AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 31 MARS 2016 Le Tribunal

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AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 31 MARS 2016 Le Tribunal
KBF/KF/AE
REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN
--------------RG N° 4828/2015
-------JUGEMENT CONTRADICTOIRE
ET DE DEFAUT
du 31/03/2016
-----------Affaire :
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 31 MARS 2016
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique
ordinaire du jeudi trente et un mars de l’an deux mil seize tenue
au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient :
1- Madame AIE Apo Monique
2- Monsieur AIE Akichy André
3- Monsieur AIE Otchan Charles
4- Madame AIE Cho Lucie Georgette
épouse BIATCHON
5- Monsieur AIE Yapi Clément
6- Monsieur AIE Léonard Yves Désiré
(SCPA IMBOUA-KOUAO-TELLA)
Contre
Docteur François KOMOIN, Président du Tribunal ;
Madame ESSOH Millie Blanche épouse ABANET, Messieurs
KACOU BREDOUMOU Florent, N’GUESSAN Gilbert, DICOH
Balamine, SILUE Daoda et ALLAH-KOUAME Jean Marie,
Assesseurs ;
Avec l’assistance de Maître KOUTOU A. Gertrude épouse
GNOU, Greffier ;
1- La Société L2A REAL ESTATES SA
2- Monsieur AIE Jean-Marie
3- Monsieur AIE Léon Stéphane
4- Monsieur AIE Achi Sylvestre
5- Madame AIE Chi Cocoa Marguerite
Marie-Léonie épouse MOUNE
(Me BOHOUSSOU Henri)
---------------DECISION :
---Défaut à l’égard de Monsieur AIE Jean Marie
----Contradictoire à l’égard des autres défendeurs
---Rejette le moyen d’irrecevabilité de l’action ;
Reçoit Madame AIE Apo Monique, Monsieur
AIE Akichy André, Monsieur AIE Otchan
Charles, Madame AIE Cho Lucie Marie
Georgette, Messieurs AIE Yapi Clément et AIE
Léonard Yves Désiré en leur action ;
Les y dit bien fondés ;
Annule les assemblées générales constitutives
de la société L2A REAL ESTATES en date du
29 septembre 2014 ;
Condamne les défendeurs aux dépens.
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre :
1- MADAME AIE APO MONIQUE, née le 21 août 1946 à
Abidjan Treichville, retraitée de nationalité ivoirienne, domiciliée
à Abidjan Riviera Bonoumin, cel. : 03.01.36.36 ;
2- MONSIEUR AIE AKICHY ANDRE, né le 15 décembre 1948 à
Abidjan Treichville, retraité, de nationalité ivoirienne, domicilié à
Abidjan Riviera Bonoumin, cel. : 05.60.99.33 ;
3- MONSIEUR AIE OTCHAN CHARLES, né le 14 juin 1951 à
Abidjan Treichville, Expert-comptable, de nationalité ivoirienne,
domicilié à Abidjan Riviera Bonoumin, cel. : 07.07.13.41 ;
4- MADAME AIE CHO LUCIE GEORGETTE EPOUSE
BIATCHON, née le 14 août 1953 à Abidjan Treichville,
Couturière, de nationalité ivoirienne, domicilié à Abidjan Riviera
Bonoumin, cel. : 01.02.64.05 ;
5- MONSIEUR AIE YAPI CLEMENT, né le 22 novembre 1959 à
Man, Directeur de société, de nationalité ivoirienne, domicilié à
Abidjan Riviera Bonoumin, cel. : 02.00.90.90 ;
6- MONSIEUR AIE LEONARD YVES DESIRE, né 2 mai 1962 à
Abidjan Plateau, Gérant de société, de nationalité ivoirienne,
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domicilié à Abidjan Riviera Bonoumin, cel. : 01.00.12.82 ;
Demandeurs ayant pour conseil, la SCPA IMBOUA-KOUAOTELLE, Avocats près la Cour d’Appel d’Abidjan ;
d’une part ;
Et
1- LA SOCIETE L2A REAL ESTATES SA, Société Anonyme
avec Conseil d’Administration au capital social de 300.000.000
de F CFA, dont le siège social est à Cocody Ambassades,
Avenue Jacques AKA, Villa Médecine, 08 BP 118 Abidjan 08,
représentée aux fins des présentes par son Directeur Général,
Madame AIE Chi Cocoa Marguerite épouse MOUNE, de
nationalité ivoirienne, demeurant au siège de ladite société, en
ses bureaux ;
2- MONSIEUR AIE JEAN-MARIE, né le 7 janvier 1964 à
Abidjan, Gérant de société, de nationalité ivoirienne, domicilié à
Abidjan Cocody Riviera III, cel. : 01.04.88.88, pris en sa qualité
de Président du conseil d’administration de la société L2A REAL
ESTATES SA, en ses bureaux ;
3- MONSIEUR AIE LEON STEPHANE, déclarant être né en
1974, de nationalité ivoirienne, domicilié à Abidjan Cocody
Riviera Bonoumin ;
4- MONSIEUR AIE ACHI SYLVESTRE, né le 13 décembre
1967 à Abidjan, domicilié à Abidjan Cocody Riviera Bonoumin ;
5- MADAME AIE CHI COCOA MARGUERITE MARIE-LEONIE
EPOUSE MOUNE, juriste née le 16 octobre 1957 à Man,
Directrice de société, de nationalité ivoirienne, domiciliée à
Abidjan Cocody Riviera III les Coteaux ;
Demanderesse ayant pour conseil, Maître Francis KOUAME
KOFFI, Avocat près la Cour d’Appel d’Abidjan ;
D’autre part ;
Enrôlée pour l’audience du 24 décembre 2015, l’affaire a été
appelée et renvoyée au 31 décembre 2015 pour la tentative de
conciliation ;
Après plusieurs renvois, le tribunal ayant constaté la non
conciliation des parties a ordonné une instruction confiée au
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juge ESSO Millie Blanche épouse ABANET et renvoyé la cause
à l’audience publique du 3 mars 2016 ;
Cette mise en état a fait l’objet d’une ordonnance de clôture N°
4828/15 du 29 février 2016 ;
A la date de renvoi, l’affaire a été mise en délibéré pour le 31
mars 2016 ;
Advenue cette audience, le Tribunal a vidé son délibéré ainsi
qu’il suit :
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties en leurs moyens et prétentions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES
PARTIES
Par exploit d’huissier en date du 04 décembre 2015, Madame
AIE Apo Monique, Monsieur AIE Akichy André, Monsieur
AIE Otchan Charles, Madame AIE Cho Lucie Marie
Georgette et Monsieur AIE Yapi Clément ont assigné la
société L2A REAL ESTATES, Monsieur AIE Jean-Marie,
Monsieur AIE Léon Stéphane, Monsieur AIE Achi Sylvestre
et Madame AIE Chi Cocoa Marguerite Marie-Léonie épouse
MOUNE à comparaître le 22 janvier 2016 devant le Tribunal de
Commerce de ce siège à l’effet de s’entendre :
-
constater que l'assemblée générale constitutive de la
société L2A REAL ESTATES du 29 septembre 2014 a
été organisée et tenue en violation des dispositions des
articles 404, 412, 406 et 45 alinéa 2 de l'Acte Uniforme
relatif au droit des sociétés commerciales et du
Groupement d'intérêt économique ;
-
annuler en conséquence purement et simplement les
délibérations issues de ladite assemblée générale ;
-
condamner aux dépens.
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Au soutien de leur action, les demandeurs exposent que suite
au décès de leur père en 1993, les dix héritiers de celui-ci sont
demeurés dans l'indivision avec la volonté commune, pour
honorer la mémoire de leur père, de ne pas liquider le
patrimoine successoral ;
Que pour leur permettre d'optimiser leur patrimoine commun et
raffermir les liens de solidarité qui les unissent, ils ont lors de la
réunion familiale qui s'est tenue le 3 février 2013, émis le vœu
de créer une société commerciale ;
Qu'ils ont souhaité que Monsieur AIE Jean Marie, leur frère
aîné, soit chargé d'approfondir la question, préparer les projets
d'actes et leur fasse retour de ses diligences afin qu'ils
délibèrent sur l'idée d'aller plus avant dans la formation puis la
constitution de la société ;
Qu’à leur grande surprise, alors même qu'ils s'attendaient à ce
que la démarche ci-avant décrite soit observée, ils apprennent
de façon incidente, courant janvier 2015, à l'occasion d'une
instance initiée contre la société BIO BOURSE, détentrice du
portefeuille titre de la succession, qu'une société anonyme avait
été créée en vue d'assurer la gestion de leur patrimoine
commun ;
Qu'ainsi à cette structure aurait été dévolue la totalité du
patrimoine commun ;
Qu’ils ont souhaité par divers courriers que les documents de
cette société leur soient transmis afin qu'ils s'assurent de la
réalité de leur engagement ;
Que les dirigeants de cette société ont multiplié les artifices et
autres ruses pour se délier de leurs obligations ;
Que las de toutes ces manœuvres, ils n'ont eu d'autre choix que
de saisir le juge des référés afin qu'il fasse injonction à ces
dirigeants sociaux de leur transmettre tous les documents en
lien avec la constitution de la société ;
Qu'en réaction à cette initiative judiciaire, Monsieur AIE Jean
Marie et Madame Monnet, agissant en qualité de dirigeants
sociaux de la société L2A REAL ESTATES, ont saisi à leur tour
le Juge des référés afin qu'il prenne à leur avantage diverses
mesures de sauvegarde ;
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Qu'au cours des débats, ceux-ci ont produit le procès-verbal de
l'assemblée générale constitutive de la société L2A REAL
ESTATES SA tenue le 29 septembre 2014 ;
Qu'aux termes des dispositions des articles 404 et 412 de l’Acte
Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d’intérêt économique, la tenue de toute assemblée
générale constitutive doit être précédée, à peine de nullité, d'une
convocation de l'ensemble des actionnaires de la société ;
Qu'en l'espèce, une assemblée générale constitutive de la
société L2A REAL ESTATES s'est tenue le 29 septembre 2014
à l'insu et en l'absence de six (06) des actionnaires de ladite
société, ni présents ni représentés ;
Que l’absence de ces actionnaires se justifie par le fait
qu'aucune convocation ne leur a été adressée relativement à la
tenue de cette assemblée générale constitutive ;
Que cette attitude des fondateurs de la société L2A REAL
ESTATES est constitutive d'une violation flagrante des
dispositions de l'article 404 de l’Acte Uniforme précité ;
Qu'il convient en conséquence de prononcer la nullité des
délibérations de l'assemblée générale constitutive du 29
septembre 2014 en application des dispositions de l’article 412
du même Acte Uniforme ;
Qu'il ressort des dispositions de l'article 406 de l'Acte Uniforme
relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d'intérêt économique que l'assemblée statue à la majorité des
voix des membres présents ou représentés ;
Qu’en l’espèce, le procès-verbal des délibérations précise bien
que les membres présents à l'assemblée générale constitutive
étaient au nombre de douze (12) ;
Qu'il aurait fallu neuf (09) voix au moins pour statuer sur les
différents points inscrits à l’ordre du jour de la réunion;
Que toutefois, comme il a été susmentionné, et contrairement
aux termes du procès-verbal de l'assemblée générale, six (06)
actionnaires de la société L2A REAL ESTATES étaient absents
et non représentés à ladite assemblée parce que n'ayant pas
été convoqués, de sorte que leurs voix ne pouvaient être prises
en compte ;
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Qu'en conséquence, la majorité des deux tiers dont se prévaut
la direction de la société n'a jamais été atteinte ;
Qu'il s'agit bien là d'une violation des dispositions de l’article 406
susvisé ;
Que la violation de cette disposition impérative expose les
délibérations à la nullité conformément à l’article 242 de l'Acte
Uniforme précité ;
Que l'article 45 alinéa 2 de l’Acte Uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique
dispose que « Les apports en nature sont libérés intégralement
lors de la constitution de la société.» ;
Qu'en l'espèce, la résolution n°3 relative à la constatation de la
souscription et de la libération de la moitié du capital social de la
société précise que « l'assemblée, après avoir entendu lecture
par le Président de la convention d'apport en date du 22
septembre 2014 entre les héritiers indivisaires de Feu AIE
Léonard et la Société L2A Real Estates (en constitution),
constate (i) que les trente mille (30.000) actions devant
composer le capital social de la société ont été intégralement
souscrites et (ii) qu'elles sont libérées de la moitié de leur valeur,
soit pour un montant de cent cinquante millions (150.000.000) F
CFA. » ;
Qu'il ressort clairement de cette résolution que les apports en
nature de la société L2A REAL ESTATES n'ont pas été libérés
intégralement ;
Qu'à la vérité, les apports en nature évoqués dans les
résolutions de l'assemblée générale constitutive susvisées sont
des apports fictifs qui ne reflètent nullement la réalité ;
Que pire, la convention d'apport du 22 septembre 2014 n'est
que pure invention ; elle n'a jamais été conclue par les héritiers
indivisaires de feu AIE Léonard et la société L2A REAL
ESTATES ;
Que la résolution n°3 ci-dessus visée qui viole les dispositions
impératives de l'alinéa 2 de l'article 45 de l’Acte Uniforme précité
encourt la nullité pure et simple ;
Que les défendeurs soulèvent l'irrecevabilité de l'action au motif
que l'assemblée générale, qui aurait acté la constitution de
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ladite société, aurait été organisée le 4 mai 2013 et non le 29
septembre 2014 ;
Que de la sorte, en sollicitant l'annulation des délibérations de
l'assemblée générale constitutive du 29 septembre 2014, les
demandeurs auraient orienté leur action contre la mauvaise
assemblée générale constitutive ;
Que l'article 101 de l'Acte Uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique dispose :
« Toute société est constituée à compter de la signature de ses
statuts ou, le cas échéant, de leur adoption par l'assemblée
générale constitutive. » ;
Qu'il s'infère de cette disposition que le processus de
constitution des sociétés commerciales est très formaliste en ce
que chaque étape est acté par la signature et/ ou l'adoption
d'actes précis ;
Qu'ainsi, une société commerciale est réputée constituée quand
ses statuts ont été signés et/ ou adoptés en assemblée générale
par l'ensemble des associés ou des actionnaires, selon la forme
juridique de celle-ci ;
Que cette exigence est encore plus forte pour les sociétés
anonymes dont le processus de constitution connaît quelques
spécificités en raison de l'étape préalable de la formation du
capital social, qui implique le recours à des règles particulières
lorsque la formation de ce capital requiert des apports en
nature ;
Que pour tenir compte de ces spécificités, l’article 400 de l’Acte
uniforme précité énonce que « Les statuts doivent
nécessairement contenir l'évaluation de chaque apport en
nature et la description des avantages particuliers stipulés ainsi
que le cas échéant leur évaluation ... » ;
Qu’aux termes de l’article 411 du même Acte Uniforme « Le
procès-verbal de l'Assemblée générale indique la date et le lieu
de la réunion, la nature de l'assemblée, le mode de convocation,
l'ordre du jour, les conditions de quorum et de vote de chaque
résolution et le résultat des votes pour chacune d'elles.
Il est signé, selon le cas, par le président de séance et par un
autre associé ou par l'associé unique et il est archivé au
siège social, avec la feuille de présence et ses annexes.
Il indique, le cas échéant, l'acceptation de leurs fonctions par les
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membres du conseil d'administration ... » ;
Qu'au regard de ce qui précède, les défendeurs doivent produire
les statuts signés le 04 mai 2013, ainsi que le procès-verbal de
l'assemblée générale constitutive qui serait tenue à cette date ;
Qu'à défaut, ils n'auront qu'à se résoudre à accepter l'évidence,
à savoir que la société L2A REAL ESTATES SA a été
irrégulièrement constituée en violation des articles 404, 412, 406
et 45 alinéa 2 de l'Acte Uniforme relatif aux sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique et ce, sur
la base des documents sociaux que ses dirigeants sociaux ont
transmis aux demandeurs dans le cadre de la procédure de
référé, lesquels ont servi à l'immatriculation de ladite société au
Greffe du siège du Tribunal de ce siège ;
Que dans l'attente de la production de ces pièces, l'ensemble
des moyens articulés par les défendeurs sur la base de celles-ci
est inopérant et doit être rejeté ;
Que les défendeurs invoquent l’irrecevabilité de l'action de
Madame AIE Apo Monique au motif que les résolutions de
l'assemblée générale du 29 septembre 2014 pourraient être
régularisées ;
Que pour mémoire, le Tribunal de commerce a accordé dès
l'entame de cette procédure aux parties de pouvoir se parler et
se concilier éventuellement ;
Que cependant, les récriminations étant suffisamment ancrées
dans les cœurs et les esprits, cette énième tentative de
rapprochement a tout naturellement échoué ;
Que ces récriminations ont pour fait générateur unique les
conditions troubles dans lesquelles la société L2A REAL
ESTATES a été constituée puis immatriculée ;
Que les défendeurs, les plus jeunes de la fratrie, ont procédé à
l'organisation et à la tenue d'une assemblée générale
constitutive à l'insu de six (06) des actionnaires de ladite
société ;
Que de la sorte, l'affectio societatis a manifestement fait défaut
dans le cadre de la constitution de la société L2A REAL
ESTATES ;
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Qu'évidemment, cela constitue une entrave à la coopération
entre les actionnaires ;
Qu'en effet, l'affectio societatis désigne l'élément intentionnel
indispensable à la formation du lien qui unit les personnes qui
ont décidé de participer au capital d'une société, qu'elle soit
civile ou commerciale ;
Qu'elle est nécessaire à la formation du contrat de société dont
elle est le critère d'identification et doit exister aussi longtemps
que dure la société ;
Qu'en l'absence de l’affectio societatis, la société L2A REAL
ESTATES SA n'a pas pu exister juridiquement, que sa
constitution a été fortement viciée par les multiples violations
des dispositions de l'Acte Uniforme ;
Que dès lors, les défendeurs ne sauraient parvenir à la
régularisation des délibérations d'une société dans laquelle les
actionnaires pressentis n'ont jamais eu de vue commune, faute
de les avoir clairement exprimé à l'occasion de la constitution de
la société, et faute de se faire mutuellement confiance ;
Que les résolutions de l'assemblée générale du 29 septembre
2014 ne peuvent donc faire l’objet d’une quelconque
régularisation ;
En réplique, la société L2A REAL ESTATES SA fait valoir que
les héritiers de feu AIE Léonard au nombre de douze ont
entendu créer une société en vue d’y loger les biens
successoraux pour une meilleure gestion en vue de les faire
fructifier ;
Que dans ces conditions s’est tenue une assemblée générale
en date du 04 mai 2013 pour la création de la société L2A REAL
ESTATES SA ;
Qu’à la suite de cette assemblée, plusieurs réunions du conseil
d’administration ont eu lieu avec des procès-verbaux produits au
dossier ;
Que cependant, pour permettre d’insérer le rapport du
commissaire aux apports, le conseil de la société a conseillé de
procéder comme il a été fait par une assemblée générale qui se
serait tenue le 20 septembre 2014 ;
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Que la société ayant alors une libération d’une seule partie du
capital social a décidé de procéder à l’évaluation du patrimoine
immobilier à l’effet de l’intégrer comme cela avait été convenu
dès le 04 mai 2013 à l’assemblée générale constitutive ;
Que l’expert désigné a commencé son travail mais n’a pu
achever sa mission en raison de ce que certains actionnaires
qui occupent certaines maisons dudit patrimoine successoral ont
refusé de procéder à leur évaluation ;
Qu'il est établi que l'assemblée constitutive de la société L2A
REAL ESTATES SA est celle qui s'est tenue le 4 mai 2014 ;
Que ladite assemblée générale constitutive est régulière parce
que conforme aux règles de constitution des sociétés, mais
mieux, comme la liste de présence peut l'attester, tous les
actionnaires étaient présents ;
Qu’en ce qui concerne l’assemblée générale du 29 septembre
2014, elle est abusivement intitulée assemblée constitutive,
étant donné que cette dernière assemblée générale avait
uniquement pour but de procéder à l'approbation du rapport sur
les apports ;
Que la société entend saisir le Président du Tribunal à l’effet de
convoquer une assemblée générale pour couvrir la nullité
conformément aux dispositions de l’article 247 de l’Acte
Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d’intérêt économique ;
Que dans ces conditions, la demande en nullité de l’assemblée
générale constitutive du 29 septembre 2014 deviendrait sans
objet et irrecevable ;
Que par ailleurs, le défaut d'affectio societatis évoqué par les
demandeurs pour les besoins de la cause, n'a pas non plus lieu
d'être dès l'instant où ils ont assisté à l'assemblée générale
constitutive du 04 mai 2014 et à plusieurs réunions de conseil
d'administration, toute chose qui sans nul doute établit la réalité
dudit affectio societatis ;
Que partant, c'est à mauvais droit que la demande de nullité est
présentée à la juridiction de céans ;
Qu’il y a lieu de la rejeter ;
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SUR CE
En la forme
Sur le caractère de la décision
Monsieur AIE Jean Marie n’a pas été assignée à personne. Il n’a
pas comparu et n’a pas été représenté. Il n’a fait valoir à aucun
moment de la procédure ses moyens. Il convient de statuer par
défaut à son égard. En revanche, les autres défendeurs ont eu
connaissance de la procédure, ont conclu et fait valoir leurs
moyens. Il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard ;
Sur le taux de ressort
L’article 8 de la loi organique n°2014-424 du 14 juillet 2014
portant création, organisation et fonctionnement des juridictions
de commerce dispose que : « Les Tribunaux de commerce
statuent :
- en premier ressort, sur toutes les demandes dont l’intérêt du
litige est supérieur à un milliard de francs CFA ou est
indéterminé ;
- en premier et dernier ressort, sur toutes les demandes dont
l’intérêt du litige n’excède pas un milliard de francs CFA. » ;
En l’espèce, l’intérêt est indéterminé puisque la demande porte
sur l’annulation d’une assemblée générale d’une société
commerciale. Il convient par conséquent de statuer en premier
ressort conformément aux dispositions de l’article 8 susénoncé.
Sur la recevabilité de l’action
La société L2A REAL ESTATES indique qu’elle entend saisir le
Président du Tribunal de ce siège à l’effet de convoquer une
assemblée générale dont l’annulation est demandée pour
couvrir la nullité conformément aux dispositions de l’article 247
de l’Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et
du groupement d’intérêt économique. Elle conclut que l’action
en nullité de l’assemblée générale constitutive du 29 septembre
2014 deviendrait sans objet et irrecevable.
Le Tribunal relève qu’aucun élément du dossier n’établit qu’une
action en régularisation de l’assemblée générale litigieuse a été
engagée avant l’introduction de la présente procédure.
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Dans ces conditions, la défenderesse ne peut se fonder sur une
action future pour invoquer l’irrecevabilité de la demande en
nullité. Il y a lieu de rejeter ce moyen et déclarer les demandeurs
recevables en leur action.
Sur la demande en annulation de l’assemblée générale du
29 septembre 2014
Il ressort des pièces du dossier notamment des écritures de la
société L2A REAL ESTATES que l’assemblée générale
constitutive du 29 septembre 2014 a pour objet l'approbation du
rapport sur les apports.
Il est constant que lors de l’assemblée constitutive du 29
septembre 2014, tous les actionnaires n’ont pas été convoqués,
en violation des dispositions de l'article 404 de l’Acte Uniforme
relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique.
Il y a lieu dans ces conditions de prononcer la nullité des
délibérations de l'assemblée générale constitutive du 29
septembre 2014 en application des dispositions de l’article 412
relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique ;
Sur les dépens
Les défendeurs succombent en l’instance. Il convient de les
condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par défaut à l’égard de Monsieur AIE
Jean Marie, contradictoirement à l’égard des autres défendeurs
et en premier ressort ;
Rejette le moyen d’irrecevabilité de l’action ;
Reçoit Madame AIE Apo Monique, Monsieur AIE Akichy André,
Monsieur AIE Otchan Charles, Madame AIE Cho Lucie Marie
Georgette, Messieurs AIE Yapi Clément et AIE Léonard Yves
Désiré en leur action ;
Les y dit bien fondés ;
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Annule les assemblées générales constitutives de la société
L2A REAL ESTATES en date du 29 septembre 2014 ;
Condamne les défendeurs aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an
que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. / .
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