Article Khalil Assala - Académie de l`Entrepreneuriat

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Article Khalil Assala - Académie de l`Entrepreneuriat
Proposition de Communication
8eme journée de l’académie de l’entrepreneuriat
« Impact de la culture nationale sur les comportements managériaux de
jeunes entrepreneurs algériens »
Khalil ASSALA
Doctorant
Université du Sud Toulon Var
Laboratoire Ermmes
[email protected]
1
Introduction
« Si nous devons retenir quelque chose de l’histoire du développement économique c'est que
la culture fait toute différence » écrivait Landes (1998).
L’histoire des nations a produit des cultures et des trajectoires économique différentes, mais
à l’heure du triomphe incontestable du système basé sur l’économie de marché et sa pierre
angulaire, la libre entreprise, nombreux sont les pays, à l’instar des pays post-communistes
qui vivent un événement historique rare dans lequel la culture et l'économie éprouvent les
changements radicaux simultanément.
Une telle situation a pour effet de bouleverser profondément les priorités nationales et les
politiques économiques. L’entrepreneuriat qui est reconnu aujourd’hui dans ces pays comme
levier puissant et prioritaire pour la création de richesses et d’emplois il est au cœur des
stratégies de reconversion. Le développent des attitudes et la culture entrepreneuriale
représente un défi formidable. Pourtant nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les
entrepreneurs modernes des pays en voie de développement s’affranchissent rapidement des
valeurs cultuelles qui ont marqué leur environnement pendant des décennies, pour devenir
aussi entreprenants que leurs homologues des économies de marché mûres. Nombreux sont
les chercheurs qui soulignent l’importance de la dimension culturelle dans le comportement
économique (Tsika, 1990, Kombou et Saporta ,2000).
Alors, comment la culture nationale, bâtie sur des valeurs autres que celles qui encouragent
l’esprit d’entreprise peut-elle influencer le comportement du chef d’entreprise ?
Pour répondre à la question nous avons organisé notre communication en trois parties ; la
première sera consacrée à la présentation de la notion de culture et de ses antécédents, à
travers une revue de la littéraire à grands traits du concept en science de gestion. Nous
présenterons en deuxième partie les principales recherches à l’impact de la culture sur
l’entrepreneuriat, et l’impact de la culture sur le management dans ses diverses fonctions. La
troisième partie sera consacrée la présentation d’une étude exploratoire menée auprès de
jeunes entrepreneurs algériens, évoluant dans le secteur qui caractérise le plus les économies
développées: le secteur des services.
I- La culture : définition et antécédants
Définition
Le mot culture est un mot ancien d’origine latine (cultura) dont le sens renvoie à l’agriculture
et l’exploitation de la terre de façon générale. Aujourd’hui le mot culture peut renvoyer à
2
plusieurs sens. Le sens le plus commun en langue française est celui lié aux arts et lettres
(peintre, sculpture, chants, etc) ou à la finesse d’esprit (le bon goût et les bonnes manières).
Un autre sens du mot, très utilisé dans le contexte des tensions politiques et idéologiques
actuelles (choc des cultures,Huntington,1997)) revoie aux groupes ethniques et religieux
(culture judéo-chrétienne, musulmane, occidentale, etc.) . Un autre sens encore s’applique aux
pays (culture américaine, japonaise,etc) ou à des groupes de pays (culture asiatique, africaine,
orientale, anglo-saxonne,…).
Dans notre travail nous considéreront la culture à l’échelle d’un pays (culture nationale). La
culture nationale est définit dans un espace géographique précis, mais son sens peut
s’appliquer à collectivités humaines comme l’entreprise, la profession ou la famille au sein ce
pays (Hofstede 1980).
Les scientifiques de divers horizons, historiens, anthropologues(Levi-Strauss1958),
économistes et sociologues (Weber, 1934) psychologues(McClelland,1961) se sont intéressés
depuis longtemps à la notion de culture nationale. Il existe de ce fait de très nombreuses
définitions de la culture. Kroeber et Kluckhohn (1952), dénombraient plus de 150 définitions
différentes du concept. En science de gestion, de nombreux chercheurs se sont intéressé à ce
concept (Kluckhohn et Strodtbeck, 1961, Newman, Summer et Warren, 1977; Boyacigiller et
Adler, 1991; Hofstede, 1980; Bottger, Hallein et Yetton, 1985 ;
Hampden-Turner et
Trompenaars, 1997; Lewis, 1992; Triandis, 1995). La grande majorité des chercheurs
s’accordent sur le caractère multidimensionnel
de la culture. Pour
Kluckhohn et
Strodtbeck(1961) la culture est constituée de « construits mentaux collectifs , partagées au
sein d’un groupe ou d’une nation ». Ces construits mentaux, qui influencent les organisations
et les systèmes se décomposent en 5 dimensions1 qui interagissent pour former le
comportement et les attitudes. Hampton-Turner et Trompenaars, (1994) proposent d’étudier la
culture en utilisant différentes dimensions, plutôt similaires dans l’essence à celle
précédemment citées2 et qu’on retrouve dans la grille d’analyse à 4 (puis à 5) dimensions
d’Hofstede (1980, 1993).
Selon Hofstede, la culture est constituée d’un ensemble de valeurs collectives (ou système de
valeurs) où : « la valeur est une très forte tendance d’un homme à préférer une certaine
situation à une autre »(Hofstede et Bolloinger, 1987). Ce sont valeurs portées collectivement
1
Orientation de la nature humaine (bon-bon et mauvais-mauvais), rapport à la nature (recherche de la maîtrise
ou de l’harmonie), rapport au temps (passé-présent-futur), orientation de la nature humaine (être, faire ou
devenir) , le type de relation aux autres (individualiste, égalitaire, hiérarchique).
2
Universalisme ou
Particularisme, esprit analytique ou
intégrant, Individualisme ou
Communautarisme/collectivisme, conservatisme ou ouverture, le rapport au temps (synchronisé ou linéaire),
Egalitarisme ou Hiérarchie.
3
par les individus, en fonction de leur intensité (importance pour l’individu) et leur direction
(bonne ou mauvaise) qui vont déterminer les croyances et les comportements. L’auteur
distingue la valeur de la croyance, en ce sens qu’une valeur particulièrement marquée et
spécifique est qualifiée de croyance3.
L’auteur défini la culture comme étant « la programmation collective de l’esprit humain qui
permet de distinguer les membres d’une catégorie d’hommes par rapport à une autre. »
La programmation mentale dont il est question peut s’analyser à 3 degrés différents,
entremêlés et emboîtés. Hofstede distingue une programmation mentale au niveau universel,
au niveau collectif et au niveau individuel. La culture est en partie unique et propre à chaque
individu, et en partie partagée avec les autres.
Le niveau universel touche toute l’humanité et concerne le fonctionnement biologique de
l’espèce. Le niveau collectif concerne un nombre réduit de personnes appartenant à des
groupes plus ou moins homogènes les distinguant des autres (régions, pays..). Le niveau
individuel est la partie unique et propre à chaque individu. Si la ligne de séparation entre les
niveaux, est particulièrement difficile à déterminer et est sujette à un débat permanent chez les
sociologues et les anthropologues, la culture qui fait l’objet de notre réflexion se situera au
second niveau (collectif/national) dans son interaction avec le niveau individuel. Dans notre
contexte, nous essayerons de mettre en lumière l’interaction ou l’impact de
la culture
nationale dominante, dans ses différentes dimensions sur les individus (entrepreneurs).
Nous nous concentrerons dans notre recherche sur la programmation collective, dans son
rapport avec la culture individuelle pour essayer de mieux comprendre l’impact des
comportements au sein de l’entreprise, et plus précisément l’impact de la culture (portée par
les jeunes créateurs d’entreprise) sur les pratiques managériales.
Figure 1 - La programmation mentale des hommes
Niveau
Individuel
Niveau Collectif
Niveau Universel
3
Par exemple, une valeur sociale collective forte ( comme la solidarité et le partage avec les pauvres et les
faibles), renforcée par la religion ( devoir d’aumône ) devient une croyance. Cette distinction est
particulièrement importante sur le plan conceptuel et méthodique, car elle permet d’étudier les valeurs fortes et
communes, indépendamment de la croyance individuelle. Des individus athées ou croyants peuvent avoir les
mêmes valeurs fortes, avec les mêmes intensités, mais pour des raisons psychologiques différentes. Nous
examinerons la valeur collective et non la croyance individuelle.
4
Les antécédents de la culture
La culture nationale est considérée par les chercheurs comme une construction historique que
différents facteurs concourent à produire. Pour Smith (1992), les bases de la culture nationale
(ou de l’identité nationale) sont le territoire historique et la patrie, les mythes partagés, le
mémoire collective, les droits et les lois communes, ainsi que le système économique.
Triandis (1994) considère que les deux éléments qui contribuent à la formation de la culture
d’un pays sont l’histoire et l’écologie. L’histoire représente les réalités historiques communes,
les grands évènements et le sens partagé par les générations et les lignées. L’écologie
représente le système et l’environnement socio-économique dans lequel évolue la société.
La dimension historique détermine les caractéristiques culturelles, alors que l’environnement
et la structure socio-économique influencent les manifestations de culturelles.
Peterson et Smith (1997) identifient les mêmes antécédents de la culture en y ajoutant
d’autres dimensions telles que la géographie (climat, topographie), et en insistant sur
l’importance des origines linguistiques et du langage qu’ils considèrent comme la clé de
codification de la culture, ainsi que la religion (et la philosophie sous-jacente) qui joue un rôle
important dans la construction sociale de la réalité.
Pour Sinha et al (2002), le noyau dur qui constitue la culture est d’abord la dimension
historique et géographique (éléments durs de la culture), à laquelle s’ajoute l’influence
d’autres éléments plutôt contemporains (comme l’identité sociale, les paramètres
économiques et les facteurs institutionnels). Singh et Parashar (2005), résument les antédants
de la culture en 5 dimensions (tableau I)
Tableau I: les antécédents de la culture (Singh et Parashar , 2005)
Identité sociale
Contexte
Paramètres
Facteurs
historique
économiques
institutionnels
Langage,
Mythes, Mémoire Système
Système de
Climat,
Religion,
collective,
économique,
gouvernance,
topographie .
Instruction,
Territoire ou
Développement
Système légal,
Rapport de sexe,
patrie historique,
économique,
Droits et devoirs,
Mobilité
colonisation,
Développement
règles et lois.
territoriale.
Ampleur des
technologique,
influences
industrie
externes.
principale.
Géographie
5
Hofstede(1980) propose un modèle de la formation et de la stabilisation de la culture dans
lequel l’identité sociale et les facteurs institutionnels ne sont pas des antécédents de la culture,
mais des conséquences des normes sociétaires(ou des systèmes de valeurs). Pour l’auteur, ce
sont les valeurs, partagées par le plus grand nombre d’individus et de groupes dans une
société qui constituent le noyau dur de la culture nationale. A l’origine de ces systèmes de
valeurs il existe différents facteurs qui affectent l’environnement physique (facteurs
historiques, géographiques, économiques, génétiques, technologiques) .Les valeurs créées par
ces facteurs sont selon l’auteur non seulement à l’origine du développement de la société en
tant que telle, mais ce sont aussi elles qui déterminent la structure et le mode de
fonctionnement particulier des institutions. Elles sont à l’origine de la famille, des systèmes
d’éducation, de la législation et du système politique. Hofstede différencie les valeurs de la
société (qui représentent la culture nationale) de ses conséquences (stratification sociale,
différenciation des rôles dans la société, comportements, religion, etc) mais note que les
conséquences de la culture(institutions, structures sociales, religion,etc) jouent un rôle
dynamique dans le maintien et la stabilisation de celle-ci, en renforçant à la fois les origines
et les valeurs. C’est un modèle dynamique en boucle qui implique que la culture nationale est
durable et qu’elle ne peut être modifiée que par des forces extérieures comme la nature
(changement de climat) ou de l’homme (conquête, colonisation, découverte scientifique ou
commerce).(voir en annexe I le schémas de construction de la culture)
II- Culture et entrepreneuriat
Culture et entrepreneuriat, revue de la littérature
Il est reconnu aujourd’hui que l’environnement institutionnel et économique a un impact
direct sur le niveau d’entrepreneuriat d’un pays. Les chercheurs s’accordent sur le rôle de
l’entrepreneuriat dans la croissance économique (Birley, 1981) et l’innovation (Schumpeter,
1934), mais plusieurs études montrent que le niveau d’entrepreneuriat peut différer d’un pays
à l’autre, ou d’une région à l’autre, bien que l’environnement institutionnel soit similaire ou
comparable.
Dans
un
contexte
institutionnel
et
économique
donné,
l’impact
des
variables
environnementales globales est modéré par les spécificités culturelles (Davidsson,1995). Dans
les recherches sur l’impact de la culture nationale sur l’entrepreneuriat (individuel), nous
pouvons distinguer 3 courants de recherche selon l’approche ou l’objet d’étude :
Une première série de recherches s’intéresse au lien entre la culture nationale et la vitalité
entrepreneuriale (taux de créations d’entreprise, taux d’innovation)(approche création de
6
valeur ou innovation). Des études empiriques sur l’impact de la culture sur l’entrepreneuriat
démontrent que le niveau de création et le taux de création d’entreprises son inégaux d’un
pays à l’autre (Shane, 1992 et 1993) ou d’une région à l’autre (Davidsson, 1995), (Davidsson
et Wiklund 1995) et que la vitalité entrepreneuriale est corrélée avec certaines caractéristiques
culturelles (mesurées par la grille d’Hofstede (1980))4.
Une deuxième série d’études empiriques a exploré le rapport entre la culture et les
caractéristiques des entrepreneurs (approche par les traits). Scheinberg et MacMillan (1988),
Shane, Kolvereid et Westhead (1991), Shane et al(1992) montrent qu’en dépit des
caractéristiques communes aux entrepreneurs par rapport aux non-entrepreneurs (MacGrath et
al 1992) les motivations et les objectifs des créateurs d’entreprises varient systématiquement
selon les pays, en fonction de la culture.
La troisième approche ( par la cognition), à l’instar de Muller et Thomas (2000) confirme ce
résultat en constatant que les traits caractéristiques des entrepreneurs (locus of control, la prise
de risque, l’énergie déployée) de 9 pays sont d’autant plus différents que les distances
culturelles entre pays sont grandes.
En examinant les scripts cognitifs de comportement d’entrepreneurs de 7 pays différents,
Mitchell et al (2000) montrent que ces derniers sont fortement corrélés aux valeurs culturelles,
(mesurées par le niveau d’individualisme et la distance hiérarchique5), confirmant ainsi les
résultats d’Abrmson et al(1993) qui expliquait les différences des styles cognitifs par les
différences de l’environnement culturel. (voir tableau II en annexe : récapitulatif des
recherches)
En ce qui concerne l’entrepreneuriat d’entreprise, les recherches sur l’impact de la culture
(qui ont concerné surtout les grandes entreprises) se résument principalement à des
comparaisons internationales concernant diverses questions telles que les alliances, la
coopération, l’innovation, le mode d’entrée dans un marché,etc. Ces recherches montrent
l’influence des facteurs culturels. (Kogut et Singh, 1988, Morris, Davis et Allen, 1994, Shane
et Venkataraman, 1996 ; Steensma, Marino et Weaver, 2000 ).
Hayton, Goerge et Zahra (2002) résument ces courants en proposent un modèle qui explique
le rôle modérateur de la culture dans son lien avec l’entrepreneuriat. Les auteurs identifient les
valeurs, les croyances et comportement, les besoins et motivations ainsi que la cognition
comme des manifestations de la culture jouant un rôle catalyseur dans le développement de
4
Le taux de création est positivement corrélé avec dimensions : individualisme, tolérance face à l’incertitude et
distance hiérarchique.
5
Deux des quatre dimensions de la grille d’Hofstede(1980).
7
l’entrepreneuriat. Ces manifestations interdépendantes entre elles transforment et complètent
le contexte institutionnel pour influencer l’activité entrepreneuriale. La rapport (de
dépendance ou de causalité) entre ces différents éléments n’est pas davantage explicité par les
auteurs, contrairement à Busenitz et Lau (1996) qui hiérarchisent les éléments en considérant
que les valeurs culturelles et les caractéristiques individuelles, déterminent dans un contexte
social donné la cognition qui est à l’origine de l’intention entrepreneuriale, et par la suite de la
décision.
Si l’ensemble des recherches semble démontrer de façon non ambiguë que la culture influence
les caractéristiques et la vitalité entrepreneuriale, et qu’elle pourrait influencer la cognition
(hypothèse non testée empiriquement6), très peu d’études ont exploré l’impact de la culture
sur les comportement des entrepreneurs. Si l’on admet l’idée que la culture influence les
entrepreneurs dans ce qu'ils sont, comment influence-elle ce qu’il font ?
Un certain nombre de chercheurs, de divers horizons pensent que la culture portée par les
individus (valeurs, croyances) conditionne leurs pensées, actes et gestes. Si la culture
entrepreneuriale n’est pas une création ex-nihilo, et qu’elle est le produit de l’évolution
historique des sociétés, on peut raisonnablement avancer l’idée que la création, le
management et le développement des entreprises dans le étapes ultérieures de la croissance
sont indissociables de l’existence en l’individu qui crée de certaines facultés qualitatives
(Traore, 1990).
Bourdieu (1963) considérait que les individus et les groupes portent inconsciemment en eux
des mécanismes psychiques dits « Habitus »7, -produits de leur histoire et de leur vécu- qui
conditionnent leur comportements et attitudes collectives. L’Habitus forme (de façon
inconsciente) chez les individus et les groupes des inclinaisons à penser, à percevoir, à faire
d'une certaine manière plutôt q’une autre, créant des dispositions intériorisés de façons
durables et résistantes au changement. L’idée d’habitus développée par Bourdieu est très
proche du « programme mental » d’Hofstede (1980). L'habitus qui désigne la manière d'être,
de penser et de faire en commun à plusieurs personnes de même origine sociale, issue de
l'incorporation inconsciente des pratiques véhiculées par la société ou les groupes. Cet
6
mais qui suggère l’idée que l’esprit entrepreneurial peut être un produit de l’histoire.
Bourdieu donne plusieurs définitions du concept aristotélicien, l’habitus est « Structure structurante, qui
organise les pratiques et la perception des pratiques, l’habitus est aussi structure structurée : le principe de
division en classes logiques qui organise la perception du monde social est lui-même le produit de
l’incorporation de la division en classes sociales. »(La Distinction, Minuit, 1979, p.191)
Ou encore : « L’habitus est […] à la fois principe générateur de pratiques objectivement classables et système
de classement (principium divisionis) de ces pratiques. C’est dans la relation entre les deux capacités qui
définissent l’habitus, capacité de produire des pratiques et des oeuvres classables, capacité de différencier et
d’apprécier ces pratiques et ces produits (goût), que se constitue le monde social représenté, c’est-à dire
l’espace des styles de vie. » (La Distinction, Minuit, 1979, p.190)
7
8
habitus, est selon l’auteur générateur de comportements spécifiques qu’on retrouve dans les
champs de la vie quotidienne et notamment dans le champs économique (l’entreprise par
exemple), et transposable dans le sens ou les dispositions acquises dans une certaine activité
sociale (par exemple au sein de la famille ou à l’école) sont transposées dans une autre
activité ( dans l’entreprise par exemple). Quels sont alors les comportements générés par le
programme mental, et comment sont-ils transposés dans l’entreprise ?
La culture dans l’entreprise
Le rapprochement entre culture et entreprise peut se concevoir d’au moins deux façons. Il
importe préalablement de distinguer la culture interne à l’entreprise (corporate culture),
diversement étudiée en science de gestion (Deal et Kennedy, 1982 ; Harrison et Hety1972,
Hampden-Turner,1990) et celle plus large, des groupes et des nations (culture nationale) qui
fait l’objet de notre réflexion.
L’étude de la relation entre la dimension culturelle et la vie de l’entreprise s’est fait de
différentes façons et à différents niveaux d’analyse. Nous pouvons distinguer d’emblée deux
approches différents : la première s’est focalisé sur une seule caractéristique culturelle
(approche unidimensionnel), en ne considérant qu’une seule variable et en essayant de
mesurer son impact sur les différents aspects de la vie en entreprise. Parmi les recherches les
plus célèbres on retrouve en sociologie l’oeuvre de Weber(1934) qui s’est intéressé
particulièrement à mesurer l’influence de la religion sur l’esprit de capitalisme, pour monter
que l'éthique protestante du travail en tant que finalité de l'existence ( une fois la réussite
matérielle éthiquement réhabilitée) est à l’origine du développement de l’esprit
entrepreneurial économique. Tribou (1995) a testé l’hypothèse webernienne, appliquée à
l’islam pour mesurer l’influence la religion sur la rationalité et l’esprit entrepreneurial.
L’analyse de la philosophie religieuse islamique (lecture critique des textes sacrés
musulmans), combinée à des entretiens qualitatifs montre qu’il n’existe pas d’antinomie entre
le dogme religieux et l’esprit d’entreprise. Bourdieu (1977) s’est attelé à démontrer dans « les
structures sociales de l’économie » que les agents économiques qui s’engagent dans le monde
économique ont des conduites et des anticipations plutôt raisonnables que rationnellement
économiques (en fonction de leur habitus).
On retrouve les approches multidimensionnelles davantage en économie et en science de
gestion, où l’étude de la culture dans l’entreprise occupe une place de plus en plus importante
depuis que l’hypothèse de convergence du management est remise en question depuis que
l’idée de l’existence d’un modèle de management universel et optimal indépendant des
9
environnements nationaux est abandonnée8, divers auteurs affirment que «la culture d’un
pays détermine implicitement un modèle spécifique de management » (Hofstede(1980) et
« qu’il n’y a pas de management idéal[…] les différences dans la culture nationale appellent
à des différences dans les pratiques managériales » (Newman et Nollen, 1996). De très
nombreuses études empiriques, principalement des comparaisons à l’échelle internationales,
ont identifié et mesuré les différences dans les cultures nationales (Hosfsde, 1980 ; Smith,
Trompenaars et Dugan ,1995 ; Schwartz,1999 ; Lawrence et Yeh, 1994). L’étude la plus
célèbre et la plus couramment citée en management est l’enquête d’Hofstede (1980) menée
auprès 116.000 personnes dans 72 pays à travers un questionnaire unique distribué dans des
filiales d’IBM et mesurant la culture à travers 4 dimensions supposées collectives9.
L’étude montre qu’en fonction des indices de chaque dimension, il est possible de dessiner
une carte culturelle du monde, et qu’en croisant l’échelle de l’individualisme avec celle de la
distance hiérarchique on peut distinguer 5 styles de comportement et de management10.
Dans le littérature consacrée à l’impact de la culture sur les différentes activités de gestion, on
retrouve des résultats empiriques forts qui prouvent que les cultures nationales changent et
qu'une variété des procédures de gestion diffèrent selon la culture nationale. On retrouve des
recherches sur l’impact de la culture sur Leadership (Dorfman et Howell 1988), l’orientation
stratégique (Schneider et DeMeyer 1991 ; Tan 2002), la gestion des ressources humaines
(Luthans et al, 1993) les tensions dans l’entreprise (Trompenaars et Wooliams, 2003) la
performance (Bond et Hofstede 1991, Newman et Nollen 1999 ) (voir tableau III pour résumé
des différentes étutes ;: questions/méthologie/variales, etc)
Earley (1994), montre qu’un management adapté à l’environnement culturel a des impacts
positifs sur l’efficacité individuelle et les performances de l’entreprise.
8
Cette hypothèse des année cinquante et soixante est remise en question par les chercheurs en management international
surtout depuis le développement de modèles autres que le « modèle américains » de best-practices (modèle japonais )
9
Distance hiérarchique : degré d'acceptation par une société de la distribution inégale du pouvoir dans les institutions et les
organisations.
Contrôle de l'incertitude : propension d'une société à se sentir menacée par des situations incertaines ou ambiguës.
Individualisme : disposition des membres d'une société à se prendre en charge ainsi que leur famille proche.
Masculinité : tendance d'une société à valoriser l'avancement, l'héroïsme, l'affirmation de soi et la réussite matérielle plutôt
que les relations, la modestie, l'attention aux faibles et la qualité de vie.
10
Style autocratique : Grande distance hiérarchique, avec mentalité très communautaire = : la plupart des pays du tiers
monde(y compris l’Afrique).
Style autocratique modéré: Assez grande distance hiérarchique, avec mentalité assez communautaire (les autres pays du
tiers monde et le Japon).
Style paternaliste :Assez grande distance hiérarchique, avec mentalité individualiste (France et les autres pays latins
d’Europe)
Style consultatif Distance hiérarchique moyenne, avec mentalité individualiste ( pays anglo-saxons)
Style participatif : Distance hiérarchique faible, avec un individualisme moyen ( pays germanophones et scandinaves)
(d’après Hofstede et Bollinger 1987)
10
Les recherches menées jusque là ont utilisés différentes mesures de la culture nationale, en se
référant à différents auteurs
(Parsons et Shils (1951); Kluckhohn et Strodtbeck
(1961); Newman, Summer et Warren (1977); Hofstede (1980); Hall et Hall {1990};
Lewis,(1992) ; Trompenaars et Hampden-Turner (1993); Trompenaars (1994); Fukuyama
(1995) ; Triandis (1995) ; Bottger, Hallein et Yetton(1985).
Une revue de la littérature sur les différentes dimensions de la culture nous a permis de
retrouver d’identifier un nombre très élevé (plus de 40), mais Oslet et Bird(2000) résument
l’essentiel en 22 dimensions bipolaires( tableau IV).
La multiplicité des dimensions ne signifie pas pour autant que leur nombre est aussi élevé.
On peut facilement rapprocher plusieurs dimensions et les synthétiser dans la grille
d’Hofstede (par exemple la domination de la nature, la recherche et l’esprit compétition
peuvent facilement être rapprochés de la masculinité/féminité, ou encore les rapports entre
individus, le collectivisme de l’individualisme/collectivisme).
Un avantage de la grille d’Hofstede souligné par Hayton, George et Zahra (2000) est que ses
dimensions agrégées permettent de rendre compte de beaucoup de phénomènes et de prendre
en considération divers aspects et valeurs de la culture.
De plus, les résultats empiriques de la matrice ont été testé de façon probante au niveau
national par Shackeleton et Abbas (1990) et Chow, Shileds et Chan (1990), Nasierowski et
Les différentes mesures (dimensions) de la culture (d’après Osland et Bird,2000)
Rapport la nature : soumission
Passé
Mode d’activité : être
rapports hiérarchiques
conception de l’espace : privé
Nature de l’homme; bon
Nature humaine changeable
Temps Mono chronique
Contextualité du langage forte
Contrôle de l’incertitude ; faible
Distance hiérarchique : faible
Orientation à court terme
Individualisme
Masculinité
Universalisme
Autonomie affective ; forte
Cognition : diffuse
Besoin d’achèvement
Individualisme
Le lieu de contrôle : interne recherche de
la compétition
Réflexion : analytique
Harmonie
Présent
Contenir et commander
groupe
Mixe
Bon et mauvais
Domination
Futur
faire
rapports individuels
Publique
bon
Inchangeable
Temps Poly chronique
faible
élevé
forte
long terme
Collectivisme
Féminité
Particularisme
faible
Spécifique
fatalisme
Organisation
externe
compromis
Synthétique
Boguze (1998) et Naumov et Puffer (2000) et son modèle a été considéré comme important et
raisonnable pour décrire et étudier la culture nationale dans l’entreprise (Triandis, 1982)
même si paradoxalement
très peu d’études ont utilisé les dimensions d’Hofstede pour
mesurer les différents styles de management et leur impact sur la performance (Sondergaard,
11
1994), et à notre connaissance aucune étude n’a utilisé ce modèle pour étudier l’impact de la
culture nationale sur le processus entrepreneurial. La partie suivante sera consacrée à une
étude exploratoire sur l’impact de la culture sur le management de la culture.
III- Etude exploratoire
Avant de présenter l’étude exploratoire que nous avons mené auprès de jeunes entrepreneurs,
il convient de dresser un tableau rapide de l’histoire économique et politique du pays tout en
résumant les principales recherches concernant l’entrepreneuriat algérien.
Aperçu historique
L’existence politique de l’Algérie est relativement récente, ce n’est qu’en 1962, que le pays a
conquit son indépendance, après 132 ans de colonisation. En adoptant un système politique
basé sur un puissant parti unique, et modèle économique de type « socialiste », basé sur
l’édification d’un secteur monopolistique et puissant, l’Etat a été pendant plus de 30 ans
l’unique entrepreneurs et employeur. Ce n’est qu’à la suite de multiples crises économiques
(en raison de l’effondrement du prix des hydrocarbures, principale source de revenus) que
l’Etat, en cessation de paiement (1993), a autorisé l’émergence d’un secteur économique
privé, dans des conditions sécuritaires et politiques très graves11.
La mutation de l’environnement de travail a été très rapide. Le pays est passé très rapidement
de l’agriculture traditionnelle qui a duré des siècles au salariat socialiste sous la devise de
« l’industrie industrialisante », puis, depuis les 15 dernières années à l’économie de marché
qui fait - au rythme lent de multiples réformes inachevées- une place grandissante aux
secteurs productifs privés.
Les travaux de recherche en gestion portant sur l’entrepreneuriat sont quasi-inexistants en
Algérie12. Parmi les premiers travaux de référence sur les acteurs économiques, nous
retrouvons les enquêtes sociologiques et ethnographiques de Bourdieu (1958, 1963,1977) sur
les travailleurs algériens qui démontrent le rapport entre la structure sociale paysanne et
l’organisation économique pré-capitaliste ou le calcul économique ( au sens moderne de
recherche de profit, de rentabilité et de performance) est totalement absent au profit d’un
mode de travail qui visait à satisfaire les besoins primaires et assurer la reproduction du
groupe. L’industrialisation du pays dans les années 60 a provoqué un bouleversement
11
Violences terroristes (ou guerre civile selon d’autres lectures). « La décennie sanglante » du terrorisme
islamiste (1990-2000) a fait plus de 100.000 victimes et des milliers de disparus L’Algérie a connu 5 présidents
(dont un assassiné en 1994) et 11 premiers ministres en 10 ans. Le pays est toujours en « état d’urgence ».
12
Même si sur ce point, nous constatons que de nombreux chercheurs se consacrent au thème de
l’entrepreneuriat dans quelques universités (Ouargla, Tizi-Ouzou, Tlemcen,etc), ou dans des structures de
recherche à l’image du Centre de Recherches en Economie Appliquée au Développement (CREAD) qui a
entrepris en grande étude sur le thème ces 4 dernières années.
12
important de la société à travers une urbanisation rapide des générations de paysans
transformés malgré eux en salariés et en fonctionnaires. Plus récemment, les chercheurs en
sociologie et en gestion qui se sont intéressés aux caractéristiques socioculturelles et
socioprofessionnelles des entrepreneurs algériens (Gillet 2003, Madoui 2003, Kadri-Messaid
2003, Melbouci,2004) nous permettent de résumer es spécificités des anciens entrepreneurs
en quelques point les:
- La création d’entreprise est souvent corrélée à l’objectif de créer une cohésion au sein de la
famille et un lieu de reproduction des fonctionnements familiaux ce qui conduit à des
comportements irrationnels (du point de vue économique). La composition du personnel par
exemple montre que la plupart des employés ont des liens de parenté avec le chef
d’entreprise, et que l’embauche ne se fait pas forcément en fonction des qualifications et des
compétences, mais en fonction des rapports de confiance entre le chef d’entreprise et des
proches de la famille (Kadri-Messaid 2003).
- L’organisation hiérarchique est de type patriarcal : le management est caractérisé par des
rapports hiérarchiques de soumission des jeunes aux plus âgés. Le principe étant que l’autorité
du père est indiscutable .C’est l’aîné de la famille, le père (ou celui qui possède ce statut) qui
possède seul le pouvoir stratégique dans l’entreprise, même s’il ne possède pas forcement les
qualifications qui le justifie.
- La gestion du capital (familial) est marquée par la prudence et la sécurité. Le recours aux
capitaux étrangers (au cercle familial), le partenariat ou la fusion sont encore des pratiques
inconnues pour beaucoup d’entreprises. La conception des anciens entrepreneurs est que
l’association (ou le partenariat) mènerait à une diminution de leur pouvoir stratégique (de
père) et un éclatement de la famille.
Etude exploratoire
Nous avons procédé à une étude qualitative exploratoire pour essayer de faire le lien entre la
culture et le management (pratiques de gestion, et processus entrepreneurial) en adoptant
comme mesure de la culture les 4 dimensions d’Hofstede (1980) . La technique de l’entretien
individuel a été préférée à celle des entretiens de groupe en raison de sa facilité de mise en
œuvre auprès de ce type de population (Palmerino, 1997, in. Aaker et al, 2000).
Cette approche a l’avantage de ne pas imposer à l’interviewer un cadre strict de thèmes à
aborder tout en ayant la possibilité d’orienter l’entretien vers les thèmes qui n’ont pas été
évoqués spontanément.
Pour le besoin de notre étude exploratoire, et pour mettre en application (qualitative) le
modèle d’Hofstede, en rapport avec le management et le processus entrepreneurial nous avons
13
du faire un double entretien pour chaque entreprise. En effet le questionnaire original
d’Hofstede est conçu pour être administré aux employés, pour mesurer à travers des échelles
leur caractéristiques culturelles. C’est la raison pour laquelle nous avons effectué pour chaque
entreprise un entretien du propriétaire manager et d’un salarié de l’entreprise, choisi selon le
volontariat et avec l’accord du dirigeant.
Echantillon
Nous avons interviewé 12 personnes (créateurs d’entreprises dans le secteur des services). Les
9 premiers entretiens nous ont permis de compléter la liste initiale des thèmes choisis. Lors de
nos trois derniers entretiens, aucune nouvelle idée n’est apparue, nous avons estimé donc que
nous étions arrivé à une saturation thématique. Les participants sont des jeunes de sexe
masculin (âgée entre 27 et 35 ans) qui ont crée leurs propres entreprises dans le 5 dernières
années. Leur niveau d’instruction est variable. Huit ont un diplôme d’études supérieures et
trois se sont arrêté au bac et un dernier a un niveau primaire. Les entreprises sont pour la
majorité des TPE de service avec un personnel entre 7 et 9 personnes. Deux entre elles ont un
personnel supérieure que 10. Les secteurs sont varié et vont du secteur informatique à la
mécanique auto (Voir le tableau V en annexe pour les caractéristiques des entreprises).
Les interviews individuels, d’une durée moyenne d’une heure, sont parties d’une discussion
suivant un guide d’entretien en 5 points : Les quatre premiers concernent les dimensions
culturelles d’Hofstede pour lesquelles nous avons repris les questions originales de l’enquête
d’Hofstede, mais que nous avons développé et approfondi . Ces points ont été abordé avec
l’ensemble des interviewés (chefs d’entreprises et salariés) pouir pouvoir croiser les visions.
Individualisme
Distance
Contrôle
collectivisme
hiérarchique
l’incertitude
féminité
- temps libre pour vie
-rapport subordonnés
-Anxiété et stress au
- sécurité de l’emploi
- orientation
familiale ?
/ patron
travail
- coopération facile
stratégique
- conditions de travail
- perception du
-combien de temps
- avoir des chances
- perception de
agréables ?
patron
travailler dans
de promotion
l’environnement (Tan
- travail coopératif et
-différence ( niveaux,
l’entreprise
- augmentation des
2002)
efficace ?
étude, d’age) entre le
- respect des règles et
salaires
- style de
patron et employés
lois
-Rapport familiaux
de Masculinité
Management
management (Lu et
Lee 2005)
Le dernier point qui porte sur le management et le processus de création d’entreprise
(intention, décision, modes de financement, embauche du personnel) a été abordé uniquement
avec le chef d’entreprise. La discussion était centrée sur le management, en prenant pour
14
référence les dimensions utilisées par Tan(2000) et Lu et Lee (2005), a savoir l’orientation
stratégique de l’entreprise (processus de prise décision, objectifs à moyen et long terme,
l’idée d’innovation, l’intention d’innovation, agressivité et énergie déployée, la perception de
l’environnement) et le style de management (supervision, communication, coordination,
contrôle). Les entretiens ont été enregistrés, intégralement retranscrit puis analysés par la
méthode de l’analyse de contenu thématique.
Analyse des entretiens
Nous avons procédé à une analyse de contenu thématique en découpant tout d’abord le corpus
en unités d’enregistrement qui ont été ensuite regroupées en catégories, ce qui nous a permis
d’élaborer notre grille d’analyse. Nous avons effectué une analyse horizontale pour étudier en
profondeur chaque entretien ainsi qu’une analyse verticale pour comparer les différents
discours. Nous pressentons ci suite les résultats de l’analyse.
Individualisme/ Collectivisme « Disposition des membres d'une société à se prendre en charge
leur famille proche. Exprime le degré de liberté d'un individu par rapport à un groupe»
ainsi que
Ce qui caractérise les cultures collectivistes, c’est la primauté de l’intérêt du groupe sur
l’intérêt individuel. Le premier groupe dans la société est constitué par la famille ( d’abord,
restreinte puis élargie) dans laquelle on retrouve des relations de dépendances, pratiques et
psychologiques.
Concernant le rôle de la famille dans leur décision entrepreneuriale, la majorité des personnes
interviewés (11 sur 12) déclarent que la création n’aurait pas se faire sans l’aide financière des
proches (parents, oncles, cousins) à travers des dons et/ou prêts sans intérêts, et/ou des
contributions en nature (mise à disposition du garage de la maison ou d’un local) : « Si mon
père ne m’avait pas laissé le garage, je n’aurai pas de local commercial, et je n’aurais pas pu
créer la boite » ; « c’est parce qu’on avait ce local que j’ai eu l’idée d’y installer l’atelier [de
réparation], autrement impossible de louer quelque part » ; « c’est en voyant que tous le
monde transforme les garages en magasin que les parents ont accepté de me laisser
l’exploiter, c’est grâce à eux que je ne suis pas chômeur ».
En ce qui concerne le recrutement du personnel, l’embauche s’est faite au départ dans les
personnes appartenant à l’entourage proche, ce qui caractérisent la culture collectiviste, à
l’inverse de la culture individualiste, ou l’on n’aime pas embaucher dans la famille pour éviter
l’impartialité. La majorité des entrepreneurs interviewés (11 sur 12) déclarent avoir embauché
des personnes issues de leur entourage immédiat, que ça soit un membre de la famille (frère,
15
cousin) ou une personne très proche (ami, voisin, collègue d’université) ou recommandé par
un proche. Les raisons qui motivent le choix dans l’embauche, évoquées spontanément sont
liés d’abord à la confiance et ensuite à la compétence et au devoir : « j’ai pas fait d’entretien
d’embauche, je le connais depuis son enfance, puis c’est un bon ingénieur» ;« pour tenir la
caisse, j’avais besoin de quelqu’un de confiance, alors qui mieux que mon frère peut le
faire ?» ; « C’est un camarde de fac, et il est très débrouillard » ; « à compétences égales, il
est naturel de prendre mon cousin au chômage, que dirait la famille si je le fait pas entrer
[dans l’entreprise ] ?» ; « faut pas être à NASA pour s’occuper des factures, alors bien sur
j’ai pris une personne que je connais (l’amie de ma cousine) plutôt qu’une étrangère [au
cercle de connaissances], comme ça je suis tranquille».
Onze des personnes interviewées n’ont eu recours aux moyens de prospection des ressources
humaines, très peu développées sur le marché, et se résumant surtout aux annonces de
presse.« Pourquoi faire une annonce quand tu connais plein de gens au chômage ? y a qu’a
demander au gens [de l’entourage] s’il connaissent des fils de bonne famille qui ne travaillent
pas ».
Il n’y a qu’un seul entrepreneur qui fait exception à cette attitude, mais qui reconnaît
implicitement la pression du groupe « Je n’ai pas voulu embaucher des proches, mes cousins
ou mes voisins, ça détériore toujours les relations, et puis je ne veux pas que tout le monde
sache combien je gagne… après je vais leur devoir quelque chose et ils vont dire que ne
donne assez .. Je sais que je suis obligé d’aider ma famille, mais je veux le faire à ma façon »
et déclare encore « quand ma mère [qui ne travaille pas] me demande de l’argent pour aider
sa soeur dans le besoin, je ne discute pas, ça serait un honte. »
La notion honte a été évoquée par un autre entrepreneur concernant un employé ( âgé de 59
ans, sans diplôme) qu’il a recruté informellement, pour le gardiennage et l’accueil mais dont
l’apport à l’entreprise n’est pas jugé optimal depuis le recrutement d’une assistante de
direction : « J’ai licencié personne.. pour l’instant hamdoulliah [grâce à dieu] ca marche…
puis F..... a l’âge de mon père et il a trois enfants et sa femme ne travaille pas. Ce n’est pas
grave, puis
il me rends plein de petits
services [commissions personnelles, courses,
courriers, pas toujours en rapport avec l’activité de l’entreprise] et puis c’est bien qu’il y est
un homme quand je ne suis pas là [ à coté de l’assistante]».
Au niveau du poids et de l’implication de l’entourage proche, les entrepreneurs déclarent en
majorité être sollicités pour des prestations gratuites (y compris des proches de leur
employés), mais que cela n’influence leur qualité de travail ou leur autonomie stratégique:
«
il m’arrive de dépanner des proches ou de réparer gratuitement leur PC, mais c’est normal
16
de rendre service… mais quant j’ai pas le temps, je les laisse pour après.. c’est pas des
clients.. », «j’ai des petits cousins qui assistent gratuitement aux cours [d’initiation à
l’informatique], je vais tout de même pas les faire payer.. de toute façon ça ne me coûte rien
et je peux pas faire payer ma tante » ; « C’est parfois embêtant d’être dérangé pour dépanner
tout le temps …les gens s’imaginent que j’ai le temps et que je suis réparateur ..Alors que
mon métier est de faire des installations de réseaux.. Souvent je laisse faire les employés
quand ils n’ont pas beaucoup de travail s’occuper des bricoles, ou je le fais le Vendredi [Jour
de férié en Algérie] …il le faut ... ‘Allah ghaleb’ [ainsi le veut Dieu] ..»
Les employés déclarent qu’ils voient plus l’entreprise comme une espace agréable et un lieu
avec de bonnes conditions de travail « On travaille dans une bonne ambiance, on s’entends
bien et on se ménage les uns les autres... » ; « quand quelqu’un a un truc à la maison
[obligation familiale] on s’arrange toujours ..C’est important la famille, ça passe avant
tout ».
L’impression générale que nous arrivons à dégager, c’est qu’une tendance naturelle vers le
collectivisme se fait ressentir : au niveau de l’embauche (privilégier d’abord les proches qui
sont au chômage) ; du partage du revenu( la distribution d’une partie des profits en vertu de
la solidarité familiale), avec toutefois cette particularité, probablement spécifique au secteur
particulier qu’est le service, ou l’influence (ou l’ingérence) des proches dans le travail et le
management se heurte à l’obstacle de la maîtrise technique, particulièrement dans métiers qui
exigent un niveau haut de maîtrise (l’informatique, l’électronique ou la formation).
A la question de savoir si l’on peut définir l’entreprise comme familiale, si l’on réfère à la
notion de propriété et contrôle légal de l’entreprise (registre de commerce et propriété du
capital) (Lansberg ,1988), on peut considérer que les entreprises sont des propriétés
individuelles, mais si l’on considère la définition plus large (et réaliste) de Davis et Tagiuri
(1982)13 qui considèrent que c’est l’influence des proches qui détermine le caractère familial,
la majorité des entreprises sont à caractère familial, dans le sens ou le siège de l’entreprise(le
garage transformé dans 9 cas sur 12) est la propriété de la famille (ce qui lui confère un
pouvoir stratégique important : le jeune entrepreneur est dépendant des bonnes relations), ou
que l’entrepreneur se sent un devoir moral et de faire partager ses revenus avec les siens.
13
Définition de Davis et Tagiuri (1982) « ..Une organisation ou deux ou plusieurs membres de la famille
étendue influencent la marche (la direction) de l’entreprise à travers l’exercice du lien de parenté, des postes de
managements ou des droits de propriété sur le capital »
17
Masculinité / Féminité « tendance d'une société à valoriser l'avancement, l'héroïsme, l'affirmation de soi et
la réussite matérielle plutôt que les relations, la modestie, l'attention aux faibles et la qualité de vie ».
Concernant le degré de masculinité (tendance à la valorisation de l'avancement, l'affirmation
de soi, la réussite matérielle) dans le lieu de travail, la perception des entrepreneurs est assez
contradictoire. Concernant la réussite, les chefs d’entreprises montrent des tendances
ambitieuses et emploient tous des expressions telles que « je veux réussir et je me bagarre »,
« je veux faire agrandir l’entreprise » ; « il faut que j’arrive à avoir des contrats avec les
grandes entreprises» ; « il faut être dur pour réussir », mais montrent paradoxalement une
tendance à l’humilité, en déclarant «qu’il ne faut pas être trop gourmand » ; et que « dans ce
pays, comme on dit, vivons heureux vivons cachés, faut pas trop se montrer » ; « Si tu devient
trop gros on te casse, faut pas essayer de faire le malin », « Si tu ne connais pas les bonnes
personnes, il vaut mieux rester tranquille ». « Tant qu’on ne dérange pas les ‘’makla’’14 ça
va, mais faut être trop riche » Plusieurs raisons peuvent être à l’origine de cette tendance
marquée à l’humilité (voir à la résignation); une méfiance par rapport à l’Etat et ses
institutions (le fisc particulièrement) qui pendant près de 3 décennies voyait d’un mauvais œil
et surveillait étroitement la « bourgeoisie exploiteuse ». Il y a aussi la crainte d’un contrôle
qui dévoilerait le recours à des pratiques informelles (travail au noir, sous déclarations
fiscales). Un entrepreneur déclare : « on sait tous que personne ne vend et achète avec des
vraies factures, les impôts aussi le savent et ils ne nous embêtent pas… mais si tu commences
à trop te montrer, tu devras leur ’’tchiper’’ [payer un pot de vin] ...et moi j’aime pas ca. », ou
encore « Khalifa15 est l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire… regarde ou il en est, lui qui
était pourtant l’ami des puissants et des stars ». La comparaison peut être inappropriée d’
une TPE et du groupe Khalifa nous montre en tout cas que la perception de croissance dans
l’environnement national n’est pas de plus optimistes, malgré tous les efforts que déploie
l’Etat pour encourager l’entrepreneuriat.
Dans le groupe, un entrepreneur fait exception à la règle en déclarant : « je déclare tout et je
paye mes impôts, mes factures son transparentes et en règle puisque je travaille beaucoup
avec des grosses boites dont beaucoup sont étrangères ... ça m’évite devoir magouiller... ça a
même des avantages que je n’attendais pas du tout, la banque vient de téléphoner pour me
proposer des crédits, alors qu’au début j’aurais payé pour les avoir… »
14
Mot populaire qui signifie « casserole » et qui désigne « les puissants », les hommes d’influences appartenant
généralement aux grands corps d’Etat : militaires, policiers, élus(maires, préfets). Ce mot a été utilisé par 3
entrepreneurs.
15
Très groupe industriel et financier qui a fini en liquidation judiciaire suite à nombreux scandales financiers
principalement.
18
Au niveau des employés, la tendance générale qui se dégage est une certaine satisfaction par
rapport à leur situation et leur rapport à leur patron « je suis bien hamdoulillah [Louange à
Dieu] », « il y a une bonne ambiance de travail » et aucune appréhension particulière n’est
ressentie par rapport à la sécurité du poste. Aucune compétition ou émulation n’a été évoquée,
cependant la majorité des employés avouent qu’ils quitterait l’entreprise pour une meilleure
rémunération : « bien sur si IBM me propose d’aller j’irai sans hésiter » ; « Je suis bien ici,
mais si je trouve un poste au Sahara [dans les multinationales installées dans le sud du pays]
j’irai, c’est beaucoup mieux payé »
A la question des conflits, les entrepreneurs et les salariés répondent qu’ils ne sont pas
nombreux et sont rarement exprimés ouvertement, et dans la plupart du temps ils sont passés
sous silence, à l’exceptions des « ..cas ou si je ne m’en mêle pas, le travail n’est pas fait, je ne
peux renvoyer personne alors je réparti les taches de travail clairement, mais en général avec
le temps les petits conflits se règlent tout seuls ». Nous argumentons ceci par le fait que
l’embauche se fait au départ grâce aux relations personnelles, et les patrons de TPE se
retrouvent dans un cercle avec une marge de manœuvre étroite qui rend difficile la médiation
dans le cadre de relations personnelles étroites
En conclusion, le type de relations qu’entretiennent les managers avec les employés sont
assez harmonieux, même s’ils ne privilégient pas la communication en cas de tensions, elles
sont basées sur des rapports simples et peu protocolaires. La tendance masculine déclarée par
les entrepreneurs trouve certainement son explication dans le contexte nationale difficile
(chômage, concurrence déloyale, corruption, bureaucratie), mais est tempérée par une attitude
globalement féminine (voir résignée) en raison d’une perception négative de l’environnement
institutionnel.
Distance hiérarchique « degré d'acceptation par une société de la distribution inégale du pouvoir dans les
institutions et les organisations »
Au niveau politique l’Algérie est certainement un pays de distance hiérarchique élevée (parti
unique tout puisant- le tout Etat – administration puissante). Au niveau familial, la societé
considéré comme une société patriarcale (Bourdieu 1977, Gillet 2003, Kadri-Messaid 2003)
avec un père dominant et une mère obéissante Les enfants obéissent aux parents, les plus
jeunes aux plus vieux. A l’inverse, dans les entreprises interviewées nous retrouvons sans
ambiguïté dans 10 entreprises sur 12 une distance hiérarchique faible. La récurrence des
réponses des employés le montre clairement ;« tout le monde est patron ici » ; « ici on n’aime
19
pas les gens qui se gonflent, même pas le patron », « le patron c’est le patron, mais on est
tous égaux ici, personne ne se montre supérieur ». « c’est le patron qui prends la
responsabilité finale, mais nous donnons tous notre opinion ». Les réponses des chefs
d’entreprises comportent des nuances : « il faut être ferme sur le travail, mais toujours rester
humain et à la portée des employés » ; « l’Algérien est susceptible, il faut être politique avec
lui et se mettre à son niveau pour le convaincre».
Nous expliquons cette contradiction par deux faits : premièrement la taille des entreprises
rends difficile la hiérarchie. Deuxièmement les employés ont presque le même age que le
patron avec un niveau de formation équivalant et une même origine sociale; les rapport sont
plutôt égaux et amicaux. Toutefois, sur quatre entreprises, nous avons de réponses courtes et
pas toujours claires sur la perception du dirigeant et des rapports avec lui: «c’est pas toujours
facile, mais je me plains pas », « Je n’ai pas de rapport particulier avec lui, je fais mon
travail et c’est tout », « je ne comprends pas toujours ce qu’il fait, je lui es dit de faire
autrement[concernant le rapport aux clients], mais il n’a pas aimé, je me mêle plus de ses
affaires ». Les chefs de ces entreprises pensent qu’ « il faut toujours montrer qui est le patron
et ne pas trop discuter, mon père [ancien entrepreneur ] faisait comme que ça marchait bien »
, « le bâton est toujours le meilleur argument, mais quant ils travaillent bien il faut offrir des
petit cadeaux » ; « les gens sont jaloux, il ne faut jamais leur tourner le dos, ils te ruineront ».
Les deux perceptions et attitudes font penser à la théorie X et Y de MacGréogor. Si
l’échantillon ne nous permet de conclure avec fiabilité sur le degré de hiérarchie, nous
pensons que le niveau général est plutôt faible (à moyen) qu’il pourrait être corrélé au type
d’activité ; c’est dans les entreprises à très forte technicité (informatique, électronique et
formation) que nous observons les degrés hiérarchiques nettement faibles.
Nous observons toutefois, que quant un employé est plus âgé que le patron « la distance
hiérarchique est inversée et imposée ». « Qu’est ce que tu veux ? Je ne vais pas lui crier
dessus. Tu lui dit de faire ça il te fait autre chose. Il est gentil et il me fait de la peine ».
Contrôle de l’incertitude « propension d'une société à se sentir menacée par des situations incertaines ou
ambiguës. »
Le rapport à l’incertain mesuré par la tolérance de l’incertitude (existence de lois formelles et
claires, répartition claire des taches et responsabilités, anxiété au travail) qui ressort des
entretiens menés avec les salariés est assez contradictoire à priori. D’un coté il y a une
souplesse et une flexibilité dans le travail, voir un rejet psychologique des lois et des
réglementations: « j’aime pas trop les entreprises avec plein de formalisme et de procédures,
je fais mon travail à ma façon,l’essentiel c’est faire le travail, ça marche bien comme ça» ;
20
« le règlement et la loi c’est une chose, mais la réalité c’est autre chose » ; « globalement je
fais mes heures de travail, mais y a des jours je ou travaille beaucoup, des fois jusqu'à minuit,
et d’autre ou je prends mon après-midi, c’est plutôt souple ».
D’un autre coté une certaine anxiété est exprimée : « Je ne comprends plus qui fais quoi des
fois, tout le monde se mêle, et il faut que je pose plein de questions pour comprendre » ; « ca
fatigue parfois de ne pas savoir, le patron s’arrange oralement avec des clients ou des
fournisseurs, mais on est pas toujours au courant » ; « c’est pas le travail qui est stressant,
c’est le manque d’information ».
Les patrons, pour une majorité estiment qu’« une entreprise c’est pas une administration, pas
besoin d’un papier pour savoir ce qui se passe dans mon entreprise » ; « tout le monde sait
quoi faire, au final ça marche » ; « on fonctionne sur la confiance et la responsabilité, pas
besoin de règles rigides et compliqués, mais je garde toujours un œil sur l’argent».
Le caractère oral de la communication, la souplesse dans le gestion ne semblent pas gêner
particulièrement les chefs d’entreprise, mais provoquent parfois des gènes et des anxiété chez
leurs salariés, qui tout en présentant un niveau d’incertitude faible, semblent désirer davantage
de clarté dans la gestion.
Le processus entrepreneurial et le management
Nous avons interviewé les chefs d’entreprises dans un entretien consacré pour essayer de
mettre en lumière leur processus entrepreneurial, au sens de Davidsson (2003) qui prends en
considération le processus de découverte de l’opportunité, la décision et les comportements à
l’origine
de
l’émergence
organisationnelle
(Acquisition
des
ressources-
Stratégie
entrepreneuriale).
Sur l’ensemble des 12 entrepreneurs, il n’y avait qu’un seul, qui depuis une longue période
avait développé l’intention ferme de créer son entreprise : « j’ai décidé au début de mes
études en informatique de créer la boite, au départ, l’idée d’être fonctionnaire [comme le
père] ne m’a jamais séduite». Une partie des autres chefs d’entreprise(8 sur 12) déclarent
n’avoir commencé à réfléchir à la création d’entreprise que lorsqu’ils se rapprochaient d’une
situation inéluctable d’absence d’emploi : « à la fin de mon cursus universitaire, j’ai passé
plusieurs mois à chercher un travail, n’ayant rien trouvé, j’ai décidé de faire comme tout le
monde, transformer le garage de la maison en local » ; « c’est pour me créer un revenu que
j’ai ouvert l’atelier de réparation » ; « je ne me suis jamais imaginé enseignant ou formateur,
mais il y avait une opportunité quant mon père [coiffeur] à arrêté de travailler dans le
local suite à sa maladie»
21
« J’aurais aimé travailler dans une grande entreprise, avoir un bon poste, mais c’est le
Maktoub[destin], j’avais pas le choix, j’ai ouvert la boite ».
Deux interviewés (sans diplôme universitaire) ont reproduit le métier d’entrepreneur du père,
mais en changeant l’orientation de l’entreprise pour l’un : « j’ai repris le taxiphone et je l’ai
transforme en cyberespace et salle de jeux » ou en changeant complètement d’activité pour
l’autre ; « il y avait trop de superette et l’épicerie[tenue par le père] ne marchait plus, alors
j’ai convaincu le vieux de me laisser faire mon atelier [d’installations techniques : alarmes,
antennes,etc] »
Le choix du secteur et du métier apparaît dans la majorité des cas comme « improvisé » et non
choisi en fonction d’une formation initiale ou un savoir faire particulier, c’est plutôt le
mimétisme des affaires qui paraissaient à la fois « faisables » avec un budget limité, et « pas
trop risquées » qui a déterminé le type d’activité. Le mimétisme de ce qui semble
« rapporter » sur le marché, sans être risqué est le facteur de choix le plus cité dans les
interviews : « Il y’en a partout des cyber, c’est la preuve que ça marche bien ».
Il n’y a que 3 chefs d’entreprises qui disent avoir « choisi volontairement» leur métier (2
entreprises d’informatique et une entreprise d’installations techniques) parce que « c’est mon
truc [l’informatique], et ça a de l’avenir chez nous », « j’aime ça » ; « j’ai toujours aimé
bricoler ».
L’étape de création de l’entreprise est celle que tous les entrepreneurs s’accordent à qualifier
de « dure, surtout l’administration » et « la paperasse ». La mobilisation des ressources
financières s’est faite avec le concours de la famille et des proches, sans qu’aucun interviewé
n’ai beaucoup de mal à convaincre les siens de la nécessité d’entreprendre dans un marché de
l’emploi notoirement rigide : « mon père m’a encouragé », mais il fallait juste « rassurer les
parents que ça allait marcher » et que « c’est une bonne affaire » , que « c’était pas risqué ».
Le démarrage des activités n’ont pour la majorité des entrepreneurs pas été solitaires grâce au
soutien moral et psychologique des proches (famille, amis) qui ont mis à disposition tout leur
réseau social disponible.
L’aspiration de départ qui se résumait pour la majorité à « créer son propre emploi » ;
« arrêter le chômage » ;« gagner mon pain » ou « ne plus dépendre de des parents ». Il n’y a
que deux entrepreneurs qui décaleraient vouloir créer leur entreprise « pour gagner ma vie
d’abord, mais aussi parc que j’ai toujours rêvé de ça » ou « pour devenir quelqu’un ».
22
S’il est vrai que la TPE présente la particularité d’être particulièrement soumise à
l’environnement et au marché (Julien et Marchenay, 1988) il est avancé qu’« à travers
l’importance du dirigeant qui va insuffler un vision stratégique [..] la capacité à développer
des comportements entrepreneuriaux […l l’entreprise de petite dimension peut réduire
l’influence du contexte sur son fonctionnement »(Gueguen,2004)
Pour mesurer le comportement et la stratégie entrepreneuriale des dirigeants, nous avons porté
notre entretien sur les pratiques de gestion. Nous nous sommes basé sur Tan (2002) pour
mesurer la perception de l’environnement (perception de l’importance des relations avec les
fournisseurs, les clients et les concurrents) ainsi que les orientations stratégiques du
management (à travers des questions sur la de prise de risque, les orientation vers le futur, et
l’idée/intention d’innovation).
Il n’y a qu’une seule entreprise (dans le secteur d’informatique) qui présente une orientation à
long terme ( dimension culturelle associé la persévérance et le sens de l’économie (Hofstede
et Bond, 1988)): « depuis le départ, j’avais l’idée de développer plusieurs savoir-faire et un
concept particulier, j’ai du faire des choix sur l’avenir et prendre un cap précis » ;
« d’emblée j’ai orienté l’entreprise sur les grands chantiers [de bâtiments ] des grandes
entreprises en proposant de faire mes installations réseaux ‘pendant’ la construction, en plus
d’un service après vente gratuit lors de l’installation de l’entreprise, ce qui économise des
efforts à tout le monde,. J’avais estimé que c’était plus porteur que de faire de simples
prestations de services ou des dépannages et réparations pour les particuliers, c’est ce que
tout le monde fait aujourd’hui d’ailleurs ». Ce chef d’entreprise modèle qui a réussi à
transformer sa TPE en PME au bout de 5 ans pense même à « développer des activités à
l’international, mais ce n’est pas encore possible pour l’instant faut d’une règlementation
encore restrictive [marché des change notamment] ».
Pour les autres entrepreneurs le mot d'innovation (ou synonyme) n’est presque pas employé
dans leurs discours. Les objectifs de maximisation des profits, sans stratégie particulière pour
y arriver dénotent une orientation claire sur le court terme. Les entrepreneurs se fient plus à
leurs intuitions et à leurs expériences en faisant un management plutôt réactif. Il n’y a pas de
suivi de clients et la concurrence n’est pas jugée menaçante dans un marché ou la demande est
très forte. « Pourquoi se casser la tête à essayer d’améliorer quelque chose, qu’est ce que ça
me rapporte ? », « mon métier c’est d’installer, avant de partir je vérifie que ca marche,
après je ne peux rien garantir, c’est pas moi qui ai fabriqué les paraboles » ; « les gens[sousentendu les client] demandent toujours trop » ; « y a rien a changer ou à améliorer, c’est
23
comme ça, et puis je m’en fiche des gens, ils n’ont qu’a faire un kilomètre de plus aller chez
l’autre s’il ne sont pas contents » a même déclaré le dirigeant d’un cyber-café.
Ces résultats sont en contradiction avec ceux trouvé par Assasi et Hammouda (2006) qui
démontrent que les jeunes entrepreneurs algériens ont le goût du risque et utilisent les
méthodes de recrutement modernes (à travers les agences nationale pour l’emploi ou en
contactant directement les écoles et les centres de formation professionnelle). Nous
expliquons cela par le fait que le comportement des entrepreneurs dépend de la taille
d’entreprise. Leur étude s’est focalisée sur les PME, tandis que la notre échantillon est
composé principalement de TPE.
Conclusion
L’analyse du discours des entrepreneurs et leurs salariés nous permet de faire une
comparaison avec les conclusions des précédentes études sur les anciens entrepreneurs, même
si les études exploratoires, à faible échantillon n’ont pas vocation à valider scientifiquement
de tels résultats16. Les différences observées entre les générations, que nous donnons à titre
indicatif seulement, concernent principalement deux indices culturels qui semblent à priori
moins élevés chez la jeune génération dans le secteur des service ; la distance hiérarchique, et
le niveau de collectivisme, avec une nuance pour ce dernier, qui peut s’analyser à l’échelle
sociale (dans laquelle les mécanismes et logiques communautaires et la hiérarchie ont l’air de
perdurer) et à l’échelle organisationnelle (l’entreprise) qui, à priori, montre des signes de
mutation.
En ce qui concerne le management des jeunes entreprises, il n’est pas méthodologiquement
prudent de le qualifier à partir d’une simple étude exploratoire, mais si nous devions définir
un style de management à partir de l’appréciation des différences culturelles (en croisant le
niveau d’individualisme estimé ‘moyen’, et la distance hiérarchique estimée ‘faible’ dans
l’entreprise) le style serait selon les catégories d’Hofstede (1987) assimilé à un style
participatif, avec consultation du groupe. La logique entrepreneuriale qui sous-tend l’activité
ressemble à ce que Julien et Marchenay (1996) qualifient de ‘patrimoniale’ ou PIC et qui
cherche à «avant tout à accumuler du patrimoine (Pérennité) tout en souhaitant préserver
(l’Indépendance) » « … la (Croissance) de l’affaire n’est acceptée que pour autant qu’elle
ne met pas en cause la pérennité de l’indépendance patrimoniale ».
Sue le plan théorique la revue de la littérature sur l’impact de la culture sur l’entrepreneuriat
nous permet de mettre en lumière 2 résultats importants de deux approches différentes :
16
Une étude quantitative en cours de réalisation est en cours de réalisation à cet effet.
24
Le premier résultat (de l’approche par les traits, et cognitive) apporte la preuve que la
dimension culturelle joue un rôle déterminant dans 3 éléments fondamentaux : la perception,
la motivation et les objectifs des entrepreneurs. Les implications de ce résultat sont très
importantes, car ces 3 éléments sont déterminants dans le processus entrepreneurial, en ce
sens qu’ils peuvent donner « un bon ou un mauvais départ » (au moins sur le plan
psychologique)
à
l’aventure
entrepreneuriale.
Ce
sont
des
‘matières
premières’
psychologiques de la production de l’entrepreneur entreprenant, et de l’éventuel innovateur.
Le deuxième résultat important, (issu de l’approche création de valeur ou innovation) est celui
qui prouve que la dynamique entrepreneuriale, et son corollaire, l’innovation, varient selon la
culture, donc, selon la perception, la motivation et les objectifs, produits par la culture. Ce
deuxième résultat est d’autant plus important qu’il prouve que la finalité du processus
entrepreneurial (création de valeur ou innovation) est déterminée par ‘les matières premières
psychologiques’ de départ.
Un troisième résultat des études empiriques tant à prouver que le management est d’autant
plus performent qu’il est adapté à la culture. Une question naturelle se pose a nous alors, estce qu’un management adapté permettrait d’ajuster l’influences des conséquences culturelles
afin de modifier l’objectif et le promouvoir en objectif entrepreneurial ? En schématisant cette
question, et posant 3 niveaux d’objectifs en fonction de l’opportunité perçue comme possible
au départ, qu’on supposera faible (comme c’est le cas dans notre étude exploratoire), est-ce
que l’augmentation des ressources entrepreneuriales, à travers l’orientation vers un
management adapté (via un accompagnement par exemple, ou une formation préalable)
permettrait de déplacer le niveau d’objectif (donc de l’ambition entrepreneuriale) ?. Si on
avance une réponse optimiste et affirmative à cette question, d’autres questions se posent ;
comment faire de l’accompagnent adapté à la dimension culturelle ? Un regard sur les
théories de l’accompagnement dans le cadre interculturel (Levy, 2004) apporterait peut être
la réponse pour que les entrepreneurs situent leur entreprise dans « une zone de cohérence »
entre ce qu’ils sont et ce qu’ils veulent (Paturel, 1997). Une approche par les faits dans les
recherches ultérieures pourrait concilier les résultats de l’approche par les faits, et l’approche
de création de valeur, en se focalisant sur le processus de façon pragmatique.
25
26
Annexes
Schéma I - Schéma de la stabilisation de la culture (Hofstede 1980) :
Influences extérieures
- forces de la nature
- forces de l’homme
- commerce conquêtes
-découvertes
scientifiques
Origines
Normes sociétaires
Conséquences
- facteurs écologiques :
Géographiques
Économiques
Démographiques
Génétiques/ hygiéniques
Historiques
Urbanisation
Systèmes de valeur la
plupart des groupes de
population
- Structure et fonctionnement des institutions :
Structure de la famille
Différenciation des rôles
Stratification sociale
Définitions de comportement
Education
Religion
Structure politique
Législation
Architecture
Développement des théories scientifiques
CULTURE
Renforcement
Tableau II : Croisement entre culture et entrepreneuriat : quelques cherches empiriques
Entrepreneuriat (création d’entreprise)
Approche
Recherches Empiriques
Culture
Question ou objet de
recherche
Terrain
Méthodologie et
Variables
Caractéristiques des
entrepreneurs
Approche Traits ou
cognitive
Shane(1992)
Shane(1993)
Davidsson(1995)
Davidsson et
Wiklund(1995)
- Différences /
similitudes
- motivations
- perception
Inernational
National
Variables
d’Hofstede(1980)
Autres caractéristiques
personnelles
Niveau d’entrepreneuriat
Approche création de valeur
Baum et Al(1993)
Shane et al(1991)
MacMillan(1988)
Shane et al (1991)
McGrath et MacMillan (1992)
Mueller et Thomas(2000)
Mitchell et al (2000
Management et
Entrepreneuriat
Approche par les faits
Rares études
principalement en
management
international.
Taux de création
Taux d’innovation
Inter Pays
Hofstede(1980) ou caractéristiques
personnelles
27
Tableau III : Quelques études empiriques sur l’impact de culture sur le management
Auteurs
Shackleton et
Abbas (1990)
Question
Est-ce que la perception et les valeurs du
travail différent en fonction des racines
culturelles ?
Mesure de la culture
-Distance hiérarchique
-Contrôle de l’incertitude
Mesures du management
- les valeurs de travail et perception.
Terrain
7 entreprises de
nationalités différentes
en Grande Bretagne
Chow, Shields et
Chan (1991)
-Individualisme
-Interdépendances des travailleurs
- dépendances du salaire (primes)
Entreprises asiatiques
Hofstede, Frank
et Bond (1991)
Berrel, Wright et
Van Hoa (1999)
Est-ce la culture affecte la performance et la
qualité du management ? (management
qualité)
Est-ce qu les racines culturelles affectent la
performance ?
Différence dans le comportement managérial
selon culture ?
La culture en harmonie affecte elle la
performance ?
Tan (2002)
Selon la culture, est ce que l’orientation
stratégique est différente ?
La Perception différente ?
Nationalité
La performance des entreprises
mesurée par la croissance économique
-Processus de décision (participative,
inclusive)
- Planification stratégique
-Structures management
(hiérarchique/égalitaire)
- la communication (verbal/formelle)
Performance (financière )
et
-participation des salariés
-Politique (objectif) claire
-encouragement participation
- mérite et récompense du travail
- résolution des problème long terme/
court terme
- sécurité de l’emploi
- Orientation stratégique
- prise de risque
- innovation
-pro activité
- agressivité
-perception de l’environnement
Groupes de pays
d’extrême orient
36 entreprises en jointventure
Newman et
Nollen(1999)
Les 4 Dimension d’Hofstede + 5eme
dimension : Orientation à long terme
- Relations
à l’environnement
- relations interpersonnelles
- Le Mode activité
- Le rapport au Temps
- cognition
Les 5 dimensions d’Hofstede(1993)
Trompenaars et
Woolliams
(2003)
Comment résoudre les tensions et pour
s’adapter à la culture ?
-Rapports entre les employés dans
l’entreprise
- rapports hiérarchiques
- perception de l’organisation par le
personnel
Lu et Lee (2005)
Les différence culturelles entraînent elles des
styles de management différentes?
-distance hiérarchique
- individualisme
- Niveau de formalisation
- niveau de centralisation
-Supervision style(stress taskoriented)
-Prise de décision
(centralisée/participative)
-Communication (direct/indirecte)
-Mécanisme de contrôle (fort et
autoritaire ou faible)
-Orientation paternaliste (+/-) par
rapport aux employés
Résultats
Confirme Hofstede, mais le
contexte national l’emporte
sur les prédispositions
culturelles.
Oui, mais de façon différentes
selon la culture (pas de
convergence)
oui
oui
18 pays
La performance est d’autant
plus grande que le
management est en harmonie
avec la culture
2 pays- 110
entrepreneurs aux EtatsUnis en en Chine
(chinois-américains
/caucasien-américains
et chinois)
Oui, mais le contexte national
prends le pas sur la culture
d’origine
Echantillon de 5500
employés dans
plusieurs pays
4 styles de management
(missile guidé, familial,
incubateur et tour Eiffel) avec
6 scénarios de tensions
fonction de la culture.
82 managers au Japon
et Taiwan
oui
28
Tableau V : Caractéristisques des entreprises interviewée
Entreprises (nombre)
Effectif
Age (années)
5
4
Informatique (3)
11-5- 4
3-4 et 5
Electronique (1)
3
2
Transport (1)
3
4
Ecole de formation (1)
12
4
Mécanique auto (2)
4-3
3-2
Cyber café (2)
3-3
2-4
4
3
Installations techniques (1)
Agence immobilière (1)
29
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