Thierry Barbier-Mueller: «Sortir des visions dogmatiques»

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Thierry Barbier-Mueller: «Sortir des visions dogmatiques»
marché immobilier
• Un entretien avec le président de la Chambre Genevoise immobilière
Thierry Barbier-Mueller:
«Sortir des visions dogmatiques»
- Vous présidez la Chambre Genevoise
immobilière depuis bientôt deux ans,
et l’heure du bilan approchant, quel
regard portez-vous sur ces deux années
à la tête de l’association des propriétaires de biens immobiliers à Genève?
On pourrait s’étonner, pour commencer, que le patron du Groupe SPG ait
pu se rendre disponible pour une tâche
associative.
- La Chambre Genevoise immobilière, au
même titre que les autres associations professionnelles de l’immobilier genevois, ce
sont avant tout des permanents qualifiés
et motivés, une structure qui fait preuve de
beaucoup d’efficacité, d’imagination et je
dirai même de dévouement, dans l’intérêt
de ses membres – dont l’essentiel sont
des petits propriétaires -, mais aussi, dans
l’intérêt de l’économie et de la société en
général. Le Comité de la CGI, composé de
personnalités d’horizons variés aux multiples
compétences, est avant tout un cercle de
réflexion et de prospective. Que l’on dirige
une régie ou que l’on soit avocat, commerçant, notaire, etc., il est possible de décider
que l’on consacrera un peu de son temps
à une cause qui le mérite! Nous avons en
outre la chance de disposer d’un secrétaire
général, Me Christophe Aumeunier, qui pilote
avec succès cette association de près de
7000 membres jouant un rôle essentiel
dans la République.
- Genève est un canton de locataires;
ne peut-on vous reprocher, en défendant les propriétaires, de gérer des
intérêts très catégoriels?
- La vocation de la CGI est de promouvoir
l’accession à la propriété et d’assurer des
prestations à ses membres, nul ne saurait
le lui reprocher. Mais à la différence d’un
lobby professionnel ou d’un groupement
d’intérêt purement économique, la Chambre
s’attache à favoriser un développement harmonieux et durable de notre canton, à lutter
pour un urbanisme intelligent et contre le
gaspillage des ressources non renouvelables,
à faire en sorte que chaque habitant de
Genève puisse se loger dans des conditions
correspondant à ses vœux, à ses besoins et
à ses moyens. Or pour cela, il faut sortir des
visions dogmatiques et idéologiques, il faut
bâtir pour toutes les catégories de la population – du logement social à la PPE – et il
faut tout faire pour éviter le gaspillage d’un
sol de plus en plus rare.
- Les conditions d’un avenir aussi
radieux sont-elles réunies?
- Il y a, malgré la période de crise que
nous traversons, une série de chances historiques. D’abord, la volonté politique du
Gouvernement et d’une partie des élus,
tous partis confondus, de trouver des solutions pragmatiques à la crise du logement.
L’Accord sur le logement, les projets de
développement de La Praille, le déblocage
de dossiers d’aménagement, l’accélération
des procédures: l’action de Mark Muller et
celle de ses collègues du Conseil d’Etat est à
saluer. Il y a ensuite une prise de conscience
globale dans le sens du développement
durable: en matière de logement, mais aussi
d’infrastructures de transport, par exem
ple, l’heure d’agir est arrivée. Du côté des
finances publiques, on réalise que la dette
n’est plus tenable et que l’attrait qu’exerce
Genève est un atout précieux; une gestion
avisée et un encouragement à l’entreprise
créatrice de richesses sont des nécessités
reconnues.
Cesser de gaspiller le sol
- Concrètement, la CGI a beaucoup
travaillé ces deux dernières années sur
la question de la densité. Est-ce une
priorité?
- C’est l’un des sujets, certes difficile à vulgariser, qui conditionnent une partie de l’avenir
de Genève. Nous avons publié une plaquette gratuite et accessible au grand public pour
montrer combien la qualité de vie n’était pas
synonyme d’éparpillement ni de mitage du
gros plan
Urgence démographique
Pendant quelque temps, une thèse insidieuse commençait à faire son chemin: l’urgence de construire davantage de logements dans le canton n’était peut-être plus aussi évidente, puisque la croissance démographique
paraissait se calmer quelque peu. Du côté de la Chambre genevoise immobilière, on estimait au contraire
que la tendance restait globalement haussière, bon nombre des non-installations de nouveaux habitants sur
sol genevois provenant simplement de l’absence d’appartements disponibles. Les dernières statistiques de
l’OCSTAT mettent en tout cas un point d’arrêt à toute controverse: malgré la pénurie, malgré la crise, malgré
l’accroissement des installations de nouveaux habitants en France voisine et sur la Côte vaudoise, la population
genevoise explose à nouveau.
En 2008, la population résidante du canton de Genève
augmente de 5 855 personnes, soit une croissance
relative de + 1,3 % (+ 0,5 %
en 2007) et s'établit à 453
439 habitants en fin d'année
(447 584 à fin 2007).
Après avoir connu une
croissance démographique
moindre et fluctuante de 2004
à 2007, le canton de Genève
retrouve, en 2008, un rythme
de croissance tel qu'il en a
connu de 1999 à 2003 (+ 5 800
personnes en moyenne par an).
En 2008, l'augmentation de la
population se caractérise par
un solde migratoire (excédent
des arrivées sur les départs)
et un solde naturel (excédent
des naissances sur les décès)
élevés.
Mouvement de la population résidante
du canton de Genève, depuis 1997
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marché immobilier
TIM
territoire, et qu’un des endroits
les plus agréables à vivre comme
le Vieux-Carouge, par exemple,
était aussi l’un des endroits les
plus denses du canton. La densité est synonyme d'intensification
des rapports humains et sociaux.
Conditionnée par de bons projets,
elle est donc rassurante et valorisante en termes de qualité de vie.
Il faut éviter que l’on «gomme»
un étage dont de futurs habitants
ont besoin pour «faire passer le
projet plus vite». C’est malheureusement trop souvent la règle
à Genève. Mais bien d’autres
sujets ont mobilisé la Chambre
Genevoise immobilière: outre les
dossiers politiques cantonaux et
fédéraux (de la concrétisation
de l’Accord sur le logement au
droit du bail, en passant par
les surélévations, la révision du
Plan directeur, etc.), nous avons
créé un nouveau Groupement,
présidé par Jean-Pierre Pasquier, Thierry Barbier-Mueller quittera la présidence
celui des Propriétaires commer- de la CGI ce printemps.
ciaux (GPC). Cette nouvelle section rejoint le Groupement des propriétaires à la défense de leur pré carré, c’est
d’appartements, celui des propriétaires de le cas de le dire, et d’autres, beaubiens ruraux et la Section des propriétaires coup d’autres, ne font partie d’aucune
de villas.
association.
- Le grand défaut des gens qui cherchent
des solutions d’avenir, qui puissent assurer
Communication et recrutement
l’équilibre et la prospérité d’une société,
- La Chambre Genevoise immobilière c’est que parfois, ils se font distancer par les
est certes représentative, mais connaît fabricants de slogans simplistes. Voilà bien
tout de même une certaine «concur- des années, on aurait peut-être pu reprocher
rence», puisque sur les 17% de pro- à la CGI de ne pas assez faire savoir tout ce
priétaires genevois, certains font partie qu’elle offrait à ses membres et, plus généde groupements d’intérêts plus limités ralement, tout ce qu’elle réalisait pour que
Deux séances à choix pour mieux économiser des impôts
La Chambre Genevoise immobilière publie un document agréé par l’Administration fiscale, intitulé: «Déductions fiscales pour un immeuble privé genevois». Celui-ci est offert à l’ensemble des
membres de la CGI, y compris ceux qui s’inscrivent au cours de la présente campagne de recrutement (avant le 31 mars 2009). Mieux: une séance d’information rend l’utilisation du document
encore plus simple. Deux dates sont proposées:
• Mercredi 4 février 2009, à 18 h 30 à Uni-Mail (Salle R 070)
ou
• Mercredi 1er avril 2009, à 18 h 30 à Uni-Mail (salle S 130).
Les inscriptions sont prises en compte dans l’ordre d’arrivée. Consulter le site www.cgionline.ch.
A noter que la séance est gratuite pour les membres de la CGI, et que les non-membres peuvent
y assister et recevront un exemplaire du formulaire «Déductions fiscales pour un immeuble privé
genevois», le tout pour le prix de Fr. 70.-.
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les conditions cadres de l’économie immobilière s’améliorent, notamment sur le plan
administratif, fiscal et politique. Aujourd’hui,
l’imposant travail effectué, en collaboration
avec d’autres acteurs et partenaires d’ailleurs,
porte ses fruits: la population en général et
nos membres en particuliers y sont sensibles
et le montrent. La CGI a développé une
communication efficace; les services aux
adhérents sont sans cesse mis en valeur et
étendus: conseils juridiques, conditions favorables, guides et documents, séminaires et
bulletins d’information, manifestations. Notre
arcade de la rue de Chantepoulet, notre
service téléphonique et notre site internet
ont un grand succès. Depuis le début de
cette année, une opération de recrutement
est en cours et s’appuie notamment sur
notre fameuse «check-list» des déductions
fiscales auxquelles les propriétaires de biens
immobiliers ne pensent pas toujours. Deux
séances d’information sont organisées, le 4
février et le 1er avril, pour que nos membres
puissent faire le meilleur usage de ce formulaire agréé par l’Administration fiscale.
Des emplois au lieu de bisons
- Votre nouveau cheval de bataille, en
cette fin de présidence de la CGI, est
la «zone des bisons», ce territoire de
Colovrex, près de l’aéroport, où l’on
pourrait déplacer les activités actuellement situées dans le périmètre de la
Praille-Acacias-Vernets, facilitant grandement la valorisation de ce dernier
pour en faire le nouveau «centre-ville»
tant espéré. Christophe Aumeunier, qui
est aussi député libéral, a déposé une
motion «Pour une nouvelle zone industrielle à Cointrin». Quel est l’accueil des
autorités?
- Il est encore tôt pour le dire. Ce projet,
imaginé dans ses grandes lignes il y a quelque temps par l’architecte Charles Pictet,
circulait dans ce que l’on nomme les cercles
informés. Après l’avoir étudié, il nous est
apparu indispensable que les perspectives
offertes par quelque 200 hectares connectés à l’autoroute, au rail et à l’aéroport soient
explorées à fond. Toute sorte de conditions
techniques doivent être évaluées, mais surtout il s’agit d’une solution pragmatique, non
partisane, sans ambition autre que d’accélérer la réalisation des projets d’infrastructures
dont Genève a besoin en termes – ne seraitce que ceux-ci! – de logement, de transport
et d’activités. La CGI s’y intéresse pour une
simple raison: elle s’intéresse à l’avenir de
Genève. n
Propos recueillis
par Thierry Oppikofer