Un père et ses deux fils. Luc 15, 11

Transcription

Un père et ses deux fils. Luc 15, 11
Dimanche 8 Juin 2008
Pierre MAGNE De LA CROIX, pasteur de l’Eglise réformée du
Bouclier, à Strasbourg. Avec la participation d’un groupe de cathéchumènes de
la paroisse du Bouclier : Sophie Mathis, Amandine Grappe, Léa Münch,
Joana Trigueiro et Clémentine Cawdrey.
Un père et ses deux fils.
Luc 15, 11 - 32.
Musique : J.S Bach - Sonaten. Adagio, Sonata n°1 BWV 1027. Deutsche Grammophon
415 471-2.
Introduction :
PMC : Il y a des textes, il y a des poèmes, des histoires que j’aime écouter et réécouter,
comme un enfant qui aime qu’on lui raconte encore et encore les trois petits cochons,
Hansel et Gretel, le petit Poucet…
Ces histoires, vous les connaissez bien, vous aussi et vous aimez comme moi les relire
parce qu’elles nous parlent de nous-mêmes, de nos vies, de nos peurs, de nos joies.
Ainsi les trois petits cochons, trois frères : c’est une histoire qui me raconte que je suis
parfois bien fragile comme pour les deux premières maisons, comme pour les deux
premiers frères. Mais, comme le troisième frère et la troisième maison, je suis quand même
solide et fort et je vais tenir face au méchant loup.
Ainsi, bien mieux qu’un discours ou qu’une explication, une histoire dit des choses
importantes sur la vie, comme une musique, comme une mélodie qui résonne de manière
particulière et semble raconter quelque chose de la vie. Ecoutez ce violoncelle :
Musique : J.S Bach - Les six suites pour violoncelle. Suite violoncelle No. 1 BWV 1007.
EMI Classic 7243 56900-2.
PMC : Cette musique résonne en moi comme une histoire, comme un poème, qui racontent
quelque chose de la vie.
AG : C’est ce qui m’arrive lorsque j’écoute et que je réécoute l’histoire du père et de ses
deux fils dans la Bible. Cette histoire est connue sous le titre de « Parabole du fils
prodigue » : Un homme a deux fils. Un père, deux frères, une famille.
SM : Un jour l’enfant quitte père et mère,
Parfois avec son frère, avec sa sœur, on se dispute, on se chamaille.
Il arrive qu’on ne se comprenne plus, et les choses vont mal.
PMC : D’ailleurs, peut-on avoir un frère sans qu’il y ait de la colère ?
Un jour de colère où les voix montent et retentissent…
Musique : Karl Jenkins. Requiem plage 2 Dies irae. Emi Classic 7243 557966-2.
PMC : Jour de colère entre deux frères et un père.
Je vous invite à écouter cette histoire d’un père et de ses deux fils.
Des catéchumènes de Strasbourg ont lu cette histoire,
Ont débattu et ont interprété ce récit.
AG : Oui, nous avons réagi et dit comment cette histoire entre en résonance avec nos
expériences. Nous allons suivre cette histoire étape par étape.
Et à chaque étape nous commenterons.
PMC : Cette histoire commence ainsi :
SM : « Un homme a deux fils. Le plus jeune dit à son Père : « Père, donne-moi ma part
d’héritage ». Alors le père partage ses richesses entre ses deux fils. Quelques jours après,
le plus jeune fils vend tout ce qu’il a reçu et il part avec l’argent dans un pays éloigné… »
(Luc 15, 11 – 13).
121
Musique : Lynyrd Skynrd. Page 1 "Sweet home Alabama". MCA Records, Inc 01746.
PMC : Le fils cadet est parti avec sa part d’héritage. A t-il eu raison de partir ?
AG : Bien sûr que "oui": il a bien raison de partir, il a le droit, il est libre,
SM : Il faut qu'il vive sa vie, il faut qu'il prenne ses responsabilités et qu'il découvre la vie, y compris les
côtés difficiles.
AG : Il n'y aura pas toujours papa maman pour tout résoudre, pour tout aplanir,
SM : Tout dépend aussi de son âge, est-il assez « mûr » pour partir ?
PMC : Peut-être le fils cadet n'est-il pas assez heureux chez lui,
Il ne se sentait pas bien et il avait besoin de partir pour respirer, pour vivre ;
Rien n'est dit dans le texte biblique sur ce mal-être, mais ce mal-être est peut-être aussi le reflet de certains
malaises que nous vivons nous-mêmes.
AG : Quitter son père, quitter sa mère, c'est normal…mais fallait-il vendre l'héritage ? Ne pouvait-il pas
partir en gardant ces richesses et en essayant de vivre avec ses propres moyens ? Pour moi, le fils cadet est
encore dépendant de son papa, car il est encore incapable de vivre sans la richesse de son père !
SM : Quitter, s'éloigner, prendre de la distance, vivre sa vie, faire ses preuves, je suis d’accord.
Mais pas n'importe comment !
PMC : Cette phrase « quitter papa et maman » nous rappelle la parole de la Genèse qui dit :
« C'est pourquoi l'être humain quittera son père et sa mère... ».
Parole que l'on rappelle volontiers au moment des mariages…lorsqu’on quitte père et mère.
Le fils cadet a quitté son père. Ecoutons la suite de l’histoire :
AG : « Dans ce pays éloigné, le fils cadet disperse son bien en vivant de façon désespérée
Quand il a tout dépensé, une grande famine arrive dans le pays. Et le fils commence à être en manque…
SM : … Il va travailler pour un habitant de ce pays. Cet homme l’envoie dans les champs garder les
cochons. Le fils a envie de manger la nourriture des cochons, mais personne ne lui en donne …
AG : Alors le fils se met à réfléchir en lui-même et il se dit :
SM : « Chez mon père tous les ouvriers ont assez à manger et ils en ont même trop.
Et moi, ici, je meurs de faim. Je vais partir pour retourner chez mon père, et je vais lui dire :
« Père, j’ai péché contre Dieu et contre toi. Je ne mérite plus d’être appelé ton fils. Fais comme si j’étais l’un
de tes ouvriers ».
AG : Et il part pour retourner chez son père… » (Luc 15, 13 – 20)
Musique : Karl Jenkins. Requiem - plage 7 "Lacrimosa". Emi Classic 7243 557966-2
PMC : Le fils cadet a dépensé tout ce que son père lui avait donné. Il a faim, il est dans une situation très
difficile.
AG : Je crois que le fils cadet est en train de vivre une seconde rupture avec son père.
La première rupture, c’est lorsqu’il s’en va, lorsqu’il part dans un pays éloigné, loin de son père ; mais il est
encore dépendant de son père parce qu’il vit avec l’argent de celui-ci ;
SM : La seconde rupture, la vraie, c’est quand le fils n’a plus l’argent de son père ; c’est comme si le fils avait
eu besoin de perdre cet héritage pour vraiment s’éloigner de son père.
PMC : Alors le fils cadet décide de rentrer chez lui pour devenir ouvrier de son père.
Comment trouvez-vous alors la solution du fils qui décide de retourner ainsi chez papa ?
SM : Le fils cadet est un profiteur, c'est trop facile de rentrer chez papa ; après tout, il a fait des choix, il faut
maintenant qu'il assume ! Le papa pompier, c’est trop facile ; c’est à lui de se débrouiller, de retrouver une
situation stable, d’assumer ses erreurs et de se redresser.
AG : Mais d’un autre côté, le fils reconnaît son erreur, il a honte ! Mais il sait pouvoir compter sur son père :
le fils cadet a tout perdu sauf cette confiance en son père.
PMC : Pour moi, le fils cadet est courageux, car ce n'est pas facile de reconnaître ses erreurs : il est plus
simple de se masquer la face, et de fuir, que de reconnaître qu'on a fait fausse route. Peut-être même que cette
expérience a permis au fils cadet de grandir, de mûrir, de devenir moins dépendant de son père.
AG : Vivre un échec n'est pas un malheur lorsqu'on arrive à reconnaître l’échec, à se relever et à se
reconstruire ! Même si la prise de conscience n'est pas évidente.
SM : Le fils cadet a grandi (le texte grec de l’évangile parle même de résurrection), il est enfin prêt à
affronter la vie et son père.
PMC : Le fils retourne donc par le même chemin, même s’il a changé.
122
Musique : Lynyrd Skynrd. Page 1 "Sweet home Alabama". MCA Records, Inc 01746.
PMC : Après avoir tout perdu le fils cadet rentre donc chez lui ; il veut devenir ouvrier de son père.
Voici la suite de l’Histoire :
AG : « Le fils est encore loin. Mais son père le voit et il est plein de pitié pour lui.
Le père court à sa rencontre, il le serre contre lui et l’embrasse. Alors le fils dit à son père :
SM : « Père j’ai péché contre Dieu et contre toi et je ne mérite plus d’être appelé ton fils »…
AG : … Mais le Père dit à ses serviteurs :
SM : « Vite apportez le plus beau vêtement et habillez mon fils. Mettez-lui une bague au doigt et des
sandales aux pieds. Amenez le veau qu’on a fait grossir et tuez-le. Mangeons et faisons la fête.
Oui, mon fils qui est là était mort et il est revenu à la vie. Il était perdu et il est retrouvé »…
AG : … Et ils commencent à faire la fête. » (Luc 15, 20 – 25)
PMC : On entend la musique, les rythmes, les chants, les danses.
Musique : Temptation. "Rebecca".
PMC : C’est la fête : le père accueille son fils. Mais qu'aurait donc fait votre père, à la place de celui de
l’histoire ?
AG : Mon père m’aurait plutôt passé un savon, ou du moins il m’aurait accueillie froidement, voire il
m’aurait ignorée. Il n'aurait pas été aussi indulgent et gentil que le père de l’histoire ! D’abord des
explications, et après, éventuellement, un accueil.
SM : Je crois que mon père, lui, m’aurait accueillie. C'est normal, après tout, le père se réjouit lorsque l'enfant
revient ! Et il se réjouit d'autant plus que le fils cadet revient avec plus de maturité : il a grandi, son retour
étant le signe de ce mûrissement.
AG : Le courage de revenir, la maturité du fils, sont pour le père plus importants que le gaspillage de ses
richesses. Son fils a acquis une nouvelle richesse : l’expérience de la vie.
SM : Mon père, lui, aurait sans doute réagi de la manière suivante :
D’abord, il est heureux de me revoir, mais il ne le montre pas, puis il se fâche, pose des questions et m’aide à
tirer des leçons. Enfin, après : on fait la fête…
PMC : Mais notre récit propose une autre démarche, une autre pédagogie :
Lorsqu’un événement important arrive, lorsque deux personnes se retrouvent après une séparation importante,
après une rupture, lorsque le fait de se revoir est si chargé d’émotion, de questions, de conflit, de sentiments
emmêlés, de culpabilité… Alors … comment se retrouver ?
AG : Par un repas ! Car c’est le repas qui va dire au mieux cette rencontre, un repas qu’il faut préparer, ce
sont les mains qui vont d’abord parler, qui vont canaliser l’énergie, l’émotion, ou la colère…
SM : Mangeons d’abord, parlons après…
PMC : Nourrissons-nous d’abord, partageons ce qui nous fait vivre : le pain d’abord et - après - nous serons
mieux en mesure de parler de nos vies si différentes.
SM : La joie, avant la réflexion.
AG : La fête, avant le travail.
PMC : La grâce, avant la Loi.
AG : L’amour et l’accueil, bien avant la morale.
PMC : En effet, le père accueille son fils non pas parce que le fils se repend, mais parce que son fils est
vivant. La joie du père n’est pas dans la repentance du fils mais dans le bonheur de le voir en vie. Et le repas
exprime cela : le père accueille sans condition ; alors nous passons à la fête, à la suite de l'histoire.
SM : Qui devrait être la fête et qui n'est pas la fête !
PMC : On attend la joie … et c’est la colère qui éclate : à nouveau les voix de la colère.
Musique : Karl Jenkins. Requiem plage 2 Dies irae. Emi Classic 7243 557966-2.
PMC : Ainsi, ce n’est pas la fête pour tout le monde. Le père accueille son fils cadet et décide de faire la fête.
Le frère aîné n’est pas du tout content. Ecoutons la suite de l’histoire :
JT : « Pendant ce temps, le fils aîné travaille dans les champs. Quand il revient et s’approche de la maison, il
entend de la musique et des danses. Il appelle un des serviteurs et lui demande ce qui se passe. Le serviteur
lui répond :
LM : « C’est ton frère qui est arrivé. Et ton père a fait tuer le veau gras parce qu’il a retrouvé son fils en bonne
santé ». Alors le fils aîné se met en colère et il ne veut pas entrer dans la maison. » (Luc 15, 25 – 28).
123
Musique : Karl Jenkins. Requiem plage 2 Dies irae. Emi Classic 7243 557966-2.
… JT : Alors le fils aîné se met en colère et ne veut pas rentrer à la maison. Le père sort pour lui demander
d’entrer. Mais le fils répond à son père :
LM : « Ecoute ! Depuis de nombreuses années je travaille pour toi. Je n’ai jamais refusé d’obéir à tes ordres.
Pourtant tu ne m’as jamais donné une petite chèvre pour faire la fête avec mes amis. Ton fils qui est là a
mangé tout ton argent avec des filles, mais quand il arrive, tu fais tuer le veau gras pour lui ». Le père lui
répond :
JT : « Mon enfant ! Tu es toujours avec moi et tout ce qui est à moi est à toi.
Mais il fallait faire la fête et nous réjouir. En effet, ton frère qui est là était mort et il est revenu à la vie. Il était
perdu et il est retrouvé ! » (Luc 15, 28 – 32).
PMC : Voilà cette histoire du père et des ses deux fils qui résonne comme une musique bien connue.
Musique : J.S Bach - Les six suites pour violoncelle. Suite violoncelle n0 1 BWV 1007. EMI Classic 7243
56900-2.
JT : Peut-on avoir un frère, une sœur, sans jalousie ou disputes ?
PMC : Souvenez-vous des deux premiers frères de la Bible : Caïn et Abel.
De manière imagée, Caïn et Abel sont les deux premiers frères de l'humanité. Et les choses vont mal !
LM : Caïn est l'aîné, Abel est le cadet : déjà ça, ce n’est pas simple.
JT : Caïn, l’aîné, est désiré par sa mère, il est accueilli, il a une identité.
LM : Abel, le cadet, sa mère ne lui parle pas, Abel est un prénom qui veut dire vapeur et buée, il ne vaut pas
grand’ chose.
PMC : Y -a-t-il des frères sans différences et sans rivalités ?
(Remarques de Léa Münch et Joana Trigueiro) :
L’un est fort en math, l’autre est un rêveur ;
L’un est fort en sport, l’autre est bon en anglais ;
L’un c'est le grand, il a tous les droits, l’autre c'est le petit dernier, le chouchou ;
L’un est toujours dans ses livres, l’autre aime jouer avec ses amis.
Dans notre récit biblique :
L’un est le cadet, qui gaspille tout, qui ne pense qu'à partir, qu'à voyager, qu’à mordre la vie ;
L’autre est l'aîné, travailleur, fidèle, discret toujours là à la maison.
PMC : Moi, je suis touché par les reproches du fils aîné à son père : Nous oublions ce bonheur de vivre
chaque jour ensemble, de se voir tous les jours, de manger ensemble tous les jours.
Le père, comme bien des pères, et aussi des mères n’a peut-être pas assez exprimé son amour, sa tendresse, sa
joie d’être avec son fils aîné ! Le père le lui dit à la fin de leur dialogue, mais le fils aîné est aussi un fils qui a
besoin de fête, de joie, et qu’on lui dise et redise qu’on est heureux avec lui. Le fils aîné est un grand sensible.
JT : Ayant peut-être manqué d’amour et de tendresse, le fils aîné a sans doute du mal à exprimer ses
émotions. Alors, il s’exprime avec une machine à calculer, il compte ses services, ses années de travail, son
obéissance…
LM : Ce n’est pas toujours simple d’être l’aîné : il a dû faire de la place au petit, il a dû renoncer à sa place de
fils unique, il s’est peut-être réjoui quand le frère cadet est parti, et maintenant il faut lui refaire de la place.
En plus, c’est par un serviteur qu’il apprend qu’il y a une fête. Il y a, là, de quoi se sentir exclu ! Le père et le
fils cadet n’ont pas su partager leur joie : quelle maladresse ! Alors le fils aîné va être maladroit lorsqu’il
exprime ses émotions et son sentiment d’être exclu.
PMC : Les paroles du fils aîné sont pour moi un aveu : le cri, la révolte, la colère sont souvent l’expression
d’une souffrance, d’une frustration, mais cette révolte, cette colère sont aussi le signe que la relation au père
n’est pas morte ; elles sont une tentative d’entrer en relation. L’enfermement et le silence seraient pires. Le
fils aîné, par sa colère, dit son besoin de relation, d’attention, son désir d’être lui aussi quelqu’un qu’on fête.
JT : Et le père entend cet appel et voit que son fils aîné est en train de passer à côté de sa joie.
Alors le père va espérer en son fils aîné comme il a espéré en son fils cadet.
PMC : Et nous, qui sommes-nous dans ce récit ?
JT : Le frère aîné ou le cadet?
LM : Ou le père ?
JT : Parfois l'un et parfois l'autre.
124
PMC : Je me retrouve à la fois dans le cadet et dans l’aîné. Et comme bien souvent dans l’Evangile,
l’histoire ne se termine pas, car le lecteur est invité à la prolonger. La suite doit être imaginée…
JT : En ne terminant pas cette histoire, Jésus nous invite à la poursuivre à notre manière, à imaginer comment
se passe la suite.
PMC : Et c’est ce que vous avez fait, vous avez imaginé la rencontre entre les deux frères : ces rencontres
sont souvent orageuses, avec des règlements de comptes, ou des silences et des reproches :
Les frères ont-ils tellement de mal à se retrouver ?
LM : La colère, les reproches, la violence, sont bien souvent l’expression d’une blessure, d’une
incompréhension, d’une grande difficulté à accepter des parcours différents.
PMC : Alors, c’est bien souvent orageux, à l’image de ce que nous sommes si souvent ; comme cette
musique qui dit la colère :
Musique : Karl Jenkins. Requiem plage 2 Dies irae. Emi Classic 7243 557966-2.
PMC : Des voix qui en colère se rejoignent sur une même note. Ainsi cette rencontre entre les deux frères que
vous avez imaginée. Nous l’écoutons :
(Dialogue entre Léa Münch et Joana Trigueiro) :
Alors mon petit, tu pars faire la fête, tu gaspilles tout l’argent de la famille et puis après tu reviens chez papa
pour la bonne soupe. Tu n’es qu’un profiteur !
Et toi : tu ne profites peut-être pas du père, bien tranquille à la maison, un bon boulot, pas de souci, papa
assure tout. Moi, j’ai pris des risques, j’ai quitté les jupes des parents, je me suis lancé.
Tu t’es lancé ? Tu as tout gaspillé, en plus avec des prostituées
Pas du tout, pas avec des prostituées, ça c’est dans ton imagination : ne projette pas sur moi tes phantasmes.
J’ai tout dépensé avec des amis. Toi, tu n’as jamais vraiment accepté de ne plus être le seul fils, mon départ
t’a bien arrangé
Tu voulais être grand et autonome, mais tu as vécu avec l’argent du père, comme un bébé qui continue de
téter au sein maternel…facile !
OK, mais j’ai fait des expériences, je me suis cassé les dents, mais qui risque rien, n’a rien, et moi j’ai grandi
par cette expérience, car les échecs font partie de la vie et font grandir.
Oh le petit, ne te prends pas pour Superman ; vivre des aventures extraordinaires, c’est bien plus facile à vivre
que de ternir chaque jour un engagement, chaque jour faire un pas, chaque jour apprendre un peu.
Tu veux vivre tout, et tout de suite ; tu veux grandir en un jour ; tu crois au père Noël ?
Viens donc prendre le temps de grandir jour après jour !
Tu as retrouvé notre père, réapprends maintenant à vivre avec les autres, à vivre avec moi…
PMC : Et nous qui sommes-nous dans cette histoire ?
Le cadet, l’aîné, les deux : en désaccord : mais leurs paroles résonnent comme une même demande
d’attention, d’écoute … comme une musique où deux voix se cherchent, s’opposent et finalement jouent si
bien ensemble :
Musique : J.S Bach - Die Englischen Suiten. Suite anglaise n°4 BWV 809 plages 25 & 30. M2K 42268.
PMC : Un père et ses deux fils. Et si ce père est une image pour Dieu, c’est souvent ainsi qu’on lit cette
histoire…
JT : Alors c’est un Dieu qui est parfois maladroit, ou que l’on comprend mal,
PMC : Mais un Dieu qui reste présent, en attente, et dont le premier geste est d’abord la joie de retrouver son
fils, la joie d’offrir un repas, le bonheur de vivre avec ses enfants.
LM : Si ce père de l’histoire est Dieu, alors Dieu est d’abord tout simplement un Père ;
JT : C’est une évidence…
LM : Pas si sûr ! Et cette évidence, c’est bien de la rappeler : un père qui donne ses richesses, laisse ses
enfants libres, se réjouit de les retrouver.
PMC : Par ses repas par ses paroles et par sa joie, il les faire vivre et grandir.
125
LM : Chaque rencontre avec ce Dieu-Père prend la couleur d’une naissance, d’une renaissance, d’une joie.
JT : Ce que tu dis là est presque une confession de foi !
LM : Peut-être bien que oui !
PMC : On appelle souvent cette histoire : « La parabole du fils prodigue ». Vous avez proposé d’autres titres,
les voici :
JT : Nés du même ventre et pourtant si différents ;
LM : Un père, deux fils, des problèmes, c’est la vie ;
JT : Va, vis, grandis ;
LM : De la richesse matérielle, au manque de relation et à la demande d’amour ;
JT : L'amour d'un père qui accueille sans condition ;
LM : Une porte toujours ouverte ;
JT : L’accueil et la joie qui déplaisent ;
Liberté, égalité - ok - mais bonjour la fraternité ;
LM : La fraternité, un chemin difficile ;
JT : Le fils perdu et le fils retrouvé ;
LM : Deux apprentissages différents de la vie ;
JT : Si le père est Dieu, alors bon courage à Dieu ;
LM : Dieu accueille sans condition ;
PMC : Comme des notes chacun de ces titres reconstruit l’histoire pour une mélodie pétillante de vie.
Musique : J.S Bach - Die Englischen Suiten. Suite anglaise n°4 BWV 809 plages 25 & 30. M2K 42268.
PMC : En résonance à ce récit du père et de ses deux fils, nous vous invitons à la prière,
(Prière antiphonée par Clémentine Cawdrey et Pierre Magne de La Croix) :
La prière d’un père ou d’une mère pour son enfant :
Je t’ai donné la vie, mais je ne peux pas la vivre à ta place ;
Je peux t’enseigner, mais je ne peux pas apprendre à ta place ;
Je peux te dire les mots, la musique, le langage pour découvrir le monde, la vie, Dieu,
Mais je ne peux pas vivre et croire à ta place ;
Je peux témoigner de ma foi, mais je ne peux pas faire confiance à ta place ;
Je peux te donner l’envie de découvrir, le courage de créer, l’appétit de comprendre :
Ce qu’est le monde, ce que vivent les gens, ce que Dieu me dit ;
Mais je ne peux pas à ta place découvrir, créer, comprendre :
Ce qu’est le monde, ce que vivent les gens, ce que Dieu te dit.
Je peux prier pour toi, mais je ne peux pas marcher avec Dieu à ta place ;
Je t’invite à dire avec moi la prière que Jésus adresse à son propre père, et qu’il transmet à ses disciples.
Prière que j’ai reçue de mes parents :
(Notre Père, antiphoné par Pierre Magne de la Croix et Clémentine Cawdrey) :
Notre Père qui es aux cieux,
Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ;
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour,
Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés,
Et ne nous soumets pas à la tentation mais délivre-nous du mal ;
Car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire, pour les siècles des siècles. Amen.
Bénédiction et envoi :
PMC : Bonne suite, bonne journée, bonne semaine, bonne route, avec cette histoire d’un père et de ses deux
fils. Une histoire qui nous parle de Dieu, du monde et de nous.
Musique : J-S. Bach – Glenn Gould, plage 25 Die Englischen Suiten.
126

Documents pareils