La deuxième guerre punique (219-204) A l`issue de la première

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La deuxième guerre punique (219-204) A l`issue de la première
La deuxième guerre punique (219-204)
A l’issue de la première guerre punique la paix régna 23 ans, paix durant laquelle
Rome s’empara de la Sardaigne et s’engagea dans de grandes entreprises dans l’Adriatique
contre les pirates Illyriens et au nord contre les Gaulois. Deuxième guerre punique qui va
durer 17 ans et Hannibal fut à deux reprises en 216 et 212 très proche de la victoire
définitive et se maintient 15 ans en Italie. Hannibal développe des vues politiques et
stratégiques nouvelles et originales qui en font sans doute le deuxième grand stratège de
l’histoire militaire après Alexandre le Grand, suivi par Scipion l’Africain puis par Jules
César.
Fin politique, grand général, Hannibal est pourtant vaincu. Pourquoi ? Car les
objectifs de guerre étaient différents : politique italienne d’Hannibal qui vise à séparer
Rome de ses alliés italiens, apportant la liberté aux Italiens et en ne faisant la guerre qu’aux
Romains. Refus effarant de Rome de signer un traité après la défaite de Cannes : Discours
d’Hannibal : « il ne fait pas aux Romains une guerre d’extermination, et ne combat que
pour la dignitas et l’imperium ». Bref, renverser à son profit les traités humiliants de 241 et
de 236. Carthage désire retrouver sa puissance d’autrefois et laver l’affront qui lui a été
fait. Objectifs limités de Carthage au retour de la situation antérieure. Objectifs de Rome
différents : il s’agit d’une guerre totale pour laquelle on accepte tous les sacrifices, on
supporte toutes les horreurs de la guerre et l’extermination d’une grande partie de la
jeunesse romaine. Carthage n’est pas prête à tous les sacrifices car pour elle il ne s’agit pas
d’une guerre à mort, mais vaincue, elle verra que les Romains ne songeaient qu’à son
extermination pure et simple.
Rome dût sa survie aux énormes ressources en hommes dont elle disposait et à la
persistance d’un solide réseau des colonies latines. La défection de Capoue, en Campanie,
représente l’exemple même des tensions qui déchiraient les alliés de Rome.
I- Les événements :
Après avoir maté les mercenaires révoltés en 237, Hamilcar Barca emmena les
survivants en Espagne pour entreprendre la conquête du royaume de Tartessos et profiter
ainsi des mines d'argent des montagnes andalouses et entreprendre une colonisation
agricole. Cette politique expansionniste est poursuivie par son gendre, Hasdrubal, et par
son fils, Hannibal Barca. Rome, inquiète des possessions de Carthage en Espagne songe à
donner un coup d'arrêt aux conquêtes puniques et envoie un émissaire à Hasdrubal en 226
pour fixer l'Ebre comme limite septentrionale à ne pas franchir. En 219, Hannibal fait le
siège de la ville de Sagonte ce qui déclenche la guerre. Hannibal, qui s'était préparé depuis
longtemps à cette éventualité, prend l'initiative à la grande surprise des Romains. Ces
derniers s’étaient préparés à une guerre semblable à la précédente et avaient établi un plan
qui consistait à frapper les Carthaginois en Espagne et en Afrique. Les Carthaginois, suite
au traité de paix de 241, ne disposaient plus d’une flotte de guerre leur permettant
d’inquiéter les transports de troupes romains ou de débarquer en Italie. La guerre serait
sans doute longue, mais elle ne se déroulerait qu’en territoire ennemi, l’Italie étant, a priori,
protégée. Le plan ambitieux d’Hannibal surprend tout le monde et déjoue les plans
romains. Traversant les Pyrénées en mai 218, il longe les côtes gauloises. Les Romains
envoient une flotte à Marseille pour protéger la cité grecque et arrêter Hannibal sur le sol
gaulois. Les légions de P. Cornélius Scipion ne parviennent pas à rencontrer l’armée
punique qui franchit le Rhône en août 218, et, qui, peu de temps après, passe les Alpes au
col du Perthus avec ses 12000 Africains, ses 8000 Ibères et Baléares, 6000 cavaliers numides
et ibères et des dizaines d'éléphants. Arrivé dans la plaine du Pô, il n'a aucun mal à
convaincre la plupart des tribus gauloises de rejoindre son armée. Les Romains sont
impressionnés par l’exploit d’Hannibal qui a réussi à franchir deux montagnes, les
Pyrénées et les Alpes, un fleuve dangereux et sauvage, le Rhône, ainsi qu’un pays, la Gaule,
lui-même sauvage et peuplé de barbares. Toutefois, cette armée de moins de 30 000 hommes
n’inquiète guère le sénat qui redoute toutefois la jonction entre ces troupes d’élite, aguerries
par la campagne d’Espagne, et les tribus celtes du nord de l’Italie. D’ailleurs le terme
officiel employé par les Romains pour désigner cette guerre est “guerre contre les
Carthaginois et les Gaulois”. Il est donc décidé de porter un coup fatal à l’armée dès sa
descente des Alpes pour empêcher Hannibal de rejoindre les tribus celtes de Cisalpine et
pour profiter de la faiblesse d’une armée que l’on imagine épuisée après une marche forcée
de 7 mois et des terribles épreuves comme la traversée des Alpes. L’armée de Publius
Cornelius Scipion, revenue de Marseille, franchit le Pô et se porte à la rencontre
d’Hannibal. Un premier affrontement de cavalerie se déroule début novembre à la hauteur
du lac Tessin et le consul, blessé, est sauvé par son fils de 17 ans, le futur Scipion l’Africain,
vainqueur d’Hannibal à Zama. Le consul se retire alors avec ses troupes. Il repasse le Pô et
s’installe sur les bords de la rivière Trébie pour attendre les renforts de son collègue, le
consul Tiberius Sempronius Longus. Avant que ce dernier ne le rejoigne, à la mi-décembre,
Scipion subit les défections de ses troupes auxiliaires gauloises tandis qu’Hannibal bénéficie
du ralliement de nombreuses tribus celtes. Ce dernier décide de forcer les Romains à la
bataille à la fin du mois malgré les terribles conditions hivernales qui commencent à
décimer les hommes et les animaux. C’est dans la neige que combattront les éléphants qui
mourront pour la plupart de froid et de leurs blessures. Mais la victoire est acquise, et c’est
en décembre 218 que les Romains prennent pleinement conscience du danger que
représente Hannibal.
Hannibal prend ses quartiers d’hiver à Plaisance et décide, au début du printemps
217, de porter la guerre en Etrurie. Le 21 juin 217, au bord du lac Trasimène, 15000
légionnaires sont massacrés. Hannibal, après ces nombreuses victoires, espère que tous les
anciens vaincus se rattachent à sa cause, mais la plupart des Etrusques et des Latins restent
fidèles à Rome, seuls les Gaulois rejoignant les rangs puniques. Déçu, Hannibal contourne
Rome et descend vers l'Italie du sud le long de la côte adriatique. Son plan est de franchir
les Apennins et de s'installer dans la riche et fertile Campanie, espérant bénéficier de
l'appui des Samnites et des Campaniens dans sa lutte contre Rome.
Là encore son espoir est déçu: tous restent fidèles à Rome. Il pille la plaine
campanienne et part en Apulie où il s'installe pour l'hiver. Les Romains décident alors de
porter un coup fatal à l'expédition punique. Ils envoient toutes leurs forces, soit 8 légions, à
Cannes en Apulie. La bataille, livrée le 02 août 216 est un désastre pour Rome qui perd
48000 hommes pour 5700 tués côté punique dont 4000 Gaulois. Cette prodigieuse victoire
provoque la panique à Rome et laisse perplexes la plupart des cités d'Italie du sud. A
Capoue, les partisans d'Hannibal prennent le pouvoir et accueillent le général carthaginois
avec enthousiasme.
Quelques autres cités campaniennes suivent l'exemple de Capoue et se mettent au
service d'Hannibal, ainsi que les Lucaniens. Par contre, les cités grecques refusent de se
soumettre et, Naples en tête, résistent au vieil ennemi phénicien. Hannibal allait dès lors se
servir de la Campanie comme base principale de sa lutte, malgré la résistance de Naples
mais aussi de Cumes.
En 215, deux événements importants sont à noter:
- Un traité d’alliance entre le roi de Macédoine, Philippe V, et Carthage
- La mort du vieux roi Hiéron II de Syracuse, fidèle allié de Rome, provoque une
crise dans la cité grecque qui change d’alliance et épouse la cause
carthaginoise.
L’année 215 marque apparemment le triomphe de Carthage, victorieuse en Italie et
bénéficiant en Grèce et en Sicile de l’alliance des Grecs. Toutefois, les Romains se sont
adaptés aux méthodes de combat d’Hannibal et le temps des victoires éclair est terminé.
Syracuse est rapidement assiégée par les légions et sera prise en 212 malgré les célèbres
machines d’Archimède qui trouve la mort lors du pillage de la ville. Hannibal cherche à
mener la lutte décisive en Campanie mais Naples résiste ainsi que la plupart des cités
campaniennes qui, hormis Capoue et quelques petites villes, restent fidèles à Rome. Capoue
est assiégée par les Romains à partir de l’année 213.
Les opérations déterminantes se déroulent en fait en Espagne où Rome avait envoyé dès
218, deux armées sous les ordres de Cneus et Publius Cornelius Scipion opposés aux frères
d’Hannibal, Hasdrubal et Magon. En 211, ces deux armées sont massacrées avec les deux
consuls, coup qui est très dur pour Rome mais pas mortel et, à la fin de l’année 210, Rome
confie le commandement en Espagne à un jeune homme de 25 ans, élu proconsul Publius
Cornelius Scipion, fils et neveu des deux consuls massacrés l’année précédente.
Dans l’année 211, les Capouans, épuisés par trois ans de siège, sur le point de
succomber, appellent au secours Hannibal qui fait alors le siège de Tarente. Ne pouvant se
permettre de perdre son meilleur allié en Italie, Hannibal fait route en toute hâte avec 33
éléphants et ses meilleurs soldats, espérant qu'à sa seule vue les troupes romaines lèvent le
siège. Mais celles-ci, solidement à l'abri derrière leurs retranchements résistent aux
attaques des cavaliers numides. Le temps passe et Hannibal, bloqué à Capoue, sait que
toutes les armées romaines convergent vers lui par voie de terre et par voie de mer,
débarquant à Naples. Et c'est alors qu'Hannibal prit la décision la plus folle, celle
d'attaquer directement Rome avant même que les légions qui convergent vers lui ne sachent
qu'il a quitté la Campanie.
Sa petite armée se fraie un passage à travers les légions qui cheminent en sens
inverse et arrive à proximité de Rome alors que personne ne s'attendait à un tel
retournement de situation. A Rome, c'est l'effroi, et le cri "Hannibal est devant les portes"
fera tressaillir des générations de Romains comme la prise de l'Urbs par les Celtes en 387.
Hannibal avait en fait espéré que les légions qui faisaient le siège de Capoue le suivraient
pour sauver Rome. Mais il n'en est rien et Hannibal, arrivé devant les murs de Rome,
voyant les défenses imposantes de la ville et l’organisation que celle-ci met en œuvre pour sa
défense, décide de rebrousser chemin pour se rendre en Apulie. Non seulement il
abandonne Rome mais aussi la Campanie puisque Capoue, laissée à son sort, doit capituler.
La prise de Capoue par les Romains et le sort infligé à ses habitants produisit une
impression profonde dans toute l'Italie du sud. Hannibal, désormais bloqué en Italie du sud,
devait rester en situation défensive jusqu'en 204. Il demande des renforts au sénat de
Carthage qui décide de lui envoyer des forces considérables afin de terminer la guerre au
plus vite. Mais à c’est à ce moment que le sort de la guerre tourne à l’avantage définitif des
Romains. En 209, Scipion prend Sagonte, privant Carthage de sa base principale en
Espagne, et, au printemps 208, Scipion vainc Asdrubal Barca sans empêcher celui-ci de
remonter vers le nord et de suivre les traces de son frère, franchissant les Pyrénées et les
Alpes avec son armée. Il pénètre en Italie au printemps 207 avec des forces considérables de
60 000 à 80 000 hommes mais est arrêté sur les bords du Métaure durant l’été 207 dans le
nord de l’Italie. Cette bataille décisive marque un tournant dans la guerre, car Hannibal
comptait sur ces renforts nombreux pour relancer l’offensive. Il apprend l’échec de ces
objectifs en recevant de nuit, dans son camp, la tête coupée de son frère. Son deuxième
frère, Magon, à la tête d’une puissante flotte, ravage les côtes de la Ligurie et s’empare
même de Gênes au printemps 205. En 203, lorsqu’il est rappelé, il est comme assiégé dans le
Bruttium. Guerre d’endurance et d’usure. Grandes victoires du début (La Trébie,
Trasimène, Cannes) révèlent une maîtrise totale dans la stratégie, le cheminement, la
disposition des troupes, l’utilisation du terrain et dans la tactique, ne se répètent plus après
215.
A cette date, les Romains, vainqueurs en Espagne et en Sicile, décident de porter la
guerre en Afrique du nord. Publius Cornelius Scipion attire dans son alliance Massinissa,
héritier du trône du puissant royaume berbère des Massyles en guerre contre Carthage. La
cavalerie numide apportera une aide décisive aux légions romaines qui débarquent en
Afrique du nord en 204. Le sénat carthaginois, désemparé, propose des négociations de
paix. Scipion impose les conditions suivantes : rendre tous les prisonniers, évacuer l’Italie,
renoncer à l’Espagne, livrer la marine de guerre et payer une amende de 5000 talents. Les
négociations durant longtemps, les Carthaginois demandent à Hannibal de venir à leur
secours. Celui-ci débarque durant l'automne 203 et un an plus tard, au début de l’automne
202 a lieu la célèbre bataille de Zama qui est un triomphe pour les légions romaines. Les
clauses du traité furent aggravées avec le doublement de l’amende portée maintenant à 10
000 talents.
II- La Campanie et Capoue : clef de la guerre :
Après les batailles de la Trébie, de Trasimène, de Cannes, Hannibal libère sans
rançons les prisonniers latins et alliés. Avec Capoue commence la série des traités signés
entre Hannibal et des cités italiennes alliées. Traités garantissent l’indépendance et
l’autonomie, la permanence des lois et des institutions, l’absence de tribut, de mobilisation
forcée. Hannibal fit en plus à Capoue, après signature du traité, la promesse que Capoue
serait la capitale de l’Italie. Capoue appelée la « Carthage de l’Italie ».
La politique de main tendue d’Hannibal : Texte 1 : bataille de Trasimène
Le tournant de la bataille de Cannes : Texte 2
Les clauses du traité de paix et d’alliance entre Carthage et Capoue : Texte 3
Les objectifs de Capoue et la situation en Campanie après le traité de paix : Texte 4
La guerre en Campanie et le rôle stratégique de Naples : Textes 4 et 5
Le siège de Capoue : Textes 6 et 7
La marche sur Rome : Texte 8
La reddition de Capoue : Texte 9
Stratégie d’Hannibal qui était de couper Rome de ses alliances et solidarités. Ne fonctionna
réellement que dans la Gaule cisalpine mais en Campanie, la plupart des cités restent
fidèles à Rome exception faite de Capoue. Moment le plus difficile qui fut celui de la défaite
de Cannes, avec pouvoir romain qui semble vaciller. Cités avaient un choix crucial et
dangereux à faire : si elles ne ralliaient pas Hannibal, elles subissaient aussitôt son
courroux. Hannibal déporta et massacra ainsi des milliers d’Italiens qui n’avaient pas
voulu le rejoindre. Mais Rome se vengeait aussi de la défection de ses alliés : 25 000
Samnites et Lucaniens furent ainsi massacrés au cours d’une seule campagne militaire pour
avoir rallié la cause d’Hannibal.
A Capoue ce furent les sénateurs de la ville, ceux qui étaient alliés aux plus grandes familles
de Rome, qui organisèrent la trahison. Ils furent 27 à se suicider lors de la reprise par Rome
en 211. En 209, c’est Tarente qui est délivrée. A Capoue, 70 des principaux sénateurs furent
exécutés, 300 nobles jetés en prison, et une grande masse de citoyens vendus comme
esclaves.
III- Les conséquences de la guerre :
Carthage est anéantie et Rome devient désormais la plus grande puissance de la
Méditerranée, prenant possession de l’Espagne, organisée en 197 en deux provinces, la
Citérieure autour de l’Ebre et l’Ultérieure autour du Guadalquévir. Le royaume syracusain
de Hiéron II est incorporé à la province de Sicile et toute la plaine du Pô est soumise à
l’autorité romaine. De plus, Rome, en s’opposant à Philippe V de Macédoine, avait
commencé à entrer dans les affaires grecques. Cinquante ans après la fin de la 2e guerre
punique, Carthage, fidèle au traité de paix, finit de payer les 10 000 talents d’amende. La
cité, bien qu’humiliée et ruinée, avait réussi à reprendre vie et était de nouveau devenue
florissante, bien que toujours menacée par l’empire de Massinissa. C’est dans ce contexte
de rivalité entre le royaume numide et Carthage que Rome prit la décision non seulement
de déclarer la guerre mais aussi d’anéantir Carthage selon la phrase célèbre de Caton
l’Ancien : “Delenda est Cartago”. Le parti anti-carthaginois l’emporte en 150 et la dernière
guerre punique, déclarée par les Romains, ne fut qu’une guerre d’extermination qui dura 3
ans, à l’issue d’un siège terrible au cours duquel la population carthaginoise, menant une
résistance héroïque et désespérée, fut massacrée. C’est Scipion-Emilien, élu consul en 147
qui fut le vainqueur de Carthage. Au printemps 146, l’assaut fut donné dans des conditions
effroyables, et après une bataille de rue d’une semaine, les derniers défenseurs furent
exterminés. Le sol fut déclaré sacer, maudit, le site abandonné, et les derniers défenseurs
vendus comme esclaves. La même année, avait lieu la prise et le pillage de la ville grecque
de Corinthe.
De l’incident de Messine qui, en 264, décida les légions à intervenir hors d’Italie à la
destruction totale du royaume de Macédoine en 167, moins d’un siècle s’était écoulé mais la
mécanique était mise en branle qui ne s’arrêterait qu’après la conquête du monde. La
destruction de Carthage et celle de Corinthe en 146 marquaient désormais une véritable
politique de domination violente, d’expansionnisme non seulement militaire mais aussi
économique avec la volonté d’anéantir physiquement les Etats représentant des menaces
pour les intérêts économiques des Italiens et en particuliers des chevaliers et des publicains.
Les chevaliers sont les membres de la classe équestre qui doivent posséder un cens
minimum de 400 000 sesterces, identique à celui des sénateurs. A la différence de ces
derniers, les chevaliers pouvaient librement investir et commercer. Leurs moyens financiers
leur permettent donc d’investir des capitaux importants dans des grandes propriétés où
l’on pratique une forme d’agriculture intensive mais aussi dans le grand commerce
maritime international qui représente le principal débouché pour les productions de ces
latifundia. La deuxième guerre punique a entraîné la ruine d’une partie de la Campanie qui
fut ravagée par les armées puniques et romaines tandis que les petits et moyens fermiers,
premiers à être recrutés dans les armées romaines, furent décimés par la guerre. Cette
deuxième guerre punique ne marque pas pour autant la disparition, en Campanie, de la
petite et moyenne propriété rurale, mais à ces côté de ces fermes moins nombreuses
qu’auparavant, s’étalent désormais d’immenses propriétés où la culture des céréales est
abandonnée au profit de la culture intensive de la vigne qui permet de faire rapidement des
profits considérables dans le cadre d’une économie capitaliste où les mêmes personnes
contrôlent non seulement les moyens de production mais aussi les moyens de transport.
De plus, les terres confisquées à ceux qui avaient trahi la cause romaine étaient
devenues ager publicus. On conserva pour les peupler la masse des résidents non citoyens
tandis que tous les édifices et tout le territoire de Capoue devenaient propriété du peuple
romain. Premier effet du conflit est la méfiance et le mépris qui se font jour dans le
comportement romain. Bouleversements que les confiscations de terres intégrées dans
l’ager publicus entraînent dans les structures agraires de la Campanie. Concédées à des
propriétaires romains qui les exploitaient sous la forme de latifundia. Mutations de
propriétés et de l’organisation des exploitations s’inscrivaient dans un contexte général de
destruction partielle du tissu social de l’Italie. Fondations de colonies reprirent avec en 194
fondation de Pouzzoles, Salerne, Volturnum. Vétérans de l’armée de Scipion qui se voient
octroyer des terres à titre individuel. Sociétés de publicains qui apparaissent après la
seconde guerre punique. Associations financières que formaient entre eux des citoyens qui
affermaient les revenus de l’état ou les travaux publics. Comme les membres du sénat
étaient exclus des adjudications publiques, la plupart des publicains se recrutaient parmi
les chevaliers, membres de l’aristocratie. Campanie qui fournissait du blé à Rome.
Pouzzoles qui était le port par lequel il était exporté, prit une importance stratégique
durant la 2e guerre punique. Il devint le principal port de l’Italie. La Campanie devint ainsi
la région italienne la plus ouverte à la Méditerranée. A bien des égards, la campagne
d’Hannibal se révélait ainsi l’épisode décisif qui avait conduit l’Italie sur la voie de
l’unification et de la romanisation.
La Campanie cessait d'être une position stratégique de première importance, une
terre de rencontres et donc de conflits, ce qu'elle avait été depuis le VIIIe s. Elle cessait de
l'être car désormais les intérêts stratégiques sont ailleurs qu'en Italie. C'est l'Espagne qui
fournit les principales mines métallifères et c'est l'Afrique du nord qui deviendra la terre à
blé de Rome. Province d'Afrique créée en 146 après la destruction de Carthage. La
Campanie devient un lieu de travail mais aussi un lieu de loisir.
Conclusion :
La Campanie, après la ruine des guerres puniques se relève peu à peu et devient un
important centre de production agricole et industriel. Dans le contexte de cette
romanisation accélérée faite par l'économie, Naples reste un vivant foyer d'hellénisme.
Alors que partout le latin s'impose, à Naples, le grec non seulement subsiste mais rayonne
grâce au théâtre et à la poésie. Les Romains fortunés y envoient leurs enfants car la culture
qui devient à la mode est désormais la culture grecque et tous les Romains de bonne famille
se doivent de connaître la langue grecque et la littérature, la philosophie et l'histoire
grecques.
La Campanie devient une terre de Latifundia, de grandes propriétés foncières entre
les mains de très grands propriétaires. Le vin est produit de manière massive dans ces
latifundia ainsi que les amphores qui sont livrées par milliers dans toute la Méditerranée
occidentale. C'est une véritable production capitaliste qui caractérise la Campanie à partir
du IIe s. av. et c'est d'ailleurs à partir de cette époque que l'on voit apparaître les premières
villas fastueuses dans les grandes propriétés agricoles mais aussi dans les villes, comme
Pompéi. Car la Campanie devient aussi une terre de loisirs et de plaisirs. Durant la fin de la
république et tout l'empire, les notables de Rome fuient la capitale l'été pour se rendre sur
la côte campanienne et profiter ainsi de tous ses avantages. Les Romains les plus fortunés,
comme Cicéron, y font bâtir des résidences de luxe et les empereurs viendront de même y
séjourner avec leurs familles. Terre de travail dans les latifundia, terres de loisirs, la
Campanie devient surtout une terre de profondes inégalités avec une plèbe misérable qui y
végète dans les campagnes et dans les villes. Les mouvements sociaux seront nombreux aux
IIe et Ier s. et la révolte de Spartacus démarrera dans les arènes de Capoue. Spartacus
attirera à lui tous les parias de la société, les gladiateurs, bien sûr, mais aussi les esclaves et
les hommes libres que leur pauvreté forçait à une vie dégradante.