Roland Mack

ECONOMIE
MARDI4SEPTEMBRE2012 P
DÉVELOPPEMENT Soixante entrepreneurs qui font l’Alsace
L’AGENDA
ÉCONOMIE
Roland Mack,
main tendue sur le Rhin
OBERHAUSBERGEN
Réforme des
retraites : impact
sur les entreprises
et les salariés
Q MARDI 18 SEPTEMBRE.
Arpege Prévoyance, groupe
Réunica, organise une table
ronde thématique sur le
thème « Réforme des retraites : impact sur les entreprises et les salariés » (de 9 h à
12 h, chez Réunica Arpege
Prévoyance, 2 rue de Reutenbourg à Oberhausbergen).
Inscription obligatoire avant
le 10 septembre. Contact :
Christophe Viginay,
✆0390228494, [email protected]
STRASBOURG
Crise et risque image
Q MERCREDI 19 SEPTEMBRE.
La CCI de la région Alsace
organise un petit-déjeuner
d’information sur le thème
« Crise et risque image :
comment gérer votre communication ? » (de 8 h 30 à
10 h à la CCI, 10 place Gutenberg à Strasbourg). Inscription obligatoire avant le 14
septembre. Contact : Frédéric
Papelard, ✆0388764207,
[email protected]
PRATIQUE
PRÉVENTION
Campagne du
régime social
des indépendants
Le régime social des indépendants (RSI) développe RSI Prévention Pro, programme de
prévention des risques professionnels pour les chefs d’entreprise. Ce programme s’articule
autour de deux axes : sensibilisation et auto-évaluation des
risques liés à l’activité professionnelle et consultation médicale par le médecin traitant
dédiée à la prévention et au
dépistage. En 2012, 1 252 coiffeurs, 400 artisans taxi et 101
exploitants de pressing, affiliés
au RSI Alsace, sont invités à y
participer et disposent d’un an
pour répondre à l’invitation.
Chaque année, le RSI offre ainsi
à des catégories professionnelles ciblées une consultation
gratuite et sans avance de frais
qui permet à l’assuré de bénéficier d’un examen clinique pour
dépister les pathologies pouvant être liées à la pratique
professionnelle et de recevoir
des conseils de prévention
personnalisés ; des recommandations adaptées à chaque
activité professionnelle.
Le RSI a conçu des modalités de
participation simples et pratiques adaptées au rythme de vie
des indépendants : les assurés
reçoivent par voie postale les
documents nécessaires à la
consultation médicale ainsi que
la brochure d’information, ils
prennent rendez-vous avec leur
médecin traitant en précisant
qu’il s’agit de la consultation de
prévention dédiée aux risques
professionnels proposée par le
RSI, ils présentent l’ensemble
des documents à leur médecin
traitant.
Ce programme, développé au
niveau national par le RSI, avait
fait l’objet en 2010 d’une
expérimentation auprès des
boulangers et des coiffeurs des
régions Pays-de-la-Loire et
Picardie. Pour les assurés y
ayant participé, 83 % l’ont
trouvé intéressant et 81 % ont
adopté de nouveaux comportements au travail.
Q Documents du programme sont
téléchargeables sur le site
www.rsi.fr/prevention-pro
18
Le patron du célèbre parc de loisirs de
Rust emploie de très nombreux
Alsaciens. Le modèle de développement
de ce voisin, Européen et francophile
enthousiaste, force le respect. Trentetroisième volet de notre série.
R
oland Mack ? Un entrepreneur badois qui fait
l’Alsace ? Vous n’y pensez pas ! Eh si, qu’on le
veuille ou non, la famille Mack a
contribué depuis presque quarante ans à faire de l’Alsace ce
qu’elle est aujourd’hui dans un
espace qui excède, naturellement, ses propres frontières. On
le sait peu, ou on a tendance à
l’oublier, mais parmi les 3400
collaborateurs travaillant à Rust
pour Europa-Park, 60 % sont
des Français. Sur les quatre millions de visiteurs, 49 % viennent d’Allemagne, 20 % de Suisse et autant de France pour une
visite d’une durée moyenne
de… 8 h 30. Ces chiffres font de
Rust le premier parc de loisirs
allemand et le deuxième en Europe. Il a reçu 90 millions de
personnes depuis l’origine.
Europa-Park, créé de manière
assez modeste le 12 juillet 1975,
est devenu l’activité phare et la
vitrine d’une famille spécialisée
depuis le XVIIIe siècle dans la
construction de manèges et d’attractions foraines à Waldkirch,
en Forêt-Noire. Alors que la production de Mack Rides, exportée
à 90 %, se poursuit, le parc qui
dispose de 90 hectares pour son
déploiement, ne cesse de croître. À moins de 5 km à vol
d’oiseau du fleuve frontière,
c’est certainement l’entreprise
allemande la plus francophile et
la plus francophone du Rhin
supérieur.
En ce mois de juillet à la météo
capricieuse, Roland Mack reçoit
dans le hall confortable du Colosseo. D’inspiration italienne,
il est l’un des sept hôtels ou
hébergements de Rust qui abrite
au total pas moins de 4500 lits
depuis l’ouverture cet été du
Bell Rock, un établissement
évoquant la Nouvelle-Angleterre avec son grand phare rouge et
blanc de 35 mètres de haut. Ses
suites offrent une vue imprenable au sommet. La Nouvelle-Angleterre est le 14e quartier européen de Rust ! Le patron du
groupe a évidemment une vue
extensive, rêvée de l’Europe. Un
rêve ancré sur le Rhin et pétri de
bon sens badois.
« J’ai été toute ma vie un homme qui a pensé international.
Très jeune, j’ai été en contact
avec beaucoup de nations. Je travaillais dans l’entreprise de
construction de manèges de
mon père et nous allions sur
place, chez nos clients présenter
et monter les machines. Mon
grand-père vendait déjà des manèges en Grande-Bretagne et en
Scandinavie », raconte Roland
Mack. Cette fibre internationale
et européenne, il pense l’avoir
héritée de son père et l’a cultivée très tôt : « Je me rappelle un
concours à l’école lorsque
j’avais douze ans. Le thème était
Journée de l’Alsace
dimanche
Le dimanche 9 septembre
sera la Journée de l’Alsace
à Europa-Park. Ce moment
dédié au public alsacien, et
plus largement français, a
été institué il y a trois ans
et devient une institution,
la famille Mack prenant
soin d’inviter personnellement ses partenaires français. La dégustation de vins
d’Alsace sera proposée aux
visiteurs ainsi que la découverte d’artisanat traditionnel et un spectacle
avec groupes et orchestres
folkloriques. Ouverture du
parc aux heures habituelles
(9 h-18 h).
« Le trafic relie l’Europe », j’ai
gagné le concours et un prix du
Bade-Wurtemberg. J’ai reçu une
invitation pour visiter le Conseil
de l’Europe, à Strasbourg. J’ai
été fasciné par l’Europe et je
suis devenu un Européen », explique avec une conviction sincère le dirigeant.
Le patron, avec son frère Jürgen,
du groupe familial développe
une vision classique de l’Europe, centrée sur l’axe franco-allemand « essentiel ». L’argumentation est solide et constante :
l’Allemagne et la France étant
les deux pays les plus forts en
Europe, leur solidarité simpose.
Mais il y a davantage, plus intime : « J’étais le seul à parler
français dans la firme. J’ai travaillé à Lyon et à Lille pour monter des manèges. À mes yeux,
cela a toujours été totalement
clair qu’on parle les deux langues dans notre entreprise.
Pour moi, les Français n’ont jamais été des étrangers. Et ce fut
aussi une chance d’être ici, tout
près de la France. De ce fait, ici,
l’idée européenne est authentique. Et d’ailleurs le Français ne
se sent pas à l’étranger chez
nous. Il se sent en Europe, comme dans le jardin du voisin.
C’est un miroir de la politique
actuelle, porté par une famille », développe Roland
Mack. Du reste, la France a su
distinguer cet homme, récipiendaire de l’ordre du Mérite, de la
Légion d’honneur, nomination
due à Jacques Chirac, et des palmes académiques. Sans parler
d’innombrables distinctions allemandes et européennes.
teint peut-être une limite. Mais
on peut augmenter la durée de
leur séjour. Je pense que nous
allons passer de quatre millions
à six millions de visiteurs annuels d’ici quelques années.
Mais pour cela, il faut construire
des hôtels. Nous avons déjà dépensé plus de 200 millions
d’euros dans l’hôtellerie… Mais
ça vous donne la chance et la
possibilité de continuer à investir dans le parc ». Ces projets ne
sont jamais neutres. Ainsi le
dernier-né représente la création de 225 chambres dont 35
suites, 42 millions d’euros d’investissements et la création de
260 emplois.
« Je crois que la
qualité des produits
gérés par la bourse
est moins bonne. Je
préfère un beau parc
à un beau bilan »
« Je pense que nous
allons passer de
quatre millions à six
millions de visiteurs
annuels d’ici
quelques années »
Et il est vrai qu’à la différence
d’autres parcs de loisirs européens ou américains, les codes
de l'histoire que raconte Europa-Park ont un enracinement
historique et culturel imparable. Décors, féerie et paillettes
ont à Rust, paradoxalement, un
goût d’authenticité un peu plus
prononcé qu’ailleurs. Un autre
secret du succès de l’entreprise
familiale tient à son pragmatisme élevé au rang de loi. Pas de
concept fumeux ou de projet
hors sol entre Waldkirch et Rust.
« Nous avons toujours gardé les
deux pieds sur terre. Il faut savoir d’où on vient pour savoir où
on va », martèle le Badois. C’est
ce pragmatisme qui a amené le
groupe Mack à construire son
Roland Mack: «Mes maîtres-mots sont émotion, qualité et
innovation. Dans cet ordre.» PHOTOS DNA FRANCK DELHOMME
site pas à pas, ajoutant chaque
année une attraction, un hébergement, un aménagement. De
ce fait, Rust entretient en permanence l’intérêt des opérateurs de voyages, mais aussi des
simples visiteurs.
Pour des observateurs alsaciens
qui ont en tête le goût amer des
déboires du Bioscope, Rust mérite plus qu’un regard superficiel ou arrogant. « Nous n’avons
jamais eu un seul euro de subvention. En trente-huit ans, il
n’y a jamais eu de décroissance
de la fréquentation. La première
année, nous avons reçu
250OOO visiteurs, 600000 la
deuxième année et sept fois
plus aujourd’hui… », rappelle
Roland Mack. Compte tenu du
goulot d’étranglement des accès, Rust n’a-t-il pas atteint sa
limite ? La direction n’est pas
encore parvenue à se faire entendre, mais ne désespère pas
d’obtenir, un jour, un raccordement ferroviaire digne de ce
nom.
« En nombre de visiteurs, on at-
Héritiers de Franz, décédé en
2010, ses fils Jürgen et Roland
ont la chance de voir la relève
assurée par Thomas et Michael.
« Mes fils ont vu tout le développement du parc, ils ont grandi
avec lui. Ils ont une très bonne
relation avec cette entreprise et
ils ont beaucoup parlé avec leur
grand-père. »
À 62 ans, Roland Mack a la satisfaction de voir l’aventure se
poursuivre. Mais si on lui parle
de financement, de deuxième
parc ailleurs dans le monde une question que tout le monde
lui pose - ou pire encore, de la
bourse, il éclate de rire : « Nous
voulons combiner le parc et la
fabrication. Nous ne voulons
pas lâcher ce concept : 20 % de
notre chiffre d’affaires vient de
la production de manège. Grandir nécessiterait des financements, d’aller en bourse… Et je
serais un piètre PDG ! Je travaille à l’émotion et pour la satisfaction de nos hôtes. Je ne
veux pas jongler avec l’argent.
Je suis convaincu que la qualité
des produits gérés par la bourse
est moins bonne. Je préfère un
beau parc à un beau bilan. »
On peut être assez sûr que le
bilan, sur lequel la famille reste
discrète, est plus que présentable : « Nous délivrons bien plus
que la concurrence grâce au
parc, qui est notre vitrine. Mes
maîtres-mots de manager sont :
émotion, qualité, innovation…
Dans cet ordre. »
ANTOINE LATHAM
R
Q Dernière parution dans cette
série créée à l’occasion des
soixante ans de l’Adira : Rodolphe
Lanzi le 26 juin.