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Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (décembre 2012) - 17ème année
L’ÉDITO
N
e pas s’arrêter, aller de l’avant, créer, innover, proposer
sont les maîtres mots qui nous animeront en cette année
2013. Nous avons décidé que la morosité ambiante ne
devait pas nous atteindre. Nos projets sont nombreux et
variés. Ainsi par exemple, notre nouveau site internet est à
votre disposition depuis le début de l’année.
■ Du
côté de
votre notaire
■ Du
côté du parlement
P. 3
P. 3-4
■ Point
P. 4-5
de vue
A propos de l’arrêt
« Commune de Port-Vendres »
■ Le
point sur
La vente par lots ou
vente à la découpe
■ Flash
Fiscal
P. 6-7
P. 8-9
■ Stratégie
P. 10-12
■ Le
P. 13-17
patrimoniale
La dotation à l’enfant
commun par un bien
personnel d’un des époux
dossier
L’mmobilier universitaire
■ Du
côté des tribunaux
- Stratégie patrimoniale
- Droit des affaires
- Copropriété
- Droit fiscal
- Urbanisme
et Aménagement
- Immobilier institutionnel
et Promotion immobilière
- Droit public
- Environnement
■ Conjoncture
Nous sommes également sur le « pied de guerre » avec nos clients pour être prêts
à faire toute proposition dans le cadre du futur projet de loi Duflot. Nous
réfléchissons notamment à la question du démembrement du droit de propriété
sous forme de bail emphytéotique afin de faciliter l’accession à la propriété, et aux
évolutions nécessaires au droit de la copropriété afin de permettre aux grands
ensembles immobiliers urbains de pouvoir mieux évoluer.
Enfin, un des grands chantiers qui va nous animer en 2013 est l’amélioration de la
qualité juridique au service de chacun d’entre vous. Ceci passe par l’évolution de
notre bulletin, le développement de la transversalité des équipes de l’Etude dans
le domaine de l’immobilier, l’accent sur la réflexion juridique, la mise en place d’un
partage des connaissances performant et unique.
P. 22-24
Cette énergie pour 2013, nous vous la souhaitons également. L’ensemble de
l’Etude se joint à moi pour vous souhaiter une très belle et heureuse année.
P. 24-27
P. 27-28
P. 29
Michèle Raunet
:
- Les Indices
- L’Immobilier parisien
Office certifié ISO
par
P. 18-19
P. 19-20
P. 20
P. 21
Par ailleurs, une jeune chinoise Cécile Yang, ayant fait ses études à l’Université
Internationale des Etudes de Shanghai vient d’intégrer l’équipe de droit patrimonial.
Avec un profit biculturel, sa mission est de développer la clientèle chinoise.
P. 31
P. 32
Directeur de la publication : Maître Michèle RAUNET
Ont participé à ce Bulletin : Sylvie Alonso, Célia Allity, Isabelle Arnold, Nathalie Athimon, Malory Baron,
Adila Berramdane, Sophie Bolela, Marie Choplin-Texier, Bruno Cheuvreux, Louis Coquillette, Victoire Crépy,
Thierry Croizé, Ségolène de La Rivière, Dorothée Delpeyroux, Maël De Champsavin, Baptiste Delloye, Malicia Donniou,
Fanny Dugert, Pierre-Yves Fauconnier, Murielle Gamet, Romain Leblond- Masson, Marie-Anne Le Floch, Marie-Anna
Lejeune, Raphaël Leonetti, Coralie Leveneur, Carole Lvovschi-Blanc, Catherina Makosso, Thibault Martini, Mathilde
Maurey, Mathilde Perinet-Marquet, Rémy Nerrière, Alix d'Ocagne, Cathérina Makosso, Raoul Prely, Albane Rey-Jouvin,
Michèle Raunet, Frédéric Recq, Isabelle Teboul, Antoine Urvoy, Fleur-Marie Voyron, Jeanne Yvon.
Le Bulletin de Cheuvreux N° 4 - 2012 est édité par l’Etude Cheuvreux
Impression : La Renaissance Lochoise - 1 ter rue de la Tour 37601 Loches
Conception graphique : L.C création - 01 42 60 04 50
ISSN : N°1764-3015 - Dépot légal : Quatrième trimestre 2012
Le Bulletin de Cheuvreux© est protégé par les règles de la propriété littéraire et artistique.
Toute reproduction est strictement interdite sauf accord exprès de l’Etude CHEUVREUX.
N° QUAL / 2003 / 20002
ETUDE CHEUVREUX : 77, boulevard Malesherbes - 75008 Paris - Tél : (33) 01 44 90 14 14 - Fax : (33) 01 44 90 14 15
Le Bulletin sur internet : http://www.cheuvreux-associes.fr
u côté de l’Étude
Michèle Raunet et Carole Lvovschi-Blanc sont les auteurs d’un article paru
dans le numéro de septembre d’Opérations Immobilières ayant pour titre
« 10 questions sur l’étude d’impact et l’enquête publique réformée ». L’article
fait un point complet sur cette mesure phare du Grenelle de l’environnement
entrée en vigueur le 1er juin 2012.
Murielle Gamet est co auteur d’un article publié à l’AJ droit de la famille
(janvier 2013) intitulé « Les garanties des prestations compensatoires et
leurs voies d'exécution ».
Xavier Boutiron est quant à lui intervenu à l’occasion d’un article intitulé :
« transmettre son patrimoine sans se démunir » (Le Particulier oct 2012).
Michèle Raunet a été interrogée par Les Echos à l’occasion de la parution d’un
article intitulé « Ces villes qui imposent leur loi aux promoteurs immobiliers »
(Les Echos 20 oct. 2012). Elle s’est notamment exprimée sur les conditions
de validité des clauses anti spéculatives. Elle a également fait part
de son avis sur la technique du macrolot dans un article du Moniteur
des travaux public du 23 novembre 2012 intitulé « Macrolot : le bon outil
pour faire la ville ? ».
Rémy Nerrière a animé une formation organisée par l’AFAC le
30 novembre 2012 sur le thème de la « vente par lots et en bloc : 7 années
d’application de la loi aurillac ».
Malicia Donniou est intervenue lors d’une formation organisée par EFE le
4 décembre 2012 sur le thème du lotissement et des divisions foncières.
u côté du parlement
A NOTER AU JOURNAL OFFICIEL
DPE et plan de travaux d'économies d'énergie pour les copropriétés
Le décret n° 2012-1342 du 3 décembre 2012 vient mettre en œuvre les
dispositions insérées par la loi Grenelle 2 à l'article L. 134-4-1 du Code
de la construction et de l'habitation et dans la loi du 10 juillet 1965 fixant
le statut de la copropriété. Il précise les modalités d’inscription à l’ordre du
jour, de vote et de réalisation du diagnostic de performance énergétique
(DPE) ou de l’audit de performance énergétique, pour les copropriétés de
50 lots ou plus, pour les bâtiments équipés d’une installation collective de
chauffage ou de refroidissement. Pour tous les bâtiments en copropriété, le
décret fixe les modalités de réalisation et le contenu du plan de travaux
d’économies d’énergie. Pour rappel, un diagnostic de performance énergétique (DPE) doit être réalisé pour les bâtiments équipés d’une installation
collective de chauffage ou de refroidissement dans un délai de cinq ans, à
compter du 1er janvier 2012 (CCH, art. L. 134-4-1). Au vu des résultats du
DPE ou de l’audit énergétique, les copropriétaires peuvent décider de
mener des travaux d’économie d’énergie. Si un plan de travaux d’économies
d’énergie est adopté, les travaux planifiés doivent faire l’objet d’un vote
distinct dans les conditions prévues au g de l’article 25 de la loi du 10 juillet
1965 (CCH, art. R. 138-1).
Nouvel arrêté amiante
L’arrêté précisant les conditions de mesurage des niveaux d’empoussièrement,
de contrôle du respect de la valeur limite d’exposition professionnelle et
d’accréditation des organismes procédant à ces mesurages a été publié au
Journal officiel du 23 août 2012 (arrêté du 14 août 2012). Sont concernés
tous les organismes chargés du mesurage et du contrôle de l’empoussièrement au cours d’opérations pendant lesquelles les travailleurs sont susceptibles d’être exposés à l’amiante. Ces modifications ont pour but de respecter
les dispositions communautaires et sont applicables depuis le 24 août 2012,
à l’exception des dispositions relatives aux conditions d’accréditation des
organismes qui entreront en vigueur le 1er juillet 2013.
Règles parasismiques : le calendrier reporté
Face aux difficultés rencontrées par les professionnels pour se mettre en
conformité avec la nouvelle réglementation parasismique, un arrêté du
25 octobre 2012 prolonge jusqu’au 1er janvier 2014 la période transitoire
durant laquelle l’ancienne réglementation, dite « PS92 », peut continuer à
s’appliquer. Rappelons que deux décrets et un arrêté du 22 octobre 2010 ont
mis en place de nouvelles règles de classification et de construction parasismique pour les bâtiments de la classe dite « à risque normal », conformément
à l’Eurocode 8, norme issue d’un consensus européen et relative au calcul
des structures pour leur résistance au séisme. Désormais, 21 000 communes
sont concernées par le risque sismique.
De plus, depuis le 1er janvier 2013, les diagnostiqueurs élaborent leurs
diagnostics de performance énergétique (DPE) selon la nouvelle méthode de
calcul 3CL-DPE que les pouvoirs publics viennent de valider par un arrêté du
17 octobre 2012. Avec cette nouvelle mouture qui multiplie notamment les
points de contrôle, le calcul des consommations conventionnelles des logements devrait être plus réaliste et, par conséquent, les DPE plus transparents
vis-à-vis des particuliers.
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
ICPE de traitement de déchets
Les activités de traitement de déchets font l’objet d’un classement administratif afin de prendre en compte les risques sanitaires et environnementaux
2
inhérents à ce type d’opérations. La nomenclature ICPE classe ces activités
en fonction de la nature des déchets et de leur dangerosité, et non de leur
provenance. L’arrêté du 23 juillet 2012 (JO du 25 octobre 2012) vient
clarifier, mais surtout simplifier, plusieurs arrêtés de prescriptions générales
applicables aux installations de traitement de déchets soumises à déclaration, notamment les installations de lavage de fûts, de traitement biologique
des déchets, de tri, transit, regroupement de déchets non dangereux.
L’essentiel des dispositions est entré en vigueur le 26 octobre 2012.
l'ex-époux débiteur de sa dette, lorsqu'elle est versée en exécution
d'une décision de justice (RM Moyne-Bressand n° 83591, JO débats AN du
29 août 2006).
Rép Min n° 01615 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le
JO Sénat du 23 août 2012
Mandat d’agent immobilier et Code des marchés publics
Dans le cas d'une commune souhaitant procéder à la vente de terrains communaux en confiant cette mission à un agent immobilier à charge pour celuici de se rémunérer sur le prix qui sera payé par l'acquéreur et qui lui sera
versé par le notaire rédacteur des actes de vente, le choix d'un agent immobilier pour conduire une telle mission relève de la législation des marchés
publics. Le caractère onéreux du contrat résulte dans cette hypothèse d'un
abandon, par la collectivité, d'une partie de la recette liée à la vente du terrain. Les contrats portant sur de tels services doivent par conséquent être
passés selon les procédures de droit commun prévues par le code des marchés publics.
Le bénéfice du Dalo étendu
Un droit à un logement décent et indépendant opposable à l’État a été
institué par la loi du 5 mars 2007. Le décret n° 2012-1208 du 30 octobre
2012 élargit le champ d’application du Dalo aux ressortissants étrangers. Les
ressortissants de l’Union européenne (UE) peuvent toujours prétendre au
bénéfice de ce droit qui est également étendu aux membres de leur famille,
ainsi qu’aux ressortissants d’autres États titulaires d’un titre de séjour ou
d’un visa. Un arrêté viendra préciser la liste des titres de séjour admis pour
les personnes de nationalité étrangères. Enfin, les références à une période de
résidence en France ainsi que le caractère d’une mention de la carte de
séjour ont été supprimés.
QUESTION PRIORITAIRE DE
CONSTITUTIONNALITE
Redevance d’archéologie préventive revalorisée
La redevance d’archéologie préventive doit être versée pour les travaux affectant le sous-sol, soumis à autorisation ou déclaration préalable ou donnant
lieu à une étude d’impact. Cette redevance connaît une légère revalorisation
depuis le 1er janvier 2013, passant de 0,51 €/m2 à 0,53 €/m2 de la
surface au sol des travaux (arrêté du 18 octobre 2012). De nouvelles règles
de calcul sont entrées en vigueur au 1er mars 2012, à l’instar des règles applicables à la taxe d’aménagement sur laquelle elle est désormais intégralement adossée. La loi de finances pour 2013 prévoit d’apporter à cette
redevance des réajustements destinés à en augmenter les ressources.
Constitutionnalité de l’article L. 13-8 du Code de l’expropriation pour
cause d’utilité publique – oui
L’article L.13-8 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique
prévoit que « Lorsqu’il y a litige sur le fond du droit ou sur la qualité des réclamants et toutes les fois qu’il s’élève des difficultés étrangères à la fixation du
montant de l’indemnité et à l’application des articles 19. 22 et 23 ci-dessus,
le juge règle l’indemnité indépendamment de ces litiges et difficultés sur
lesquels les parties sont renvoyées à se pourvoir devant qui de droit ». Le juge
judiciaire doit ainsi fixer autant d’indemnités alternatives qu’il existe
d’hypothèses envisagées. Le Conseil Constitutionnel relève pour justifier
l’absence de violation des articles 15 et 17 de la Déclaration de 1789
garantissant respectivement le droit à un recours le fait que la fixation de
l’indemnité qui doit recouvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et
certain causé par l’expropriation, est prise au terme d’une procédure contradictoire susceptible de recours, et que les parties sont loisibles de saisir à
nouveau le juge de l’expropriation si la décision rendue par le juge compétent ne correspond pas à l’une des hypothèses envisagées par le juge de
l’expropriation, effectif et le droit de propriété. La constitutionnalité de
l’article L.13-8 du code l’expropriation est confirmée. Décision n° 2012-275
QPC du 28 septembre 2012
Deux décisions récentes du Conseil constitutionnel traduisent une intégration toujours poussée du principe de participation du public à l’élaboration
des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement.
Le BOFIP-Impôt remplace le BOI
L’administration fiscale a entrepris depuis plus de deux ans une vaste
opération de refonte de sa documentation administrative fiscale. Ce projet
vient d’aboutir à la mise en ligne d’une base documentaire accessible sur
Internet depuis le 12 septembre 2012, dénommée « Bulletin officiel des
finances publiques – Impôts » (BOFIP), et qui se substitue au Bulletin officiel
des impôts. Désormais, seuls les commentaires publiés sur cette base seront
opposables à l’administration en application du deuxième alinéa de l’article
L80A du livre des procédures fiscales (décret n° 2012-1025 du 6 septembre
2012 et instruction du 7 septembre 2012, BOI 13 A-2-12.
REPONSES MINISTERIELLES
■ Plus-values immobilières - opérations imposables
Procédure de classement et de déclassement de sites – Articles L.341-1
et L.341-13 du code de l’environnement - constitutionnalité – non
Cette QPC fut initiée à l’occasion d’un recours exercé à l’encontre d’une
décision de refus de déclassement partiel d’un site naturel classé. Les procédures d’inscription, de classement et de déclassement des sites et monuments naturels sont encadrées par les articles L.431-1, L.431-3 et L.431-13 du
Code de l’environnement. Il était évoqué à l’appui du recours la méconnaissance de la liberté d’entreprendre, du droit à un recours juridictionnel
effectif, du droit de propriété et enfin des articles 6 et 7 de la Charte de
l’environnement. Seule est retenue par le Conseil constitutionnel, la violation
de l’article 7 de la Charte lequel pose la règle de la compétence du législateur pour l’encadrement des conditions de participations du public à
l’élaboration des décisions présentant une incidence sur l’environnement
Concernant la taxation des plus-values immobilières, le ministre du logement
a précisé que onstituent notamment des cessions à titre onéreux susceptibles
de faire l’objet d’une plus-value imposable :
– les échanges : l'échange d'un bien, même sans soulte, doit être considéré
comme une vente suivie d'un achat. La cession réalisée par chaque coéchangiste entre donc dans le champ de l'impôt sur le revenu afférent aux
plus-values. Toutefois, certaines opérations d'échange sont exonérées.
– l’attribution d'un bien propre de l'ex-époux débiteur, en paiement d'une
prestation compensatoire en capital, dès lors que celle-ci a pour effet
de transférer la propriété du bien à l'ex-époux attributaire et de libérer
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DE CHEUVREUX
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mais consacre plus largement un droit à l’information du public. Aux termes
de l’article L.431-3 relative à la procédure de classement, les intéressés sont
invités à présenter leurs observations selon une procédure fixée en Conseil
d’Etat. Le Conseil Constitutionnel relève que la référence à la notion
« d’intéressé » et la faculté de « présenter des observations » ne justifient pas
du respect du principe de participation du « public » à « l’élaboration des
décisions ». L’article L.431-13 relative à la procédure de déclassement ne
prévoit purement et simplement aucune modalité de participation du public.
Sur ces motifs, le Conseil constitutionnel abroge les dispositions précitées,
cette décision prenant effet le 1er septembre 2013. A noter que la constitutionnalité de l’article L.341-1 du Code de l’environnement relative à la
procédure d’inscription des sites et monuments naturels, dont il découle un
régime de contrôle d’une moindre portée est confirmée.
Décision n°2012-283 QPC du 23 novembre 2012
s’applique en l’absence d’autre disposition particulière du Code de l’environnement ou de la législation applicable à la décision considérée. Le Conseil
constitutionnel abroge l’article L.120-1 du Code de l’environnement au motif
que cette disposition ne prévoit aucune modalité de participation du public
s’agissant de l’élaboration des décisions non réglementaire. L’article L.120-1
constituant un ensemble indivisible, c’est l’intégralité de la disposition
qui est censurée. Cette déclaration d’inconstitutionnalité prendra effet au
1er septembre 2013, les décisions prises en application de l’article L.102-1
intervenues avant cette date ne pourront être attaquées. En revanche la
constitutionnalité de l’article L.581-9 alinéa 2 du Code de l’environnement,
qui soumet l’installation des bâches publicitaires de dimension exceptionnelle à un régime d’autorisation, est confirmée. Etait invoquée la violation
de l’article 7 de la Charte, la procédure d’autorisation ne prévoyant pas la
participation du public. Le moyen est rejeté au motif que de telles décisions
ne présentent pas d’incidence significative sur l’environnement au sens de
la Charte. Il était en outre invoqué la violation de la liberté d’expression
(Article 17 de la Déclaration de 1789) ; le moyen est également rejeté,
au motif et sous la réserve interprétative que ce régime d’autorisation ne
constitue pas le fondement d’un contrôle préalable du contenu du message
publicitaire.
Décision n°2011-282 QPC du 23 octobre 2012
Constitutionnalité des articles L.120-1 et de L.581-9 al.2 du Code de
l’environnement – abrogation de l’article L.120-1.
L’article 7 de la Charte de l’environnement est venu consacrer le principe
de participation du public. L’article L.120-1 du Code de l’environnement
détermine les conditions générales d’application de ce principe aux décisions
réglementaires de l’Etat et de ses établissements publics, présentant une
incidence directe et significative sur l’environnement. L’article L.120-1
oint de vue
« DROIT PUBLIC »
L’application dans le temps de la
définition du domaine public posée
à l’article L. 2111-1 du CG3P
Conseil d’Etat, 3 octobre 2012, n°353915, Commune de Port-Vendres
Michèle RAUNET et Raphaël LEONETTI
Groupe Droit Public Immobilier
Outre l’intérêt qu’elle présente sur la question de l’étendue des pouvoirs du
propriétaire d’une dépendance du domaine public qui est le siège d’une
activité de service public ne relevant pas de ses compétences, la décision du
Conseil d’Etat mérite une attention particulière en ce qu’elle met un terme
au débat qui a pu naître entre plusieurs cours administratives d’appel sur
l’application dans le temps de la nouvelle définition générale du domaine
public immobilier retenue par l’article L. 2111-1 du CG3P (1).
Le Conseil d’Etat a été saisi en cassation, dans le cadre d’une procédure de
référé suspension, à propos de la légalité de la décision d’une commune
de ne pas renouveler un « bail » au profit d’une association chargée d’une
mission de service public. Dans un arrêt du 3 octobre 2012, il confirme les
décisions des juges de premier ressort et d’appel en considérant que « le
moyen tiré de ce que le conseil municipal n’avait pas pris en considération la
nature des activités qui s’exerçaient dans cet immeuble était propre, en l’état
de l’instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de la délibération
attaquée ».
En effet, la première question qui était posée au juge portait sur la compétence de la juridiction administrative s’agissant d’un litige relatif à un
(1) Pour une application de cette définition aux situations d’affectation antérieure au CG3P : CAA Nancy, 26 novembre 2009, Communauté de communes de la station classées des Rousses, n°09NC00188 ; CAA Marseille,
10 avril 2012, Société TDF, n°09MA04616 ; contre une telle solution : CAA Lyon, 29 avril 2008, Société Boucheries André, n°07LY02216, AJDA 2008, p. 2338, note J. Andréani ; CAA Paris, 31 juillet 2012, C.A.I.P.,
n°12PA00616.
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DE CHEUVREUX
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En deuxième lieu, il faut bien comprendre qu’une telle exigence de déclassement exprès ne saurait s’imposer à des immeubles qui ne sont jamais
entrés dans le domaine public et, à cet égard, s’agissant des immeubles à
usage de bureaux des personnes publiques, on rappellera que l’ordonnance
n°2004-825 du 19 août 2004 et désormais l’alinéa 2 de l’article L. 2211-1
du CG3P n’avaient pas pour objet d’emporter un déclassement de ces
immeubles dans la mesure où ils n’avaient jamais été clairement incorporés
au domaine public. Les dispositions de ces textes ont donc simplement eu
pour effet, afin notamment d’éviter tout débat sur le statut domanial des
immeubles à usage de bureaux, de préciser que ces immeubles, dès lors
qu’ils ne forment pas un ensemble indivisible avec un immeuble appartenant au domaine public, relèvent du domaine privé par détermination de la
loi (sur cette question, v. É. Fatôme, « Le statut des immeubles à usage de
bureaux des personnes publiques après l'ordonnance du 19 août 2004 »,
AJDA 2005, p. 584).
immeuble affecté à un service public antérieurement à l’entrée en vigueur
du CG3P, étant ici précisé que les litiges relatifs aux occupations du
domaine public relèvent de l’ordre juridictionnel administratif (cf. article
L. 2331-1 du CG3P).
Comme le rappelle le Conseil d’Etat « avant l’entrée en vigueur, le 1er juillet
2006, du Code général de la propriété des personnes publiques, l’appartenance au domaine public d’un bien était, sauf si ce bien était directement
affecté à l’usage du public, subordonnée à la double condition que le bien
ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du
service public auquel il était destiné » (2). La conception extensive de la
condition d’aménagement spécial retenue par le juge avait conduit à une
sorte de présomption d’appartenance au domaine public de tous les
immeubles des personnes publiques dès lors qu’ils étaient affectés à un
service public (v. not. les conclusions du président Labetoulle sur l’arrêt
d’Assemblée du 3 mars 1978, AJDA 1978, p. 584, avec la jurisprudence
pertinente). C’est pour remédier à cette « hypertrophie » du domaine public,
et pour permettre un resserrement du périmètre de la domanialité publique
à un noyau dur de biens, que les auteurs du CG3P ont substitué à la
condition de l’aménagement spécial celle, plus stricte, de l’aménagement
indispensable (cf. article L. 2111-1 du CG3P).
En troisième et dernier lieu, il convient de préciser que l’effet utile de la
nouvelle définition du domaine public n’est pas neutralisé par la décision
du Conseil d’Etat. En effet, ce n’est pas parce que la condition de l’aménagement indispensable, lorsqu’elle n’est pas remplie par un immeuble entré
dans le domaine public par application de la définition jurisprudentielle
antérieure au code, n’a pas pour effet de l’en faire sortir automatiquement,
que l’autorité administrative n’est pas en droit de donner toute sa portée au
nouveau critère réducteur en prononçant expressément le déclassement de
la dépendance en cause. Dans ses conclusions sur cette affaire, Bertrand
Dacosta écrit en ce sens « que la personne publique concernée, si elle estime
que la condition de l’aménagement indispensable n’est pas remplie, peut,
pour l’avenir, procéder à un déclassement. Nous n’ignorons pas que l’article
L. 2141-1 du code ne mentionne le déclassement que dans le cas où le bien
ne serait plus affecté au service public (ou à l’usage direct du public). Mais
nous ne voyons pas d’obstacle insurmontable à ce que, par la voie
prétorienne, vous permettiez un déclassement du bien lorsque l’autre
condition fixée par la loi [celle de l’aménagement indispensable] n’est pas
remplie ».
Dès lors, en l’espèce, pour savoir si l’immeuble en cause, affecté au service
public géré par l’association départementale, n’était pas « manifestement
insusceptible d’appartenir au domaine public », le Conseil d’Etat devait se
prononcer sur la question de l’application de la nouvelle définition du
domaine public à des immeubles affectés à un service public antérieurement à l’entrée en vigueur du CG3P. Ce qui revenait à se demander, pour le
dire autrement, si des immeubles ainsi affectés à un service public et qui
sont entrés dans le domaine public avant l’entrée en vigueur du CG3P en
ont été automatiquement déclassés du fait de la nouvelle définition retenue
par ce code dès lors qu’ils ne font pas l’objet d’un aménagement indispensable.
Dans son arrêt du 3 octobre 2012, le Conseil d’Etat considère « qu’en
l’absence de toute disposition en ce sens, l’entrée en vigueur de ce code n’a
pu, par elle-même, avoir pour effet d’entraîner le déclassement de dépendances qui appartenaient antérieurement au domaine public et qui, depuis
le 1er juillet 2006, ne rempliraient plus les conditions désormais fixées par
son article L. 2111-1 ».
Reste que les personnes publiques devront faire preuve de prudence
dans l’application de la condition de l’aménagement indispensable dans
l’attente d’une jurisprudence suffisamment claire sur le sens qu’il convient
de donner à cette notion.
Cette solution appelle trois séries d’observations.
En premier lieu, force est de constater que le Conseil d’Etat refuse de considérer qu’un déclassement du domaine public puisse être opéré en l’absence
de disposition se prononçant expressément en ce sens (3). Or, si cette règle
était clairement établie à propos des décisions des autorités administratives,
il était permis de douter de son application s’agissant du législateur (v. sur
ce point les conclusions de Bertrand Dacosta sur l’arrêt commenté).
(2) On relèvera que dans l’arrêt commenté le Conseil d’Etat considère que l’affectation à l’usage direct du public ne nécessitait pas, pour emporter incorporation d’un bien au domaine public, que celui-ci ait fait l’objet
d’un aménagement spécial, ce qui semble conforme à la volonté des rédacteurs du code mais n’en demeure pas moins en contradiction avec l’interprétation que certains auteurs avaient pu avoir de la jurisprudence
antérieure à l’entrée en vigueur du CGPPP. Christine Maugüé et Gilles Bachelier indiquaient notamment que « Pour les biens qui sont affectés à l'usage direct du public toute référence explicite à l'aménagement disparaît
(CE, 28 juin 1935, Marécar, Rec. p. 734). Pour autant il n'en résulte pas de modification fondamentale dans la mesure où le critère posé dans le code est celui d'une affectation à l'usage direct du public et où une
ouverture au public ne saurait se confondre avec une telle affectation » : « Genèse et présentation du code général de la propriété des personnes publiques », AJDA 2006, p. 1073.
(3) Il s’inscrit dans la droite ligne d’une décision antérieure à propos des dispositions législatives définissant le statut domanial du patrimoine immobilier de RFF : CE, 24 juin 2009, Sté centre parisien de recyclage, n°298960.
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
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e point sur
« Droit immobilier »
LA VENTE PAR LOTS
OU « VENTE A LA DECOUPE »
Nathalie ATHIMON
Groupe Immobilier
La vente par lots, ou vente à l’unité, plus communément appelée « vente à
la découpe », par opposition à la vente d’un immeuble entier, dite « vente
en bloc », consiste pour un propriétaire d’immeuble entier à diviser juridiquement tout ou partie de celui-ci aux termes d’un état descriptif de
division-règlement de copropriété en vue de vendre, appartement par
appartement, les lots issus de la division.
Les accords collectifs imposent aux vendeurs par lots d’un immeuble
comportant plus de dix logements, sauf lorsqu’il s’agit d’organismes d’habitation à loyer modéré, de personnes physiques ou de sociétés civiles
immobilières constituées exclusivement entre parents et alliés jusqu’au
quatrième degré inclus, le respect d’une procédure dont les principales
étapes sont les suivantes :
Cette pratique est le plus souvent utilisée par les institutionnels (banques,
compagnies d’assurance, mutuelles…) ou marchands de biens afin de
rentabiliser au mieux leur parc immobilier.
– la délivrance d’une information au maire de la commune ainsi qu’à
l’association de locataires, s’il en existe une, et ce dès que le bailleur a pris
la décision de mettre en vente l’immeuble,
– la tenue d’une réunion d’information des locataires, au cours de laquelle
le vendeur ou son mandataire doit notamment porter à la connaissance
des locataires les phases importantes de l’opération de vente et les droits
respectifs des locataires et propriétaires, les conditions de crédit du
moment, les prix moyens au mètre carré, les avantages notamment de
prix, accordés aux locataires en fonction de leur ancienneté dans les lieux
et la durée restant à courir de leur bail, les possibilités de relogement, les
dispositifs légaux et réglementaires destinés à protéger les locataires âgés
ou à faibles ressources,
– la production de diagnostics et bilans techniques portant sur les éléments
essentiels du bâti, les équipements communs et de sécurité susceptibles
d’entraîner des dépenses importantes pour les futurs copropriétaires dans
les années qui suivront la vente. Il s’agit en particulier du clos, du couvert,
de l’isolation thermique, des conduites et canalisations collectives, des
équipements de chauffage collectif, des ascenseurs, de la sécurité en
matière d’incendie. A ne pas confondre toutefois avec le diagnostic visé
par l’article L111-6-2 du code de la construction et de l’habitation avec
lequel ils peuvent se cumuler,
– l’envoi d’une lettre d’information individuelle contenant une information
personnalisée notamment quant au prix de vente et la décote éventuellement consentie,
– le respect d’un délai de trois mois entre la réception de cette lettre d’information individuelle et l’envoi des offres de vente visées par l’article 10
de la loi du 31 décembre 1975,
– le cas échéant la délivrance d’un congé avec offre de vente conformément
aux dispositions de l’article 15-II de la loi du 6 juillet 1989,
– une prorogation de plein droit des baux à raison d’un mois par année
d’ancienneté, dans la limite de trente mois, pour les locataires en place
depuis plus de six années,
– un renouvellement de plein droit, sous certaines conditions, des baux
consentis aux personnes âgées de plus de soixante-dix ans à l’expiration
de leur bail, aux personnes gravement malades ou invalides,
– une obligation de relogement des personnes à faibles revenus.
Alors que certains locataires y voient une opportunité de devenir propriétaires de leur logement à moindre coût, d’autres dont la situation financière
ne leur permet pas de se porter acquéreur de leur logement, y voient un
mode de spéculation immobilière les contraignant à acheter ou à partir à la
fin de leur bail, ce qui, compte tenu des difficultés de relogement, suscite de
vives critiques.
La vente « à la découpe » qui a déjà défrayé la chronique dans les années
1997-1998 donnant lieu à la signature des accords collectifs du 9 juin 1998
puis à ceux du 16 mars 2005, revient aujourd’hui sur le devant de la scène.
En effet, après l’abandon de la proposition de loi « visant à lutter contre la
pratique de la vente à la découpe » en instituant un permis de mise en
copropriété, notre nouvelle ministre du Logement, Madame Cécile Duflot,
promet pour le printemps prochain une réforme des ventes « à la découpe »
estimant « nécessaire d’encadrer, par modification législative, la possibilité
de mettre en copropriété et de congé-vente par le bailleur ».
En attendant ce nouveau texte, il semble opportun de faire un rapide point
sur l’actualité, notamment jurisprudentielle, de la vente par lots.
Les accords collectifs du 9 juin 1998 puis ceux du 16 mars 2005, sont venus
régir les ventes par lots, dès lors que celles-ci portent sur plus de dix
logements dans un même immeuble d’habitation. Les accords collectifs
imposent en effet au vendeur, une procédure stricte de mise en vente,
fondée sur un souci d’information et de protection des locataires en place.
Avant d’énumérer brièvement les différentes étapes de la mise en vente
imposées par les accords collectifs, rappelons que ces derniers se distinguent de la loi du 13 juin 2006 dite « Loi Aurillac » notamment en ce que
celle-ci, même si elle confère un droit de préemption aux locataires lorsque
le nouveau bailleur ne prend pas l’engagement de proroger les baux en
cours au jour de la vente pour une durée de six années, ne régit que la vente
en une seule fois d’un immeuble entier comportant plus de dix logements,
aussi appelée « vente en bloc ».
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référence relative aux congés pour vente qui figure dans l’intitulé de l’accord
n’en restreint pas la portée à ces seuls congés, car dans son préambule, il
stipule que : « les organisations participant à la négociation demandent que
l’accord soir étendu à tous les bailleurs mettant en vente plus de dix logements » En conséquence l’accord ne concerne par seulement la mise en
œuvre des congés pour vendre délivrés dans le cadre de l’application de la loi
du 6 juillet 1989, mais également la mise en œuvre des offres de vente
notifiées en vertu de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975 ».
La pratique notariale se devait donc d’être prudente et de conseiller au vendeur de plus de dix logements dans un même immeuble qui n’entendait pas
délivrer de congé pour vente, d’appliquer strictement la procédure de mise
en vente prévue par les accords collectifs.
Au regard des contraintes que les accords collectifs imposent aux vendeurs
d’immeuble par lots et des conséquences financières en résultant pour ces
derniers, doctrine et praticiens se sont posés bon nombre de questions
quant au champ d’application desdits accords, et notamment quant aux
caractéristiques des locaux à prendre en compte pour le calcul du seuil des
dix logements, quant au délai de mise en vente de ces logements et quant
à la notion même d’immeuble.
Les juges ont, au fil des années, lever ces incertitudes.
Une question demeurait toutefois, donnant lieu à des controverses
doctrinales et à des pratiques divergentes, celle du caractère obligatoire des
accords collectifs dès lors que le vendeur n’entendait délivrer aucun congé
pour vente.
Maître Philippe Pelletier (Defrénois 2011 n° 39207, p. 433) préconise dans
cette situation d’appliquer les accords collectifs sans toutefois y faire
référence, et ce afin de ne pas se placer volontairement et explicitement
dans le champ d’application desdits accords.
A s’en tenir au sens strict des accords du 16 mars 2005 d’ailleurs intitulés
« Congés pour vente par lots aux locataires dans les ensembles immobiliers
d’habitation », ainsi qu’à l’esprit ayant animé les rédacteurs de ces textes,
les accords collectifs ne devaient trouver à s’appliquer que lorsque le
propriétaire envisageait de délivrer au moins un congé pour vendre. Cette
théorie était renforcée par les dispositions de l’article 6 des accords qui
sanctionnent le non-respect des mesures visant à protéger les locataires en
place, par la nullité du congé pour vente.
Cette solution éviterait ainsi, selon lui, au vendeur de s’imposer des
contraintes auxquelles il ne devrait pas être soumis, notamment en ce qui
concerne l’établissement des diagnostics techniques de l’immeuble et pour
lesquels les juges font preuve d’une exigence redoutable.
La 3ème chambre civile de la Cour de cassation vient par un arrêt du 5 septembre 2012 ( Cass., 3ème civ., 5 sept. 2012, n° 11-17630, Flash Defrénois
n° 38, 2012) d’affirmer « que les accords collectifs du 9 juin 1998 rendus
obligatoires par le décret du 22 juillet 1999 ne concernaient pas seulement
la mise en œuvre des congés pour vendre, mais également la mise en œuvre
des offres de vente » et que par conséquent, les locataires ayant reçu une
offre de vente sur le fondement de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975
étaient fondés à se prévaloir des informations prévues par les accords, en
l’occurrence l’implication de l’association de locataires dans les modalités
d’établissement des diagnostics techniques, sans pour autant exiger que
ceux-ci n’aient reçu de congé pour vente.
C’est d’ailleurs la position retenue par le Tribunal d’Instance de Paris du
16ème arrondissement, dans un arrêt des 2 février et 6 avril 2010, qui avait
déclaré inapplicables de plein droit les accords collectifs des 9 juin 1998 et
16 mars 2005, en l’absence de congé-vente, précisant que « ces accords ont
pour objectif de protéger les locataires qui, à la suite d’un congé-vente sont
susceptibles de quitter les lieux à défaut d’acquisition » (TI Paris, 16ème ch.
2 février 2010, n° 11-09-001110 et jugement rectificatif : TI, 16ème ch., 6 avril
2010 n° 11-10-000258).
La doctrine était également sur ce point quasi unanime (C. Fénardon , JCPN
2007, n° 1134, JCPN n°20, n° 1194, C. Bosgiraud, JCPN 2003, n° 1559, Ph.
Pelletier Defrenois n° 04/04, p. 265).
La jurisprudence s’était, jusqu’ici, révélée en la matière très incertaine voire
contradictoire.
La 3ème chambre civile de la Cour de cassation semble donc poser le
principe de l’application des accords collectifs de location alors même
qu’aucun congé pour vente n’est délivré.
Certains se basent toutefois sur l’existence, en l’espèce, de congés pour
vente délivrés à d’autres locataires de l’immeuble et sur le fait que le
vendeur se soit volontairement soumis aux accords collectifs pour émettre
des doutes quant à la portée générale de cette décision.
Ainsi la 6ème chambre de la cour d’appel de Paris avait-elle décidé dans un
arrêt du 15 mars 2005 que l’accord collectif ne concernait pas exclusivement la mise en œuvre des congés pour vente délivrés en application de la
loi du 6 juillet 1989 mais également la mise en œuvre des offres de vente
notifiées en application de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975 (CA
Paris, 6ème ch., 15 mars 2005, JurisData n° 2005-266153 – Loyers et copr.
2005, comm. 134).
Il n’en reste pas moins, qu’au regard de cet arrêt, devront désormais être
associées à la procédure de mise en vente prévue par les accords collectifs,
toutes personnes susceptibles de se prévaloir d’une offre de vente prévue
par l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975 modifiée, sans qu’il y ait lieu
de rechercher si celles-ci pourraient ou non se voir délivrer un congé pour
vente conformément aux dispositions de l’article 15 II de la loi du 6 juillet
1989. Il convient donc d’assimilér aux locataires concernés par les accords,
les locataires titulaires d’un bail régi par la loi du 1er septembre 1948, les
occupants de bonne foi au sens de l’article 4 de ladite loi, les titulaires de
contrat de location meublée, etc.
La 3ème chambre de la même cour d’appel a ensuite dans un arrêt du
25 juin 2009 décidé qu’en l’absence de congé-vente, les règles spéciales
relatives à l’information et à la protection des locataires ne s’appliquaient
pas, avant d’affirmer le contraire dans un arrêt du 4 novembre 2010. (CA
Paris, Pôle 4, 3ème ch., 25 juin 2009, n° 07/05818, Administrer mars 2010,
p. 30.)
Dans ce dernier arrêt, la cour d’appel de Paris affirmait que : « les accords
collectifs du 9 juin 1998 rendus obligatoires par le décret du 22 juillet 1999
sont applicables même si seule une offre de vente sur le fondement de
l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975 a été notifiée. En effet la
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N° 04 - 2012 (Décembre)
La portée de cet arrêt étant encore incertaine, on ne peut qu’espérer que
la réforme annoncée par notre ministre du Logement vienne rapidement
clarifier la situation.
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- Flash Fiscal -
Flash Fiscal
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Flash Fiscal
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« L’insécurité juridique en Droit fiscal »
La sécurité juridique dont les contribuables
seraient en droit d’attendre une application
absolue en droit fiscal, le Conseil d’Etat l’ayant
érigée en principe général du droit dans l’arrêt
Ternon (CE. Ass. 26 octobre 2001, Ternon,
n° 197018, RJF 1/02 n° 81), fait parfois malheureusement défaut.
Cette insécurité juridique tient à la fois à la
complexité du système fiscal français, et à la fois
à son instabilité.
La compréhension par les contribuables des
articles contenus dans le Code général des
impôts (« CGI ») et des commentaires de l’administration demeure difficile si bien que le
système fiscal français apparaît plus comme un
« sac d’embrouilles » pour reprendre l’expression
des Professeurs Cozian et Gest à l’endroit de la
translucidité fiscale des sociétés de personnes.
Par ailleurs les textes fiscaux et la doctrine
administrative sont l’objet de modifications
régulières dont il est difficile de suivre
l’évolution.
L’actualité de ces dernières semaines tend à
démontrer l’insécurité juridique à laquelle les
entreprises et les particuliers doivent faire face
en droit fiscal à travers notamment la création
de la nouvelle base de données regroupant
l’ensemble de la doctrine administrative (I) et à
travers certaines dispositions contenues dans le
projet de loi de finances pour 2013 (II).
I/ Insécurité juridique et doctrine
administrative
Dans le cadre de sa modernisation et dans une
démarche s’inscrivant en faveur de la simplification du droit, l’administration fiscale a entrepris un travail colossal en regroupant l’intégralité de sa doctrine au sein d’une base unique et
consultable sur internet « Bulletin officiel des
finances publiques – Impôts » ou « BOFiP ».
A compter du 12 septembre 2012, seuls les
commentaires publiés au BOFiP sont opposables à l’administration au sens des dispositions de l’article L80A du Livre des procédures
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fiscales (« LPF »). La doctrine antérieure qui
n’aurait pas été reprise dans le BOFiP se trouve
rapportée par une instruction du même jour et
n’est par conséquent plus opposable. Toutefois
il ne s’agit pas d’une inopposabilité absolue
dans son principe. En effet il est précisé que la
doctrine ainsi rapportée demeure applicable à
des opérations ou à des contentieux nés avant
la mise en ligne de cette nouvelle base. Cette
survivance de l’ancienne doctrine est de nature
à assurer aux contribuables une sécurité juridique qui doit être relevée.
Cependant les omissions voire les erreurs qui
figurent au BOFiP imposent à l’administration
de les rectifier au plus vite sous peine de laisser
les contribuables et leurs conseils dans une
incertitude qui risque de mettre à mal l’objectif
annoncé de sécurité juridique. Afin de l’illustrer
on peut citer à titre d’exemple l’absence d’intégration au BOFiP de la réponse Bacquet et de
la documentation de base 7G-2432.
A/ L’absence de reprise de la réponse
Bacquet
L’absence d’intégration dans le BOFiP de la
réponse ministérielle Bacquet du 29 juin 2010
en matière de fiscalité successorale des
contrats d’assurance-vie non-dénoués laisse
certains contribuables dans l’expectative.
Pour rappel, la réponse Bacquet précise que la
valeur de rachat de contrats d’assurance-vie
souscrits avec des fonds communs fait partie
de l’actif de la communauté soumis aux droits
de succession dans les conditions de droit
commun (Rép. Bacquet, Assemblée Nationale,
29 juin 2010, n°26231).
En pratique cela revient à fiscaliser la moitié de
la valeur de rachat, qui correspond à la part
effectivement reçue par le conjoint survivant
du conjoint prédécédé.
S’agissant des droits acquittés par l’époux
survivant, ils seront nuls, puisque la loi Tépa du
25 août 2007 aménage une exonération de
principe des droits de succession au profit
du conjoint survivant.
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En revanche les autres héritiers du conjoint
prédécédé devront supporter des droits dont
l’assiette sera d’autant plus élevée que l’actif
successoral sera augmenté de la moitié de la
valeur du contrat d’assurance-vie.
En l’absence de reprise formelle de la réponse
Bacquet, la question se pose alors de savoir si
la valeur de rachat doit toujours être inscrite à
l’actif de la communauté lorsque le contrat
aura été souscrit à l’aide de fonds communs.
On l’aura compris, les conséquences fiscales
ne sont pas neutres tant du point de vue des
contribuables que de celui de l’administration
qui, assurément, sera amenée à prendre position sur cette question.
B/ L’absence de reprise de la documentation
de base 7G-2432
En principe les libéralités qui interviennent
entre conjoints divorcés sont soumises au tarif
applicable entre personnes non parentes.
Toutefois des libéralités auront pu être accordées pendant le mariage et non révoquées
suite au divorce. Tel est le cas des donations à
cause de mort. Dans cette hypothèse la DB 7G2432 dans son paragraphe 3 indique qu’il y a
lieu d’appliquer le tarif entre époux aux donations à cause de mort consenties par contrat de
mariage et aux donations éventuelles entre
époux consenties pendant le mariage et non
révoquées. Cette doctrine n’a malheureusement pas été reprise dans le BOFiP. Dès lors on
saisit tout l’intérêt que revêt l’application d’une
telle doctrine, dans la mesure où, depuis 2007,
les libéralités consenties entre époux ne sont
soumises à aucun droit. Il est légitimement permis de s’interroger sur le fait de savoir s’il s’agit
d’une omission volontaire de l’administration
ou si au contraire on est en présence d’une
simple erreur de sa part.
Dans la mesure où les modifications de l’article
265 du Code civil, posant une révocabilité de
plein droit de ces libéralités suite au divorce,
sont intervenues postérieurement à cette
doctrine les rédacteurs du BOFiP ont pu négliger
le fait que, par exception, certaines libéralités
accordées pour cause de mort pendant le
- Flash Fiscal -
Flash Fiscal
mariage pouvaient être maintenues par la
volonté expresse des parties suite à leur
divorce.
A travers ces deux exemples, on perçoit les
difficultés auxquelles sont confrontés les contribuables quant à l’application d’une doctrine
pourtant bien établie mais non reprise dans le
BOFiP.
conditions relatives à la nature de leur détention.
On perçoit d’ores et déjà les difficultés que
présente ce régime d’exception quant à ses
modalités d’application relativement à la
nature ou à la durée de détention des titres par
exemple.
Un des objectifs avoués étant de renforcer la
sécurité juridique tant des usagers que des
agents, il serait souhaitable que l’administration assouplisse sa position et admette que la
doctrine antérieure demeure opposable pour
l’avenir tant qu’elle n’aura pas été expressément dénoncée dans la rubriques « actualités »
du BOFiP.
Les plus-values réalisées par les autres contribuables seront finalement imposées au taux
forfaitaire de 24 % au lieu de 19 % pour les
gains réalisés en 2012 et soumises à la
progressivité de l'I.R. pour les gains réalisés
à partir du 1er janvier 2013. Ce revirement qui
pourrait apparaître comme une mesure de
clémence a tout de même pour conséquence
d’accroître la fiscalité de 5 points.
II / Insécurité juridique et loi fiscale
B/ Le nouveau régime des plus-values de
cessions immobilières des particuliers
A/ Le nouveau régime d’imposition des
plus-values sur valeurs mobilières et droits
sociaux des particuliers
Le régime général tel qu’il est défini aux
articles 150-0 A et suivants du CGI prévoit que
la plus-value est soumise au taux proportionnel
de 19% d’impôt sur le revenu auquel il
convient d’ajouter les prélèvements sociaux,
sous réserve que la cession n’entre pas dans le
champ des exonérations visées par les articles
précités.
Initialement l’article 6 du projet de loi de
finances pour 2013 (« PLF 2013 ») envisageait
de soumettre les plus-values sur valeurs mobilières et droits sociaux des particuliers au
barème progressif de l’impôt sur le revenu
(« I.R.») pour les cessions réalisées à compter du
1er janvier 2012.
Dans un second temps le gouvernement a
souhaité amender le projet initial afin d’opérer
une distinction en fonction de la qualité du
cédant et plus précisément en distinguant
entre les créateurs d’entreprise et les autres
contribuables.
Les premiers bénéficieront d’un régime dérogatoire prévoyant le maintien du taux forfaitaire
à 19% sous réserve de remplir certaines
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N° 04 - 2012 (Décembre)
Le régime général tel qu’il figurait à l’article
150 U du CGI soumettait indifféremment les
gains réalisés à l’occasion de la cession d’immeubles bâtis ou de terrains à bâtir au taux
proportionnel d’impôt sur le revenu de 19 %
auquel il convenait d’ajouter les prélèvements
sociaux.
Le PLF 2013 vise à instaurer une différence de
traitement entre les cessions d’immeubles et les
cessions de terrains à bâtir. Plus précisément
alors que le régime des plus-values de cessions
d’immeubles demeurerait inchangé, celui des
plus-values de cessions de terrains à bâtir se
trouverait profondément modifié. En outre les
cessions d’immeubles intervenant en 2013 se
verront appliquer un abattement supplémentaire de 20% sur la plus-value nette taxable.
L’application du nouveau dispositif suppose
de distinguer trois hypothèses pour chacune
desquelles il convient d’appliquer un régime
fiscal différent.
D’abord, pour les cessions de terrain à bâtir
ayant acquis date certaine avant le 1er janvier
2013 et intervenant avant le 1er janvier 2014 il
serait fait application du taux de 19 % et de
l’abattement pour durée de détention tel que
prévu depuis le 1er février 2012.
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-
Flash Fiscal
Ensuite pour les cessions de terrain à bâtir
ayant acquis date certaine après le 1er janvier
2013, il serait fait application du taux de 19 %.
En revanche l’abattement au titre de la durée
de détention serait supprimé.
Enfin, pour les cessions de terrain à bâtir intervenant au 1er janvier 2015, elles seraient
soumises au barème progressif de l’IR sans
abattement au titre de la durée de détention.
Ces deux exemples illustrent la complexité et
l’insécurité juridique dans laquelle se trouvent
les particuliers quant à la gestion de leur
patrimoine.
S’agissant du régime des plus-values de cessions
sur valeurs mobilières et droits sociaux, la
rétroactivité, et nécessairement l’imprévisibilité
qu’elle emporte, qui accompagne les modifications de ce régime entrainent un surcroit d’imposition que certains contribuables n’auront
sans doute pas provisionné.
S’agissant du régime des plus-values de cessions
immobilières, il convient d’établir une double
distinction. D’abord en fonction de la nature du
bien cédé selon qu’il s’agit d’un immeuble ou
d’un terrain à bâtir. Puis s’agissant d’un terrain
à bâtir, tantôt l’acte donnant date certaine à la
cession, tantôt la date de réalisation effective
de la cession détermine le régime fiscal applicable à cette cession.
Toute inflation présente un coût pour une
économie. L’inflation législative en droit fiscal
n’y fait pas exception. Le législateur devrait
constamment garder à l’esprit que le principe
de sécurité juridique est un gage de stabilité
propice aux investissements. Il devrait par
conséquent faire preuve de retenue quitte à
faire machine arrière en ce qui concerne, par
exemple, les mesures assorties de rétroactivité.
Dominique Richard
Avocat fiscaliste
Eric Meyer
Cabinet Richard
-
tratégie patrimoniale
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La dotation à l’enfant commun par un
bien personnel d’un des époux
Fleur-Marie VOYRON
Groupe Patrimoine
A propos de l’article 1438 du Code civil
L’article 1438 du Code civil énonce que « Si le père et la mère ont doté
conjointement l'enfant commun sans exprimer la portion pour laquelle ils
entendaient y contribuer, ils sont censés avoir doté chacun pour moitié,
soit que la dot ait été fournie ou promise en biens de la communauté, soit
qu'elle l'ait été en biens personnels à l'un des deux époux.
Au second cas, l'époux dont le bien personnel a été constitué en dot, a, sur
les biens de l'autre, une action en indemnité pour la moitié de ladite dot, eu
égard à la valeur du bien donné au temps de la dotation.»
avec ses propres applications (A). Mais il conviendra par ailleurs qu’elle
réponde à une finalité particulière en ce qu’elle doit pourvoir à l’établissement autonome du donataire (B).
A) L’application des conditions de validité des donations entre vifs à la
dot :
Bien que les termes ne soient pas les mêmes, il y a lieu d’assimiler la
« dot » à une « donation ». En conséquence, l’acte constatant la dotation à
l’enfant commun sera passé par acte notarié.
Par ailleurs comme toute donation, il conviendra que les deux époux disposant interviennent à l’acte, en ce compris celui qui n’est pas propriétaire du
bien donné, dans notre cas d’une dotation par un bien personnel d’un des
époux, ayant tous deux la qualité de donateur.
La dot devra par ailleurs classiquement être acceptée par son bénéficiaire.
En outre, bien que le texte parle de « dot », faisant penser à ce qu’elle soit
constituée par contrat de mariage, il pourra s'appliquer plus généralement
à toute forme de donation faite par des père et mère désirant doter leur
enfant commun. Et aussi bien à l'occasion d'une donation simple que
d'une donation-partage.
Enfin, l’article 1438 du Code civil, bien qu’il résulte du chapitre du Code civil
concernant le régime de la communauté, pourra jouer quel que soit le
régime matrimonial des époux (1).
En revanche ce texte reste limité aux donateurs « époux » et donc mariés,
aucun texte ni jurisprudence ne l’ayant à ce jour étendu aux partenaires de
pacs ou concubins.
La dot constitue donc une donation qui en respecte tant les conditions de
fond que de forme. Cependant elle s’en distinguera quant au fond par sa
finalité, qui ne pourra être que le souhait de l’établissement autonome du
donataire par les donateurs.
Certes cette disposition se rapporte directement à la notion de « dot »,
fortement connotée ancestrale et désuète, nous rappelant le temps du
régime dotal. En effet, ce terme s’entend traditionnellement comme un don
de biens, fait par leurs parents, au moment du mariage, aux jeunes époux,
souvent par contrat de mariage. Cependant il est admis dès le 19e siècle que
l’article 1438 pourra s’appliquer plus généralement à tous les cas où les
père et mère désirent faire à leurs enfants une libéralité destinée à leur
procurer un « établissement » qui devra en outre désormais être « autonome ».
Et ce quel que soit le régime matrimonial des époux donateurs et la forme
de donation, qu’elle soit simple ou partage.
En cas de dot, que cela soit fait au moyen d’un bien commun ou d’un bien
personnel d’un des époux, le donataire alloti sera réputé avoir été alloti par
chacun de ses deux parents pour moitié, sauf convention contraire. Cela
aura donc des conséquences tant civiles, que fiscales ouvrant plus de portes
que l’on aurait pu l’imaginer au sens courant d’une dot. Le recours à cette
disposition pourra ainsi encore à notre époque s’avérer tout à fait opportun,
et notamment quant à sa fiscalité qui peut s’avérer attractive.
Il conviendra cependant d’être vigilant et de l’utiliser habilement afin
d’éviter tout risque de tomber dans l’abus de droit. Cela sera d’autant plus
important dans le cas où la dotation à l’enfant commun se fera au moyen
d’un bien n’appartenant qu’à un des époux, hypothèse à laquelle nous
nous intéresserons particulièrement en l’espèce.
Nous envisagerons ainsi dans un premier temps le champ d’application de
l’article 1438 du Code civil (I), avant d’analyser les conséquences civiles et
fiscales de l’application du régime de la dot (II).
B) L’exigence d’une finalité particulière consistant en l’établissement
autonome du donataire :
Cette exigence a été posée par un arrêt de principe rendu par la chambre
commerciale de la Cour de cassation du 24 avril 1990, dit « consorts
Heimburger » (2).
Les juges posent le principe selon lequel « une donation ne peut être qualifiée de dot qu'à la condition de pourvoir à l'établissement autonome du
donataire ».
La Cour ajoute « qu'il s'ensuit qu'une donation faite, comme en l'espèce,
en nue-propriété au profit d'un enfant de 17 mois, ne peut s'analyser en
une constitution de dot, et que, l'acte ainsi qualifié étant fictif au regard de
–I–
Le champ d’application de l’article 1438 du Code civil
La dot au sens de l’article 1438 du Code civil demeure une libéralité entre
vifs. Elle devra donc répondre aux conditions de validité de toute donation,
(1) Aubry et Rau, op. cit., t. VIII, 7e éd., par A. Ponsard, 503, n° 96, texte et note 33. – Planiol et Ripert. Traité pratique de droit civil français, t. VIII, n° 134. – Ripert et Boulanger. Traité élémentaire de droit civil, t. IV. n°
198. – CA Paris, 26 juin 1874 : DP 1875, 2, p. 181. – CA Rouen, 28 janv. 1935 : Rép. gén. not. 1935, art. 21159, p. 212).
(2) Dr. fisc. 1990, n° 51, comm. 2426, La Semaine Juridique Notariale et Immobilière n° 17, 26 Avril 1991, 100432 , Commentaires par Jacques LAFOND
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l'article L. 64 du Livre des procédures fiscales, l'opération a le véritable
caractère de simple donation ».
Cependant en pratique, il est en tout cas incontestable que l'âge de
l'enfant sera déterminant. Et la prudence nous conduira à éviter la réserve
d’usufruit par les parents en cas de recours à l’article 1438 du Code civil.
Nous avons délimité les conditions de fonds et de forme permettant le
recours à l’article 1438. Nous allons désormais nous intéresser aux conséquences de l’application de l’article 1438 du Code civil fiscalement, mais
aussi sur la liquidation du régime matrimonial des époux donateurs et du
rapport à leur succession.
Cet attendu comporte donc trois branches :
1) l'article 1438 ne peut être invoqué que lorsqu'il y a « dot » au profit
du donataire,
2) il y a dot lorsque la donation a pour finalité de « l'établir »,
3) et qui plus est « l'établir de façon autonome ». (3)
Le tribunal de grande instance de Bordeaux a donné pour sa part une
définition stricte de la notion « d'établissement » énonçant que la donation
doit « lui assurer une situation certaine personnelle et par définition même
indépendante des parents ».
Pour appliquer le régime de l’article 1438 du Code civil à une donation, il
ne suffira pas de simplement contribuer à améliorer la situation matérielle
de l’enfant, mais il faudra réellement souhaiter son établissement. (4)
Laissant ainsi sous-jacent l’idée d’un véritable changement de situation, et
de nouveauté.
Il faut également que la donation rende l’enfant autonome. Ce qui ne sera
pas le cas d’une donation faite à un enfant de 17 mois, ce qu’énonce la
Cour de cassation dans l’arrêt Heimberger (5). L’âge de l’enfant pouvant
donc être également un indice déterminant.
Cependant la chambre des requêtes a pu considérer que l’établissement
autonome est caractérisé par « la fourniture de moyens matériels propres à
lui assurer une existence personnelle indépendante à l'occasion de son
mariage, par l'exercice d'une activité lucrative autonome et notamment
une installation professionnelle » (6).
Son utilisation sera donc favorisée pour des occasions particulières de la vie
du donataire : fin des études, mariage, naissance de son premier enfant,
installation professionnelle etc.. Et au moyen de biens ayant vocation à
l’installer dans la vie, notamment professionnelle : bien immobilier, fonds de
commerce, apport de somme d’argent pour la création d’une société etc.
Enfin, l’utilisation de la dot sera évitée lorsque l’enfant doté n’est pas
susceptible de mener une existence autonome.
La question de la donation d’un bien en nue-propriété a par ailleurs fait
débat. Une dot peut-elle être caractérisée alors que les parents se réservent
l’usufruit du bien donné ?
Le TGI de Lyon avait considéré dans un arrêt du 26 avril 1979 (7) que la
donation devait avoir pour effet de rendre la situation de l’enfant plus
avantageuse « alors même qu’elle s’accompagne d’une réserve d’usufruit ».
Le TGI de Bordeaux considérait pour sa part, adoptant une conception
beaucoup plus stricte de la notion d’établissement qu’elle devait lui assurer
une situation « certaine, personnelle et par définition même indépendante
» faisant obstacle à ce que les parents de l’enfant doté conserve l’usufruit
du bien donné. (8)
Dans l’attendu de l’arrêt du 24 avril 1990 ci-dessus visé, la solution est
ambiguë, la Cour de cassation déclarant que « la donation faite en l'espèce
en nue-propriété au profit d'un enfant de 17 mois ne peut s'analyser en une
constitution de dot ». Le fait que la donation incriminée ne constitue pas un
« établissement autonome» de l'enfant tient-il à ce qu'elle est consentie
seulement en nue-propriété ? ou à l'âge de l'enfant ? Ou à ces deux motifs
cumulés ?
Il semble que ce soit plutôt le cumul des deux qui fasse obstacle à la
qualification de dot.
– II –
Les conséquences civiles et fiscales de l’application du régime
de l’article 1438 du code civil à une donation :
En vertu de l’article 1438 du Code civil ci-dessus énoncé, deux époux
pourront faire conjointement une donation à leur enfant, alors même que
le bien donné est propre à l’un des époux. Faute d’exprimer la part donnée
par chacun ils sont réputés avoir donné chacun pour moitié. Nous verrons
que cela aura nécessairement des conséquences fiscales quant à l’application des abattements et du barème fiscal des droits de mutation à titre
gratuit au stade de la donation (A). Nous envisagerons dans un second
temps comment traiter la dot lors de la liquidation du régime et son rapport
à la succession des époux donateurs (B).
A) Un avantage fiscal certain au stade de la dot en cas de dotation de
l’enfant commun par un bien personnel d’un époux :
On l’aura compris, l’utilisation de l’article 1438 présente un avantage fiscal
non négligeable, notamment lorsque le bénéficiaire reçoit un bien n’appartenant qu’à l’un de ses parents. En effet, ce dernier étant réputé recevoir
ledit bien par chacun de ses deux parents, et ce pour moitié sauf convention
contraire, il bénéficiera du double abattement résultant de l’article 779 du
CGI, à la fois celui issu de sa mère et celui issu de son père. A ce jour selon
la réglementation en vigueur l’enfant commun pourra donc recevoir jusqu’à
200 000 € sans qu’aucun droit de mutation ne soit dû, contre 100 000 €
s’il avait reçu le bien donné du seul parent propriétaire, par donation simple.
Par ailleurs, il bénéficiera deux fois du barème progressif des droits de
mutation à titre gratuit en ligne directe, et donc deux fois des tranches
basses de l’impôt. (9)
Cependant, l’utilisation de l’article 1438 du Code civil à des fins fiscales
pourra être de nature à constituer un abus de droit. Il conviendra donc d’être
vigilant dans son application.
La notion « d'abus de droit » en matière fiscale résulte de l'article L. 64
du Livre des procédures fiscales. Le Conseil d’Etat et la Cour de cassation
s’accordent aujourd’hui à le caractériser alternativement soit lorsque l’acte
passé présente un caractère fictif, soit qu’il n’a pu être inspiré que par des
préoccupations purement fiscales. Il conviendra cependant à l’administration fiscale d’en apporter la preuve.
Or, dans l’arrêt Heimberger du 24 avril 1990, ci-dessus visé, la Cour de
cassation a qualifié textuellement de « fictive » une donation consentie par
référence à l'article 1438 du Code civil, au motif qu’elle avait été faite « en
nue-propriété à un enfant de 17 mois ». Elle fournit ainsi à l'administration
fiscale une arme redoutable qui lui facilitera la preuve de « l'abus ».
Certains auteurs le regrettent à plusieurs titres. Ils considèrent en effet tout
d’abord qu’il n’y avait en l’espèce aucune dissimulation à l’administration
(3) La Semaine Juridique Notariale et Immobilière n° 17, 26 Avril 1991, 100432 , Commentaires par Jacques LAFOND
(4) CA Toulouse 31-12-1883 : S. 1884 2 113
(5) voir Cass com 24-4-1990
(6) Req. 10-2-1896 : DP 1896 1 559.
(7) TGI Lyon, 26 avr. 1979 JCP 80, Prat. 7632
(8) Trib. gr. inst. Bordeaux, 15 septembre 1986 JCP 88, Prat. 711, n.4
(9) Art 777 du CGI
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fiscale, les parents ayant fait un acte de donation, comportant une clause
de réserve d'usufruit et faisant expressément référence à l'article 1438 du
Code civil. La fictivité de l’acte résulterait donc d’un dépassement du cadre
de l’article 1438 du Code civil, mais qui à leur sens n'aurait pu être « abusif » que s’il était, par ailleurs, clairement fixé, et que les donateurs avaient
voulu faussement faire croire (élément de «fictivité» ou volonté de dissimulation) que la donation relevait de ce texte. (10)
Il conviendra donc de rassembler suffisamment d’éléments justifiant d’un
but d’établissement autonome de l’enfant. Il sera par ailleurs opportun,
dans l’exposé de l’acte de donation, de développer le but poursuivi par les
époux donateurs, afin de limiter la possibilité pour l’administration fiscale
d’arguer d’une seule préoccupation fiscale.
En cas de doute, et faute pour les époux de pouvoir envisager une autre
solution pour être codonateurs, il pourra être opportun d’utiliser la procédure
du rescrit fiscal, prévue par l'article L. 64-B du Livre des procédures fiscales.
Cette procédure consiste pour un contribuable, préalablement à la conclusion d'un contrat ou d'une convention, à consulter l'administration en lui
fournissant « tous éléments utiles pour apprécier la portée véritable de cette
opération ». Si l'administration n'a pas répondu dans un délai de six mois
à compter de la demande, la procédure de l’abus de droit ne pourra plus
être invoquée par l’administration.
Nous avons pu envisager le champ d’application de l’article 1438 et son
intérêt fiscal. Quid de son fonctionnement au regard de la liquidation du
régime matrimonial et du rapport ?
sera judicieux en pratique de prévoir toutes stipulations dans l'acte de
donation quant au montant de la récompense. (13)
A défaut de règlement au cours du mariage, la créance apparaîtra :
– si l’époux débiteur décède le premier : dans la déclaration de succession
de l'époux débiteur, en tant que dette envers son conjoint survivant.
Sur le plan fiscal, cette dette constitue un passif de succession, déductible
dans les conditions de droit commun. Or, l’article 773 du CGI prévoit que
les dettes échues depuis plus de trois mois lors de l’ouverture de la succession sont présumées remboursées, sauf à apporter la preuve contraire
par une attestation de créancier. En l’occurrence, cela s’avérera impossible,
le créancier étant par définition décédé. En conséquence, pour éviter
tout risque de redressement, il sera souhaitable de stipuler dans l'acte de
donation que la dette ne sera exigible qu'à la dissolution du régime
matrimonial.
– si l’époux créancier décède le premier : dans la déclaration de succession
de l'époux créancier, comme une créance sur son conjoint survivant. Et
cette créance entre dans l'actif taxable aux droits de succession. (14)
Concernant le rapport de la dot à la succession des donateurs, l’article 1438
répute la dot faite pour moitié par chacun des époux, sauf convention
contraire. Ainsi, conformément aux principes de l’article 850 du Code civil,
la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 12 juillet 1989 (15) que le
rapport devra se faire partiellement à chacune des successions des
donateurs, par principe pour moitié sauf convention contraire. Ce principe
vaut quelle que soit la nature des biens fournis et sauf à opérer les règlements financiers sus-exposés dans notre cas d’une dot au moyen d’un bien
personnel d’un époux. (16)
Concernant le montant du rapport, cela fait également débat en doctrine,
dans les mêmes termes, de savoir s’il convient de rapporter traditionnellement la valeur décès, en application de l’article 860 du Code civil, ou la
valeur au jour de la donation, appliquant un régime anormal, résultant de
la lettre de l’article 1438 du Code civil. Selon nous, la faveur ira à la solution
traditionnelle d’une évaluation valeur décès, selon les règles de l’article 860
du Code civil, en ce qu’elle porte à la réserve héréditaire qui est d’ordre
public. Il sera opportun par précaution de préciser ces modalités dans
l’acte de donation. Et s'agissant ici, par hypothèse, de donations conjointes,
génératrices d'un double rapport, à effectuer à des époques différentes et
pour des montants différents, il sera préférable de s'en tenir à la valeur du
bien donné à l'époque de la donation. La donation-partage sera donc
préférée lorsqu’elle est possible. A défaut, l’excédent résultant de la différence entre la valeur décès et la valeur donation pourrait être considérée
comme un avantage indirect acquis au donataire hors part successorale,
conformément à l’article 860 alinéa 4 du Code civil.
Nous observerons donc que l’utilisation de l’article 1438 du Code civil pourra
s’avérer être un outil tout à fait opportun pour des parents souhaitant doté
leur enfant commun. Cependant il conviendra de l’utiliser avec précaution,
dans des situations très particulières ayant vocation à une réelle installation
autonome de l’enfant commun, et d’en justifier à l’acte par un exposé
préalable. Si les éléments rassemblés ne suffisent pas à caractériser une
véritable finalité d’installation autonome de l’enfant, il faudra préférer une
autre solution, telle que le changement de régime matrimonial des époux
donateurs au profit de la communauté universelle ou les donations entre
époux, pour arriver à faire bénéficier l’enfant commun d’une donation par
ses deux parents.
B) La naissance d’une créance de l’époux qui a fourni son bien personnel
contre son conjoint :
L’article 1438 du Code civil énonce en son alinéa 2 que « l'époux dont le
bien personnel a été constitué en dot, a, sur les biens de l'autre, une action
en indemnité pour la moitié de ladite dot, eu égard à la valeur du bien
donné au temps de la dotation. »
L'époux qui a fourni ses biens propres pour une donation conjointe en vue
de l'établissement d'un enfant commun devient donc créancier de son
conjoint. L’époux propriétaire du bien donné disposera d'une action en
indemnité pour la moitié de la donation.
Selon la doctrine dominante, le règlement de cette créance entre époux
n'est pas différé à la dissolution du régime matrimonial. Contrairement à la
règle applicable en matière de récompense, le règlement pourrait donc être
poursuivi pendant le mariage sur le patrimoine propre du conjoint débiteur.
Concernant le montant de cette créance, traditionnellement, on estimait
que par application analogique de la solution prévue à l'article 1438,
alinéa 2 pour les indemnités entre époux, la récompense éventuelle à la
communauté devait s'apprécier eu égard à la valeur du bien donné au
temps de la donation. Mais, aujourd'hui, alors que les récompenses sont
calculés en fonction de la valeur du bien donné à l'époque du décès, la
question s’est posée de savoir si l’indemnité due au titre de l’article 1438 du
code civil ne devrait-elle pas être également calculée selon la valeur au jour
du décès et calculée selon le profit subsistant, conformément à l’article
1469 al 3 du Code civil ? C'est ce que suggèrent certains auteurs. (11)
Cependant cette position, n'est pas adoptée par tous (12), et ce n’est
d’ailleurs pas la nôtre. Ces auteurs considèrent eux au contraire le système
de l’article 1438 du Code civil comme anormal et non conforme à la règle
de l'article 1469 alinéa 3 du Code civil, préférant donc se résoudre à
retenir le montant de la dépense faite.
La matière des récompenses n'étant pas d'ordre public, dans le doute, il
(10) Jacques LAFOND – la semaine notariale et immobilière n° 17, 2§ avril 1991, 100432
(11) Patarin et Morin, op. cit., n° 288, note 2
(12) V. J.-Cl. Fasc. n° 33
(13) V J-Cl Fasc n°30, § 75
(14) En ce sens, par exemple, Rép. Zeller : AN 27-10-1980 p. 4530.
(15) Cass. 1re civ., 12 juill. 1989 : JCP G 1989, IV, 350 ; Jour. not. 1989, art. 59879, obs. E.S. de la Marnierre ; Defrénois 1989, art. 34594, p. 1122, obs. G. Morin
(16) Aubry et Rau, op. cit., t. VIII, 503, n° 96, et 509, n° 207-b, texte et note 70-3
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
12
Le Dossier
DROIT PUBLIC
Immobilier universitaire :
des modalités différentes d’octroi de
droits réels selon l’origine des biens
Malicia DONNIOU et Raphaël LEONETTI
Groupe droit public immobilier
–I–
L’identification du patrimoine universitaire
Le patrimoine affecté à l’immobilier universitaire représentait au 31 décembre
2009 plus de 18 millions de m2 de surfaces hors œuvre nette et près de
6 000 hectares de foncier non bâti.
I.1. Les établissements d’enseignement supérieur, utilisateurs d’immeubles dont ils n’ont pas la propriété
Au regard de l’importance de ce foncier, et depuis la loi LRU du 10 août
2007 (1), d’une part, et le développement par l’Etat d’une véritable stratégie
de gestion du patrimoine des organismes contrôlés par l’Etat (2), d’autre
part, les établissements publics d’enseignement supérieur se sont engagés
dans une logique de valorisation de leur patrimoine, qu’ils en assument
simplement la gestion pour le compte de l’Etat ou qu’ils en soient propriétaires.
■ Sur la propriété de l’Etat : mise en place systématique des conventions
d’utilisation
On rappellera que depuis un décret du 1er décembre 2008 (4), les régimes
de l’affectation et de la remise en dotation ont été remplacés par un régime
de conventions conclues entre « l’Etat propriétaire » et les utilisateurs, administrations et opérateurs (notamment les établissements publics de l’Etat).
Dans ce cadre, le Gouvernement a notamment lancé en 2007 « l’opération
Campus » visant à soutenir la rénovation et/ou la construction de bâtiments
universitaires et de recherche, afin notamment de permettre aux établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel (« EPSCP », dont
les universités font partie) de prendre toute leur place dans la compétition
internationale avec les universités mondiales. C’est ainsi qu’une cinquantaine
d’opérations ont pu être lancées grâce aux 5 milliards d’euros affectés au
Plan Campus (3).
Les règles instaurées par ce décret, dont on notera qu’elles mettent en place
un régime uniforme applicable tant au domaine privé qu’au domaine
public, sont désormais codifiées au sein de la partie réglementaire du CG3P
dans un chapitre intitulé « Attribution » (5).
Ces conventions d’utilisation présentent d’abord l’avantage de ne plus faire
référence à l’idée d’affectation, susceptible d’entraîner une confusion avec
le critère de définition du domaine public.
Il n’en demeure pas moins que le patrimoine universitaire est hétérogène et
fait l’objet de règles distinctes selon la nature et l’origine des droits dont
disposent les établissements universitaires. Cette divergence des situations
a des incidences sur les droits réels que sont susceptibles d’accorder les
établissements d’enseignement supérieur aux opérateurs chargés de
conduire les opérations du Plan Campus, notamment dans le cadre
de contrats de partenariat.
Mais elles ont surtout vocation, comme le note le rapport au Premier
ministre accompagnant le décret du 1er décembre 2008, à « mettre fin aux
comportements de quasi-propriétaire qu’ont parfois développé les administrations occupantes et les établissements publics nationaux lorsqu’ils
occupent ou gèrent des biens immobiliers de l’Etat ».
Plusieurs aspects du régime de ces conventions méritent d’être mentionnés.
(1) Loi n°2007-1199 du 10 août 2007 libertés et responsabilités des universités.
(2) Une circulaire du Premier Ministre en date du 28 février 2007 a instauré une véritable stratégie de gestion du patrimoine immobilier des organismes contrôlés par l’Etat à travers: le recensement et valorisation du
patrimoine des opérateurs ; la préparation par chacun d’eux d’un schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI).
(3) 3, 686 milliards d'euros correspondent au produit de la cession en novembre 2007 de 2,5 % du capital de l'entreprise EDF. La recette a été enregistrée sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières
de l'Etat » et ces crédits font, depuis, l'objet chaque année d'un arrêté de report. 1,3 milliard d'euros en provenance des fonds de l'emprunt national au titre du plan d'investissements d'avenir voté dans le cadre de la
deuxième loi de finances rectificative pour 2010. La somme de cinq milliards constitue un capital non consomptible dont seule la rémunération en contrepartie du dépôt de cette somme au Trésor peut être utilisée.
(4) Décret n°2008-1248 du 1er décembre 2008 relatif à l'utilisation des immeubles domaniaux par les services de l'Etat et ses établissements publics
(5) V. les articles R. 2313-1 et suivants du COG3P. V. également le modèle de convention prévu par un arrêté du 21 avril 2009.
Le Bulletin
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N° 04 - 2012 (Décembre)
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D’abord, à la lecture des dispositions des articles R. 2313-1 et suivants du
CG3P, on constate que les conventions d’utilisation ont une durée maximale
de neuf ans lorsqu’elles concernent un immeuble à usage de bureaux.
Dans les autres cas, la durée est fixée librement par les parties. Pour les
universités, toute la question sera donc de savoir dans quelle mesure les
locaux qu’elles utilisent sont de simples immeubles de bureaux. Sachant
notamment qu’elles ne sauraient accorder plus de droits qu’elles n’en ont et
donc, qu’elles ne pourraient sans l’accord de l’Etat consentir des titres d’occupation plus long que la durée de la convention d’utilisation (6). Il convient
aussi de souligner que selon l’article R.2313-5 du CG3P, ces conventions ne
peuvent être renouvelées par tacite reconduction.
Concernant les immeubles appartenant à d’autres personnes publiques que
l’Etat, et dont les plus connus sont les locaux de la Sorbonne qui relèvent
du domaine public de la Ville de Paris, il convient d’attirer l’attention sur
le fait que le CG3P offre aujourd’hui la possibilité pour les personnes
publiques entre elles de procéder à des mises à dispositions d’immeubles,
sans avoir à passer par le système des autorisations d’occupation privatives
du domaine public ou celui des baux emphytéotiques administratifs, en
utilisant le mécanisme du transfert volontaire de gestion prévu à l’article
L. 2123-3 qui dispose que :
« les personnes publiques […] peuvent opérer, entre elles, un transfert
de gestion des immeubles dépendant de leur domaine public pour
permettre à la personne publique bénéficiaire de gérer ces immeubles en
fonction de leur affectation ».
On notera ensuite que l’article 9 du modèle de convention fixé par l’arrêté
du 21 avril 2009 précise :
– que l’utilisateur supporte la charge des dépenses d’entretien courant et de
petites réparations ;
– que l’utilisateur convient d’une programmation pluriannuelle de travaux
avec le propriétaire, s’appuyant sur son contrat d’objectifs ;
– que pour les établissements publics nationaux que sont les Universités,
l’utilisateur réalise les grosses réparations de l’article 606 du Code civil
avec les dotations inscrites sur son budget.
Pour qu’un tel transfert de gestion puisse être consenti, il faut qu’il soit
lié à la nouvelle affectation que son bénéficiaire souhaite conférer à
l’immeuble en cause.
Trois traits de son régime méritent également d’être précisés.
En premier lieu, le transfert a une vocation à la pérennité. En effet, comme
il s’agit de permettre à une autre personne publique d’exercer sa mission, il
faut que la continuité de celle-ci puisse être garantie. Toutefois, une durée
peut être prévue dans l’acte transférant la gestion. Mais il demeure également possible de la conditionner au maintien de l’affectation qui, si elle
devait cesser, devrait en toute hypothèse entrainer un retour du bien dans
le patrimoine de la personne publique propriétaire, à titre gratuit.
Enfin, last but not least, la passation de ces « baux publics » entre France
Domaine et les occupants servira de support à des loyers budgétaires
devant être généralisés au fur et à mesure à l’ensemble des anciens affectataires d’immeubles de l’Etat et notamment, conformément à l’annonce
faite par le ministre du budget le 3 décembre 2009 (7), à l’ensemble des
établissements publics nationaux à compter du 1er janvier 2012.
Ces loyers doivent permettre de faire prendre conscience du coût financier
d’immobilisation du capital occupé. Etant à cet égard précisé qu’ils permettront également de connaître la valeur des immeubles en cause puisque les
loyers de départ sont alignés sur les loyers comparables des immeubles du
secteur privé (8).
En deuxième lieu, en application de l'article L. 2123-6 du CG3P, les transferts de gestion donnent lieu à une indemnisation de la personne publique
propriétaire du bien transféré. Le montant de ces indemnités sera calculé en
fonction : soit des dépenses qui devront être engagées par la collectivité dessaisie ; soit de la privation de revenus qui résulterait du transfert. On remarquera qu’il s’agit d’une indemnité et non d’une redevance d’occupation.
Au-delà du fait que ces loyers devraient conduire les universités à faire plus
facilement des arbitrages entre leurs implantations, à améliorer leur performance immobilière, et à prendre conscience de la valeur de leur patrimoine,
leur paiement est une question cruciale à l’heure où le législateur a permis
à l’Etat, sur demande des universités occupantes, de transférer à celles-ci à
titre gratuit les immeubles mis à leur disposition. Toutefois, on constate
que les conventions aujourd’hui conclues avec les universités comportent la
mention « sans objet » à l’article relatif aux loyers.
En troisième et dernier lieu, le bénéficiaire du transfert a un droit de jouissance dont le contenu peut être précisé dans l’acte lui accordant la gestion
du bien. En l’absence de précision dans la partie réglementaire du CG3P, il
nous semble qu’une convention transférant la gestion de l’immeuble pourrait prévoir, comme c’est le cas dans le cadre des concessions de service
public ou dans certaines mises à dispositions des communes au profit de
structures intercommunales (9), que le bénéficiaire du transfert aura les
droits et obligations du propriétaire. Le bénéficiaire du transfert de gestion
devrait alors pouvoir délivrer des titres d’occupation du domaine public, ce
qui pourrait être précisé dans la convention.
Ainsi, le régime juridique du transfert de gestion semble plus proche d’une
« mise à disposition » que d’une véritable occupation privative du domaine
public, raison pour laquelle il est d’ailleurs réservé à des situations dans
lesquelles les partenaires sont deux personnes publiques.
L’utilisation d’immeubles appartenant à d’autres personnes publiques
que l’Etat
■
Sans pouvoir être exhaustif, on remarquera que les Universités utilisent
parfois des immeubles appartenant à d’autres personnes publiques que
l’Etat, mais également à des particuliers.
(6) Etant précisé que, à la lecture des articles R. 2122-12 et R. 2122-15 du CG3P, un établissement public de l’Etat peut être compétent pour recevoir des demandes d’autorisations constitutives de droits réels sur le
domaine de l’Etat et pour les délivrer lorsqu’il « tient expressément du texte qui lui confie ou concède la gestion d'un élément du domaine public le pouvoir d'y délivrer des titres d'occupation constitutifs de droits réels ».
L’article L. 762-2 du code de l’éducation semble pouvoir être interprété en ce sens (cf. CAA Paris, 27 avril 1999, n°97PA00311).
(7) V. sur ce sujet, A. Tessier, « La politique immobilière des opérateurs de l’Etat », in Mél. É. Fatôme, Dalloz, 2011, p. 435
(8) Leur revalorisation peut aussi être prévue, à chaque renouvellement du bail. Elle peut également se produire à échéance fixe sur la base de la variation d’un indice légal ou conventionnel, ou ponctuellement pour prendre
en compte des améliorations apportées par le propriétaire.
(9) Cf. Rép. du Ministre de l’Intérieur, publiée au JO du 06/10/2004, page 7439 (question n°901) : « Je rappelle qu'en vertu des articles L. 1321-1 et L. 1321-2 du code général des collectivités territoriales, le transfert de
cette compétence entraîne de plein droit, vous l'avez dit, la mise à disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date du transfert, pour l'exercice de cette compétence. La remise de
ces biens se fait à titre gratuit ; la collectivité bénéficiaire de la mise à disposition assume l'ensemble des obligations du propriétaire et des pouvoirs de gestion. Elle peut enfin procéder à tous travaux de reconstruction, de
démolition, de surélévation ou d'addition de constructions propres à assurer le maintien de l'affectation des biens, dans son esprit et dans son objet. Il apparaît que les procès-verbaux de mise à disposition confèrent à la
communauté de communes dont vous parlez un droit réel sur les biens, puisqu'elle assume l'ensemble des droits et obligations du propriétaire, à l'exception du pouvoir d'aliénation. »
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14
■
qui en font la demande la pleine propriété des biens mobiliers et immobiliers appartenant à l'Etat ou à l'Etablissement public de Paris-Saclay
qui leur sont affectés ou sont mis à leur disposition. Ce transfert s'effectue à titre gratuit. Il s'accompagne, le cas échéant, d'une convention
visant à la mise en sécurité du patrimoine, après expertise contradictoire.
Il ne donne lieu ni à un versement de salaires ou honoraires au profit
de l'Etat ni à aucune indemnité ou perception de droits ou de taxes au
profit de l'Etat. Les biens qui sont utilisés par l'établissement pour
l'accomplissement de ses missions de service public peuvent faire l'objet
d'un contrat conférant des droits réels à un tiers, sous réserve de l'accord
préalable de l'autorité administrative compétente et de clauses permettant d'assurer la continuité du service public. »
L’utilisation d’immeubles appartenant à des personnes privées
Les universités sont parfois occupantes d’immeubles qui sont la propriété
de personnes privées et les contrats qu’elles concluent à cet égard sont, en
principe, soumis au droit privé, sauf s’ils remplissent les critères de qualification des contrats administratifs (notamment, s’ils comportent des clauses
exorbitantes du droit commun).
Concernant l’application des règles du droit privé, tout ce qui ne relève pas
d’une réglementation spécifique est soumis au droit commun du Code
civil (articles 1708 et s.). L’établissement d’enseignement n’étant pas un
commerçant exploitant un fonds de commerce, le bail ne sera donc pas
soumis obligatoirement à la réglementation des baux commerciaux, à
l’exception toutefois des locaux qui servent directement à l’activité d’enseignement (lieux où se déroulent les cours) puisque ces locaux entrent dans
le champ d’application de ce statut en vertu de l’article L. 145-2 du Code
de commerce. Pour ses locaux de bureaux ou ses locaux techniques,
l’université pourra donc proposer au bailleur de soumettre la location aux
principes souples et adaptables du Code civil. Mais les bailleurs exigent la
plupart du temps la conclusion d’un bail commercial, ce qui est tout à fait
envisageable si les parties décident volontairement de se soumettre à ce
statut. Ce statut, moins souple que celui des baux civils, présente certains
avantages pour l’occupant tels que le principe de fixation du loyer à
hauteur de la valeur locative et le principe d’un droit au renouvellement du
contrat. Il comporte néanmoins certains inconvénients qu’il conviendra
d’appréhender au mieux lors de la négociation du contrat (durée ferme
de neuf ans, déplafonnement du loyer du bail renouvelé pour les bureaux,
sous-location et cession du bail soumise à agrément du bailleur, clauses
travaux…).
L’article 3 du décret n°2008-606 du 26 juin 2008 vient préciser que :
« Le transfert des biens mobiliers et immobiliers prévu à l'article L. 719-14
du code de l'éducation peut bénéficier aux établissements publics administratifs disposant, conformément aux dispositions de l'article 1er du
présent décret, des responsabilités et compétences élargies en matière
budgétaire et de gestion des ressources humaines.»
Seules sont donc concernées par ce transfert les universités (en tant
qu’EPSCP) autonomes en matière budgétaire. On notera également que les
universités devront se doter d’une véritable comptabilité patrimoniale et
d’une politique immobilière si elles veulent réussir le passage à l’autonomie
sur le plan immobilier (cf. cahier des charges établi en octobre 2007 par
l’Inspection Générale des Finances et l’Inspection Générale de
l’Administration de l’Education Nationale et de la Recherche, en vue de
l’élargissement des compétences des universités prévu par la loi relative aux
libertés et responsabilités des universités).
I.2. Les établissements d’enseignement supérieur, propriétaires des
biens qu’ils utilisent
Le transfert de propriété des biens immobiliers a surtout une incidence
comptable importante. En effet, l’État leur transfère également la charge du
renouvellement du patrimoine. Les Universités devront donc pratiquer de
vrais amortissements sans pouvoir les « neutraliser » par une ponction
opérée sur la dotation remise annuellement par l'Etat.
Les universités peuvent devenir propriétaires de leurs biens, comme toute
entité bénéficiant de la personnalité morale, dans le cadre d’acquisition à
titre onéreux qui s’opèrent suivant les règles du droit civil (cf. article L. 1111-1
du CG3P). Elles peuvent notamment recourir à des acquisitions dans le
cadre de ventes en l’état futur d’achèvement, dès lors qu’elles respectent les
limites posées à cet égard par le Conseil d’Etat au vu des règles de la
commande publique et de la loi n°85-704 du 12 juillet 1985 modifiée
relative à la maîtrise d’ouvrage publique (10). Elles seront alors complètement maître de leur domaine (11).
Force est donc de remarquer que la principale donnée du choix laissé aux
universités entre la mise à disposition et le transfert en pleine propriété sera
de savoir si elles entendent payer un loyer au prix de marché ou devenir
pleinement propriétaires et supporter le poids de l’amortissement comptable de leur patrimoine. Mais, l’Etat demeure en toute hypothèse maître
d’accepter ou de refuser la demande de dévolution, ce qui implique donc
l’existence d’une véritable volonté politique du gouvernement d’opérer ces
transferts de patrimoine.
Mais, en-dehors des modalités classiques d’acquisition de leurs immeubles,
les Universités bénéficient d’une possibilité de dévolution du patrimoine de
l’Etat qu’elles utilisent, dans le cadre du dispositif prévu à l’article L. 719-14
du Code de l’éducation.
– II –
Mise en œuvre des opérations du Plan Campus : les modalités
d’octroi des droits réels aux cocontractants des établissements
On rappellera que l’article 32 de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007
modifiée (relative aux libertés et responsabilités des universités) a créé cet
article L. 719-14 du code de l’éducation qui dispose désormais que :
Quel que soit le propriétaire des immeubles utilisés par les universités, la
vétusté de ce patrimoine implique d’importants chantiers de rénovation qui
s’inscrivent dans le cadre du Plan Campus.
« L'Etat et l'Etablissement public de Paris-Saclay peuvent transférer aux
établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel
(10) V. sur ce point le commentaire des professeurs Etienne Fatôme et Philippe Terneyre sous l’avis du Conseil d’Etat du 31 janvier 1995, Section de l’intérieur et Section des travaux publics réunies, n°356 960, Les grands
avis du Conseil d’Etat, 3e éd. 2008, n°26, p. 297 ; v. également, des mêmes auteurs, « A propos des règles de passation des contrats publics à objet à la fois immobilier et de travaux- Retour sur l'arrêt Jean Auroux »,
AJDA 2009, p. 1868.
(11) On notera toutefois que les Universités peuvent recevoir des dons et legs, selon des procédures prévues aux articles L. 1121-2 et 3 du CG3P, et qu’elles devront alors gérer et administrer le patrimoine en cause selon les
charges qui, le cas échéant, peuvent assortir la libéralité.
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
15
Plusieurs outils contractuels existent pour la mise en œuvre des opérations
de ce Plan. Certains ne sont pas propres aux opérations universitaires
(travaux sous maitrise d’ouvrage publique, contrats de partenariat de
l’ordonnance du 17 juin 2004).
permettant d'assurer la continuité du service public lorsque les biens
concernés sont nécessaires à l'accomplissement de ce service.
Ils fixent les conditions financières des titres d'occupation du domaine
qu'ils délivrent, après avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente. »
Un montage innovant et dédié aux opérations universitaires a également
été imaginé la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) : le partenariat
public-public. Il s’agit d’un partenariat public-public pour le financement des
opérations projetées, supposant la création d’une société de réalisation à
laquelle participent l’université, la CDC et éventuellement des collectivités
territoriales. Cette société, placée en situation de « quasi-régie » avec
l’université – ce qu’il conviendra de démontrer – se voit octroyer une
autorisation d’occupation temporaire (AOT) du domaine public constitutive
de droit réel, assure la maîtrise d’ouvrage et le financement des opérations
immobilières, et passe à cette fin des contrats de financement et de
« conception-construction-maintenance » (dans le cadre de l’ordonnance
n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines
personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics)
avec d’autres opérateurs. Ce montage doit notamment permettre à la
sphère publique de conserver l’entier contrôle des bâtiments universitaires,
contrairement au contrat de partenariat public-privé.
Les universités peuvent donc consentir des conventions d’occupation constitutives de droits réels sur les biens dont elles ne sont qu’affectataires.
Cette évolution doit être saluée puisqu’il faut bien remarquer que peu
d’entre elles ont aujourd’hui demandé à l’Etat le transfert de la propriété de
leur patrimoine.
On notera toutefois que, dans le cadre de l’examen du décret n°2012-1147
du 12 octobre 2012 relatif à la délivrance de titres constitutifs de droits réels
par les établissements publics d’enseignement supérieur, pris notamment
en application de l’article L. 762-2 précité du Code de l’éducation, a
été soulevée la question de savoir si les universités peuvent conclure des
contrats constitutifs de droits réels sur l’ensemble du patrimoine mis à leur
disposition par l’Etat ou si cette faculté ne concerne que les immeubles
existants. En effet, l’article L. 762-2 du Code de l’éducation employant la
notion de « locaux », on pouvait être tenté de soutenir que cet article permet
d’accorder des droits réels sur des bâtiments existants mais pas sur des terrains
non-bâtis.
Tant le contrat de partenariat que le montage proposé par la CDC imposent
aux établissements d’enseignement supérieur d’être en mesure d’octroyer
des droits réels aux sociétés cocontractantes. Or, le mode de dévolution des
droits réels est susceptible d’être différent selon la nature des droits dont
dispose l’établissement mais également la manière dont il est devenu
propriétaire.
Deux situations propres au patrimoine universitaire méritent à cet égard
l’attention.
Cependant, deux principales objections empêchent de retenir une telle interprétation.
En premier lieu, il ressort clairement des travaux parlementaires relatifs à la
loi précitée du 13 décembre 2010 que les parlementaires ont souhaité autoriser les universités à délivrer de tels titres, en vue notamment de la conclusion de contrats de partenariats, tant pour permettre des réhabilitations
d’immeubles que des constructions neuves. Le rapport du sénateur Dupont
sur cette proposition de loi mentionne ainsi, à titre d’exemple illustrant les
besoins concernés, les projets de l’université de Bourgogne, à Dijon, pour lesquelles « le partenariat public-privé permettra, par exemple, de construire une
résidence d’accueil de chercheurs étrangers […] » (12). On lit également dans
le rapport de Madame de Panafieu, rappelant les limites de l’article
L. 762-2 dans sa rédaction alors en vigueur, que la mise en œuvre du contrat
de partenariat de l’ordonnance du 17 juin 2004 et du dispositif proposé par
la Caisse des dépôts et consignations « nécessite donc que les universités
aient la capacité de délivrer des droits réels sur leurs terrains et bâtiments » (13).
II. 1. L’octroi de droits réels sur les immeubles de l’Etat dont les établissements sont utilisateurs
Pour permettre aux universités d’utiliser certains montages contractuels
reposant sur l’octroi direct d’un droit réel à un partenaire chargé d’effectuer
ces travaux, la loi n° 2010-1536 du 13 décembre 2010 (relative aux activités
immobilières des établissements d'enseignement supérieur, aux structures
inter-universitaires de coopération et aux conditions de recrutement et
d'emploi du personnel enseignant et universitaire) a modifié l’article
L. 762-2 du Code de l’éducation qui prévoit désormais que :
« Les établissements publics d'enseignement supérieur dont, notamment,
les établissements publics de coopération scientifique, peuvent se voir
confier, par l'Etat, la maîtrise d'ouvrage de constructions universitaires.
En second lieu, on relèvera que si l’alinéa 2 de l’article L. 762-2 du Code de
l’éducation vise des « locaux », il s’agit notamment des locaux pour lesquels
les universités se sont vues confier par l’Etat, dans le cadre de l’alinéa 1er du
même article, la maîtrise d’ouvrage des constructions universitaires. Il nous
paraît donc pour le moins contestable de considérer que la notion de local
au sens de l’article L. 762-2 du Code de l’éducation ne vise que des
bâtiments existants. Elle devrait à tout le moins concerner également des
bâtiments à construire (14) .
A l'égard de ces locaux comme de ceux qui leur sont affectés ou qui sont
mis à leur disposition par l'Etat, les établissements d'enseignement supérieur relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur ou du
ministre de l'agriculture exercent les droits et obligations du propriétaire,
à l'exception du droit de disposition et d'affectation des biens.
Il nous semble donc, au vu de l’ensemble de ces éléments, que les universités
peuvent conclure des contrats constitutifs de droits réels sur l’ensemble du
patrimoine immobilier que l’Etat leur met à disposition, dans le cadre de
l’article L. 762-2 du Code de l’éducation.
Ils sont toutefois compétents pour conclure sur les biens visés à l'alinéa
précédent des contrats conférant des droits réels à un tiers, sous réserve de
l'accord préalable de l'autorité administrative compétente et de clauses
(12) Doc. Sénat 2010, n°100.
(13) Doc. AN 2010, n°2981.
(14) A cet égard, on peut d’ailleurs penser qu’en toute hypothèse des contrats constitutifs de droits réels pourraient certainement être conclus sur les terrains pour lesquels les conventions d’utilisation passées avec les
universités prévoient la réalisation de constructions, terrains qui pourraient donc être qualifiés de locaux au sens des dispositions combinées des alinéas 1 et 2 de l’article L. 762-2.
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
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Le décret du 12 octobre 2012 précise par ailleurs le formalisme que doivent
respecter les contrats d’occupation des biens passés sur le fondement de
l’article L.762-2 du code de l’éducation.
Pour les biens appartenant à l’Etat et mis à la disposition des EPSCP (article
L.762-2 du Code de l’éducation) les contrats conférant des droits réels
consentis par les EPCSP sont soumis à l’accord préalable :
– du ministre de tutelle et du ministre chargé du domaine lorsque le
montant des travaux projetés est supérieur ou égal à 3 millions d’euros
hors taxes ; lesquels disposent d’un délai de 2 mois pour se prononcer ;
– du Préfet, lorsque le montant des travaux projetés est inférieur à 3 millions
d’euros hors taxes ; lequel dispose d’un délai d’un mois pour se prononcer.
1° Du ministre de tutelle et du ministre chargé du domaine lorsque le
montant des travaux projetés est supérieur ou égal à trois millions d'euros hors taxes ;
2° Du ministre de tutelle des établissements qui lui sont directement rattachés ou, s'agissant d'autres établissements, du recteur d'académie,
chancelier des universités lorsque le montant des travaux projetés est inférieur à trois millions d'euros hors taxes.
II.-Les ministres ou le recteur mentionnés au I se prononcent notamment
sur les clauses permettant d'assurer la continuité du service public auquel
le bien concerné est affecté.
III.-Le défaut d'obtention de l'accord express préalable mentionné au I
vaut refus de cet accord préalable à compter de l'expiration d'un délai,
selon le cas :
1° De deux mois à compter de la saisine des autorités mentionnées au 1°
du I ;
2° D'un mois à compter de la saisine des autorités mentionnées au 2°
du I ».
Dans les deux situations, le défaut d’accord exprès préalable dans le délai
imparti vaut refus d’autorisation.
Ces autorités doivent notamment s’assurer du contenu des clauses permettant d’assurer la continuité du service public visées au dernier alinéa de
l’article L. 719-14 et à l’article L. 762-2.
Ainsi, en application de ce texte toute signature de contrat conférant des
droits réels sur un bien transférés à un EPCSCP en vertu de l’article L.719-14
du code de l’éducation est soumis à un accord préalable d’une autorité de
tutelle. Il s’agit :
– du Ministre de tutelle et du ministre chargé du domaine (Ministre du
budget) lorsque le montant des travaux projetés est supérieur ou égal à
3 millions d’euros hors taxes ; lesquels disposent de 2 mois pour se prononcer ;
– du Recteur d’académie, Chancelier des universités pour les établissements
placés sous la tutelle du ministère de l’enseignement et de la recherche
(MESR) ou du ministre de tutelle pour les autres établissements lorsque le
montant des travaux projetés est inférieur à 3 millions d’euros hors taxes.
Ces autorités disposent d’un délai d’un mois pour se prononcer.
II.2. L’octroi de droits réels sur les biens dont les universités sont
propriétaires
Pour les immeubles qui leur appartiennent en propre, il ressort de l’article
R. 2122-15 du CG3P que les universités sont en principe libres de délivrer
des titres constitutifs de droits réels. Toutefois, les deux derniers aliénas de
cet article disposent « que s'il apparaît à cette autorité que tout ou partie
des ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier dont la
réalisation est envisagée sont nécessaires à la continuité du service public
auquel est affectée la dépendance du domaine public concernée par la
demande, il ne peut y être fait droit que sur accord préalable du ministre
de tutelle et du ministre chargé du domaine, ou du préfet après avis du
directeur départemental des finances publiques, selon que le montant des
travaux projetés est ou non supérieur à 3 millions d'euros hors taxes. Faute
d'obtention de cet accord préalable dans un délai de deux mois à compter
de la saisine du préfet ou de quatre mois à compter de la saisine des
ministres, l'autorité compétente de l'établissement public ou de l'organisme
gestionnaire du domaine est tenue de refuser le caractère constitutif de droit
réel au titre d'occupation demandé. »
*
* *
L’immobilier universitaire est donc un patrimoine complexe sur lequel les
pouvoirs publics ont porté toute leur attention, dans le but notamment de
rendre nos universités compétitives sur le plan international. L’autonomie
apparaît à cet égard comme un élément majeur des récentes réformes.
Cependant, à ce jour, peu d’universités ont demandé et obtenu la dévolution du patrimoine en vertu de l’article L.719-14 du Code de l’éducation (15).
Un régime d’accord préalable a également été mis en place pour les biens
transférés aux universités dans le cadre de l’article L. 719-14 du Code de
l’éducation dont le dernier alinéa prévoit que « Les biens qui sont utilisés par
l'établissement pour l'accomplissement de ses missions de service public
peuvent faire l'objet d'un contrat conférant des droits réels à un tiers, sous
réserve de l'accord préalable de l'autorité administrative compétente et de
clauses permettant d'assurer la continuité du service public ».
En conséquence, le décret n°2012-1147 du 12 octobre 2012 pris en application de cet article dispose que :
Quant au remède à la vétusté du patrimoine il semblerait que le bon outil
n’ait pas encore été identifié, les contrats de partenariats et montages CDC
qui avaient initialement été encouragés viennent d’être remis en cause
dans un rapport rendu public en octobre 2012 et demandé par Madame le
Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) (16).
« I.- Les projets de contrat conférant des droits réels à un tiers mentionnés
à l'article L. 719-14 du Code de l'éducation sont soumis par l'établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel à l'accord
préalable :
Des montages plus classiques sur le fondement d’AOT constitutives de droits
réels devraient toutefois voir le jour et, à ce titre, il est indispensable que les
autorités compétentes donnent une interprétation claire et incontestable du
décret du 12 octobre 2012.
(15) Il s’agit des universités de Poitiers, Toulouse 1 et Clermont-Ferrand.
(16) Rapport de la mission nationale d’évaluation de l’opération campus (juillet – octobre 2012), Rapport à la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche - Mission présidée par Roland Peylet, Conseiller d’État,
président-adjoint de la Section des travaux publics du Conseil d’État.
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DE CHEUVREUX
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u côté des tribunaux
STRATÉGIE PATRIMONIALE
INDIVISION
SUCCESSIONS
L’indemnité d’occupation profite
à toute l’indivision
– possible action en expulsion
par un seul des indivisaires
Recel successoral à plusieurs
– imputation sur la part successorale
– condamnation d’un seul pour le tout
(oui)
Une indemnité d’occupation d’un bien indivis
doit être versée à l’indivision, et non à un seul
indivisaire.
En outre, la Cour rappelle que l’action tendant
à l’expulsion d’un occupant sans droit ni titre
d’un bien indivis est un acte conservatoire qui
peut être demandé par tout indivisaire, sans
avoir à justifier de péril.
Cass. 1ère civ. 4 juillet 2012 n°10-21.967
n°80 P+B+R+I, Bull. Gestion Immo n°449,
septembre 2012 p 8
Trois sœurs héritent de leur père. L’une d’elle
accuse les deux autres d’avoir diverti de la succession près de 100 000 euros. Elle les assigne
en liquidation et partage de la succession et
demande qu’elles soient condamnées à rapporter chacune les 50 000 euros qu’elles avaient
reçus de leur père et privées de toutes parts sur
ces sommes. La Cour d’appel fait droit à cette
demande, toutefois elle ne condamne que l’une
des sœurs à rapporter et à être privée de la
somme recelée. La sœur condamnée forme un
pourvoi par lequel elle reproche à la Cour de
l’avoir condamnée seule alors qu’elle aurait dû
établir que le recel avait bénéficié aux deux
co-héritières. La Cour de cassation rejette son
pourvoi au motif que la Cour d’appel avait
« caractérisé la connaissance qu’avait chacune
d’elles du recel commis par l’autre et en a exactement déduit que l’une et l’autre ne pouvaient
prétendre à aucune part sur ladite somme ». En
principe chaque héritier n’est sanctionné que
pour la part de biens recelés qui lui est imputable. La présente décision pose une exception
à ce principe puisque l’un des receleurs peut
être condamné pour l’ensemble du recel s’ils
avaient connaissance du recel commis l’un par
l’autre. La sanction du recel est donc particulièrement aggravée.
Cass. 1ère civ. 20 juin 2012 – n°11-17.383 Droit et Pat. Hebdo n°884 du 9 juillet 2012
REGIMES
MATRIMONIAUX
Prêt commun
– remboursement avec des deniers
propres – calcul de la récompense
Par suite d’un divorce entre deux époux et de la
nécessité de procéder au partage de la communauté, un litige est né sur le calcul d’une récompense.
L’époux avait remboursé avec ses deniers
propres et par anticipation le solde d’un prêt qui
avait été souscrit pour le compte de la communauté. Le motif de ce prêt était de financer des
constructions en vue de l’édification d’une
maison d’habitation sur un terrain commun.
Par un arrêt du 5 avril 2011 (CA Aix en
Provence, 5 avril 2011), les juges du fond ont
décidé que le montant de la récompense devait
être fixé au montant de la dépense faite.
Par cet arrêt, la Cour de cassation vient effectuer un rappel des dispositions de l’article 1469
alinéa 3 du Code civil en précisant que le montant de la récompense ne peut pas être en l’espèce inférieur au montant du profit subsistant.
La somme ayant servi à acquérir un bien au
profit de la communauté avec des fonds propres.
Cass. 1ère civ, 10 octobre 2012 n° 11-20.585 JCP N n°42 du 19 octobre 2012
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
DIVORCE
Régime de séparation de biens
– financement d’une partie de la
quote-part de l’autre
– indemnisation due selon les textes
de l’indivision
– différence avec le partage
Cet arrêt concerne un couple marié sous le
régime de la séparation de biens. A l’occasion
18
de l’acquisition d’un bien immobilier, l’époux a
financé partiellement la quote-part indivise
de son épouse. Lors du divorce, l’épouse est
condamnée par la cour d’appel à verser à
l’époux une indemnité calculée selon le profit
subsistant.
La Cour de cassation va alors rappeler :
– l’alinéa 1er de l’article 1469 du Code civil aux
termes duquel « le règlement des créances
entre époux séparés de biens ne constitue pas
une opération de partage. »
– en conséquence, l’indemnité due au mari ne
peut être calculée que selon l’article 815-13
du Code civil.
L’intérêt de cet arrêt étant de montrer la différence de régime des créances entre époux selon
le régime matrimonial.
Cass. 1ère civ. 26 sept. 2012 – n°11-22.929 Droit et Pat. Hebdo n°891 du 8 octobre 2012
Achat en indivision
– demande de partage de l’indivision
et attribution préférentielle
– absence de clause en ce sens
dans la convention
– rejet de la demande
Deux personnes achètent en indivision un bien
immobilier. Une indivision conventionnelle régit
leurs rapports. Lors de leur séparation, l’une
d’entre elles demande le partage de l’indivision
et l’attribution préférentielle de l’immeuble.
La Cour de cassation rejette cette demande car :
– d’une part, elle n’est prévue légalement que
pour le conjoint, le partenaire de pacte civil de
solidarité ou tout héritier (art. 831-2 du code
civil),
– d’autre part, l’indivision conventionnelle ne
contenait pas de clause particulière à cet
égard.
Cass. 1ère civ. 26 sept.2012 – n°11-12.838 Droit et Pat. Hebdo n°891 du 8 octobre 2012
TUTELLE
Majeurs protégés gérant de SARL
–représentation de la société par le
tuteur (non)
La Cour de cassation, par un arrêt publié,
revient sur les pouvoirs du tuteur, en particulier
lorsque le majeur protégé est gérant de société.
La Haute juridiction souligne – en effet – que le
tuteur d’une personne protégée, à laquelle a été
dévolue la fonction de gérant d’une société,
n’est pas investi du pouvoir de représenter
celle-ci.
Cass. 1ère civ. 12 juillet 2012 n° 11-13161- ECLI :
FR : CCASS : 2012 / C100918, FS-PBI
(cassation) - Flash Defrénoisn°45 du 23 juillet
2012
DIVERS
Exploitation agricole familiale
– créance de salaire différé
– nécessité d’une participation régulière
Une personne ayant travaillé occasionnellement sur l’exploitation agricole de ses parents,
alors qu’elle exerçait au même moment
deux autres emplois rémunérés et que ladite
exploitation était trop petite pour permettre
DROIT DES AFFAIRES
FUSIONABSORPTION
Assignation en paiement
– créancier absorbé
– capacité d’ester en justice (non)
Une banque assigne en paiement une société.
Par la suite une autre banque soutenant venir
aux droits de la première à la suite d’une fusionabsorption intervient volontairement en cause
d’appel. La Cour d‘appel déclare l’intervention
volontaire de la société absorbante recevable.
Selon la Cour d’appel l’irrégularité consécutive à
la disparition de la personnalité morale absorbée est couverte en raison de la transmission
universelle de son patrimoine à la bénéficiaire
de la fusion. Mais la deuxième chambre civile
censure ce raisonnement au visa des articles 32
et 117 du Code de procédure civile :
« L’irrégularité d’une procédure engagée par une
partie dépourvue de personnalité juridique est
une irrégularité de fond qui ne peut être
couverte ». Or en l’espèce à la date de la délivrance de l’assignation la personnalité juridique
de l’absorbée avait disparu du fait de la fusionabsorption dont elle avait fait l’objet. Ainsi
l’inexistence de la personne morale qui agit en
justice ne peut être couverte et entraîne la
nullité de la demande introductive d’instance.
Cass. 2ème civ. 27 septembre 2012 – n°1122.278 - Droit et Pat. Hebdo n°892 du 15
octobre 2012
SOCIETE CIVILE
Garantie consentie à l’unanimité
– acte contraire à l’intérêt social
– nullité de la garantie (oui)
Une SCI se porte, suite à une décision unanime
des associés, caution hypothécaire et solidaire
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
pour deux prêts consentis par un établissement
de crédit au profit de ses deux associés et donne
en garantie le seul bien immobilier lui appartenant.
La société est mise en liquidation et l’établissement
de crédit déclare sa créance à titre privilégié.
La Cour de cassation, au visa de l’article 1849
du Code civil, casse et annule l’arrêt de la Cour
d’appel, laquelle avait considéré que l’accord
unanime des associés suffisait à engager la
société et retient notamment qu’il convenait de
rechercher si la garantie consentie par la SCI
n’était pas contraire à son intérêt social, dès lors
que la valeur de son unique bien immobilier
était inférieure au montant de son engagement
et qu’en cas de mise en jeu de la garantie, son
entier patrimoine devrait être réalisé ce qui était
de nature à compromettre son existence même.
C’est la première fois à notre connaissance que
la 3ème chambre civile de la Cour de cassation
se prononce sur les conditions de validité d’une
sûreté consentie par une société en dehors de
son objet social. Ces conditions ne sont pas
nouvelles ; elles ont été énoncées à plusieurs
reprises par la chambre commerciale.
Cass 3ème civ. 12 septembre 2012 n°11-17.948
- JCP N du 5 octobre 2012 n° 40 - BRDA
n°20/12 – 31 octobre 2012
Augmentation des engagements
– appels de fonds
– refus d’un associé
– faute (non)
Une société civile immobilière regroupait trois
associés, détenteurs respectivement de 50 %,
25 % et 25 % du capital social. Ladite société
avait pour projet une acquisition immobilière
nécessitant des appels de fonds auprès desdits
associés en cours de vie sociale, et venant s’ajouter
à ceux autorisés aux termes des statuts. L’un des
associés refusa de répondre auxdits appels de
charge.
Par conséquent, ledit associé, détenteur de la
19
d’engager un salarié à temps complet, ne peut se
prévaloir d’une créance de salaire différé dès
lors que l’aide apportée n’était qu’occasionnelle.
Bien que l’article L321-13 du Code rural exige
une participation directe et effective à l’exploitation agricole, rien n’oblige à ce que cette participation soit permanente et exclusive.
Toutefois, elle ne peut pas être qu’occasionnelle.
Cass.1ère civ. 20 juin 2012 n°11-20-217 Solution Notaires n°8-9 août-septembre 2012
moitié du capital, a notifié à la société et à ses
associés un projet de cession de parts, puis s’est
rétracté et a demandé en justice la dissolution
anticipée de la société au motif de la paralysie
de celle-ci pour mésentente entre les associés.
Cette demande a été rejetée par la cour d’appel
saisie du litige, mais les demandes reconventionnelles formées par les autres associés ont
été accueillies favorablement ; et notamment
celle ayant trait à une expertise visant à évaluer
le préjudice causé par le retard dans le financement du projet immobilier de la SCI imputable
selon eux au refus de l’associé majoritaire de
répondre aux appels de fonds.
Cet arrêt d’appel a été censuré par la cour de
cassation, qui affirme que : « les engagements
d’un associé ne pouvant, en aucun cas, être
augmentés sans son consentement, le refus de
répondre à des appels de fonds en cours de vie
sociale ne peut être considéré comme fautif, sauf
à ce que ces appels de fonds soient prévus par
les statuts. »
Cette solution est conforme à l’article 1836 du
Code civil, qui édicte une règle fondamentale
qui, selon les auteurs, retranscrit le caractère
contractuel de la société, et par là même le fait
qu’un contractant ne puisse être engagé par un
contrat à d’autres obligations que celles qu’il a
voulues.
Cependant, il est important de rappeler que la
Cour de cassation juge également que le fait de
créer une société sans apporter de fonds propres
suffisants pour assurer son fonctionnement
dans des conditions normales et de poursuivre
l’activité sans prendre aucune mesure pour
remédier à cette insuffisance de fonds propres
constitue de la part des dirigeants une faute de
gestion au sens de l’article L.651-2 du Code de
commerce (Cass. Com., 23 novembre 1999,
n°97-12834 : RJDA 3/00 n°457).
Ainsi, si le principe de l’article 1836 du Code
civil demeure incontestable, il convient tout de
même de veiller à porter une appréciation globale quant à la part de responsabilité de l’associé qui n’aurait pas pris la mesure des besoins
DROIT DES AFFAIRES
financiers de la société qu’il a constituée.
Cass. Com., 10 juillet 2012, n° 11-14267
(F-PB) SARL OPIM c/ Sté Caulet et a. - Bulletin
Joly Sociétés Octobre 2012 n°10, p.693
Héritiers d’un associé de SCP
– droit au bénéfice (oui)
– qualité d’associé (non)
En cas de décès d’un associé de société civile
professionnelle (SCP), les héritiers ou légataires
de l’associé n’acquièrent pas la qualité d’associé, et pendant le délai durant lequel ils ont la
faculté de céder les parts du défunt, ils ne peuvent exercer aucun droit dans la société.
Toutefois, et sauf s’ils en sont déchus, ils conservent vocation à la répartition des bénéfices
dans les conditions prévues par les statuts (Loi
du 29-11-1966 art. 24, al. 2 et 4).
Une Cour d’appel avait cru pouvoir déduire de
ces dispositions que les héritiers ou légataires
d’un associé décédé d’une SCP d’architectes
n’avaient droit aux bénéfices que pendant le
délai imparti pour parvenir à la cession de parts
(délai d’un an à compter du décès auquel s’ajoute,
en l’absence de cession dans ce délai, un délai
de six mois qui est laissé à la SCP pour acquérir
ou faire acquérir les parts) et pas au-delà.
A tort, vient de juger la Cour de cassation : les
héritiers ou légataires conservent vocation aux
bénéfices jusqu’à la cession ou au rachat des
parts du défunt. C’est une solution inédite
applicable à toute SCP.
Cass. 1ère civ. 12 juillet 2012 - Affaire « Bargas
c/ Rigal » n°11.18-453 – BRDA n°17/12 – 15
septembre 2012
SOCIETE
COMMERCIALE
Réparation d’un préjudice résultant
d’une vente dolosive de droits sociaux
Si l’acquéreur trompé n’exerce pas l’action en
nullité de la vente pour dol, il peut demander
uniquement la réparation du préjudice correspondant à la perte d’une chance d’avoir pu traiter
à de meilleures conditions.
Le vendeur de parts d’une société dissimule à
son acheteur le fait que des contre-lettres aux
contrats passés par la société stipulent des
clauses défavorables à celle-ci.
L’acheteur ainsi trompé n’exerce pas l’action en
nullité de la vente pour dol. Il demande à être
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
COPROPRIÉTÉ
indemnisé de la perte de la chance d’avoir pu
réaliser un autre investissement, plus favorable
à ses intérêts. Il est débouté par la Cour d’appel.
N’ayant pas exercé l’action en nullité de la
vente, le seul dommage dont il peut demander
réparation est celui correspondant à la perte
d’une chance d’avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses pour lui.
Cass. com. 10 juillet 2012 – n°11.21.954–
Dictionnaire permanent Droit des affaires –
bulletin n°779 octobre 2012
Fixation de la rémunération
du gérant de SARL
– nécessité d’une décision collective
ou d’une fixation par les statuts
Après la cession par le gérant d’une SARL et son
conjoint, seuls associés de la société, de l’intégralité de leurs parts sociales, l’acquéreur des
parts et la SARL avaient demandé le remboursement de la rémunération que l’ancien gérant
avait prélevéé avant la cession sans autorisation
de l’assemblée des associés.
La Cour d’appel de Rouen avait rejeté cette
demande : les époux étant les seuls associés de
la SARL, il était sans intérêt de s’attacher à
déterminer si les prélèvements critiqués avaient
été ou non autorisés par l’assemblée générale.
La Cour de cassation vient censurer cette
décision au motif que la rémunération du
gérant d’une SARL est déterminée soit par les
statuts, soit par une décision de la collectivité
des associés.
Le Code de commerce ne comporte aucune
disposition relative à la rémunération des
gérants de SARL, mais il était admis que leur
rémunération est librement déterminée par les
statuts ou par une décision des associés.
C’est la première fois que la Cour de cassation
énonce clairement ce principe. Elle le fait au
visa de l’article L223-18 du Code de commerce
qui prévoit notamment que les gérants sont
nommés pars les statuts ou par décision collective.
Cass. com. 25 septembre 2012 – Affaire
« Raffoux c/ Garreau » n°1-22.754 – BRDA
n°19/12 – 15 octobre 2012
ASSEMBLEE
GENERALE
Refus en assemblée de travaux
– annulation par le juge
– remise en état demandée
par le syndicat (oui)
L’annulation par le juge du refus par l’assemblée générale, d’autoriser des copropriétaires à
réaliser des travaux dans leur lot, ne vaut pas
autorisation de les effectuer. Par conséquent,
l’action du syndicat visant à exiger la remise en
l’état des lieux modifiés sans cet accord préalable de la copropriété est recevable.
Cass. 3ème civ. 19 septembre 2012 n°11-21.631
n°981 P+B, Bull. Gestion Immo n°450,
octobre 2012 p. 6
PARTIES COMMUNES
Vice de construction
sur parties communes
– trouble dans les parties privatives
– action du copropriétaire
contre le syndicat (oui)
Une entreprise a causé des désordres tant dans
les parties communes que privatives d’un
immeuble en copropriété, et a été condamnée à
effectuer les travaux de réparation qui s’imposent.
Les désordres persistant dans un appartement,
son propriétaire assigne en responsabilité le
syndicat des copropriétaires.
La Cour rappelle les dispositions d’ordre public
de la loi du 10 juillet 1965 : le syndicat des
copropriétaires est responsable des désordres
affectant les parties communes, à charge pour
lui ensuite de former un recours contre les
responsables. L’action offerte au copropriétaire
n’a pas un caractère subsidiaire. Par conséquent,
un copropriétaire est bien fondé à agir contre le
syndicat concernant une humidité persistante
de son appartement, dont l’origine est un vice
de construction affectant les parties communes.
Cass. 3ème civ. 19 septembre 2012 n°1110.421 n°989 P+B, Bull. Gestion Immo
n°450, octobre 2012 p 6 - Droit et Pat. Hebdo
n°890 du 1er octobre 2012
- CHEUVREUX INFO Pour obtenir la copie d’un texte réglementaire ou d’une jurisprudence mentionnés dans le Bulletin
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20
DROIT FISCAL
REVENUS FONCIERS
Appartement mis en location
– immeuble resté vacant
– possibilité de déduire des charges (oui)
– preuve des diligences du propriétaire
En application des dispositions de l’article 28
du CGI les propriétaires disposent de la possibilité de déduire de leurs revenus fonciers certaines charges grevant les immeubles qu’ils
mettent en location et dont l’article 31 du
même code dresse la liste.
Dans la décision du 4 juin 2012 les juges de la
Haute Assemblée rappellent que la déductibilité de ces charges n’est pas conditionnée à ce
que l’immeuble ait effectivement procuré des
revenus fonciers. Il appartient en revanche au
contribuable d’apporter la preuve qu’il a accompli toutes les diligences de nature à offrir à la
location cet immeuble resté vacant.
CE, 10ème et 9ème s.-s., 4 juin 2012, Friedman,
n°334196
ISF
Déductibilité des travaux effectués
par l’usufruitier
– liste limitative de l’article 606
du Code civil
L’usufruitier n’est en principe tenu qu’aux
réparations d’entretien, les grosses réparations
demeurant à la charge du nu-propriétaire en
application des dispositions des articles 599
al 2, 605 et 606 du Code civil.
En matière d’ISF, l’article 768 du CGI prévoit
que seules les dettes à la charge personnelle
d’un contribuable sont déductibles.
L’administration fiscale a refusé aux usufruitiers
la déduction, au titre de l’ISF, du coût de travaux
de démolition, de reconstruction d’une habitation d’une superficie supérieure, de construction
d’une piscine et d’aménagement du terrain, au
motif que ces travaux constituaient de grosses
réparations.
Les juges de cassation ont censuré la décision
rendue en appel en visant l’article 606 du Code
civil. A cet égard, il est rappelé que l’article
précité dresse une liste limitative des travaux
qui constituent de grosses réparations. Au cas
particulier, les travaux réalisés n’entrant pas
dans le champ de l’article 606 du Code civil, ils
ne constituaient pas de grosses réparations
mais de simples améliorations. Par conséquent
les usufruitiers étaient fondés à se prévaloir de
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
la déduction au titre de l’ISF des coûts qu’ils
avaient supportés.
Cass. com. 30 mai 2012, Porcheron, n°1118.323 - Bull. Gestion Immo n°448, juillet
2012 p. 10
DROIT
D’ENREGISTREMENT
Bail à construction
– acquisition par le preneur en cours
de bail – qualification de résiliation
anticipée (non)
L’acquisition d’un terrain en cours de bail à
construction par son preneur n’entraine pas la
résiliation anticipée du bail mais son extinction.
Par suite la valeur des constructions effectuées
par le locataire n’entre pas dans l’assiette des
droits d’enregistrement.
L’administration faisait valoir que cette cession
constituait une résiliation amiable anticipée du
bail. Elle soutenait que le principe d’autonomie
du droit fiscal n’empêchait pas l’application des
dispositions de l’article 683 I du CGI aux termes
duquel les actes civils et judiciaires translatifs de
propriété ou d’usufruit de biens immeubles
à titre onéreux sont assujettis à une taxe de
publicité foncière ou à un droit d’enregistrement
au taux prévu à l’article 1594 D.
Le Cour de cassation a rejeté le pourvoi de
l’administration au motif que la vente avait
entrainé l’extinction du bail et non sa résiliation
anticipée en raison de la confusion des droits
locatifs et de propriété au sens des dispositions
de l’article 1300 du Code civil.
Cass. com. 12 juin 2012, DGFIP c/ Sté Arc,
n°11-18.978
BIC
Location de locaux aménagés
– appréciation au cas par cas des
conditions d’occupation des locaux
– nécessité du matériel minimal pour
pouvoir exploiter
L’arrêt rendu par le Conseil d’Etat rappelle les
conditions pour que la location de locaux
aménagés soit qualifiée de commerciale au
sens des dispositions de l’article 35, I-5° du CGI.
Cette appréciation s’effectue in concreto et
doit prendre en considération l’ensemble des
agencements, équipements ou moyens y
compris mobiles essentiels à l’exercice de l’acti-
21
vité. Les éléments qualifiés d’essentiels correspondent à ceux sans lesquels l’exploitation ne
pourrait être exercée dans les locaux considérés.
Dans l’affaire portée devant le Conseil d’Etat,
les juges, constatant l’absence du matériel de
manutention, ont considéré que la location ne
comportait pas l’essentiel du matériel nécessaire
à l’exploitation d’une entreprise de stockage.
CE, 10ème et 9ème s.-s., 16 mai 2012, d’Arras,
n°323079.
DIVERS
Travaux incombant à l’acquéreur
– charge augmentative du prix (non)
A travers un arrêt de la chambre commerciale,
la Cour de cassation nous donne une illustration de l’article 683 du Code général des
impôts, qui dispose que l’assiette des droits de
mutation à titre onéreux porte sur le prix
exprimé dans l’acte augmenté des charges
stipulées au profit du vendeur si elles existent.
Ainsi en est-il lorsque des travaux de rénovation
sont imposés à l’acquéreur par le vendeur et
réalisés postérieurement à la conclusion de la
vente.
Les faits particuliers avaient toutefois orienté la
solution en l’espèce. En effet, les vendeurs
étaient les associés de l’entreprise qui intervenait pour la rénovation. La vente et les travaux
se présentaient donc comme une opération
globale aux intérêts économiques liés.
D’une manière générale pour que des travaux
constituent une charge augmentative de prix, il
faut qu’ils incombent aux vendeurs.
Cass. Com. 10 juillet 2012 n°11-21-280 Solution Notaires n°10 octobre 2012
CONTENTIEUX
FISCAL
Rappel fiscal
– donations
– clause d’inaliénabilité
– décote de sa valeur vénale (non)
Un acte de donation portant sur la nue-propriété
d’une maison interdisait au donataire d’aliéner
ou d’hypothéquer pendant la durée de l’usufruit
de la donatrice, âgée de 82 ans.
La cour d’appel avait admis une décote de 10 %
sur la valeur de la nue-propriété.
L’arrêt est cassé : la Cour de cassation rappelle
que la limite apportée par le donateur à la
liberté d’aliéner un immeuble dont il se réserve
l’usufruit n’affecte pas sa valeur vénale.
Cass. com. 11 septembre 2012 n° 11-21.234 Flash du Defrénois n°39 du 2 octobre 2012
URBANISME ET AMÉNAGEMENT
PERMIS DE
CONSTRUIRE
Permis de construire
– musée d’art contemporain de la
Fondation Louis Vuitton
– contrariété de la loi de validation
du permis avec l’article 6 de la CEDH
– oui – conformité du permis aux
articles ND 6 et 7 du POS – oui
La Cour administrative d’appel de Paris vient
de rendre une nouvelle décision concernant
l’implantation du musée d’art contemporain de
la Fondation Louis Vuitton au sein du bois de
Boulogne à Paris. Pour mieux comprendre cet
arrêt, il convient de rappeler les différentes
étapes qui ont jalonné cette affaire.
Le 8 août 2007, la Fondation d’entreprise Louis
Vuitton obtient un permis de construire pour la
création d’un musée d’art contemporain au bois
de Boulogne.
L’annulation, par décision du Conseil d’État en
date du 18 juin 2010, des articles 6 et 7 du
règlement des zones UV et N du PLU de Paris, a
eu une incidence directe sur le permis de la
Fondation Louis Vuitton qui, par jugement
du tribunal administratif de Paris en date du
20 janvier 2011, a été annulé aux motifs qu’il ne
respectait pas les articles ND 6 et 7 du POS
remis en vigueur.
Par un cavalier législatif au sein de la loi relative
au prix du livre numérique (art. 10 de la loi du
26/05/2011), le législateur a « validé » ce
permis en indiquant que « sous réserve des
décisions de justice passées en force de chose
jugée, sont validés, à la date de leur délivrance,
les permis de construire accordés à Paris en tant
que leur légalité a été ou serait contestée pour
un motif tiré du non-respect des articles ND 6 et
ND 7 du règlement du plan d'occupation des
sols remis en vigueur à la suite de l'annulation
par le Conseil d'Etat des articles N 6 et N 7 du
règlement du plan local d'urbanisme approuvé
par délibération des 12 et 13 juin 2006 du
Conseil de Paris » ; étant ici précisé que cette
disposition a été déclarée conforme à la constitution à l’occasion d’une question prioritaire de
constitutionnalité (Cons. Const. 24/02/2012).
L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris
du 18 juin 2012 a pour objet de se prononcer
sur la légalité de l’annulation du permis de
construire opérée par le jugement du tribunal
administratif de Paris du 20 janvier 2011.
Pour apprécier la légalité du permis, la Cour
écarte l’application de la loi du 26 mai 2011
précitée car elle estime que cette mesure, à
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
portée rétroactive, porte atteinte au droit à un
procès équitable prôné par l’article 6 de la
convention européenne des droits de l’Homme.
En effet, pour la Cour, seuls d’impérieux motifs
d’intérêt général auraient pu justifier de porter
atteinte à ce principe, or, même si « la création
du musée d'art contemporain envisagé présente
un intérêt culturel, urbanistique, architectural et
économique de nature à renforcer l'attractivité
touristique de la ville de Paris et à mettre en
valeur le Jardin d'acclimatation, lesdits motifs
ne revêtent cependant pas, en l'espèce, un
caractère impérieux ».
La Cour annule enfin le jugement de première
instance en estimant que le permis litigieux est
conforme aux articles ND 6 et 7 du POS.
CAA Paris, 18 juin 2012, req. n°11PA00758,
AJDA 30 juillet 2012, p. 1496
Déclaration de travaux
sur construction existante
– construction initiale irrégulière
– application de la jurisprudence
Thalamy
– nécessité de régulariser l’ensemble
– oui
Le propriétaire d’une maison d’habitation a
déposé une déclaration de travaux portant sur
la modification de l’aspect extérieur de la
construction. Le maire s’est opposé à la déclaration aux motifs que la construction initiale avait
été édifiée sans autorisation.
Le Conseil d’État confirme en l’espèce la position du maire en faisant application de la
jurisprudence Thalamy (CE, 9/07/1996) :
« dans l’hypothèse où l’autorité administrative
est saisie d’une demande tendant à ce que
soient autorisés des travaux portant sur un
immeuble qui a été édifié sans autorisation, la
demande (doit) alors porter sur l’ensemble du
bâtiment ».
CE, 27 juillet 2012, req. n° 316155, RDI 2012,
p. 526
Permis de construire sur construction
existante
– construction initiale non-conforme
– application de la jurisprudence Sekler
– travaux étrangers aux dispositions
méconnues
– espèce – oui
Les propriétaires d’une ancienne maison d’habitation ont obtenu un permis de construire pour
sa rénovation.
Face à un risque imminent d’écroulement de la
22
toiture, les travaux ne se sont pas déroulés
comme prévu et un procès-verbal de réalisation
de travaux non conformes au permis délivré a
été dressé. La nouvelle demande de permis de
construire, déposée aux fins de régulariser les
travaux effectués, a été refusée aux motifs du
non-respect de certaines dispositions du POS en
vigueur.
En effet, même si la construction initiale
devait être considérée comme régulièrement
implantée car édifiée antérieurement à l’obligation d’obtenir un permis de construire, elle était
devenue, par l’effet de l’adoption du POS, non
conforme à certaines dispositions du règlement
et notamment aux règles de hauteur.
Saisi d’un recours à l’encontre du refus de
permis, le tribunal administratif de Lyon a
fait application de la jurisprudence Sekler
(CE, 27/05/1988) en indiquant que « la circonstance qu’une construction existante n’est
pas conforme à une ou plusieurs dispositions
d’un plan d’occupation des sols régulièrement
approuvé ne s’oppose pas, en l’absence de
dispositions de ce plan spécialement applicables
à la modification des immeubles existants, à la
délivrance ultérieure d’un permis de construire
s’il s’agit de travaux qui, ou bien doivent rendre
l’immeuble plus conforme aux dispositions règlementaires méconnues, ou bien sont étrangers à
ces dispositions. »
En l’espèce, le juge administratif annule le refus
de permis de construire, estimant qu’eu égard à
la nature et à l’ampleur limitée des travaux
(faible rehaussement de la toiture sans modification du faîtage), ces derniers devaient être
considérés comme étrangers à l’objet des dispositions méconnues.
TA Lyon, 22 décembre 2011, req. n° 1000222,
AJDA 2012, p. 1649
CONTENTIEUX
Autorisation d’urbanisme
– invisibilité du panneau
– inopposabilité de l’obligation
de notification du recours – oui
Les panneaux d’affichage des autorisations
d’urbanisme doivent notamment mentionner
l’obligation faite à l’auteur d’un recours de
notifier sa requête, sous peine d’irrecevabilité
de sa demande, à l’auteur et au titulaire de
l’autorisation, conformément aux dispositions
de l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme.
En l’espèce, le panneau d’affichage d’un permis
d’aménager avait été mal positionné de sorte
qu’il n’était pas visible depuis la voie publique.
Appliquant un principe dégagé par le Conseil
d’État (CE, avis, 19 novembre 2008, req.
n° 317279), la cour administrative de Douai
juge que l’absence de visibilité du panneau
rend inopposable l’irrecevabilité prévue à
l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme.
CAA Douai, 19 avril 2012, req. n° 11
DA01164, JCP A, n° 35, comm. 2284
Avis de l’ABF
– déclaration préalable
– non-opposition tacite – oui
En principe, en matière d’autorisation de
construire, le défaut de notification d’une décision
expresse à l’issue du délai d’instruction vaut
décision d’acceptation.
Par exception, dès lors qu’un permis nécessite
d’obtenir l’avis de l’architecte des bâtiments de
France (ABF), son obtention ne peut pas faire
l’objet d’une décision d’acceptation tacite.
Toutefois, il convient de relever que cette
exception ne s’applique que pour les permis (de
construire, d’aménager ou de démolir).
Par conséquent, le Conseil d’État précise qu’une
déclaration préalable portant sur un bien situé
en site classé et nécessitant de ce fait d’obtenir
un avis de l’ABF peut faire l’objet d’une décision
tacite de non-opposition.
CE, 26 octobre 2012, req. n° 350737, commune
de Saint-Jean-Cap-Ferrat, Dalloz actualités,
7 novembre 2012
PLU
PLU
–modification
– engagement de la procédure
– compétence du Conseil municipal
– oui
L’article L. 123-6 du Code de l’urbanisme impose
que les procédures d’élaboration ou de révision
générale d’un PLU soient initiées par délibération
du Conseil municipal.
Comme aucune disposition similaire n’existe en
cas de procédure de modification d’un document
d’urbanisme, la commune de Magland a engagé,
par décision du maire, une procédure de modification de son PLU.
Saisie d’un recours à l’encontre de la décision
d’approbation de la modification, la Cour
administrative d’appel de Lyon juge que la
compétence pour prescrire une modification
d’un PLU appartient au seul Conseil municipal.
Elle précise en effet qu’aucune disposition du
Code de l’urbanisme ne prévoit que l'initiative
de la procédure de modification du plan local
d'urbanisme appartiendrait au maire et indique
que cette compétence ne saurait être déduite
de la circonstance que l'article L. 123-6 précité
confère expressément au conseil municipal le
pouvoir de prescrire l'élaboration ou la révision
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
du PLU. Elle poursuit son argumentation en
indiquant que l’engagement d’une procédure
de modification d’un document d’urbanisme ne
figure pas non plus au nombre des attributions
du maire exercées au nom de la commune
énumérées au Code général des collectivités
territoriales et qu'il appartient dès lors au
conseil municipal, investi d'une compétence
générale, de prescrire la modification du plan
local d'urbanisme.
CAA Lyon, 22 mai 2012, req. n° 11LY00778,
AJDA, p. 1760.
PLU
– révision
– concertation
– respect des modalités fixées – oui
– durée de la concertation – indifférent
En application de l’article L. 300-2 du Code de
l’urbanisme, toute procédure d’élaboration
d’un PLU doit faire l’objet d’une concertation
pendant toute la durée d’élaboration du projet ;
étant ici précisé que chaque commune est libre
dans la définition des modalités de concertation
qu’elle entend mener.
Selon cette même disposition, les documents
d'urbanisme ne sont pas illégaux du seul fait
des vices susceptibles d'entacher la concertation,
dès lors que les modalités définies par la délibération ont été respectées.
En l’espèce, une décision d’approbation d’un
PLU était contestée pour insuffisance de concertation car même si la commune avait respecté
les modalités qu’elle s’était fixée, les requérants
estimaient que la concertation n’avait pas été
organisée pendant toute la durée de l’élaboration du document. Le Conseil d’État refuse de
faire droit à la requête en estimant que « la
légalité d'une délibération approuvant un plan
local d'urbanisme ne saurait être contestée au
regard des modalités de la procédure de concertation qui l'a précédée dès lors que celles-ci
ont respecté les modalités définies par la délibération prescrivant l'élaboration de ce document
d'urbanisme. »
CE, 8 octobre 2012, req. n° 338760, AJDA,
p. 1932
DROIT
DE PRÉEMPTION
URBAIN
Indivisibilité d’une vente immobilière et
d’un fonds de commerce
– opposabilité au titulaire du droit de
préemption urbain (non)
Des vendeurs avaient soumis la cession de leur
23
fonds de commerce à l’acquisition, par le même
acquéreur, de l’immeuble dans lequel ce fonds
était exploité. La promesse stipulait que l’opération
était indivisible. La Cour de cassation confirme
la solution de l’arrêt de la 3ème chambre de la
Cour de cassation du 11 mai 2000 (n°9718610) : l’indivisibilité de cette opération est
inopposable au titulaire du droit de préemption
urbain qui peut décider d’acquérir l’immeuble
seul, et ceci, même si le notaire avait indiqué
cette indivisibilité dans la déclaration d’intention d’aliéner.
Cass 1ère civ 17 octobre 2012 n°11-22466
Defrénois flash – n°45 - 2012
Non respect du PLH
– constat de carence
– transfert du DPU au préfet
– conditions d’application
dans le temps
Lorsqu’une commune ne remplit pas les engagements inscrits au programme local de l’habitat
(PLH) pendant plus de trois ans, les dispositions
du Code de la construction et de l’habitation
prévoient la possibilité pour le Préfet d’engager
une procédure de constat de carence. Pendant
toute la durée de l’arrêté de carence, la loi
Boutin du 25 mars 2009 prévoit que le droit de
préemption est exercé par le Préfet dès lors qu’il
porte sur l’aliénation d’un terrain, bâti ou non
bâti, affecté au logement.
À l’occasion d’un contentieux relatif à une
décision de préemption prise par le Maire de
Nogent-sur-Marne, la Cour administrative
d’appel précise que cette substitution du titulaire
du droit de préemption s’exerce également dans
les cas où un arrêté de carence serait intervenu
préalablement à l’entrée en vigueur de cette
mesure : « considérant que les dispositions (…)
qui prescrivent que le Préfet est substitué à la
commune pour l’exercice du droit de préemption
urbain (…) sont entrées en vigueur au 28 mars
2009, lendemain de la publication de cette loi
au Journal officiel ; qu’elles ne prévoient aucune
mesure d’application et se sont appliquées
immédiatement, en l’absence d’impossibilité
manifeste, y compris dans les cas où un arrêté de
carence était antérieurement intervenu. »
CAA Paris, 28 juin 2012, req. n° 11PA03557,
AJDA, p. 1938
DPU
– appréciation de la légalité de la
décision de préemption
– examen du prix
– non
À l’occasion d’un recours contre une décision de
préemption, le juge administratif vient rappeler
les motifs pouvant légalement justifier une déci-
sion de préemption : « les collectivités titulaires
du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la
réalité d'un projet d'action ou d'opération
d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme,
alors même que les caractéristiques précises de
ce projet n'auraient pas été définies à cette date
et, d'autre part, si elles font apparaître la nature
de ce projet dans la décision de préemption ».
Le Conseil d’État rappelle que seuls ces motifs
sont examinés par le juge pour déterminer la
légalité d’une décision de préemption et sanctionne, pour erreur de droit, l’arrêt d’appel qui
avait annulé une décision de préemption au
motif de l’inadéquation du prix de la préemption avec le projet invoqué par la commune.
CE, 6 juin 2012, req. n° 341534, AJDA, p. 1990
ZAC
ZAC
– Programme des équipements publics
– insuffisance – non
– dossier réalisation
– mesures préparatoires
– oui
– concession
– rémunération substantiellement
assurée par les résultats de l’opération
– espèce – oui
La cour administrative d’appel de Paris a rendu
un arrêt concernant la ZAC Clichy Batignolles.
Alors que le tribunal administratif avait annulé
en première instance, les délibérations approuvant le dossier de réalisation, le programme
des équipements publics et la concession d’aménagement, la Cour adopte une position
plus libérale à l’égard des documents de la ZAC.
Elle rappelle d’abord, que la délibération qui
approuve le dossier de réalisation constitue une
mesure préparatoire insusceptible de recours
pour excès de pouvoir. Ensuite, s’agissant du
PEP, elle retient une appréciation relativement
souple de l’article R.311-7 du Code de l’urbanisme qui impose que le PEP fasse état des
équipements projetés dans le périmètre de la
ZAC, indique leur mode de financement et
démontre l’accord des collectivités maître
d’ouvrage en ce qui concerne ce financement :
pour ce qui concerne les équipements situés
dans le périmètre de la ZAC mais dépassent les
besoins des futurs habitants, la Cour considère :
« que toutefois, dans la mesure où ils font l’objet
d’un financement propre, extérieur à la Z.A.C., et
que leur mise en œuvre dépend d’un calendrier
de réalisation spécifique ne permettant pas de
préciser leurs modalités prévisionnelles de
réalisation à la date d’approbation du dossier de
réalisation ou du programme des équipements
publics, ces derniers ne peuvent être irréguliers
du fait qu’ils ne comportent pas de telles
précisions »
En l’espèce, en ce qui concerne le tramway, et
les stations de Vélib, la Cour refuse de considérer,
contrairement au tribunal administratif, que
cette revente soit de nature à constituer une
carence entachant le PEP d’une irrégularité.
Enfin, la Cour apporte un éclairage intéressant
sur la qualification de la concession d’aménagement en marché de travaux ou concession au
regard du droit communautaire, selon que le
concessionnaire est rémunéré substantiellement
ou non par les résultats de l’opération. En l’espèce, elle considère que la circonstance qu’une
partie de la rémunération soit fixée à l’avance,
qu’un complément de prix soit prévu et qu’en
cas de fin de mission avant terme une partie du
déficit puisse être pris en charge par le concédant, « ne peut être regardée comme aboutissant
à une rémunération de l’aménageur qui ne serait
pas « substantiellement constituée par les
résultats de l’opération d’aménagement », ou qui
aboutirait à ce que l’aléa principal de l’opération
ne reste pas à la charge de l’aménageur », dès
lors que les recettes attendues de l’opération
constitue la partie principale de sa rémunération.
CAA Paris, 4 octobre 2012, Ville de Paris c/
Syndicat des copropriétaires de la résidence
Olympe, n°10PA04347
ZAC
– maîtrise foncière partielle
– libre choix de l’aménageur – oui
Le propriétaire d’un terrain inclus dans le
périmètre d’une zone d’aménagement concerté
ayant fait l’objet d’une déclaration d’utilité
publique a formé un recours à l’encontre de
l’arrêté préfectoral ayant rendu son terrain
cessible au profit de l’aménageur de la ZAC.
Le propriétaire contestait le choix de l’aménageur de souhaiter conserver la maîtrise foncière
de l’ensemble de la zone. Il aurait en effet
souhaité participer financièrement au coût du
projet en concluant une convention de participation au financement des équipements publics
conformément aux dispositions de l’article
L. 311-4 du Code de l’urbanisme, laquelle constitue une pièce obligatoire des demandes d’autorisations de construire lorsque le constructeur
n’a pas acquis son terrain de l’aménageur.
Le juge administratif affirme que le fait pour
l’aménageur d’une ZAC d’acquérir (ou non) la
totalité des terrains inclus dans le périmètre de
la zone relève de son libre choix et juge en
l’espèce que le choix de l’aménageur de souhaiter
conserver la maîtrise foncière de l’ensemble de
l’opération afin d’en assurer un aménagement
global et cohérent, ce qui nécessitait de faire
abstraction des limites parcellaires notamment
en matière de voirie et d’aménagement foncier,
n’était pas de nature à priver le projet d’utilité
publique.
La Cour précise également qu’en toute hypothèse, le fait de recourir à une ZAC à maîtrise
foncière partielle n’a pas pour objet « d’ouvrir
aux propriétaires de terrains non acquis d’un
aménageur, le droit d’être associés au projet
d’aménagement. »
CAA Nantes, 15 juin 2012, req. n°
10NT01779, Construction urbanisme n° 10,
octobre 2012, comm. 147
IMMOBILIER INSTITUTIONNEL ET PROMOTION IMMOBILIÈRE
BAIL COMMERCIAL
Centre commercial géré par
une association
– obligation d’adhésion prévue au bail
– nullité de la clause (oui)
– restitution des avantages tirés
La Cour rappelle le principe de la nullité absolue d’une clause obligeant un preneur à adhérer
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
à une association des commerçants d’un centre
commercial. (Cass 3ème civ, 12 juin 2003,
n°02-10.778 ; Cass 1ère civ. 20 mai 2010,
n°09-65.045). Toutefois, elle précise que le commerçant doit restituer en valeur à l’association
les services dont il a bénéficié.
Cass. 1ère. civ. 12 juillet 2012 n°11-17.587
n°914 FS-P+B+I, Bull. Gestion Immo n°449,
septembre 2012 p 4 - JCPN n°30-34 du 27
juillet 2012
24
Local situé dans un ensemble immobilier
– immatriculation au RCS
– nécessité d’une concordance avec
l’ adresse précise du fonds de commerce
(non)
Une société preneuse à bail commercial portant
sur des locaux situés dans un parc d’activités
demande le renouvellement de son bail. Dans
un premier temps, le bailleur accepte à la
IMMOBILIER INSTITUTIONNEL ET PROMOTION IMMOBILIÈRE
condition que la société justifie des conditions
lui permettant de prétendre au renouvellement.
Dans un second temps cependant, le bailleur
saisit le tribunal en arguant que la société ne
bénéficie pas du droit au renouvellement car
elle n’est pas immatriculée au RCS pour les
locaux objets du bail.
La Cour d’appel déboute le bailleur et la Cour
de cassation confirme cette décision : l’immatriculation de la société preneuse correspondait à
l’adresse du parc d’activités même si le numéro
du bâtiment était erroné. Or, le Code de commerce ne comporte aucune exigence concernant l’identification d’un bâtiment au sein d’un
ensemble immobilier.
La Cour d’appel pouvait donc en déduire que la
mention de l’adresse de l’établissement suffisait
à son identification.
Cass. 3ème, 4 juillet 2012, n°11-13868 et
JurisData n°2012-015194 - JCPN n°29 – 20
juillet 2012
BAIL D’HABITATION
ET MIXTE
Bail d’habitation et mixte
– usage uniquement professionnel
– reconduction tacite (non)
La loi du 6 juillet 1989 concerne les baux
d’habitation principale ou à usage mixte : professionnel et d’habitation principale. Cette loi
offre au locataire un droit à une reconduction
tacite de son bail en dehors des cas de congé.
Toutefois, la Cour rappelle que ce droit n’existe
que si les biens sont effectivement utilisés à titre
d’habitation principale (en ce sens cass. Ass.
plen 2 février 1996, n°91-21973). Par conséquent, une SCP d’avocats utilisant exclusivement ce bien à un usage professionnel, ne peut
bénéficier de ce droit. La Cour précise aux
termes de cet arrêt que cet usage constitue en
outre, un motif grave et légitime permettant au
propriétaire de donner valablement congé.
Cass. 3ème civ. 19 septembre 2012 n°1130.369 n°993 P+B, Bull. Gestion Immo
n°450, octobre 2012 p 7 - Flash Defrénois
n°38 du 24 septembre 2012
Baux loi du 6 juillet 1989
– préavis réduit en cas de perte d’emploi
– nécessité de changement de région
(non)
Un locataire, titulaire d’un bail loi de 1989
donne en 2010 congé à son bailleur en invo-
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
quant une perte d’emploi et donc un préavis
réduit d’un mois. Il quitte les lieux le mois
suivant. Le bailleur l’assigne en paiement de
trois mois de loyer.
Le TGI fait droit à sa demande énonçant que si
le licenciement ne faisait pas débat, il n’établissait pas avoir quitté la région.
La Cour de cassation censure cette analyse au
motif que le tribunal avait ajouté à la loi une
condition qu’elle ne comporte pas.
Cass 3ème civ, 19 septembre 2012, Bull Lamy
Immo n°207, octobre 2012
Cependant, la Cour d’appel, n’ayant pas constaté l’existence dans le mandat d’une clause
donnant pouvoir à l’agent de représenter le vendeur pour conclure la vente, cette question est
soumise à une nouvelle discussion devant la
juridiction de renvoi.
Cass. 3ème, 12 avril 2012, n°10-28637 et
JurisData n°2012-007097 - JCPN n°29 – 20
juillet 2012
PROMMESSE
DE VENTE
Des parties ont conclu le même jour, le
30 janvier 1997, à la fois un compromis de
vente sous condition suspensive avec une
réitération prévue au plus tard le 30 mars 2002
et un bail portant sur le même bien – une
maison d’habitation -, d’une durée de 5 ans à
compter de ce jour.
Le compromis de vente stipulait que les
acomptes alors versés lors de la signature
devaient être déduits du prix de vente en cas
d’achat définitif mais restaient acquis au
vendeur dans tous les autres cas.
Le compromis est par la suite résolu aux torts
des deux parties. Les acquéreurs demandent la
restitution de la somme.
La Cour de cassation approuve la Cour d’appel
d’avoir déduit à bon droit que les acquéreurs
étaient fondés à solliciter la restitution de cette
somme en considérant que la résolution entrainait la mise à néant rétroactive de la force obligatoire du contrat et que cet anéantissement
affectait toutes les clauses du compromis y
compris celles invoquée par les vendeurs.
Cass. 3ème civ. 20 juin 2012 n° 11-16.197
(n° 794 FS-D) - AJDI- Juillet-Août 2012- pages
477 à 556- n°7-8
Mandat de vente
– agent immobilier
– représentation
Affaire ayant déjà donné lieu à un arrêt de la
première chambre civile de la Cour de de cassation le 25 février 2010.
Un propriétaire indivis, ayant obtenu pouvoir de
vendre des co-indivisaires, avait conclu avec un
agent immobilier un mandat selon lequel le
bien devait être présenté à la vente pour un prix
enfermé dans une fourchette. Des acquéreurs
acceptent l’offre mais le vendeur dénonce le
mandat et refuse de signer le compromis de
vente préparé par l’agence.
Les acquéreurs assignent alors le propriétaire
pour faire constater la réalisation de la vente et
le vendeur forme une demande reconventionnelle en nullité du mandat.
Le TGI juge que la remise de l’exemplaire du
contrat de mandat postérieurement à sa signature affecte la validité de la clause d’exclusivité
mais pas la validité du mandat. Le vendeur est
donc tenu par l’acceptation de l’offre et la vente
est parfaite. La Cour d’appel confirme ce jugement.
La Cour de cassation casse cette décision et
considère que la remise immédiate d’un des
exemplaires du mandat comportant une clause
d’exclusivité est exigée pour sa validité même.
Sur renvoi de cassation, la Cour d’appel de Lyon
juge qu’il ne peut être prouvé par témoin contre
le contenu du mandat. Le mandat précisait en
effet qu’il avait été remis immédiatement au
vendeur qui, à travers des attestations de ses
enfants et de témoins, tentait de démontrer que
le double du mandat lui avait été remis tardivement. Par conséquent, le mandat est valable et
donc le compromis de vente l’est également.
La Cour de cassation confirme cette solution
en ce qui concerne les modes de preuve.
25
Résolution d’un compromis de vente :
restitution des acomptes payés par les
acquéreurs ayant occupé les lieux
VICES CACHES
Autorisation d’urbanisme
– construction sans permis
– vices cachés
Des propriétaires confient la vente de leur
maison à une société mandatée pour rechercher
un acquéreur. Par son intermédiaire, les propriétaires concluent une promesse synallagmatique
de vente dans laquelle il était stipulé que la
maison ainsi que la piscine avaient été édifiées
selon un permis de construire et une conformité.
Après la signature, le notaire chargé de l’établissement de l’acte authentique fait part à
l’acquéreur des difficultés tenant au défaut de
délivrance de certains documents d’urbanisme.
Les acquéreurs renoncent à leur acquisition et
assignent la société mandataire, le notaire et les
vendeurs en paiement de dommages et intérêts
que leur avait causé leur renonciation à la signature de la vente, leur maison ayant été
vendue entre temps.
La Cour d’appel, dont l’arrêt est confirmé,
accueille d’une part la demande à l’encontre de la
société et des vendeurs en retenant l’existence
dans la promesse d’une mention de nature à
dissimuler les vices affectant le bien vendu et
d’autre part la réparation pour le préjudice que
leur avait causé leur renonciation à la signature
de l’acte de vente.
Cass. 1ère civ. 28 juin 2012 n° 11-13.461
(n°769- F - D) - AJDI- Juillet-Août 2012- pages
477 à 556- n°7-8
VENTE
Vente immobilière
– assainissement raccordé
au réseau public
– nécessité un raccordement total (oui)
L’acte de vente d’une maison précise qu’elle est
raccordée au réseau public d’assainissement.
Découvrant que ce raccordement n’est que
partiel, l’acheteur demande au vendeur le remboursement des travaux de raccordement et
une indemnisation au titre du préjudice subi du
fait de ces travaux.
Sa demande est accueillie. En vendant un
immeuble raccordé à l’égout, le vendeur s’était
engagé à délivrer un bien dont tous les écoulements étaient raccordés. Tel n’était pas le cas
puisqu’une salle de bains, deux machines à
laver et un wc n’étaient pas reliés au réseau
collectif.
Le vendeur qui déclare dans l’acte que
l’immeuble est raccordé au réseau public
d’assainissement s’engage à délivrer un bien
dont tous les écoulements sont raccordés.
Cass. 3ème civ. 11 juillet 2012 n° 11-14.062 –
Flash Defrénois n°35 du 23 juillet 2012
Clause d’inaliénabilité
– disparitions de l’intérêt légitime
et sérieux
– possibilité de vendre (oui)
Code civil. En l’espèce, une personne avait légué
deux terres contigües, une à sa fille et l’autre à
ses petits-enfants, en stipulant qu’au cas où les
petits enfants désireraient vendre leur terre, ils
devraient la proposer en priorité à leur tante.
Quarante ans après, ils vendent leur parcelle à
un tiers. Entre-temps, la tante avait déjà revendu
la sienne.
La demande de la tante en résolution de la
vente est rejetée au motif que l’intérêt sérieux et
légitime qui motivait la clause initiale avait
disparu, la tante n’étant plus propriétaire de sa
propre terre lors de ladite vente.
L’objectif de la testatrice était de former un ilot
global qui appartiendrait à la famille. Or la
réunion des parcelles était devenue impossible
du fait de la mutation de la première terre.
L’intérêt sérieux et légitime qui animait la
clause d’inaliénabilité n’était donc plus justifié.
Cass.3ème civ. 5 juin 2012 n°11-19-294 Solution Notaires n°8-9 .août-septembre 2012
Faute du diagnostiqueur
– indemnisation intégrale du préjudice
(oui)
Les investigations du diagnostiqueur s’étant
révélées insuffisantes, l’acquéreur qui se trouve
contraint de démolir et de reconstruire le bâtiment à l’identique à la suite de dégradations
commises par les termites a droit à l’indemnisation de son entier préjudice, et non seulement à
l’indemnisation d’une perte de chance.
En l’espèce, un constat parasitaire avait été
annexé à l’acte de vente et mentionnait « la
présence d’indices caractérisant le passage de
termites et l’existence de dégradations commises par les termites « sans activité au jour de
l’expertise ».
La Cour de cassation retient qu’en raison de la
faute commise par la diagnostiqueur, dont les
investigations insuffisantes n’avaient pas permis
de révéler l’ampleur de l’infestation par les termites, l’acquéreur qui avait acheté l’immeuble
pour un prix en rapport avec sa vétusté, ayant
été contraint de démolir et reconstruire, avait
droit à l’indemnisation de son entier préjudice
et non à celle d’une perte de chance.
Cass. 3ème civ. 12 septembre 2012 n° 1118122) – D (rejet) - Flash du Defrénois n°39
du 2 octobre 2012
DIVERS
Par un arrêt de la troisième chambre civile, la
Cour de cassation rappelle le principe selon
lequel une clause d’inaliénabilité n’est valable
que si elle est temporaire et justifiée par un
motif sérieux et légitime. Si cet intérêt disparaît,
le juge peut alors autoriser la vente du bien en
vertu de l’article 900-1 alinéa un in fine du
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
Art de la chasse
– petites parcelles – droit de propriété
– incorporation obligatoire dans une
ACCA – discrimination (non)
La loi Verdeille oblige les propriétaires de parcelles
26
dont la surface est inférieure à 10 hectares de
se regrouper au sein d’Associations Communales
de Chasse Agrées (ACCA) dans le but, entre
autres, « d’assurer une bonne organisation
technique de la chasse » et de « favoriser le développement du gibier et de la faune sauvage ».
Un propriétaire de deux petites parcelles de
terrains a demandé l’exclusion de sa propriété,
auprès de l’ACCA, du périmètre de ladite ACCA
en vue de se réserver un droit de chasse exclusif.
Sa demande est rejetée, il forme alors un
recours au niveau européen.
Il se fonde sur l’arrêt du 29 avril 1999 rendu par
la Grande Chambre de la CEDH (arrêt
Chassagnou et aures du 29 avril 1999) et sur la
loi Verdeille modifiée par la loi du 26 juillet
2000. Ces textes prévoient la possibilité pour le
propriétaire de parcelles ne dépassant pas le
seuil fixé par les Préfectures de s’opposer à la
pratique de la chasse pour des raisons éthiques
et d’ainsi interdire cette pratique sur leur propriété
en demandant l’exclusion de leurs parcelles du
périmètre de l’ACCA dont ils étaient originairement membres. L’interdiction valant dans ce cas
pour les autres membres de l’ACCA mais aussi
pour soi-même.
La CEDH précise également par cet arrêt que
l’obligation pour un propriétaire de petites
parcelles d’intégrer sa propriété au sein d’une
ACCA, l’empêchant ainsi d’exercer une activité
cynégétique sur ses parcelles de façon exclusive,
n’est pas discriminatoire.
A la différence de l’arrêt Chassagnou et autres,
la demande n’est pas ici fondée sur le non-respect des convictions personnelles mais sur une
discrimination de « fortune foncière ». Or, rassembler ses terres au sein d’une ACCA permet
de réguler la pratique de la chasse et d’améliorer
le respect de l’environnement, ce qui n’emporte
pas, selon la CEDH, d’altération des droits de
propriété pour laquelle les Etat ont une marge
d’appréciation « importante » et offre la possibilité de chasser sur les terres des autres membres
de l’association. Enfin, les propriétaires justifiant
de revenus issus de la chasse ou ayant investi
dans des aménagements servant au développement de cette activité avant leur intégration
dans une ACCA peuvent obtenir une indemnisation en contrepartie.
La CEDH instaure donc un prix de l’exclusivité
du droit de chasse sur ses propres terres, son
montant est celui du dépassement du seuil de
surface foncière imposé par les préfectures.
Dans le cas contraire, chers chasseurs, soyez
partageurs !
Cet arrêt vient donc clore un débat en partie
tranché par la Grande Chambre de la CEDH le
29 avril 1999 et qui avait amené l’Etat français
à légiférer sur ce point le 26 juillet 2000 (loi
n°2000-698) afin de modifier la loi du 10 juillet
1964, dite « loi Verdeille ».
CEDH, gde ch., 4 octobre 2012, n°57412/08,
Chabauty c/ France - JCP N n° 43 - 44 du
26 octobre 2012
Mise à disposition d’un bien
à usage agricole
– contrepartie financière
ou en nature sans date fixe
– qualification de bail (oui)
En l’espèce il s’agit d’un prêteur à usage qui se
prétendait être preneur à bail rural en raison du
fait qu’il avait remis la première année à la
personne qu’il qualifie de bailleur une enveloppe
contenant de l’argent liquide et des produits de
l’exploitation (légumes et viandes).
Aux termes de l’article L441-1 du Code rural et
de la pêche maritime : toute mise à disposition
à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole
en vue de l'exploiter pour y exercer une activité
agricole définie à l'article L. 311-1 est régie par
les dispositions du présent titre. Cet article ne
donne aucune indication sur le montant ou la
nature de la contrepartie permettant de dire
qu’il y a paiement de loyers.
La Cour par cet arrêt rappelle ici que :
– le caractère onéreux d’une mise à disposition
ne dépend pas du caractère régulier du versement de la contrepartie : selon elle il n’est pas
nécessaire que tous les mois ou tous les ans,
un loyer soit versé à date fixe ;
– pour conférer au contrat un caractère onéreux,
la contrepartie de la mise à disposition doit
être obligatoire à la différence du don ;
– la qualification de bail exige l’existence d’un
loyer sérieux.
La Cour profite de cet arrêt pour rappeler que le
caractère onéreux d’une mise à disposition ne
dépend pas du caractère régulier de la contrepartie et qu’elle peut être d’un faible montant
ou consistant en un partage de récoltes ou de
certaines denrées.
Cass. 3ème civ. 7 mars 2012 n° 11-14.630
(n° 289 FS-P+B) - AJDI- Juillet-Août 2012pages 477 à 556- n°7-8
Incorporation partielle d’un chemin
d’exploitation à la voie publique
– perte de sa nature
La Cour de Cassation casse un arrêt de Cour
d’appel en considérant que l’incorporation
partielle d’un chemin d’exploitation à la voie
publique ne lui fait pas perdre sa nature de
chemin d’exploitation et sans constater qu’il
avait été supprimé du consentement de tous les
propriétaires qui avaient le droit de s’en servir.
La Haute juridiction considère – en effet - que la
cour d’appel avait violé les articles L162-1 et
L 162-3 du Code rural et de la pêche maritime
selon lesquels les chemins et sentiers d’exploitation étant ceux qui servent exclusivement à la
communication entre divers fonds, ou à leur
exploitation, ils sont, en l’absence de titre,
présumés appartenir aux propriétaires riverains,
chacun en droit soi, mais l’usage en étant
commun à tous les intéressés et ne peuvent être
supprimés que du consentement de tous les
propriétaires qui ont le droit de s’en servir.
Cass. 3ème civ. 31 mai 2012 n° 11-17-027
(n° 669 FS-D) - AJDI- Septembre 2012- pages
557 à 636- n°9
Baux ruraux
– droit de reprise partielle du bailleur
– limitation aux membres de la famille
– article L411-57 du Code rural
et de la pêche maritime
Un Groupement Foncier Agricole (GFA), constitué
au sein d’une famille, avait donné à bail un
domaine agricole à Monsieur X et lui avait
délivré congé d’une des parcelles louées pour
constituer une dépendance à une maison habitée
par l’un de ses associés. Le locataire conteste ce
congé. La cour d’appel, pour déclarer le GFA
fondé à exercer son droit de reprise considéra
que les dispositions de l’article L411-57 du Code
rural et de la pêche maritime ne prévoient pas
d’exception au droit de reprise lorsque le bailleur
est une personne morale et que ce droit ne
peut s’exercer qu’en la personne de son associé
majoritaire.
L’arrêt est cassé. La Cour de cassation précise
qu’un GFA, constitué au sein d’une famille, ne
peut, en sa qualité de bailleur, exercer valablement
son droit de reprise partielle de terrain jouxtant
une maison d’habitation propriété non du GFA,
mais de l’indivision ayant constitué ce dernier,
lesquels n’ont pas la qualité de «membres de la
famille » du bailleur.
Cass. 3ème civ., 5 septembre 2012 n° 1122952- PB (cassation) - Flash Defrénois n°38
du 24 septembre 2012
DROIT PUBLIC
DOMAINE PUBLIC
Application dans le temps du code
général de la propriété des personnes
publiques
– critère de l’aménagement spécial
CE, 3 octobre 2012, Commune de PortVendres, n° 353915. V. le focus en page 4 de
ce bulletin.
Local n’étant pas manifestement
insusceptible d’appartenir
au domaine public
– affectation au service public
en tant qu’élément de l’organisation
d’ensemble d’un centre culturel
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
Par une convention en date du 8 février 1992,
une commune a mis à disposition d’une société
des locaux situés dans un espace culturel en vue
de l'exploitation d'une brasserie. La commune
souhaitant restructurer cet espace a proposé à
la société en cause de continuer son exploitation
dans un autre local en attendant l’achèvement
des travaux projetés. Après avoir refusé cette
proposition, ladite société s’est maintenue dans
les lieux et la commune a saisi le juge des référés
du tribunal administratif de Nancy afin qu'il
ordonne son expulsion sur le fondement de l'article L. 521-3 du Code de justice administrative.
Par ordonnance du 11 octobre 2011 le juge des
référés a enjoint à cette société de libérer le local,
décision contre laquelle elle s’est pourvue en
cassation en soulevant notamment un moyen
tiré de l’incompétence de la juridiction adminis-
27
trative. Le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la
société et retient dans ce cadre la compétence
de la juridiction administrative en considérant que
le local en question constituait un élément de
l’organisation d’ensemble de l’espace culturel et
appartenait donc au domaine public de la
commune. Il relève à ce titre, après avoir détaillé
la nature des différents espaces du centre (un
hall d'accueil, une billetterie, des locaux techniques, la salle occupée par la société en cause,
une salle de spectacles, des bureaux, une salle de
cinéma, une salle de réunion et l'appartement
du concierge, un espace destiné au « rock » et
des locaux de rangement du bar) « que la
convention stipulait que la commune se réservait le droit d'utiliser la salle pour ses propres
activités culturelles, en ne laissant dans cette
hypothèse qu'un espace de 72 mètres carrés
DROIT PUBLIC [sur 264] à la disposition du gérant et que
celui-ci pouvait organiser des animations et des
spectacles correspondant aux orientations
culturelles de l'espace […] avec l'autorisation
préalable de son responsable ». Partant, et
« alors même qu'il existait un accès au bar
distinct de l'entrée principale, le local mis à
disposition […] constituait un des éléments de
l'organisation d'ensemble de l'espace Georges
Sadoul et devait, par suite, être regardé comme
affecté au service public culturel de la commune ».
Conseil d'État, 26 mars 2012, M. A., n°353681.
DOMAINE PRIVÉ
Chemin rural
– obligation d’entretien
par la commune
(non)
Le propriétaire d’une parcelle desservie par un
chemin ouvert à la circulation comportant des
nids de poule et des nappes d’eau stagnante,
engage la responsabilité de la commune pour
défaut d’entretien du chemin. Saisi du litige, le
Conseil d’Etat considère que le chemin est
demeuré dans la voirie rurale dans la mesure où :
(i) il n’a pas fait l'objet, antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 7 janvier
1959, d'un arrêté de reconnaissance en vertu
des dispositions de la loi du 20 août 1881 selon
lesquelles les chemins ruraux reconnus sont
incorporés de plein droit à la voirie rurale de la
commune ;
(ii) ce chemin, qui n'est pas situé en agglomération, n’a pas fait l'objet de l'une des procédures
de classement dans la voirie communale
prévues par l'article 9 de l'ordonnance du
7 janvier 1959. Par conséquent, en principe,
une commune ne peut être responsable des
dommages causés par un chemin rural sur le
fondement du défaut d’entretien normal. Mais il
en va différemment lorsque la commune a
exécuté, postérieurement à l’incorporation du
chemin dans la voirie rurale, des travaux
assurant la viabilité du chemin et acceptant
ainsi de l’entretenir. En l’espèce, la lettre du
maire indiquant faire « au mieux pour résoudre
le problème posé par le mauvais état de ce
chemin » ne traduit pour le juge aucun accomplissement de travaux d’entretien. Par ailleurs, le
pouvoir de police du maire sur les chemins
ruraux n’a pas non plus pour objet de mettre
à la charge d’une commune l’obligation d’entretien du chemin
CE, 26 septembre 2012, M. Garin, n°347068.
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
suite
CONTRATS PUBLICS
Contrats administratifs
– principes de la commande publique
Saisi d’un litige né à l’occasion de la signature
d’un contrat de prestations de services entre le
Consulat général de France à Tunis et une
société privée ayant pour objet la collecte des
dossiers de demandes de visas, le Conseil d’Etat
considère que les principes de la commande
publique s’appliquent à ce contrat. Au titre de
ces principes figurent ceux de liberté d’accès à
la commande publique, d’égalité de traitement
des candidats et de transparence des
procédures.
Le Conseil d’Etat admet ainsi que les principes
de la commande publique peuvent trouver à
s’appliquer à des contrats administratifs ne
relevant pas du champ d’application du Code
des marchés publics ni d’autres textes comme
ceux relatifs aux délégations de service public.
La décision ne permet pas en revanche de savoir
si ces principes doivent s’appliquer à tout
contrat administratif, ou s’ils ne concernent que
certains d’entre eux.
CE, 29 juin 2012, Société Proc 2C, n°357976,
JCPA, n°46, 19 novembre 2012, p.22.
Articulation référé
précontractuel/référé contractuel
– délai de standstill
Un candidat évincé d’une procédure de passation
d’un marché public de fournitures lancé par un
département a formé un référé précontractuel
afin d’annuler la procédure. Le marché ayant
été signé quelques jours avant la demande en
référé, le requérant s’est désisté de son recours
et a formé un référé contractuel sur le fondement des articles L.551-13 et L.551-18 du
Code de justice administrative aux fins d’obtenir
l’annulation du marché.
Le Conseil d’Etat, saisi du litige, rappelle qu’un
candidat évincé exerçant un référé précontractuel ne peut pas former de référé contractuel,
sauf si celui-ci « était dans l'ignorance du rejet
de son offre et de la signature du marché, par
suite d'un manquement du pouvoir adjudicateur au respect des dispositions de l'article 80
du Code des marchés publics qui prévoient
l'obligation de notifier aux candidats le rejet de
leurs offres et fixe un délai minimum de
seize jours – onze jours en cas de transmission
électronique – entre la date d'envoi de cette
notification et la conclusion du marché ».
En l’espèce, le Conseil d’Etat admet la recevabilité
28
du référé contractuel en considérant que le seul
rappel par le pouvoir adjudicateur dans son
courrier de rejet de l’offre d’un candidat du délai
minimum prévu par l’article 80 du Code des
marchés publics ne pouvait valoir fixation du
délai de suspension que s’imposait le pouvoir
adjudicateur entre la date d'envoi de la notification du rejet de l'offre et la conclusion du
marché.
CE, 29 juin 2012, Société Signature,
n° 357617, AJDA 2012 n°36 p.1989.
Délégation de service public
– durée du contrat inférieure à celle de
l’amortissement des investissements
(oui) – indemnisation du délégataire
en fin de contrat
Une communauté d’agglomération a lancé une
consultation en vue de conclure une délégation
de service public ayant pour objet le financement,
la conception, la construction et l’exploitation
d’une station d’épuration pour une durée de
vingt ans. Le Conseil d’Etat est saisi d’un recours
formé contre la délibération de la communauté
d’agglomération ayant autorisé la signature
du contrat. Rappelant que l’article L.1411-2 du
Code général des collectivités territoriales impose
que les délégations de service public soient
limitées dans leur durée, laquelle doit être déterminée en fonction de la nature et du montant
de l’investissement à réaliser, il considère que le
texte n’interdit pas, par principe, que cette
durée puisse être inférieure à celle de l’amortissement des investissements réalisés.
Dès lors, le Conseil d’Etat considère que le
principe posé par le texte ne fait pas obstacle
au droit du délégataire d’être indemnisé à
hauteur des investissements non amortis à l’issue
du contrat si la durée de celui-ci est inférieure à
celle de leur amortissement. Dans ces conditions,
le juge considère que le contrat peut valablement prévoir le montant de l’indemnisation due
au titre des investissements non encore amortis
au terme du contrat.
CE, 4 juillet 2012, Communauté d’agglomération de Chartes Métropole, n° 352417.
Le Bulletin
de cheuvreux
Depuis 1995,
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l’actualité juridique !
ENVIRONNEMENT
POLLUTION
DES SOLS
DPU
– Terrain pollué
– information
– réticence dolosive ou vice caché
(non)
Le vendeur d’un terrain pollué avait fait réaliser
une étude environnementale qui avait été
annexée au « compromis » de vente intervenu
entre les parties. Or ni ce compromis ni l’étude
environnementale n’avaient été annexés à la
déclaration d’intention d’aliéner du bien, et la
commune concernée n’avait découvert l’état de
pollution du terrain qu’après avoir exercé son
droit de préemption au prix indiqué dans la
DIA. Estimant que le vendeur avait commis une
réticence dolosive, la commune avait refusé de
réitérer la vente et, assignée, avait formé une
demande en réduction du prix et en indemnisation du préjudice subi en raison de la pollution
des sols. La Cour d’appel avait rejeté cette
demande « dès lors qu'aucune obligation légale
ou réglementaire n'imposait aux venderesses
d'annexer le compromis de vente à la DIA
notifiée à la Ville d'Amiens et que celle-ci s'est
contentée des documents transmis sans solliciter
du notaire des parties cette convention ni ses
annexes ». La Cour de cassation confirme cette
solution en énonçant : « attendu qu’ayant relevé
que l’acquéreur initial avait été informé de la
pollution du terrain par un rapport annexé à
l’acte sous seing privé de vente et qu’aucune
obligation n’imposait aux venderesses d’annexer
ce “compromis” à la déclaration d’intention
d’aliéner et que la commune disposait de
services spécialisés et de l’assistance des services de l’État, la cour d’appel […] a pu retenir
que la commune qui s’était contentée des
documents transmis ne pouvait se prévaloir
d’une réticence dolosive ni de l’existence d’un
vice caché et devait régler le prix mentionné à la
déclaration d’intention d’aliéner et réparer le
préjudice subi par les SCI ; D’où il suit que le
moyen n’est pas fondé ».
Cass. 3ème civ. 7 novembre 2012, n° 11-22.907
ICPE
Obligation de remise en état
– responsabilité délictuelle de l’ayant
droit du dernier exploitant
– réparation du préjudice financier et
d’image du propriétaire
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 04 - 2012 (Décembre)
Statuant sur renvoi d’un arrêt de la Cour de
cassation du 15 décembre 2010 (lire notre
Bulletin de Cheuvreux n°2-2012) la Cour d’appel
de Versailles a fait application de la décision par
laquelle l’ayant droit du dernier exploitant
d’une ICPE, dont le terrain d’implantation
n’avait été que très tardivement remis en état,
devait être condamné à indemniser le propriétaire du terrain sur le fondement des articles
1382 et 1383 du Code civil. Parmi les moyens
de défense, l’ayant droit faisait valoir que la
remise en état du terrain avait certes duré plus
de dix ans, mais que les premières prescriptions
administratives n’avaient été formulées que
cinq ans après la déclaration de cessation
d’activité de l’ICPE. Sur ce point, la Cour précise
que « la responsabilité de l’exploitant pollueur
est engagée à l’égard des tiers même en l’absence
d’injonction administrative de remise en état du
terrain lors de la déclaration de la cessation
de l’exploitation ». Par ailleurs l’ayant droit de
l’exploitant opposait au propriétaire une clause
par laquelle il avait déclaré, dans l’acte d’acquisition du terrain conclu avec son propriétaire
précédent, faire son affaire personnelle de la
situation de l’immeuble au regard de la pollution, sans recours contre le vendeur. La cour
d’appel répond que « cette clause n’a d’effet
que dans les relations contractuelles entre la SCI
venderesse et la société [propriétaire final de
l’immeuble], mais reste sans conséquence sur
l’action en responsabilité délictuelle que cette
dernière exerce contre l’ayant droit du dernier
exploitant ». Ainsi, au soutien de sa demande
d’indemnisation, le propriétaire faisait valoir
qu’il avait été retardé dans la commercialisation
par lots de l’immeuble, qu’il lui avait été difficile
de trouver des acquéreurs, qu’il avait en outre
vendu des lots en-dessous du prix du marché, et
qu’il avait subi un préjudice commercial et
d’image lié à des campagnes de presse et
sur internet en raison de la pollution du site. En
l’espèce la cour d’appel a jugé que seules les
atteintes à son image et les retards et difficultés
de revente de lots acquis pouvaient être retenus
en lien avec l’état de pollution du site, et que
ces préjudices devaient être indemnisés par une
somme fixée à 100 000 euros.
CA Versailles, 6 septembre 2012, n°11.08231,
SARL Pauli Immeuble SOFI c/Sté SHELL
Déclaration d’exploitation
– récépissé de déclaration
– compétence liée du préfet
Un recours était exercé contre un récépissé de
déclaration d’exploitation d’une ICPE. Il était en
29
l’espèce reproché à l’autorité préfectorale
d’avoir délivré ce récépissé, alors que l’exploitation de l’installation en cause aurait méconnu
les dispositions du plan d'occupation des sols
de la commune ainsi que celles du règlement
sanitaire départemental. Or la Cour administrative d’appel de Nancy rappelle à cet égard la
compétence liée du préfet qui « doit vérifier
que l'installation pour laquelle est déposée la
déclaration relève du régime de la déclaration et
[…] est tenu, si tel est le cas, de délivrer le récépissé de déclaration dès lors que la déclaration
est régulière en la forme et complète ». En particulier « les dispositions précitées de l'article
R. 512-47 du Code de l'environnement
n'imposent pas que le dossier de déclaration
[…] fasse état de la situation des bâtiments par
rapport aux règles d'urbanisme et au règlement
sanitaire départemental ». Le recours est donc
en l’espèce rejeté.
CAA Nancy, 26 juin 2012, n°11NC00636,
Aloyse B, JCP Environnement n°10 Comm. 76
PROTECTION
DE LA NATURE
Chêne bicentenaire
– branches empiétant
sur la propriété voisine
– droit d’élagage
(oui)
Par un arrêt d’espèce, la Cour de cassation a
jugé que le caractère remarquable d’un chêne
bicentenaire ne pouvait faire échec au droit
imprescriptible d’élaguer les branches d’un
arbre empiétant sur un fonds voisin. L’article
673 du Code civil prévoit en effet que « celui sur
la propriété duquel avancent les branches des
arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin peut
contraindre celui-ci à les couper. […] Le droit de
[…] faire couper les branches […] est imprescriptible ». En l’espèce l’arbre litigieux, qui n’avait
été que répertorié comme arbre remarquable
dans le plan vert de la commune, devait donc
être soumis à l’application de cette disposition
du Code civil et élagué à première demande
du voisin, même si cela devait conduire à son
dépérissement. La doctrine relève toutefois que
la décision aurait probablement été différente si
l’arbre avait fait l’objet d’un dispositif juridique
de protection du patrimoine ou d’urbanisme
plus contraignant que le plan vert allégué
en l’espèce, ce dernier ne constituant qu’une
« feuille de route » des actions à engager par la
commune pour la préservation et la valorisation
de l’environnement.
Cass. 3ème civ. 31 mai 2012, n° 11-17.313, JCP
Environnement n°10 Etude 13
COMITÉ EDITORIAL DU BULLETIN CHEUVREUX
Directeur de Publication
Comité scientifique
Michèle RAUNET
Bruno CHEUVREUX
Rédacteur en chef
Alix D’OCAGNE
Conception/Rédaction
Murielle GAMET
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Corrections/Relecture
Réalisation
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COMITÉ DE RÉDACTION
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Louis COQUILLETTE
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Immobilier
Droit Public
Pratique Notariale
Copropriété
Urbanisme
Immobilier
Urbanisme
Victoire CREPY
Baptiste DELLOYE
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Pierre-Yves FAUCONNIER
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Immobilier
Immobilier
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Urbanisme
Immobilier
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Droit public
Marie-Anne LE FLOCH
Marie-Anna LEJEUNE
Raphäel LEONETTI
Coralie LEVENEUR
Carole LVOVSCHI-BLANC
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Thibault MARTINI
Immobilier
Environnement
Droit public
Droit Bancaire
Environnement
Pratique Notariale
Stratégie Patrimoniale
Mathilde PERINET-MARQUET
Raoul PRELY
Isabelle TEBOUL
Antoine URVOY
Fleur-Marie VOYRON
Jeanne YVON
Stratégie Patrimoniale
Droit des affaires
Stratégie Patrimoniale
Droit Public
Immobilier
Immobilier
29
Albane REY-JOUVIN
Thierry CROIZE
Immobilier Parisien
Immobilier Parisien
LES INDICES
CONSOMMATION
INDICES BOURSIERS
Au 20 septembre 2012
Indice Immobilier :
Indices des prix à la consommation (sources : INSEE)
Nov. 2012
Variation en %
Ens. des ménages :
Ens. des ménages :
Hors Tabac
Ménages urbains :
Ménages urbains
Hors tabac
:
mensuel : – 0,2
annuel : + 1,4
124,61
126,95
mensuel : – 0,2
mensuel : – 0,2
annuel : + 1,3
annuel : + 1,4
CAC 40 :
mensuel : – 0,2
annuel : + 1,3
Indice coût de la construction (sources : INSEE)
Variation
Variation
2ème trim. 2012
sur 1 an
sur 3 ans
+ 4,58 %
3 363,46
+ 15,94 %
+ 23,17 %
Taux d'intérêt légal
Pour 2012 :
0,71 %
Argent au jour le jour (T4M) :
Au 30 novembre 2012 :
0,08 %
CROISSANCE
1998 : +3,4 %
1999 : +2,9 %
2000 : +3,6 %
2001 : +2,0 %
2002 : +1,2 %
Variation
sur 9 ans
+ 10,08 %
3,5
3
2,5
2
1,5
1
0,5
0
- 0,5
-1
- 1,5
-2
- 2,5
+ 36,60 %
Indice de référence des loyers
3ème trim. 2012
123,55
+ 41,19 %
annuel : + 2,13
PIB :
1 666
+ 29,7 %
TAUX MONÉTAIRES
Indice Nat. Bâtiment Tous corps d'Etat (BT01)
Août 2012
Variation en %
mensuel : + 024
1 499,31
Taux de Base Bancaire
Variat. annuelle
Inchangé depuis le 31/12/2009 : 6,60 %
CONSTRUCTION
877,2
Variation
depuis 1 an
(code Sicovam : QS0011018098)
126,35
124,40
Variation
depuis le 01/01/12
Variation annuelle
+ 2,15 %
1998
1999
2000
2001
2002
2008 : +0,8 %
2009 : – 2,2 %
2010 : +1,6 %
2011 : +1,7 %
2012 : +0,2 % (prévision)
2003 : +0,8 %
2004 : +2,3 %
2005 : +1,2 %
2006 : +2,1 %
2007 : +1,9 %
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
CONJONCTURE
Confiance des ménages et achat immobilier
Il existe une forte corrélation depuis de nombreuses années entre l'évolution des prix des logements et
l’indice d’opinion des ménages tel qu’il est déterminé par l’INSEE. Ce dernier a connu une forte chute
en début d'année 2008, anticipant la baisse des prix, avant de remonter sensiblement de la même
manière que l'évolution des prix, qui, elle, s’est accélérée fortement en 2010. La fin 2011 a vu l’évolution des prix s’arrêter brutalement et se stabiliser sur l’année 2012, tout comme l’indice de confiance
des ménages (voir tableau n°1). Il s’agirait donc semble-t-il d’un juste retour à l’équilibre et non de
l’éclatement d’une bulle immobilière. L’indice de la capacité future à épargner subi une très forte
montée (voir tableau n°2).
Prix des logements parisiens et opinion des ménages (1996 - 3ème trim. 2012)
Evolutions des prix des logements anciens à Paris au m2
(Echelle de gauche)
Confiance des ménages - Indice INSEE
8
10
(Echelle de droite)
6
0
4
- 10
- 20
0
- 30
- 40
-4
-6
- 50
1996 1997 1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009 2010
2011
Confiance des ménages (Juil. 2008 - Nov. 2012)
© Etude CHEUVREUX
0
Capacité future à épargner
Opportunité de faire des achats importants
Indicateur résumé opinion des ménages
0
-5
-5
- 10
- 15
- 10
- 20
Logement : un marché en voie de
glaciation
[Les Echos | 13/12]
L'objectif des 500 000 logements par an
fixé par le président de la République
s'éloigne déjà. Tous les indicateurs sont au
rouge et les dernières décisions du gouvernement risquent d'avoir l'effet inverse des
buts poursuivis.
Alors que la production des promoteurs
ne devrait pas dépasser 70 000 logements
cette année (en baisse de 30 % par
rapport à 2011), le Duflot, le nouveau
dispositif défiscalisant censé relancer la
machine, n'est pas encore au point. Sans
le décret promis avant la fin de l'année
précisant les niveaux de loyers réglementaires, pas de vente possible. « Compte
tenu des délais, il est peu probable que le
moindre effet se fasse sentir avant le
second trimestre au mieux », pense un
promoteur.
2
-2
En bref
- 25
- 15
- 30
Les professionnels de l'aménagement
sont aussi sceptiques : aucun ne croit aux
nouvelles taxes sur le foncier non bâti pour
provoquer le « choc d'offres » attendu par
- 35
- 20
- 40
- 45
- 25
Juil
.0
Sep 8
t. 0
Nov 8
.0
Jan 8
v. 0
Ma 9
rs 0
9
Ma
i0
Juil 9
.0
Sep 9
t. 0
Nov 9
.0
Jan 9
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Ma 0
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0
Ma
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Jan
v. 1
1
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rs11
Ma
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.1
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t. 1
1
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Jan
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2
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i. 1
2
Juil
. 12
Sep
t. 1
2
Nov
. 12
- 50
Le Bulletin
DE CHEUVREUX
N° 02 - 2012 (Juin)
31
le gouvernement. Dès 2013, les plus-values
de cession seront taxées à 34,5 % (19 %
forfaitaires auxquels s'ajoutent 15,5 %
de prélèvements sociaux). Deux ans « de
répit » jusqu'en 2015, date à laquelle
s'appliquera le barème de l'impôt sur le
revenu. « Ces impôts supplémentaires vont
au contraire inciter les propriétaires à
conserver leurs terrains plutôt qu'à les
mettre sur le marché », explique un représentant du Syndicat national des aménageurs lotisseurs (SNAL). Les professionnels
tablaient sur une inversion de la fiscalité
taxant la détention et non pas les vendeurs.
Les exonérations au-delà de 30 ans ont disparu aussi. « A notre avis, les propriétaires
fonciers qui n'ont pas besoin de vendre
attendront simplement que la fiscalité soit
à nouveau modifiée », poursuit le Snal.
Cible facile, les plus-values sur les propriétés bâties de plus de 50 000 euros
devraient faire l'objet d'une surtaxe comprise entre 2 % et 6 %. « Une nouvelle
manière de bloquer le marché », répondent
les agents immobiliers. Enfin aucune aide
publique ne viendra soutenir l'ancien, a
précisé Cécile Duflot, la ministre de
l'Egalité des territoires et du logement,
afin d'éviter tout effet inflationniste.
L’IMMOBILIER PARISIEN
PROGRAMMES NEUFS DANS PARIS PAR ARRONDISSEMENT
Arrdt
Nombre
de Programmes
Prix moyen au M 2
dans l’Arrdt
Nombre d’appart.
disponibles
Arrdt
Nombre
de Programmes
Prix moyen au M 2
dans l’Arrdt
Nombre d’appart.
disponibles
2ème
1
12 965 €
6
15ème
5
13 240 €
19
4ème
2
11 748 €
48
16ème
1
14 963 €
3
6ème
1
23 091 €
4
17ème
1
10 894 €
9
7ème
3
18 961 €
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18ème
3
9 405 €
23
8ème
1
14 036 €
4
19ème
4
9 314 €
30
11ème
6
11 562 €
37
20ème
2
9 506 €
8
13ème
4
11 659 €
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© Etude CHEUVREUX
QUELQUES PROGRAMMES IMMOBILIERS NEUFS DANS PARIS
Paris 13ème
■ Paris Open
Paris 15ème
■ Green
EIFFAGE
Paris 15ème
■
GROUPE ARC
Paris 18ème
■ INNOVA
74 Félix Faure
CIBEX
BOUWFONDS MARIGNAN
Ceci constitue un aperçu des programmes immobiliers neufs dans Paris.
Novembre 2012 - Source : « Indicateur BERTRAND ». Référence de l’Etude : Service d’expertise et de négociation immobilière, Thierry CROIZÉ / Albane REY-JOUVIN
5
4
L’IMMOBILIER PARISIEN
3
Conjoncture
2
1
0
Indice Notaire / INSEE Paris (prix/m2 Appartements anciens)
-1
-2
-3
3ème trimestre 2012
131,1
-4
-5
-6
Variation annuelle
+ 0,8 %
Variation sur 3 mois
+1%
Evolution des prix et des volumes dans Paris et Petite Couronne
Source : Evolution au 3ème trimestre 2012 de la Chambre des Notaires de Paris www.paris.notaires.fr
Transactions immobilières
Total :
Volume
– 21 %
Chiffre d’Affaires
– 0,2 %
Dont :
Appartements anciens libres
Appartements neufs
Maisons anciennes
Maisons neuves
– 20 %
– 21 %
– 22 %
– 21 %
+ 0,3 %
+ 0,2 %
+ 1,2 %
+ 0,3 %