La construction clé sur porte, un héritage d
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La construction clé sur porte, un héritage d
4 DOSSIER SEMAINE DU 21 AU 27 MAI 2015 LIBRE IMMO La construction clé sur porte, À ses détracteurs, qui lui reprochent parfois d’être moins qualitative, la construction clé sur porte peut faire valoir ses origines historiques et se vanter d’avoir traversé les âges avec succès. Dossier Baptiste Erpicum AUJOURD’HUI, LES MAISONS dites “clé sur porte” poussent comme des champignons, à l’ombre des villes, en banlieue ou à la campagne. Il s’agit géné ralement d’habitations unifamiliales, d’allure tra ditionnelle, réalisées par des entreprises telles que TPalm, Thomas&Piron, Etienne Piron, Maisons Baijot, Matexi, etc. Ces sociétés proposent à leurs clients un catalo gue de constructions modulables selon les envies et les besoins des futurs propriétaires. “C’est comme le prêtàporter dans la confection textile, cela convient à tout le monde, mais pas parfaitement, et, le cas échéant, il faut faire certaines retouches”, com mente Marianne Puttemans, professeur d’histoire de l’architecture à l’ULB. Les maisons prédétermi nées selon le type d’usager s’opposent ainsi aux maisons dessinées et réalisées sur mesure. “En ef fet, les architectes de ce type d’habitations vont à la rencontre de chaque client pour comprendre ses be soins particuliers et tenter d’y répondre le mieux pos sible”, poursuit Marianne Puttemans. Un souci d’économie La construction clé sur porte a fait ses preuves au fil du temps. Son héritage remonte au milieu du XIXe siècle, quand les architectes ont commencé à utiliser des éléments produits en série. “En Belgi que, et en particulier dans les grandes villes, les entre preneurs construisaient des maisons ‘entre mitoyen’, c’estàdire jointives et composées de pièces en enfi lade, explique Marurizio Cohen, architecte chargé de cours à l’ULB et l’ULg. Les modèles typologiques étaient assez conventionnels et répétitifs, mais il était possible de choisir le ‘style’ de la façade sur catalogue. Cela explique notamment la variété des façades de cette époque, dont certaines étaient Art Nouveau. Leur nombre est d’ailleurs plus important que celui des bâtiments entièrement Art Nouveau. Puis, après la Seconde Guerre mondiale, le phénomène s’est dé placé sur d’autres typologies, comme les maisons iso lées à 4 façades, inscrites dans des lotissements, et les immeubles à appartements, construits par des socié tés privées (Etrimo, Amelinckx, etc.).” Marianne Puttemans revient elle aussi sur ces éléments d’architecture produits en grande quan tité. “Cela a commencé par concerner tout ce qui était en fer forgé, en fonte, en acier, mais aussi en verre. On retrouvait ces éléments dans des catalo gues, un peu comme aujourd’hui on feuillette les pa Épinglé Acte de naissance à Saint-Gilles, en 1900, ou à peu près. L’architecte belge Ernest Blérot y a construit au début du siècle passé un ensemble de 14 maisons de style Art Nouveau le long de la rue Vanderschrick. Ce faisant, il a appliqué invariablement les mêmes “recettes” pour composer ces habitations. Il a ainsi limité les coûts de construction. “Mais, précise Marianne Puttemans, professeur d’histoire de l’architecture à l’ULB, Blérot a veillé aussi à ce que ces maisons ne soient pas identiques les unes aux autres. Il fait en sorte que les habitants puissent se sentir chez eux, parce qu’ils ont une maison qui leur ressemble.” Comme on peut le lire sur le site Internet de la Ville de Bruxelles, “la composition générale [des habitations sises le long de l’avenue Vanderschrick] combine à la fois unité et individualité : les maisons, de même gabarit, se différencient toutes entre elles. Chaque façade porte la signature de l’architecte, suivie du millésime. Certaines sont en briques claires, d’autres en pierre blanche; toutes sont abondamment rehaussées de pierre bleue. Une même grammaire formelle se décline d’une élévation à l’autre : soubassement légèrement incurvé, baies à arc repris dans un arc plus vaste ménageant des tables rentrantes, pleins de travée rentrants, fenêtres à mince encadrement en creux, bandeaux de pierre bleue scandant horizontalement la composition, corniche en bois sur minces modillons ouvragés, châssis et portes largement ajourées, à petitsbois souples parfois garnis de vitraux à motifs floraux”. © MONUMENTS & SITES – BRUXELLES La construction clé sur porte est née ges de La Redoute ou des 3 Suisses pour y choisir des vêtements. Cela simplifiait très fort la vie des futurs propriétaires, qui pouvaient faire leur choix au sein d’une large gamme de prix. Ils déterminaient ainsi la taille de leur fenêtre, le type de châssis, la rampe d’es calier, les balustres… Et réalisaient, ce faisant, des éco nomies dans leur budget, avec éventuellement à la clé la construction d’un bâtiment plus grand.” Aujourd’hui encore, les futurs propriétaires re courent souvent à des éléments produits en série pour réduire le coût de leur habitation. “Ils ne se contentent plus seulement de les commander en par courant les pages de magazines spécialisés, mais se déplacent pour les choisir sur base d’un assortiment présenté dans les showrooms de fabricants et autres décorateurs. Et ce, à l’image des Facq, Velux, Brico et consorts, ou bien carrément des cuisines et salles de bain achetées tout équipées chez Ikea, par exemple. Dès lors, les architectes construisent l’habitation en fonction de ces éléments choisis, ce qui laisse peutêtre moins de place à leur créativité, regrettait, pour ne ci ter que lui, un ancien professeur de La Cambre, Yvan Nuthaels, qui témoignait d’une certaine nostalgie de l’architecture artisanale face à l’architecture indus trielle”, dit Marianne Puttemans. Depuis la fin de la guerre, certaines entreprises de construction poussent même la logique indus trielle encore plus loin, en proposant des maisons entièrement préfabriquées avec des variations vo lumétriques et un choix de composants, tels que les planchers, les fenêtres et l’ossature.