CRITERES ET DEMARCHES DE CHOIX POUR LES

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CRITERES ET DEMARCHES DE CHOIX POUR LES
CRITERES ET DEMARCHES DE CHOIX POUR
LES DESINFECTANTS ET LES
ANTISEPTIQUES
Agents
antiinfectieux
GIRARD R, Pierre Bénite
Mai 2004
Objectif
Le choix des produits antiseptiques et désinfectants est déterminant. Cette fiche rappelle les étapes clés
d'un choix satisfaisant, du point de vue du CLIN. Les contraintes légales et administratives ne seront pas
développées ici.
Techniques et méthodes
I - DEFINITION DES OBJECTIFS
1) Ciblage de l'utilisation du produit
La première étape consiste à définir le produit à acheter selon le ou les usages prévus et les utilisateurs. On
définit ainsi des rubriques : désinfectants (D) et détergents désinfectants (DD) pour sols et surfaces,
désinfectants pour les Dispositifs Médicaux (DM), désinfectants pour les mains des soignants, antiseptiques
pour les muqueuses etc… Le guide de désinfection des DM du Ministère de la Santé propose un classement
de ce type.
2) Identification des besoins et des contraintes
Pour chaque groupe de produits, il faut définir, en fonction des recommandations :
- le niveau de désinfection ciblé (bas niveau, niveau intermédiaire ou élevé),
- les contraintes de temps, de matériels,
- les produits associés dans le même usage,
- les notions de toxicologie,
- les besoins pour la période couverte par le marché.
Pour que cette étape soit complète, il est nécessaire de faire appel aux utilisateurs.
II - REDACTION DU CAHIER DES CHARGES
La rédaction du cahier des charges formalise les informations recueillies à l'intention de l'agent administratif
chargé de la rédaction de l'appel d'offres, et permet de les exprimer sous une forme normalisée, en
spécifiant les exigences et les préférences.
Différents aspects sont inclus:
1) Exigences d'activité et d'efficacité
Le Comité Européen de Normalisation définit les exigences d'activité attendue pour les produits destinés à la
désinfection. Pour certains domaines, comme les mains, l'ensemble des étapes de validation est prêt, mais
pour d'autres domaines, l'utilisateur est encore obligé d'associer d'anciennes normes.
Il est important d’exiger :
une activité de base in vitro, sur les micro-organismes correspondants au niveau de désinfection ciblé (cf.
tableau I),
une activité maintenue en présence des substances interférentes attendues lors de l'utilisation,
une activité en condition modélisant l’usage.
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Tableau I : Objectifs de désinfection par groupe de désinfectants
Usage
Classement de
l'usage
Niveau de risque
infectieux
DD ou D sols et
surfaces
DD usage
alimentaire
Non critique
Risque bas
DD instruments et
D instruments
Semi-critique
Risque médian
D instruments
Critique
Risque élevé
Niveau de
Cibles
désinfection /
stérilisation
Désinfection de bas Virus de taille
niveau
moyenne et virus
lipidiques
Bactéries
végétatives
Désinfection de
Bactéries
niveau
végétatives
intermédiaire
Fungi
Virus (tous)
Mycobactéries
Stérilisation ou si
Bactéries
impossible
végétatives
désinfection de
Fungi
haut niveau
Virus (tous)
Mycobactéries
Spores
bactériennes
2) Exigences ou informations sur la tolérance
Pour les désinfectants classiques, destinés au matériel, se référer aux données toxicologiques, disponibles
sur les fiches de sécurité.
En ce qui concerne les antiseptiques et les désinfectants destinés aux mains des soignants, il n'existe pas
de norme utilisée par tous les laboratoires permettant de comparer la tolérance des différents produits
proposés. Le choix du meilleur produit repose sur des essais (suffisamment longs pour être discriminants),
sur l’expérience d'autres établissements utilisateurs et sur les données recueillies lors du suivi par la
médecine du personnel.
3) Compatibilité avec le matériel et les autres produits
De nombreux matériaux sont incompatibles avec certaines molécules (exemple : le plexiglas des
incubateurs est incompatible avec de nombreux produits). Les compatibilités exigées avec les matériaux et
les autres produits doivent donc être répertoriées.
4) Présentations, conditions de conservation
La politique de l'établissement en matière de distributeurs-doseurs muraux, de mono-doses ou d'autres
présentations adaptées doit être définie en accord avec le CLIN en fonction des besoins des services
utilisateurs et des procédures écrites.
5) Documents justificatifs
Demander les compte-rendus de normes, la composition détaillée du produit, l'attestation de marquage CE
(les désinfectants utilisés pour les DM doivent avoir le marquage CE), les contrôles de qualité du laboratoire,
les certifications ISO 9000, les modèles d'étiquettes.
6) Echantillons
Le nombre d’échantillons nécessaires doit être défini afin de réaliser un essai réellement discriminant. Les
échantillons doivent être identiques aux produits du marché. Constituer une échantillothèque.
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III - EXAMEN DES DOSSIERS
Cet examen doit être réalisé par des personnes formées. Les points clés (hors vérifications administratives)
sont les suivants :
1) Contrôle de la composition
Permet de prédire certaines incompatibilités non signalées avec des matériaux ou des intolérances
probables (médecin du travail).
Une vérification minimale de l'aspect (couleur, viscosité, pH…) doit être confrontée aux descriptions du
fabriquant (pharmacie).
2) Contrôle de l'activité
Les comptes-rendus des essais de conformité aux normes exigées doivent être méticuleusement vérifiés :
sont-ils fournis et corrects (la relecture d'un compte rendu doit être fait en vérifiant systématiquement la
conformité aux modes expérimentaux normalisés décrits par la norme) ? La concentration active est-elle
inférieure à la concentration d’usage ?
Attention, il est illégal pour un établissement public, d'exiger l'inscription d'un produit sur une liste de produits
recommandés par une société scientifique, telle que la Liste Positive des Désinfectants de la Société
Française d'Hygiène Hospitalière.
3) Toxicité
Toutes les informations sur la tolérance et la toxicité devront être contrôlées par le médecin du personnel ou
un autre expert.
4) Compatibilités – Incompatibilités
Le dossier devra être contrôlé aussi bien sur les aspects négatifs (incompatibilités) que positifs (indications).
5) Présentations, durées de conservation
Vérifier si les présentations sont conformes aux exigences du cahier des charges, maniables, et compatibles
avec les durées de conservation.
6) Etiquettes
Vérifier si les étiquettes indiquent les mentions légales, l'activité et les indications du produit, ainsi que les
dilutions et durées de conservations préconisées. Un produit sans numéro de lot sur chaque présentation ou
dont les indications ou dilutions d'utilisation sont différentes des protocoles de l'établissement ne doit pas
être retenu.
Au terme de cette phase, un certain nombre de produits sont éliminés. Il est inutile de les tester sur
le terrain.
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IV - ESSAIS DES PRODUITS DONT LES DOSSIERS SONT CONFORMES
Les essais permettent d'évaluer les performances qu'il est impossible d'apprécier par d'autres méthodes.
1) Objectifs des essais
L'essai permet de classer les produits proposés et de rejeter les produits inacceptables, sur la base de
critères préalablement définis tels que :
-
la qualité du nettoyage pour les produits détergents désinfectants,
l'absence de traces résiduelles,
l'absence d'altération des matériaux,
la qualité du conditionnement (adapté au besoin, avec ouverture ou fermeture aisée, sans "coulures"),
la clarté et la lisibilité de l'étiquetage,
l'odeur et le caractère volatil,
les différents aspects de la tolérance du produit : tolérance cutanée, respiratoire et oculaire.
2) Organisation des essais
Cette organisation est directement liée aux objectifs : l’évaluation de l’efficacité détergente par exemple est
plus simple et plus rapide à recueillir que la tolérance cutanée ou respiratoire d'un produit.
Certains essais pourront être ciblés sur des services précis dans lesquels on a identifié une contrainte
spécifique (exemple détergent-désinfectant pour instruments difficiles à nettoyer), d'autres devront être plus
larges et surtout plus prolongés (savons ou produits de friction par exemple). Comme pour le dossier
technique, certains critères de qualité recueillis sont des exigences et d'autres sont des éléments permettant
de classer les produits comme plus ou moins satisfaisants.
Une personne doit être spécifiquement chargée de l'organisation des essais, de leur suivi, ainsi que de
l'exploitation des données recueillies si on veut obtenir les réponses aux questions posées.
Le planning de l'appel d'offres doit tenir compte de ce temps d'essai.
V - CHOIX FINAL
Pour être retenu, un produit doit obligatoirement être conforme aux exigences ciblées par le cahier des
charges lors de l’étude du dossier technique et à l’issu des essais sur le terrain. Un classement des
différents produits est ensuite réalisé, selon les différents critères étudiés et les prix proposés. Le choix final
se porte sur le "mieux disant".
VI - VIGILANCE
Les désinfectants des DM font l'objet d'une vigilance officielle dans le cadre de la matério-vigilance, et les
antiseptiques avec AMM dans le cadre de la pharmaco-vigilance.
Il est également impératif que chaque établissement instaure un recueil permanent des incidents et
accidents survenus lors de l'utilisation des produits : intolérances, allergies, matériaux dégradés,
incompatibilités entre produits, accidents survenant lors de l'ouverture d'emballages tels que les sachets unidoses etc…
Cet enregistrement repose sur une collaboration étroite entre les services utilisateurs, l'EOH, la pharmacie,
les techniciens bio-médicaux, la médecine du personnel et les services économiques. Les données
recueillies doivent être accessibles pour le CLIN et doivent être prises en compte lors des choix ultérieurs de
produits.
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Responsables
Le Clin définit la politique de désinfection et d'antisepsie, en accord avec la pharmacie et les services
économiques, acheteurs. Il participe au choix des produits et facilite l'organisation d'un système efficace de
vigilance.
Les services acheteurs doivent mettre en place une démarche concertée pour le choix des produits
désinfectants et antiseptiques afin de permettre la réalisation de procédures efficaces et de minimiser les
incidents et accidents.
La médecine du personnel est responsable du suivi des phénomènes de toxicité et d’intolérance ainsi que
de leur transmission aux acheteurs.
Evaluation
Différents niveaux d'évaluation sont nécessaires :
- Suivi : l'intégration dans le bilan annuel des incidents, accidents et problèmes d'intolérance permet un suivi
à long terme des produits et des procédures.
- Qualité : des études périodiques d'évaluation doivent être programmées afin de réajuster la connaissance
des besoins.
Pour en savoir plus
Références
Société Française d'Hygiène Hospitalière. Liste positive désinfectant 2003. HygieneS 2003; XI, 3: 207-2223.
(NosoBase n°3721). Mise à jour annuelle : http://sfhh.net
Guides et recommandations officiels
COMITE TECHNIQUE NATIONAL DES INFECTIONS NOSOCOMIALES. Désinfection des dispositifs médicaux. Guide
des bonnes pratiques. Ministère de l'Emploi et de la Solidarité, Secrétariat d'Etat à la Santé et à l'Action
Sociale, 1998, 133 pages. (NosoBase n°5832)
Sites internet
PRODHYBASE : base de données sur les produits désinfectants : http://prodhybase.univ-lyon1.fr/
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