Mise en page 1
Transcription
Mise en page 1
Bretagne voyageren couleurs AUTOCHROMES 1907-1929 L’arrivée du tourisme en Bretagne 1 L’émergence du tourisme Le tourisme naît au XVIIIe siècle en Grande-Bretagne avec le Grand Tour, voyage à but éducatif pour les jeunes hommes de la haute société. Ils visitent les sites remarquables d’Europe, surtout italiens et romains. Signe d’une certaine appartenance sociale et d’une culture commune, ce voyage est raconté dans des récits, puis dans des guides. Durant la période révolutionnaire et l’Empire, l'Orient devient une destination phare. À la même époque, pour des raisons d’hygiène et de mode, les médecins préconisent les cures thermales, puis les bains de mer. Les premiers restaurants concurrencent alors les tables communes des auberges. Au XIXe siècle, grâce au déploiement des chemins de fer, des constructions nouvelles se développent autour des établissements de bains, créant peu à peu des villes nouvelles. Les guides touristiques En 1839 paraissent les premiers guides de voyage portatifs. L’anglais John Murray publie un volume consacré à la Suisse tandis que l’allemand Karl Baedecker sort un ouvrage sur la Belgique. Adolphe Joanne sort en 1841 son premier guide consacré aussi à la Suisse. Tous ces guides sont conçus pour former une collection, ils ont la même couverture et seule la destination change. Les textes sont hiérarchisés par des styles de caractères différents, les informations générales sont toujours à la même place et les renseignements ne concernent que les différentes étapes, le voyage lui même n'étant évoqué que par l’itinéraire ferroviaire ou l’état des routes. En 1863, Hachette crée sa collection de guides en embauchant Adolphe Joanne. La maison publie L’itinéraire général de la France en un seul volume, et des petits guides : les guides Diamant et la collection des Guides des chemins de fer français, consacrés aux villes possédant une gare. En 1907 débute la collection des guides Joanne illustrés qui proposent aussi des guides des plages et stations balnéaires. La Côte d’Émeraude est inventée en 1894 par le malouin Eugène Herpin avec son guide : La côte d’Émeraude, Saint-Malo et ses souvenirs. En 1919, les guides de la collection Joanne sont renommés les « Guides bleus ». La construction du réseau de chemin de fer breton Depuis la naissance du chemin de fer (1811 : premier train à vapeur minier au pays de Galles), le chemin de fer se développe d’abord en Grande-Bretagne et se répand ensuite en Europe à partir de 1840. En France, plusieurs sociétés privées construisent des lignes de chemin de fer. La concession « Versailles - Rennes » est attribuée en 1851 et l’inauguration de la ligne a lieu en 1857. « C'est de Laval qu'est parti le premier train à grande vitesse, dont le passage, dans cette contrée classique de la superstition et de la sainte ignorance, va introduire les usages et les habitudes qui doivent faire bientôt rentrer la Bretagne dans le concert de notre civilisation… ». L’Illustration, 9 mai 1857. Après, Nantes (1851) et Rennes (1857), le rail arrive à Brest en 1865, exploité par la Compagnie de l’ouest créée en 1855. Un plan national de développement des transports est lancé en 1878 par le ministre des travaux publics, Charles de Freycinet. Il prévoit la création d’un chemin de fer national, constitué par le rachat de plusieurs compagnies (Le Chemin de fer de Vendée et La Compagnie des Charentes) et l’obligation de créer 181 lignes pour les compagnies privées. En Bretagne, 15 lignes d’intérêt local sont prévues. Même si elles avantagent la circulation sur le littoral, elles offrent de nouveaux itinéraires nationaux, notamment par le raccordement au réseau normand. Affiche des chemins de fer de l’Ouest, coll. musée du Rail Dinan. En 1909, La Compagnie de L’Ouest, déficitaire, est rachetée par la compagnie de l’État. À partir de 1918, les transports routiers se développent et concurrencent le rail. Grâce aux progrès techniques et à l’amélioration des routes, les voitures à chevaux disparaissent au profit des automobiles qui deviennent majoritaires dans les années trente. Trains et tourisme balnéaire L’arrivée du train en Bretagne favorise le développement du tourisme balnéaire. Les compagnies de chemin de fer proposent des tarifications promotionnelles pour les destinations maritimes. Le premier train à destination de la mer (Le Havre) est le « train de promenade » créé en 1847. À partir des années 1880, toutes les compagnies françaises proposent une tarification avantageuse pour les destinations balnéaires. À la fin du siècle, les trains « de bains de mer » commencent à circuler au mois d’avril avant le service régulier de l’été. Un nouveau type de publicité est créé en 1886 pour la compagnie des chemins de fer de l’ouest, grâce à son directeur Edward Blount qui mène pour la première fois une campagne d’affichage publicitaire. Ce type d’affiche montre tous les « clichés » présentés dans les guides touristiques : costumes folkloriques, sites remarquables, activités traditionnelles ou, au contraire, dernière plage à la mode. Avec la Grande Guerre, peu de touristes prennent le train et, par la suite, la concurrence de l’automobile entraîne une désaffection de ce moyen de transport. Guide bleu Bretagne, Hachette, 1927, © Musée Albert-Kahn Département des Hauts-de-Seine La station balnéaire Bath, la première station thermale, fut lancée par Richard Nash (1673-1762), un mondain surnommé « beau » qui participa ensuite au lancement de Brighton, la première station balnéaire. Les têtes couronnées et les membres de la noblesse lancent les nouveaux sites, bientôt mis au goût du jour par la presse. Napoléon III met à la mode Biarritz et Sissi le Cap Martin. Pour satisfaire cette clientèle, la station doit posséder les infrastructures indispensables que sont : un réseau routier desservant toute la station jusqu’à la gare, une plage protégée, un « grand hôtel », un casino, un établissement de bains, un ou plusieurs lieux de culte, un équipement pour les sports « de luxe » et une promenade aménagée avec plusieurs points de vue. Jusqu’au début du XXe siècle, les cabines de bains sont des sortes de roulottes tirées par des chevaux qui suivent la marée et amènent les baigneuses jusqu’à l’eau. L’établissement de bains se trouve à proximité de la plage et offre des cours de natation et des bains chauds. Les bâtiments originaux en bois sont bientôt remplacés par des bâtiments pérennes. Les premières stations balnéaires bretonnes apparaissent au milieu du XIXe siècle, en liaison avec les nouvelles dessertes ferroviaires. De riches Anglais viennent en villégiature dans la région de Saint-Malo par bateau vapeur en provenance de Southampton et s’y font construire les premières villas. Un des promoteurs de Dinard, le comte Rochaïd Dahdah (avec l’éditeur Albert Lacroix), fait de la plage de l’Écluse le nouveau centre-ville. Des villas, une halle et la gare (Compagnie de l’Ouest) sont édifiées. Entre 1875 et 1885, de nombreux chantiers sont menés. Villas, lotissements de luxe, nouveau casino, tennis et champs de courses surgissent peu à peu aux alentours. Le Crystal Hôtel En 1892, la Villa Crystal, inspirée du Crystal Palace de Londres, est construite sur la plage de l’Écluse à Dinard. En 1905, devenu le Grand Hôtel, il occupe tout un pâté de maison et devient une des curiosités de la région. En effet, un ascenseur descend le touriste à la grotte de cristal, vantée comme un Voyage au centre de la terre après la venue de Jules Verne, et monte au belvédère, au sommet d'une tour carrée. De 45 m de hauteur, cette dernière évoque un phare la nuit grâce à sa lanterne. Le bâtiment en fer, béton et verre est pour sa part dévolu aux bains de mer chauds, donnant directement à la plage et à un restaurant panoramique à l’étage. Dinard : la plage de l’écluse et le « Crystal Hôtel », vers 1911 Autochrome 9x12, Jules Gervais Courtellemont, Inv. A 727, Cinémathèque Robert-Lynen, Mairie de Paris