Stage de fin de 2 cycle 7 semaines à l`hôpital national de Cusco au
Transcription
Stage de fin de 2 cycle 7 semaines à l`hôpital national de Cusco au
ALLIMANT Carole DCEM4 Faculté Lyon Est Université Claude Bernard/Lyon 1 ème Stage de fin de 2 cycle 7 semaines à l’hôpital national de Cusco au Pérou Du 15/06/2012 au 10/08/2012 I) VIE PRATIQUE 1) Logement Nous avons été accueillies par le Dr Velasquez, le gérant de la plupart des hôpitaux de Cusco, avec qui nous avions été en contact dès le début pour l’organisation de ce stage. Il a négocié pour nous une chambre dans « el Colegio Medico » de Cusco, sorte d’Ordre des médecins : lieu de conférences et de réunions avec quelques chambres à l’étage. Nous étions 3, avec 2 amie de la même promotion de médecine, dans une petite chambre avec salle de bain personnelle, eau chaude (luxe obligatoire à Cusco ville à 3800m d’altitude, très froide en hiver de Mai à Septembre !). Loyer à 10 nuevo soles par personne et par nuit, sans caution, soit environ 3,5 euros. Le rapport qualité-prix était exceptionnel, les auberges de jeunesse dans lesquelles nous avons dormi par la suite lors de notre voyage au Pérou affichait des tarifs de 20 soles et avec sanitaires communs. Nous étions à 5 minutes de l’hôpital; à 5minutes en taxi de la Plazza de Armas, centre de la ville ; en plein dans une zone Universitaire (Ingénieurs, Médecins, Infirmières…) avec tous les commerces qui s’y attachent généralement (cyber café, restauration, supermarché…) Nous n’avons jamais ressenti d’insécurité dans ce pays, d’autant plus qu’il y avait au Colegio Medico toujours un gardien sur place et le bâtiment était fermé à clé en permanence. 2) Argent La vie au Pérou est bien évidemment beaucoup moins chère qu’en France mais les prix augmentent rapidement et notre guide qui datait de 4/5 ans affichait des tarifs quasi 2 fois moindre à l’époque. La monnaie est le nuevo sol, le change était 1 euros = 3,2 NS lors de notre voyage. Nous payions tout en liquide, il existe de nombreux ATM pour retirer sans mauvaise surprise en dehors des commissions bancaires habituelles... Pour exemple, nous pouvions manger des Menus le midi pour 3/4 soles avec Soupe ou buffet de salade + Plat principal avec une viande et des féculents (et l’assiette Péruvienne est généreuse) + Dessert + Un verre de Chicha Morada (boisson non alcoolisée à base de maïs noir, typique). Les auberges de jeunesses coûtaient entre 15 et 25 soles par nuit avec dortoirs. Le trajet de taxi est à 3 soles… Mais la négociation fait partie du jeu dans tous les domaines et après quelques semaines d’observation nous pouvions profiter des tarifs des « locaux ». 3) Santé Il existe un système de Sécurité Sociale au Pérou mais non obligatoire et accessible pour peu de personnes du fait du haut niveau de pauvreté de cette population. A Cusco seulement 1/3 des habitants ont les moyens de cotiser. Cela s’appelle le système El Seguro qui donne accès à des hôpitaux spécifiques nommés ES Salud (celui de Cusco dans lequel nous avons effectué notre stage et de nombreuses autres maisons médicales présentes dans les villages alentours). En parallèle il existe le système de soin dit de l’Etat qui dispose de beaucoup moins de moyens, les bâtiments et locaux sont très précaires et les médecins surchargés de travail. Sinon de nombreux cabinets médicaux privés existent mais nous n’y avons pas du tout eu accès. Le territoire est très mal couvert sur le plan médical avec une absence quasi-totale des médecins dans les villages très pauvres des Andes, d’Amazonie…qui restent gérer par des infirmières, des remèdes locaux à base de plantes, des chamans… 85% de la démographie médicale se trouve à Lima la capitale, le reste est réparti dans les grosses villes comme Arequipa, Cusco, Puno… 4) Télécommunications Seulement 2 opérateurs se partagent le réseau péruvien, Movistar et Claro avec donc une couverture bien moyenne et des tarifs élevés comparés au niveau de vie. Pour une durée de presque 3 mois au final au Pérou, la meilleure solution a été de nous procurer une carte prépayée (qui fonctionne avec tous les portables débloqués à apporter de France ou à acheter sur place d’occasion mais sans garantie pour la longévité de ce type de mobile…). Cela nous a été essentiel pour communiquer entre nous quand nous étions séparées notamment à l’hôpital dans différents services, et surtout avec nos différentes rencontres locales. Le problème principal est que ces opérateurs sont incompatibles avec nos opérateurs français concernant les textos et les appels dans les 2 sens Europe-Pérou étaient à des tarifs exorbitants. De fait on se rendait souvent dans les café internet (50centimes de soles la demi heure) et pour les communications internationales il existait des cabines téléphoniques spéciales à tarif correct (30 soles la demi heure environ soit 10 euros, le temps de parole était compté tout de même). Skype fonctionnait de manière aléatoire selon le cybercafé mais nous a rendu de grands services certaines fois. 5) Vie Universitaire Nous avons rencontré des étudiants en médecine qu’après le premier mois. Ils ont un système de stage bien particulier puisqu’il change de service tous les 15 jours. La confrontation a été intéressante, nous avions eu le temps d’améliorer nos bases en espagnol et nous avions en moyenne 1 à 2 années d’études en plus, ainsi, nous avons pu créer une relation d’échange Espagnol-Médecine-Mode de vie très enrichissante. Nous étions dans un service médico-chirurgical avec 3 médecins référents pour nous que nous voyions tous les jours entre les visites dans le service, les consultations et les blocs opératoires. Ils ont immédiatement été très impliqués avec nous qui étions très motivées et malgré nos difficultés en Espagnol les premières semaines. Au programme en plus de l’activité de service: de nombreux cours informels dans le service, un accès à une conférence de cancéro-épidémiologie, un exposé personnel devant un des médecins à la fin du stage… Nous n’avons pas été à la faculté de médecine par ailleurs et donc nous n’avons pas eu accès aux différents cours proposés aux étudiants cusquéniens. 6) Stage Notre stage a été très facile à trouver puisque nous avons eu le contact du Dr Velasquez par des amis qui avaient effectué le même stage 2 ans auparavant. C’est un Docteur en Epidémiologie-Santé Publique qui est actuellement le gérant de nombreux hôpitaux de Cusco dont le ES Salud dans lequel nous avons effectué notre stage. Il est bilingue françaisespagnol ce qui a été d’un grand secours les premiers jours. Il est très motivé par cet échange entre sa faculté et celle de Lyon notamment (il reçoit également des Belges, des Allemands…) et donc très généreux avec ceux qui ont la chance de faire parti de cette expérience ! Le rythme de travail dans les services de médecine est relativement tranquille pour les étudiants puisque nous commencions à 8h30 et finissions la journée entre 13 et 14h sans pause. Cela correspondait aux horaires des médecins en consultation et dans le service. C’est seulement en chirurgie que les horaires étaient plus larges et variables. Aucune rémunération évidemment et nous avions surtout un rôle d’observateur et d’aide au médecin pour les prescriptions, les gestes techniques, les examens cliniques… D’autant plus qu’un interne est venu en plus dans le service à la fin du 1er mois. Au final le fonctionnement est très semblable à celui dans nos services à l’hôpital. 7) Vie quotidienne Cusco est une ville idéale pour un stage de 2mois, à taille humaine avec ses 350 000 habitants, ancienne capitale Inca elle est encore très ancrée dans l’histoire, le côté traditionnel et folklorique de ces populations andines avec notamment des fêtes quasi quotidiennes au mois de juin à base de défilé, de danse, de musique dans toute la ville... A cette période de l’année c’est l’hiver au Pérou mais le climat reste très agréable. On se réchauffe vite au soleil la journée mais les nuits sont très fraîches et les 4 à 5 grosses couvertures en Alpaga qu’on vous donne ne sont pas de trop ! Cette ville se trouve à 3800m d’altitude, ce qui nécessite quelques jours d’adaptation, elle se situe dans une sorte de cuvette et s’étend toujours plus sur les flans des collines alentour. Le premier jour nous avions voulu observer la vue d’un de ses quartiers surélevés, le célèbre San Blas, nous avons un peu regretter en expérimentant pour la première fois un grand mal des montagnes dit « soroche » avec maux de tête, grande fatigue, essoufflement et quelques nausées. Les Péruviens sont adorables et très accueillants, serviables. Ils vivent sur des rythmes latinos et il existe de très nombreux clubs de salsa avec cours quotidiens ! Une superbe manière de rencontrer des personnes ! La nourriture andine est particulièrement grasse et calorique avec par exemple une assiette typique : toujours bien remplie comprenant un gros morceau de viande frit ou bouilli (porc/vache/mouton/lama-alpaga élevés sur les plateaux) avec un assortiment de féculent mélangeant en même temps patates/maïs/pâtes/riz…plus faim ! Autre particularité, ils mangent du cochon d’Inde, cuit au four, viande très fondante et délicieuse mais il faut du temps pour dépasser l’image écœurante de ce « rat cuit » dans son assiette et il faut beaucoup de patience puisqu’il faut un peu plus d’une heure pour un novice pour dépiauter chaque petite côte une à une… II)BILAN ET SUGGESTIONS Ce séjour à l’étranger a été très réussi pour de nombreuses raisons. En premier lieu le contexte du post ECN où l’on se trouve complètement désociabilisé et paumé après ces 2 voire 3 ans de travail acharné sans trop de loisir. Il faut réapprendre à vivre simplement, sans pression « scolaire ». Pour moi le meilleur moyen est de s’éloigner de son milieu habituel, de partir le plus vite possible en post concours pour aller se mélanger à des personnes d’un autre monde, d’une autre culture… on prend alors plus facilement du recul sur ce qu’on vient de vivre, on réalise une fois de plus qu’il y a une vie passionnante en dehors de la médecine, que l’on a beaucoup de chance en France concernant notre niveau de vie… Du côté professionnel, le stage m’a permis de me rendre compte à nouveau à quel point j’aime ce métier. Je suis sortie du concours et des derniers mois de bachotage pur qui l’ont précédé vraiment dégoûtée par la médecine. Pendant notre stage en Oncologie, qui est une spécialité où le rapport médecin-patient est d’une très grande intensité, j’ai retrouvé cette complicité, cette écoute et ce plaisir de soigner que j’avais développé au cours des nombreuses années de stage. Ce sentiment revenu, cela m’a aidé à relativiser : quelque soit le résultat du concours, je sais que je me plairais dans ce métier et c’est incroyablement réconfortant de penser ça sans que ce soit toujours évident compte tenu de la difficulté de nos études. J’avais par ailleurs comme projet personnel de progresser en espagnol. J’aime apprendre les langues et après l’anglais je voulais vraiment récupérer les bases de l’espagnol acquises en collège-lycée (et donc perdues depuis 6ans, ça faisait loin !) et les améliorer. Nous ne le savions pas avant de partir et nous avons découvert notre chance sur place : les Péruviens sont ceux qui parlent le castillan le plus « propre ». Ils parlent relativement lentement et surtout marquent bien les accents. Leurs voisins Boliviens, Chiliens, Argentins ne peuvent pas se vanter d’une telle pureté : ils sont impossibles à comprendre sans 2/3 jours d’adaptation (pour exemple, le llama péruvien prononcé « yama » devenait le « chama » pour un argentin, pas évident au départ !). Celui qui nous a reçu était bilingue ce qui nous a beaucoup aidé les premiers jours, mais rapidement nous nous sommes retrouvées en stage avec des médecins qui ne parlaient que très peu voire pas du tout français ou même anglais. Immersion quasi-totale et nous étions toutes les 3 très motivées par cet apprentissage, nous avons donc progressé très rapidement et pu tenir des discussions correctes et intéressantes au bout d’une à deux semaines. Enfin, le Pérou est en plein essor économique mais il reste pour le moment un pays très pauvre. Il s’agissait pour moi d’un premier voyage dans un pays du Tiers Monde avec cette pauvreté à chaque coin de rue, ces familles vivant de rien dans les Andes avec une espérance de vie de 15 ans moins élevée que chez nous et des taux de mortalité infantile ahurissants. C’est un pays où le gouvernement et les forces publiques sont encore très corrompues et de fait, le peuple ne fait pas du tout confiance à l’avenir et à une quelconque amélioration de leurs conditions de vie. Tout ça était nouveau et cela m’a beaucoup affecté. Il existe cependant des perspectives de progrès avec notamment la mise de place de campagne de dépistage (cancer du col, du sein où rien n’est encore mis en place malgré les preuves formelles de l’efficacité de telles campagnes et de réduction du coup de santé), et on observe ces dernières années une amélioration des conditions de vie pour une certaine classe moyenne ; mais il reste encore énormément à faire, je vais suivre ça avec attention et j’ai hâte si possible d’y retourner dans quelques années en espérant pouvoir observer ces progrès ! Concernant l’organisation du séjour, tout a été très facile pour nous puisque nous avions des amis de 2 promotions au-dessus de nous qui avaient effectué le même stage à Cusco en fin de DCEM4. Nous avons donc contacté le Dr Velasquez en mars de l’année de DCEM3 par mail qui a été immédiatement très enthousiaste à l’idée de nous accueillir; la convention de stage a été plus longue à obtenir étant donné la surcharge de travail de notre maître de stage mais aussi à cause du système postier péruvien pas toujours très fiable et rapide ! Sur place nous avons été logées directement dans des chambres dédiées normalement aux médecins en déplacement sur Cusco pour des conférence et réunions, à 5 minutes à pied de l’hôpital et à 10 minutes en taxi du centre ville, pour un tarif plus que correct. Puis le lendemain de notre arrivée une rencontre avait déjà été organisée avec les médecins du service d’Oncologie et quelques heures plus tard nous étions en blouse blanche en train de faire le tour des patients en espagnol ! Tout s’est passé de manière très naturelle, on s’est vite sentie bienvenue et utile dans le service. On apportait notre petite touche européenne contre un apprentissage intensif en espagnol (bases et langages médicaux) et rapidement nous avons pu avoir une réelle activité d’externe fait de dialogues avec le médecin référent, examen cliniques des patients et analyse d’examens complémentaires… Les consultations et les blocs opératoires nous ont été immédiatement accessibles. Pour moi le plus intéressant restait les consultations où on enchaînait les cas cliniques tous plus intéressant les uns que les autres et surprenant pour nous (maladie différente, stade de découverte des cancers beaucoup plus avancés, prise en charge plus limitée, vision différente de la médecine pour les patients : méfiance et refus à l’opposée de la consommation médicale que l’on observe chez nous !). Ce qui a rendu notre séjour à Cusco encore plus agréable a été de s’inscrire d’emblée dans une école de salsa. Cela nous a permis de rencontrer des jeunes cusquéniens en plus des externes et internes de l’hôpital avec qui nous avons rapidement sympathisé et cela a beaucoup contribué à nous créer une vie locale bien rythmée sans temps morts. Stage de 8h à 14-15h et salsa à 18-19h presque tous les jours. Si je devais revivre une telle expérience je referai ce schéma là, investir sur le développement d’une véritable vie locale entre hôpital et une activité qui nous intéresse : cela multiplie les rencontres et nous permet de découvrir diverses facettes de la vie à Cusco. Ce que je regrette, c’est de ne pas avoir eu accès à quelques jours de stage dans les hôpitaux dits de l’Etat, beaucoup plus pauvres et difficiles. Je suis contente d’avoir été dans l’hôpital liée à la Sécurité Sociale qui nous permettait d’observer une médecine finalement très proche de la notre mais j’aurais aimé observer quelques jours cette médecine beaucoup plus précaire qui concerne encore une majorité de Péruviens. De même en s’y prenant plus à l’avance on aurait pu suivre des médecins généralistes quelques journées dans les campagnes au sein des communautés les plus pauvres. Je conseillerais aux prochains qui feraient ce stage d’organiser cela d’emblée pour élargir l’étendue de cette expérience médicale péruvienne et varier les points de vue. Enfin, ces échanges internationaux sont pour nous, avec nos études longues et fastidieuses, une chance incroyable d’enrichir notre expérience médicale et humaine. Je n’ai pas pu faire le stage en fin de DCEM2 que je conseille comme celui de fin de DCEM4 qui sont pour moi les bons moments pour vivre ces expériences au sein de notre cursus.