Les Liaisons dangereuses (1782)

Transcription

Les Liaisons dangereuses (1782)
la correspondance dont il est extrait».
L’ambiguïté de l’œuvre de Laclos est posée avant même le début
de la lecture de la correspondance.
! Les personnages principaux
• Les instigateurs
-Vicomte de Valmont : il incarne le libertin calculateur par
excellence. Toujours uni à Mme de Merteuil dans ses manigances,
il apparaît pourtant plus sensible qu’elle dans certaines lettres.
-Mme de Merteuil : grand maître du libertinage, elle donne le ton au
roman en servant sa cause coûte que coûte. Despote froid et cruel,
elle cherche à tout diriger.
• Les victimes
-Cécile de Volanges : jeune ingénue spontanée et puérile, elle
représente la victime idéale pour la réalisation de l’éducation
libertine rêvée par les deux complices Valmont et Merteuil.
-Mme de Tourvel : vertueuse et dévote, elle est la voix de la morale
injonctive du roman. Cependant, elle est divisée à l’intérieur : la
séduction de Valmont semble faire fondre ses résistances
moralisatrices.
! L’amour vs. le désir
Les personnages évoluent et changent sous l’influence de l’amour
et du désir. Le roman semble affirmer que le plaisir n’est
qu’éphémère parce qu’il obéit à une injonction naturelle ;
mécanique, il n’offre qu’un faible moment de félicité. Cependant,
l’amour quant à lui se veut au-dessus des contingences matérielles
pour atteindre le bonheur. Les personnages naviguent entre les
deux, allant du désir à l’amour comme Valmont ou en les séparant
comme Cécile.
! Le libertinage
• Le libertinage n’est pas seulement un phénomène littéraire. Il
s’agit avant tout d’une pratique sociale de l'aristocratie que la
littérature, en se parant d'une dimension réaliste très neuve, va
ensuite refléter. Laclos s'inscrit et se démarque d'un genre, celui
du récit libertin. La polyphonie de son roman est la clé de
l'originalité.
• Au XVIIIe siècle, le libertinage désigne dans la littérature une
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quête égoïste du plaisir accompagnée d’une débauche morale au
sein de la société.
Etymologiquement, le «libertin» vient du latin libertinus qui est
«l’esclave venant d’être affranchi». Dans le roman de Laclos, la
même notion de libération par rapport à des codes sociaux rigides
se retrouve : face à l’honneur et à la réputation, le libertin mène
son jeu de perversion tout en s’assurant l’estime de la société.
Considéré comme un modèle de vertu, le libertin triomphe en
masquant sa véritable nature.
La séduction dans le roman est transformée en art : c’est un défi
dans lequel la femme est la proie du chasseur libertin.
Cependant, il ne s’agit pas d’une littérature licencieuse dans les
échanges de lettres mais plutôt d’un raffinement intellectuel
pervers.
Le cynisme du libertin se retrouve dans ses fausses apparences :
Valmont se déclare ainsi «amoureux et timide» (lettre LVII) puis
charitable (lettre XXI), mais il manigance sans cesse avec Mme
de Merteuil.
L’orgueil et le mépris placent le libertin au-dessus des membres
de la société soucieux de respecter les codes moraux établis. Les
victimes de Valmont et de Mme de Merteuil ne sont pour eux que
sottes (Mme de Tourvel et sa vertu) ou ingénues (Cécile de
Volanges et son jeune âge). Les deux complices partagent la
même intelligence et la même jouissance dans la rédaction
mutuelle de leurs exploits.
Au-delà du défi libertin, les deux instigateurs entretiennent dans
leurs échanges épistolaires une tension et une rivalité : Mme de
Merteuil veut dominer Valmont et affiche une sorte de féminisme
avant l’heure. Valmont répond à ces déclarations de guerre par
des stratégies qu’il considère parfaitement élaborées.
Dans le roman, le libertinage apparaît au centre de toute l’œuvre,
mais il n’est pas la fin de l’analyse : pourquoi Laclos va-t-il aussi
loin dans la fascination pour ses personnages ?
Par delà même le libertinage, on constate que l’énigme sousjacente ne vient pas de l’anecdote, mais d’un travail au regard
exacerbé sur une époque de grandes révolutions.
MemoPage.com SA © / 2008 / Auteur : Charlotte Rault / Expert : Joséphine Malara
! Structure de l’œuvre
• Ce roman épistolaire est composé de 175 lettres datées
échangées entre les différents personnages.
• Au début du roman, un «Avertissement» déclare : «Ce n’est
qu’un roman». Cependant, la préface qui suit laisse sousentendre une véritable authenticité : «Ce recueil, que le public
trouvera peut-être encore trop volumineux, ne contient pourtant
que le plus petit nombre des lettres qui composaient la totalité de
II. Les Liaisons dangereuses : sens et enjeu
du thème du libertinage
! L’énigme de sa vie et de son œuvre
" Marcel Proust écrit de Laclos : «l’honnête homme par excellence,
le meilleur des maris [...] qui a écrit le plus effroyablement pervers
des livres».
" A 18 ans, Laclos entre à l’école royale d'artillerie de La Fère.
Echouant dans son projet d’embarquer pour l’Amérique avec la
Brigade des colonies, il reste frustré dans ses ambitions militaires
et s’investit alors dans la littérature.
" En 1779, il rédige à l’île d’Aix Les Liaisons dangereuses, publiées
en 1782.
" En 1786, il épouse Marie-Solange Duperré après la naissance de
leur premier enfant. Ils en auront deux autres.
" Pendant la révolution, il soutient le Duc d’Orléans puis se rallie
aux idées républicaines. Enfin, il rejoint Napoléon Bonaparte et
réintègre le commandement militaire.
" En 1803, il meurt de fièvre à Tarente.
I. Pierre Ambroise Choderlos de Laclos
(1741-1803)
Les Liaisons dangereuses
(1782)