Crésus 55 - Cresus - L`Hebdo national de l`économie

Transcription

Crésus 55 - Cresus - L`Hebdo national de l`économie
DOSSIER CAPITAINES D’INDUSTRIE OU SIMPLES RENTIERS ?
n
LEUR NOMBRE NE CESSE D’AUGMENTER
Pages
7-15
L’ÉCHO D’ALGER
Avenir de l’OPeP
In medio stat virtus
L’Hebdo national de l’Économie n Du dimanche 16 au Samedi 22 octobre 2016 n n°55 n Prix 30 DA n Étranger 1 euro
À Alger, l'OPEP a marqué un
point.
Il reste à transformer ces
gains en un progrès durable,
ce qui est loin d'être gagné.
Pour cela, cinq conditions
clés…
Par Francis Perrin à
Crésus Page 5
nRAPPORT
RALENTISSEMENT DE LA
CROISSANCE MONDIALE
nSPORT,
Page 3
L’EN
DES VERTS PAS
ENCORE MÛRS ?
nKARIM
DR RAHALI F. DJALILA, CYBERPSYCHOLOGUE :
DE L’OMC
HABIB,
Page 16
UN DESIGNER LIBANAIS AU
SERVICE DE BMW
cresus.dz
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL À PARIS
PAGE17
« L’ADDICTION À INTERNET, UN PHÉNOMÈNE
QUI PASSE INAPERÇU CHEZ NOUS »
L’Internet est l’outil
technologique le plus
populaire, eu égard à
la facilité de l’accès à
ses services et à sa
vulgarisation à
travers le monde.
Cependant, le revers
de la médaille et qui
suscite de plus en
plus de craintes et
d’appréhensions a
aujourd’hui un nom
: L’addiction.
Pages12-13 et 14
nÉLECTIONS
PRÉSIDENTIELLES
AUX ÉTATS-UNIS
UN JEU D’ÉCHECS
OÙ TOUS LES COUPS
SONT PERMIS
Page 15
442
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
à l’oreille de Crésus
Sauvetage de l’économie
tunisienne
La diplomatie comme
ultime recours ?
Enquête sur le blanchiment d’argent dans le secteur financier
La Falcon Private Banking visée
des réunions sont organisées en Tunisie avec les
représentants des grandes entreprises internationales et les institutions financières. Une réunion a
été tenue en présence des investisseurs étrangers
et de journalistes américains, indique le site réalités.com. « C’était l’occasion de présenter le nouveau climat d’affaires tunisien et d’évoquer la
conférence internationale sur l’investissement des
29 et 30 novembre prochain. Le ministère a présenté le plan quinquennal 2015-2020 et les projets de collaboration entre les secteurs privé et
public », a déclaré le ministre tunisien de l’Investissement et de la Coopération internationale à
cette occasion. Dans ce même cadre, de grandes
entreprises américaines, œuvrant en Afrique du
Nord, ont également été sollicitées. « Il y a eu des
industriels et des fonds d’investissement. Nous
leur avons présenté la nouvelle loi d’investissement ainsi que la loi d’urgence économique », a-til poursuivi. Il a, d’autre part, évoqué les réunions
avec les représentants des grandes institutions
mondiales, telle que la représentante de la Banque
Mondiale ou encore celle de l’administration centrale américaine. « C’était une rencontre de haut
niveau, à l’issue de laquelle on a ressenti un intérêt
réel pour la Tunisie ». D’un autre côté, le ministre
a indiqué que les négociations avec le FMI sont en
cours.
le bureau du procureur suisse a déclaré
mardi dernier qu'il pourrait ouvrir une
enquête criminelle avec la banque Falcon Private Banking, basée à Zurich,
dans le cadre de la surveillance imposée
du marché financier en Suisse.
Le bureau du procureur a déclaré dans
un communiqué que «la question de
l'ouverture d'une enquête criminelle
contre Falcon Private Banking est à l'étude."
Dans ce contexte, le Bureau suisse du
procureur général a demandé à l'organe
de surveillance du marché financier, en
suisse, de lui remettre une copie de sa
résolution afin d'ouvrir une enquête criminelle contre Falcon Private Banking
après analyse de cette décision.
Il est reproché à la banque de Falcone
des profits illégaux et des violations des
règles relatives au blanchiment d'argent
lié au financement du fonds One MDB
Dubaï
Lancement des travaux de la plus haute tour au monde
les travaux de construction de « Dubai Creek
Tower », le nouvel édifice architectural, qui devrait
être le plus haut bâtiment du monde, l'achèvement
de sa construction en 2020, en partenariat entre le
«Dubai holding» et «Emaar Properties», ont été
lancé le 10 octobre passé en présence des plus
hautes autorités de Dubai et des Emirats arabes
unis.
Cheikh Mohammed bin Rashid Al Maktoum, viceprésident des EAU a affirmé à cette occasion que la grande
renaissance urbaine des Émirats arabes unis est l'un des fruits
des plans de développement ambitieux, et le produit du mouvement économique actif au servie du peuple et des résidents
des Emirats.
Il a ajouté que les Émirats arabes unis sont toujours une plate-
Arabie saoudite-Egypte
L’austérité gâche la lune de miel
Après une longue période de convivialité, il
est devenu difficile de cacher les différends
égypto-saoudiens. La lune de miel entre Le
Caire et Riyad marque le pas : l'aide promise au régime du président Abdel Fattah alSissi serait devenue une carte de pression
dans les mains de Ryad pour forcer le Caire
à modifier ses positions.
L'affrontement entre le Caire et Ryad sur
plusieurs dossiers est apparu, il y a environ
un an et ce, après un an et demi d’entente,
en particulier lorsque l'Arabie saoudite
offrait des milliards de dollars au régime
d’Abdel Fattah al-Sissi. Mais la divergence
dans le dossier syrien, notamment sur le
sort du président Bachar al-Assad a fait
voler en éclat cette entente.
Il convient de noter qu’environ un million
d'Egyptiens travaillent en Arabie saoudite
et seront touchés par la politique d’austérité du royaume. La divergence de vues est
apparue au grand jour lors de la session du
Conseil de sécurité de l’ONU, lorsque le
Caire a changé un vote de soutien à la posi-
L’Hebdo national de l’Économie,
édité par la SARL
CeliGne Éd. & Com.
direCteur de PubliCAtiOn
SAMIR MEHALLA
souverain
malaisien.
Par
ailleurs,
l'Autorité
monétaire de Singapour a ordonné à la
branche Falcon Bank à Singapour de suspendre ses opérations en raison « d'une
compréhension forte et continue » des
contrôles régissant le blanchiment d'argent à Singapour
forme pour le développement de grands projets et
initiatives qui ajoutent chaque jour du nouveau à la
civilisation humaine.
Il a rappelé la construction de Bordj Khalifa, il y a
quelques années et qui a surpris le monde comme
le plus haut bâtiment sur terre.
Il a indiqué que son pays est « habitué aux défis qui
sont une exigence importante pour atteindre des
niveaux d'excellence sans précédent, tout en ne
ménageant aucun effort pour fournir tous les ingrédients
nécessaires pour améliorer notre compétitivité à l'échelle
régionale et internationale dans tous les domaines, grâce à l'appui des projets existants, et d'explorer de nouvelles opportunités, et de déterminer comment s’employer à renforcer notre
position dans l'économie mondiale ».
tion saoudienne et française pour soutenir
la position de la Russie. Ce n'est pas la première fois que Le Caire est opposé à la position de Ryad sur la Syrie, en particulier son
insistance sur la conduite de la solution
avec la participation du président al-Assad,
au moins dans la phase de transition.
Au Conseil de sécurité, il y a quelques jours,
la position égyptienne prise et le non-soutien à la position saoudienne a annoncé le
début d'une nouvelle phase de la relation
dans laquelle le royaume peut punir le régime al-Sissi sur plusieurs dossiers.
Parmi ces dossiers, la guerre ouverte au
Yémen. Bien que le Caire ait préféré garder
le silence sur le grand massacre de Sanaa, il
a exprimé sa grande préoccupation dans
les coulisses.
D'autre part, la présence d'environ un million d'Egyptiens dans le royaume fournit
des devises fortes au pays. L'augmentation
des frais pour les émigrés en raison du déficit budgétaire et de la baisse des prix du
pétrole inquiète les Egyptiens.
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Kamel Aït Bessaï
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Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
algérie
443
Après les prévisions de la Banque mondiale et du Fond
monétaire international (FMI) sur un commerce international
en difficulté et d’une croissance lente, c’est l’Organisation
mondiale du commerce (OMC) qui vient leur emboîter le pas,
prévoyant à la baisse les indicateurs du commerce mondial et sa
croissance pour cette année.
ralentissement de la croissance
économique mondiale
L’OMC L’A PRÉvU DANS SON DERNIER RAPPORT
A
4Par Adel boucherguine
insi, l’OMC s’est montrée, dans
son dernier rapport annuel,
pessimiste sur le dynamisme
des échanges mondiaux, prévenant que la croissance du commerce dans le monde devrait être « la plus
lente depuis la crise financière », en cette
année, 2016. L'OMC prévoit une hausse de
1,7% alors qu’en avril dernier elle anticipait une croissance du commerce mondial
de 2,8% cette année. « Le ralentissement
impressionnant de la croissance du commerce est grave et devrait servir de sonnette d'alarme », s'inquiète le directeur général de l'OMC, Roberto Azevedo, cité dans un
communiqué. « Une baisse plus forte que
prévu du volume du commerce des marchandises au premier trimestre (-1,1%
d'un trimestre sur l'autre) et une reprise
encore plus faible que prévu au deuxième
trimestre (+0,3%) sont la cause première et
directe de cet amollissement qui est la
conséquence du ralentissement de la croissance du Produit intérieur brut (PIB) et du
commerce dans les économies en développement », affirment les économistes de l’organisation mondiale qui citent, entre
autres, la Chine et le Brésil, mais aussi
l’Amérique du Nord. Anticipant que le PIB
réel dans le monde devrait augmenter de
2,2% en 2016, l’OMC s'inquiète également
de « l'affaiblissement du rapport entre le
commerce et la croissance du PIB ». Dans
les années 1990 et au début des années
2000, le commerce international ou mondial évoluait deux fois plus vite que la croissance du PIB. Pour l’année en cours, le volume de marchandises échangées augmentera plus lentement que le PIB mondial. «
Nous devons faire en sorte que (l'hostilité
et le rejet croissants à l'égard de la mondialisation) ne se traduise pas par des politiques inconsidérées qui risqueraient d'aggraver encore plus la situation », a prévenu
M. Azevedo. En effet, selon l’OMC toujours,
la torpeur des échanges mondiaux pourrait
se prolonger en 2017 puisque l'Organisation anticipe désormais que la croissance
du commerce mondial devrait se situer à
1,8% et 3,1% au cours de l’année prochaine, contre les 3,6% prévus auparavant. «
Depuis la publication des prévisions de
l'OMC en avril 2016, certains risques de
ralentissement se sont concrétisés, notamment une période d'instabilité financière
qui a touché la Chine et d'autres économies
de marché en développement au début de
l'année, mais qui s'est apaisée depuis », justifie l'organisation. Plusieurs signaux pointent en faveur d'un redressement du commerce mondial au second semestre, dont la
progression du trafic des ports à conteneurs ou l'augmentation des commandes à
l'exportation aux États-Unis. Mais, a-t-il
cependant noté, « plusieurs incertitudes
pèsent sur les perspectives concernant le
reste de l'année et l'année prochaine »,
relève Le rapport qui cite « la volatilité
financière due aux changements touchant
la politique monétaire des pays développés
«L’Algérie sera fortement impactée»
FARID AMIR, ENSEIgNANT à L’UNIvERSITÉ DE BÉjAïA :
4entretien réalisé par Adel boucherguine
Farid Amir est docteur en économie à l’université de
béjaia. dans cet entretien, il revient sur le dernier rapport de l’OMC et parle de l’impact des prévisions du
ralentissement du commerce mondial.
Crésus : Après la timide reprise de la croissance économique qui a suivi la crise de 2008-2009, quel état des
lieux faites-vous sur le commerce mondial ?
Farid Amir : Après le processus rapide de la mondialisation, amorcé vers la fin des années 1980 et le début des
années 1990, le système économique mondial est entré
dans une nouvelle ère de croissance économique et commerciale dynamique. Cette dynamique peut s’expliquer par
le processus d’intégration des économies nationales à l’économie mondiale, notamment, avec le processus d’intégration des ex-pays socialistes à l’économie de marché et leur
ouverture aux investissements étrangers et le commerce
international dans un multilatéralisme fort des années
1990. Cet élan formidable de cette dynamique a été vite
brisé par la crise financière de 2007. A l’heure actuelle,
l’économie mondiale traverse une étape très difficile de son
histoire après la crise de 2007-2009. En effet, malgré un
retour timide de la croissance à partir de 2010, l’économie
mondiale assiste à une progression lente de la croissance
du PIB. Cette lente progression de la croissance du PIB est
accompagnée par une nouvelle donnée sur le plan commercial. Il s’agit du ralentissement sans précédent du taux
du commerce mondial. Selon les bases de données de
l’OMC, la croissance du commerce mondial qui était deux
fois plus élevée que le PIB peine aujourd’hui à dépasser ce
dernier. Il s’agit d’une nouvelle phase de l’évolution du
commerce international qui constitue un tournant déterminant du système économique mondial. Ce qui témoigne de
l’importance de ce changement est le taux de variation de la
croissance du commerce mondial par rapport aux années
1990. A titre d’exemple, par comparaison au taux de croissance des échanges mondiaux durant les quatre dernières
années, le taux de croissance est passé de 6,9% entre 1995
et 2008 à 3,5%. Il s’agit d’une chute décevante du commerce mondial qui appelle à tirer la sonnette d’alarme. La ques-
tion qui s’impose est de savoir s’il s’agit d’un phénomène
conjoncturel ou structurel, et ce que la réponse à cette
question implique pour renverser l’équation.
Ce phénomène du ralentissement de l’échange
mondial dont a conclu l’OMC est-il structurel ou non ?
Une partie importante des analystes et spécialistes pensent qu’il s’agit d’un ralentissement conjoncturel. Ce ralentissement est une conséquence de la crise qui a touché la
zone Euro ces dernières années. Le constat leur donne raison au regard de la part de l’Union européenne dans le
volume du commerce mondial, elle compte environ un tiers
du commerce mondial. La crise a freiné la demande d’importation dans la région de la zone Euro. Considérée
comme l’épicentre de la crise actuelle, la zone Euro a enregistré une baisse de 1.1% de son volume des échanges commerciaux en 2012, et elle a connu une reprise de 0.3% en
2013. Donc, si les pays de l’Union européenne arrivent à
redresser leurs économies en 2017, la croissance du commerce mondial devrait reprendre sa dynamique. Cependant, la stabilité du rapport importations/PIB dans certains
pays, comme les Etats Unis et la Chine, après la crise laisse
à penser que les origines de cet historique ralentissement
du commerce mondial ne peuvent être attribuées uniquement à la crise de la zone euro. Les volumes d’importations
exprimés en pourcentage du PIB réel, sont à peu près
constants depuis 2005. Il s’agit d’une stabilité prolongée.
Cette dernière est un symptôme d’un mal profond qui met
en péril le devenir de l’économie mondiale.
Quelles sont les raisons de
ce ralentissement, selon vous ?
La première explication de ce ralentissement est certainement la faiblesse de la croissance du PIB. Le PIB représente un déterminant de premier rang. Son évolution mondiale se caractérise par une progression très lente. Il y a
aussi le taux faible d’investissement qui peut affecter négativement la croissance du commerce mondiale. Ajoutant à
cela la crise de la zone euro qui a joué un rôle important
dans l’influence de la tendance du commerce mondial, par
ce que sa crise a induit comme performances médiocres. Le
recul de la croissance chinoise a profondément impacté
l’évolution récente du commerce mondial. Ces éléments
sont conjugués avec le retour au protectionnisme dans l’objectif de faire face aux effets indésirables de la mondialisation. Cette remise en cause de l’ouverture après la crise de
2008-2009 pose beaucoup d’interrogations, notamment en
ce qui concerne le devenir de la tendance actuelle du système économique mondial.
Quelles conséquences ou impacts aura ce
ralentissement du commerce mondial sur la
croissance ?
Effectivement, le ralentissement actuel du commerce
mondial va impacter l’économie mondiale. Cela s’explique
d’abord par le ralentissement de l’économie chinoise, en
raison du rôle important de ce pays dans la structure du
commerce mondial et de son modèle économique fortement intensif en matière première. Le ralentissement va
impacter en premier lieu les pays exportateurs de matières
premières qui vont voir l’effondrement des prix des
matières premières sur le marché mondial, base de leurs
recettes financières. Pour les pays développés, leurs économies seraient moins vulnérables à ce ralentissement.
Comment sera affectée l’Algérie si cette tendance se
maintiendra durant l’année 2017 ?
L’économie algérienne est basée essentiellement sur
l’exploitation des hydrocarbures, quasiment unique ressource du pays. Ces derniers constituent la principale source de revenu du pays (98% des recettes des exportations
algériennes). Au début des années 2000, avec l’aisance
financière, l’Algérie a pu financer les différents programmes de relance économique. Ainsi, le produit intérieur
brut demeure fortement influençable par le comportement
de la production dans le secteur des hydrocarbures. A ce
titre, comme tous les pays exportateurs des matières premières comme le pétrole, l’Algérie sera impactée par le
ralentissement du commerce mondial par la baisse de la
demande du pétrole, première matière des exportations
algériennes, qui va maintenir les prix du brent dans leur
niveau actuel. Cela engendrera le gel des projets d’investissements et la stagnation de la croissance économique en
raison de la baisse sans précédent des recettes du pays.
444
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
algérie
entre succès diplomatique et échec stratégique
RETOUR SUR LA RÉUNION INFORMELLE DES PAYS MEMBRES DE L’OPEP à ALgER
l’issue de la réunion de l’OPEP,
l’Algérie officielle a, sans gestion du risque, vite crié victoire
justifiée par une réduction de
la production de 750 000
barils/jour en vue d’une augmentation des
prix du pétrole. La réalité est que l’OPEP ne
pourra jamais reprendre en main la régulation du marché énergétique puisqu’elle ne
représente que 30% au plus de l’offre mondiale de pétrole. Le seul résultat à retenir
de cette réunion est un consensus sur une
déclaration commune à couleur dominante
politico-stratégique. L’analyse de l’information ne permet plus aujourd’hui de jouer
sur la surpolitisation de l’événement en
présentant cet événement comme une réelle victoire de notre diplomatie. Le résultat
est loin d’un consensus si ce n’est un simple
rapprochement de vues qui pouvait être
réalisé sans regroupement et la planète
aurait gagné en rejet de gaz à effet de serre
et l’Algérie des millions de dinars de frais
d’organisation.
La réduction si elle venait à se concrétiser, et ce n’est pas évident, permettrait la
limitation de la production à 33 millions de
barils jours, ce qui représente une réduction de 750 000 barils/jour à partager
entre les producteurs. Une goutte d’eau
dans l’océan et son impact sur le marché
mondial sera quasi-nul. La géopolitique et
la géostratégie ont fait, avec la bénédiction
des puissances (Europe, Etats-Unis et Russie), que les guerres persistent et les pays
déstabilisés ont besoin de vendre leur
unique production : le pétrole, comme
l’Iran, l’Irak, la Libye et le Nigeria.
De ce fait, le consensus de façade obtenu
à Alger n’est qu’un leurre et cela pourra se
vérifier à vienne le 30 novembre prochain.
La crise qui touche plusieurs pays pétroliers hors OPEP aura un impact déterminant sur le prix de référence que cherche à
stabiliser les pays membres de l’OPEP mais
restera pour longtemps un vœu pieux et
surtout politique.
Finalement, l’accord d’Alger a simplement jeté les jalons sans matérialiser les
grandes lignes d’un futur accord. Les perturbateurs que sont les gros producteurs
comme l’Arabie saoudite, les USA, et les
pays du golfe continueront à pomper du
pétrole à des rythmes imposés par leur
train de vie et de dépenses. Le jeu stratégique surtout de l’Arabie saoudite faisant
croire qu’elle doit accepter un effort diffici-
le a fait passer en douce sa production de 9
à 11 millions de barils/jour entre 2014 et
2016. Une diminution de sa production
d’une centaine de milliers de barils/jour est
une gageure.
Un autre paramètre déterminant dans le
maintien de la production actuelle, donc de
coûts inférieurs à 60 dollars, est le train de
Pub
REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE
DIRECTION DES RESSOURCES EN EAU
DE LA WILAYA DE OUARGLA
NIF : 099030015051545
AVIS D’APPEL D’OFFRES NATIONAL OUVERT
AVEC EXIGENCE DE CAPACITES MINIMALES
N° 16/2016
La direction des ressources en eau de la wilaya de Ouargla lance un Avis d’appel d’offres national pour :
Réalisation d’un réseau d’adduction de nouveau forage albien
jusqu’aux régions d’ALIA et TAIBINE
Les entreprises qualifiées en hydraulique, activé principale catégorie III et plus, peuvent retirer le cahier
des charges auprès du secrétariat de la Direction des Ressources en eau de la Wilaya de Ouargla, sis Rue
Abderrahmane Rouabah, BP 12 Ouargla - Tél : 029.76.36.53 Fax : 029.76.36.54.
Les Offres doivent comporter un dossier de candidature, une offre technique et une offre financière :
4. Le dossier de candidature : contient les pièces fixées à l’article 08 du cahier des charges.
5. Offre technique : contient les pièces fixées à l’article 08 du cahier des charges.
6. Offre financière : contient les pièces fixées à l’article 08 du cahier des charges.
Les offres doivent être déposées par porteur à l’adresse ci-après : Direction des Ressources en eau de la
Wilaya de Ouargla, sis Rue Abderrahmane Rouabah BP 12 – Ouargla.
Le dossier de candidature mis dans une enveloppe séparée et cachetée portant les mentions suivantes :
Dénomination de l’entreprise…………………………………….
« Avis d’appel d’offres national ouvert avec exigence de capacités minimales N°16/2016 pour :
Réalisation d’un réseau d’adduction de nouveau forage albien jusquaux régions d’ALIA et TAIBINE
« Dossier de candidature »
-L’offre technique mise dans une enveloppe séparée et cachetée portant les mentions suivantes :
Dénomination de L’entreprise………………………………………
« Avis d’appel d’offres national ouvert avec exigence de capacités minimales N°16/2016 pour :
Réalisation d’un réseau d’adduction de nouveau forage albien jusqu’aux régions d’ALIA et TAIBINE
« Offre technique »
-L’offre financière mise dans une enveloppe séparée et cachetée portant les mentions suivantes :
Dénomination de L’entreprise……………………
« Avis d’appel d’offres national ouvert avec exigence de capacités minimales N°16/2016 pour :
Réalisation d’un réseau d’adduction de nouveau forage albien jusqu’aux régions d’ALIA et TAIBINE
« Offre financière »
Les trois enveloppes (le dossier de candidature, l’offre technique, et l’offre financière) doivent être mises
dans une 4eme enveloppe, cachetée et anonyme, portant la mention :
« A n’ouvrir que par la commission d’ouverture des plis et d’évaluation des offres - Avis d’appel d’offres
national ouvert avec exigence de capacités minimales N°16/2016 pour : Réalisation d’un réseau d’adduction de nouveau forage albien jusquaux régions d’ALIA et TAIBINE.
-La durée de préparation des offres est fixée à 21 jours à compter de la date de la 1ere publication
dans la presse ou le BOMOP.
-Le dépôt des offres correspond au dernier jour de préparation des offres, et l’heure limite est fixée
jusqu’à 14h00. Si ce jour coïncide avec un jour férié ou un jour de repos légal, la durée de préparation des
offres est prorogée au jour ouvrable suivant jusqu’à 14h00.
-Les soumissionnaires sont invités à assister à la séance d’ouverture des plis prévue le dernier jour de
la période de préparation des offres à 14h30 au siège de la Direction des Ressources en eau de la Wilaya
de Ouargla. Si ce jour coïncide avec un jour férié ou un jour de repos légal, la durée de préparation des
offres est prorogée au jour ouvrable suivant jusqu’à 14h30.
-Les soumissionnaires resteront engagées par leurs offres pendant la duré de préparation des offres
plus 03 mois à compter de la date de dépôt des offres.
-Dans le cas de l’entreprise attributaire du marché, le délai de validité des offres est prorogé systématiquement d’un mois supplémentaire.
Cresus n° 55 du 16 /10/2016 au 22/10/2016- Anep 430 924
Depuis les années 1975,
jamais le gouvernement
n’a versé dans l’autogratification et
l’autosatisfaction mais
en matière de stratégie
économique et
géopolitique il n’y a pas
de quoi crier victoire et
vendre son pétrole à un
prix minimal avoisinant
les 80 dollars pour
assurer l’équilibre
budgétaire. La peau de
l’ours a-t-elle été vendue
avant de l’avoir
localisée ?
A
Par K. benabdeli
vie des pays du golfe et de certains pays
africains et sud-américains. La corruption
dans le domaine pétrolier est devenue
monnaie courante et les corrompus n’ont
pas intérêt à ce que la manne pétrolière
baisse. Pour atteindre cet objectif, chaque
fois que le prix baisse on augmente la production pour préserver une stabilité de la
rente.
Les pays non-OPEP sont un autre vecteur de perturbation de ce domaine, tant ils
maîtrisent les techniques de production du
gaz de schiste et la politique énergétique
mondiale.
En attendant, le marché pétrolier est
figé par une offre excédentaire et qui le restera pour au moins deux à trois ans, surtout
en l’absence de moyens de contrôle efficace
au niveau des pays producteurs.
La production excédentaire, selon les
spécialistes, dépasse les 1.5 million de
barils/jour et tous les chiffres avancés sont
perturbés par la production et le commerce
illicite dans les pays en guerre.
Pour l’Algérie, le prix de référence pour
permettre au gouvernement de continuer à
être un bon dépensier, doit être de l’ordre
de 90 dollars, ce qui reste un rêve et doit
pousser nos gestionnaires à avoir une autre
stratégie économique et politique.
K. b.
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
algérie
445
Quoi qu'il en soit, après le succès de la réunion d'Alger, l'OPEP a une
obligation de résultat. Ayant créé des attentes, elle ne doit surtout pas
échouer le 30 novembre. Sinon, la sanction des marchés pourrait
être très rude.
l’ÉChO d’AlGer
L’AvENIR DE L’OPEP
C
4Par Francis Perrin
e qui s'est passé le 28 septembre à Alger marque
le réveil de l'OPEP (Organisation des pays
exportateurs de pétrole) après deux ans d'impuissance depuis le début de la chute des prix
du brut au cours de l'été 2014. Pour les producteurs, c'est donc une étape importante et très positive.
Cette réunion de l'OPEP dans la capitale algérienne a
débouché sur des résultats concrets puisque les prix du
pétrole ont augmenté depuis cette date. Le cours du Brent
de la mer du Nord pour le contrat de décembre sur ICE
Futures Europe à Londres est à présent compris entre $52
et $53 par baril, soit un gain de plusieurs dollars, ce qui
n'est pas anodin. Rappelons qu'au début de 2016 les prix
du pétrole étaient même tombés brièvement en dessous de
$30/b. Ils ont donc augmenté de près de 50% depuis
février. Cela dit, selon l'OPEP, le prix du panier de bruts
OPEP ne dépassait pas $42,89/b pour le mois de septembre, contre $47,24/b pour le Brent. Il y a en effet une
différence de quelques dollars entre le Brent et le panier
OPEP.
l'OPeP A reMPOrtÉ une viCtOire MAiS il
reSte à GAGner lA Guerre
L'OPEP a donc marqué des points mais il reste à transformer ces gains en un progrès durable, ce qui est loin
d'être gagné. Pour cela, il faut au moins cinq conditions clés
:- La réduction de la production annoncée à Alger (pas plus
de 32,5 à 33 millions de barils par jour de brut à l'avenir
alors que les pays membres de l'organisation ont produit
33,64 millions de b/j en septembre, selon l'Agence Internationale de l'Energie - AIE) doit être confirmée et précisée à
vienne le 30 novembre lors de la prochaine réunion ordinaire de la Conférence de l'OPEP. Plusieurs questions doivent en effet trouver réponse. Par exemple: le plafond serat-il de 32,5 ou de 33 millions de barils/jour ? S'appliquerat-il à compter du 1er janvier 2017 ? Et pour combien de
temps ? Six mois ? Un an ?
- Il faut que les 14 pays membres de l'OPEP s'entendent
sur les niveaux maximums de production pour chacun
d'entre eux tout en faisant certaines exceptions. Il semble y
avoir un accord sur le fait que la Libye, le Nigeria et l'Iran
devraient être exemptés de cette réduction de production.
Mais jusqu'à quel point ? Pourrait-il y avoir une autre ou
d'autres exceptions, dont l'Irak ? Chacun sait que fixer des
plafonds de production par Etat n'est jamais une décision
facile pour l'OPEP.
lA PrOduCtiOn de l'OPeP AurAit AuGMentÉ
de PluS de 900 000 b/j en un An
- Il serait bon qu'entre maintenant et la fin novembre
l'OPEP donne des gages au marché pour apparaître comme
crédible. Si, par exemple, la production de l'OPEP devait
augmenter d'ici novembre, cela créerait des doutes sur sa
volonté de réduire effectivement sa production à la fin
2016 ou au début 2017. Ce n'est pas parce que ce qui a été
annoncé à Alger n'est pas d'application immédiate qu'il
faut faire le contraire entre maintenant et le 30 novembre.
Selon l'AIE, la production de l'OPEP a augmenté de 910 000
b/j depuis un an (il y a diverses estimations sur cette production. L'OPEP cite le chiffre de 33,39 Mb/j pour septembre alors que l'AIE l'évalue à 33,64 Mb/j). Il est temps
de stopper et d'inverser la tendance.
- Si l'OPEP confirme le 30 novembre l'accord conclu à
Alger, il faudra l'appliquer sérieusement. Annoncer une
réduction de production, c'est bien, la mettre en œuvre
rapidement et complètement, c'est beaucoup mieux. C'est
toute la différence entre les discours et les actes. Les premiers peuvent avoir un impact temporaire sur les marchés
mais seules les actions peuvent avoir un impact durable.
- L'OPEP doit poursuivre ses efforts en direction de plusieurs pays non-OPEP, notamment la Russie, en vue de les
convaincre de faire eux aussi quelque chose. Plus le
nombre de pays réduisent leur production et plus les
volumes concernés seront importants, plus l'impact haussier sur les prix sera significatif. Depuis plusieurs mois, les
dirigeants russes font état de leur volonté de limiter la production pétrolière de leur pays pour contribuer à la remontée des prix et le président vladimir Poutine a réaffirmé
cette position il y a quelques jours lors du Congrès Mondial
de l'Energie à Istanbul mais ses déclarations ne sont pas
toujours dépourvues d'une certaine ambiguïté. Et ce pays
n'a récemment manqué aucune opportunité de produire
plus s'il le pouvait.
une rÉduCtiOn d'Au MOinS
1,5 MilliOn de b/j SerAit
SOuhAitAble
L'objectif pour les pays OPEP et non-OPEP devrait être
d'arriver à une réduction de la production de 1,5 million de
b/j au moins. Un tel volume serait susceptible de changer la
donne en accélérant le rééquilibrage du marché pétrolier et
en commençant à mordre sur des stocks de brut et de produits raffinés surabondants à travers le monde. L'excédent
de l'offre pétrolière mondiale sur la demande et l'importance des stocks sont parmi les plus importants facteurs
baissiers sur le marché actuellement. Certes, ce rééquili-
brage est en cours puisque la consommation pétrolière
mondiale continue à augmenter alors que l'offre non-OPEP
diminue du fait de la chute des prix. Selon le dernier rapport de l'OPEP sur le marché pétrolier, qui a été publié le 12
octobre, la demande pétrolière mondiale augmenterait de
1,24 million de b/j (mb/j) cette année pour atteindre 94,40
mb/j et la hausse serait de 1,15 mb/j à 95,56 mb/j. Quant à
l'offre non-OPEP, elle baisserait de 680 000 b/j en 2016
pour s'établir à 56,30 mb/j.
l'OPeP dOit ACCÉlÉrer le rÉÉquilibrAGe du
MArChÉ POur FAire reMOnter leS COurS du
brut
Mais ce processus de rééquilibrage entre l'offre et la
demande prend du temps et il n'est pas sûr que les pays
producteurs puissent attendre davantage au regard des
coûts considérables que représentent pour eux les bas prix
du pétrole depuis deux ans. Ces coûts sont économiques,
bien sûr, mais aussi sociaux et souvent politiques. Il y a les
conséquences négatives sur leurs balances commerciales
et leurs balances des paiements, sur leurs équilibres budgétaires, sur leur endettement et sur leur croissance économique ainsi que l'ensemble des impacts négatifs directs
et indirects sur leurs populations. Le cas du venezuela est
tristement exemplaire à cet égard mais beaucoup d'autres
pays ont considérablement souffert de la baisse des prix.
Trop attendre du marché comporte un autre risque.
Selon l'OPEP, l'offre pétrolière des pays non-OPEP pourrait
repartir à la hausse très prochainement. Dans son dernier
rapport sur le marché pétrolier, l'organisation projette un
accroissement de 240 000 b/j à 56,54 mb/j en 2017. Le
secrétariat de l'OPEP souligne que la Russie serait pour une
bonne part à l'origine de cette augmentation qui ne constituerait pas une bonne nouvelle pour l'OPEP.
lA reSPOnSAbilitÉ de l'OPeP
Le redressement du marché n'est pourtant pas mission
impossible. Selon l'OPEP, la demande de pétrole qui lui est
adressée – ce que l'on appelle souvent l'appel au pétrole
OPEP – serait de 31,8 mb/j en 2016, en forte hausse par
rapport à 2015. Par contre, cette demande ne croîtrait que
de 800 000 b/j en 2017 pour atteindre 32,6 mb/j. Une production OPEP de 32,5 mb/j l'an prochain serait donc en
ligne avec les besoins du marché mondial.Quoi qu'il en soit,
après le succès de la réunion d'Alger, l'OPEP a une obligation de résultat. Ayant créé des attentes, elle ne doit surtout
pas échouer le 30 novembre. Sinon, la sanction des marchés pourrait être très rude.
F. P.
446
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
algérie
quel impact sanitaire et économique
gESTION DU RISQUE DE PUTRÉFACTION DE LA vIANDE
L’actualité de la fête de l’Aid s’est concentrée autour du problème inexpliqué de la putréfaction de la viande le
jour même de l’abattage. Un phénomène inquiétant puisque jugé anormal même quand la viande est mise juste
quelques heures après l’abattage au réfrigérateur voire même au congélateur.
L
4Par K. benabdeli
e nombre de cas, s’il a été minimisé par les services du ministère, est inquiétant puisque c’est
des dizaines de milliers de famille qui ont été contraintes de se
débarrasser de leur (s) mouton (s) et voir
ainsi une somme entre 35 et 50 000 DA
partir en fumée. Comme chaque fois qu’il y
a un danger, les services compétents
ouvrent une enquête tout en minimisant le
danger ; comme toujours, les conclusions
ne seront jamais portées à la connaissance
du public. La maladie a été écartée rapidement en justifiant que 2000 vétérinaires
ont été mobilisés pour s’assurer de l’état
sanitaire du cheptel sacrifié. Comment
2000 vétérinaires peuvent-ils contrôler
plus de 3 millions de têtes, seuls les services compétents pourront répondre à
cette question. Comment ce nombre de
vétérinaires peut-il contrôler les carcasses
et les abats, exception faite de ceux qui
égorgent dans les abattoirs. Il y a lieu de
reconnaître que la gestion du risque n’a pas
été prise en charge et ne sera jamais prise
en charge au regard des conditions d’abattage acceptées et généralisées à travers le
territoire national. Cette impunité, au nom
de la religion, est une atteinte grave à la
salubrité publique avec toutes les conséquences qui en découlent tant du point de
vue sanitaire que de celui de la propreté.
Pour minimiser le risque, les services
compétents affirment que ce phénomène
est circonscrit, ce qui est faut car il a été
constaté à travers plusieurs wilayas du
pays à l’Est, au Centre et à l’Ouest. Pire
encore, on rassure la population avec des
mots mais pas avec la prise de mesures ; ce
qui prouve qu’aucune stratégie de gestion
des risques sanitaires n’est mise en branle
si elle existe au niveau du ministère de
l’Agriculture et de celui de la Santé.
Les citoyens étaient perdus face à ce
phénomène, ne sachant quoi faire surtout
ceux qui ont consommé les abats et même
la viande en pensant qu’elles se sont transformées sous l’effet de la chaleur.
Il faut se rendre à l’évidence que ce n’est
ni la température ni les conditions d’hygiène qui sont à l’origine de ce phénomène
comme le supposent certains responsables
dans leurs déclarations. C’est bel et bien un
phénomène de santé publique et de qualité
du cheptel autorisé à la vente dans des
espaces publics ouverts à cet effet. Tous les
services en charge de la santé du cheptel
ovin semblent ne pas avoir pris conscience
de l’absence totale de traçabilité de notre
cheptel et de son alimentation.
Ce phénomène qui d’ailleurs n’en est
pas un puisqu’il s’agit sans aucun doute (et
les analyses biochimiques, microbiologiques et toxicologiques le prouveront) des
conséquences d’agissements de commerçants véreux ne se souciant point
de la santé des Algériens. Les impacts de
cette putréfaction rapide de la viande
même mise au froid sont au nombre de
trois au moins :
- Le premier est d’ordre de santé
puisque des milliers d’Algériens ont
consommé les abats et même des brochettes à base de viande douteuse. Ces
consommateurs sont inquiets et sont traumatisés vu qu’aucune information ne leur
soit donnée.
- Le second impact est d’ordre économique puisque des milliers d’ovins n’ont
pas été consommés et déposés dans les
dépotoirs et les poubelles avec un risque
important de contamination de l’environnement.
- Le troisième volet est plus grave
puisque le citoyen ne fait plus confiance à
ces responsables qui n’ont pas été capables
d’assurer la qualité d’un produit autorisé à
la consommation.
Le phénomène est sérieux et doit être
pris en considération à un niveau très élevé
pour situer les responsabilités. A défaut, il
est fort probable que les vrais responsables
ne seront jamais inquiétés. En l’absence de
factures, de bons de livraison, d’identification du cheptel, de traçabilité de l’aliment
du bétail, du type d’hormone, du type de
vaccin, etc., les soupçons s’orientent vers
les hormones de croissance qui sont largement disponibles et distribuées sans aucun
contrôle à un cheptel tenu par des maquignons sans scrupules et disposant d’un
cheptel non identifié ne permettant pas de
remonter à la source en cas de problème.
En l’absence de stratégie nationale avérée, testée et validée en matière de gestion
des crises et des risques sanitaires, c’est la
cacophonie qui s’est installée en l’absence
d’une communication vers la population à
travers des consignes précises.
Les causes de ce phénomène inquiètent
du point de vue sanitaire et technique
puisque le vecteur a pu putréfier la viande
même mise au frais. Donc, tout un procédé
de conservation des aliments frais est
remis en cause sans que les autorités ne
s’inquiètent ni ne répondent à la menace en
créant une commission. Il faut noter que
l’utilisation massive et préventive d’antibiotiques en santé animale avec l’arrièrepensée qu’ils accéléreront la prise de poids
des animaux traités a également un impact
sanitaire suite à la dispersion de ces hormones dans l’environnement et donc sur
l’ensemble de la chaîne alimentaire.
Un mois après cette catastrophe alimentaire, aucune information n’est donnée aux
citoyens, surtout pour ceux qui ont
consommé cette viande avariée. Les résultats de l’analyse tardent à être rendus
publics et la commission ne s’est pas prononcée. Le mystère enveloppant cette affaire alimente la suspicion et le commérage.
Tous ces éléments se justifient par l’absence de stratégie préventive tant dans la prise
en charge d’une affaire sanitaire que dans
celui de la communication.
Que faire face à cette situation où la responsabilité des institutions est totalement
engagée ?
1. La prise de conscience dans un Etat de
droit doit être plus forte et surtout stratégique à travers des mesures de salubrité
publique qui devaient empêcher une pratique à risque sanitaire élevé autorisée
dans tous les espaces publics.
2. Identifier le cheptel en assurant une
traçabilité permanente depuis la naissance
jusqu’à l’abattage.
3. Revoir toute la stratégie de contrôle
des produits alimentaires et des intrants
consommés par tous les êtres vivants.
4. Instaurer la pratique de la facturation
pour toute vente d’ovins.
K .b.
447
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
algérie
CAPITAINES DE L’INDUSTRIE OU SIMPLES RENTIERS ?
leur nOMbre et leurS FOrtuneS ne CeSSent d’AuGMenter en AlGÉrie
La fin de l’idée du tout-État, matérialisée par les réformes
économiques structurelles de la fin des années 1980 et des
années 1990, devait donner naissance à une nouvelle économie basée sur l’initiative privée et libérée du dirigisme.
Des fortunes ont commencé à émerger au dessus de la
chape de plomb du système monolithique de l’économie
dominé par l’appareil administratif et bureaucratique.
vingt-cinq années après l’ouverture économique, des entrepreneurs ont émergé, notamment dans le secteur de l’agroalimentaire et de l’agro-industrie, mais est-ce suffisant
pour parler de véritables capitaines de l’industrie qui
créent de la richesse et de l’emploi se substituant à la
dépendance des hydrocarbures ? Les experts sont partagés.
Hormis quelques success story, le constat est mitigé.
Sur le terrain, la concurrence continue à être déloyale sur
le marché, à défaut d’un rôle régulateur de l’État. Dans la
sphère financière, l’argent des banques publiques continue
à accompagner les projets de développement en lieu et
place d’une bourse qui existe certes mais dont la frilosité
des entreprises privées à son égard, justifie quelques atermoiements.
Alors, capitaines d’industrie ou simples rentiers, nos
patrons sont diversement appréciés en raison de la relativité des paramètres qui servent à juger de leur apport à
l’économie nationale et à la sécurité alimentaire du pays.
nLes
SOMMAIRE
industriels algériens à l’aune de
la crise économique :
nLes dangers du monopole ; De Berlusconi à
Rebrab
Pages 7 et 8
nLady
Olga Maitland, présidente de la Mission économique
algéro-britannique, à Crésus:
nRiches
industriels et pauvre collectivité
Pages 8 et 9
n Capitaines d’industrie en Algérie :
Un mythe savamment entretenu
Page 10
Kamel Aït bessaï
LES DANgERS DU MONOPOLE
4Patricia Mazy
le monopole existe dès lors qu’un seul
producteur détient l’exclusivité d’un produit ou d’un service sur le marché. Cette
situation, qui pour le producteur est particulièrement confortable à tous niveaux,
l’est beaucoup moins pour le consommateur et remet en question les causes de la
concurrence. Plus que des avantages, le
monopole comporte des dangers qui non
seulement mettent un frein à l’expansion
économique mais provoque aussi des
carences financières et portent atteinte au
bien-être social.
L’absence de concurrent, les prix élevés,
et une piètre qualité, constituent l’essence
de cette exclusivité qui peut être particulièrement néfaste, surtout lorsqu’elle a trait
au domaine public.
Le monopole va ainsi anéantir de manière certaine l’esprit de concurrence loyale
entre les individus mais aussi entre les
états alors que cette concurrence concourt
en général à perfectionner le travail et à
augmenter le niveau de production.
Le monopole va également provoquer
des problèmes sociaux comme par exemple
le chômage, l’inflation, la fraude, le favoritisme et la corruption. Enfin, le monopole
sera un frein à la recherche et au développement. Effectivement, si l’on est seul sur le
marché à produire un bien ou un service,
pourquoi se casser la tête à l’améliorer
puisque personne ne pourra nous voler la
place. En découlera donc un manque de
projets et par conséquent un manque d’investissement. C’est donc l’ensemble du système économique, financier et social qui en
pâtira.
Certains monopoles peuvent avoir également parfois des conséquences extrêmement importantes au niveau politique et
c’est le cas en particulier de celui crée par
Silvio Berlusconi en Italie.
Fin des années 70, quand Silvio Berlusconi a pris rendez-vous avec Agnelli, l’homme d’affaires italien le plus important à ce
DE BERLUSCONI À REBRAB
CERITAL
moment-là, ce dernier l’a fait attendre de
longues heures afin d’humilier ce jeune
loup qui s’apprêtait à prendre possession
de l’Italie.
A cette époque, la télévision italienne
était composée de quelques chaines, les
Rai, dont chacune d’entre elles était aux
ordres de partis politiques différents. Il
s’agissait d’un ordre rigide et bien établi.
Lorsque Berlusconi a mis sur le marché ses
premières chaînes de télévision, s’en est
suivi une petite, mais véritable révolution
non seulement dans le milieu audiovisuel
mais également dans le paysage économique et politique.
Berlusconi pour arriver au pouvoir avait
tout compris. Les grands pays de l’Europe
occidentale et d’Amérique du nord se définissaient comme des démocraties mais il
ne s’agissait que d’une apparence qui
cachait une toute autre réalité. Les élections étaient en fait organisées mais faussées par l’argent et le contrôle des médias.
Quelques années plus tard, le groupe
Medias et qui détenait la plupart des
chaînes de télévision italiennes mis à part
les Rai devenait la référence pour le peuple
italien en matière de spectacles et d’information. On repartait deux milles ans en
arrière avec comme devise pour calmer et
contenter la population ‘du pain et des
jeux’. Les moyens de communications
certes n’étaient plus les même mais l’esprit
n’avait guère changé. On ajoute un club
prestigieux de football à son patrimoine et
la télé fait le reste. La télévision devient
ainsi un moyen non seulement de manipuler et d’abrutir un peuple mais surtout, elle
permet d’asseoir le pouvoir politique en
place et de se faire énormément d’argent.
Les très vieilles séries américaines,
comme Texas Walker Ranger pour n’en
citer qu’une, sont transmises en boucles
depuis plus de dix ans et ça continue toujours et toujours…
Les émissions de cuisine populaires et
celles qui racontent à longueur de journée
le malheur des autres ont pignon sur rue.
Les seules émissions avec lesquels on ne
joue pas, concernent bien évidemment l’information faite uniquement, cela va de soi,
à la sauce Berlusconi.
Une toute petite ombre au tableau existe néanmoins, le monopole n’est qu’un
quasi monopole. Qu’à cela ne tienne, on
s’empare de la presse écrite et pourquoi
pas, de l’édition.
Les nominations importantes de la Rai
sont faites dans le bureau du Premier
ministre et on demande aux annonceurs de
ne plus faire de publicité dans le journal de
centre gauche récalcitrant, espérant voir
ainsi mourir à petit feux celui qui n’hésite
pas à dénoncer ces attitudes scandaleuses.
Le monopole, on le sait, a comme principal défaut de procurer la plupart du temps
un service de mauvaise qualité dû à un
manque de concurrence. En ce qui concerne la télévision italienne, c’est une évidence
et certain n’hésite pas à la surnommer ‘Tv
spazzatura’ ou ‘Télévision poubelle’.
Mais rien ni personne ne peut mettre fin
à l’existence de ce monopole, pas même la
législation européenne qui pourtant lui est
contraire. Bien au contraire, l’empire
s’agrandit et les héritiers participent eux
aussi à son développement.
Aujourd’hui le fils, Pier Silvio Berlusconi
est administrateur délégué du groupe
Mediaset et son père qui est toujours propriétaire envisage néanmoins un recentrage sur l’édition et la presse au travers de
son groupe Mondadori. Marina Berlusconi,
sa fille est présidente de Fininvest, holding
qui contrôle Mediaset et le groupe Arnoldo
Mondadori editore. Malgré des difficultés
financières obligeant la famille Berlusconi à
vendre le club de football et a envisager de
partager Mediaset avec des étrangers
comme les français (la vivendi de vincent
Bolloré), le monopole est toujours en place
ou du moins semble le rester. Pier Silvio
Berlusconi a d’ailleurs déclaré récemment :
‘ Nous sommes courtisés par de nombreuses personnes. Mais quelque soit la
décision qui sera prise, le contrôle de
Mediaset ne sera pas remis en question’.
Pas question donc de renoncer au pouvoir absolu. Mais pour combien de temps
encore ? Tout change dans la vie, rien ne
dure, pas même les monopoles.
P. M.
448
algérie
CAPITAINES D’INDUSTRIE OU RENTIERS ?
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
LADY OLgA MAITLAND, PRÉSIDENTE DE LA MISSION
ÉCONOMIQUE
ALgÉRO-BRITANNIQUE, à CRÉSUS
«Haddad a un bon sens des visions»
plus de dix années d’existence. C’est
un conseil qui travaille beaucoup
mais qui ne bénéficie pas d’assez de
publicité. Parlez-nous de ce que
vous faites ?
Lady Olga Mitland : IOn a décidé de
lancer le conseil d’affaires algéro-britannique ici. Arslane m’avait arrangé des
réunions avec beaucoup de ministres
ainsi qu’avec le Premier ministre de
l’époque, Ahmed Ouyahia que j’ai rencontré quatre fois. Deux années plus tard,
j’ai eu l’audience avec M. le président. Ce
fut un grand honneur pour nous, d’autant
que le Président aime beaucoup la reine
Elisabeth II. Le Président Bouteflika était
fasciné par ses idées et par la chaleur
avec laquelle elle discutait du Commonwealth. Dix ans après, la différence entre
l’Algérie de 2005 et celle de 2015 est
énorme.
Justement, c’est quoi la différence?
Naturellement, les relations sont
devenues beaucoup plus sophistiquées
dans le domaine du commerce, dans le
secteur privé, dans le secteur énergétique qui est très dynamique. j’ai eu à
apprécier l’activité du Forum des Chefs
d’entreprises (FCE) qui est énorme. Mais
ce n’est pas seulement cela la différence.
La réduction du prix du pétrole, c’est une
opportunité pour le secteur privé en
Algérie. je suis optimiste quant au développement de l’économie dans le secteur
privé. Moi, mon rôle c’est de chercher des
partenariats pour les deux secteurs,
public et privé.
Dans ce changement que vous
évoquez, où le gouvernement
commence à écouter le monde
d’affaires et le monde du privé qui
détiennent l’économie, est-ce que le
pouvoir politique ne risque pas de
glisser des mains des bureaucrates
vers celles des libéraux qui ont
l’argent, tout ceci en l’absence d’un
Parlement influent et d’élus qui ont
un rôle dans la société…
L’Algérie est un pays émergeant. La
London Stock Exchange a dit qu’elle est
d’accord pour discuter avec la délégation
algérienne et d’envisager un partenariat
à court, moyen et long terme et développer la confiance. je suis consciente qu’il y
a la donne politique. je ne crois pas qu’il
y a un risque car la relation est gagnantgagnant en affaire. Il est question de
changer de culture et de donner une
chance aux hommes d’affaires pour se
développer. Le gouvernement est
conscient aujourd’hui qu’il n’a plus le
choix que de diversifier son économie.
Justement qu’est-ce que vous pensez
de M. Haddad qui dirige le FCE, de
sa motivation et de l’impulsion qu’il
a données au FCE ?
C’est fascinant. j’ai connu M. Réda
Hamiani, au début du FCE. Mais M. Haddad a un bon sens des visions. C’est quelqu’un qui enchaîne réunions et contacts
tout au long de la journée. Autour de lui,
il y a des personnes qui ont les mêmes
qualités et le même sens de vision, tels M.
Fichker. Ces personnes savent que le
moment est arrivé pour le secteur privé
et le gouvernement l’écoute d’une manière différente par rapport aux cinq années
passées.
Tout en étant franchement libéral, je
m’interroge s’il est faisable de donner le
pouvoir aux hommes d’affaires en l’absence d’un Parlement solide…
Il faut accepter le fait que l’Algérie
n’est pas comme un autre pays d’Europe.
Elle n’a pas la même représentation historique qu’en grande-Bretagne où il y a
un Parlement qui a 800 années d’existence. En Europe, on a accepté que la Constitution soit le fait du Parlement. Il faut
donc accepter la réalité telle qu’elle est et
agir en fonction des possibilités offertes.
Sans la stabilité, il n’y a pas d’investissements. Il y a beaucoup de problèmes de
sécurité ailleurs, comme en Afrique du
Sud, au Kenya ou au Nigéria, mais ici la
situation est sous contrôle.
Le défi pour une entreprise étrangère
c’est la bureaucratie. Il faut comprendre
comment cela fonctionne et savoir faire
la présentation. C’est un slalom. Pour
moi, mon rôle est d’apporter le soutien et
montrer comment faire l’entrée dans le
secteur public et aussi en direction du
secteur privé.
vous qui avez travaillé avec la
défunte Margaret thatcher, vous
savez que la femme d’affaires n’est pas
mise en avant ? qu’est-ce que vous
pensez de la femme qui mène les
affaires ? dites-nous quelques mots
sur Mme thatcher et pensez-vous que
la femme algérienne peut être une
bonne chef d’entreprise.
Mme Thatcher était une femme extraordinaire. j’ai fait la connaissance de
beaucoup de femmes algériennes qui ont
beaucoup de détermination et qui travaillent avec beaucoup de génie. jusqu’à
présent, il n’y a pas beaucoup de femmes
dans le gouvernement qui ont l’expérience. je sais que la participation féminine
est encouragée au Parlement. Même si les
femmes ne sont pas élues mais nommées
(système de quotas, ndlr), mais les
femmes sont présentes. C’est un exemple
pour beaucoup de pays dans le monde. Il
y a deux années de cela, j’ai participé à
une conférence organisée par les femmes
parlementaires. Même si la participation
des femmes à la prise de décisions est
limitée ou bien dans des secteurs limités,
les nombreuses femmes médecins, avocates, ingénieurs et femmes d’affaires
que j’ai connues ici me font dire qu’il y a
un avenir pour les femmes dans votre
pays. je compare les femmes algériennes
aux lionnes, aux tigresses. Elles sont
extraordinaires.
Racontez aux lecteurs de Crésus une
anecdote que vous avez vécue avec
Margaret Thatcher, la Dame de fer
C’était une femme très intéressante
parce qu’elle était déterminée, avait une
forte personnalité et, bien sûr, une grande intelligence. Mais la chose la plus
importante est qu’elle a une vision claire
et elle maintient sa vision et c’est le
secret de sa réussite. Les hommes qui
formaient son cabinet étaient contents
de travailler avec une femme comme elle.
C’est une dame convaincue et dotée d’un
grand sens de direction.
En parlant de femmes, est-ce que
Mme Angela Merkel a le même
esprit ?
C’est la reine de toute l’Europe. Nous
avons la reine Elisabeth ; mais elle, elle a
une position spéciale.
entretien réalisé par S. M.
LEUR FORTUNE A CONNU UNE
PROgRESSION FULgURANTE CES
DERNIèRES ANNÉES
riches industriels
et pauvre
collectivité
Leur nombre a progressé en l’espace de seulement
quelques années. Ils sont riches, voire richissimes pour
certains d’entre eux. Ils sont des milliardaires qui
conduisent des groupes industriels privés, dont les
sigles donnent, par leur simple évocation, des idées à
tous les Algériens. Ils engrangent annuellement des
dizaines, voire carrément des centaines de milliards
de dinars.
I
Par boualem rabah
l s’agit des patrons privés algériens, auxquels on attribue le titre
trompeur – sauf pour une minorité
d’entre eux – de « capitaines de
l’industrie algérienne ». Certains
sont plus connus que d’autres, mais ils ont
tous, comme on dit dans le jargon populaire algérien qui désigne les fortunes, la
chkara. Mais cette réputation est-elle réelle ou surfaite ? Quel est leur apport à l’économie nationale ? En ce temps de Taqechouf (austérité), chacun apparaît à sa
juste valeur. Le gouvernement qui compte
énormément sur eux pour soutenir la
croissance économique a fini par perdre
toutes les illusions. Surtout, dans la foulée
de l’emprunt obligataire national lancé
pour lever de nouveaux fonds nécessaires
pour « le renouveau économique». L’apport des patrons, notamment ceux regroupés au sein du Forum des chefs d’entreprise (FCE), principaux alliés de l’exécutif,
était faible, pour ne pas dire insignifiant.
Pourtant, dans leurs déclarations, ils affichent tous leur engagement à contribuer
au développement économique du pays. «
Patriotisme économique », « au service de
l’économie nationale » et « révolution
industrielle »… ces slogans et d’autres
reviennent comme un leitmotiv dans leurs
discours. joignent-ils le geste à la parole ?
Avant de répondre à cette question, nous
sommes contraints de désigner quelques
noms de patrons les plus en vue dans le
pays. Une dizaine caracole en tête des
riches algériens, dont le plus célèbre, le
milliardaire Issad Rebrab (Cevital), le
patron des patrons, Ali Haddad (FCE), le
PDg du groupe Condor, Abderrahmane
Benhamadi, le groupe Mehri de Djillali
Mehri, Mohieddine Tahkout et Karim Kouninef...
un POidS lOurd et deS « nAinS »
Entre ces six, les styles, les niveaux de
performance et les stratégies diffèrent,
même s’ils ont des similitudes. Présentons- les d’abord avant d’évoquer les
points forts de chacun. L’exemple du succès algérien est, sans conteste, symbolisé
par le patron du groupe Cevital, Issad
Rebrab. Une véritable école de la réussite
dans les affaires. Sa réputation a franchi
les frontières du pays et son parcours est
donné comme un exemple de réussite
dans plusieurs pays à travers le monde.
Fondateur du premier groupe privé en
Algérie, l’homme a intégré en 2013 le
célèbre classement du magazine Forbes.
Simple enseignant de comptabilité au
départ, il a réussi à se classer, depuis
2015, parmi les cinquante plus grandes
fortunes africaines. Seul algérien
d’ailleurs à se frayer une place dans ce
classement africain, avec 3,2 milliards de
dollars. Cependant, Issad Rebrab n’est pas
connu seulement pour sa richesse. Son
sens de l’entrepreneuriat qui s’est aiguisé
avec les années en Algérie, lui a ouvert
grand toutes les portes à l’étranger, y compris en Europe où il a réussi à acquérir des
usines. Ce renard de l’économie qui peine
à réaliser d’autres importants projets, en
raison des blocages bureaucratiques et
politiques, a réussi grâce à sa stratégie
communicationnelle à conquérir, aussi
facilement, des marchés internationaux
finances CAPITAINES D’INDUSTRIE OU RENTIERS ?
449
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
n’a réussi à faire jusque-là. L’homme
sait vendre ses idées. Que ce soit en Algérie, en France, en Italie et ailleurs, il a pu
gagner de l’estime. Boudé en Algérie, le
patron de Cevital est souvent reçu en haut
lieu à travers le monde, notamment en
Europe et en Amérique. En Afrique, l’accès
aux marchés semble très facile pour le
groupe Cevital, dont le chef est demandé
partout, y compris au Maroc où les autorités du Royaume lui font la cour depuis plusieurs années. Toutes ces données font
ainsi de Issad Rebrab un véritable poids
lourd devant lequel le reste des industriels
algériens apparaissent comme des « nains
».
deS POidS et dÉMeSure
Mais en termes d’investissement en
Algérie, le patron du groupe Cevital qui a
déjà à son actif plusieurs projets florissants
dans divers secteurs d’activité, se plaint de
« blocage politique » de ses autres projets
qui pourraient être bénéfiques pour le
pays. Selon lui, les projets bloqués sont en
mesure de générer plusieurs milliards de
dollars et des milliers d’emplois directs.
Contrairement à cette véritable machine
créatrice de richesse, les cinq autres
hommes d’affaires bénéficient de toutes
les largesses des autorités. Accès aux marchés publics, ouverture de lignes de crédits
auprès des banques publiques et accès
facile au foncier industriel malgré sa rareté. C’est le cas notamment de celui qui fait
le plus parler de lui en ce moment tant
dans les milieux politiques que dans celui
des affaires, en l’occurrence le milliardaire
Ali Haddad. A la tête du groupe qui porte
son nom, ETRHB Haddad, l’homme a réussi, en l’espace de quelques années, à effectuer une ascension fulgurante. Son investissement politique s’est soldé par un
retour fructueux de l’ascenseur. En effet,
l’homme de 49 ans a été l’un des bailleurs
de fonds pour le financement des campagnes électorales du président Bouteflika
en 2009 et 2014. grâce à sa proximité avec
les milieux politiques et, sans doute pour
service rendu, l’actuel président du FCE a
raflé pratiquement tous les marchés juteux
dans le secteur du BTPH. Réfection d’un
important tronçon de l’autoroute EstOuest, réalisation du Stade de Tizi Ouzou…,
pratiquement tous les marchés dans le secteur des travaux publics lui reviennent,
comme « de droit ». Il ne se contente pas
des seuls marchés de ce secteur. Ali Haddad brasse encore plus large, en touchant
d’abord au sport avec l’achat de la majorité
des actions dans le club de football algérois, l’USMA. Le secteur des hydrocarbures
suscite aussi sa convoitise. Le groupe n’a
cependant aucune visibilité à l’international, même si la fortune de son chef est estimée actuellement à quelques 400 millions
d’euros. Mais il envisagerait d’acquérir des
hôtels de luxe à Barcelone, en Espagne. La
presse espagnole avait même donné les
noms des hôtels qu’Ali Haddad s'apprêtait
à acheter, à savoir le grand Hotel La Florida, sur les hauteurs de la ville, et l'Hôtel
Miramar Barcelona, non loin du front de
mer. En 2011, il avait déjà racheté le
célèbre Hôtel Palace pour la bagatelle de
80 millions d’euros. C’est en somme la
seule « stratégie internationale » du patron
des patrons. Certains patrons investissent
plus dans la communication que dans des
projets. Dans cette catégorie, on trouve
notamment celui qui fut longtemps l’homme le plus riche d’Algérie : Djilali Mehri.
Spécialisé dans le secteur du tourisme, son
groupe gIMMO (groupe d’investisseurs du
Maghreb et du Moyen-Orient) a certes une
présence dans certains pays d’Afrique,
mais son apport au secteur du tourisme
tarde à se concrétiser. Périodiquement, les
responsables de son groupe organisent des
sorties médiatiques et présentent d’ambitieux projets touristiques. Mais on ne sait
plus s’ils seront achevés un jour. Le natif
d’Oued Souf, victime d’AvC, a été contraint
de suspendre certains de ces projets, dont
le lancement d’une chaîne de télévision
maghrébine consacrée à l’économie, la cul-
ture et le tourisme. Djilali Mehri signe
aussi une présence timide dans l’agriculture, l’agroalimentaire, les boissons gazeuses
(Pepsi Cola Algérie) et alcoolisées, l’hôtellerie (le Royal à Oran, les hôtels Ibis et
Novotel avec la chaîne Accor etc.), le tourisme et la promotion immobilière. L’homme, dont la fortune est estimée à 600 millions d’euros, avait aussi émis le vœu d’investir dans le secteur de la santé.
L’autre fortuné qui dispose plutôt d’une
présence médiatique que d’autre chose est
Abderrahmane Benhamadi. Son groupe
Condor qui fait dans le montage du matériel électroménager et de l’importation,
directement de Chine, de ses téléphones
portables et tablettes, annonce, à travers
des campagnes publicitaires, des projets
importants. Pour son activité dans le montage, le groupe bénéficie des avantages à
l’importation de sa matière première, mais
aussi de ses produits finis auquel il accole
seulement, selon les observateurs, les étiquettes made in Algeria. En matière de
création d’emploi, Condor reste aussi très
timide avec seulement 4600 employés.
Mais son patron voit sa richesse personnelle augmenter sensiblement pour
atteindre les 100 millions d’euros environ.
Mahieddine Tahkout, pour sa part, symbolise l’une des contradictions du système
économique algérien. Marchant de fruits et
légumes à l’origine, l’homme d’affaires
possède, actuellement, le plus grand parc
de bus en Algérie : environ 3500 bus et
véhicules. Il s’est fait connaître depuis des
années grâce au transport de plusieurs
milliers d’étudiants qu’il assure quotidiennement avec ses bus. Un gros marché qu’il
monopolise depuis près de 20 ans déjà.
Cela lui a valu une richesse colossale (près
de 120 millions d’euros) qu’il investit
désormais dans l’importation de véhicules
en représentant au moins sept marques
asiatiques.
Karim Kouninef fait aussi partie de
cette catégorie de riches algériens aux
grandes ambitions. A la tête d’une entreprise familiale fondée par son père dans les
années 1970, l’homme de 44 ans devient
influant lui aussi. grâce à son groupe
Heavy Construction Company, il joue
même sur le terrain politique en finançant
des campagnes électorale des candidats à
la présidentielle en Algérie. Le retour sur «
investissement » est rapide. En 2007, HCC
a réussi un grand coup en décrochant l’autorisation de racheter l’unité algéroise de
l’Entreprise nationale des corps gras
(ENCg) qui fabrique les huiles ménagères.
Mais le palmarès de la famille Kouninef
était déjà riche avec des investissements
dans d’autres secteurs, à l’image des
hydrocarbures où l’entreprise a été le premier privé algérien à réaliser des forages
pétroliers pour la multinationale Mobil.
La liste s’est allongée ces dernières
années avec l’émergence de Mohamed Laïd
Benamor, Abdelouahab Rahim, Abdelmadjid Kerrar…
leS MÉdiAS Attire
leS COnvOitiSeS
Dans leur quête de notoriété et de
richesse, les industriels algériens n’ont pas
hésité à investir le secteur des médias. En
mesure de leur assurer plus de visibilité et
d’influence, la presse a été leur première
cible. Et cela dès l’ouverture du secteur à
l’initiative privée, suite à la circulaire de
Mouloud Hamrouche de mars 1990.
Les expériences de Bolloré et Bouygues
qui ont réalisé une sérieuse concentration
des médias en France, leur ont donné des
idées. Et le premier à avoir met un pied à
l’étrier de la presse en Algérie est Issad
Rebrab. Entré comme actionnaire dans le
capital du journal Liberté, le patron de
Cevital est vite devenu majoritaire. Il
rachète les parts de la majorité des actionnaires, à l’exception de celles d’Ahmed Fat-
tani, l’actuel directeur de L’Expression, qui
avait refusé de céder les siennes. Mais cela
ne l’empêche pas, à travers une stratégie
de maître, de rendre insignifiante la présence d’Ahmed Fattani au sein du journal
en augmentant son capital. Mais Liberté
n’a pas donné l’impression d’être le journal
d’Issad Rebrab. Son contenu est resté globalement neutre, même si certaines de ses
prises de position politiques reflétaient
bien sûr celles de son patron. L’homme,
selon même des confrères de Liberté,
donne une large autonomie de gestion à
son quotidien qui s’est placé parmi les
meilleurs journaux francophones dans le
pays. En revanche, son hebdomadaire,
Liberté économie n’a pas eu la même réussite. Au fil des années, le patron de Cevital
a pris goût à cette aventure. Il tente alors
de renforcer son groupe de presse. Il essaie
de racheter d’autres titres à partir des
années 2000. Son entreprise a abouti en
2016 avec l’acquisition, pour plus de 4 millions de DA, le groupe de presse El Khabar
(journal et chaîne de télévision KBC).Un
rachat qui a vite suscité des réactions des
responsables politiques, en dénonçant «
une concentration des médias entre les
mains d’industriels ». La fin, on la connaît.
La transaction a été invalidée par la justice
après une plainte du ministère de la Communication.
En revanche, le PDg de l’ETRHB, Ali
Haddad concentre dans ses mains deux
quotidiens et deux chaînes de télévision…et une tentative de rachat des actions
dans les quotidiens El Watan et El Khabar.
Ali Haddad donne l’impression d’avoir créé
son groupe de presse seulement pour brasser de la publicité des entreprises
publiques. En effet, si ses chaînes de télévision tentent de se frayer une place dans le
paysage audiovisuel national en variant
leurs programmes, ses journaux sont «
incolores et inodores ». Leur ligne éditoriale reste confuse. De plus, on ne trouve
aucun effort de promotion du groupe Haddad, ni une explication de ses « idées économiques ». L’autre exemple de la pénétration des industriels dans le monde des
médias est celui de Mehieddine Tahkout.
Après avoir été la cible préférée de la chaîne Numédia News qui avait diffusé plusieurs dossiers le concernant, il a fini par la
racheter. Pour quel but ? On n’en sait rien.
A moins de vouloir la museler, on ne voit
aucun intérêt pour le millionnaire dans un
média, pratiquement, sans aucune audience. Cela renseigne également sur l’amateurisme de ces patrons qualifiés « de nouveaux riches ».
A l’exception de Issad Rebrab dont le
groupe est réellement créateur de richesse et d’emploi dans plusieurs wilayas, l’apport des autres industriels reste en deçà
des espérances. De l’avis de plusieurs
observateurs, les hommes d’affaires algériens sont beaucoup plus dans la logique
d’enrichissement personnel que dans l’engagement pour le développement économique du pays. Cela s’est confirmé, surtout
depuis 2014. Tout en exigeant des
réformes économiques, sans doute nécessaires, les patrons algériens ne font
presque aucun sacrifice pour le bien du
pays. L’opération de levée de fonds pour le
financement des projets économiques n’a
pas drainé, comme attendu par le gouvernement, l’adhésion de « ses alliés privés ».
Leur soutien s’est limité à une simple promesse sans lendemain. Sans l’engagement,
obligatoire, des entreprises et des banques
publiques, l’emprunt obligataire aurait été
un échec cuisant. Même sur le plan de l’absorption du chômage, le privé, comme le
confirment les statistiques de l’ONS,
emploie très peu. Même en matière de partenariat avec les entreprises publiques, le
privé algérien laisse le champ libre aux
opérateurs étrangers.
b. r.
4410
dossier
CAPITAINES D’INDUSTRIE OU RENTIERS ?
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
un mythe savamment entretenu
La mission du FMI, qui a séjourné en Algérie entre le 1er et 14 mars dernier, a fait son audit. Se basant sur la
diminution rapide de l’épargne budgétaire, le Fonds estime qu’il est plus que nécessaire de faire appel à
l’endettement pour financer les déficits à l’avenir.
I
4Par Moncef Wafi
l préconise également l’ouverture du capital dans la
transparence de certaines entreprises publiques et
la réforme des subventions tout en conseillant «de
vastes réformes structurelles». Le FMI veut aussi
une plus grande ouverture de l’économie aux
échanges internationaux et à l’investissement étranger,
l’amélioration de l’accès à la finance et le développement
des marchés de capitaux, et le renforcement de la gouvernance, la concurrence et de la transparence. En deux mots,
le même programme que le patronat algérien qui a montré
les crocs, lors de la deuxième université d’été du FCE. Pour
son président, le gouvernement ne fait pas assez pour
mettre l’entreprise au centre de la politique de développement ou plutôt dans la politique de reconversion économique dictée par la dépendance de l’Algérie aux seules
recettes d’hydrocarbures. Ali Haddad a tiré, à cette occasion, et sans sommation sur la politique du gouvernement
qui, selon lui, se contente d’une profusion de textes et de
déclarations officielles appelant à «plus de radicalité» et à
accélérer la cadence des réformes. Ali Haddad n’est pas
content et il le fait savoir. Depuis que Louisa Hanoune est
passée en mode silence après la tentative de redressement
qu’elle a subie, aucune voix discordante ne vient perturber
la voix néo-libérale que veut faire prendre le patronat au
pays. En effet, le patron du FCE avait indiqué que les facteurs qui constituent un véritable frein à l’économie nationale sont à chercher dans le foncier industriel, le blocage
des budgets en ce qui concerne les projets publics et le système des subventions généralisées. De Constantine, il a
exprimé son impatience face à la lenteur des réformes qui
ne vont pas assez vite à son goût, affirmant même que l’Algérie a trois, voire quatre ans pour réussir sa «transition
d’une économie de rente vers une économie productive».
le virAGe de COnStAntine
Il critiquera, à demi-mots, le nouveau Code de l’investissement avouant l’échec d’«un véritable changement». L’attitude d’un Bouchouareb sensé défendre l’Etat consacre, et
définitivement, l’image d’un gouvernement attentif aux
désidératas d’un patronat jamais satisfait. En effet, le
ministre de l’Industrie enverra des signes forts au FCE
déclarant que «tout est possible en Algérie» à propos des
réformes à mener. Et pour montrer sa bonne foi, il évoquera 27 mesures initiées par son département depuis 2014
qui répondent directement aux préoccupations des chefs
d’entreprises et visent à améliorer l’environnement des
affaires. Pour davantage de concessions, Bouchouareb a
également déclaré qu’un avant-projet de loi sur le partenariat public-privé est en préparation assurant qu’il s’agira
d’un «tournant pour l’économie» du pays. Mais en faveur de
qui ? Cette offensive est interprétée par certains observateurs comme un signe de l’exaspération des milieux d’affaires devant l’action socialiste du gouvernement Sellal qui
a promis que la politique économique du pays n’allait pas
laisser les couches défavorisées sur le bas-côté de la route.
Pourtant, les contours de ce nouvel ordre économique
national prennent des allures d’obsèques du secteur public
au profit du privé installé aux rênes de la finance nationale.
Et les Algériens d’assister impuissants à l’émergence d’une
faune d’affairistes puissamment relayés dans le gouvernement Sellal prêts à sacrifier tous les acquis sociaux à la gloire de la rente. En Algérie, on a plus tendance à parler d’affairistes, de trabendistes ou de beznassis, à la rigueur
hommes d’affaires, quoique, qu’à évoquer les capitaines
d’industrie, un concept encore étranger dans les mœurs
économiques du pays. Hormis le patron de Cevital qu’on
présente comme Le capitaine d’industrie algérien le mieux
et le plus côté sur la scène internationale, elles sont nombreuses les fortunes du pays à n’exister que par leur proximité, souvent douteuse, avec le pouvoir politique. Dans
l’imaginaire populaire, difficile de soustraire les sagas
industrielles de ses parrains politiques.
PArAPluie POlitique
A chaque homme d’affaires, une ombre bienveillante et
des relais influents dans l’administration pour assurer
prêts bancaires, facilitations administratives et surtout passation de marchés les plus juteux s’il vous plait. Ces parapluies haut placés ont mis en place des monopoles sur
mesure à travers des prête-noms, des hommes de paille et
des industriels fabriqués de toutes pièces qui ont fait fortune du jour au lendemain. Mis à part deux ou trois noms
qu’on peut tracer dans l’histoire, toutes les grandes fortunes « industrielles » d’Algérie ont grandi sous le règne de
la prédation économique et du grand bradage foncier. Et ce
sont ces mêmes noms, qui se prévalent d’une hypothétique
légitimité financière dont les origines restent obscures, qui
se placent pour rafler la mise par le truchement du nouvel
ordre économique prôné par le gouvernement Sellal et sa
volonté de s’émanciper de la fiscalité pétrolière pour
s’orienter vers la diversification de l’économie nationale.
Depuis des années, on retrouve pratiquement les mêmes
patronymes qui ont investi dans presque tous les rouages
de l’économie. Des hommes qui écument les avis d’appel
d’offres, faisant main basse sur les marchés du BTPH et qui
sous-traitent par la suite. Des hommes qui jouent de leurs
relations pour monopoliser un tel secteur d’activité en écartant toute concurrence. On les retrouve à la tête d’entreprises tentaculaires et derrière des groupes de presse à la
gloire de leurs bienfaiteurs. Un pouvoir résolument rentier
acquis à une classe d’affairistes qui hypothèque l’avenir de
tout un pays dans des opérations aventurières qui ne
répondent à aucune logique commerciale ou économique à
moyen et long terme. L’Algérie ne cesse de prendre de
fausses pistes perdant sur le chemin et du temps irrécupérable et des milliards de dollars gaspillés sur l’autel de la
prédation et des incompétences notoires qui vont conduire
le pays à se tourner derechef vers l’endettement extérieur.
eCOnOMie de bAzAr
Le titre de capitaine d’industrie ne se décrète pas, il se
mérite. Mais en Algérie, quiconque investit dans de la ferraille avec l’argent des banques s’autoproclame industriel
et s’installe dans la vitrine économique du pays. Cette collusion entre l’argent et le politique trouve sa quintessence
dans les différentes propositions d’armistice à travers, par
exemple, la « mise en conformité fiscale volontaire » ou
comme aiment l’appeler ses détracteurs « l'amnistie fiscale
», lancée par la Direction générale des Impôts pour l'intégration des milliards de l’informel dans la sphère bancaire.
Le deuxième cadeau fiscal proposé est l’emprunt obligataire porté à bout de bras par le ministère des finances. Ce rapport à l’argent est devenu plus viral depuis que les prix du
baril du pétrole ont chuté vertigineusement mettant à nu
tous les artifices de gouvernance des pays dépendants
exclusivement des hydrocarbures à l’exemple de l’Algérie.
Pourtant l’intrusion de l’argent dans le politique ne date pas
d’hier puisqu’il a réellement commencé à peser dans
l’orientation politique dès les années Chadli. Le pays assistait alors à l’émergence d’une classe de privilégiés remplaçant les monopoles d’Etat par des monopoles de proximité
avec les arcanes du pouvoir. Des fortunes colossales sont
amassées par le truchement d’une économie de bazar
savamment mise en place au détriment d’une économie
nationale qu’on a fini par déstructurer, démantelant des
pans complets d’une industrie bâtie à coups de milliards
pour récupérer les assiettes foncières au dinar symbolique
et privilégier l’importation de tout et de rien. De cette
époque et nés des décombres de la décennie noire, des fortunes qui aujourd’hui décident de notre avenir. Ils sont tous
milliardaires et dirigent presque tous des groupes industriels qui engrangent par an des dizaines, voire des centaines de millions d’euros. Ils sont connus des Algériens
pour avoir de l’influence.
M. W.
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
dossier
CAPITAINES D’INDUSTRIE OU RENTIERS ?
4411
l’OFFiCier qui…
4Par rachid ezziane
«La plus haute finalité de
la richesse n’est pas de
faire de l’argent, mais de
faire que l’argent
améliore la vie. »
D
Henry Ford
ans l’économie moderne, et
depuis la révolution industrielle, on appelle capitaines d’industrie [pour dire aussi
patrons d’entreprises économiques] tout entrepreneur qui gère une
entreprise d’envergure nationale ou mondiale, avec création de richesse et participation au PIB (Produit Intérieur Brut) de son
pays. Qui veut dire, d’un point de vue purement économique, évaluation de la valeur
totale de la « création de richesse » en une
année. De ce fait, le PIB devient l’un des
agrégats (ou indicateurs) majeur pour
mesurer l’activité économique. D’ailleurs,
l’institution des comptes nationaux ou
comptabilité générale dans les années
1930 n’a été décidée que parce qu’au
moment de la récession de ces années-là,
en Europe et en Amérique, il a été difficile
pour les experts d’en savoir les causes, et
plus que les causes de la crise, les pays
concernés ne pouvaient prédire aucune
orientation à leur économie. Le PIB est
donc le miroir sur lequel reflète la variation
d’une économie. C’est-à-dire sa croissance.
Le PIB diffère du PNB (Produit national
Brut) qui, lui, calcule la production annuelle nationale d’un pays en biens et services.
Dans quelques pays, on ne parle plus de
PNB mais de RNB (revenu national brut).
Dans tous les cas de figures, les économistes utilisent beaucoup plus le PIB. Mais
on ne peut parler de croissance que si le
PIB, divisé sur toute la population, fait ressortir une amélioration du niveau de vie du
citoyen (A ne pas confondre avec qualité de
vie qui, elle, se base sur d’autres facteurs
qui rentrent dans l’épanouissement de
l’homme dans toute son envergure). Et seul
le pouvoir d’achat peut être pris dans le calcul de la richesse individuelle. Et si la croissance positive est un facteur à même de
tirer vers le haut, citoyens et pays, l’inflation en est sa maladie. Les symptômes de
cette maladie (contagieuse) sont la frénésie
des augmentations des prix des produits de
consommation. Cette frénésie des prix, des
biens et des services, divulgue une incohérence entre la production et la consommation. Mais comme l’économie n’est tout de
même pas une science exacte au même titre
que les mathématiques, plusieurs définitions de l’inflation sont proposées par les
économistes. Il y a même ceux qui préconisent sa tolérance pour une certaine fluidité
commerciale. Mais lorsqu’elle devient chronique, voir rampante, comme nous la
vivons en Algérie depuis presque deux
décennies, elle devient un frein pour tout
essor économique…
Revenons à notre sujet du jour : qu’apportent nos capitaines d’industrie, patrons
et autres managers d’entreprises, privées
et publiques, à l’économie du pays ? Et que
peuvent attendre d’eux le pays et ses
citoyens ?
Mais avant de répondre à ces questions,
faisons ensemble quelques pas dans l’his-
toire de la capitainerie économique. Au
début du XIv siècle, le mot fut utilisé dans
le domaine militaire. C’est l’officier qui
commande une compagnie, puis, quelques
années après, il fut utilisé pour désigner un
chef de navire de guerre ; et ce n’est qu’à la
fin du XvIII siècle que l’on utilisa l’appellation pour désigner un commandant de
marine marchande. De toute évidence,
dans le mot capitaine il y a la racine
«caput» qui signifie tête en Latin et en
langue Indo-Européenne. Toujours est-il
que le mot capitaine désigne le chef donc. Il
est même utilisé de nos jours dans le sport
pour désigner le chef du groupe. Pour ce
qui est de l’industrie, son utilisation est
certes ancienne, mais au début il désignait
une activité secrète. Puis avec le temps, le
mot rentre dans le jargon des économistes
pour désigner un « big-boss ». Alors,
comme les capitaines de bateau, les « capitaines d’industrie » se voient octroyer, à
tort ou à raison, la définition de créateurs
de richesse.
Ici en Algérie, l’expérience de la libre
entreprise est récente. Son âge ne dépasse
guère les vingt ans. Car les « vingt glorieuses » post-indépendance étaient gérées
par l’Etat. Et ça c’est une autre paire de
manches à revisiter.
Revenons si vous le voulez bien à nos
capitaines d’industrie de l’Algérie de 2016.
je ne sais pas si on peut inclure les managers publics. Mais pour faire dans la modernité mondiale, contentons-nous de leurs
pairs privés. voyons voir maintenant quel
est le rôle de nos capitaines d’industrie
dans la création de la richesse, biens et services. Et peut-on vraiment parler d’entreprise économique quand cette dernière
assure ses arrières financiers par l’octroi
de marchés publics ? Car si c’est le cas,
l’opération ne ressemble-t-elle pas à un
partage de la rente ? Ou, du moins, à une
panoplie qui cache l’envers du décor, pour
ne pas dire l’arbre qui cache la forêt ? Il y a
un début à tout me répondront, à coup sûr,
les concernés. L’Algérie opère sa mue de
l’économie dirigiste vers celle de la libre
entreprise, et elle a besoin d’un temps d’apprentissage, je le sais. Mais combien doit
durer ce temps et à quel prix ? Et pourquoi
n’a-t-on pas investi dans ceux qui ont traversé ces années-là sans jamais fureter
dans les caisses des banques de l’Etat ? Et
ils sont légion. Presque à portée de main…
Mais la politique a sa raison que ni l’économie ni même le bon sens n’en ont, et ça
aussi je le sais. Comme je sais qu’il n’y a pas
de fumée sans feu. Encore moins de cendre
sans braises.
Mais là où le bât blesse, et même qu’on
peut dire qu’il y a anguille sous roche,
quand on constate, de visu et à couteaux
déployés, le tiraillement des uns et des
autres pour le leadership de la capitainerie
d’industrie. N’est-il pas plus judicieux pour
le pays et le bien du peuple de les voir tous
œuvrer (et ensemble) pour un seul
objectif ? voyez comment dans les autres
pays les capitaines d’industrie sont regroupés sous un seul chapiteau et parlent de la
même voix que leurs gouvernements. Car
quand la « capitainerie d’industrie » va,
tout va. Et quand sa machine grince, tout
s’empile et se bloque. N’est-il pas aussi
rationnel et judicieux, dans ces moments de
stabilité et de sûreté, d’aller vers un
« contrat social » entre le gouvernement, le
patronat et les capitaines d’industrie ? En
quoi ça dérangerait, les uns et les autres, si
vraiment tout un chacun œuvre pour un
meilleur avenir du pays, de mettre la main
dans la main et d’essayer, sans fureter dans
les caisses de l’Etat et ses banques, de faire
marcher la locomotive économique comme
partout ailleurs avec le seul critère du
labeur et le génie créateur. « Se réunir est
un début ; rester ensemble est un progrès ;
travailler ensemble est la réussite », disait
le grand industriel américain Henry Ford.
Il n’y a pas encore le feu à la maison. Et
tant mieux. A l’horizon luit une clarté. Et
c’est encore mieux. Car dire que rien ne va
plus, c’est voiler le soleil avec un tamis.
C’est d’union dont ont besoin les capitaines
d’industrie en Algérie. Car l’union fait la
force. Et quand elle se métamorphose en
économie libre et entrepreneuriale, elle fait
les beaux jours des pays et des peuples. Et
les Algériens méritent, de par ce qu’ils ont
enduré durant des décennies, la prospérité
et le bien-être. Et même qu’ils s’y prêtent
tacitement. Capitaines d’industrie ou
simples rentiers sont nos patrons d’entreprises ? je crois qu’ils ne sont ni ceci ni cela.
Car l’économie de l’Algérie vit dans les
contractions de la parturiente. Et il n’y a
jamais d’accouchement sans douleur. Espérant seulement que l’enfant qui y naîtra
sera sain d’esprit et de corps.
Mais voilà… mes amis, j’ai peur qu’il ne
reste pas beaucoup de temps. Et comme le
temps n’est pas une chose que l’on peut
maîtriser et dompter, il ne nous reste qu’à
retrousser nos manches et nous mettre au
travail. Car… « Le génie est fait d’un dixième d’inspiration et de neuf dixièmes de
transpiration », disait le grand savant Thomas Edison.
Pour le reste, c’est aux experts en économie et management de l’expliquer et lui
trouver les mécanismes nécessaires pour
rendre notre économie performante et
concurrentielle. Si vous avez décelé dans
mon papier comme un filon d’assurance,
sachez que je suis atteints d’un mal incurable et je voudrais qu’il soit épidémie, je
souffre du syndrome de l’espoir.
r. e.
412-13
entretien de la semaine
«l’AddiCtiOn à inter
qui PASSe inAPe
ENTRETIEN AvEC LE DR RAHALI
L’Internet est l’outil
technologique le
plus populaire, eu
égard à la facilité de
l’accès à ses services
et à sa vulgarisation
à travers le monde.
Cependant, le revers
de la médaille et qui
suscite de plus en
plus de craintes et
d’appréhensions a
aujourd’hui un nom
: L’addiction à
Internet ou la
cyberdépendance,
avec ses effets
dévastateurs sur les
enfants, les
adolescents et même
les adultes. Ce fléau
fait l’objet d’une
mobilisation de plus
en plus
grandissante de par
le monde afin de
prendre en charge
ses différentes
manifestations
cliniques mais aussi
pour s’en prévenir. Il
reste assez méconnu
chez nous. Pourtant,
des scientifiques à
l’instar du Dr Rahali
F. Djalila,
cyberpsychologue,
n’ont de cesse
d’alerter l’opinion
publique sur ce
phénomène. Dans
l’entretien ci-après,
le Dr Rahali nous
donne les clés pour
comprendre la
cyberdépendance et
nous aider à
prévenir nos enfants
qui en sont les plus
exposés.
4entretien réalisé par Samir Mehalla
les pays les plus connectés est
alarmant. Chez nous, c’est un
Crésus : L’internet est devenu une réalité sociale
phénomène qui passe inaperçu
de nos jours. Son utilisation est-elle sans danger
mais qui commence à faire de
?
sérieux ravages particulièrement
Dr. Rahali F. Djalila : Un enfant, un adolescent ou un
chez les enfants et les jeunes. Les
jeune adulte qui se connecte quotidiennement à interadultes eux aussi n’en sont pas
net pendant plusieurs heures, qui consulte son Faceépargnés. En fait, l’utilisation
book une cinquantaine de fois par jour, qui joue en
non responsable d’Internet et
réseau seul ou avec des amis pour plus de 2 heures, qui
surtout des plateformes que la
tchatche via Messenger ou viber à longueur de journée
toile offre (Facebook, YouTube,
et de manière intermittente, qui ne sort presque plus
jeux en réseau etc.) a fait que,
de chez lui, qui oublie ses rendez-vous et ses devoirs,
quotidiennement, des couples se
qui néglige ses responsabilités, qui saute ses repas et
séparent, des femmes sont abureste sur le net à une heure tardive, qui se sent très
sées, des vies de familles sont
gêné chaque fois qu’on lui fait la remarque qu’il reste
détruites sur tous les plans et des
trop longtemps connecté et qui pique des crises de
hommes sont escroqués ou
colère chaque fois que sa connexion le lâche.
manipulés par des groupes malEn somme, il ne supporte pas de rester sans intersains.
net. Il reste conscient qu’il en fait trop mais n’arrive
Les parents eux commencent
pas à réduire le temps de sa connexion et, encore
à s’inquiéter du comportement
moins, à cesser de se connecter.
de leurs enfants et adolescents
Cet abus démesuré de l’utilisation d’internet a
qui passent plusieurs heures par
désormais un nom. Il s’appelle la cyberdépendance ou
jour devant leurs écrans. A la
cyberaddiction, une accoutumance qui s’inscrit dans la
maison, chez la grande famille,
panoplie des addictions dites comportementales ou
dehors et même chez leurs
addictions sans substances et qui est traitée par des
médecins. Ils sont connectés via
addictologues (spécialistes des addictions) et des psyleurs téléphones intelligents
chologues spécialisés.
(smartphones) et utilisent InterLa révolution numérique a touché tous les secteurs
net de différentes manières. Les
et toutes les populations dans le monde. Elle continue
uns aiment regarder des vidéos
inlassablement à changer notre vie. à l’école, comme
sur YouTube, des clips ou des
dans toutes les activités de la vie sociale, les technolocourts-métrages insolites, tandis
gies de l’information et de la communication prennent
que d’autres se branchent sur
de plus en plus de place. Cette révolution s’est adressée
Facebook, publient photos, anecà une nouvelle forme d’intelligence qui réfléchit en
dotes et même l’assiette de leur
sons et en images.
déjeuner du jour. Une autre catéLes jeunes d’aujourd’hui ont grandi avec une «
gorie adore tchatcher et échancuillère numérique » à la bouche. Ils assimilent l’inforger des e-mails. Mais là où le danmation d’une manière différente de celle des générager existe, en grande partie, est le
tions précédentes. Ainsi, l’utilisation de ces technolofait que beaucoup d’enfants et
gies révèle une nouvelle forme de culture. Nous nous
d’adolescents s’adonnent aux
rendons compte qu’au fur et à mesure de
jeux vidéo en ligne, de manière
leur évolution, les activités numériques
profonde et prolongée. Ils pasfont apparaître de nouveaux modes de
sent de 2 à 4 heures par jour à
LA MORT D’UN ADOLESCENT
PAR ÉPUISEMENT APRÈS
vie qui doivent être analysés sous difféjouer à des jeux de combat et
AVOIR JOUÉ SUR INTERNET DE de guerre, des jeux qui se
rents aspects et à travers de nouvelles
MANIÈRE CONTINUE ET LA
équations et péréquations.
jouent de manière individuelle
SIGNALISATION DE 10 DÉCÈS
grâce à la technologie, beaucoup de
mais aussi en alliance avec
PAR PATHOLOGIE
domaines se sont certes développés mais
d’autres personnes connectées
CARDIOPULMONAIRE DANS
il existe toujours un revers de la
elles aussi pour constituer la «
DES CYBERCAFÉS AINSI QU’UN guilde », un groupe d’alliés qui
médaille. Cette même technologie a, malMEURTRE LIÉ AUX JEUX DE
heureusement, contribué à l’émergence
se bat contre un ennemi.
VIOLENCE, LES AUTORITÉS
de nouveaux troubles liés à elle directeChoqués par le contenu de
SUD-CORÉENNES ONT
ment ou indirectement. En partie, nous
ces
jeux-là, alarmés par la
INSTALLÉ LE KADO, UNE
parlons de l’addiction aux moyens techrégression
du niveau scolaire
AGENCE SPÉCIALISÉE POUR
nologiques qui commence à déranger
de leurs enfants et de leur
CONTRER LE PROBLÈME DE
sérieusement tout le monde.
retrait de la vie sociale,
L’ADDICTION À INTERNET,
Qu’on le veuille ou non, Internet est
conscients des effets négatifs
CLASSÉE COMME PROBLÈME
devenu une réalité sociale. On pourrait
sur leurs capacités cognitives
DE SANTÉ PUBQUE.
même, à mon sens, parler de « netoyen »,
et mentales, les parents ne
un citoyen branché sur le monde à trasavent plus quoi faire ni à quel
vers le net, surtout après l’introduction de la 3g puis la
saint se vouer. Ils voient cependant que leurs enfants
4g, avec la disponibilité d’une multitude de platene font pas exception et que les enfants des autres parformes digitales à la portée de la bourse des familles de
tagent aussi les mêmes passions. Ils restent branchés
classe moyenne.
via Smartphones et tablettes qu’ils leurs achètent onéreusement pour les motiver à étudier, pour les récomMais, quel est son impact sur les populations
penser, et surtout pour se déculpabiliser du temps
mondiales en général et sur l’Algérien en
qu’ils ne peuvent plus leur consacrer pour une raison
particulier ? Et cette toile, deviendra-t-elle une
ou pour une autre.
vraie toile d’araignée pour nos enfants et
adolescents ?
Mais quel est ce phénomène qu’on méconnait à
Le phénomène de la cyberdépendance auquel nous
ce point ? S’agit-il vraiment d’une dépendance ou
assistons, pas seulement dans notre pays, mais dans le
est-ce un simple abus maitrisable avec le temps ?
monde entier, est un phénomène nouveau qui pose
Et s’il s’agit d’une véritable addiction, autrement
problème et qui est de plus en plus reconnu notamdit d’une drogue, est-ce une nouvelle forme de
ment grâce aux études psychologiques. Le constat dans
drogue? Si oui, est-ce qu’une cure de
désintoxication est
indispensable? Devons-nous
aller vers l’ouverture de
centres, de cliniques et
d’hôpitaux spécialisés en désin
internet comme il est le cas aill
Les réponses à ces questions et
gravitent autour de la relation homm
tout autour du duo inséparable mo
virtuel, sont données en majeure p
psychologie.
Cyberpsychologie vous dites ?
Avec l’émergence de nouveaux
giques liés à l’utilisation des nouvel
cyberpsychologie, comme nouve
venue répondre à de nouvelles que
ter de nouvelles maladies psychiqu
étudiées dans leur milieu naturel et
Les troubles pris en charge pa
logues dont l’auteur (1) sont ceux
monde digital, un monde binaire qu
substituer rapidement au monde ré
experts de ladite discipline parlent
vie ». La Cyberpsychologie est défin
psychologie qui a pour objet d'étu
cyberespace sur le comportement h
en général ». Plus explicitement, on
chologie de l'Internet » ou de la « ps
qui est un domaine de développem
les phénomènes psychologiques qu
technologie émergente ou affectés p
du mot « cyberespace » qui est l'étud
contrôle et de communication, et de
est l'étude de l'esprit et du comport
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
rnet, un PhÉnOMène
rçu Chez nOuS»
F. DjALILA, CYBERPSYCHOLOgUE
Depuis peu d’années, cette discipline se recentre
sur l’étude de quelques phénomènes qui prennent une
ampleur sociale extravagante dans tous les pays
connectés, sans exception. Elle étudie, par exemple,
l'effet de l'Internet et du cyberespace sur la psychologie des individus et des groupes, les relations en ligne,
la dépendance aux outils de communication (ordinateur, smartphones, tablettes), l’addiction à Internet
(addiction aux jeux en ligne, aux jeux de hasard en
ligne, aux réseaux sociaux, aux sites pornographiques,
etc.).
Il y a quelques années, en parlant de l’addiction à
Internet, beaucoup de scientifiques ont été sceptiques
devant son existence réelle. Pour être plus pragmatiques, les chercheurs se sont d’abord posé la question
: l’addiction à Internet existe-elle vraiment ou est-ce un
simple phénomène médiatique ? Tandis que d’autres se
sont demandé s’il s’agit d’une accoutumance périlleuse
ou d’un phénomène social. Bien d’autres encore sont
allés même à se demander si Internet n’est pas en fait
le nouveau moyen socialisant lié au développement de
l’être humain dans sa manière de communiquer avec
ses semblables et avec le monde dans les contextes de
globalisation et de rapprochement interculturel.
Mais la Cyberdépendance, c’est quoi au juste ?
A l’origine, ce terme signifiait toute dépendance à
l’ordinateur ou à l’univers informatique mais il est utilisé aujourd’hui pour désigner un usage inapproprié
des diverses plateformes électroniques offertes par
internet. On parle présentement de cyberaddiction,
d’usage problématique d’internet (UPI) de trouble de
dépendance à Internet (TDI), d’usage pathologique
d’internet et d’usage compulsif d’Internet. D’autres
appellations ont été aussi données à ce phénomène
mais presque toutes vont vers la notion
L’OUVERTURE CHEZ NOUS d’addiction, à savoir qu’une personne
peut être tellement absorbée par Internet
DE CENTRES, DE
qu’elle néglige d’autres aspects imporCLINIQUES ET MÊME
D’HÔPITAUX SPÉCIALISÉS tants de sa vie réelle (famille, études,
conjoint, amis, activités sociales et proEN ADDICTOLOGIE LIÉE
AUX MOYENS
fessionnelles). Le comportement compulTECHNOLOGIQUES DONT
sionnel s’installe et s’ancre dans la perINTERNET, NE DOIT PLUS
sonnalité de l’addict. De là, l’aide d’un
ÊTRE UN TABOU.
expert en addictologie ou un psychologue
spécialisé en cyberaddiction s’avère
toxication à
indispensable puisqu’il s’agirait là d’une véritable
leurs ?
drogue dure.
à bien d’autres qui
Autrement dit, il s’agit de personnes de tout âge qui
me-machine et surn’arrivent plus à décrocher d’internet pour une raison
onde réel et monde
ou pour une autre. Ils passent plus de 25 heures par
partie par la cybersemaine sur Internet et pour les vrais dépendants et
les grands joueurs en réseau appelés « hardcore
gamers », ils peuvent aisément dépasser les 90 heures
de connexion par semaine. Ainsi, chez cette catégorie
troubles psycholode personnes, des enfants et des jeunes gens en partilles technologies, la
culier, l’utilisation persistante et répétitive de Internet
lle discipline, est
engendre chez eux des difficultés sérieuses sur le plan
stions et aussi traipsychologique, physiologique, cognitif, mental, comues après les avoir
portemental, social, scolaire et/ou professionnel.
t en laboratoire.
r les cyberpsychoPouvez-vous nous faire un diagnostic de la
en relation avec le
cyberdépendance ?
ui est en train de se
Un cyberdépendant n’est pas celui qui passe beauéel, au point où des
coup de temps sur Internet comme beaucoup le
t d’une « deuxième
croient. La cyberdépendance n’est diagnostiquée
nie comme étant la
comme telle que si la personne addicte remplit un cerude « les effets du
tain nombre de critères. Ainsi, et pour étiqueter corhumain et la société
rectement ce comportement comme addiction, il faut
n parle de la « psyd’abord qu’il occupe une place prédominante dans la
sychologie du web »
vie de la personne qui sent de l’apaisement et du plaiment englobant tous
sir en s’adonnant à Internet, quelle que soit l’activité
ui sont associés à la
choisie (jeux en ligne, Facebook, tchache etc.). Ensuite,
par elle. Cyber vient
il faut qu’il y ait accoutumance avec un besoin d’augde de l'opération de
menter la « dose de connexion » et donc le nombre
« psychologie » qui
d’heures, ceci pour obtenir les mêmes effets. En dertement.
nier, il faut qu’il y ait sensation désagréable lors de la
cessation ou de la réduction de la fréquence ou de la
durée de l’activité. La cessation de l’activité donnerait
les mêmes effets du sevrage, réactions incontrôlées
qui vont de la colère explosive aux actes de violence ou
d’automutilation.
Dès lors, sur le plan physiologique, le stress, l’insomnie, l’anorexie ou la boulimie s’installent comme
symptômes. Tandis que sur le plan relationnel, l’addict
entre généralement en conflits francs avec son milieu
familial (parents, conjoint, fratrie), son milieu de travail (collègues, chef…), ou son milieu social (amis,
enseignants…) suivant le milieu où le problème se
déclenche. En conséquence, il peut carrément se couper du monde et toute tentative individuelle de réduction ou de cessation de connexion à Internet conduit,
dans la majorité des cas, à la rechute et la personne
revient à son addiction.
cause de la mort d’un adolescent par épuisement après
avoir joué sur Internet de manière continue et la signalisation de 10 décès par pathologie cardio-pulmonaire
dans des cybercafés ainsi qu’un meurtre lié aux jeux de
violence, les autorités sud-coréennes ont installé le
KADO , une agence spécialisée pour contrer le problème de l’addiction à Internet, classée comme problème
de santé public. De plus, des camps de désintoxication
ont été installés pour permettre aux addicts de revenir
à la vie réelle et reconnaitre le réel du virtuel.
En outre, des pays comme la Chine, les USA, le Canada et la grèce ont introduit des séances de sensibilisation à l’utilisation d’Internet dans leurs programmes
éducatifs et scolaires, surtout après que l’expérience
grecque ait démontré qu’en l’absence de tout contrôle,
les jeunes finissent par substituer toutes les activités
de la vie réelle aux activités virtuelles au point où la
limite entre le réel et le virtuel n’est plus reconnaissable. En conséquence, les jeunes addicts deviennent
plus introvertis et plus méfiants à l’égard de la communication directe, ce qui influe négativement sur la
communication dans la société et sur son devenir.
A dire vrai, on dirait que le monde vient de se
réveiller sur un drame et s’en est un. Septembre dernier, 600 experts en addiction de plusieurs pays se
sont réunis en Allemagne autour du thème de la cyberdépendance. Les ONg, elles aussi, commencent à bouger à l’international avec l’association espagnole Dianova qui s’est lancée dans l’organisation d’une campagne internationale, en juin dernier, pour lutter
contre la cyberaddiction sous le thème « Ne Te Laisse
Pas Posséder ». La chose n’en est pas restée là, des
centres, des cliniques et même des hôpitaux spécialisés
en troubles liés aux moyens technologiques ont poussé
comme des champignons dans les pays les plus touchés par la cyberaddiction. Même l’Union européenne
a bougé en face de ce phénomène en finançant un
grand projet de recherche sur l’étude des comportements de cyberdépendance chez les adolescents européens.
Les enfants et les adolescents sont les plus
touchés ! Pourquoi ?
Sans avoir à diaboliser Internet et les jeux en ligne
mais aussi et surtout sans avoir à les banaliser, Internet est, pour beaucoup, un « cadeau » que nous a offert
la technologie tant qu’elle met le monde à nos pieds.
Les jeux, eux, qu’ils soient sur CDrom ou en ligne, sont
des moyens qui favorisent le développement des
réflexes et de l’intelligence, surtout si le jeu est de grande qualité (jeu de stratégie, jeu éducatif…). Ce sont
aussi un moyen d’apprentissage, de loisirs et de défoulement. De ce fait, nous constatons que leur utilisation
raisonnable et rationnelle n’est dangereuse ni pour
l’enfant ni pour l’adolescent et, encore moins, pour
l’adulte. Cela dit, c’est dans l’excès que le problème se
pose.
Les jeux vidéo en ligne sont particulièrement bien
réputés chez le public des enfants et des adolescents.
Les enfants sont généralement touchés de part leur âge
où l’activité ludique fait partie de leur développement
physique, psychique et social. C’est à travers le jeu que
l’enfant se socialise et se voit introduit au monde des
règles. Les jeux de société en sont les meilleurs
exemples. Ainsi, il est très facile pour un enfant d’abuQu’en est-il en Algérie ?
ser des activités ludiques hors contrôle parental et loin
Mounir, un jeune de 17 ans, en classe terminale, sa
de toute surveillance.
sœur Houda, 8 ans, en 3ème année primaire sont deux
Les adolescents, eux, de par les changements horenfants dont la maman se trouve complètement permonaux qui affectent leurs corps mais aussi leur perdue. Après les avoir gavé de cadeaux électroniques,
ception du monde et des relations interpersonnelles et
elle se sent coupable en voyant qu’ils les utilisent de
sociales, se trouvent devant des besoins psycholomanière excessive. Facebook, Messenger et sites d’hagiques spécifiques qui les conduiront à la construction
billage de poupées virtuelles sont leurs plateformes
d’une identité propre à eux. Ceci dit,
préférées. Depuis plus d’un an, la
le besoin d’être reconnus, le besoin
maman, médecin généraliste, observe
UNE ÉTUDE
d’émancipation, le besoin d’appartechez ses enfants des changements
PSYCHOLOGIQUE, MENÉE négatifs sur tous les plans. Ils n’internir à un groupe qui a les mêmes penSUR 15 000 ÉCOLIERS ET
chants et les mêmes valeurs, le
agissent plus comme avant avec leurs
ÉTUDIANTS DES TROIS
besoin de pouvoir et aussi le besoin
parents et leurs vrais amis, se connecCYCLES D'ENSEIGNEMENT,
de s’amuser, tout cela leur est accestent longuement au détriment de leurs
À ALGER, A FAIT
sible sur Internet à travers les jeux en
RESSORTIR QUE 70% DES devoirs scolaires qu’ils oublient de
ligne. Dans le jeu en fait, ils gagnent et
faire, n’arrivent plus à se concentrer en
ÉCOLIERS ET ÉTUDIANTS
reçoivent des éloges, ils montent en
classe, ne sortent plus de la maison et
FRÉQUENTERAIENT LES
niveau de jeu, deviennent plus forts
communiquent entre eux par textos
ESPACES INTERNET DE
et s’allient avec d’autres jeunes
même à la maison. Toutes les tentatives
MANIÈRE CONTINUE ET
joueurs pour gagner des parties et
des parents pour réduire leurs heures
33% D’ENTRE EUX
SERAIENT
dans tout cela ils trouvent un grand
de connexion ou pour les faire cesser,
CYBERDÉPENDANTS.
plaisir et s’amusent comme des fous.
se sont vouées à l’échec. « Les réactions
grosso modo, dans le jeu en réseau,
engendrées suite à chaque essai
l’adolescent se construit une identité,
avaient été catastrophiques », selon la
sauf qu’elle est virtuelle. De ces faits, il court un grand
maman. De grands changements au niveau de l’hurisque d’adopter un comportement dysfonctionnel vismeur, allant de la colère aux crises de pleurs, passant
à-vis d’Internet qui peut facilement le conduire à l’adpar une irritabilité excessive à toute demande parentadiction. En somme, Internet peut devenir chez l’adolesle et leur fréquentation des cybercafés du voisinage en
cent un espace où il fait sa crise d’adolescence.
utilisant leur argent de poche pour payer leur « dose »
de connexion quotidienne. Ce cas est l’un des dizaines
Quid de la Cyberdépendance dans le monde ?
de milliers, voire des centaines de milliers de cas réels
Plusieurs pays ont fini par donner une importance
en Algérie. Il y a aujourd’hui pratiquement 2 millions
primordiale à ce phénomène après des incidents et
d’Algériens connectés par wifi et presque tout le
aussi des études réalisées sur terrain. A titre
monde se connecte via téléphone grâce à la 3g.
d’exemple, le modèle Sud-Coréen nous apprend qu’à
(Suite en page 14)
414
entretien de la semaine
(Suite de la page 12-13)
Des gens qui marchent, déjeunent, parlent et même conduisent
leurs véhicules tout en gardant
l’œil sur leur Smartphones ou
tablette qu’ils vérifient plus d’une
cinquantaine de fois par jour. Ce
comportement obsessionnel et
compulsionnel fait partie de leur
quotidien.
Pour connaître l’ampleur de
cette accoutumance que je qualifierai, en connaissance de cause,
de massive, il n’y a qu’à voir comment les Algériens, toutes populations confondues, réagissent au
moindre problème avec leur
connexion Internet à domicile ou
sur d’autres supports technologiques. Le meilleur exemple est le
fait que l’Algérie ait connue deux
longues coupures d’Internet au
niveau national. Les services
clientèles des fournisseurs d’accès
à Internet se sont vu submergés
par les abonnés qui se présentaient tous les jours au service
commercial. Selon Amel, cadre au
niveau d’une annexe, elle dit avoir
vécu, elle et ses collègues, un état
d’alerte sous «pression insupportable des clients qui ne voulaient
rien savoir ». En manque de leur
dose de connexion quotidienne, «
ils ne savaient plus quoi faire de
leur temps alors ils le passaient en
va-et-vient ». Salim, un jeune de
25 ans, se rappelle qu’en ces
moments-là, il est devenu comme
un fou à aller de cyber en cyber
espérant trouver « une petite
connexion » et qu’il a souffert de
cette coupure plusieurs jours au
point où, selon lui, il s’en rappellera toute sa vie.
Durant les deux dernières
années, quelques efforts louables
ont été signalés en Algérie mais
restent insuffisants devant l’ampleur du phénomène. Le plus gros
effort est sans doute l’action qu’a
engagée la commission sectorielle
de prévention des fléaux sociaux
de l’Assemblée Populaire de la
Wilaya d’Alger (APW) en collaboration avec la DgSN à son plus
haut niveau. Durant l’évaluation
annuelle de ses actions, la commission a tenu des conférences
importantes en incluant l’addiction à Internet comme fléau social
qui mériterait des actions de prévention au même titre que la
drogue et la violence en milieu
écolier. Egalement et pas plus que
l’année dernière, une étude psychologique à Alger, première de
son genre, a été menée sur 15 000
écoliers et étudiants des trois
cycles d'enseignement. Elle a fait
ressortir des chiffres alarmants,
voire choquants qui mériteraient
réflexion et action. En effet, l’étude
dit que 70% des écoliers et étudiants fréquenteraient les espaces
Internet de manière continue et
33% d’entre eux seraient cyberdépendants. Sur la base de ces
chiffres, des recommandations
ont été rapportées par ladite commission dont la plus importante
est la nécessité d’ouvrir des cellules d’écoute et d’orientation au
niveau de tous les établissements
scolaires.
Une autre action importante et
unique en Algérie a vu également
le jour, il y a quelques mois de cela
quand une équipe pluridisciplinaire de l’établissement public de
santé de proximité (EPSP) Bachir
Mentouri (Constantine), a ouvert
un centre pour traiter le problème
croissant de l’addiction des jeunes
Algériens à Facebook et aux
réseaux sociaux.
Certes, l’addiction à Internet
et aux jeux en ligne, comme
modèle prédominant, n’a pas
encore été bien recensée en
Algérie mais ce fait nous
empêchera-t-il de tirer
l’alarme avant qu’il ne soit
trop tard ? Ou faut-il
attendre la mort de jeunes
par épuisement pour bouger
le doigt ? Ne dit-on pas que
prévenir vaut mieux que
guérir ? Ne devons-nous donc
pas inscrire cette
préoccupation comme
priorité nationale de
prévention ?
Il n’est pas difficile pour nous
les psychologues d’avertir les
parents constamment et leur dire
: Attention ! vos enfants développent une addiction très grave et
risquent d’être drogués au même
titre que la consommation du cannabis ou de l’alcool. La cyberdépendance est un trouble sérieux
qui peut devenir chronique s’il
n’est pas dépisté à temps et traité
rapidement d’où le grand risque
encouru par les parents qui ne
s’inquiètent pas de l’état de leurs
enfants. Pire encore, il y a des
parents qui, par inadvertance ou
insouciance, ne voient pas d’inconvénients à ce que leur enfant
reste tout le temps à la maison et
joue calmement dans sa chambre
à longueur de journée. Pour eux, il
est là, ne dérange pas les voisins,
ne risque pas la fréquentation
malsaine, ne risque pas l’abus
sexuel et surtout ne risque pas un
kidnapping. Ce dernier, est un
autre facteur qui, depuis quelques
années, agit de manière profonde
dans la société algérienne. Donc,
pour l’enfant qui joue à domicile, il
est là, chez lui sous les yeux de ses
parents protecteurs loin de tout
risque. Erreur ! A ces parents non
avertis, nous psychologues crions
: Réveillez-vous ! Le danger d’Internet peut être dévastateur au
point où votre enfant peut
échouer sur tous les plans, à commencer par ses études, sa vie
sociale et, plus tard dans sa vie
conjugale et professionnelle en
s’adonnant à la pire des drogues
de par son accessibilité, au quotidien, à moindre coût et dans tous
les espaces surtout dans votre
propre foyer.
Aux enseignants, aux psychologues, aux psychiatres, aux médecins, à la société civile et aux instances étatiques concernées de
près ou de loin, je dirai :
Réveillons-nous! Il faut agir avant
qu’il ne soit trop tard en calquant
les expériences des pays d’outremer et en les réadaptant en fonction de nos spécificités sociales et
culturelles. Réveillons-nous tous!
Il s’agit du devenir de nos enfants,
adultes de demain, pire encore, il
s’agit du devenir de notre un pays.
Ceci dit, l’ouverture chez nous de
centres, de cliniques et même
d’hôpitaux spécialisés en addictologie liée aux moyens technologiques dont Internet, ne doit plus
être un tabou.
L’addition pèse lourd, mais, qui
la paiera ?
S. M.
* Le Dr. Rahali F. Djalila, est la première
Cyberpsychologue en Algérie depuis 1999.
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
teSt PArent-enFAnt Sur lA dÉPendAnCe
d'internet (CyberdÉPendAnCe)
Veuillez répondre aux questions qui suivent en mettant un cercle
sur la réponse qui vous semble la plus adéquate. Veuillez utiliser
l’échelle suivante :
1 = Non applicable ou rarement.
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment.
4 = Souvent.
5 = Tous les jours.
1. À quelle fréquence que votre enfant désobéit aux limites de
temps que vous lui déterminez pour son usage en ligne de l'internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
2. À quelle fréquence votre enfant néglige ses corvées à la maison, pour passer plus de temps en ligne sur l'internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
3. À quelle fréquence votre enfant préfère passer plus de temps
en ligne sur Internet plutôt qu'avec le reste de votre famille ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
4. À quelle fréquence votre enfant établit de nouvelles relations
avec des personnes en ligne sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
5. À quelle fréquence est-ce que vous vous plaignez au sujet de
la quantité de temps passée en ligne sur Internet par votre enfant
?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
6. À quelle fréquence les résultats scolaires de votre enfant sont
atteints à cause du temps qu'il passe en ligne sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
7. À quelle fréquence votre enfant vérifie ses courriels avant de
faire autre chose ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
8. À quelle fréquence votre enfant semble en retrait des autres
depuis qu'il a découvert l'internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
9. À quelle fréquence votre enfant se trouve-il sur la défensive ou
en secret lorsqu'il lui est demandé ce qu'il fait en ligne sur Internet
?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
10. À quelle fréquence vous avez surpris votre enfant accédant en
ligne sur Internet, contre votre volonté ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
11. À quelle fréquence votre enfant passe du temps seul dans sa
chambre jouant à l'ordinateur?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
12. À quelle fréquence votre enfant reçoit des appels téléphoniques étranges, de nouveaux cyber-amis rencontrés "en ligne" ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
13. À quelle fréquence votre enfant réplique, crie, ou réagit avec
contrariété, s’il est dérangé alors qu'il est en ligne sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
14. À quelle fréquence votre enfant apparaît plus épuisé et fatigué
(qu'il l'était avant sa possibilité d'utiliser Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
15. À quelle fréquence votre enfant semble préoccupé de retourner en ligne lorsqu'il n'est pas sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
16. À quelle fréquence votre enfant démontre des accès de colère en rapport avec votre interférence concernant le nombre de
temps qu’il passe en ligne sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
17. À quelle fréquence votre enfant choisit de passer du temps en
ligne sur Internet, plutôt que de s'adonner à des activités de délassement qu'il appréciait auparavant et/ou des activités qui l'intéressent à l'extérieur de la maison?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
18. À quelle fréquence votre enfant devient en colère ou belliqueux lorsque vous lui déterminez des limites de temps alloué à
passer en ligne sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
19. À quelle fréquence votre enfant décide de passer plus de
temps en ligne sur Internet plutôt que de sortir avec ses amis ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
20. À quelle fréquence votre enfant s'est senti déprimé, de mauvaise humeur, ou nerveux lorsqu'il n'est pas en ligne sur Internet,
ce qui semble se résoudre lorsqu'il revient en ligne sur Internet ?
1 = Rarement
2 = Occasionnellement
3 = Fréquemment
4 = Souvent
5 = Tous les jours
Lorsque vous aurez répondu à toutes les questions, additionnez
les nombres que vous aurez sélectionnés pour chaque réponse
afin d'obtenir un score final. Plus le score est élevé, plus est élevé
le niveau de dépendance à l'internet de votre enfant. Voici un
barème général pour vous aider à mesurer le score :
- Entre 20 et 49 points : Votre enfant est un utilisateur en ligne
moyen. Il peut naviguer sur le Web un peu plus longtemps parfois,
mais semble avoir le contrôle de son usage.
- Entre 50 et 79 points : Votre enfant semble expérimenter des
problèmes, d'occasionnels à fréquents, à cause d'Internet. Vous
devriez considérer le plein impact de l'Internet sur la vie de votre
enfant et comment ceci a des conséquences sur le reste de votre
famille.
- Entre 80 et 100 points : L'usage de l'internet cause des problèmes significatifs à la vie de votre enfant et, très probablement,
à celle de votre famille. Vous devez prendre ces problèmes en
mains dès maintenant.
élections américaine
un jeu d’ÉCheCS Où tOuS
leS COuPS SOnt PerMiS
415
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES AUX ÉTATS-UNIS
A St Louis,
Missouri, durant le
second débat
présidentiel,
Clinton et Trump
ont atteint cette
fois le fond du
panier. Toutes les
tensions ressenties
jusqu’à présent
entre les deux
candidats ont
finalement
explosées avec,
néanmoins, ce qui
fait craindre le
pire, une volonté
de ne pas aborder
les sujets
importants.
B
4Par Patricia Mazy
ien pire, les propos échangés
pendant une heure et demi
relevaient plus de marchands
de poissons que de candidats à
l’élection présidentielle. Trump
et *Clinton ont en effet passé leur temps à
se traiter de : « menteur », « peu fiable », «
incapable » et « inadapté » à devenir président.
Trump a menacé Clinton de la faire
mettre en prison et Clinton l’a accusé d’éviter de parler de sa campagne qui, selon elle,
est en voie de destruction. Ce fut donc le
débat le plus inintéressant, le plus méchant
et le plus obscène de l’histoire des présidentielles aux Etats-Unis. A la décharge de
Trump, il faut avouer qu’au niveau des
coups bas, c’est Clinton qui a tiré la première. Quelques jours avant le débat, les démocrates (seraient-ils à court d’arguments ?)
ont mis à jour une vidéo remontant à 2005
où Trump raconte dans une ambiance privée et décontractée que l’on peut tout se
permettre avec les femmes… Il s’agit donc
d’un document remontant à plus de dix ans
durant lequel Trump parle librement du
monde des célébrités dont personne
n’ignore le mode de fonctionnement, à
savoir que lorsqu’un homme est une star,
de nombreuses femmes feraient n’importe
quoi pour s’approprier ses bonnes grâces
et se laissent traiter volontairement de
manière abjecte pour arriver à leur fin ce
qui est un fait de société avéré. Que vient
faire ce genre d’information dans une campane présidentielle sur des pratiques qui
existent depuis la nuit des temps dans les
milieux où le pouvoir et l’argent sont roi ?
Le programme de H. Clinton serait-il a ce
point vide de toute substance ou peu
recommandable pour se cacher derrière de
telles dénonciations sans intérêt ? Trump
s’est excusé pour ses « propos de vestiaire
» et naturellement n’a pas manqué de souligner qu’en l’occurrence l’hôpital se
moquait vraiment de la charité puisque à ce
sujet, Bill Clinton n’avait pas seulement
tenu des propos mais avait abusé des
femmes comme personne d’autre dans
l’histoire politique des Etats-Unis. Hillary
Clinton a accusé le coup en le regardant et
en déclarant sans rejeter les accusations : «
la plupart de ces accusations ne sont pas
vraies ». Il faut dire que peu avant le débat,
Trump avait convoqué une conférence de
presse en présence de trois femmes (Paula
jones, juanita Broaddrick et Kathleen
Willey) qui accusent Bill Clinton de les
avoir agressées sexuellement et qui furent
rejointes par une quatrième Kathy Shelton
qui, a douze ans, fut violée par un homme
défendu par Hillary Clinton. Le ton de cette
triste comédie sans intérêt pour les électeurs et le pays mais aussi pour le monde
entier fut donc donné dès le début de cette
lamentable confrontation qui laisse préjuger du pire pour l’avenir. Les demandes
politiques des journalistes, pour tenter de
remettre à un niveau correct ce débat sorti
des égouts, furent continuellement ignorés
par les deux candidats qui n’ont pas cessé
de se balancer des méchancetés concernant
leur caractère et leur personnalité respectives. Hillary Clinton préférant occulter la
positivité a continué à évoquer des sujets
sans intérêt allant même jusqu’à référer
certaines déclarations de Trump qui aurait
dit que Barak Obama ne serait pas né aux
Etats-Unis ou qu’un journaliste aurait été
ridiculisé à cause d’un handicap physique…
Trump de son côté attaqua Clinton sur la
question de mails compromettants envoyés
d’un server personnel quand elle était
secrétaire d’Etat. Un petit extrait de la discussion à cet égard démontre le niveau
dans lequel s’est déroulé le débat :
A la tentative de H. Clinton de répondre,
Trump l’interrompt :
- « Oh, tu ne les as pas effacés ? Mais où
sont passés les 15 000 mails manquants ? »
- « Ok Donald. je sais que ce soir tu
cherches à faire diversion pour cacher la
manière dont les républicains t’abandonnent. »
Et cela a continué ainsi jusqu’au bout
avec des paroles, des paroles et seulement
des paroles, Trump interrompant souvent
Clinton, qui de toutes façons ne semblait
pas capable de reprendre le cours d’un réel
raisonnement politique.
Mais pour en revenir à ces fameux emails, il convient d’admettre que ceux-ci ne
sont pas sans intérêt, comme en témoignent les nouvelles révélations de Wikileaks. Hilary Clinton, outre le fait d’être
soupçonnée d’avoir favoriser l’émergence
de Daesh en Irak, serait très liée aux sociétés financières et servirait les intérêts de
Wall Street. La fondation Clinton quant à
elle aurait été également accusée à plusieurs reprises d’accepter des dons en
échange de certains accès politiques. Entre
2012 et 2015 H. Clinton a donné 12 conférences devant des grandes banques mondiales comme la goldman Sachs ou la
Deutsche Bank qui lui ont rapporté 2,3 millions de dollars et dont elle a toujours refusé de rendre public le contenu pour avoir
certainement tenu des positions allant à
l’encontre de sa campagne actuelle. Le 24
octobre 2013 lors de sa conférence pour
goldman Sachs, elle déclare : « Se présenter
à la Présidence nécessite beaucoup d'argent dans notre pays, et les candidats doivent lever les fonds eux-mêmes. New York
est probablement le cœur des collectes de
fonds pour les prétendants des deux
camps. Et il y a beaucoup de gens ici qui
feraient mieux de poser les questions qu'il
faut avant de dilapider leurs contributions
de campagne pour des gens qui jouent à se
faire peur avec notre économie. »
Hilary Clinton avait en fait besoin de
l’argent de Wall Street pour financer sa
campagne et elle le sait depuis très longtemps. Durant l’une de ses conférences en
2014, très prévoyante, elle rappelle qu’elle
a travaillé avec de nombreux professionnels de Wall Street et qu’elle a toujours tout
mis en œuvre pour qu’ils prospèrent.
Aujourd’hui, curieusement, Clinton vient de
proposer de démanteler les banques jugées
trop importantes afin de mieux contrôler le
système bancaire parallèle. Les grandes
banques, en Europe aussi, connaissent
d’importantes difficultés comme par
exemple, la Deutsche Bank qui, depuis
2008, évite coûte que coûte une faillite qui
mettrait par terre l’économie allemande et
dans son sillage l’économie mondiale.
A ce jour, dans le monde entier et en
particulier aux Etats-Unis, les grands établissements bancaires doivent prouver aux
instances de régulations qu’elles peuvent
être gérées efficacement dans tous leurs
domaines d’activités. A défaut de réussir de
cette manière, les autorités de régulation
auraient la possibilité de les réorganiser ou
de les scinder en différentes entités. Cela
renforcerait la capacité de l’administration
américaine à démanteler les banques dans
lesquelles elle verrait une menace pour le
système financier. voulant mettre un frein
aux « abus » financiers de Wall Street, Clinton préconise même une augmentation des
amendes que les régulateurs pourront
imposer aux sociétés financières et à leurs
dirigeants. Interrogée sur les détails de ce
plan, Clinton est totalement incapable d’en
dire plus et laisse ainsi supposer se servir
de projets envisagés par la finance ellemême pour sauver les plus grandes
banques. Pourquoi agit-elle ainsi ? vraisemblablement, dans le but secret de tenter
d’effacer auprès du public son image de
femme dévouée à Wall Street et à la haute
finance.
Une politique donc essentiellement
basée sur l’intérêt de la finance et laissant
peu de place à ceux de la classe moyenne
dont H. Clinton admet elle-même s’être fortement éloignée.
Trump quant à lui joue la carte de la
classe oubliée de tous et des Américains de
plus en plus pauvres et s’engage à supprimer certaines exemptions qui bénéficient
aux traders ou aux gérants de hedge funds.
Il veut abaisser l’impôt sur les sociétés de
35 à 15 % et en matière de commerce extérieur, menace par exemple les Chinois de
droits de douanes de 35% sur chaque voiture produite chez eux et les multinationales américaines de représailles si elles
continuent à délocaliser.
Mais, de tout cela, pour l’instant rien
n’apparait dans les débats et seules les
injures et les coups bas sont à l’ordre du
jour. Personne ne parle des problèmes de
réelle importance, (mais peut-être est-ce
une stratégie volontaire ?) et l’on a plutôt
assisté à un talkshow de bas niveau, vulgaire et sans intérêt. Ainsi que l’a déclaré M.
gorbatchev récemment à l’agence de presse russe RIA Novosti : « je pense que le
monde s’approche dangereusement de la
zone rouge. Il a appelé à « revenir aux priorités principales » qui sont le terrorisme, le
désarmement nucléaire et la protection de
l’environnement, soulignant que tout le
reste est insignifiant.
Le troisième et dernier débat présidentiel aura lieu à Los Angeles le 19 octobre
prochain, même si tous les coups semblent
désormais permis, espérons au moins que
le roi et la reine se déplaceront avec plus de
bon sens et d’intelligence puisque de toutes
les façons et dans tous les cas, nous serons
tous « échec et mat ».
P. M.
416
sports
LA CHRONIQUE
e coach
national de
football est un
monsieur un
peu bizarre. Aussi
bizarre que la
bizarrerie. Et pour
cause, lors de la
conférence de
presse qu'il a tenu après le match
contre le Cameroun pour le compte de
la 1ère journée des qualifications pour
la Russie, nous avons retenu une
phrase un peu louche qui suscite
moult interrogations et qui ouvre une
brèche sur d'autres ramifications
intéressantes. Il avait dit : « Ils doivent
savoir que c’est moi qui décide ». Ils,
ce sont certainement les joueurs qui
n'ont pas pris part à ce match et qui
chauffaient le banc de touche. Parmi
ces « Ils », ils y avaient Brahimi et
Feghouli, pas du tout contents de se
retrouver avec les remplaçants.
Seulement, le technicien serbe a
oublié quelque part que le onze de
départ aligné comporte plusieurs
anomalies. A commencer par la
titularisation de Mbolhi (sans club) et
celle de Zeffane qui n'a pas encore
joué avec son équipe, le Stade
Rennais. Ensuite, les incorporations
de Brahimi et Feghouli en fin de partie
alors que ces deux internationaux ne
jouent pas avec leurs clubs respectifs.
C'est dire, si on croit les paroles de
Rajevac, c'est lui qui a décidé de
débuter avec ce onze. Cependant,
cela aurait soulevé, après le match,
des contestations et des demandes
d'explication de la part de nos
responsables du football et, en
particulier, du président de la FAF,
Raouraoua, mais rien n'a été fait.
Cela nous amène à dire que ce n'est
pas Rajevac qui compose son onze.
Parce que comment voulez-vous qu'un
entraîneur de renommée mondiale
pour avoir conduit le Ghana jusqu'aux
quarts de finale d'un mondial, puisse
accepter d'aligner quatre joueurs sans
clubs ? Mbolhi était irréprochable
mais Zeffane, Brahimi et Feghouli
doivent refaire la maternelle du
football pour pouvoir mener à bien
leur mission en équipe nationale.
Autre erreur de notre ami Rajevac :
celle d'avoir déclaré que les Verts
n'ont eu que deux stages. Ce
monsieur a oublié là aussi que
l'équipe qu'il a pris est déjà prête à
affronter n'importe quelle équipe,
qu'elle était déjà sur pied grâce à
Vahid à moins que là également, ce
n'est pas lui qui a choisi de faire des
matches amicaux contre Blida et
Boufarik.
Imaginons un seul instant que notre
équipe nationale de football soit
drivée par un Trappatoni ou un
Capello. Peuvent-ils aligner un gardien
sans club ? Impossible. D'autant que
ce n'est pas les doublures qui
manquent à ce poste avec les
Asselah, Zemamouche et les autres.
Bref, l'histoire retiendra que nous
tournons sempiternellement en rond
et que le Cameroun reste la bête noire
de l'Algérie. Justement, à propos de
bête, même les armoiries animalières
ont raison. Nous sommes les Fennecs,
eux, les Lions Indomptables…
S. L.
deS vertS
PAS enCOre MûrS ?
APRèS LE SEMI-ÉCHEC FACE AU CAMEROUN
DE SAID LACÈTE
Galimatias !
L
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
Finalement, même au stade Mustapha Tchaker, les Fennecs ne parviennent pas à
effacer le signe indien et battre pour une fois la formation camerounaise qui avait
un seul objectif : ne pas perdre à Blida.
M
4Par Said lACete
ission réussie pour Broos,
le coach des Lions Indomptables, qui connaît aussi le
football algérien et même
si cette empoignade n’a
pas atteint un niveau technique appréciable, il n'en demeure pas moins que le
Cameroun repart invaincu chez lui, laissant les Algériens et leur coach Rajevac se
poser beaucoup de questions.
lA Meilleure en AFrique ?
On a poussé le bouchon trop loin en
affirmant, à chaque tournant, que l'Algérie
est la meilleure équipe du continent. La
prestation des camarades de Medjani face
au Cameroun est là pour attester tout le
contraire puisque les Lions indomptables
n’ont jamais fermé le jeu préférant
prendre un maximum de risques sur le
plan offensif, ce qui a énormément gêné les
coéquipiers de Mahrez. Les protégés de
Broos se sont même permis le luxe de
jouer très haut et parfois ils récupéraient
des ballons dans le camp des Algériens,
comme s'ils jouaient chez eux.
Dimanche dernier, le Cameroun n'était
pas le Lesotho ni, encore moins, la Tanzanie mais une équipe soudée mise en place
pour inquiéter sérieusement l'Algérie qui,
nonobstant le but marqué d'entrée de jeu,
n'a pas pu continuer sur sa lancée.
Le match nul de dimanche dernier servira d'avertissement pour l'Algérie et
même pour les autres équipes du même
groupe : En effet, si sur le classement FIFA,
l'Algérie est en tête, ce n'est pas le cas sur
le terrain où, désormais, le Nigeria et la
Zambie peuvent se frotter les mains pour
surprendre les Fennecs.
PrOblèMe de trAnSitiOn
Une fois le but de Soudani inscrit, on
s’attendait à voir une avalanche de buts et
une domination territoriale des camarades
de Mahrez pour le reste de la partie. Les
tribunes du stade Mustapha Tchaker
bouillonnaient de joie et de liesse avant
que les verts ne tombent dans un sommeil
incompréhensible, laissant libre cours aux
Camerounais pour s'asseoir peu à peu une
prééminence qui portera ses fruits.
Pendant que les Algériens confondaient
vitesse et précipitation, l'adversaire profite pour gagner les duels dans l'entre- jeu et
venir inquiéter le dernier rempart des Fennecs.
Il est vrai que la transition entre les
deux compartiments (défensif et offensif)
était complètement absente chez les Algériens sinon comment expliquer, à chaque
fois, Mahrez devenait l'animateur offensif,
laissant son aile fétiche pour venir prêter
main forte au milieu de terrain.
En seconde période, après que les Lions
indomptables avaient égalisé en première
mi-temps, le jeu brouillon chez les verts
fait son apparition. On espérait mieux de
cette équipe algérienne mais ni les ratés de
Slimani, les centres « morts » de Mahrez et
parfois de Zeffane sans oublier le bolide de
guedioura n'ont eu raison de l'excellent
portier camerounais.
Les Lions indomptables demeurent
debout, présents et confirment avec éloquence que, ce soir-là, l'Algérie était loin
d'être la meilleure en Afrique surtout
quand on sait que le Cameroun est en pleine période de transition.
leS FAux CAlCulS de rAjevAC
D'abord, il faut se poser la question sur
la composition de l'équipe. Un peu louche,
ce onze rentrant avec le gardien Mbolhi
qui n'a pas encore trouvé de club (lire la
chronique). Et puis, avec le but égalisateur
et notamment en seconde période, Rajevac
n'a pas réalisé le bon coaching pour
prendre à défaut la défense camerounaise.
Bien entendu, les incorporations de Brahimi, ghezzal et Feghouli n’ont pas renversé
la vapeur pour battre pour la première fois
le Cameroun. Il a fait jouer l'offensive sans
pour autant oublier que les Camerounais
restaient de redoutables attaquants, eux
aussi, et la preuve en est le beau but qu'ils
avaient inscrit et auraient pu marquer un
second but en fin de partie.
Ainsi, avec ce piètre rendement, le
coach national sait donc qu'il aura du pain
sur la planche pour remonter ce retard car
dans ce genre de compétition, le moindre
petit point perdu devient fatal au décompte général.
zeFFAne, lA FAuSSe nOte
Il a été le joueur le plus critiqué et le
plus conspué par le public de Blida. Mehdi
Zeffane aligné en raison des absences pour
blessures de Mandi et Belkaroui, a eu du
mal à entrer dans le jeu. Ses passes ratées
ou encore son erreur sur le but égalisateur
du Cameroun ont prouvé que cet arrière
manque de compétition et dans son club
de Rennes, il a été très peu utilisé cette
année.
Zeffane a eu beaucoup de mal à suivre
le rythme imposé par les attaquants
rapides du Cameroun. A plusieurs
reprises, nous avons remarqué que le danger des Lions indomptables, venait de son
côté comme l'atteste le but de Moukandjo.
POint de jOueurS lOCAux
Cela dure depuis longtemps. Les
joueurs locaux n'ont plus leur place en
équipe nationale mais certains se retrouvent (sans jouer) sur le banc de touche.
C'est comprendre ainsi que la rareté
devient plus… rare quant à voir à l'avenir
un joueur de l'USM Alger, de la jS Kabylie
ou encore de l'ES Sétif jouer titulaire chez
les Fennecs.
Pourtant, dimanche face au Cameroun,
un Benyahia aurait pu faire l'affaire ou
encore, à la place de Zeffane, Meftah l'Usmiste aurait été d'un grand secours. Seulement, depuis quelques années, notre équipe nationale évolue avec des joueurs qui
jouent à l'étranger et même ceux qui n'ont
pas encore trouvé de clubs, se permettent
le luxe de débuter des rencontres officielles dans notre équipe nationale.
Là aussi, il faudra revoir ce volet si
important puisque le football national possède quand même des individualités qui
ont fait leurs classes dans des clubs locaux
avec qui ils ont atteint des finales africaines. L'USMA ou l'ESS en comptent énormément. Il suffit de les utiliser sans complexe.
S. l.
417
auto
un designer libanais
au service de bMW
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
KARIM HABIB
A
4de notre envoyé spécial à Paris,
Saïd lACete
u Mondial de Paris, le modèle
BMW Série 3 en version gran
Turismo aura été le véhicule
qui a fait le buzz tellement les
visiteurs l'ont approché,
aimé et surtout il est devenu la star de ce
show automobile parisien. Mais derrière
cette star, se cache une autre vedette que
les visiteurs ne verront pas mais c'est
grâce à cette autre figure que BMW se
taille la part de popularité du côté de la
Porte de versailles. Cette seconde star
n'est autre que le designer de ce produit,
Karim Habib. Ce Libanais d'à peine 45
ans, travaille actuellement pour la BMW
groupe. Il est le concepteur en chef de la
marque BMW, succédant à Adrian van
Hooydonk en 2012. Francophone, fils
d’une professeur de littérature française,
Karim Habib est dans l'obligation de quitter le Liban pour fuir la guerre qui faisait
fureur. Destination Téhéran mais là aussi,
la famille ne séjourne pas longtemps et
quitte l'Iran pour la grèce. Ce sera un
séjour de courte durée en terre hellénique puisque la famille Habib s’envole
définitivement pour le Canada. A Montréal, Karim Habib partage son emploi du
temps entre les études et le sport. Le
sport, pour lui, c'est son authentique violon d'Ingres puisque c'est un très bon
escrimeur. Pour preuve, il sera champion
du Canada dans sa catégorie et, dans le
même temps, il décroche un diplôme en
génie mécanique. Avec ce titre en poche, il
ne s'arrête pas en si bon chemin et le
voilà qui poursuit son cursus à l’Art Center, en Suisse puis en Californie, aux
Etats-Unis. Dès lors, c'est une nouvelle
aventure qui débute car en 1998, il est
engagé chez BMW. Il y restera une année
avant d'aller chez Daimler mais reviendra
chez le constructeur allemand en mai
2011 pour prendre la direction du design
extérieur. Une année, jour pour jour, on le
nomme directeur du design de la marque
allemande, sous l’autorité d’Adrian van
Hooydonk, qui supervise l’ensemble du
groupe. En marge de la production régulière, Karim Habib s’est penché sur le
patrimoine génétique de la firme bavaroise, ce qui s’est traduit par des conceptcars très évocateurs des grandes
légendes. Karim Habib est responsable de
l’ensemble de la gamme que l’on peut
découvrir sur le stand BMW avec, parmi
les vedettes, la Série 3 en version gran
Turismo, dévoilée au Mondial.
Quand on lui pose la question sur le
devenir du design moderne, Karim Habib
répond sans hésitation que la voiture
autonome représente aujourd'hui un dossier majeur. Pour lui, c'est la nouvelle tendance qui va inonder le monde automobile et c'est également pour la plupart des
designers, un champ d'investigations
unique du fait que l'organisation de l'espace intérieur sera bien entendu bouleversée.
La conduite autonome remettra en
cause le règlement routier mais également la mentalité des conducteurs. Karim
Habib sait aussi que le problème se pose
avec plus d’acuité chez son employeur
BMW qui a fait du plaisir de conduite, l’un
de ses atouts primordiaux.
Quand on pose également des questions à Karim Habib en ce qui concerne
les modèles les plus marquants de l'histoire de l'automobile, il ne se fait pas
prier pour répondre d'abord que ce sont
ceux qui ont initié des tendances fortes. A
titre d'exemple, le designer de BMW cite
la volkswagen golf de 1976 ou la Renault
Espace 1984. Cependant, en bon connaisseur et amoureux de l'esthétique, Karim
Habib ne peut pas s'empêcher de dire
qu'il réserve une fascination particulière
pour la première Lamborghini Countach,
la plus pure, celle de 1971.
S. l.
les 5 principales nouveautés au Mondial de Paris 2016
le Mondial de Paris a, comme à chaque édition, apporté son
lot de nouveautés. Pour l'édition 2016, Crésus s'est baladé à travers les pavillons et les stands pour vous parler de ces nouveautés qui ont attiré une foule nombreuse.
•GiuliA velOCe d'AlFA rOMÉO
Elle coûtera à partir de 50
200 euros ! C'est dire que le
constructeur italien présente au
Mondial de Paris un spécimen de
haut de gamme pour séduire le
public connaisseur en la matière.
La version sportive giulia
veloce est un produit comme
nous venons de le dire, haut de gamme à quatre roues motrices
qui est véhiculé par deux motorisations spécifiques de 210 cv
(diesel) à 280 cv pour la version essence.
• PeuGeOt 5008
Monospace à l'état initial, le Peugeot 5008 est transformé en
SUv pour épater tout le monde à Paris. Cela se voit d'abord à son
bas de caisse nettement relevé. Avec 7 places, Peugeot 5008 ne
craint guère la concurrence et, mieux encore, veut se frayer un
chemin important parmi les SUv les plus réputés.
Sous le capot, Peugeot promet des émissions de C02 à partir
de 115g/km en essence et de 105g/km en diesel. Le Peugeot
5008 bénéficie de la dernière évolution de l'i-Cockpit avec
notamment une tablette 8 pouces permettant de profiter de ses
applications mobiles et une dalle numérique de 12,3 pouces.
Peugeot annonce que son 5008 sera mis en vente au printemps
2017.
• FerrAri APertA
L'Italie revient avec les nouveautés. Après la giulia veloce
d'Alfa Roméo, voilà que la version cabriolet de la Ferrari, l'Aperta qui envahit Paname. C'est un modèle supercar à série limitée
spéciale qui illumine le stand de Ferrari du côté de la Porte de
versailles.
La nouvelle Aperta
reprend la motorisation
de la Ferrari, soit un
cumul de 963 cv entre
son v12 et son bloc
électrique pour une
accélération de 0 à
100km/h en moins de 3
secondes et une vitesse
de pointe de 350km/h.
Son prix, 2 millions
d'euros pour ce trésor qui ne sera produit hélas qu'à 500 exemplaires ou moins.
• CitrOën C3
La nouvelle génération de C3 est à l'honneur dans le stand de
la marque aux Chevrons.
La Nouvelle Citroën, longtemps considérée comme étant la
cousine de la Peugeot 208, s'inspire du Cactus qui avait fait
fureur durant les deux dernières années qui viennent de s'écouler. Inspiration du Cactus d'abord en raison des fameux Airbump, ces petits coussins d'air placés sur les portes. Cette nouvelle C3 est surtout personnalisable, tant à l'extérieur décliné en
bi-ton avec trois couleurs de toit qu'à l'intérieur avec ses 4 packs
d'ambiance disponibles. Elle est attendue en concession dans la
foulée du Mondial de Paris 2016, à partir de 12.950 euros.
• nOuvelle niSSAn MiCrA
La nouvelle Micra adopte un nouveau look, caractérisé par la
calandre en forme de v mais également de nombreuses aides à la
conduite comme le freinage autonome d'urgence avec reconnaissance des piétons ou le limiteur de vitesse.
C'est une 5e génération de Micra qui débarque à Paris et qui
se démarque déjà par sa taille puisqu'elle gagne 17 cm en longueur et 7,7 cm en largeur. Le constructeur propose de nombreuses possibilités de personnalisation pour un total de 125
combinaisons possibles. Les ventes débuteront en Europe en
mars 2017.
S. l.
Les énormes ambitions
iraniennes
l'iran a l'intention d'exporter 1 million de
véhicules d'ici l'année 2025 et ce, grâce à des
coentreprises avec des constructeurs étrangers. On parle déjà des constructeurs français PSA et Renault qui sont sur les agendas
des Iraniens.
Pour ce faire, une assiette reposant sur un
rectangle de sept kilomètres sur deux,
implanté dans la banlieue de la capitale
Téhéran, au pied des montagnes séparant la
capitale iranienne de la mer Caspienne, servira d'usine pour la production de ce projet
très intéressant. On parle d'une usine gigantesque que la firme Iran Khodro veut exploiter pour atteindre ses objectifs.
Par les accords tenus avec Renault et PSA,
les 30.000 salariés du site assembleront
bientôt des Peugeot 208 et 301, entre autres,
soit des modèles bien plus sophistiqués que
ceux produits actuellement.
Afin d'alimenter son marché local (iranien)
et ensuite passer à l'exportation, le premier
constructeur iranien souhaite doubler sa
production en dix ans pour atteindre en
2025, la bagatelle de 1,1 million de voitures.
Croissance permanente
depuis 2009
En 2015, la production mondiale de véhicules particuliers et utilitaires a évolué de
1,1% (environ 950 000 unités de plus). Il y a
eu en tout pas moins de 90,8 millions de
véhicules produits. Cette ascension va toujours crescendo depuis 2009, année de la
chute de la production automobile.
Aujourd'hui, la majorité des zones de production vivent des hausses significatives qui
contrastent avec les baisses observées au
japon, en Russie et en Amérique du Sud.
Dans les zones des pays émergents, on
observe une production en hausse de 128%
pour l'Asie-Océanie, 176% pour la Chine et
27% dans les nouveaux États membres de
l'Union européenne. Cependant, la chute est
à mettre au profit des pays d'Amérique latine avec un ratio de 18%.
Nissan met Bolt
à l'épreuve du feu
nissan parraine depuis un certain temps
l'homme le plus rapide de la planète. En
effet, Usain Bolt demeure son « directeur des
sensations fortes ». Et pour se jeter dans
l'aventure, la marque nippone compte
confronter son ambassadeur à de nombreux
nouveaux défis et le plus délicat est celui de
courir plus vite que la propagation d'une
flamme. Produire des images fantastiques,
reste l'objectif pour Nissan et Bolt.
Allemande et électrique
Avec les électriques, la question n'est plus à
combien ça roule ? Mais plutôt Combien ça
roule ? Opel attaque le problème de front et
soigne sa nouvelle Ampera-e ; le tout nouveau produit, fraîchement présenté au Mondial de Paris, se montre apte de dépasser à
l'aise la barre fatidique des 400 kilomètres
d'autonomie sans la moindre recharge. Pourtant, les normes NEDC accordent à la concurrence entre 190 et 240 kilomètres.
Ainsi, si cela s'avère vrai, on pourra déduire
que la compacte électrique d'Opel sera la
meilleure de sa catégorie.
A la découverte de...
Discovery
Pendant des décennies, les Land Rover,
seules, toisaient les berlines de toutes les
autres marques. Désormais, presque chaque
gamme comporte des SUv et l'univers de la
concurrence est foisonnant, moyennant un
renouvellement régulier. Le nouveau Discovery apparaît aujourd'hui et la circonstance
est un peu solennelle car ce n'est que la quatrième réincarnation de la grande ancienne
en 27 ans d'existence.
S. l.
418
idées-débats
qu’eSt-Ce que l’intÉGriSMe
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
(Première partie)
On a l’habitude de voir l’intégrisme comme une sorte d’exagération de la religion. D’ailleurs, il n’y a pas si
longtemps, on l’appelait encore l’extrémisme religieux. Il est conçu comme une sorte d’augmentation
quantitative de ce que sont les règles habituelles de la religion. C’est, à mon avis, une grave erreur de concevoir
l’intégrisme de cette façon. Elle implique que la religion et l’intégrisme sont deux choses de même nature et qu’il
n’y a qu’une différence quantitative qui les sépare.
E
4Par Karim jbeili
n plus d’être fausse, cette
conception avantage énormément l’intégrisme au détriment
des religions puisqu’elle lui
permet de tirer avantage de la
bonne réputation des religions tout en discréditant celles-ci. Chaque fois que l’intégrisme commet une exaction, elle est mise
sur le compte de la religion. Ce qui suscite
la colère contre l’ensemble des croyants et
les oblige, qu’ils le veuillent ou non, à se
réfugier dans l’intégrisme. La réalité est
bien plus complexe que cette conception
simpliste et dangereuse.
Peut-être que la meilleure façon de
résumer ce que nous savons de l’intégrisme
passerait par la théorie de la horde primitive de Freud. C’est dans son livre Totem et
tabou que Freud formule sa théorie de la
horde primitive. Selon lui, à un stade précoce de l’histoire de l’humanité, le père de
la tribu disposait à sa guise de toutes les
femmes. jusqu’au jour où ses enfants, les
fils de la tribu, l’ont tué pour pouvoir eux
aussi jouir des femmes de la tribu. Puis
après avoir joui un certain temps des fruits
de leur crime, ils se sont rendu compte que
cette situation où tout le monde n’en faisait
qu’à sa guise, engendrait le chaos. Il leur a
alors fallu instaurer la loi pour réglementer
une situation qui n’en finissait pas de dégénérer. Une loi égalitaire dans laquelle cha-
cun avait sa part du gâteau. En somme,
nous avons affaire à un groupe de gens qui
ont transgressé les règles établies par leur
dieu ou leur père et, ce faisant, l’ont tué; et
qui, par la suite, essayent de se débrouiller
avec cette transgression. Cette théorie va
nous servir à très bien comprendre ce
qu’est l’intégrisme. L’intégrisme se reconnaît à cinq signes principaux : la transgression, la mort de Dieu, l’identification, les
murailles et l’énergétique.
1)-lA trAnSGreSSiOn
Les juifs étaient autrefois des nomades
dont l’essentiel des ressources provenaient
de l’élevage des ovins et donc de la sexualité reproductive de ceux-ci. La logique de
leur religion a cristallisé cette situation en
proscrivant pour eux l’agriculture et le rapport direct et non médiatisé avec la terre.
Le rapport à la terre est devenu, pour eux,
prohibé. La terre, même promise, demeure
la propriété de Dieu. S’il l’a promise c’est
qu’elle lui appartient et s’il la leur a prêtée,
il peut la leur retirer en tout temps.
Lorsqu’un certain nombre d’entre eux
sont devenus sionistes, et ont voulu accaparer une terre, il leur a fallu transgresser cet
interdit. Contrairement à ce qu’ils disent, la
terre de Palestine ne leur a pas été donnée
par Dieu, ils la lui ont volée. Comme quelqu’un qui violerait sa mère en prétendant
que c’est son père qui la lui a donnée.
Pour les Musulmans, dont la civilisation
s’est construite autour du commerce et des
échanges, les différences inter-individuelles sont essentielles. Chacun négocie
continuellement des services ou des objets
avec tous ceux qui l’entourent. Le désir de
chacun est donc toujours limité par le désir
du voisin. Quelle que soit la jouissance du
désir de quelqu’un, sa satisfaction sera toujours limitée par l’obligation de négocier
avec le désir de l’autre. Même dans le désir
sexuel, il y a une négociation qui s’effectue.
Le Musulman ne désire pas une femme, en
général, mais une femme en particulier, qui
est possédée par un père, un frère ou un
oncle. Même après le mariage, le rôle de la
famille de l’épouse va demeurer essentiel à
l’équilibre du couple.
Pour les islamistes, le rapport à la
femme a changé. Elle n’est plus liée à une
famille, un père ou un frère, elle n’est possédée par personne. La femme est un objet
sans propriétaire. Elle ne peut plus inspirer le respect. On ne possède plus une
femme particulière dans la mesure où le
père ou le frère le permet, on possède plutôt une femme en général qui n’est possédée par personne et on en fait ce qu’on
veut. Chacun peut se jeter sur elle et se
l’approprier puisqu’elle n’est plus possédée
par personne. Le moindre morceau de chair
apparente inspire une terrible concupiscence.
La violence ségrégative qui a été exercée
sur les Musulmans et les Chrétiens orien-
taux, de façon quotidienne, depuis des
décennies par la colonisation, l’impérialisme et le sionisme, a provoqué une accumulation démesurée de colère qui, à la longue,
a cherché un moyen de se décharger. Dans
toutes les traditions religieuses, d’avoir des
liens cordiaux avec le voisin, fut-il un ennemi, est un impératif de survie. Il est également interdit de porter atteinte à sa propre
vie puisqu’elle nous a été prêtée par Dieu.
Ce sont ces règles qui ont été transgressées
par les intégristes. Tuer l’autre sans nécessité et se tuer soi-même sont les deux
règles qui ont le plus été transgressées par
les islamistes.
Après avoir pris possession des femmes
sans l’assentiment de leur père, on prend la
vie des hommes en les incitant à s’éclater,
on met les femmes en esclavage, on brûle
des maisons et on détruit des temples et
des vestiges archéologiques. Bref, toutes
les transgressions deviennent possibles
que ce soit dans la sexualité ou la violence.
Qu’il soit juif ou musulman, le problème de
l’intégrisme c’est que, dans le rapport à
l’objet, il n’y a plus une distance suffisante,
on peut même dire qu’il n’y a plus de distance du tout. Le sioniste est collé à la terre
et l’islamiste est collé à la femme et à la violence. Ils mourraient cent fois plutôt que
K. j.
de lâcher le morceau.
(A suivre)
419
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
CHRONIQUE D’UN BAS DE LAINE
MOi, l’ÉCrivAin inCOnnu. tOi, l’enFAnt innOCent
J
Par Rachid EZZIANE
« Rien ne peut compenser une seule
larme d’un seul enfant.» Dostoïevski
e viens d’éteindre la télé.
L’information, comme celles
déjà passées, je l’ai écoutée
plusieurs fois. Dans ma tête
elle résonne comme une
antienne d’un chant mortuaire. L’enfant
de quatre ans, enlevé il y a quelques
jours, a été retrouvé décapité en
morceau à l’intérieur d’un sac en
plastique déposé dans une machine à
laver. Une fille de six ans, retrouvée
décapitée, le corps sans tête. Deux
frères, le premier âgé d’un an et le
deuxième de cinq ans, tous deux
égorgés. Une trêve de quelques jours,
juste au moment d’espérer, on annonce
un nouveau fait d’infanticide. Et puis les
images défilent sur les écrans. Suivent
les cortèges mortuaires dans des cités
moyenâgeuses. Des visages blêmes de
haine réclament la condamnation à
mort. Sur les plateaux de télé, les
experts, les pour et les contre,
s’affrontent pour un laps de temps
d’audimétrie. Chacun veut sa gloire
médiatique. Personne ne pose la vraie
question. Pourquoi ?... Pourquoi, chez
nous, tue-t-on en série des enfants ?
Je suis tout retourné. Pas triste. Pas en
colère. Sans haine. Je suis tout
questionnement. Mais je me sens
perdu. Sans repères. Et je veux
comprendre avant de juger. Moi,
l’écrivain. Je n’arrive pas à admettre ce
qui arrive, à toi, l’enfant innocent.
Moi, l’écrivain. Je n’ai que cette
chronique à crier à la face du monde.
Pour toi, l’enfant innocent. Une façon de
ne pas me sentir responsable de ce qui
t’arrive. Mais aussi pour libérer ma
conscience. Car celle de ma société est
devenue caduque. Sauf ton respect, toi
l’enfant innocent, elle est devenue
caduque par la course effrénée des
cupides que sont devenus mes
concitoyens. Elle l’est aussi par
l’insoutenable suffisance de nos
intellectuels qui, du matin au soir, et là
où portent la vue et les avions, courent
derrière la reconnaissance, les prix et
les salons feutrés où coulent à flot les
petits-fours et « la bonne chair ». Je ne
suis pas triste. Je ne suis pas en colère.
Je constate. J’observe. Et je pose les
questions. Où sont-ils ces hommes et
femmes des « Lettres et des Arts » ? Ces
élites du droit et de la culture. Ailleurs,
là où vous aimez partir et dire vos
sarcasmes, ils ne laissent rien passer
sans qu’ils n’aient leur mot à dire. Ici,
on achève bien les enfants innocents
sans qu’une seule de vos voix n’ait été
élevée pour dénoncer ce qui arrive à
nos enfants. Ici, si tu oses te mesurer,
par ta plume inconnue, ou sobre, ou
pudique, on te traitera d’écrivain rural.
C’est vers le sensationnel que tout
converge.
Ne t’en fais pas mon petit. Moi,
l’écrivain inconnu, je te donnerai la
parole par ma plume. Dis-leur ce que tu
as à dire. Peut-être qu’ils reviendront à
de meilleurs sentiments. Peut-être qu’ils
s’arrêteront pour écouter tes cris de
détresse. Peut-être…
Voici ma plume. Dis. Ecris sur mon livre
blanc.
« Je ne comprends pas votre haine
envers moi. Ni votre acharnement.
Encore moins, le sort qui m’est réservé,
en ces temps qui courent dans mon
pays. Je n’ai jamais fait de mal à
personne. Je n’ai, non plus, jamais
manqué de respect à quiconque. Je ne
milite dans aucun parti politique. Ni
dans aucune association. Je ne suis
même pas supporteur d’une équipe de
football. D’ailleurs tout ce qui se dit et
se fait en dehors de mon monde, ne
m’intéresse pas. Je n’ai jamais donné
mon avis, ni témoigné contre x ou y.
Comment osez-vous me traiter comme
un vulgaire coupable alors que vous
savez que je suis innocent. Quel cœur
avez-vous ?
Je me plains de votre acharnement à
Dieu. Et le Jour du Jugement dernier
vous ne trouverez aucune excuse à
présenter. Avec les anges, je serai. Et
dans l’enfer, vous y demeurerez. Mais,
en attendant ce jour, je conte ma peine
et ma douleur à tous ceux qui portent
en eux la lumière de la lucidité, mais
aussi celle de l’empathie envers moi.
D’ailleurs, je ne sais pas écrire comme il
se doit. J’ai donné procuration à la
plume de l’écrivain ; car lui sait rendre
compte de mon cas. Il sait aussi penser
et panser mon cri de désarroi et, au
plus profond des cœurs des hommes, le
révéler. Et pourtant ! Il n’y a pas
longtemps, j’étais par tous choyé et
adulé. Et pas que dans mon pays.
Partout où mon nom était cité,
s’ouvraient devant moi les bras, et de
câlins j’étais étouffé.
Que vous arrive-t-il ? Et votre
conscience, vous laisse-t-elle dormir ?
Et votre honneur, qu’en faites-vous ?
Que direz-vous demain à Dieu ? « Quand
le soleil sera obscurci, et que les étoiles
deviendront ternes, et les montagnes
mises en marche, et les chamelles à
terme, négligées, et les bêtes farouches,
rassemblées, et les âmes accouplées et
qu’on demandera à la fillette enterrée
vivante pour quel péché elle a été
tuée… » [S.81/V de 1 à 9].
Pour quelque motif que ce soit, et dans
toutes les religions et les cultures du
monde, encore plus en Islam, il est
blasphématoire de faire du mal à un
enfant. Alors, qu’est-ce que ça serait
découper en morceau un petit être de
quatre ou cinq ans sans défense ?...
La main de l’écrivain tremble. Elle
n’arrive plus à écrire ma doléance. Les
images de ma douleur lui font mal.
Découpé en morceau, mis dans un sac
en plastique dans une machine à laver
ou brûlé et jeté en pâture aux animaux
sauvages de la forêt ou tout simplement
abandonné dans une poubelle, là est
l’image que se passent les réseaux
sociaux en buzz… sans aucune autre
raison que de se passer l’info en boucle
pour des « j’aime » et des «
commentaires » plus que pour me
protéger, sinon pourquoi continue-t-on
toujours, sans peur ni honte, à me
kidnapper et à mutiler mon petit corps ?
Réveillez-vous ! L’enfant n’est-il pas le
père de l’homme ? Il est même son
avenir. Traitez-nous comme il se doit
aujourd’hui, on vous le rendra demain
en réalisant une société saine et
équilibrée…
C’est au nom de tous mes frères et
sœurs qui, comme moi, leur liste est
longue malheureusement, ont subi les
atrocités des adultes, que j’ai donné
mandat à l’écrivain et au poète pour
porter notre douleur à qui de droit, et
même en faire une affaire nationale
pour que demain, nous… vos enfants,
les pupilles de vos yeux et le sang de
vos foies, comme vous dites, et si vous
le dites sincèrement, plus jamais aucun
enfant ne subira ce que nous avons
subi. »
Moi l’écrivain qui écrit par la bouche de
l’enfant (d’aujourd’hui), j’ai honte d’être
l’adulte (d’aujourd’hui), car quand
j’étais enfant, les adultes de mon
temps, parents, voisins et simples
passants, ne m’ont jamais traité de
cette façon. Chez eux, j’ai toujours
trouvé refuge et compassion. Et en
aucun cas, ni en aucune circonstance
(sauf celle d’une brimade pour un
mauvais comportement) je n’ai eu peur
des adultes, hommes ou femmes.
Jamais…
Moi l’écrivain qui écrit par la bouche des
enfants maltraités, j’aurais aimé leur
écrire un poème pour leur faire
apprendre à croire en la vie, ou leur
conter l’histoire de la « Terre des
hommes ».
Moi, l’écrivain inconnu, j’ai voulu – par
ces temps exécrables qui courent chez
nous, où l’enfant est malmené dans sa
chair et son petit être, sans qu’on y
arrive, gouvernants et gouvernés, à le
préserver de l’agissement de ces
monstres inhumains qui agissent
presque en toute liberté, par ma plume
et ma conscience – apporter à tous les
enfants où qu’ils soient mon affection et
ma solidarité agissante.
J’ai choisi pour ma chronique solidarité
agissante, non pas d’énumérer tous ces
crimes commis contre nos enfants, ou
le nombre de ces anges martyrs, ni ce
qu’ils ont enduré durant leur captivité,
car le fait d’y penser est en lui-même
une souffrance insupportable, mais j’ai
voulu dépeindre l’enfant dans toute sa
simplicité, tel qu’il est.
Mais…
« Il pleut sur ma patrie, la mort et la
légende
Il suffit d’un épi pour que chantent les
blés
Il suffit d’un moment pour que la nuit
descende
Et aussi d’un moment pour que le jour
soit né… », disait Malek Haddad.
R.E.
Pour quelque
motif que ce
soit, et dans
toutes les
religions et les
cultures du
monde, encore
plus en Islam, il
est
blasphématoire
de faire du mal
à un enfant.
Alors, qu’est-ce
que ça serait
découper en
morceau un
petit être de
quatre ou cinq
ans sans
défense ?...
420
LE PALAIS DES RÊVES
littérature
Ce roman de fiction (à
résonnance politique) a
été écrit par Ismail
Kadaré par étapes, par
recueils de récits, de 1970
à 1981.
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
D’ISMAIL KADARE
C
ar, à l’époque, l’Albanie était,
comme on le sait, l’un des pays
les plus fermés au monde. Enver
Hoxha, le père-président du
petit peuple du pays des aigles
(ou Shqipëria en albanais) ayant choisi le
régime stalinien pour gouverner l’Albanie
d’une main de fer. En 1981, quand le roman
prit sa forme actuelle sous le titre de : L’employé du palais des rêves, il fut publié à l’automne de la même année. Ismail Kadaré,
avec ce roman, s’était exposé à un risque
sans précédent. Mais durant plus de deux
mois, après sa sortie, personne n’en parla.
Pas un seul journal ou critique littéraire
n’osa le mentionner. Heureusement pour
l’auteur, le dictateur était occupé et préoccupé à régler ses comptes à ses rivaux du
parti communiste. D’ailleurs, en décembre
de l’année en cours, le premier ministre,
accusé de complot, s’était suicidé. Mais la
roue de la dictature se rattrape et convoque
une réunion extraordinaire (plénum de
l’union des écrivains) présidée par la
femme du président Hoxha, au début de
l’année 1982, pour examiner en présence
de l’auteur, Ismail Kadaré, le contenu du
roman Le palais des rêves. Après deux
jours de délibération, les membres du plénum considèrent le roman subversif et
affable Kadaré d’ennemi de la république
communiste. N’était-ce ses écrits sur l’histoire des Balkans et de l’Albanie, grands
succès même dans le monde, il aurait été
condamné. Mais malgré les circonstances
qui plaidèrent pour l’auteur, la deuxième
personnalité du parti, Ramiz Alia, lui adressa une mise en garde à la fin du plénum. «
Le peuple et le parti vous hissent sur
l’olympe, mais si vous ne leur êtes pas fidèle, ils vous précipitent dans les abîmes »,
dit-il à Ismail Kadaré.
De quoi parlait le roman pour qu’il
mette les officiels du système Albanais de
l’époque à la défensive ? Pour le savoir,
feuilletons, ensemble, les deux-cents pages
de ce livre surréaliste. Bien-sûr, ce n’est
que de la fiction, mais c’est un imaginaire
qui incite à « suivre le regard » de l’auteur ;
car l’auteur veut mener son lecteur de la
fiction à la réalité. Et comme la réalité, dans
plusieurs des cas, dépasse la fiction, alors…
Il faut aussi mettre le livre dans son
contexte historique. En 1970, l’Albanie,
comme tous les systèmes communistes au
parti unique, vendait l’image d’un pays
paradis où tout le monde était beau et gentil guidé par un père protecteur. Mais le
roman, de par sa trame, les décors, les lieux
et les personnages, comme un cheveu dans
la soupe, vient rappeler l’envers du décor
d’un système contre-nature où tout mène à
l’enfer. Mais tout ça à travers une histoire
vieille du temps de l’empire ottoman qui a
occupé l’Albanie durant cinq siècles.
Revenons au roman lui-même. Et
voyons voir de quoi parle-t-il.
En Albanie, au temps de l’empire ottoman, vivait l’illustre famille des Quprili,
Kuprili en turc, seule famille chrétienne
associée à la gouvernance du pays, mais qui
subissait de temps à autre les affres de la
Sublime porte. La famille, bien que bien placée dans les rouages de l’Etat, avait utilisé
toutes ses relations pour trouver un emploi
à un neveu, Mark-Alem, dans la prestigieuse et secrète administration impériale : le
Tabir Sarrail. Cette mystérieuse administration impériale avait pour mission d’assembler, de classer et d’interpréter les
rêves des citoyens pour arriver à détecter
des signes qui permettront à l’empire de se
projeter dans l’avenir. Et c’est par l’emploi
de Mark-Alem que l’auteur nous fera visiter
les lieux du « palais des rêves », ses
lugubres bureaux, ses services, ses
employés et… ces rêves par quantité industrielle à comprendre, expliquer et commenter pour le bien de l’empire. Car le peuple
avait consenti à participer à cette grande
œuvre. Pour son bien lui avait-on dit, et
bien-sûr menti. En voici un exemple de ces
rêves à élucider par Mark-Alem : « Il choisit
les feuillets portant les textes les plus
courts, et, sans même regarder le nom de
l’auteur du rêve, il lut ce qui était consigné
sur l’un d’eux : Un chat noir avec la lune
entre les dents courait, poursuivi par une
multitude de gens, laissant derrière lui les
traces sanglantes de l’astre blessé… »
Et de tout le pays arrivaient par dossiers
complets, écrits à la main, soit par les personnes eux-mêmes qui les avaient rêvés ou
Il faut aussi mettre le livre
dans son contexte historique.
En 1970, l’Albanie, comme tous
les systèmes communistes au
parti unique, vendait l’image
d’un pays paradis où tout le
monde était beau et gentil guidé
par un père protecteur. Mais le
roman, de par sa trame, les
décors, les lieux et les
personnages, comme un cheveu
dans la soupe, vient rappeler
l’envers du décor d’un système
contre-nature où tout mène à
l’enfer
par des copistes, et transportés par des voitures courrier, appelées : les porteurs de
rêves. Les emplois du « palais des rêves »
sont minutieusement répartis et classifiés.
Tout en amont, il y a les « porteurs de rêves
», puis viennent après les employés affectés
au classement des rêves, arrivent ensuite
les interpréteurs des rêves et enfin les préposés au « maître-rêve », ceux qui, en dernier lieu et après avoir décelé dans le rêve
étudié une opportunité à aller présenter le
songe au sultan. Sans oublier les archives
regroupées dans les sous-sols du palais.
– « Naturellement, reprit l’archiviste en
rigolant. Tu peux reprocher beaucoup de
choses aux gens, notamment leur paresse,
mais en aucun cas leur sommeil ! Tout le
monde dort, a dormi et dormira, mon cher,
depuis le commencement du monde
jusqu’à la fin des temps… »
Et l’archiviste voulait dire à Mark-Alem
qu’il y avait matière à travailler dans le
sommeil des hommes, car chaque être
humain, homme ou femme, qui dort rêve.
Et c’est dans les rêves que se disent les
secrets les plus enfouis.
Mais dans cet empire où l’on étudie les
rêves et les délires, on n’épargne guère
ceux qui ont le regard perçant par leur
mauvais œil. Alors un décret fut promulgué
pour crever les yeux à toute personne suspecte d’avoir un mauvais œil. Il y eu même
ceux qui, se sachant porteurs de cette tare,
acceptèrent volontairement d’avoir les
yeux crevés, moyennant une pension pour
services rendus à la nation. Service après
service, Mark-Alem se voit nommer dans
les différents rouages du Tabir Sarrail jusqu’à devenir maître-rêve, puis finir le
maître absolu. Mais il restera hanté par la
peur d’être à son tour broyé par cette
même bureaucratie qu’il dirige. Et c’est
dans un de ces rêves anonymes qu’il lira, un
jour, la condamnation de sa propre famille.
Tel est le roman d’Ismail Kadaré. Plein
d’énigmes et de non-dits. Où son charme se
dégage du contraste entre les ténèbres du
palais et le merveilleux que représente le
rêve, comme le mentionne l’écrivain français Eric Faye en introduction du livre.
Et c’est là aussi où le génie de l’écrivain
trouve tout son épanouissement doublé
d’un talent de virtuose littéraire.
Ismail Kadaré (Kadare en albanais) est
un écrivain Albanais né le 28 janvier 1936
dans le Sud de l’Albanie. Après des études
de lettres à l’université de Tirana et un
cours séjour à Moscou, il se consacre au
métier de journaliste. Dans les années cinquante, il commence à s’intéresser à l’écriture, et c’est dans la poésie qu’il s’essaie en
premier. C’est en 1963 qu’il publia son premier roman, Le général de l’armée morte.
Le roman a été adapté au cinéma en 1983.
Le livre figure dans la liste des Cent livres
du siècle. La bibliographie d’Ismail Kadaré
est riche et diversifiée. Son œuvre est
reconnue par les critiques comme étant
une création littéraire contemporaine
d’une grande importance. Ismail Kadaré a
touché à tous les styles, du roman au
théâtre, en passant par la nouvelle, la poésie et l’essai. Il a été, à plusieurs reprises,
cité pour le Nobel de littérature.
Sa bibliographie est d’une telle richesse,
estimée à plus d’une trentaine d’ouvrages.
Nous citerons à titre d’exemple : Les tambours de la pluie, Le crépuscule des dieux
de la steppe, Le pont aux trois arches, La
niche de la honte. Ismail Kadaré est aussi
un écrivain engagé. Il était porteur d’espoir
pour son peuple et à tous ceux qui militaient pour une vie meilleure dans le
monde.
r. e.
littérature
421
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
«Les Harkis ont été les victimes
de la colonisation»
ENTRETIEN AvEC PIERRE DAUM, AUTEUR DE :
LE DERNIER TABOU, LES HARKIS RESTÉS EN ALGÉRIE APRÈS L’INDÉPENDANCE
4entretien réalisé par Amine idjer
être accompagné de militaires armés destinés à me protéger. je comprends très bien
l’inquiétude des autorités algériennes qui
ne veulent pas que je sois kidnappé par des
terroristes. Mais en même temps, ces vieux
témoins n’auraient jamais accepté de parler en présence de policiers ou de militaires.
Crésus : Votre dernier ouvrage traite
des harkis vivant encore en Algérie.
Comment vous est venue l’idée
d’écrire ce livre ?
je venais de finir mon enquête sur les
Pieds-noirs restés en Algérie (Ni valise ni
cercueil, sorti en 2012 chez Actes Sud et
chez Médiaplus), une amie à moi, fille de
harki, venue en France comme enfant en
1962, m’a suggéré l’idée. Au début, j’étais
très surpris, parce que j’étais sûr qu’ils
avaient tous été « massacrés », et qu’il n’en
restait plus aucun.
L’accueil de cet ouvrage en Algérie et
en France ?
En France, toutes les organisations de
type « Algérie française » me sont tombées
dessus. Mais cela, je m’y attendais. Car
depuis 50 ans, leur discours peut se résumer ainsi : « Nos héros de l’OAS ont eu raison de se battre contre les barbares du
FLN, car ils se battaient pour protéger les
bons Musulmans, ceux qui avaient fait le
choix du drapeau tricolore. Et lorsque ce
salaud de de gaulle a abandonné l’Algérie,
les barbares du FLN ont massacré tous les
harkis ». Or, mon livre explique que tout est
faux dans ce discours. Donc c’est normal
qu’ils soient fâchés [rires]. En Algérie, j’ai
été attaqué par le ministre des Moudjahidine, qui refuse d’admettre qu’autant d’Algériens ont été du côté des Français. Or c’est
la vérité historique, et je ne suis d’ailleurs
pas le premier à le montrer : il y a eu plus
de 400 000 Algériens (des hommes
adultes) qui ont porté l’uniforme français à
un moment ou à un autre de la guerre de
libération. C’est en effet un chiffre énorme,
d’autant plus qu’en face, il y avait à peu
près autant de moudjahidine.
Pourquoi vouloir aborder cette partie
du passé commun entre l’Algérie et la
France ?
vous avez tout à fait raison de parler
d’un passé commun ! Car les harkis appartiennent autant à l’Algérie qu’à la France,
même si tout le monde les rejette. Les Algériens les rejettent parce que ce sont des «
traîtres », et les Français les rejettent parce
que ce sont des « Arabes » et des « Musulmans ». justement pour cette raison, les
harkis sont au cœur des tensions non
réglées entre la France et l’Algérie. Or, je
fais partie des gens qui veulent que ces tensions s’apaisent enfin.
Comment avez-vous retrouvé la trace
de ces harkis ?
Ce n’était pas facile ! vous imaginez bien
que je ne pouvais pas aller dans les villages,
et demander au premier passant : « Pourriez-vous m’indiquer où habitent des harkis, s’il vous plaît ? » [rires]. j’ai trouvé mes
premiers contacts grâce à Internet. Dans le
secret des cybers, les jeunes des villages,
fils ou filles de harki, osent envoyer des
messages par Internet en disant la vérité
sur leur père.
Après Ni valise ni cercueil (2012), il y
a eu Le dernier tabou, les harkis
restés en Algérie après
l’indépendance. Pourquoi cet intérêt
pour ce passé commun entre l’Algérie
et la France ?
je suis très sensible au racisme antimaghrébin en France. Or, je pense profondément (et je ne suis pas le seul) que ce
racisme trouve son origine dans le mépris
colonial qui a miné la société française
depuis le XIXe siècle, et qui continue à la
miner aujourd’hui. Seule l’étude de la colonisation, de sa méchanceté et de ses
crimes, peut permettre, j’espère, de se guérir de cette maladie du racisme.
Convaincre ces pères de témoigner at-il été facile ?
Non, ce n’était pas facile. Il s’agit de
vieux messieurs qui ont gardé le silence sur
leur passé depuis plus d’un demi-siècle. j’ai
dû faire preuve de beaucoup de patience, et
de beaucoup de conviction. Et puis j’ai
assuré à chacun ma totale discrétion.
Dans votre ouvrage, vous décrivez
des idées reçues en Algérie et en
France sur les harkis. Lesquelles ?
En France, deux idées dominent, qui
sont toutes les deux fausses : les harkis se
seraient engagés « par amour du drapeau
tricolore », et ceux qui sont restés en Algérie en 1962 auraient tous été « massacrés »
par le FLN. En Algérie deux fausses idées
dominent aussi : les harkis seraient des «
traîtres » ou des « collabos », et ils seraient
à peu près tous partis en France en 1962. Il
existe une troisième idée, totalement ridicule : ceux qui sont restés auraient pris le
pouvoir et seraient aujourd’hui encore
dans le gouvernement.
Pour les Algériens, les harkis sont des
« collabos ». Qu’en est-il en France ?
Cette idée peut-elle évoluer ?
Cette idée fausse (« traîtres », « collabos
», « amour du drapeau tricolore ») repose
sur l’idée que ces hommes auraient fait un
choix idéologique lorsqu’ils sont allés frapper à la caserne des Français. Qu’ils étaient
intellectuellement en faveur du maintien
de la colonisation. Or ce n’était pas du tout
le cas. Il s’agissait de paysans qui souf-
fraient de l’oppression coloniale depuis
plus d’un siècle. Quand la guerre est venue
dans les villages, avec toute sa violence et
sa misère, leur objectif était la survie de la
famille.
Dans certaines familles, d’ailleurs, certains sont montés au maquis, d’autres sont
allés chez les Français, histoire d’être protégés des deux côtés. Les collabos français,
eux, ont fait un choix idéologique en 1940 :
ils étaient pour les nazis, ils étaient contre
les juifs, ils voulaient une dictature en
France.
Comment expliquez-vous que ces
harkis soient restés en Algérie après
l’indépendance ?
C’est logique. Dans la plupart des villages, tout le monde savait que les harkis
n’étaient pas des salauds qui avaient fait un
choix idéologique, mais des paysans
pauvres qui se battaient pour la survie de
leur famille. Si pendant la guerre, le harki
n’avait pas accompli d’acte ignoble (torture
ou viol), le village lui a pardonné. Et comme
dans de nombreuses familles, au sens
large, il y avait des moudjahidine et des
harkis, tout le monde a décidé de tourner la
page.
Que voulez-vous démontrer ou
expliquer à travers votre livre ?
je ne veux rien « démontrer ». j’ai réalisé une enquête approfondie, j’ai passé des
semaines et des semaines à travers le pays
pour rencontrer ces vieux harkis, j’ai parcouru des milliers de kilomètres, j’ai
recueilli des témoignages d’hommes qui
n’avaient jamais raconté leur histoire à
personne, j’ai retranscrit ces récits en vérifiant le mieux possible la véracité des faits,
et je les ai replacés dans l’histoire générale
de la guerre et de la colonisation. Avec cette
enquête, j’offre de nouveaux matériaux à
ceux qui cherchent à comprendre avec distance et honnêteté ce qu’a été la guerre de
libération de l’Algérie, dans toute sa complexité.
Qu’est-ce qui a été difficile dans le
projet de cet ouvrage ?
En plus de retrouver ces hommes et de
les convaincre de me parler, j’ai dû m’organiser pour me rendre dans ces villages sans
La reconnaissance de la part du
président français François Hollande
de la souffrance des harkis va-t-elle
changer leur situation ? Aura-t-elle
(a-t-elle) des retombées négatives sur
les relations entre les deux pays ?
Les 25 000 harkis et leur famille (80
000 personnes en tout) arrivés en France
en 1962 ont terriblement souffert. La moitié a été parquée dans des camps, tous ont
subi le racisme et le subissent encore. j’ai
trouvé cela particulièrement indécent de la
part de François Hollande de se souvenir
soudain de ces souffrances à 7 mois de la
prochaine élection présidentielle. Le même
jour, tous les candidats à cette élection
(Nicolas Sarkozy, Alain juppé, François
Fillon) ont aussi versé leurs larmes de crocodile sur le malheur des harkis, et la honte
de la France. Mais tout cela, c’est de la
comédie. Car pour reconnaître aux harkis
leur statut de victime de la France, il faudrait admettre avant tout qu’ils ont été les
victimes de la colonisation, et que la colonisation était un crime en soi. Et cela, malheureusement, aucun responsable politique français n’a le courage de le faire.
A.i.
422
internet et lA SOCiÉtÉ
de l’inFOrMAtiOn
Wolton…ades
4Par dominique Wolton
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
(Suite)
Si internet n’est pas réglementé, il pourrait devenir une menace réelle pour nos libertés individuelles et
collectives, toujours fragiles. Les techniques n’apportent pas la liberté. Elles peuvent réellement établir et
pérenniser la liberté. Les techniques ne peuvent se subtiliser à la loi, sauf à imposer celle de la puissance
économique qui les contrôle, peinte aux couleurs de la liberté.
I
l serait d’autant plus dommage que
le Net soit le symbole d’une réelle
innovation et atteste un fort besoin
de créativité. C’est un superbe support d’utopies sociales et culturelles, bien plus importantes que les
prouesses techniques. Pou éviter que ces
utopies cèdent à la seule loi du marché, il
faut multiplier les expériences, comparer,
évaluer, être empirique et ne pas confondre
performance technique et changement de
rapports sociaux, dans cette perspective,
affirmer haut et fort que la loi ne tue pas la
liberté de communication, elle la protège,
contrairement à ce que prétend l’idéologie
de déréglementation.
Internet possède une dimension émancipatrice qui sera préservée en privilégiant
la logique de la communication et les
enjeux de société qu’elle porte, par rapport
à la logique de l’information qui reste centrée sur la performance des outils et des
techniques industrielles.
L’idée générale consiste à socialiser les
techniques pour éviter de techniciser la
société. Préconisation corollaire : il ne faut
pas séparer les nouvelles techniques des
medias traditionnels. Nouveaux et anciens
sont en réalité complémentaires, ne ressortissant pas à la même échelle de communication. Penser la communication technique
en termes de hiérarchie, c’est sacrifier à
l’idéologie technique.
Les jeunes générations sont séduites, à
juste titre, par la performance technique. Il
faut pourtant leur faire comprendre que
l’essentiel de la communication n’est pas là,
mais dans la grandeur et la difficulté des
rapports humains, une trop forte fascination technique provoquera de profondes
désillusions quand toute une classe d’âge
constatera que les rapports sociaux n’ont
pas changé. En un mot, résister au « jeunisme technique ». Ce n’est pas l’ambigüité
d’internet qui est en cause, mais la fausse
croyance selon laquelle on pourrait passer
facilement, presque ludiquement, de la
dimension possible d’internet, celle d’un
outil compatible avec un projet politique de
solidarité au nord et destiné à équilibrer les
relations Nord-Sud.
internet et leS
induStrieS CulturelleS
L’idée d’utiliser internet pour aider certaines industries culturelles, dont l’édition
en sciences sociales appelle trois commentaire qui illustrent l’emprise actuelle de
l’idéologie technique.
Partant du fait qu’internet distribue un
grand nombre d’informations d’un bout a
l’autre de la terre, on rêve d’une augmentation considérable de l’offre de connaissance. Ce qui suppose l’offre actuelle étranglée,
notamment par les éditeurs. Or jamais
l’idée d’une difficulté des sciences sociales à
décrypter et rendre intelligible un monde
de plus en plus compliqué n’est évoquée.
jamais n’est suggéré non plus le décalage
entre une societe qui ne cesse, apparemment, de demander des connaissances aux
science sociales, mais qui lui préfère, dans
l’écrasante majorité des cas, les propos des
journalistes, hommes politiques, et des
experts car ceux-ci sont davantage dans
l’air du temps. jamais non plus n’est évoqué
ce décalage, presque inéluctable, entre le
discours des sciences sociales et les autre
discours existant dans la société. Et surtout
personne ne pose la question de la deman-
de. Celle-ci est hélas souvent faible par rapport à ce type de connaissance.
Bref, il y a de très nombreuses explications à cette reconnaissance difficile des
sciences sociales, où l’étroitesse du marché
et les ravages du photocopillage jouent
aussi un rôle déterminant. Au lieu de reconnaitre cette complexité des rapports entre
l’offre et la demande, on se focalise sur le
système technique. Augmenter la capacité
de diffusion résoudrait tous les problèmes,
en réduisant le rôle des éditeurs, considérés comme responsables de la crise actuelle. Pourtant leur fonction est essentielle,
même si elle est toujours critiquable, car
l’éditeur sélectionne, oriente, conseille.
On retrouve ici une idée dominante d’internet : haro sur l’intermédiaire, soyez
libres, faites tout vous-mêmes ! devenez
votre éditeur. La critique elle, touche aussi
le journaliste dont on veut réduire le rôle
au profit du mythe de l’ « information en
direct », le professeur auquel on préfère le
dialogue homme/machine, où l’homme
politique bientôt remplace la démocratie
électronique. Bref, le modèle est le suivant :
vous avez toutes les compétences. Faites
tout, tout seul. Or ce n’est pas parce que
chacun peut accéder au net que chacun dispose des compétences. Pour gérer et apprécier les millions d’informations qui y circulent : et surtout, cette idéologie de la liberte
poussée a l’extrême, oublie de rappeler le
lien entre internet et le commerce electronique et de forums alternatifs ! pourquoi
internet irait-il aider par exemple l’édition
en sciences sociales ou toute autre industrie culturelle, si demain il peut, en ligne,
satisfaire le milieu universitaire, académique et scientifique, en le débarrassant
des « coûts » de l’édition du livre ?
Ces services interactifs, mêlant documentation et édition et où chacun sera
simultanément auteur et lecteur, structureront un marché electronique rentable,
assez éloigné du rêve d’une société transformée en vaste librairie. La oùcertains ne
voient que la liberté, d’une bonne partie des
connaissances scientifiques, culturelles, et
artistiques. Et a des taux de rendement qui
feront paraitre bien modestes les exigences
des éditeurs et des producteurs actuels. Si
l’information et la connaissance entrent,
comme on le dit depuis plus de trente ans,
directement dans une logique de l’économie, il y a toute chance que leur prix soit
bientôt sans commune mesure avec ce que
nous connaissons…
Au-delà du prix, se pose la question
essentielle de la validation. Si chacun peut
mettre « librement » sur le réseau ce qu’il
veut, qui contrôle ? On le voit déjà avec la
tendance à vouloir contourner les revues
scientifiques au profit de connaissances circulant « librement » sur lees. Sans parler
des possibilités d’erreurs, d’espionnages
scientifique ou industriel, voire de manipulations qui sont sans rapport avec l’idéal
libertaire existant actuellement.
Non, Internet, comme réseau, est trop lié
a des enjeux gigantesques de production et
diffusion d’informations scientifiques, économiques et demain culturelles de toute
nature pour qu’il soit possible naïvement
de croire que le déplacement des industries
de la presse, de la connaissance et de la culture sur le net ne créerait pas de redoutables problèmes déontologiques, économiques et politiques.
Non seulement le système technique ne
crée aucune vertu, en soi, mais surtout le
récepteur n’est pas non plus une oie
capable d’absorber une quantité croissante
d’informations, de connaissances, de culture sans filtres, hiérarchie, compétences,
intermédiaire et confiance.
d. W.
A suivre
423
algéiades
Indice de la consommation
Les Algériens subissent
la flambée des prix
les statistiques du ministère du Commerce montrent
qu’il y a eu une flambée généralisée des prix des produits
alimentaires qui impacte directement les portefeuilles
des consommateurs algériens.
Les prix de la majorité des produits alimentaires ont
connu une hausse importante depuis le mois d’août
dernier par rapport à la même période de l’année
dernière, selon la même source.
A titre indicatif, le riz a augmenté de 7,1%, les pâtes
alimentaires de 7%, la farine conditionnée (6,3%), le
concentré de tomate (5,6%), le thé (5,3%), le sucre blanc
(2,3%), le café (1,7%), les huiles alimentaires (1%) et la
semoule ordinaire (0,1%). Même chose pour les légumes
secs, à l’exception des haricots secs dont les prix ont
baissé de 7%. Le prix des pois chiches a connu une
flambée (+60,4%). Les lentilles ont, en revanche,
augmenté de 22,1%. Beaucoup de légumes frais ont
connu également la même tendance, à l’image de l’ail
importé (+28,7%), l’ail local sec (+18,2%) et la tomate
fraîche (+17,6%). Les seuls produits qui font exception
sont l’oignon sec (-31,4%) et la pomme de terre (-8,3%).
Les prix des viandes ont également connu la même
tendance haussière (poulet éviscéré avec 13,7%, viande
bovine congelée (1,5%). Les prix des œufs sont montés
aussi en flèche avec un taux de 33,3%. En somme,
presque tous les produits alimentaires ont connu des
hausses.
Ces augmentations qui touchent même des produits
subventionnés par l’Etat et dont les prix sont plafonnés,
augurent de lendemains encore plus douloureux. En effet,
les augmentations prévues dans le cadre de la Loi de
finances 2017, celles par exemple relatives aux taxes dont
les taux sont revus à la hausse, ne manqueront pas
d’entraîner de nouvelles augmentations. Au final, c’est le
consommateur qui payera la différence de toutes les
augmentations directes et indirectes.
Mila
Le foncier agricole en danger
« la sonnette d’alarme est tirée, désormais l’Etat sévira
par la force de la loi. Aucune parcelle agricole ne sera plus
déclassée pour servir à des projets urbanistiques ou
industriels ». C’est en ces termes que Abderrahmane
Madani Fouatih, le wali de Mila, wilaya de l’est de
l’Algérie, dresse le constat du détournement du foncier
agricole devenu préoccupant.
Comme le précise le site d’information El Watan, la
situation est critique. « Des plaines entières, réputées
autrefois pour la qualité de leurs terres, servent
actuellement d’assiettes aux projets immobiliers ou
économiques. Les terres agricoles de la wilaya de Mila se
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016
rétrécissent comme une peau de chagrin à cause de la
multiplication des actes de détournement de ce foncier au
profit de projets urbanistiques ou industriels. Pas une
seule commune n’est épargnée par le déplorable
phénomène qui touche tant les terres privées
qu’étatiques », rapporte le site.
Si la situation est préoccupante, le wali compte toutefois
situer les responsabilités. « Parfois le mal vient de
l’intérieur des institutions de l’Etat. Il existe des élus
corrompus ou ingrats qui utilisent leur pouvoir pour
détourner des terres à leur propre profit ou aider à ce
détournement. L’Office national des terres agricoles doit
faire son travail de protection des terres et ouvrir une
enquête approfondie pour débusquer tous les prédateurs
du foncier agricole », a-t-il conclu.
Par ailleurs, le ministère de l’Agriculture a installé
récemment une commission pour élaborer un plan global
visant à réhabiliter les terres agricoles abandonnées ou
peu exploitées.
Cette commission a été installée afin de réfléchir sur les
moyens et les efforts à fournir pour exploiter les terres
agricoles abandonnées appartenant à l’État et aux privés,
précise le ministère. Ces terres en jachère constituent
48% de la superficie globale des terres agricoles en
Algérie, un potentiel négligé qui doit être mis à profit très
rapidement.
Marché de l’automobile
Les véhicules coûteront encore
plus cher en 2017
Après une augmentation qui a suscité des polémiques
durant l’année en cours, les prix des véhicules vont
encore augmenter en 2017, annonce l’association des
concessionnaires automobiles, AC2A.
« Pour 2017, il y aura d’autres augmentations des prix
des véhicules neufs. On s’attend à une dévaluation
supplémentaire de 15% du dinar par rapport aux autres
monnaies. Cela va donc se répercuter systématiquement
sur les prix des véhicules neufs qui devraient augmenter
entre 15 et 20% », a indiqué mardi à Alger le président de
cette association, Sofiane Hasnaoui cité par l’APS. Il a
expliqué que la hausse actuelle des prix est le résultat
non seulement de la dévaluation de 30% du dinar depuis
les deux dernières années, mais aussi du coût de certains
équipements qui étaient optionnels auparavant mais
devenus obligatoires en application du nouveau cahier
des charges, notamment ceux liés à la sécurité (ABSAirBag).
Pour le président de l’AC2A, les augmentations des prix
attendues pour 2017 seront engendrées par les quotas
d’importation des véhicules neufs prévus pour l’année
prochaine. Il a expliqué que l’achat des véhicules neufs
sera plus cher auprès des constructeurs à l’étranger du
fait que ces derniers augmentent systématiquement les
prix lorsque les commandes ne sont pas importantes.
Néanmoins, le marché local devrait connaître un «
renversement » positif une fois que l’offre locale sera
plus conséquente, a prédit M. Hasnaoui qui a considéré
que le marché avait de « bonnes perspectives de
croissance », surtout que sur un parc avoisinant les 6
millions de véhicules, 65% ont plus de 10 ans d’âge.
Citant l’exemple de Renault Algérie, M. Hasnaoui a
indiqué que l’usine de montage était « en avance » en
termes de croissance par rapport aux prévisions initiales,
en précisant qu’elle produit actuellement 40.000 unités
annuellement au lieu des 25.000 prévus au lancement.
Sur le plan social, la crise financière et des mesures prises
pour réduire les importations des véhicules (licences
d’importation…), a poussé les concessionnaires à perdre
50% de leurs effectifs qui étaient de 50.000 emplois
directs et de 100.000 emploi indirects créés à travers les
réseaux de distribution et les points de vente. Les
concessionnaires s’attendent également à des pertes de
85% de leur chiffre d’affaires en 2016, selon M.
Hasnaoui.
Nouvelle ville de Sidi Abdellah
Nouveau pôle urbain ou simple
bide architectural ?
le ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la ville,
Abdelmadjid Tebboune, vient de réitérer encore une fois
la nécessité de faire de la nouvelle ville de Sidi Abdallah
un modèle urbanistique pour les autres nouvelles villes
lors d’une visite de travaille effectuée récemment sur les
chantiers.
Mais à défaut de pôle urbanistique, on assiste
actuellement au développement d’une véritable citédortoir. La Nouvelle ville de Sidi Abdellah devait changer
le visage de l’Algérie. Elle devait permettre d’offrir un
cadre de vie agréable et une nouvelle façon de construire
nos villes. Pour l’heure, la nouvelle ville de Sidi Abdellah
n’abrite que des logements AADL.
« Sidi Abdallah doit obéir à une conception architecturale
bien élaborée qui tienne compte des moindres détails
pour constituer, à l’avenir, un modèle de pôles urbains et
de nouvelles villes », a expliqué le ministre en évoquant
les grandes lignes d’un projet qui tarde à venir au regard
des bides architecturaux qui poussent comme des
champignons aux quatre coins du pays.
Banques publiques
Vers une en 2017
l’etAt enviSAGe la recapitalisation de ses banques
publiques en 2017 pour un montant global de 380
millions de dollars en 2017, selon la version finale du
projet de la Loi de Finances 2017.
Ce plan de recapitalisation vise à remédier au manque de
liquidités dont souffrent les banques publiques. Ce
manque est dû, selon la Banque d’Algérie, à la baisse des
dépôts du secteur des hydrocarbures.
A l’issue de cette baisse, le gouvernement a décidé
d’augmenter le capital social de ses banques.
Il est à rappeler que dans un contexte de chute des
recettes pétrolières, l’Etat avait l’intention d’ouvrir son
marché bancaire aux investisseurs privés, locaux et
étrangers et de permettre aux banques publiques de
s’introduire en Bourse, dans le but de diversifier leurs
sources de financement et de développer leurs activités.
Les autorités algériennes avaient déjà envisagé d’ouvrir
le secteur bancaire aux capitaux étrangers en 2007,
lorsqu’elles avaient annoncé la privatisation du Crédit
populaire d’Algérie (CPA), mais elles se sont rétractées
pour éviter d’importer la crise financière internationale
via cette ouverture aux capitaux étrangers.
Crésus # 55 du dimanche 16 au samedi 22 octobre 2016a
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