Etel 2007 : la NEV descend de la montagne!
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Etel 2007 : la NEV descend de la montagne!
EAUVIVE 6/12/07 14:03 Page 1 N AGE EN EAU VIVE Etel 2007 : la NEV descend de la montagne! Habituellement, les manifestations de nage en eau vive (descentes et slaloms) se déroulent sur les torrents de classe 3 à 5 dans les Alpes, le Massif Central ou les Pyrénées. Depuis deux ans maintenant, la commission nationale de nage en eau vive, la CNNEV, couvre aussi les rivières et plans d’eau de classes 1 et 2. Et cette année, pour lancer de façon significative l’activité, la CNNEV avait décidé d’organiser à Etel (56), en bord de mer, sur la rivière d’Etel le 1er critérium national des classes 1/2. Un récit de Yann Salaün. E ntre Lorient et Quiberon, la ria d’Etel est une rivière de “carte postale”. La chapelle de Saint Cado, la petite maison bleue sur l’îlot à côté, les remous du Pont Lorois, la barre d’Etel sont autant de sujets qui méritent le détour et attirent les visiteurs. La ria d’Etel, c’est aussi une rivière maritime parsemée d’îles autour desquelles fuse un courant puissant, surtout avec une marée de 106 !, et, en conséquence, dans laquelle la navigation compte autant que le palmage. Il faut être capable de palmer pour aller vite aux bons endroits, il faut choisir les bons passages avec les courants… dans le bon sens. En fait, c’est la rivière de classe 1 à 2 idéale pour réunir, d’une part, les habitués des torrents et de la navigation entre les rochers et d’autre part, les costauds de la palme, adeptes des rivières “calmes” de la région parisienne ou de la Loire. Si, sur les 50 coureurs inscrits, certains avaient décidé de venir et de descendre cette rivière pour des motifs touristiques ou gastronomiques, la majorité était venue pour en découdre et si possible, pour inscrire son nom à la première édition nationale de NEV classes 1/2. Mais qui allait l’emporter ? Les locaux de Vannes, habitués des lieux, faisaient figure de favoris, les Parisiens avaient l’avantage du nombre sans rogner sur la qualité. La région Centre avait déplacé ses meilleurs éléments. Il ne manquait que les 80 Bordelais, champions de France de NEV classes 3/4 à Thonon cette année. Le parcours entre la vieille chapelle de Ste Hélène et la pointe Pordic après la cale SNSM à Etel fait 7 km et, avec une marée descendante et un coefficient de 106, les organisateurs prévoient un temps de 45’ pour les premiers. Dès le départ, Denis Villette d’Orléans, comme à son habitude, démarre “au sprint”. Si l’on veut gagner, il ne faut pas le laisser partir car il a les ressources pour aller jusqu’au bout. Derrière, Fabrice Gault de Gien, Raphaël Gutierrez de Melun, Julie Dessagne de Courbevoie et Thierry Ravoisier de Sarcelles réagissent et accélèrent eux aussi pour rester au contact, dans le premier groupe. Quant aux Vannetais, surpris par ce départ ultrarapide, ils gèrent leur retard en partant sur la droite du plan d’eau. Vont-ils trouver la veine miracle qui va les ramener sur la tête de course ? Pendant ce temps, Raphaël Gutierrez est passé en tête et Yann Salaün de Viry Chatillon a recollé au premier groupe. Derrière, l’heure n’est plus à la plaisanterie, il faut “y aller” et les coureurs sont sur toute la largeur de la rivière, chacun cherchant la direction la plus favorable et essayant de trouver le bon palmage dans un clapot naissant. Au passage en S au Pont Lorois, sous le regard des nombreux curieux et supporteurs venus profiter du spectacle, Raphaël Gutierrez, habitué de la nage en eau vive, passe superbement les courants très forts à cet endroit-là et prend une vingtaine de mètres d’avance sur le premier groupe. Il n’hésite pas à rallonger sa route en restant dans la veine principale pour garder le maximum de vitesse et ainsi gagner du temps sur ceux qui sont tentés de couper et qui tombent ainsi dans le contrecourant. Sur la ria d’Etel, la ligne droite n’est pas forcément la plus courte, beaucoup vont le découvrir à leurs dépens ! Sur le pont, les spectateurs sont impressionnés par la maîtrise de ces flotteurs qui défilent à grande vitesse parmi les remous et autres marmites. À la sortie du S, dans la grande ligne droite de l’arrivée (2 km), Raphaël Gutierrez accélère encore, il augmente son avance et il ne sera plus rejoint. Il franchit détaché la ligne d’arrivée en 47’ 19”. Derrière, les 5 coureurs du premier groupe se sont regroupés, pour mener la chasse ou pour se marquer ? Les autres sont loin et la deuxième place va se jouer entre ces cinq coureurs. Devant le port d’Etel, Denis Villette et Fabrice Gault lancent le sprint. Alors que le groupe est resté au centre de la rivière, Yann Salaün tente de passer à gauche et de profiter des courants du port. Ça ne suffit pas, il repart à droite de la rivière et remonte Thierry Ravoisier et Julie Dessagne. Devant, Denis Villette et Fabrice Gault gardent une longueur d’avance et arrivent dans cet ordre. Ces cinq coureurs arrivent en 10 secondes, mais une minute après le premier… Derrière, Alexandre Bru de Viry Chatillon, à l’issue d’une course sage mais bien dosée, prend une excellente septième place et Annie Michel de Vannes, deuxième féminine, et première locale, prend la neuvième place. Ensuite, les arrivées vont s’enchaîner et les derniers arriveront vingt minutes seulement après le premier, démontrant ainsi le bon niveau de ce premier critérium national flotteurs. Bravo à Raphaël qui a montré sa grande condition physique et sa science de la navigation. Bravo à Julie qui confirme ici son titre de championne de France de NEV descente classe 3/4. Bravo à la famille Maignant d’Argenteuil qui classe le père Pascal, le fils Xavier et la fille Marlène (1er jeune) dans les quinze premiers. Bravo aussi à Mélanie Dumont de Corbie (2e jeune) qui se classe 18e. Bravo à Gérard Lafosse de Noisy qui à 70 ans termine 14e de cette course très relevée. Bravo enfin à tous d’avoir été là car les absents ont eu tort. Merci au CN Etel (Patrick Barbeau, Philippe Guhel et leurs équipes) pour sa parfaite organisation de la course et de la logistique associée. Merci aux sponsors qui ont joliment récompensé les coureurs. À l’année prochaine pour le 2e critérium dans les gorges du Verdon. La course, comme si vous y étiez Tout le monde est déjà à l’eau pour s’échauffer en amont de la ligne de départ entre la digue de la vieille Chapelle et la bouée mouillée à quelques encablures dans le courant descendant. Et moi, je suis toujours sur le bord en train de répondre à la journaliste d’Ouest France. “Départ dans cinq minutes”, annonce le juge starter. Entre le stress du départ et mes obligations d’organisateur, j’aurai une bonne excuse pour ne pas être premier. Enfin, j’arrive à enfiler mes palmes et à me rapprocher de la ligne de départ. “Départ dans deux minutes”. Ce n’est pas assez pour chauffer ma vieille carcasse mais il faudra faire avec. Où prendre le départ ? Près de la cale, ce sera JANVIER-FÉVRIER 2008 - N° 216 SUBAQUA EAUVIVE 6/12/07 14:03 Page 2 dégagé mais le courant est moins fort. En milieu de ligne, ça va être embouteillé, on va se palmer dessus ! Si je prends à l’extérieur de la ligne, je devrais être seul. Ce sera plus long mais le courant sera plus fort et au bout de cinq cents mètres, je serai gagnant. Ça y est, c’est parti. Évidemment, tout le monde a pensé comme moi et je suis entouré de nageurs fous. On dirait un banc de thons en train de manger des anchois. Çà éclabousse de partout. Ça joue des coudes et du flotteur. On ne voit plus rien. C’est vers où l’arrivée ? Pour être dégagé, il faudra repasser. Il y en a 2, des Parisiens, je crois, devant moi qui me font “bouffer” leurs gerbes d’eau. À gauche, c’est Emmanuel Lussac, un Vannetais qui palme bien et qui me colle (à moins que ce ne soit moi qui le colle). À droite, légèrement en retrait, il y a Pascal Maignant qui m’empêche de passer. De toutes les façons, c’est vers la gauche, vers le courant qu’il faut aller. Ce n’est pas le meilleur départ que j’ai pris et de loin ! De plus, je vois Raphaël Gutierrez qui me remonte comme une fusée pour rejoindre les premiers. Je reconnais devant Fabrice Gault et Denis Villette qui sont déjà en tête avec une dizaine de mètres d’avance. Écœurant ! J’avais envie de gagner, c’est mal parti mais je ne vais quand même pas me laisser faire comme çà. Il faut que je me débarrasse de mes voisins. D’abord, m’écarter du Vannetais pour arrêter de le traîner. Pas facile, il me tient bien, le bougre. J’ai du mal à trouver mon souffle, respire Yann et accroche-toi. Ça y est, il faiblit, enfin, il est décollé. Maintenant, à Pascal, ça va être plus dur. Il faut que je prenne un peu d’avance vers la droite, tant pis pour le courant. Il faut aussi que je traverse le sillage de ceux qui me précèdent. Je reprends mon 20e (au moins !) souffle et au bout d’une minute, Pascal est derrière moi. Ça y est, je suis enfin en eau libre, mais les autres, c’est-à-dire les premiers, sont bien à 20/30 m devant moi. Je reconnais devant Thierry Ravoisier, notre président toujours gaillard, et Julie une sacrée battante. Il y a un trou entre eux et moi. Il ne faut pas que je les laisse partir, sinon, je ne les reverrai pas et encore moins les premiers. D’abord me reconcentrer et soigner mon palmage : jambes tendues, souples, bien respirer, bonne position sur le flotteur. Ça c’est la théorie car dans la pratique, j’ai mal aux jambes et le souffle court. Je ne pourrai pas tenir comme ça pendant toute la course. Accroche-toi car eux non plus ne doivent pas être à l’aise dans leurs palmes. Ça doit commencer à tirer pour tout le monde. Que faire ? Si je reste comme ça, je ne vais pas les rattraper. De plus, où sont les Vannetais ? Ils ne sont pas en tête mais ils connaissent le parcours. Par où vont-ils passer pour nous rattraper ? Sur la droite, ils sont sur la droite à 50 m de là, légèrement en retrait mais ils vont vite. Alors que nous avons choisi de partir sur la gauche, sur la rive sud-est de la rivière, ils passent par la rive droite, nord-ouest. Ils vont sûrement nous rattraper en face de Saint Cado. Je me souviens qu’ils voulaient raser la perche rouge en face de St Cado. Il doit y avoir du courant par là, sur la droite. J’abandonne le groupe de tête que je n’avais pas vraiment rejoint pour marquer les Vannetais. Je me mets entre la perche rouge et le groupe de Vannetais et je palme, je palme… Enfin la perche rouge, je m’aperçois que le groupe de tête est toujours là. Je n’ai rien perdu sur eux et les Vannetais sont décrochés. Il faut maintenant que je suive, voire que je me rapproche du groupe de tête. Ils SUBAQUA N° 216 - JANVIER-FÉVRIER 2008 sont cinq. Je suis donc sixième. Peut mieux faire, Yann ! Accroche-toi. Le courant nous fait accélérer. Le S du pont Lorois est proche et je suis les palmes de Thierry Ravoisier. C’est quand même notre maître à tous en matière de navigation. Donc, si j’arrive à limiter les dégâts dans ce passage, peut-être que… Étonnant ce courant, on serpente à la queue leu leu à six/sept nœuds entre les îles et les rochers. On se croirait sur l’Ubaye dans un championnat de France de descente NEV. Il ne faut surtout pas essayer de sortir de la trajectoire du courant, sinon, on est bons pour les contre-courants et le coup de frein. Les vagues nous poussent comme des jouets. Pas le temps de regarder si ma famille est là. Pas le moment de faire des sourires aux jolies filles qui doivent sûrement nous admirer du haut du pont. Attention à la marmite à gauche, pas trop près de la digue à droite. La rive défile à toute vitesse et voici la grande ligne droite de l’arrivée. Ce n’est pas encore le sprint mais si je veux gagner quelques places, c’est maintenant qu’il faut faire l’effort. J’avais déjà dit ça au début de la course… D’abord, partir sur la droite du plan d’eau, c’est là qu’il y a encore quelques restes de courant du passage du Pont Lorois. Évidemment, Thierry fait pareil. Il part même avec Fabrice et Julie un peu trop à droite et je les vois ralentir : ils sont dans un contre ! Je fonce à gauche et j’accélère mes battements. Ça y est, je les rattrape, je les passe. Ils sont derrière. À moi la quatrième place, peut-être même la troisième ! Mais c’est maintenant moi qui suis dans un contre, c’était trop beau. Tranquillement, ils me repassent et j’ai toujours le même retard. Je repars à droite avec eux pour ne pas me faire distancer et surtout, pour ne pas me faire rattraper par l’arrière. On ne sait jamais avec les Vannetais, ils ont peut-être une dernière veine de courant cachée dans leur flotteur. Voilà le port d’Etel, l’arrivée est à 500 mètres. C’est devant qu’il faut regarder. Il faut s’arracher et ne plus regarder le cardio. Julie et Thierry piquent vers la gauche pour se rapprocher de la rive. Moi, je repars à droite mais pas trop, je reste dans le centre de la rivière et je lance le sprint. Le courant est le même pour nous trois. Ce n’est pas avec lui que je vais les passer. Je vois Thierry qui a le souffle court mais qui continue à palmer. Je ne suis pas mieux mais c’est le money time. J’arrive à trouver un peu d’air, les palmes sont dures et je mouline autant que faire se peut. Il ne lâche rien et c’est Julie qui fléchit. Thierry et moi nous en rapprochons. La ligne est entre le bateau et la terre. Plus que 100 mètres. Encore un, deux, trois efforts… Ça y est, je passe Thierry et dans la foulée, si je puis dire, je double Julie. Fabrice Gault est là à portée de palmes. S’il s’effondre, je le passe mais il a du métier, le diable. Encore quelques mètres. La ligne est franchie mais je ne regarde pas, ni en arrière, ni sur le côté. Je continue à palmer des fois que Thierry ou Julie me passent sur la ligne. Enfin, ça y est, j’arrête de palmer. Je suis quatrième. On se traîne jusqu’au bord. Raphaël Gutierrez et Denis Villette sont déjà là et nous attendent en refaisant la course. J’ai du mal à m’asseoir et à enlever les palmes. Mais il faut faire bonne figure devant les curieux, les amis et les familles qui sont là, tout heureux de retrouver. J’arrive à me lever et à sortir de l’eau pour attendre “au sec” l’arrivée de mes camarades de club. Les courses en flotteur, c’est génial, surtout quand il y a la bagarre, surtout quand on passe les autres et surtout, surtout… quand on est arrivé ! À plus tard, sur une autre descente. ■ Extrait du classement scratch: 1er, Raphaël Gutierrez, Melun, V H , 47’ 19”. 2e, Denis Villette, Orléans, VH, 48’ 13”. 3e, Fabrice Gault, Gien, SH, 48’ 18”. 4e, Yann Salaün, Viry Chatillon, VH, 48’ 21”. 5e, Julie Dessagne, Courbevoie, SF, 48’ 23”. 6e, Thierry Ravoisier, Sarcelles, VH, 48’ 24”. 7e, Alexandre Bru, Viry Chatillon, SH, 48’ 53”. 8e, Annie Michel, Vannes, VF, 49’ 11”. 9e, Pascal Maignant, Argenteuil, VH, 49’ 24”. 10e, Xavier Maignant, Argenteuil, SH, 49’ 44”. 81