ONG internationale dotée du Statut Consultatif Spécial de l`ECOSOC

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ONG internationale dotée du Statut Consultatif Spécial de l`ECOSOC
CERCLE DE RECHERCHE SUR LES DROITS ET LES DEVOIRS DE LA PERSONNE HUMAINE
ONG internationale dotée du Statut Consultatif Spécial de l’ECOSOC des Nations Unies
Yaoundé, le 13 juin 2016
0187/CRED/PR/CM/13/06/16
A Madame Nathalie Prouvez
Chef de la Section de l’état de droit et de la démocratie OHCHR
Concerne : Première session du Forum sur les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit sur
le thème : « Elargissement de l’espace démocratique : le rôle des jeunes dans la prise de décision
publique ». Référence : NP/HV du 13 juin 2016
Le Cercle de Recherche sur les droits et les devoirs de la personne humaine(CRED) agissant en qualité
de coordonnateur du programme national anti-discrimination(PNAD) mis en œuvre au Cameroun
depuis 2012 par le CRED, présente ses compliments à l’office du Haut-Commissariat des Nations
unies aux droits et a l’honneur de soumettre ses vues conformément à la résolution 28/14 du Conseil
des droits de l’homme, en tant qu’organisation de jeunes.
1) Pratiques optimales, problèmes rencontrés au Cameroun pour garantir le respect des
droits de l’homme, de la démocratie et de l’état de droit.
1.1 Pratiques optimales
L’élargissement de l’espace démocratique et le rôle des jeunes dans la prise des décisions sont
étroitement liés au droit de participer aux affaires publiques et politiques consacrés par les articles
25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’article 5©de la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discriminations raciales, et les articles 7, 8,
14(2-a et f) de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à
l’égard des femmes.
En marge des travaux du forum, notre organisation a élaboré un rapport1 sur les discriminations
raciales dans le contexte des élections législatives, municipales et sénatoriales de 2013 au Cameroun.
Nous avons sollicité les points de vue2 des partis politiques, y compris du parti au pouvoir par le biais
du Ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation, de l’organe en charge des
élections, de l’ordre des avocats et du Réseau des défenseurs des droits de l’homme et de la
commission justice et paix. Bien entendu, la présente contribution n’engage en rien les entités visées
par les consultations entreprises par le CRED. Cependant, il est important de souligner que le PNAD
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Voir : http://pnad.ch/images/PNAD/docs/RAPPORT_DISCRIMINATIONS_RACIALES_ELECTIONS_LEGISLATIVES_CAMEROUN_2013-2.pdf
Voir : http://pnad.ch/images/PNAD/consultations/Consultations_partis_politiques_cameroun.pdf
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est un programme participatif, inclusif, multisectoriel. Nous travaillons en toute transparence et tous
les actes posés sont diffusés sur le site et sur nos réseaux sociaux.
Notre organisation a aussi envoyé notre rapport à sept experts du Conseil des droits de l’homme
pour savoir les sanctions et les mesures coercitives prévues ou envisagées lorsqu’un Etat refuse
manifestement de coopérer dans le cadre de la mise en œuvre des obligations internationales qu’il a
volontairement contracté, comme c’est le cas du Cameroun.
1.2) Problèmes de participation au processus démocratique au Cameroun
Au Cameroun, la loi N°2012/001 du 19 avril 2012 portant code électoral3, modifiée et complétée par
la loi N°2012/017 du 21 décembre 2012, exige en ses articles 151 (3), 171(3),218(3),246(1) que
chaque liste tienne compte des composantes sociologiques et du genre respectivement pour les
élections législatives, municipales, sénatoriales et régionales.
La composante sociologique n’est définie nulle part en droit international des droits de l’homme.
Cependant, il s’agit d’une ruse politique introduite par le système dictatorial pour détourner
l’attention des acteurs politiques sur les obligations prévues aux articles 5© de la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discriminations raciales et les articles 25 (a et
b) du Pacte international sur les droits civils et politiques.
Dans le cadre du rapport soumis, plus de 62 listes4 ont été rejetées pour le motif de l’ethnie et de
l’origine nationale des candidats. Le droit d’être candidat est ainsi bafoué pour des milliers de
camerounais qui ne pourront plus être candidat ni élu au Cameroun parce qu’ils sont de telle ou telle
ethnie, de telle ou telle origine nationale. Cette question devait être traitée comme une source de
conflits potentiels au Cameroun.
1.3 Problèmes liés aux consultations publiques et à la participation politique
Lors de nos consultations, nous notons que certains leaders politiques font la confusion entre tribu et
ethnie5. Au Cameroun, le tribalisme est répandu et cette forme de discrimination fondée sur l’origine
ethnique et nationale au sens de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes
de discriminations raciales n’est pas encore inscrite dans les programmes pays des Nations unies ni
des partenaires au développement. L’appartenance politique n’est pas une obligation au Cameroun
et la structure militante des partis politiques n’est pas à l’heure actuelle suffisante pour permettre
une application optimale des dispositions visées aux articles 151 (3), 171(3), 218(3), 246(1) du code
électoral.
Par ailleurs, nous notons que les partis ne sont pas suffisamment ancrés dans les nouvelles
technologies de l’information et de la communication et d’aucuns n’ont pas d’adresse mail ni des
réseaux sociaux pour communiquer au grand public.
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Voir : http://pnad.ch/images/PNAD/docs/CODE_ELECTORAL_CAMEROUN.pdf
Cette donnée est sous-estimée. L’organe en charge des élections a été appelé à fournir toutes les listes électorales rejetées pour ce motif.
Les élections antérieures à 2013 ont connu les mêmes faits.
5 Constats : Dans le document de base du Cameroun aux organes de traité (HRI/CORE/1/Add.109), il est noté 230 tribus. Dans le document
actualisé de janvier 2014(HRI/CORE/CMR/2013), il est noté 250 ethnies. Voir :
http://pnad.ch/images/PNAD/consultations/consultation3/document_base_actualise_Gouvernement.pdf
Voir aussi : http://pnad.ch/images/PNAD/consultations/consultation3/document_base_Gouvernement_version_2000.pdf
Voir les données actualisées du PNAD : Etat de la recherche sur la composition ethnique du Cameroun (CRED, 2013).
http://www.pnad.ch/index.php/publications
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Enfin, le site internet du programme national anti-discrimination (www.pnad.ch) hébergé en Suisse a
été piraté le 28 janvier dernier et les lettres de demande d’assistance envoyées aux autorités
publiques genevoises pour nous assister sont restées vaines. Des ressources consacrées à des
activités opérationnelles du programme national anti-discrimination(PNAD) ont dû être mobilisées
pour refaire un nouveau site internet en ligne depuis avril 2016.
1.4) Problèmes spécifiques à la jeunesse camerounaise qui entravent la participation des jeunes à
la prise de décision publique
Le rôle des jeunes dans le cadre de l’élargissement de l’espace démocratique au Cameroun est resté
très influencé par des politiques dictatoriales (c’est-à-dire autoritaires et sans alternance) menées
sous le règne de Mr Paul Biya depuis plus de 40 ans au Cameroun avec pour corollaire le tribalisme
institutionnalisé, le favoritisme, le népotisme, le clientélisme, la corruption, une politique de diviser
pour mieux régner à l’intérieur de son parti politique(le RDPC) et au sein de l’opposition.
L’une des conséquences les plus plausibles de cette politique sur les jeunes est visible sur le plan
socio-économique. En effet, les données présentées par le Gouvernement du Cameroun dans le
document de base faisant partie des rapports des Etats parties daté du 22 mai 2013 et distribué le 23
janvier 2014(HRI/CORE/CMR/2013), font état d’une situation sociale dégradante, inhumaine et
cruelle pour une grande majorité des jeunes en ce qui concerne leur emploi, leur revenu et le
développement. Le paragraphe 23 du rapport indique « L’offre publique des services sociaux de base
est touchée. Le niveau de l’emploi a baissé de 10 % et le chômage atteint les 17 % en 1995. Il frappe
principalement les jeunes et les femmes, entraînant un fort développement du secteur informel ». Le
paragraphe 26 révèle que « En février et mars 2008, le Cameroun a connu une crise sociale. En effet,
le seuil de pauvreté était d’environ 269 443 francs CFA par adulte et par an contre 232 547 en 2001.
En 2007, il est apparu que, par rapport à 2001, l’incidence de la pauvreté n’a pratiquement pas
diminué au niveau national (39,9 % contre 40,2 % en 2001) ».
Le paragraphe 31 rapporte que « Au sens strict du terme, le taux de chômage est faible (4,4 %), alors
que le taux de chômage élargi qui reflète mieux le contexte camerounais, se situe à environ 13 %. Ce
niveau de chômage masque cependant un sous-emploi dont le taux est de 75,8 %. Son ampleur est
plus marquée en milieu rural (78,8 %) qu’en milieu urbain (57,4 %). Cette situation s’est développée
de manière concomitante à un accroissement important du secteur informel qui emploie environ 90 %
des personnes actives. Le sous-emploi invisible qui comprend les actifs occupés dont le revenu est
inférieur au SMIG représente 64,8 % de la population active, tandis que le sous-emploi visible (11 %)
concerne les personnes travaillant involontairement moins que la durée légale hebdomadaire (40
heures par semaine). »
2) Possibilités à exploiter ou de coopérer
2.1 L’expérience des Nations Unies en matière de statut consultatif devrait être généralisée dans les
institutions démocratiques de tous les pays. Les parlements, les conseils régionaux et municipaux
doivent permettre aux organes de la société civile, les organisations communautaires de jeunes et
des regroupements des femmes, les minorités et autochtones de pouvoir participer à titre
consultatif aux travaux des organes constitutionnels. De même, au niveau international, l’ONU
devrait inclure les partis politiques en leur donnant la possibilité de solliciter le statut consultatif
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auprès de ses organes comme les autres associations et organisations non gouvernementales de la
société civile.
2.2 Le CRED lance un appel à toutes les parties prenantes pour l’application du paragraphe 61 du
document A/HRC/27/29. En marge de la soumission de cette contribution aux travaux du forum,
deux correspondances6 ont été adressées au représentant permanent du système des Nations unies
au Cameroun et aux ambassades et missions diplomatiques et consulaires accréditées au Cameroun
pour demander de donner effet aux dispositions du paragraphe 61 du document A/HRC/27/29.
2.3 En vertu de l’article 66 de la Constitution du Cameroun « le Président de la République, le 1er
Ministre et les membres du Gouvernement et assimilés…. doivent faire une déclaration de leurs
biens et avoirs au début et à la fin de leur mandat ou de leur fonction», cette disposition n’a jamais
été appliquée depuis son institution en 1996. De ce fait, le CRED a pris également l’initiative d’une
plainte auprès des juridictions suisses sur la non déclaration des biens et avoirs du Président de la
République du Cameroun et des membres du Gouvernement en place au Cameroun. La question de
la déclaration des biens est cruciale pour le maintien de l’état de droit au Cameroun. A ce titre, la
coopération voulue de tous les Etats pour l’application des dispositions de l’article 66 de la
Constitution camerounaise est indispensable pour l’intégrité, la responsabilisation du système
démocratique au Cameroun et l’avenir de la jeunesse camerounaise qui se trouve ainsi sacrifiée par
la gabegie érigée en règle au sein de l’Etat du Cameroun. Les biens non déclarés des dirigeants
camerounais7 dans tous les Etats doivent être systématiquement gelés et mis à la disposition du
trésor public pour des œuvres d’intérêt public.
2.4 Le CRED a initié une session de formation en direction des acteurs du processus électoral au
Cameroun pour les sensibiliser sur les normes internationales en matière de non-discrimination et les
voies de recours disponibles au niveau international. Le CRED sollicite des moyens de la communauté
internationale pour la réalisation de ce projet de séminaire prévu en parallèle aux travaux du forum.
2.5 Le CRED informe enfin la communauté internationale qu’avec le concours de l’UNITAR un cycle
de formation sur la programmation stratégique dans le domaine des droits de l’homme a été conçu
et sera appliqué aux recommandations du forum sur les droits de l’homme, la démocratie et l’état de
droit. La première session aura lieu les 27.02 au 03 mars 20178.
Le CRED saisit cette occasion pour renouveler à l’office du Haut-Commissariat des Nations unies aux
droits de l’homme les assurances de sa très haute considération.
Hilaire BELL
Président de CRED et Coordonnateur du PNAD
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Voir : http://pnad.ch/images/PNAD/docs/front/Sommation_Ambassades.jpeg
Voir aussi : http://pnad.ch/images/PNAD/docs/front/Sommation_PNUD.jpeg
7 Voir la liste du Gouvernement et assimilés : http://www.spm.gov.cm/gouvernement/composition/philemon-yang.html (consulté le 30
mai 2016)
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Le programme est disponible sur le lien : https://www.unitar.org/event/full-catalog/atelier-international-de-formation-sur-laprogrammation-strat%C3%A9gique-dans-le-domaine-des
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