Décision n°2005-C/C-45 du 29 août 2005

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Décision n°2005-C/C-45 du 29 août 2005
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Décision n°2005-C/C-45 du 29 août 2005
Affaire CONC-C/C-05/0057: Distripar S.A. / Sociétés Immoni
1. Procédure
La notification simplifiée de la concentration a été déposée le 1 er août 2005 au secrétariat du Conseil de la
concurrence et enregistrée sous le numéro CONC-C/C-05/0057.
Le rapport du Corps des rapporteurs a été déposé au Conseil de la concurrence le 22 août 2005.
Par la lettre transmise par les représentants communs des parties notifiantes, en date du 29 août 2005, ces
derniers renoncent à une audition formelle devant le Conseil de la concurrence.
L’affaire est traitée par cette chambre à l’audience du 29 août 2005.
2. Opération de concentration
2.1. Acheteur
L’acheteur est la société anonyme de droit belge « Distripar» dont le siège social est établi à 1170 Bruxelles,
Chaussée de la Hulpe,181.
La société Distripar est détenue à 97 % par la Compagnie Nationale à Portefeuille (ci-après« CNP »),
holding contrôlé par le Baron Albert Frère et sa famille.
Le Groupe CNP détient des participations dans un certain nombre d’entreprises présentes dans des domaines
d’activités très divers. CNP détient encore pour l’instant au travers de ses filiales Taittinger et Société du
Louvre une participation indirecte dans la société « Annick Goutal », fabricant de parfums et cosmétiques de
luxe. Les titres du Groupe Taittinger et de la Société du Louvre ont été vendus. Les parfums Annick Goutal
ont été cédés à Starwood Capital par le biais de la cession des participations de CNP dans les sociétés
Taittinger et Société du Louvre. Cette cession a été notifiée à la Commission européenne dont la décision est
attendue pour la fin du mois de septembre 2005.
La société Distripar détient le contrôle conjoint avec les membres de la famille Cloquet de plusieurs sociétés
principalement actives dans le secteur de la parfumerie et des soins de beauté.
La société Distripar est active, au travers de sa filiale à 100 % dénommée « Belgian Sky Shops » sur le
marché de la vente au détail de produits de marque en zone de transit des aéroports de Bruxelles National et
de Charleroi. Outre des parfums et cosmétiques, les magasins de Belgian Sky Shops vendent de nombreux
autres produits : alcools, denrées alimentaires de luxe, chocolats, joaillerie et horlogerie, vêtements,
souvenirs, équipement photographique, etc.
La société Distripar détient également des participations dans le producteur/distributeur de chocolat
« Vanparys ».
Enfin, Distripar contrôle à 100 % la société anonyme « SONECO » qui exploite un magasin de chocolat et
de confiserie à la gare du midi de Bruxelles.
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2.2. Vendeurs
Les vendeurs sont Monsieur Georges Cloquet et son épouse Madame Monique Loriaux ainsi que Monsieur
Guy Cloquet. Ils sont les trois actionnaires, aux côtés de la société Distripar , des sociétés IMMONI, GPL
(Grande Parfumerie du Luxembourg) et GMPC (Gestion et Manutention de Produits à Commercialiser).
2.3. Sociétés cibles
Les sociétés cibles sont:
[Secrets d'affaires]
Les sociétés cibles sont dénommées pour les besoins de la notification “groupe des sociétés Immoni”. Elles
sont essentiellement actives dans le secteur de la distribution des produits de parfumerie. A cet effet, elles
exploitent [Secrets d'affaires] magasins de parfumerie en Belgique sous l’enseigne “Planet Parfum” et
[Secrets d'affaires] magasins de parfumerie au Grand Duché de Luxembourg. Leurs activités sont soutenues
par les sociétés anonymes [Secrets d'affaires] qui sont des sociétés de support.
Les sociétés anonymes Immoni et GPL sont actuellement détenues à raison de 50% par la société Distripar et
par les membres de la famille Cloquet .
3. Description de l’opération et délai
L’opération de concentration consiste en une prise de contrôle exclusif de manière directe et indirecte par la
société Distripar sur le « groupe des sociétés Immoni ».
Les parties notifiantes font mention d’une « lettre d’intention » qui définit les conditions et modalités selon
lesquelles la société Distripar achète les actions des vendeurs. Les parties ont signé la lettre d’intention le 28
juin 2005 et elles déclarent dans le formulaire de notification que l’audit n’a pas révélé d’élément permettant
de remettre en cause la transaction.
Au regard de l’article 12, §1, de la LPCE, les parties doivent notifier l’opération de concentration dans le
délai d’un mois de la conclusion de l’accord.
Par le terme « accord » au sens de l’article 12, §1, et § 2, de la LPCE, il y a lieu d’entendre l’accord
irrévocable, c’est-à-dire celui auquel les parties ne peuvent renoncer que conjointement.
Ladite lettre d’intention engage juridiquement les parties mais diffère dans le temps l’opération de
concentration. En effet, des dispositions de la lettre d’intention stipulent que l’acheteur a la faculté et non
l’obligation d’acquérir les actions des vendeurs si une des conditions reprises aux points 4.1.1. à 4.1.7. n’était
pas remplie. En cas d’exercice de cette faculté, celle-ci devra être notifiée à Mr Guy Cloquet, avant le 29
juillet 2005. Cette notification est intervenue le 28 juillet 2005, de sorte qu’il y a lieu de considérer que c’est
à cette date que les parties se sont engagées conjointement de manière irrévocable et que c’est à cette même
date que le délai d’un mois prend cours.
La notification de l’opération de concentration est intervenue dans le délai légal requis.
4. Champ d'application
Les sociétés précitées sont des entreprises au sens de l’article 1er de la LPCE et l'opération notifiée est une
opération de concentration au sens de l'article 9 de cette même loi.
En vertu de l'article 11, § 1er, de la LPCE, tel que modifié par l'arrêté royal du 3 juillet 2005, les dispositions
en matière de concentration ne s'appliquent que lorsque les entreprises concernées totalisent ensemble en
Belgique au cours de l'exercice social précédent un chiffre d'affaires de plus de 100 millions d'euros et qu'au
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moins deux des entreprises concernées réalisent chacune en Belgique au cours de l'exercice social précédent
un chiffre d'affaires d'au moins 40 millions d'euros.
L'article 2 de l’arrêté royal du 3 juillet 2005 stipule que le présent arrêté entre en vigueur le jour de sa
publication au Moniteur belge, soit le 19 juillet 2005.
Les chiffres d'affaires en Belgique des entreprises concernées en 2004 sont les suivants :
- Distripar : [Secrets d'affaires] euros ( chiffres d’affaires consolidés en Belgique et au GD Luxembourg)
- Groupe des sociétés Immoni : [Secrets d'affaires] euros.
Les nouveaux seuils de chiffres d’affaires sont atteints par les entreprises concernées.
5. Marchés de produits et géographiques en cause
Les secteurs économiques concernés par l'opération sont : le commerce de détail de parfumerie et de produits
de beauté (code NACE : 52.33), l'institut de beauté (code NACE : 93.022) et la fabrication de parfums et
cosmétiques (code NACE : 24.52).
5.1. Marchés de produits en cause
Les marchés de produits en cause identifiés par les parties sont :
- le marché de la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone urbaine;
- le marché de la vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone aéroportuaire de transit;
- le marché de la fabrication de parfums de luxe;
- le marché de l'approvisionnement des points de vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone
urbaine;
- le marché de l'approvisionnement des points de vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone
aéroportuaire de transit.
5.1.1. Le marché de la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone urbaine et le
marché de la vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone aéroportuaire de transit
Les parties notifiantes estiment que la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe en
zone urbaine constitue un marché distinct de celui de la vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en
zone aéroportuaire de transit. Elles se fondent sur la pratique décisionnelle de la Commission européenne et
la jurisprudence du Conseil de la concurrence1 . Les parties soutiennent que les magasins en zone
aéroportuaire s'adressent à une clientèle différente de celle des magasins en zone urbaine. De plus, elles
affirment que ces deux marchés sont approvisionnés par des canaux différents, ce qui semble être confirmé
par l’instruction.
Les réponses des fournisseurs semblent confirmer que la distribution sélective de parfums et produits
cosmétiques de luxe en zone urbaine et la vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone
aéroportuaire de transit constituent deux marchés distincts. Un des fournisseurs interrogés précise qu’à la
différence des clients des points de vente en zone urbaine, les clients des points de vente en zone
aéroportuaire doivent être en possession d'un billet d'avion.
5.1.2. Le marché de la fabrication de parfums et produits cosmétiques de luxe
Les parties notifiantes se réfèrent à la pratique décisionnelle de la Commission européenne pour avancer
qu'au sein des produits cosmétique de luxe, les segmentations suivantes peuvent être opérées :
- les parfums féminins,
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Décision du Conseil de la concurrence, n° 94-C/C-14 du 18 mai 1994 :Affaire Parfumerie Douglas / Compartilux :
« Bien qu'ils relèvent assurément de la distribution sélective par toutes les caractéristiques et notamment par la
compétence de leur personnel vendeur, les points de vente en exemption de droits, notamment dans les aéroports,
doivent être exclus du marché national, en raison de leur extra-territorialité et singulièrement des barrières qui les
séparent dudit marché. »
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les parfums masculins,
les produits de maquillage,
et les produits de soin.
Dans la présente affaire, il n'est pas nécessaire de se prononcer davantage sur les segmentations de ce marché
car l'opération en cause ne conduit pas à la création ou au renforcement d’une position dominante.
L’opération a principalement pour effet de modifier la nature du contrôle exercé par la société Distripar sur
le groupe des sociétés Immoni.
De plus, selon les parties notifiantes, dans un avenir relativement proche, la société Annick Goutal, seule
société du groupe CNP à être présente sur ce marché, ne fera en principe plus partie du groupe CNP auquel
appartient la société Distripar.
5.1.3. Le marché de l'approvisionnement des parfumeries en zone urbaine et le marché de
l’approvisionnement des parfumeries en zone aéroportuaire de transit
Les parties notifiantes distinguent le marché de l'approvisionnement des parfumeries en zone urbaine du
marché de l'approvisionnement des magasins en zone aéroportuaire de transit. Selon elles, les pratiques et les
conditions d'achat sont différentes. Les points de vente en zone urbaine s'approvisionnent principalement
auprès d'importateurs exclusifs ou non exclusifs établis sur le territoire national et, occasionnellement, auprès
des producteurs. En revanche, les opérateurs actifs sur le marché de l’approvisionnement des parfumeries en
zone aéroportuaire s’adressent directement au siège central des producteurs et bénéficient de conditions
d’achats spéciales. Ces conditions ne sont pas applicables aux parfumeries situées en zone urbaine.
L’instruction révèle un consensus de la part des fournisseurs et d’une association concernant l’existence de
ces deux canaux d’approvisionnement.
Le Conseil de la concurrence rejoint le Corps des rapporteurs en ce sens qu’il confirme l’opinion des parties.
Néanmoins il considère qu’il n’est pas nécessaire de tirer une conclusion définitive sur la segmentation
éventuelle du marché de l’approvisionnement des parfumeries car l’opération en cause ne devrait pas poser
de problème de concurrence.
5.2. Marchés géographiques en cause
5.2.1. Le marché de la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone urbaine
Les parties notifiantes se réfèrent à la décision n° 98-C/C-2 du 12 janvier 1998 du Conseil de la concurrence
pour soutenir que la dimension géographique du marché pourrait être nationale. Le Conseil de la concurrence
confirme la dimension géographique de ce marché. En effet, sur celui-ci, les principaux fournisseurs et
distributeurs sont actifs au niveau national.
5.2.2. Le marché de la vente de parfums et produits cosmétiques en zone aéroportuaire de transit
Les parties notifiantes proposent de laisser ouverte la question de la dimension géographique du marché de la
vente de parfums et produits cosmétiques en zone aéroportuaire de transit tout comme l’a fait la Commission
européenne dans sa décision du 17 juillet 1996 dans l'affaire IV/M.782 - Swiss Air / Adlers International-.
Dans le cadre de la présente affaire, même en retenant la définition la plus étroite du marché en terme
géographique, c.à.d. la Communauté européenne ou l’EEA, l’opération ne devrait pas poser de problème de
concurrence. En effet, l'opération en cause concerne principalement les activités de distribution sélective de
parfums et produits cosmétiques de luxe en zone urbaine. Il ressort en outre de la notification que la part de
marché de Belgian Sky Shops au niveau communautaire est largement inférieure à 25%.
La question de la définition géographique de ce marché peut de ce fait rester ouverte.
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5.2.3. Le marché de la fabrication de parfums et produits cosmétiques de luxe
Selon les parties notifiantes, les caractéristiques telles que la présence de grands opérateurs dans plusieurs
pays et l'importance des échanges intra-européens font estimer le marché géographique en cause comme
étant de dimension au moins communautaire. Cependant, l'organisation des réseaux de distribution à l'échelle
nationale tend à considérer ce marché de dimension nationale.
La question de la définition du marché géographique en cause peut rester ouverte du fait que l’opération ne
pose pas, même au niveau national, de problème de concurrence.
5.2.4. Le marché de l'approvisionnement des parfumeries en zone urbaine et le marché de
l’approvisionnement des parfumeries en zone aéroportuaire de transit
Comme déjà précisé (cfr 5.1.3), l'approvisionnement en zone urbaine est principalement réalisé auprès des
distributeurs locaux tandis que l'approvisionnement en zone aéroportuaire est principalement réalisé auprès
des producteurs.
La question de la définition du marché géographique en cause peut rester ouverte. L’opération ne pose en
effet pas de problème de concurrence.
6. Procédure simplifiée
Sur le marché de la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone urbaine, les
parties notifiantes estiment la part de marché des magasins Planet Parfum inférieure à 25 %.
L'instruction ne contredit pas ces estimations.
Sur le marché de la vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone aéroportuaire de transit ainsi
que celui de l’approvisionnement de ces points de vente, l’instruction tend à démontrer l’existence d’une
position modeste dans le chef de Belgian Sky Shops.
En outre, ces marchés de la distribution sélective de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone urbaine
et de la vente de parfums et produits cosmétiques de luxe en zone aéroportuaire de transit sont considérés
comme des marchés distincts (cfr 5.2.2). Il n’y a donc pas de chevauchement d’activité au niveau de la
distribution de ces produits.
Sur le marché de l'approvisionnement des points de vente situés en zone urbaine, sur le territoire de la
Belgique, les parties notifiantes estiment la part de marché des magasins Planet Parfum inférieure à 25 %.
L’instruction confirme ces estimations et n’a au surplus pas révélé de problème d’approvisionnement du
marché.
En outre la distinction des marchés au niveau de la distribution se reflète également au niveau de
l’approvisionnement des parfumeries en zone urbaine ou de l’approvisionnement des parfumeries en zone
aéroportuaire de transit par l’existence de canaux d’approvisionnement également distincts. Il n’y aurait donc
pas de chevauchement d’activité au niveau de l’approvisionnement.
Compte tenu des parts de marchés se rapportant aux différents marchés de produits retenus qui sont
inférieures à 25%, il n’y a donc pas de marchés concernés au sens de la loi.
La procédure simplifiée est dès lors d’application en l’espèce, les conditions de la communication conjointe
du Conseil de la concurrence et du Corps des Rapporteurs relative à la procédure simplifiée pour le
traitement des concentrations (M.B.11 décembre 2002) étant réunies.
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Version publique
Par ces motifs,
Le Conseil de la concurrence
- constate que la concentration en cause tombe dans le champ d'application de la loi ;
- déclare la concentration admissible, conformément aux articles 33 § 1er et 33 § 2, 1.a de la loi.
Ainsi décidé le 29 août 2005 par la chambre du Conseil de la concurrence constituée de Monsieur Jacques
Schaar, président de chambre, de Mesdames Dominique Smeets et Anne Junion, et de Monsieur Christian
Huveneers, membres.
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