L`enfant soldat

Transcription

L`enfant soldat
Fiche rédigée par Daniel Salles
Images de presse
L’enfant soldat
Chappatte / Georges Gobet
© Chappatte (Suisse), 2003
Paru dans International Herald Tribune (Paris) le 22 octobre 2003.
@ Georges Gobet (France) / AFP Photo
27 juin 2003. Un enfant soldat portant un sac à dos nounours pointe son arme sur un photographe dans une rue de Monrovia
que les forces du président libérien Charles Taylor ont pris sous leur contrôle. (V.O. page 4)
© CRDP de l’académie de Versailles – 2010
1/4
Images de presse
Fiche rédigée par Daniel Salles
L’enfant soldat
Chappatte / Georges Gobet
Le fait
L’expression « enfant soldat » désigne toute personne âgée de moins de dix-huit ans qui fait partie de toute
force ou groupe armé, régulier ou irrégulier. L’emploi des enfants soldats est l’une des manifestations les
plus cruelles et traumatisantes des conflits contemporains. Selon l’ONU, ils seraient au nombre de 300 000
environ dans le monde, principalement en Afrique, en Asie et en Amérique latine (86 pays y recouraient
en 2008). Les groupes et forces armés utilisent les enfants pour de multiples raisons : pour faire face à
un manque d’effectif, pour les utiliser à des tâches auxiliaires, telles que celles de cuisinier ou de porteur,
pour l’espionnage ou le transport de messages. Il est également plus facile de convaincre ou d’obliger des
enfants à commettre certains actes et de les fidéliser à la cause défendue. Ils sont drogués pour obéir de
manière aveugle.
Mais souvent, ces enfants ne sont pas enlevés ou forcés, ils « décident » de s’engager parce qu’ils n’ont
pas d’autre alternative, notamment économique, pour vivre ou faire vivre leur famille. Beaucoup ne sont
pas scolarisés. Ils peuvent aussi décider de rejoindre une armée ou une milice en pensant que c’est le seul
moyen d’assurer leur protection ou celle de leurs proches.
La communauté internationale a réagi face à l’ampleur de ces pratiques : par exemple, en République
démocratique du Congo, le 26 janvier 2009, l’ancien chef de guerre congolais Thomas Lubanga Dyilo a dû
répondre devant la CPI (Cour pénale internationale) d’accusations de crimes de guerre pour avoir utilisé
des enfants soldats lors du conflit en Ituri.
Par ailleurs, avec la fin des conflits, le recrutement à grande échelle d’enfants par des forces gouvernementales dans des pays tels que le Burundi, la Côte d’Ivoire, la Guinée et le Libéria ont cessé. Pour favoriser la
réintégration des enfants soldats, les Nations-Unies et d’autres organismes soutiennent les programmes
DDRR (Désarmement, Démobilisation, Réintégration, Réinsertion).
Focus
L’ « enfant soldat » est un redoutable oxymore qui fait voler en éclats l’imagerie traditionnelle de la figure
innocente préservée des fureurs du monde. Le dessin de Patrick Chappatte comme la photo de Georges
Gobet jouent de cette antinomie entre angélisme et guerre, juvénilité et mort, jeu et réalité. Ils forcent les
contrastes de manière subtile.
Trois motifs les font se ressembler : la négritude, qui évoque la réalité majoritairement africaine de l’utilisation des enfants soldats dans des milices et armées régulières ; la « kalachnikov », fusil reconnaissable
à sa forme si particulière, qui équipe de nombreux combattants de guerres civiles et qui, ici, fait ressortir
l’incongruité de l’association arme-enfant par la disproportion qu’elle instaure ; enfin l’instabilité des corps,
celle de l’enfant saisi en pleine action et prêt à se relever, comme celle de l’enfant unijambiste dessiné par
Chappatte, arc-bouté de façon distordue sur son arme.
Les deux enfants, enfin, sont face au spectateur et le regardent « droit dans les yeux ». Ils l’interpellent. Mais
le message que ce regard signe lui adresse est ambigu. La dureté de celui du petit « guerrier » de la photo en
fait un enfant perverti et menaçant ; il transforme l’innocent en assassin en proie à la fureur. Le regard de
l’enfant du dessin de Chappatte, réduit à deux petits ronds au milieu du visage, est vide d’expression : cette
vacuité traduit une déshumanisation subie par l’enfant (comme s’il était hypnotisé) aussi bien qu’elle invite
le spectateur à y projeter ses propres émotions.
2/4
© CRDP de l’académie de Versailles – 2010
Fiche rédigée par Daniel Salles
Images de presse
Activités
L’enseignant adaptera ces brèves propositions pédagogiques aux besoins de ses élèves. Pour le second
degré, les activités suggérées pour le premier degré pourront être reprises et approfondies.
À l’école
• Dans un premier temps laisser les élèves verbaliser les émotions que suscitent ces images. Tenir compte
des représentations des jeunes enfants : la guerre comme un jeu, la guerre phénomène du passé.
• Remarquer l’absence de contexte dans les deux images. Noter en quoi l’indice de la peau noire de l’enfant, le rôle de la légende aident à la contextualisation des images.
• Repérer les nombreux points communs entre les deux images et analyser la manière dont le photographe
et le dessinateur les ont mis en valeur. Dégager notamment quelques thèmes afin d’analyser leur mise
en scène : la misère (notamment à travers les vêtements), l’innocence enfantine, la dureté de la guerre…
• Distinguer enfin les différences dans la manière de mettre en valeur cette situation et d’émouvoir le spectateur : le choix du handicap dans le dessin de presse et celui de la « menace guerrière » dans la photographie.
• Noter le rôle argumentatif des oppositions dans la photo : ourson rose, arme pointée, visage effrayé/
effrayant, arme et vêtements civils…
• Mettre en lumière le cadrage frontal au niveau du sol et la profondeur de champ qui fait exister dans
l’arrière-plan de la photographie des personnes en train de regarder ou de vaquer à leurs occupations.
• Le dessin semble presque une « suite » de la photographie dans la description d’une même situation
narrative : avec les enfants, imaginer ce qui s’est passé entre les deux « moments » de cette tragédie d’un
enfant perdu.
Au collège et au lycée
• Repérer les oppositions qui structurent la photographie et le dessin.
• Étudier l’absence d’un « arrière-plan », au sens propre comme au sens figuré dans le dessin. Quelles en
sont les raisons ? Qu’apporte l’arrière-plan dans la photographie ?
• Réfléchir sur l’importance du regard dans une image : opposer l’absence de « regard caméra » au cinéma,
les yeux dans les yeux du présentateur du JT, l’adresse au spectateur dans les publicités…
• S’interroger sur la place choisie par le photographe de presse et les risques liés à la pratique de ce métier.
• Synthèse : demander aux élèves de montrer comment, chacune à sa manière, ces deux images dénoncent la situation/l’existence des enfants soldats.
• Effectuer des recherches au CDI sur les enfants soldats dans le monde et sur les actions mises en œuvre
pour arrêter ce phénomène.
• Réaliser des affiches pour dénoncer l’existence des enfants soldats et le non-respect de la Convention
internationale des droits de l’enfant.
Pour aller plus loin
Des sites
„„ www.unicef.fr
Le site de l’Unicef, organisation internationale engagée dans la lutte contre l’enrôlement des enfants soldats
„„ www.globecartoon.com/dessin
Le site du dessinateur Chappatte
„„ www.clemi.org/fr/tv/
Visionnez sur le site du CLEMI les réactions de Jean-François Leroy et Plantu à propos des images du cédérom.
© CRDP de l’académie de Versailles – 2010
3/4
Images de presse
Fiche rédigée par Daniel Salles
Des livres
Allah n’est pas obligé, Ahmadou Kourouma, Seuil, coll. Points, 2002.
Enfant soldat, Akira Fukaya, deux tomes, Delcourt, coll. Gingko, 2009. Une bande dessinée japonaise.
Un film de fiction
Ezra, de Newton I. Aduaka, DVD, Arte vidéo, 2009.
Légende en anglais de la photo de Georges Gobet
A child soldier wearing a teddy bear backpack points his gun at a photographer in a street of Monrovia
27 June 2003 where Liberian President Charles Taylor’s forces took control of the city.
4/4
© CRDP de l’académie de Versailles – 2010

Documents pareils