Livret de médiation

Transcription

Livret de médiation
Plan de l’exposition
7
6
8
5
11
9
10
4
SOUS-SOL
9 Exposition de poche
2
1
3
10 Sculpture instrumentale
11 Métamorphose
REZ-DE-CHAUSSÉE
1 Nature et géométrie
4 Mobiles
7 Studiolo
2 Obsolescence
5 Récits de voyage
8 Carte
3 Non alignés
6 Conversations
03
Introduction
L’exposition
de
Raphaël
Zarka et d’Aurélien Froment
découle
d’une
invitation
mutuelle
formulée
par
deux artistes qui ont une
connaissance réciproque de
leurs travaux respectifs. Les
intéressés ont participé à de
nombreuses manifestations
tant dans le cadre d’expositions personnelles que
collectives, en France et à
l’étranger (Centre Pompidou,
Vancouver
Contemporary
Art Gallery, Biennale de Venise...), mais cette exposition
des Abattoirs est - pour l’un
comme pour l’autre - une de
leurs plus importantes, tant
par sa surface que par le
nombre de pièces rassemblées. Et ils en proposent une
traversée commune. Pour le
musée, cette réunion est un
évènement inédit. Il est à la
fois la somme de deux monographies, un projet commun
de deux des artistes français
04
les plus reconnus de leur
génération et une exposition
collective.
Appréhension large des
œuvres de chacun, l’exposition est une découverte
croisée
et
simultanée
des principaux motifs de
celles-ci. Déployée dans
les espaces principaux des
Abattoirs, elle regroupe une
centaine de pièces, dont plusieurs inédites. Par sa double
signature, la proposition
approche la structure d’un
chant en canon, mais elle se
signale rapidement par une
polyphonie
exponentielle.
Car sur une base stéréophonique, leur projet est aussi
une exposition collective.
Sujets, figures et auteurs s’y
multiplient.
Aurélien Froment et Raphaël
Zarka ne sont pas les seuls
auteurs ici. Ils convient les
spectateurs à la visite d’un
musée imaginé, un endroit
dans lequel les collections
ne seraient pas protégées
dans des vitrines mais réinventées par les œuvres qui
les conservent.
Olivier Michelon
Aurélien Froment est né
en 1976, il vit et travaille à
Dublin. Si l’image peut être
considérée comme le moteur
principal de son œuvre,
celle-ci s’envisage comme
une recherche poétique dont
les formes se renouvellent à
chaque sujet. Le cinéma, le
Facteur Cheval, les arts de
la mémoire et la danse sont
quelques-uns des prétextes
qu’il met en situation ici.
Raphaël Zarka est né en
1977, il vit et travaille à Paris.
La sculpture est le socle
commun de son œuvre, mais
celle-ci se réalise également
par la photographie, la peinture, le dessin ou encore la
vidéo. Elle a été influencée
par des horizons aussi divers
que le skate-board, les objets
mathématiques et bien sûr
l’histoire des arts. Contemporain, le travail de Raphaël
Zarka est en conversation
avec les époques saisies
dans ses œuvres.
05
1
Nature et géométrie
Influencé par Rousseau,
Friedrich Fröbel (1782-1852)
conçoit au début du XIXe
siècle un projet pédagogique
inédit. Basées sur le jeu et
la reconnaissance visuelle,
les activités proposées dans
le jardin d’enfants (Kindergarten) dont il est l’initiateur
visent à une compréhension
du monde par des formes
manipulables. À travers des
combinaisons géométriques
simples, la méthode de Fröbel ressemble à un manuel
de l’abstraction à venir.
Avant le « traitez la nature
par le cylindre, la sphère, le
cône » de Paul Cézanne, il y
a eu les « cylindres, sphères
et cubes » de Fröbel. C’est
avec ces éléments que la
génération de Piet Mondrian
et Vassily Kandinsky a saisi
son environnement. Fröbel
est tombé dans un oubli
relatif, mais sa méthode est
06
un des socles de nos outils
d’appréhension du monde.
Aurélien
Froment
s’est
emparé de la méthode de
Fröbel pour concevoir une
exposition dans laquelle le
pédagogue est autant un
sujet qu’un acteur. Fröbel est
« Fröbelé », traduit par ses
outils. C’est à partir de ceuxci, que l’artiste compose
ses photographies et recrée
des objets pour introduire
l’œuvre du pédagogue. Les
images
photographiques
de Froment sont autant
des compositions que des
représentations. Dans ce
gigantesque jardin d’enfants,
joué à l’échelle d’une nef, le
visiteur déambule visuellement et physiquement. Relais
visuels, les photographies
forment une grille de lecture que l’on peut poser sur
l’ensemble de l’exposition et
du bâtiment.
Dans cette présentation sont
intégrées des œuvres de
Raphaël Zarka, mais également une peinture de PierreHenri
de
Valenciennes
(1750-1819)
représentant
Cicéron découvrant le tombeau d’Archimède. Sur son
tombeau, le scientifique grec
(287 av.JC – 212 av. JC) aurait
demandé - bien avant Fröbel
- que soit gravée une sphère
inscrite dans un cylindre.
Parmi d’autres inventions,
Archimède est le découvreur
de la vis sans fin, une forme
que l’on retrouve dans les
Cénotaphes que lui a dédiés
Raphaël Zarka à partir d’une
cheminée Tudor du XVIe
siècle. À Archimède l’on doit
aussi la première découverte
du rhombicuboctaèdre, ce
volume géométrique qui
obsède l’œuvre de Zarka et
dont l’on trouve deux occurrences ici. Les deux grands
volumes de bétons et de
bois, intitulés Les récifs, sont
des sculptures recueillies.
Abandonnés au bord d’une
nationale, ils ont été partiellement restaurés et consolidés par l’artiste. D’abord
inconnus dans leurs usages,
ces rhombicuboctaèdres se
sont avérés être des récifs
artificiels, une géométrie
propre à recréer la nature.
2
Obsolescence
2
Les formes du repos de
Raphaël Zarka traitent de
constructions, de volumes,
d’« ouvrages d’art » délaissés, de rampes de skateboard
reprises par la nature ou de
rail de train à grande vitesse
resté dans le paysage. Photographiés, ces morceaux ne
sont pas des ruines mais des
sculptures, suspendues dans
le temps.
En 1982 dans Fitzcarraldo,
le cinéaste Werner Herzog
raconte la passion dévorante
d’un homme pour l’opéra.
Avec sa modeste fortune,
il rêve de bâtir une salle
de concert dans la jungle
péruvienne. Cette folie lyrique
l’amène à faire passer un
bateau entre deux bras de
fleuve. Aurélien Froment a
repris cet épisode sous la
forme d’un plan-relief. Cette
maquette est proche dans
08
sa facture et ses motivations
de celles présentes dans les
musées d’histoire naturelle.
La maquette matérialise un
point de bascule dans le film
et dans le destin de son personnage. Un bateau est monté
au sommet d’une montagne et
y repose un instant.
L’obsolescence dorée est
un moment particulier dans
lequel une technologie, jadis
pleinement occupée par sa
fonction, se révèle dans toute
sa beauté et ses possibles. Au
début du XXe siècle, le cinéma
a rencontré le théâtre et le
roman. Depuis il n’a cessé de
raconter des histoires avec un
début et une fin, là où il était
avant tout une histoire de
temps et de lumière. Balance
des blancs de Froment est
un film invisible qui dure le
temps d’une exposition et
disparaît dans celle-ci.
09
3
Non alignés
« Somnath Mukherjee s’est
installé à Pikine, ville
satellite de Dakar en 1987.
Avec Ram Chandra Biswas,
Mukherjee quitte Calcutta en
1982, en vue de réaliser un
tour du monde à bicyclette
afin d’œuvrer pour la paix et
l’amitié entre les peuples.
Cinq années plus tard, après
avoir traversé les villages
et les villes de vingt-quatre
pays du continent africain,
après avoir appris les langues, partagé les repas en
échange de performances
et de spectacles improvisés,
Somnath et Ram arrivent
au Sénégal. Leur prochaine
destination prévue : le Brésil.
Amadou Badiane, chanteur
sénégalais indophile invite
alors Mukherjee à enseigner
les danses indiennes. Appelé
également à programmer
et à diffuser la musique
indienne via radios et
10
télévisions, Mukherjee se fait
rapidement un nom et décide
de rester au Sénégal. Il crée
une association culturelle
Bharatindo-sénégalaise,
(L’identité
de
Pehchane
l’Inde), qui réunit autour de
lui une petite communauté de
passionnés à qui il continue
de transmettre sans relâche
depuis 25 ans la langue et les
gestes de l’Inde, à travers
le chant, la culture et la
danse ».
Aurélien Froment
11
4
Mobiles
Dans son ouvrage Contes de
la Lune (2011), l’historienne
des lettres et des sciences,
Frédérique Aït-Touati parle de
« voyage optique » pour décrire la manière dont le père
de l’astronomie moderne,
Johannes Kepler, considérait
ses observations de la Lune.
C’est grâce à son télescope
qu’il pouvait voyager jusqu’à
la Lune, y camper ses expériences et ses récits. À la fin
du XVIIe siècle, Emanuele
Tesauro parlait même d’« ailes
de verre » au sujet de l’optique
du télescope. Nombre des
œuvres de Froment et Zarka
sont des instruments de navigation et de voyage.
L’intérêt de Raphaël Zarka
pour les formes de mesure,
instruments
scientifiques
devenus pièces de musée,
souligne ce point. Depuis 2010,
il a entrepris la réalisation
12
d’un catalogue raisonné du
rhombicuboctaèdre, de la
classification par Archimède
de ce volume à 26 faces à son
utilisation
contemporaine,
sans omettre ses nombreuses
représentations
picturales
et scientifiques. À travers le
répertoire qu’il dresse, Zarka
fait des rhombicuboctaèdres volumes par ailleurs nommés
de la sorte par Kepler - une
suite de balises posées dans
le temps et l’espace.
L’optique (le cinéma, la photographie) occupe une place
importante dans le travail
d’Aurélien Froment. Avec ces
outils, il déplace son regard
et projette le spectateur dans
d’autres espaces temps.
Mais là, ce sont des tirages
de cloches de terre, moulées
à Arcosanti (Arizona), qui
annoncent et se souviennent
d’un des voyages de Froment.
13
5
Récits de voyage
À l’origine, les récits de
voyage étaient ce que l’on
ramenait faute d’autre chose.
À la fin du XVIe siècle, dans
Histoire d’un voyage fait en la
terre de Brésil, l’explorateur
Jean de Léry regrette que
son perroquet ait été mangé
par les marins lors de son
retour.
Rhombus Sectus de Zarka
et The Apse, the Bell and the
Antelope de Froment sont
des récits de voyage. Le premier film prend pour sujet la
bibliothèque nationale du Belarus à Minsk, une construction monumentale héritière
accidentelle de l’architecture
moderne et le plus grand
rhombicuboctaèdre jamais
construit. Dans son film,
Zarka filme le bâtiment mais
surtout sa présence massive
et étrange. Il est posé dans le
paysage mais sans certitude
14
de pérennité ou de datation
exacte.
Le second film a pour sujet
une autre architecture, celle
conçue par Paolo Soleri à partir de la fin des années 1960
dans le désert de l’Arizona.
Le projet est celui d’une cité
réconciliée avec la nature. La
ville est ici racontée par un
de ses principaux habitants
et constructeurs : Roger
Tomalty. Malgré le recours à
l’image, la ville est davantage
décrite qu’elle n’est montrée.
Au centre, un banc de béton
est partagé par les deux projections. Celui-ci a été réalisé
il y a un peu plus d’un an à Toulouse lorsque Roger Tomalty
est venu pour apprendre aux
étudiants des beaux-arts de
la ville et aux deux artistes à
travailler selon les méthodes
de Soleri.
6
Conversations
Le cabinet d’amateur est un
genre pictural qui s’épanouit
au début du XVIIe siècle. Un
des plus célèbres est l’Allégorie de la vue réalisée en
1617 par Pierre Paul Rubens
et Jan Brueghel, conservée au Musée du Prado
(Madrid). Dans ces tableaux,
les artistes s’approprient
les œuvres d’autres en les
peignant dans des intérieurs
savamment agencés, des
galeries imaginaires ou des
lieux d’étude. Parfois même,
les œuvres originales sont
modifiées pour répondre à
l’agencement. Le changement d’échelle, le passage
d’un format à un autre, de
la toile à la miniature, de
la sculpture à la peinture,
s’accompagnent de bouleversements plus substantiels.
Certaines œuvres peuvent
aussi être inventées pour être
insérées dans de véritables
16
conversations
entre
pièces conservées.
les
Froment et Zarka situent
tous deux leurs travaux dans
un après. Ils reprennent des
formes déjà existantes, prolongent des histoires. Cette
salle noue par une série de
panneaux, de volumes et de
transparences, un dialogue
entre deux lieux, deux répertoires de forme et de vie :
le monastère bénédictin de
Monte Oliveto (Toscane) et le
site d’Arcosanti (Arizona).
Du premier lieu, Raphaël
Zarka a « emprunté » les
panneaux décoratifs insérés
au début du XVIe siècle par
Signorelli et Sodoma pour
rythmer la fresque de la vie
de Saint Benoît. Habituellement reléguées dans la partie inférieure du cycle, ces
compositions géométriques,
véritable
répertoire
de
figures
abstraites,
sont
reprises par Raphaël Zarka
et accrochées à hauteur de
tableau. Ces grands dessins,
qui évoquent dans leur technique aussi bien les gouaches
découpées de Henri Matisse
que la marqueterie, respectent la taille originale du
chef-d’œuvre
renaissant.
La vingtaine de planches
s’apprécie indépendamment
mais également comme panneaux ornementaux d’une
salle où sont disposées par
Froment des photographies
et des maquettes de deux
des principales structures
construites à Arcosanti.
17
7
Studiolo
Raphaël Zarka a plusieurs
fois utilisé le terme de
« sculpture documentaire »
pour qualifier son travail. Par
cette expression, il souligne
qu’il travaille volontairement
à partir de formes déjà
existantes ; des formes
qu’il n’invente pas mais qu’il
découvre. À la manière d’un
archéologue exhumant un
objet, l’artiste s’intéresse
autant aux contours de
celui-ci qu’à son contexte
d’extraction, à l’histoire dont
il témoigne. À partir de 2008,
Raphaël Zarka a entrepris
une série de maquettes
qui trouvent leurs sources
dans la peinture italienne
du XVe siècle. Une des plus
complexes d’entres elles,
Studiolo modélise le cabinet
de Saint Jérôme tel qu’il
a été imaginé par Antonello da Messina dans un
célèbre tableau conservé à la
18
National Gallery de Londres.
Un studiolo est davantage
qu’un lieu d’étude, il est aussi
un lieu de conservation, une
des variations des cabinets
de curiosités et de merveilles
qui se développent à la Renaissance et qui annoncent
la classification du monde à
venir.
Aurélien Froment et Raphaël
Zarka partagent un intérêt
tout particulier pour la
période renaissante. Elle
est, du XVe au XVIe siècle, un
moment très particulier dans
l’histoire de l’art et des idées,
une période dans laquelle la
vision « moderne » du monde
s’installe. Elle place l’humain
en son centre, par l’art et
les sciences. Cet instant est
aussi celui d’une crise dans
laquelle
s’épanouissent
d’autres formes de connaissances qui n’ont finalement
pas connu de suite. Ainsi,
L’idée de Camillo d’Aurélien
Froment s’attache à un texte,
celui de Giulio Camillo, un
philosophe
hermétique
qui, nourri par « l’art de la
mémoire » de l’Antiquité
a développé un projet de
mémorisation du monde à
partir d’une suite de lieux et
de figures disposés dans un
théâtre. À travers la voix et
les gestes de l’actrice Olwen
Fouéré, Froment projette ce
théâtre sur la scène du Teatro Olimpico réalisé d’après
Palladio à Vicence à la fin du
XVIe siècle.
19
8
Carte
En 1968, un tremblement de
terre a détruit la ville sicilienne
de Gibellina. Une vingtaine
d’années plus tard, le peintre
italien Alberto Burri réalise
un monument à l’échelle de
la ville, une œuvre de près de
300 mètres sur 400. Il grande
Cretto est une immense
sculpture de ciment, un bloc
qui recouvre le passé, mais
conserve dans ses formes le
souvenir de la ville. Le dessin
de ses rues est devenu un réseau de craquelures. Raphaël
Zarka emprunte souvent le
terme de « documentaire »
pour qualifier son travail,
mais son film n’en est pas
un. Il est une transformation,
une déduction, celle d’une
sculpture physique refondue
en un film, un bloc de temps et
d’image projeté, immatériel.
Dans Gibellina Vecchia, le film
de Zarka, un géomètre passe
comme un double possible de
20
l’artiste. À lui de relever un
paysage arrêté, coulé dans le
ciment, mais aux frontières
indéfinies.
Tutto nero est une œuvre
de Burri réalisée en 1955
et entrée dans la collection
des Abattoirs en 1993. Elle
appartient aux cycles réalisés
par l’artiste à partir de sac de
jute, un matériau organique
dont les mailles éparses lui
permettent d’atteindre une
qualité organique, informe,
aux bords indéfinis.
Dans Sylvie et Bruno, l’écrivain Lewis Carroll, auteur
d’Alice au Pays des Merveilles,
évoque une carte détenue
par un roi. Aussi grande que
son royaume, elle n’a jamais
pu être dépliée. Les paysans
avaient peur que cela ne plonge
leurs terres dans le noir.
21
9
Exposition de poche
Théâtre de Poche d’Aurélien
Froment est inspiré des
prouesses
du
magicien
Arthur Lloyd, un prestidigitateur de l’entre-deux guerres,
dont le numéro consistait à
exhiber à la demande toute
sorte de documents imprimés. Lloyd jouait avec les
images, mais aussi avec la
mémoire. Il gardait en tête
la classification d’un répertoire de plusieurs milliers
de documents qui tenaient
dans les poches de sa robe.
Ici, un homme manipule
une série de cartes face aux
spectateurs. Il positionne des
reproductions sur un écran
transparent entre lui et nous.
Inspirée de l’interface du film
de science-fiction de Steven
Spielberg Minority Report
(2002), l’action rappelle les
balayages d’images que nous
réalisons quotidiennement
sur nos écrans tactiles.
22
Froment a réalisé son œuvre
en 2007, l’année de la commercialisation de l’iphone et
plusieurs mois avant celle de
l’ipad. Mais l’œuvre trouve
ses sources dans un temps
bien plus long. Au XVIIe siècle,
Cassiano et Carlo Antonio de
Pozzo constituèrent sous
le nom de Museo cartaceo
(ou musée de papier) une
collection
de
plusieurs
milliers de feuillets, un
recueil d’images destiné à
rendre visible le savoir des
hommes. Au fur et à mesure
du film, le magicien s’entoure
d’un monde d’images, un
aquarium iconographique où
se conjuguent associations
et récits à la manière d’un
film en plans fixes ou d’une
exposition.
23
10
Sculpture Instrumentale
L’expérience du skateboard
a été décisive dans l’œuvre
de Raphaël Zarka, non pour
son iconographie, mais par le
rapport particulier à l’espace
qu’elle induit. La pratique du
skate consiste en une série
de détournements. Par « Une
journée sans vague » – pour
paraphraser le titre de l’ouvrage que Zarka a consacré
à l’histoire du skateboard –,
des skateurs ont transformé
la rue en terrain de glisse.
Ils ont utilisé des piscines
vides pour y rouler, investi
des espaces publics et privés
pour rouler et sauter. La série
Riding Modern Art est emblématique de cela. Collectées
dans les magazines spécialisés, ces photographies
montrent des sculptures
utilisées comme obstacles ou
appuis, souvent de manière
spectaculaire. Les angles
et les plans deviennent des
24
surfaces et des points d’équilibre, les courbes des lieux
d’accélération.
Comme à rebours, l’artiste a
conçu des sculptures « skatables » à partir des objets
scientifiques du mathématicien Arthur Schönflies (18531928), des petits éléments
géométriques plus ou moins
réguliers qui s’emboîtent
les uns dans les autres pour
paver l’espace sans jamais
laisser de vide. Agrandis à
l’échelle du mobilier urbain,
ils sont qualifiés de « sculptures instrumentales » par
Raphaël Zarka qui les a
confiés à des skateurs pour
plusieurs journées, à charge
pour eux de venir les patiner
par figures interposées. Ces
sculptures en bois valent
pour leur forme, mais elles
sont aussi des obstacles
négociables par les skateurs.
25
11
Métamorphose
Réalisée
de
manière
parallèle
à
l’ensemble
dédié à Friedrich Fröbel,
l’installation photographique
consacrée par Froment au
Facteur Cheval (1836-1924)
s’apparente à une galerie de
portraits, ceux des créatures
qui habitent l’architecture
fantasmagorique de Ferdinand Cheval. Le Facteur
a commencé à édifier son
Palais à Hauterives en 1879.
Il lui aura fallu plus de 30 ans
pour bâtir un chef-d’œuvre
dans lequel la structure du
bâtiment n’est qu’excroissance sculpturale. Froment
a isolé ces motifs grâce à un
drapé noir. Cet artefact est
également un accessoire qui
renforce la théâtralité des
êtres imaginés par le Facteur Cheval. À la grille et la
clarté géométrique de Fröbel
semble répondre le monde
fantastique de Cheval.
26
Par contamination, Les Prismatiques, sculptures présentées par Raphaël Zarka
dans la salle, s’assimilent
à une suite de fétiches aux
allures anthropomorphes ou
zoomorphes. Ces sculptures
sont pourtant déduites avec
rigueur par l’artiste à partir
de
modules
identiques,
une méthode qui aurait pu
avoir cours dans les jardins
d’enfants de Fröbel. Un jour,
alors qu’il patientait dans
l’atelier d’un ami peintre,
Raphaël Zarka a mis la main
sur un jeu de clés de châssis,
ces petites pièces de bois
énigmatiques qui se posent
au dos du tableau, par paires,
aux quatre angles du cadre
pour tendre la toile. C’est à
partir de cette forme trouvée
que l’artiste a déduit une série
de sculptures, un hommage
concret aux illusions à venir.
27
Les œuvres d’Aurélien
Froment ont été coproduites
avec : Badischer Kunstverein
(Karlsruhe), Bunkier Sztuki
(Cracovie), Clark House
Initiative (Bombay), FRAC Îlede-France/Le Plateau (Paris),
Irish Museum of Modern Art
(Dublin), ISDAT (Toulouse),
NCAD Gallery (Dublin)
En collaboration avec :
12e Biennale de Dakar,
Bharat-Pehchane (Pikine),
Cinéma Le Cratère (Toulouse), Cosanti Foundation
(Scottsdale), Palais Idéal du
Facteur Cheval (Hauterives),
National College of Art and
Design (Dublin), Red shoes
(Paris)
Avec le soutien de :
Arts Council of Ireland
Galerie Marcelle Alix (Paris)
Temple Bar Gallery + Studios
(Dublin)
Aurélien Froment remercie :
Isabelle Alfonsi, Sue Anaya,
Cécilia Becanovic, Rob Clyde,
Anne Dallant, Marie-José
Georges, Tessa Giblin, Mary
Hoadley, Anne Kelly, Marc
Lagouarre, Stephen Marsden,
Aurélien Mole, David Mozziconacci, Somnath Mukherjee,
Pierre-Alexandre Nicaise,
Chris Ohlinger, Camila Renz,
Olga Rozenblum, Sumesh
Sharma, Maki Suzuki, Roger
Tomalty, Dominic Turner et
les équipes des Abattoirs.
Ainsi que les étudiants ayant
participé au workshop Silt
Casting qui s’est tenu du 1er
au 8 décembre 2014 à l’ISDAT
à Toulouse :
Ismail Alaoui-Fdili, Audrey
Brugnol, Antonin Detemple,
Claudine Dumas, Anaïs Hay,
Rebecca Konforti, Céline
Lachaud, Jeanne Macaigne,
Liza Maignan, Isamu Marsden, Ambre Muller, Marion
Molinier, Aurélie Perderizet,
Leslie Ritz, Julie Saclier et
David Vaucheret.
Sauf mention contraire,
Raphaël Zarka
toutes les œuvres d’Aurélien
Froment, courtesy Marcelle
Alix, Paris.
Les œuvres de Raphaël
Zarka ont été coproduites
avec : Mudam (Luxembourg),
Musée Sainte Croix (Poitiers),
Le Miroir (Poitiers), BPS22
(Charleroi), Atelier Calder
(Saché), Galerie Michel Rein,
Paris/Brussels.
Raphaël Zarka remercie :
Calder Foundation, Alfred
Pacquement, Maxime Guitton,
Corinne Bouvier, Guillaume
Blanc, Pierre-Olivier Rollin,
Pascal Faracci, Jean-Luc
Dorchies, Laurence Gateau,
Enrico Lunghi, Christophe
Gallois, Clément Minighetti,
Marie-Noëlle Farcy, Michel
Rein, Loïc Chambon, Luciana
Brito, deValence, Aurélien
Mole, Zohreh Zavareh, Ronan
Lecreurer, Ernesto Sartori,
Cécilia Becanovic, Raymond
Azibert, Colette Barbier,
Jacques Barbier, François
Blanc, Daniel Bosser, Benoît
Doche de Laquintane, Nicolas
Libert et Emmanuel Renoird,
Arnaud Oliveux, le Frac
Basse-Normandie, le Frac
Alsace, le CNAP, le Musée
régional d’art contemporain
(Sérignan), les photographes
de Riding Modern Art et les
équipes des Abattoirs.
Sauf mention contraire, toutes
les œuvres de Raphaël Zarka,
courtesy Michel Rein (Paris/
Bruxelles), Luciana Brito (Sao
Paulo).
Remerciements au Musée
des Augustins, au Musée
de Lavaur et au Musée du
Louvre pour leurs prêts
exceptionnels.
Cartels : Åbäke
Clark House Initiative
Programmation culturelle en lien avec l’exposition
Jeudi 01/10 à 21h30
Auditorium - Entrée libre
Concert de Caroline Bergvall
“Vigil”
Sentinelles
(performance - création)
avec la participation de Bruno Coffineau (chorale Le Cri du Chœur).
Jeudi 20/10 à 18h30
Auditorium - Entrée libre
Rencontre avec Aurélien Froment et Frère Jean-Michel
Maldamé
Lors de cette rencontre, il sera question de l’art de la
mémoire. Les stratégies mnémotechniques, dont les dominicains firent un usage particulièrement important, sont au
cœur de ”L’idée de Camillo”, installation d’Aurélien Froment.
Mercredi 23/11 à 18h30 et 20h30
Cinéma le Cratère
Projections uniques de trois films chiliens de Raùl Ruiz,
présentées par Aurélien Froment et Pierre-Alexandre Nicaise
18h30 - Tres tristes tigres (Trois tristes tigres), Chili, 1968
20h30 - La Colonia penal (La colonie pénitentiaire), Chili, 1970
Suivi de : Ahora te vamos a llamar hermano (Désormais nous
allons t’appeler frère), Chili, 1971
Couverture : Aurélien Mole, 2016 - Tous droits réservés
Textes : Olivier Michelon
Images : Aurélien Froment (5, 9, 13, 25), Raphaël Zarka (7, 11, 19),
Stephan Baumann (15), Sully Balmassière (17), Aurélien Mole (21),
Hendrik Herzmann (23)
L’exposition d’Aurélien Froment et de Raphaël
Zarka fait l’objet d’une coproduction avec le
Printemps de septembre.
Avec le soutien de
D’après une proposition d’Olivier Michelon.
les Abattoirs / ART MODERNE ET CONTEMPORAIN
l ’ar t contemp or ain en Midi-P y r éné e s www.lesabattoirs.org

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