Saint Andrews
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Saint Andrews
É V A S I O N Saint Andrews God save the green ! C’est dans cette ville d’Ecosse que le prince William a rencontré Kate Middleton. Saint Andrews héberge une des plus anciennes universités de Grande-Bretagne. Mais c’est surtout là qu’est né le golf. Ce sport est toujours l’activité reine de la ville. PAR GUILLAUME DE DIEULEVEULT (TEXTE) ET ÉRIC MARTIN POUR LE FIGARO MAGAZINE (PHOTOS). 70 • LE FIGARO MAGAZINE - 22 AVRIL 2011 Ruines de la cathédrale et du château, tour médiévale, vieux port : la silhouette de Saint Andrews est reconnaissable entre toutes. On la voit depuis le golf de l’hôtel Fairmont, à dix minutes de la ville. 22 AVRIL 2011 - LE FIGARO MAGAZINE • 71 É V A S I O N Rudes montagnes, prairies dorées, austère beauté des vallées Au nord de Saint Andrews se trouvent les Glens of Angus. Ces très anciennes vallées glacières sont surtout fréquentées par des moutons, des randonneurs, des grouses, des faisans et des chevreuils. Ici, le Glen Clova, au sud-est du massif montagneux. Dimanche après l’office : le Pier Walk, une tradition de Saint Andrews. u fond, c’est une histoire banale. D’ailleurs, lorsqu’en 2001 Catherine Middleton fit ses premiers pas à l’université de Saint Andrews, en Ecosse, elle se doutait certainement de ce qui l’attendait. Les étudiants forment la majorité de la population de cette ville de 16 000 habitants. Ils y vivent comme dans une bulle, en vase clos. Lors de son discours de bienvenue, le principal de l’université ne lui apprit sans doute rien en annonçant qu’à la fin de son cursus un étudiant sur dix se marierait avec un condisciple. Mais l’histoire ne dit pas si l’idée l’effleura que, dans son cas, cet étudiant serait de sang royal... Le conte de fées qui fascine les sujets de la couronne britannique a débuté dans un cadre enchanteur. Avec ses trois rues principales, ses golfs plusieurs fois centenaires qui pénètrent jusque dans la ville, ses bâtiments universitaires médiévaux, son château en ruine au bord de la mer, Saint Andrews est un décor idéal. Les étudiants et les golfeurs en sont les protagonistes. Ils s’y croisent depuis environ six cents ans. Car Saint Andrews, qui abrite la plus vieille université d’Ecosse, est surtout la patrie de naissance du golf. Le prince William, davantage porté sur le polo que sur l’activité reine de la ville, en fréquenta peu les prestigieux parcours. Mais d’autres monarques avant lui contribuèrent à donner ses lettres de noblesse au Old Course, le plus ancien parcours de golf du monde. Le premier fut David Ier d’Ecosse. En 1123, il reconnut que le links land était la propriété des habitants de Saint Andrews, qui pouvaient s’y exercer à toutes sortes de jeux. Cette lande n’était alors qu’une zone de dunes couvertes d’herbe rase et de touffes d’ajoncs, impropre à la culture. Le golf a commencé à y être pratiqué au début du XVe siècle. Il est vite devenu si populaire qu’en 1457 le roi Jacques II d’Ecosse dut l’interdire afin d’inciter la jeunesse à pratiquer le tir à l’arc, plus utile lors des batailles avec l’ennemi anglais. En 1502, Jacques IV, golfeur lui-même, leva le ban. Depuis, on n’a jamais cessé de jouer au golf à Saint Andrews. The Old Course est le parcours auquel tous les golfeurs du monde rêvent de se mesurer une fois dans leur vie. Sa particularité est de n’avoir jamais été conçu par un architecte. Il a été façonné par des siècles de pratique. Et les règles qui y ont été inventées se sont imposées à tous les golfs de la planète. Aujourd’hui, Saint Andrews compte sept parcours, gérés par la Saint Andrews Links Trust, ••• A 72 • LE FIGARO MAGAZINE - 22 AVRIL 2011 22 AVRIL 2011 - LE FIGARO MAGAZINE • 73 E V A S I O N Le plus important complexe de golf en Europe Glamis Castle, une résidence royale depuis 1372. La reine mère passa son enfance dans ce château où Shakespeare situe l’action de « Macbeth ». Le saint des saints J ••• un organisme public. Cela fait de la ville le plus important complexe de golf en Europe. 240 000 parties – dont plus de 48 000 pour le seul Old Course – sont jouées chaque année sur les sept parcours de la ville : 60 % par des membres de clubs de Saint Andrews, 40 % par des visiteurs. A condition d’avoir le handicap requis (24 pour les hommes, 36 pour les femmes), Saint Andrews est donc relativement accessible, si on en connaît les ficelles (voir encadré). De nombreux golfs se trouvent aussi en dehors de la ville. Ainsi, à dix minutes de là, l’hôtel Fairmont Saint Andrews dispose de deux parcours de 18 trous. A Saint Andrews, on pratique le golf comme une religion. La ville en héberge le temple : la sévère façade du Royal and Ancient Golf Club se dresse en bordure du Old Course. C’est dans ce club créé en 1754 que sont fixées les règles suivies par les 30 millions de golfeurs de la planète. Le musée du golf est situé juste derrière la respectable institution. Il raconte les évolutions techniques du sport. On y voit, alignées derrière les vitrines, les cannes en bois utilisées du temps de Bobby Jones, un des plus grands champions de l’histoire du golf. A quelques pas de là, dans la rue Golf Place, se trouve la boutique de la Saint Andrews Golf Company. Cette entreprise est la dernière d’Ecosse à produire des cannes semblables à celles de Bobby Jones. « Un petit courant de joueurs revient à une pratique à l’ancienne pour affronter le Old Course avec des clubs construits de façon traditionnelle », explique Ewan Glen, un des directeurs de ••• de planter son tee. Toute la planète golfique se presse pour vivre une expérience unique dans le saint des saints et, comme il y a trop de fidèles, l’accès au parcours est laissé à l’appréciation du hasard. Chaque jour, le daily ballot récompense les pèlerins qui, la veille, ont fait acte de candidature. Pour être certain d’une visite inoubliable dans cette petite ville d’Ecosse, des tour-opérateurs proposent un green fee garanti pour un séjour complet, hébergement compris. A des tarifs assez élevés. Mais, dit-on dans les pubs, les légendes n’ont pas de prix. La plus étonnante concerne l’origine des bunkers, ces pièges de sable uste une balle, un club et, face à vous, un premier trou qui n’est pas, loin de là, le plus difficile du monde. Pourtant, quand on se retourne pour vérifier sur l’horloge son heure de départ, le poids de l’histoire vous tombe sur les épaules. Derrière la façade du vieux bâtiment se réunissent les vénérables membres du Royal and Ancient. Leurs ancêtres ont créé les règles du golf en 1754. Depuis, ces gardiens du temple cooptés dans toutes les nationalités, dont une dizaine de Français, se réunissent régulièrement pour actualiser les lois du jeu, boire un vieux scotch et fumer un bon cigare. Rarement pour jouer. D’ailleurs, ce club-house aux salons feutrés est peut-être le seul au monde à ne pas avoir de parcours. Le Old Course, comme les autres terrains de la ville, est effectivement public. Si proche de la population qu’aucun grillage ne le sépare de la rue. Si intégré que chaque dimanche, jour de fermeture pour les joueurs, greens et fairways sont foulés respectueusement par les promeneurs et les amateurs de pique-niques. L’accès est libre, généreux. Ce n’est pas vraiment le cas Le Swilcan Bridge, avant le 18e trou du Old Course. Tous les les autres jours de la semaine, quand il s’agit golfeurs du monde rêvent de l’emprunter au moins une fois. 74 • LE FIGARO MAGAZINE - 22 AVRIL 2011 énervants sur tous les parcours de la terre. Les coupables ? Les moutons qui, il y a des siècles, se protégeaient du vent en se blottissant derrière de petits monticules : en satisfaisant leurs besoins naturels, les ovins ont brûlé l’herbe et laissé le sable prendre ses aises. La plage où fut tournée une célèbre scène des Chariots de feu est toute proche. Le Old Course est donc aussi le premier des links, ce terme anglophone qui désigne, à l’origine, les parcours imaginés entre la mer et les surfaces cultivables. Un no man’s land que fréquentaient principalement les bergers. Doit-on en déduire que ces derniers ont inventé le golf ? Les historiens du jeu se chamaillent. Il semble cependant certain que l’activité s’est réellement développée au XVIIIe siècle, avec la noblesse et la franc-maçonnerie. Et avec des codes pour le moins misogynes qui perdurent. « Interdit aux femmes et aux chiens », la vieille plaque d’un autre temps fait toujours sourire dans les différents cercles golfiques qui longent le parcours. Un parcours qui, à l’origine, comprenait 22 trous. Des travaux, dont on ne connaît la cause, l’ont amputé. Depuis, la règle 18 est universelle. Comme la toute-puissance de DENIS LEBOUVIER Saint Andrews. Les ruines de la cathédrale de Saint Andrews vues depuis la Saint Rule’s Tower. Fondé en 1160, ce chef-d’œuvre de l’art gothique en Grande-Bretagne fut pillé en 1559. Les anciennes maisons de Saint Andrews sont, dit-on, construites avec ses pierres. Terrasse ensoleillée... à l’écossaise ! Le village de Crail est l’un de ces jolis ports qui ponctuent la côte au sud de Saint Andrews. Sautant aux yeux comme un élément indissociable du décor, la cape rouge d’un étudiant de l’université de Saint Andrews, au coin de South Street. Jusqu’aux derniers rayons du soleil, les joueurs se succèdent sur le Old Course. É V A S I O N SAINT ANDREWS LE CARNET de VOYAGE Office de tourisme de la GrandeBretagne (www.visitbritain.com). Y ALLER Easy Jet (www.easyjet.com). Vols quotidiens au départ de ParisCharles-de-Gaulle, à destination d’Edimbourg. A partir de 33 ¤ l’aller simple, 66 ¤ l’aller-retour. OÙ DORMIR ? Le Jigger Inn est un rendez-vous prisé des golfeurs du Old Course. Le Aikman’s, un pub bon enfant ••• l’entreprise. Cette pratique a même un nom, le Hickory Golf. Dans une ville dont l’histoire est liée à celle de ce sport, il est bien naturel que les traditions aient une place à part. Sur ce terrain, l’université, autre institution phare de Saint Andrews, n’est pas en reste. L’une de ses traditions consiste à se rendre tous les dimanches matins, à l’issue de l’office célébré à 11 heures dans l’église Saint Salvator, sur la jetée de pierre. C’est le Pier Walk. Cheminant sous le frais soleil de cette fin de matinée, ils sont sept à s’être pliés à la coutume ce jour-là. Ce sont des étudiants de première année, cela se reconnaît au fait qu’ils portent leur cape de laine rouge sur les deux épaules. Ce vêtement fut imposé au XVIIe siècle. Il s’agissait de repérer les étudiants plus assidus au pub qu’à la bibliothèque. Les lointains condisciples de ces fêtards ne portent plus de cape lorsqu’ils sortent le soir. Mais il n’est pas difficile de les trouver. Passé 22 heures, la ville est littéralement occupée par les étudiants. Au Aikman’s, l’ambiance est bon enfant, concert de rock et pintes qui s’entrechoquent. Le Ma Bells, qui était fréquenté par le prince William, est plutôt le rendez-vous des étudiants de bonne famille. Ils passent pour être assez nombreux à Saint Andrews, où l’on porte des vêtements classiques : veste Barbour pour tout le monde. « A force de vivre ensemble, on finit par s’habiller pareil », confirme Mairi Oliver, une étudiante de quatrième année. « C’est une nice little bubble ici ! D’ailleurs on est toujours sûr de revoir un étudiant déjà aperçu. » Après le fameux défilé où elle lui apparut dans une robe aussi banale que transparente, William n’eut donc pas de mal à croiser à nouveau le chemin de Kate. ■ GUILLAUME DE DIEULEVEULT La salle à manger de Easter Kincaple, bed & breakfast de charme. Easter Kincaple (00.44.13.34.47.32.24 ; www.easterkincaple.com). La famille Cuthill vit depuis plus d’un siècle dans ce joli cottage situé dans la campagne proche de Saint Andrews. James, qui est agriculteur, l’habite actuellement avec sa femme Lucy, leurs deux enfants et leur labrador. L’accueil de ce B & B est parfait. Le service et les chambres n’ont rien à envier aux meilleurs hôtels de Saint Andrews. A partir de 56 ¤ la nuit. Fairmont Saint Andrews (00.44.13.34.83.74.89 ; www.fairmont.com/standrews). à une dizaine de minutes de Saint Andrews, cet hôtel prestigieux est situé entre deux golfs, au bord de la mer du Nord. Offre spéciale pour les lecteurs du Figaro Magazine : nuit en chambre Fairmont Guestroom à 129 ¤. Cette offre est valable de juin à septembre 2011 pour toute réservation faite avant le 30 avril. (Mentionner « Le Figaro » en appelant le 00.44.13.34.83.70.00 ou par mail : [email protected]). SE RESTAURER/SORTIR Le Peat Inn (00.44.13.34.84.02.06 ; www.thepeatinn.co.uk) est considéré comme un des meilleurs restaurants d’Ecosse. Il est tenu depuis 5 ans par Geoffrey et Katherine Smeddle. La salle compte 40 couverts. Dans les assiettes, une cuisine contemporaine qui utilise avec brio des produits locaux et de saison. L’établissement compte également 8 chambres. A partir de 136 ¤ la nuit. A Saint Andrews, le Sea Food (00.44.13.34.47.94.75 ; www.theseafoodrestaurant.com) est installé dans un bâtiment de verre qui surplombe la mer. Très belle vue. Ce restaurant sert, comme son nom l’indique, des poissons. Le Aikman’s Bar and Bistro (00.44.13.34.47.74.25), à Saint Andrews, est un des plus anciens rendez-vous des étudiants de l’université. Concerts les jeudis et vendredis. Egalement réputé, le pub Ma Bells se trouve au rez-dechaussée du St Andrews Golf Hotel (00.44.13.34.47.26.11 ; www.standrews-golf.co.uk). ET ENCORE… Trois adresses appréciées des golfeurs, bondées lors des tournois : The Macdonald Rusacks Hotel, Pilmour Links, St Andrews (00.44.844.879.9136). Le Claret Jug Pub, 7, Pilmour Place, North Street (00.44.1334.473.105). Et le Jigger Inn (00.44.13.34.47.43.71) à côté du Old Course Hotel. LE BÉMOL Les balles de golf volent bas à Saint Andrews... Attention à ne pas garer sa voiture n’importe où sous peine de retrouver son pare-brise en éclats. La rue Links est particulièrement dangereuse, et pour cause : on s’y gare le long du Old Course. LIRE Guide du Routard Ecosse, 12,90 ¤. Découvrez en vidéo sur iPad les plus belles images de Saint Andrews, ville universitaire et lieu de naissance du golf, où l’idylle princière a commencé… G. D. ILLUSTRATION ANDRÉ DE CHASTENET AVANT DE PARTIR