Le Mois de l`Histoire des Noirs
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Le Mois de l`Histoire des Noirs
Le Mois de l’Histoire des Noirs Midi-conférence organisé par l’AEAS, l’AHUS, le CIPO et l’AIDE à l’Agora de l’Université de Sherbrooke. Dr. Gérard Pierre Ti-i-Taming 13 février 2004 Mes biens chers amis, Lorsqu'on m'a sollicité pour prendre part à cette activité, c'est avec beaucoup de joie que j'ai accepté de me joindre à vous. Comme vous les savez, il est question de célébrer le mois de Février, qui a été désigné en 1992, comme étant le mois de l'histoire des Noirs. Question de se rappeler, notamment, que la colonisation du nouveau continent, ne s'est pas faite que, par des européens. On a découvert que les Noirs sont ici depuis près de 400 ans sinon plus. En effet, l'explorateur Noir, Mathieu Da Costa est arrivé en 1605 en Nouvelle Écosse avec Samuel de Champlain. On sait que son nom est associé à la ville de Québec et qu'il a contribué au développement du Canada. Il a notamment été médiateur entre les Micmacs et les français dans leurs échanges commerciaux de la fourrure, qui était alors, la base de l'économie de la Nouvelle-France, et qu'il fut le fondateur de PortRoyal, qui est maintenant la province de la Nouvelle-Écosse. Loin d'être tombé dans l'oubli, chaque année on décerne des prix à son nom. De nos jours, février regorge de manifestations à travers le monde, pour rappeler au genre humain, l'apport des Noirs à la communauté. Évidemment, tous ne sont pas d'accord avec l'institution d'un mois, voué à la célébration des réalisations des Noirs. Je ne parle pas nécessairement ici de personnes ou de groupes aux tendances racistes ou xénophobes, mais gens dites censées, comme Moïse Rousseau, celui qui voit dans ces festivités, ?une formule promotionnelle que la politique et, le communautaire, ont trouvé pour souder leurs relations, sur le dos des Noirs. On prétendra tout ce qu'on veut au Québec, cependant, cet événement n'a ses racines ni au Canada ni au Québec. Le Mois de l'histoire des Noirs est un événement qui a lieu dans plusieurs grandes villes d'Amérique du Nord. En ce temps-là, les Afro-américains n'avaient pas de droits civiques. Le fondateur, le Noir, Carter G. Woodson, en a fait le lancement officiel en 1925. Au début ce fut la Semaine de l'histoire des Noirs. Compte tenu du succès grandissant de cette Semaine de l'histoire des Noirs, cette activité fut étendue, par la suite, à une durée d'un mois. On sait que le manque de respect de la personne humaine qui donna naissance à cet événement aujourd'hui célébré internationalement. Les Noirs américains, dans ces années-là, étaient systématiquement ignorés par l'histoire, en plus d'être tenus en état de servitude aux USA. Mais, ils ont su relever le défi avec fierté, force et courage. Au Québec, les Noirs anglophones de Montréal, ont été les premiers à suivre l'exemple des américains et à célébrer février, le mois de l'histoire des Noirs?. La ville de Montréal, en 1991, a été la première ville francophone, à reconnaître officiellement cet événement mondial. L'humanité de cette façon, rend hommage à l'apport culturel, économique, social et, politique des Noirs à travers l'histoire du genre humain. En Estrie, et plus particulièrement à Sherbrooke, l'honneur d'avoir implanté cette activité dans la région, revient au Centre Interculturel PeuplEstrie optimum. CIPO, est un organisme que j'ai fondé avec d'autres copains en 1987. Car en effet, j'avais fait la promotion des immigrants, la lutte au racisme, à la discrimination et à l'exclusion. En 1999, je m'engage dans cette voie, c'est-à-dire, faire la promotion des réalisations des Noirs, de ces inventeurs, de ces penseurs Noirs, qui font que l'humanité progresse. L'histoire, en général, n'a guère retenu leurs noms. Pourtant, beaucoup de Noirs sont à l'origine ou ont participé à des découvertes scientifiques et techniques fondamentales aux XIXe et XXe siècles. Nous sommes ici réunis pour rendre hommage à tous les inventeurs, à tous les penseurs et savants Noirs. ( Partageons une minute de silence en souvenir des personnes qui ont payé leur attachement à la justice et l'équité, au prix de leurs souffrances ou de leur vie.) Aimé Césaire n'en savait pas beaucoup sur le sujet dont je vous entretiens. C'était au moment où il publiait, à la fin des années 30, son célèbre Cahier d'un retour au pays natal. Le célèbre personnage, duquel j'ai reçu le Prix d'Excellence en 1957-1958, ignorait sans doute à quel point il se trompait: Eia pour ceux qui n'ont rien inventé, écrivait-il... Car, sans remonter aux anciennes cultures africaines, l'apport des Noirs, à la science et à la technique moderne, était déjà incontestable. Mais, dans les colonies, d'histoire, il n'existait que celle imposée par le colon. Néanmoins, la liste des scientifiques Noirs de haut vol est longue et d'autant plus remarquable qu'une grande partie de ces personnalités illustres ont vécu au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe. De nos jours, les personnes, qui ont subit le racisme, peuvent à peine réaliser les difficultés que les Noirs ont rencontrées, dans la reconnaissance de leur talent, de leur droit, de leur humanité. La situation a-t-elle changée..., je me le demande? Quoi qu'il en soit, saviez-vous que la première opération à cœur ouvert, a été réalisée avec succès en 1893. Elle a été faite par l'Afo-amécirain Daniel Hale Williams qui vécu de 1856 à 1931. La chirurgie n'en était qu'à ses balbutiements à cette époque. Le patient, atteint d'une balle à la poitrine, était jeune. Il a ensuite vécu jusqu'à 50 ans passés. Charles Richard Drew qui est né en 1904 et est mort en 1950, est une autre personnalité marquante dans le domaine médical. On était déjà parvenu à transfuser du sang, mais on ne savait pas comment conserver ce liquide. En dehors du corps, il se détériore rapidement. Le dr, Drew a trouvé la solution en découvrant le plasma sanguin, c'est-à-dire, le sang débarrassé des cellules. Le plasma, se prêtait beaucoup mieux au stockage. Son travail a eu une implication immédiate, avec le début de la Seconde guerre mondiale, puisque ce chercheur à été chargé d'organiser l'expédition de plasma pour les blessés vers la Grande-Bretagne. Le docteur Samuel Kountz qui vécu de 1930 à 1981, est un autre exemple, parmi les plus remarquables, en matière médicale. En 1964, il réalise la deuxième implantation de rein, au monde, entre une mère et sa fille, la première ayant lieu en 1962 à l'hôpital Necker de Paris. Mais, rassurez-vous, les réalisations des Noirs ne se cantonnent pas à la médecine. Je n'aurai pas assez de temps, pour passer en revue, les innombrables activités, dans lesquels les Noirs ont excellé. En voici des exemples: Georges Washington Carver (18641943), né un an avant l'abolition de l'esclave aux USA, est devenu l'un des plus célèbres et prolifiques chimistes mondiaux. Ses travaux les plus illustres concernent l'arachide et la pomme de terre dont il a tiré des centaines de produits différents, comme le shampoing, le vinaigre, le savon ou la poudre de toilette. Et ce n'est-là qu'une petite partie de ses multiples découvertes. Celles-ci vont de la transformation du coton pour faire des planches d'isolation, du papier, du cordage et des blocs de pavage pour la construction d'autoroutes et à la fabrication de pièces d'automobiles en plastique à base de soja ou à la mise au point d'engrais. Autant de travaux pour lesquels ce scientifique hors du commun a reçu des distinctions aux États Unis et dans le reste du monde. Les scientifiques Noirs ont laissé leurs empreintes dans bien d'autres disciplines. La conservation des aliments sous vide est une invention de Lloyd Augustus Hall(18941971), qui a expérimenté de nombreux moyens de préservation de la nourriture. Et, si le DDT cet insecticide très controversé, a pu être remplacé par un produit moins nocif dans de nombreux pays, c'est largement grâce aux travaux de Bertran Olivier Frasier-Rei, un canadien d'origine jamaïcaine. Connaissez-vous Garret A. Morgan, il vécu de 1877 à 1963? C'est lui qui a inventé les tous premiers masques à gaz, en 1912, et qui a créé les feux de circulation automobile, au début des années 20. Citons, cet ingénieur créole, né à la Nouvelle Orléans qui inventa un procédé de raffinage du sucre, par évaporation. Cette méthode connaît un énorme succès dans beaucoup d'autres domaines. Donc l'apport des Noirs à la technique ou à la science actuelle, ne devrait surprendre personne. Mais, il n'en reste pas moins vrai, que les médias n'en parlent jamais. C'est pourquoi toutes les activités qui commémorent Février, le mois de l'histoire des Noirs, doivent être soulignées de belles façons, annuellement! Parlons maintenant du Canada et de la participation des Noirs à la Seconde Guerre Mondiale de 1939-1945. En 1939, le Canada participe à la guerre mondiale qui se déroulait en Europe contre l'Allemagne nazie. Au Canada, la dépression des années 30 se faisait encore sentir : beaucoup de misère et le chômage étai grand. Si les Noirs demeurés sans travail étaient nombreux à vouloir s'enrôler, ils n'étaient pas toujours les bienvenus. Souvent, à l'endroit où ils devaient se présenter pour le recrutement, on pouvait lire une pancarte: Negroes need not apply, autrement dit: que les Noirs ne se donnent pas la peine de s'inscrire, ils ne sont pas éligibles. Le pasteur Charles Este, de la Union United Church, adressa aux autorités une lettre de protestation dans laquelle il dénonçait le cas d'Oscar Chase. La Marine royale canadienne avait refusé Oscar Chase. Ce dernier n'était pas l'exception, puisqu'en ce temps-là, les écoles d'officiers n'étaient pas accessibles aux Noirs. L'année 1941 marque un progrès de la condition des Noirs, au sein des forces armées. Il purent en effet, accéder au grade d'officier, ce qui leur avait été refusé jusqu'ici. Donc, le Canada doit emboîter le pas et fournir la chair à canon, et on enrôle des Noirs dans plusieurs unités de l'armée canadienne, notamment dans l'aviation. Il est difficile d'illustrer, avec des chiffres précis, la participation des Noirs, aux opérations militaires canadienne, car ils furent intégrés dans les divers régiments, qui prirent part aux combats. Toutefois, parmi tous ces hommes, Noirs et Blancs confondus, les pertes de vie et les blessés furent nombreux. De retour au Canada, les anciens combattants se regroupent au sein de la Légion canadienne, mise sur pied en 1915, pour rassembler tous ceux qui avaient vécu les souffrances et les horreurs de la guerre. Mais dans les faits, les Noirs ne trouveront pas leur place au sein de cet organisme, de cette famille. Les anciens combattants Noirs, du Québec, formèrent donc leur propre association. Désignée sous le nom de: Dr Gaspard Branch no 50, affilié à la Légion canadienne. Ils avaient pourtant été combattants à part entière, certains au prix de leur vie. C'est pourquoi ceux qui travaillent à déraciner les préjugés mettent en lumière cette contribution des Noirs. Ainsi, à Montréal, le 1er mai 1968, on pouvait entendre le révérend F.B. Gabourel, de la Union United Church, prononcer un discours dans duquel il rappelait que ?des enfants membres de notre congrégation, nés à Saint-Henri, à SainteCunégonde, dans la Petite-Bourgogne et tout au long de la rue Saint-Antoine, ont pris part aux deux guerres mondiales et que parmi ces jeunes, plusieurs ne sont jamais revenus.? L'immigration antillaise d'expression anglaise Nous avons vu qu'au cours du 19e siècle, de nombreux Noirs originaires des Antilles affluèrent ici. Ils avaient été attirés par les perspectives d'emploi qui s'offraient à la suite de la construction du canal Lachine, du réseau ferroviaire et du pont Victoria, à Montréal, ces immigrants et immigrantes virent surtout s'implanter à Saint-Henri et Sainte-Cunégonde, alors en pleine expansion industrielle. Les îles où ils étaient nés, la Barbade, la Jamaïque, Trinidad et Tobago, étaient à cette époque des colonies britanniques, de même que la Guyane, on les nomme West Indies ou Indes de l'ouest. Cependant, à compter de 1929, les immigrants de cette région, tout comme ceux venant d'ailleurs, se verront fermer les portes du pays, car pendant la crise et la guerre, on tentait de protéger les emplois devenus de plus en plus rares. Avec la reprise économique de l'après-guerre, la main-d=œuvre venant de l'extérieur sera de nouveau admise. De 1955 à 1966 fut appliqué la programme connu sous le nom de West Indian Domestic Schema qui consistait à recruter des femmes originaires des Antilles anglaises qui seraient engagées comme domestiques au sein de familles canadiennes. Une loi en ce temps-là interdisait l'immigration de personnes issues de pays non européens. Monsieur W.E. Harris, ministre de la Citoyenneté et de l'immigration d'alors, prit une mesure d'exception pour l'entrée de ces jeunes femmes: une des principales conditions était alors que l'immigrante s'adapte et s'intègre rapidement au sein de la communauté dans un délai raisonnable. Ce programme a connu le succès puisque l'on pouvait compter plus de 2690 de ces immigrantes domestiques de langue anglaise parmi les nôtres. Au bout d'un an ou deux, quelques-unes décidaient de retourner dans leur milieu d'origine parce que l'immigration au Canada avait été une façon de découvrir un nouveau mode de vie. Pour elles, l'aventure s'arrêtait-là. Pour d'autres, cela avait été un moyen d'améliorer le sort des leurs: alors qu'ils travaillaient ici, elles faisaient parvenir de l'argent aux membres de leurs familles qui étaient restés dans leur pays. Celles qui sont restées ici, se sont intégrées, se sont mariées et ont à leur tour formé leurs propres familles. Leurs fils et leurs filles, sont eux aussi des Québécois, non plus d'adoption mais de naissance. L'immigration antillaise d'expression française Malgré la reprise économique et la modification des lois concernant l'immigration après la guerre, il y eut peu de nouveau arrivants originaires d'Haïti pendant cette période. C'est davantage au milieu des années 60 que le phénomène atteint des proportions dignes de mention: quelque 2 000 haïtiens immigrèrent alors au Québec, la plupart d'entre eux, jeunes et très scolarisés. La société québécoise vivait à ce moment-là sa révolution tranquille. Ainsi, les tâches relatives à la santé et à l'éducation, jusque-là, assumées par le clergé et les communautés religieuses, allaient connaître de profondes transformations. Le gouvernement voulait que ces services soient dispensés par un nombre croissant de laïques. C'est ainsi que l'on fit appel à nombreux professionnels et techniciens, nés en Haïti qui fuyaient le régime, de se retrouver au sein d'institutions en pleine mutation: hôpitaux, services médicaux, établissements d'enseignement de tous les niveaux, y compris les cégeps nouvellement créés. Aujourd'hui, les québécois d'origine haïtienne sont de plus en plus nombreux, car, à la faveur d'une activité économique intense, au cours de la décennie débutant en 1970, près de 20 000 hommes et femmes sont arrivés d'Haïti qui figurait alors au premier rang des pays sources d'immigration. Fuyant la répression dont ils sont victimes chez eux, ils constituaient une réponse au besoin de main-d=œuvre qui se manifestait ici. Moins scolarisés que ceux de la première vague d'immigration, plusieurs ont trouvé des emplois dans divers secteurs manufacturiers et de services (textile, bonneterie, vêtement et taxi). Ils forment avec leurs descendants près de la moitié de toutes les communautés noires de la région de Montréal, c'est-à-dire près de 45 000 personnes sur un total de 100 000. L'immigration africaine. Jusqu'à la fin des années 50, les réalités canadiennes et québécoises étaient peu connues des Africains. Eux-mêmes traversaient une période de décolonisation qui allait permettre à presque tous les pays d'Afrique, entre 1957 et 1965, d'accéder à l'indépendance. Et, nous avons vu que dans la même période, le Québec vivait sa révolution tranquille et que Montréal allait s'ouvrir au monde. En effet, le 28 avril 1967, on inaugurait l'Exposition universelle de Montréal, sur le site qui conserve encore, le nom de Terre des hommes. Des pays de tous les continents furent conviés au rendez-vous donné sur les îles et découvre une société moderne qu'ils ignoraient jusque-là. Par la suite, de nombreux ressortissants de l'Afrique francophone choisirent de venir au Québec. Entre 1966 et 1968, on ne comptait que 2 000 Africains parmi nous mais ce chiffre omettait les étudiants qui n'étaient que de passage. C'étaient des jeunes, citoyens de pays ayant nouvellement accédé à l'indépendance, ils venaient compléter leur formation dans les universités Québécoises. Ensuite ils retournaient apporter leur propre contribution à la société de leurs pays d'origine. Toutefois, certains décidaient de rester et de faire du Québec leur terre d'adoption. Cependant, le nombre d'immigrants et immigrantes Africains, anglophones et francophones confondus, est relativement modeste si on le compare à l'ensemble de la communauté noire du Québec. Ils proviennent néanmoins de pays aussi nombreux que diversifiés: l'Ouganda, la Tanzanie, le Zaïre, l'Éthiopie, le Kenya, le Nigéria, le Sénégal, la Côte d'Ivoire, le Cameroun, le Ghana, sont ceux que l'on connaît. Ils ont donné naissance à de nombreuses associations africaines au Québec, contribuant ainsi à enrichir leur nouvelle société d'adoption. LE VENT DE L'AMÉRIQUE NOIRE La traite des Noirs La couleur de la peau, qui reste encore le principal fondement des préjugés racistes, et l'état de leur économie prédisposaient les Noirs d'Afrique à être les principales victimes de l'esclavagisme. Dans l'antiquité, on vendait des Noirs sur les marchés, et les Arabes, installés en Afrique du Nord ont été les organisateurs d'un trafic, dont ils eurent longtemps le monopole grâce aux convois de captifs amenés à travers le Sahara. Mais le malheur général des Noirs commença avec les grandes découvertes maritimes. Les initiateurs furent les portugais, découvreurs de la côte occidentale de l'Afrique. En 1441, le navigateur Antonio Gonzalès, ayant doublé le cap Blanc, avait capturé quelques indigènes, qu'il offrit comme curiosité à Don Henri, dit le Navigateur. Celui-ci eut l'idée, après les avoir bien traités, de les renvoyer en Afrique comme rabatteurs Grâce à eux, Gonzalès put troquer 25 Noirs contre des marchandises. Ces Noirs furent amenés à Lisbonne mais cette fois on ne les renvoya pas. Déjà en 1445, un seul navire ramène 235 esclaves et les rois nègres, qui traitaient déjà avec les Arabes, n'ont pas tardés à comprendre l'avantage que représentait pour eux ce nouveau marché. Dès lors, les portugais s'enrichissent par ce trafic. En 1454, le pape Nicolas V leur en donna l'autorisation, au motif qu'en se substituant aux Musulmans ils pourraient au moins baptiser les captifs. Mais les appétits l'emportaient sur le souci d'évangélisation. Voici comment en 1444, la Chronique de la découverte et conquête de la Guinée, du portugais Gomès de Azurara, décrit le partage d'une cargaison à l'arrivée: Il fallait nessairement arracher les fils aux pères, les femmes à leurs maris, les frères à leurs frères. En 1481 les portugais commencèrent le construction de la forteresse d'Elmina, qui deviendra le centre de leur exploitation des côtes de Guinée: c'est là que les rois nègres vinrent faire leurs offres et amener leur butin. Pour justifier ce trafic, on a dit que, si les Noirs ne s'étaient pas vendus entre eux, il n'aurait pas été possible d'alimenter le marché par la seule capture directe. Mais, sans les acheteurs européens, il n'y aurait pas eu tant de vendeurs noirs. Les marchés restaient limités et c'est la découverte de l'Amérique qui allait entraîner l'organisation de la traite des Noirs sur une vaste échelle. Le code Noir On a souvent fait gloire à la France d'avoir promulgué le premier et le seul règlement en faveur des esclaves noirs. En même temps qu'il concédait le monopole de la traite à la compagnie des Indes occidentales, Colbert publia en effet en 1685, une ordonnance qu'on appela le code Noir ? Destiner à protéger, ce texte est un chefd=œuvre d'hypocrisie. Ainsi le maître doit nourrir suffisamment ses esclaves, non par obligation naturelle, mais afin de protéger les Blancs contre le vol et les pillages, ne recevant pas de nourriture des maîtres, en cherchent partout où ils peuvent en trouver. Il est en principe interdit de faire travailler du coucher au lever du soleil, de vendre les enfants séparément de leurs parents. le code permet à l'esclave d'assigner son maître en justice, devant un tribunal de Blancs qui pensaient: Impossible qu'un maître détruise sa propriété personnelle. Le code Noir reste lettre morte faute de sanctions. En contre partie, le code, définissait la condition juridique de l'esclave: c'est une chose, un objet de propriété, dont le maître dispose à son gré. Il prévoit aussi les devoirs de l'esclave et les châtiments qu'il peut encourir: à la première évasion, les oreilles coupés, à la seconde, les jarrets coupés, à la troisième, la mort. L'ordonnance de Colbert n'est donc qu'une honteuse légitimation des droits de l'exploitant qui a vu le jour, en un siècle dit ?grand?, dans le pays le plus ?civilisé? d'Europe, ou qui se dit tel. Il est très difficile d'évaluer avec justesse le nombre de Noirs transportés: certains ont avancé le chiffre de 40 millions, compte tenu de la mortalité en cours de transport. Il est également difficile d'imaginer ce que serait devenu le continent américain, s'il n'avait pas été mis en culture avec l'aide de la main-d=œuvre africaine. Par contre, les USA auraient évité la guerre de sécession, et irritant problème d'une minorité ethnique noire, qui soulève encore bien des passions. Sur la condition des Noirs en Amérique, tout ;a été dit ou écrit. Mais, l'indépendance américaine aurait pu constituer une occasion favorable pour décréter l'abolition de l'esclavage. Toutefois, les intérêts des états esclavagistes du sud s'opposèrent à cette idéologie. Car dans le Sud, on avait découvert une nouvelle source de richesse avec la culture du coton, mais qui exigeait beaucoup de main-d=œuvre, et où la trouver, sinon par l'importation des Noirs? Seuls les états du Nord interdirent l'importation des Noirs. C'est le développement industriel qui détourna les capitaux vers des placements plus fructueux que les plantations. Car au XIXe siècle, il y avait les chemins de fer à construire, les mines de fer et de charbon à exploiter. Donc indirectement, la grande industrie, européenne puis américaine, à contribué à libérer les esclaves. L'un après l'autre, presque tous les états adhérèrent au principe d'abolition. Officiellement, il n'existe plus d'esclavage dans le monde...