L`avenir selon Google : si vous n`êtes pas connecté, vous êtes suspect

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L`avenir selon Google : si vous n`êtes pas connecté, vous êtes suspect
État du Monde, État d'Être
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L’avenir selon Google : si vous n’êtes pas connecté, vous
êtes suspect
(Source : Rue 89)
Cyberguerre, fin de la vie privée : dans un livre, deux pontes de Google promettent une
apocalypse dont seuls les géants de la technologie pourront nous sauver.
C’est un livre de technophiles, et pas des moindres puisque l’un d’eux est patron de Google ;
et pourtant, il nous annonce un avenir à faire frémir.
Le livre qui vient de sortir aux Etats-Unis, « The New Digital Age » (« Le Nouvel Age
numérique », pas encore traduit en français), a deux auteurs de poids :
Eric Schmidt, 56 ans, pendant dix ans le PDG de Google et depuis deux ans son
président exécutif ;
Jared Cohen, de 25 ans son cadet, un jeune premier intellectuel passé de la diplomatie
auprès de Hillary Clinton à la tête de Google Ideas, le think tank du géant américain.
On aurait pu s’attendre à un livre lénifiant, un peu comme les vidéos de promo des sociétés
technologiques, promettant un avenir radieux quand tous nos objets seront connectés, nos
voitures rouleront toutes seules, nos lunettes numériques seront nos yeux...
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Cette dimension y figure, évidemment, accompagnant la prophétie selon laquelle cinq milliards
d’individus vont se joindre dans les prochaines années aux deux milliards actuels, dans un
monde numérique quasiment global, jusqu’à ses marges chaotiques.
Mais Schmidt et Cohen, l’industriel et le diplomate, se livrent à un exercice de prospective
passionnant qui porte aussi sur « la face sombre de l’innovation », qu’il s’agisse de l’individu
et de son identité numérique, des Etats, de la guerre, du terrorisme, des révolutions
citoyennes...
Assange et Kissinger
Les deux auteurs, qui ont rencontré dans leur quête de trois ans aussi bien Julian Assange et
sa galaxie WikiLeaks dans son refuge londonien, que Henry Kissinger, le vieux cynique de la
realpolitik, mettent en avant une « inévitabilité » des tendances qu’ils annoncent. Et restent
optimistes pour un avenir pourtant sacrément parsemé de dangers.
Qu’on en juge. Les deux auteurs annoncent la fin de la vie privée et de l’anonymat à l’ère
numérique, avec l’apparition de « la première génération d’êtres humains à avoir un dossier
indélébile ».
Tous les débats qui ont déjà lieu à propos de Facebook et de la protection des données seront
dépassés : il faudra assumer des « profils officiels » vérifiés pour avoir un accès complet.
Accepter que toute son histoire soit stockée dans un « cloud » et donc susceptible d’être vu par
tous ceux qui disposeront du savoir-faire suffisant.
De fait, recommandent-ils, les parents de l’avenir devront avoir avec leurs enfants « une
discussion sur la vie privée et la sécurité, avant de parler de la vie sexuelle »...
Les « gens cachés »
Pire, le refus de se plier à cette ère du tout-connecté sera suspect aux yeux des
autorités, tous régimes confondus :
Un gouvernement pourra suspecter que les personnes qui choisiront de rester
totalement à l’extérieur ont quelque chose à cacher et sont donc plus susceptibles de
violer la loi. Les gouvernements, par précaution antiterroriste, pourront faire un fichier
des “gens cachés”. [...]
Vous pourrez même être soumis à des nouvelles règles strictes incluant des contrôles
plus rigoureux dans les aéroports et même des restrictions de voyage.
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Commentaire :
Cela nous rappelle inévitablement l'affaire Tarnac où la psychopathe Michèlle Alliot-Marie avait déclaré :
Ils ont adopté la méthode de la clandestinité, assure la ministre. Ils n’utilisent jamais de
téléphones portables et résident dans des endroits où il est très difficile à la police de mener des
inquisitions sans se faire repérer. Ils se sont arrangés pour avoir, dans le village de Tarnac, des
relations amicales avec les gens qui pouvaient les prévenir de la présence d’étrangers.
Eric Schmidt et Jared Cohen estiment que cette évolution est inévitable et évoquent même les
systèmes de surveillance à la « Minority Report », le film de Spielberg. Mais ils appellent les
citoyens/internautes à se battre pour défendre leur droit à la vie privée numérique, et
demandent :
Qui sera le plus fort, les citoyens ou l’Etat ?
Ne pas sous-estimer le risque de cyberguerre
Même scénario noir pour la guerre de l’ère numérique, avec cet avertissement :
Ceux qui sous-estiment la menace de la cyberguerre le feront à leurs dépens.
Ils font partie de cette école qui pense qu’il y aura un jour un « Pearl Harbor » de la
cyberguerre, avec des éléments de terrorisme classique, et en donnent même le scénario digne
des films catastrophe d’Hollywood.
Commentaire :
Anonymous a été créé exactement pour cela. Un Pearl Harbor ou un 11 septembre numérique avec un
nouvel ennemi et tous les peuples suspects.
Première étape, une attaque sur le contrôle aérien provoquera des collisions d’avions. Au
même moment, trois bombes introduites aux Etats-Unis à partir du Canada exploseront
simultanément à New York, Chicago et San Francisco. Et une cyberattaque paralysera les
secours tandis qu’un virus s’attaquera aux installations industrielles, fermant notamment les
systèmes de refroidissement des centrales nucléaires...
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Les auteurs nous rassurent à moitié : il serait incroyablement difficile de monter ce type
d’attaque à cette ampleur. Mais ils ajoutent :
Un certain type d’attaques coordonnées physiques et cyber est inévitable.
Et le pire, comme toujours avec la cyberguerre : les Etats ne sauront pas avec certitude d’où
vient l’agression, d’un Etat, d’un groupe d’Etats, ou d’organisations terroristes connues ou
inconnues...
La Chine a droit, de ce point de vue, à de très nombreuses références hostiles dans le livre,
comme nous l’avions déjà pointé, et les auteurs pronostiquent même une « révolution » dans
l’avenir, provoquée par des citoyens connectés et révoltés.
Google peut sauver le monde
Que veulent nous dire Eric Schmidt et Jared Cohen ? Le message apparaît progressivement à
travers le livre, et surtout dans la conclusion. Car les grands absents de ce livre, ce sont Google
et les autres géants de la technologie américaine, dont il n’est que peu question.
Dans leur conclusion, les auteurs nous expliquent qu’en fait, les sociétés de technologie sont
les mieux placées pour sauver le monde.
Ils font valoir que 52% des habitants de cette planète ont moins de 30 ans et, dans leur grande
majorité, vivent dans des zones où les opportunités économiques sont faibles. Ils sont les
premiers candidats à la radicalisation que suscitera, selon eux, l’accès au monde connecté
dans les prochaines années.
Il faudra donc parler à ces jeunes et leur offrir des opportunités que permet la technologie pour
les détourner de la radicalité qui menace. Schmidt et Cohen prônent, pour y parvenir, des
« partenariats public-privé », et ajoutent :
Les entreprises de technologie sont les mieux placées pour mener cet effort
internationalement.
Le monde vu par Google est donc relativement simple : la technologie va nous faire entrer dans
une époque pleine de menaces pour l’individu, pour les sociétés, pour les Etats. Et seul le
savoir-faire de ceux qui maîtrisent la technologie peut nous permettre d’éviter les catastrophes.
CQFD.
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