Produits préfabriqués en béton filé : Vers l

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Produits préfabriqués en béton filé : Vers l
Produits préfabriqués en béton filé : Vers l’amélioration des performances
du matériau pour mieux gérer le procédé de production
Franck CASSAGNABERE
Laboratoire Matériaux et Durabilité des Constructions (LMDC) – INSA, Université
Paul Sabatier - Toulouse – 135 avenue de Rangueil - 31 400 TOULOUSE Cedex 4
RESUME. L’industrie de la préfabrication est actuellement en pleine phase de mutation en raison de i) l’apparition de
normes européennes basées sur des approches performantielles, ii) l’impératif de produire plus écologique, iii) l’émergence
de constituants novateurs comme le métakaolin. Dans ce contexte, le travail de thèse a pour objectif d’améliorer et
d’approfondir les connaissances sur les propriétés du béton filé et par conséquent sur la qualité du produit fini (poutrelles et
dalles alvéolées).
MOTS-CLÉS : préfabrication, béton étuvé, métakaolin.
ABSTRACT. Precast industry is actually faced with i)the appearance of European standards based on performential
approach, ii) an environmental production iii) the emergency of new constituents (metakaolin). In this context, the objective
for the research consists in improving and deepening the knowledge on concrete specifically used for prestressed beams and
hollow core slabs.
KEYWORDS :precasting industry, steam cured concrete, metakaolin.
1.
INTRODUCTION
La préfabrication d’élément précontraint par fil adhérent de la société SEAC-Gf (poutrelles ou
dalles alvéolées) nécessite un process très rigoureux. Ce procédé d’industrialisation s’articule en sept
étapes.
a) Les fils en acier « à haute limite d’élasticité » sont
tendus sur un platelage (120 m de long) à l’aide d’un
vérin. b) La mouleuse (machine permettant de mettre
en forme les éléments) (figure 1) est placée sur la
piste. c) Le béton est gâché en centrale puis déversé
dans la trémie de la mouleuse. d) La machine avance
en continu sur la piste tout en appliquant au matériau
une vibration lui permettant de s’écouler
gravitationnellement jusqu’aux coffrages glissants
placés en partie arrière. e) Grâce à la consistance
ferme du béton, le démoulage des éléments avec
leurs formes définitives est immédiat. f) Les
éléments sont bâchés et un étuvage est appliqué au
Figure 1 : Mouleuse.
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matériau afin d’accélérer sa maturation. g). À la fin cycle d’étuvage, le béton dispose d’une résistance
suffisante permettant la détension des câbles et donc la mise en précontrainte des éléments.
Le process est basé sur l’utilisation d’un béton qui allie une consistance ferme à l’état frais et des
performances mécaniques élevées à l’état durci. Dans un premier temps, pour assurer une bonne
productivité (rotation journalière), le béton doit posséder une résistance élevée au jeune âge afin de
pouvoir détendre les câbles. Ensuite, il est primordial d’assurer une bonne qualité du matériau à long
terme. Afin d’atteindre ces objectifs, deux solutions sont actuellement retenues :
- l’utilisation d’un ciment CEM I-52,5R, très réactif au jeune âge (notation R) et performant à long
terme (notation 52,5) ;
- l’étuvage qui favorise le développement des performances mécaniques au jeune âge (Pihlajavaara,
1972). Lors de l’hydratation du ciment, la mise en solution des ions, favorisée par la hausse de
température, réduit la période dormante. Il s’agit d’une thermoactivation de la réaction d’hydratation.
Cependant, les ciments CEM I-52,5R, en raison de leur teneur en clinker élevée (95% avec la
notation CEM I), engendre un effet néfaste sur l’environnement. En effet, pour la production d’une
tonne de clinker, une tonne de CO2 est rejetée dans l’atmosphère lors de la phase de décarbonatation
du cru.
Dans ce contexte, des solutions alternatives à l’emploi de tels ciments sont proposées. L’utilisation
couplée de ciment composé de type CEM II-52,5N et de métakaolin (MK) est une piste à envisager.
En effet, le MK est une argile (kaolinite) calcinée dont la production ne génère pas de CO2 [Eq.1]
(Gartner, 2004) et dont l’utilisation dans les bétons pourrait être généralisée.
Al2O3, 2SiO2, 2H2O → Al2O3, 2SiO2 + 2H2O
[Eq.1]
Mélangé au ciment, ce composé possède de très bonnes propriétés pouzzolaniques. La réaction
pouzzolanique est une réaction chimique en solution entre la silice provenant de la dissolution du MK
et l’hydroxyde de calcium (CH) produit par l’hydratation du ciment. Cette réaction donne des C-S-H
(hydrates conférant au matériau sa résistance) qui précipitent (Jones, 2002) et des aluminates de
calcium hydratés. La substitution de MK au ciment reste bénéfique sur des critères de performance
mécanique (Sabir et al, 2001). D’autres caractéristiques sont améliorées du fait de cette substitution :
la durabilité (Courard et al, 2003), les déformations différées (Brooks et al, 2001)…
L’objectif de cet article est de présenter le comportement de la partie liante des matériaux au
travers des mélanges étuvés composés de ciments et de MK. Dans un premier temps, l’évolution du
comportement mécanique des mélanges est mis en évidence sur mortiers. Dans une deuxième partie, à
partir de l’étude de la microstructure, des explications sont données sur les augmentations de
performance dues à l’incorporation de MK. Dans une troisième partie, le bilan environnemental du
rejet de CO2 relatif aux mélanges est dressé et montre l’intérêt de ces solutions alternatives.
Finalement, la dernière partie présente la validation en usine, dans les conditions réelles de production,
des résultats de laboratoire.
2.
2.1.
ESSAIS EN LABORATOIRE
MATERIAUX, COMPOSITIONS ET CURE
Les constituants. Trois ciments sont utilisés dans cette étude : deux ciments CEM I-52,5R (C1 et
C2) avec des compositions chimiques différentes (rapport C3S/C2S) et un ciment composé (82% de
clinker et 18% de laitier) CEM II-52,5N-S (C3). Deux additions pouzzolaniques à base de métakaolin
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et renfermant des teneurs en quartz variables (MK1 et MK2) sont employées. Les caractéristiques des
ciments et des additions minérales sont résumées dans les tableaux 1 et 2.
Les mélanges. Deux types de mélanges sont gâchés. Pour mettre en évidence les évolutions de
performance relative à l’incorporation de MK dans la matrice, des mortiers sont confectionnés avec les
trois ciments. Leurs compositions sont calquées sur celle d’un mortier normalisé (NF EN 196-1) dans
lequel on effectue des substitutions massiques (0-12,5-25%) de ciment par MK1. Pour expliquer ces
évolutions d’un point de vue microstructural, des pâtes de ciment sont gâchées avec C1 et C3 avec ou
sans substitution de MK1. Les dosages des mélanges sont consignés dans le tableau 31.
C1
C2
Type
CEM Ia)
CEM Ib)
Classe
52,5
52,5
Réactivité
R
R
Finesse (cm2/g)
4200
4322
% de clinker c)
97
99
% d’addition c)
3 (LL)
1
Composition de
Bogue du clinker c)
C3S
62,0
58,9
C2S
10,2
14,2
C3A
8,1
9,3
C4AF
8,4
6,9
Gypse c)
5,0
5,5
a)
clinker 1, b) clinker 2, c) % massique
C3
CEM IIb)
52,5
N-S
4241
82
18 (S)
58,9
14,2
9,3
6,9
3,5
Tableau 1 : Propriétés et compositions des ciments.
M(1,2,3)-0%
M(1,2,3)-12.5%
M(1,2,3)-25%
C1, C2, C3
450,00
393,75
337,50
MK1
/
56,25
112,50
Sable
Eau
1350
225
Tableau 3 : Proportions des mélanges pour
une gâchée (g) : Mortiers.
Oxydes (% massique)
SiO2
Al2O3
Fe2O3
CaO
MgO
Na2O
K2O
SO3
Perte au feu
Passant 10µm (%)
Passant 2µm (%)
Surface spécifique (m2/g)
Teneur en quartz (%)
Teneur en MK (%)
MK1
58,1
35,1
1,2
1,2
0,2
0,1
1,1
0,3
1,9
50
12
18
12
76
MK2
68,7
25,7
2,3
0,7
0,02
0,1
0,2
/
0,8
10
/
/
38
60
Tableau 2 : Propriétés des MK.
P(I,III)-0%
P(I,III)-25%
C1, C3
MK1
500
/
375
125
Eau
175
Tableau 4 : Proportions des mélanges
pour une gâchée (g) : Pâtes de ciment.
Etuvage et cure. Après la mise en place des matériaux dans les moules, les échantillons subissent
un traitement thermique moyen issu de relevés de température accomplis sur différents sites. Le
« cycle d’étuvage standard » se compose d’une préprise (2,8h à 30°C), d’une rampe avec une
croissance constante (10°C/h), d’une stabilisation (12,5h à 55°C) et d’une diminution de température
en atmosphère ambiante. Après le démoulage, les éprouvettes de mortier et de pâte de ciment sont
immergées dans l’eau à 20°C pour assurer une hydratation maximale à long terme.
Essais et analyses. Les essais de résistance en compression sur mortier (selon NF EN 196-1) sont
effectués à l’aide d’une presse de 200 kN pilotée en force à deux échéances : 1 jour, correspondant à la
détension des câbles, et 28 jours, pour un contrôle de qualité.
Après l’arrêt de l’hydratation par lyophilisation, trois procédés d’investigation concernant la
microstructure sont mis en œuvre. Ces essais s’effectuent sur des poudres issues des pâtes de ciment
broyées à 40µm. L’analyse par diffraction des rayons X (DRX) permet de visualiser les phases
cristallisées (anhydres ou hydratées) présentes dans la matrice. Elle permet aussi de suivre des
1
Les compositions des bétons, (partie « 4. Validation sur les bétons en usines ») ne sont pas communiquées pour
des raisons de confidentialité
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évolutions semi-quantitatives. Par exemple, l’avancement de la réaction pouzzolanique peut être suivi
par la consommation de la Portlandite (CH). L’analyse thermique différentielle (ATD) (Saikia et al,
2006) complète l’analyse DRX car en plus de qualifier les phases cristallisées, elle permet de
distinguer les phases amorphes comme les C-S-H (hydrates conférant majoritairement la résistance
aux matériaux cimentaires). Finalement, l’analyse thermogravimétrique (ATG) permet de quantifier
certaines phases hydratées grâce à la perte de masse engendrée par le départ d’eau des hydrates lors de
l’accroissement de température. Le positionnement des courbes ATG entre elles renseigne donc sur la
réactivité des mélanges étudiés.
2.2.
RESULTATS
2.2.1.
Résultats mécaniques
Le tableau 5 présente les résultats des résistances en compression obtenus sur les mortiers témoins
(0%) et avec MK1 (12,5-25%).
1/28 jours
1/28 jours
Valeurs de référence
39,3/54,1
M1-12.5%
M1-25%
48,9/54,4
50,5/57,5
M1-0%
40,2/55,5
M2-12.5%
44,7/48,3
M2-0%
M3-0%
33,6/47,6
27,5/42,5
M2-25%
M3-12.5%
M3-25%
47,1/51,0
41,3/47,1
44,3/48,3
Tableau 5 : Résistance en compression moyenne des mortiers étuvés à 1 et 28 jours (MPa).
A partir de ces valeurs, on introduit une résistance relative notée RSj(i). Cette valeur s’appuie sur
des valeurs de résistances de référence à 1 et 28 jours établies sur trois ciments répondant aux critères
d’exigence de la préfabrication. La figure 2 présente le calcul et les valeurs pour les différents
mélanges de RSj(i).
1,4
1,28
1,20
1,13
1,14
0,89
0,87
0,79
0,89
0,70
0,8
0,7
0,6
référence
0%
12,5
M1-...
25%
0%
12,5
M2-...
R c Re ference ( i ) [Eq.2]
RSj(i) est la résistance
relative du mélange j à i
jours
1,05
1,06
0,9
Rc j ( i )
où :
0,94
1,24
1,01
0,86
0,88
1,0
1,02
1,03
1,1
RS j ( i ) =
28 jours
1,2
1,0
1,0
Résistance relative RSj (i)
1,3
1 jour
25%
0%
12,5
M3-...
25%
Rc j (i) est la résistance en
compression du mélange j
testé à i jours (MPa)
Rc Référence (i) est la
résistance de référence en
compression à i jours
(MPa)
Figure 2 : Résistance relative RSj (i) des mortiers.
Les premières constatations sont faites sur les résultats concernant les mélanges composés
uniquement de ciment (M1-0%, M2-0%, M3-0%).
i) Le ciment C1 est un ciment approprié à la préfabrication car il est très réactif (RSM1-0%(1) = 1,02)
et reste performant à long terme (RSM1-0%(28) = 1,03).
ii) Le ciment C2 est un CEM I peu intéressant pour la préfabrication car il possède une faible
réactivité (RSM2-0%(1) = 0,86).
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iii) Le ciment C3 est encore moins intéressant vis à vis de la préfabrication car il présente des
problèmes sérieux de réactivité (RSM3-0%(1) = 0,70) et de qualité à long terme (RSM3-0%(28) = 0,79).
Lors de l’incorporation de MK1 dans les mélanges, diverses observations peuvent être faites.
i) Cette incorporation, dans une matrice cimentaire étuvée, améliore les performances mécaniques
quel que soit le ciment utilisé et quelle que soit l’échéance.
ii) Plus le taux de substitution est élevé et plus le développement des performances est observable.
Selon la littérature, l’intervalle optimal de substitution du ciment par du MK se situe entre 20 et 30%
en masse (Sabir et al, 2001).
iii) Au jeune âge, lorsque l’on substitue 25% de MK1 au liant composé (C3), on s’aperçoit que le
liant résultant possède des performances supérieures au critère de référence fixé (RSM3-25%(1) = 1,13).
A 28 jours, l’incorporation de MK1 corrige le manque de performance du ciment C3 et permet de se
rapproche du critère exigé (RSM3-25%(28) = 0,89). Pour obtenir l’équivalence, c’est à dire
RSM3-25%(28) ≈ 1, il est possible d’intervenir sur l’étuvage en diminuant la température maximale du
palier (Cassagnabère et al, 2007).
iv) On remarque que moins le ciment est réactif (C3) et plus l’incorporation de 25% de MK1 est
bénéfique à 1 jour. Pour illustrer cette observation, on compare les résistances relatives des mélanges à
base du ciment C1 (CEM I-52,5R réactif) et celles des mélanges composés du ciment C3 (CEM II52,5N-S peu réactif). Pour le ciment réactif (C1), on observe que RSM1-0%(1) = 1,02 (sans MK1)
évolue à la valeur de RSM1-25%(1) = 1,24 (avec 25% de MK1) soit une augmentation de 21,5%. Pour un
ciment peu réactif (C3), la valeur de RSM3-0%(1) = 0,70 (sans MK1) passe à RSM1-25%(1) = 1,13 (avec
25% de MK1) soit une augmentation de 61,4%.
2.2.2.
Investigations microstructurales pour la compréhension des hausses de performances
La section précédente montre l’intérêt sur le plan mécanique d’incorporer MK1 dans la matrice
cimentaire des bétons étuvés. Par ailleurs, l’association entre le ciment au laitier (C3) et MK1 semble
particulièrement prometteuse. Il est donc nécessaire d’étudier les évolutions physico-chimiques liées à
l’introduction de MK1 si on veut expliquer ces gains performantiels.
La figure 3 présente les diagrammes de DRX réalisés à 1 jour sur les poudres issues des pâtes PI0%, PI-25%, PIII-0%, PIII-25% (tableau 4).
EV
F
E
P
W
Q
A
A
+
BCP
A
+
B
B
P
PA
A Alite C3S
P
PIII-0%
B Belite C2S
C C3A
PIII-25%
E Ettringite
F C4AF
P Portlandite (CH)
PI-0%
PI-25%
5
15
25
35
2θ
θ (° Co)
45
55
65
Q Quartz
V C4AH13
W C3ASH6
Figure 3 : Diagrammes DRX à 1 jour.
Les diagrammes d’analyse par diffraction des rayons X mettent en évidence :
i) la réaction pouzzolanique identifiable par la consommation de la portlandite (CH ou P) lorsque
l’on incorpore MK1 dans la matrice (Wild et al, 1996) ; ce phénomène est observable quel que soit le
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ciment utilisé (CEM I-52,5R ou CEM II-52,5N) ;
ii) l’apparition, grâce à la réaction pouzzolanique, de phases cristallisées néoformées de type
aluminates de calcium hydratés qui sont C4AH13 (V) et C3ASH6 (W) ;
iii) une phase siliceuse cristallisée qui est du quartz (impureté contenue dans MK1).
Mais, cette analyse connait des limites surtout lorsque l’on s’intéresse aux C-S-H, hydrates
responsables de la résistance du matériau qui possèdent une structure nanocristalline, équivalente à
une phase amorphe.
La figure 4 présente les diagrammes d’analyse thermique différentielle (ATD) des poudres
considérées précédemment. La figure 5 présente les courbes d’analyse thermogravimétrique (ATG)
effectuées sur les mêmes poudres.
-1
T1
T2
T3
CH
C 4AH13
C 3ASH 6
-6
CH
C-S-H
PIII-25%
C2ASH 8
-11
CH
PI-0%
C-S-H
C4AH 13
% de perte de m asse
PIII-0%
C-S-H
PIII-0%
PI-0%
C 3ASH 6
CH
C-S-H
PIII-25%
-16
PI-25%
PI-25%
C 2ASH8
Température (°C)
0
100
200
300
400
500
Temperature (°C)
-21
600
Figure 4 : Diagrammes ATD à 1 jour .
50
150
250
350
450
550
650
Figure 5 : Diagrammes ATG à 1 jour.
i) pour l’intervalle de température [110-200°C], il existe une évolution des C-S-H couplée avec
l’apparition de la gehlenite hydratée C2ASH8 ;
ii) d’autres aluminates de calcium hydratés sont produits par la réaction pouzzolanique ; il s’agit de
la phase C4AH13 pour T ≈ 250°C et des hydrogrenats (C3ASH6) pour T ≈ 330°C ;
iii) pour [530-570°C], il apparaît que les constatations sur l’avancement de la réaction
pouzzolanique au travers de la consommation de portlandite (CH) sont confirmés par cette campagne
d’essai.
De la figure 5, on peut conclure que dans l’intervalle de température [110-200°C], la quantité
d’hydrate (plus particulièrement les C-S-H) est plus importante dans les mélanges contenant du MK1.
Ceci s’explique par le positionnement des courbes PI-25% et PIII-25% qui sont situées en dessous de
PI-0% et PIII-0% respectivement. On apprécie donc la quantité d’hydrate néoformé par la réaction
pouzzolanique en comparaison à la quantité d’hydrate issue de la réaction d’hydratation seule.
L’augmentation de la réactivité et des performances à long terme peuvent être partiellement
expliquées par l’augmentation de la quantité d’hydrate néoformé par la réaction pouzzolanique lors de
l’ajout de MK1 dans la matrice cimentaire. Mais, la connaissance des C-S-H issus de l’hydratation
d’un ciment Portland ainsi que les C-S-H issus de la réaction pouzzolanique sont encore à l’étude
(Richardson, 2004).
2.3.
BILAN ENVIRONNEMENTAL
En plus de l’intérêt économique et performantiel de remplacer la partie liante uniquement
composée de CEM I-52,5R par un mélange de CEM II-52,5N-S/MK, l’aspect environnemental peut
être valorisé. Le tableau 6 présente les évolutions de dégagement de CO2 (gaz à effet de serre)
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engendrées par la production d’un mètre cube de mortier dont les compositions sont détaillées dans le
tableau 3.
M1-0%
496
/
Emission de CO2 par m3 de mortier (kg)
Réduction de CO2 / M1-0%
M1-25%
370
-25%
M3-0%
447
-10%
M3-25%
332
-33%
Tableau 6 : Emissions de CO2 des divers mélanges.
Ainsi avec le remplacement d’un CEM I-52,5R par un mélange de CEM II-52,5N avec 25% de MK
en substitution, une économie de 33% de CO2 est envisageable pour un matériau aux performances
quasiment analogues. Il existe donc des solutions alternatives au mode de production actuel qui
respectent mieux l’environnement.
3.
VALIDATION SUR LES BETONS EN USINE
Après des résultats concluants en laboratoire, une phase de validation sur site est entreprise. Ces
essais en usine sont réalisés avec MK2 produit industriellement par la société Argéco Développement
implantée à Fumel (47).
Cette campagne de validation s’effectue en trois étapes. Dans un premier temps, des taux de
substitution jusqu’à 15% de MK2 montrent des résultats satisfaisants sur les performances mécaniques
des bétons préfabriqués (bétons B1 à B5 du tableau 7).
Béton (% de substitution en MK2 )
Témoin
1 jour
Avec MK
Témoin
28 jours
Avec MK
B1 (8%)
34,5
34,5
58,4
56,6
B2 (8%)
37,0
34,3
/
/
B3 (9%)
31,6
30,7
53,4
54,7
B4 (15%)
37,1
39,2
61,0
66,1
B5 (15%)
41,6
39,0
65,9
64,7
Tableau 7 : Résultats de validation sur des bétons confectionnés en usine (MPa).
La deuxième étape consiste à incorporer 25% de MK2 dans le béton d’étude. Les premières
investigations montrent que les performances mécaniques sont légèrement inférieures à celle du
témoin. D’autre part, certaines caractéristiques sont favorables ou équivalentes comme la maniabilité à
l’état frais, certaines propriétés de durabilité et les déformations différées.
i) A l’état frais (figure 6), une tenue de maniabilité au moins quasi équivalente sur les 20 minutes
suivant le malaxage (mesures effectuées au maniabilimètre LCL selon NF P18 452). L’usage de MK2
permet aussi la suppression de l’entraineur d’air dans la formulation (adjuvant utilisé pour faciliter le
filage), ce qui a pour conséquence de diminuer la teneur en air du mélange.
ii) Concernant la porosité (indice de durabilité), les valeurs sont équivalentes : 12,93% pour le
témoin et 13,05% avec l’ajout de MK2. Cependant, les résultats d’absorption d’eau (selon NF EN
13369) montrent que le béton contenant 25% de MK2 possède des valeurs légèrement supérieures au
témoin mais restant dans la limite normative admissible (6%) (tableau 8).
iii) Pour les déformations totales de retrait et sous charge constante (15% de la résistance à 3 jours),
les caractéristiques obtenues sur le béton avec MK2 sont similaires, voire meilleures à celles obtenues
sur le béton témoin (figure 7).
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2000
Maniabilité LCL (s)
60
Teneur en air occlus (%)
B6 Témoin
3,8
B6 avec MK2
2,9
Déformation en (µm/m)
1600
Déformations totales
sous charge
40
1200
Béton B6 Témoin
Béton B6 avec 25%MK2
20
Temps (min)
0
0
10
20
30
40
Figure 6 : Maniabilité LCL du béton B6.
Porosité (%)
800
50
Déformations totales
de retrait
Temps (j)
400
Absorption
NF EN 13369
Témoin
12,93 ± 0,24
4,64 ± 0,13
25%MK2
13,05 ± 0,22
5,06 ± 0,05
Tableau 8 : Durabilité du béton B6.
0
0
20
40
60
80
100
Figure 7 : Déformations différées du béton B6.
Dans un futur proche, la troisième et dernière étape de cette validation consistera à remplacer les
ciments à forte teneur en clinker (CEM I-52,5N) par des mélanges composés de ciment CEM II-52,5N
et de MK2. A terme, cette démarche de formulation participera au développement de nouveaux
matériaux à Haute Qualité Environnementale (HQE) tout en préservant les propriétés actuellement
obtenues.
En premier lieu, je tiens à remercier G. Escadeillas (Professeur des Universités, Directeur du LMDC
Toulouse), M. Mouret (Maître de conférence, LMDC Toulouse), P. Broilliard (Ingénieur de
recherche, SEAC-Gf) pour avoir encadré mon travail de recherche. Je remercie aussi l’entreprise
SEAC-Gf et l’Association Nationale pour la Recherche Technique (ANRT) pour le financement de
cette étude.
4.
BIBLIOGRAPHIE
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