdire les prêcheurs de la haine qui s’en prennent aux acquis et
aux symboles de notre pays sous prétexte d’appeler à l’application de la charia, de même
qu’il faut interdire la fondation d’institutions dont le rôle est la mobilisation des jeunes pour
les enrôler au sein de hordes idéologisées et militarisées, sous le prétexte fallacieux
d’éducation et de culture. Autant le Tunisien réserve un accueil favorable à ses hôtes, autant
il veille à ce qu’ils respectent les règles de l’hospitalité. Ceux là qui se prétendent les tuteurs
de notre conscience, ce sont en fait des prédicateurs dont on ne peut attendre aucun bien. Y
a-t-il pire fauteur que celui qui a porté des accusations mensongères contre la Tunisie en
prétendant parler au nom de l’islam ?
AFFRONTER LA VIOLENCE ET LE TERRORISME EN CIBLANT LEURS DIMENSIONS
INTELLECTUELLE, PSYCHOLOGIQUE, SOCIALE ET SECURITAIRE.
Que la faiblesse dans l’accomplissement de ses fonctions par l’Etat soit la conséquence d’un
plan prémédité ou celle de comportements involontaires, le résultat objectif en a été
l’apparition de pratiques inédites ne correspondant nullement aux mœurs des Tunisiens. Ces
pratiques sont en effet incompatibles avec un Etat structuré. Il en a été ainsi quand les
imams officiels ont été chassés et remplacés par d’autres qui, sans titres, ont répandu un
discours dont la charge politicienne est évidente, puisqu’il a pour objectif et pour effet de
diviser les Tunisiens en deux camps : le camp des laïques et des modernistes, d’une part, et
celui des islamistes et des fondamentalistes, d’autre part. Il s’en est suivi des qualifications
arbitraires traitant les premiers de perfides, de renégats et de violents, et assignant la vérité,
la sincérité et l’authenticité aux seconds. Comme s’il s’agissait d’organiser, au nom de la
religion et avec sa bénédiction, un combat armé entre ces deux camps.
Ces divisions ont conduit à l’apparition de la violence verbale et physique dont la première
victime a été le regretté Lotfi Nagdh ; de même qu’en est né le phénomène des assassinats
politiques qui ont visé les deux martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi et de nombreux
autres martyrs parmi les forces de sécurité et les soldats de l’armée nationale.
Ayant de multiples dimensions psychologique, culturelle, matérielle et physique, le
terrorisme est à la fois visible et invisible. Il faut pour le vaincre, notamment, en tarir les
sources de financement, en particulier le commerce illicite et le trafic de drogue. Ce sont des
activités qui ont aussi des conséquences désastreuses sur la santé, dues à la consommation
de produits d’origine inconnue et de composition n’obéissant à aucun contrôle. Elles
occasionnent au Trésor Public des pertes financières importantes et au tissu industriel et
14
commercial national un impact destructeur. Il n’y a donc pas d’autres solution que celle
d’appliquer la loi de l’Etat, ce qui suppose le recours à des forces de sécurité qui ont une
capacité de dissuasion suffisante pour assurer la sécurité du pays et des citoyens, et de
préserver l’avenir de la Tunisie et de la région maghrébine, vu le développement du
terrorisme et du crime organisé.
Dans le même ordre d’idées, il faut rappeler que le rétablissement de l’autorité de l’Etat et
le retour de la confiance des citoyens ne peuvent se réaliser sans la transparence et la
clarté qui doivent caractériser l’action publique. Il est de ce fait nécessaire de s’en tenir
fermement à la feuille de route qui a été établie par le « Dialogue National », en ce qui
concerne notamment la révision des nominations qui ont été faites, dans la fonction
publique, sur la base de l’appartenance partisane. L’inféodation des institutions de l’Etat aux
partis politiques est en effet le prélude de leur ruine.
Il est également nécessaire de réexaminer les recrutements arbitraires effectués au sein de
l’administration. Ce réexamen doit se faire dans le respect des engagements de l’Etat et en
prenant les mesures adéquates pour assurer aux intéressés une mise à niveau pour leur faire
acquérir de nouvelles compétences les rendant aptes à exercer un véritable métier dans
d’autres domaines que la fonction publique, et leur permettant de contribuer au processus
productif. Ceci doit se faire aussi en vue de réaliser une adéquation entre les effectifs en
fonctionnaires et les besoins réels de l’administration, ce qui l’aidera à gagner en efficacité,
à se préserver des risques de dégénérescence, et à garantir sa neutralité.
La transparence –l’une des obligations de l’Etat envers le citoyen – est une exigence de la vie
démocratique. Si nul n’a le droit d’accuser un autre sans preuves, il est du droit de tous de
connaître la vérité. Les citoyens ont le droit de connaître les résultats auxquels sont
parvenues toutes les commissions d’enquête qui ont été constituées à l’occasion de divers
évènements, notamment en ce qui concerne les événements de Siliana où il a été fait usage
de la chevrotine contre des manifestants pacifiques, ou encore en ce qui concerne les
incidents qui ont émaillé la commémoration, en 2012, de la fête des martyrs , ou enfin en ce
qui concerne les attaques visant le siège de l’Union Générale des Travailleurs Tunisiens et
l’ambassade des Etats-Unis.
L’attaque dans la cité Ez-Zouhour à Kasserine qui a entraîné la mort d’agents des forces de
l’ordre, de même que l’occupation du mont Châambi par des terroristes qui s’y sont installés
et qui en ont fait leur base, constituent ainsi une menace pour la sécurité du pays. Il est
inacceptable que les autorités ne s’en soient pas rendu compte et qu’elles n’assument pas
leur responsabilité. Ce sont là deux faits qui indiquent pour le moins des négligences dont
les causes doivent être identifiées. Le laxisme a causé la mort de nombreux martyrs parmi
les soldats de l’armée nationale et des forces de sécurité. Le citoyen quant à lui est terrorisé.
La situation aurait pu être plus grave encore n’eût été la vigilance et le courage de nos forces
armées. Leur intervention a été efficace comme en témoigne la découverte de caches
15
d’armes et le démantèlement des cellules terroristes dans de nombreuses zones du
territoire national.
Ce sont là des déficiences qui doivent être corrigées et portées à la connaissance du peuple,
avec l’engagement de l’Etat de les traiter par tous les moyens dont il dispose, afin de revenir
à une situation normale, le peuple retrouvant ainsi la paix, son souffle et sa tranquillité. Ces
lacunes sont graves et menacent de dangers imminents, elles imposent au peuple dans son
ensemble et aux forces armées plus particulièrement de lourdes responsabilités.
A ce titre, nos forces armées doivent être soutenues par le peuple et le gouvernement. Elles
doivent être dotées de tous les moyens matériels nécessaires et doivent disposer d’une
législation adéquate à la lutte contre la criminalité et le terrorisme. A cet égard, il devient
impératif de moderniser l’institution sécuritaire, d’en faire une institution républicaine dans
son crédo et ses fonctions. Il est donc impérieux de créer une agence nationale de
renseignement et de sécurité globale. Le devoir national impose aussi d’offrir toute l’aide
requise aux blessés parmi les héros de cette lutte et d’entourer les familles des martyrs de la
sollicitude qu’elles méritent, en modifiant, si nécessaire, les lois et la règlementation en
vigueur.
Les dangers qui menacent notre région et leurs conséquences sur la situation intérieure,
conjuguées aux difficultés de la transition démocratique, ne peuvent être jugulés que par le
renforcement de la coopération en matière de sécurité, notamment avec nos voisins
maghrébins. Cette situation nécessite également la mobilisation de tous les moyens
humains, logistiques et législatifs en faveur des forces armées, de la Garde Nationale, de la
police et des douanes afin de leur permettre d’accomplir leur devoir de protection des
frontières nationales contre toute incursion, et de mener la lutte, à l’intérieur du pays,
contre toutes les manifestations de laxisme et les atteintes aux prérogatives de l’Etat, dont
particulièrement la lutte contre le terrorisme. Par ailleurs, il revient à chaque citoyen et
chaque organisation de la société civile de faire tout ce en leur pouvoir pour assurer
l’efficacité de cette action et nous permettre de gagner la bataille contre le terrorisme dont
l’expansion est prévisible dans la situation actuelle. Pour y parvenir il faut œuvrer au
rétablissement et au renforcement de la confiance entre le citoyen et les institutions de
l’Etat après une longue période de suspicion et de méfiance. Les déficiences actuelles
doivent être reconnues et dépassées, ce qui suppose la mobilisation de tous les moyens
dont dispose l’Etat. Car il s’agit pour le peuple de retrouver sa sérénité, de revenir à ses
qualités naturelles, de renouer avec la générosité dont il a fait la preuve éclatante aux
premiers jours de la révolution, avant que celle-ci ne fût usurpée par des forces qui n’avaient
aucun mérite dans son accomplissement.
LE CARACTERE DECISIF DES PROCHAINES ELECTIONS…ET LA NECESSITE DE
TRAITER LES SITUATIONS ECONOMIQUE, SECURITAIRE ET SOCIALE URGENTES
16
Les défaillances qui ont marqué la situation sécuritaire sont telles qu’elles sont à l’origine
des revers et des retards qui ont touché le processus de la transition démocratique. Le pire
est cependant à craindre. L’action du gouvernement né du consensus national risque d’en
être affectée. Pour l’éviter, et dans la perspective des prochaines élections présidentielles et
législatives, il faudra faire preuve de compétence, de fermeté et d’esprit de coopération.
Ce sont en effet des élections décisives. Car l’avenir de la démocratie en Tunisie en dépend.
Pour cela, elles doivent se dérouler en rupture avec les pratiques frauduleuses du passé,
faites d’achat des voix et de promesses mensongères. C’est que la démocratie a pour
fondement la mise œuvre en commun de la liberté, et la liberté n’a pas de sens sans une
véritable conscience et un engagement pour la vérité.
Ce sont également des élections décisives du point de vue de la participation aux scrutins
avant qu’elles ne le soient par les résultats auxquels elles pourraient donner lieu. La sécurité
est en effet nécessaire pour que le citoyen prenne part à ces élections et celles à venir,
rompant ainsi avec son désintérêt pour la chose publique, les rendez–vous électoraux ayant
été pendant des décennies l’occasion de fraudes et de répression des récalcitrants. La
sécurité doit régner pour que le citoyen puisse vaincre ses hésitations et la crainte
d’agressions éventuelles d’éléments qui n’en ont pas encore été totalement dissuadés, et ce
en dépit de tous efforts généreux consentis. Il est à espérer que l’actuel gouvernement
fasse tout ce qui est en son pouvoir afin que la sécurité règne et qu’il rassure le peuple sur la
crédibilité des prochaines élections. Celles–ci constituent l’occasion historique pour
l’émergence d’un authentique nouvel état d’esprit. C’est par la sécurité que se protège
l’exercice de la liberté. Il n’y a plus lieu de troquer la liberté pour la sécurité. C’est en
renonçant à la première au nom de la seconde que s’instaurent les tyrannies.
Ce sont enfin des élections décisives qui engagent l’avenir de la Tunisie. Elles sont l’occasion
des choix nationaux fondamentaux. Elles ne serviront pas uniquement à la désignation d’un
gouvernement, elles détermineront le modèle sociétal qui sera celui de la Tunisie. Les
Tunisiens diront s’ils optent résolument pour la préservation de leurs acquis historiques à
commencer par l’école de la République, le Code du Statut Personnel et l’esprit de tolérance
qui a toujours été le leur. Ils diront s’ils restent fidèles à leur authentique ouverture au
monde contemporain, faite de conviction et non de hasard et d’opportunisme consumériste.
Ils diront à ce titre s’ils donnent effet aux instruments internationaux relatifs aux droits de
l’homme et aux relations internationales. A défaut, ils laisseront le champ libre à l’inconnu
qui s’inscrit dans le cadre de ce que d’aucuns ont dénommé « le chaos créateur » et que
certains chantres de « l’authenticité » ont appelé l’approche de « la dynamique des
pressions sociales ».
La responsabilité des acteurs politiques revêt donc aujourd’hui une dimension historique et
constitue un lourd fardeau ayant le statut d’une mission. Le devoir national nous appelle à
l’assumer collectivement dans l’intérêt de tous. En effet, l’intervention de l’Etat seul ne peut
suffire. Celui-ci fait face au plan politique et social, outre la crise sécuritaire, à une situation
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économique des plus difficiles. La crise que traverse le pays tire sa source dans le passé, la
révolution ayant pour effet de l’exacerber.
Il n’est pas nécessaire de fournir des preuves établissant que la déliquescence du climat
politique avant la révolution est à l’origine de la généralisation de la corruption et du
favoritisme, et qu’elle a eu des conséquences négatives sur la vie économique. Le taux de
croissance économique a baissé, le rythme des investissements s’est ralenti
quantitativement et qualitativement, et le chômage a augmenté en général, mais encore
plus pour les diplômés de l’enseignement supérieur, en particulier dans les régions
défavorisées de l’intérieur du pays.
La situation économique est devenue plus précaire après la révolution, du fait de
l’aggravation de la baisse de la croissance, de l’explosion du chômage et de l’émergence des
difficultés financières dans les deux secteurs, public et privé. Le gap s’est creusé entre les
ambitions et la réalité, entre l’espoir créé par la révolution d’assurer les moyens de vie dans
un contexte national meilleur et plus prometteur, d’une part, et l’impasse dans laquelle nous
nous trouvons qui a rendu la vie plus difficile et plus pauvre, d’autre part.
Ainsi apparaît clairement l’interaction entre les trois facteurs qui sont à l’origine de la crise
que notre pays connaît aujourd’hui, à savoir le facteur politique, le facteur sécuritaire et le
facteur économique. Ils interagissent sous la forme d’un cercle vicieux, la situation politique
et la situation sécuritaire instables engendrant des effets négatifs sur la dynamique
économique qui produit, à son tour, des conséquences néfastes sur la situation politique et
la situation sécuritaire.
Cependant, comme le facteur politique est le facteur le plus important, vu son caractère
global et vu l’enjeu que représentent les choix qui y sont attachés, il est évident que la sortie
de la crise, dans ses dimensions morale, psychologique, sociale, économique et sécuritaire
est fortement liée à la résolution de la crise politique avec une attention particulière à prêter
à la sécurité.
La reconnaissance de la centralité du fait politique dans la crise nationale impose de
reconnaitre aussi le peu d’efficacité des approches imposées par les circonstances
immédiates et des solutions ponctuelles. En cette étape très particulière de l’histoire
actuelle de la Tunisie, le devoir impose d’avoir l’audace d’entreprendre des réformes
fondamentales qui touchent à la fois nos systèmes économiques, éducatifs, culturels et
sociaux en conformité avec notre ambition pour une vie digne et prospère alliant l’efficacité
de l’initiative productive et le souci de la justice sociale et d’une répartition équitable des
fruits de la croissance entre les couches sociales et les différentes régions du pays.
La réforme la plus importante parmi celles qui doivent être entreprises est celle qui
concerne la fiscalité, conçue comme un devoir national. Se soustraire à ses obligations
fiscales est en effet une sorte de fraude à l’encontre de la citoyenneté. Le défaut d’équité
dans la détermination des charges fiscales et dans leur répartition entre les différentes
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couches sociales ainsi que l’atermoiement dans leur recouvrement se font au détriment de
la justice sociale.
LES DIFFICULTES SONT NOMBREUSES MAIS L’ESPOIR DANS UN AVENIR
PROMETTEUR EST ENCORE PERMIS SI LES VALEURS DU TRAVAIL SONT
AFFIRMEES HAUT ET FORT, SI UNE MORALE DE LA VERITE ET DE LA SINCERITE
S’AFFIRME DAVANTAGE ET SI LA CONFIANCE EN SOI SE RENFORCE.
Aujourd’hui et au terme d’une expérience avant-gardiste, la Tunisie a réalisé que si les faux
pas peuvent survenir et constituer une déconvenue importante, la capacité de s’en relever
est encore plus importante. Dans son parcours historique l’Etat tunisien a connu de
nombreuses crises, mais il a été à chaque fois capable de prendre le dessus sur les difficultés
rencontrées, et n’en est devenu que plus fort. Le déclenchement de la révolution en a fourni
la preuve la plus éclatante. Elle a traduit, d’une part, le refus d’une situation dans laquelle la
corruption a atteint tous les domaines, les valeurs de vérité et de sincérité se sont perdues,
et celles du travail et du gain honnête ont reculé. Elles ont fait place au favoritisme et à
diverses formes de népotisme. Mais la révolution a ouvert des horizons prometteurs de
lendemains meilleurs où le Tunisien pourra créer des emplois, garantir sa liberté et préserver
la dignité de sa patrie. En effet, c’est la dignité du citoyen qui fait celle de la patrie.
Le Tunisien ne s’abandonnera pas à ceux qui veulent instiller le doute au sujet de sa
révolution, en en faisant soit l’émanation d’un plan occulte conçu par des forces étrangères,
soit le résultat d’un complot ourdi par des forces de l’intérieur. Nul n’a le droit de minimiser
la valeur d’une révolution dont les causes objectives se sont accumulées, y compris le
chômage et l’aggravation des disparités entre la richesse la plus insolente et la misère la plus
noire. Bien au contraire, le sentiment de fierté doit l’emporter pour une révolution portée à
bout de bras par des volontés authentiques, et dont la jeunesse, formée à l’école de la
République, a constitué l’avant-garde.
L’Etat se doit donc de mieux écouter la jeunesse, détonateur et chef de file de la révolution.
Nul ne peut, au sein d’un peuple dont les deux tiers ont moins de trente ans négliger de tenir
compte de l’ambition qu’a cette jeunesse de contribuer effectivement à la réalisation des
objectifs les plus urgents de la révolution, et à tracer les traits de ce que sera l’avenir de
notre pays, à court et à long terme.
La jeunesse tunisienne peut s’enorgueillir d’avoir donné à la révolution un mot d’ordre
traduisant une grande ambition, dont les trois dimensions sont intimement liées :
économique, politique et modèle sociétal. La jeunesse a, ainsi, voulu montrer que cette
révolution tire sa légitimité de ses ambitions plus que de ses origines, de ses objectifs plus
que de ses causes, de son avenir prospère plus que de son triste passé. La femme tunisienne
a joué aussi un rôle majeur pendant la révolution, ainsi que pendant la période de transition
dans la défense de ses droits et de l’identité tunisienne.
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Le devoir n’en est donc que plus pressant de faire preuve d’un réveil patriotique pour
réaliser ces nobles objectifs, afin que la Tunisie retrouve sa place parmi les nations du
monde et afin que le Tunisien retrouve la joie de vivre. Il faut, pour cela, que le travail soit la
priorité. Il est la condition d’un développement durable, de l’édification d’une société du
savoir, dont la justice sociale sera l’une des orientations fondamentales et dont l’Homme
sera la fin et le moyen.
La Tunisie a déjà accompli des progrès certains dans cette direction, même s’ils restent
inférieurs, quantitativement et qualitativement, aux ambitions du peuple et à ses capacités.
Le résultat le plus important de la révolution, c’est le fait que le peuple ait appris comment
se prendre en charge, défendre lui-même ses acquis et amener l’Etat à les faire siennes. Il
est passé de l’étape de l’esprit de l’assistanat dans lequel il était passif à celui de la
responsabilité combative. Nous nous sommes ainsi débarrassés à jamais de la mentalité de
l’exclusion et de la marginalisation et avons adopté le dialogue national comme une
méthode saine qui a trouvé auprès de L’U.G.T.T, de l’U.T.I.C.A., de la Ligue Tunisienne des
Droits de l’Homme et du Conseil de l’Ordre des Avocats le meilleur appui, et ce aux
moments les plus difficiles de la transition démocratique dont la réussite ne fait pour nous
pas l’ombre d’un doute.
Nous avons accompli des réalisations multiples dont nous pouvons être fiers, mais celles qui
nous attendent sont encore plus importantes et plus nombreuses, ce qui nous impose à tous
de nous engager fermement à protéger la révolution jusqu’à ce qu’elle se développe et se
raffermisse.
Maintenant que l’heure du choix décisif a sonné, il ne peut y avoir d’autre protection de la
révolution que par le savoir et le travail d’abord, le savoir et le travail encore, le savoir et le
travail enfin, dans une société prospère, sous l’égide d’un Etat civil fort et juste, qui
développe la culture, répand la connaissance et protège la liberté.
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Liste des signataires :
Mustapha Kamel NABLI
Abdeljelil TEMIMI
Hamadi BEN JABALLAH
Abdelmajid CHARFI
Mohamed ABDENNADHER
Taoufik BACHROUCH
Boutheina BEN JABALLAH-AYADI
Monia BEN JEMIA
Fethi BEN SLAMA
Tahar BOUSSEMMA
Hela BOUSSEMMA
Mounira CHAPOUTOT-REMADI
Faouzia CHARFI
Naceureddine ELAFRITE
Abdellatif FOURATI
Amel GRAMI
Mohamed HADDAD
Taoufik JEBALI
Mohamed KILANI
Slim LOGHMANI
Abdelwaheb MAHJOUB
Ammar MAHJOUBI
Abdelwaheb MEDDEB
Ali MEZGHANI
Abdelkader MHIRI
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Kalthoum MEZIOU
Emna MNIF
Mohamed Nouri ROMDHANE
Hamadi SAMMOUD
Mis en forme : Français (France)
Neila SILLINI
Sonia TEMIMI
Mis en forme : Français (France)
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