1 ECZEMA DE CONTACT : PHYSIOPATHOLOGIE, DIAGNOSTIC

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1 ECZEMA DE CONTACT : PHYSIOPATHOLOGIE, DIAGNOSTIC
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ECZEMA DE CONTACT : PHYSIOPATHOLOGIE, DIAGNOSTIC,
ETIOLOGIE, EVOLUTION, TRAITEMENT
B. ALBES, J. MAZEREEUW-HAUTIER, J. BAZEX, J.L. BONAFÉ
Collège des Enseignants de Dermato-Vénéréologie
Services de Dermatologie Purpan et Rangueil
Juillet 2002
ITEM 114 : allergies cutanéo-muqueuses
MOTS CLES : eczéma de contact, allergie, dermocorticoïdes
1. PHYSIOPATHOLOGIE
1.1. Phase de sensibilisation
1.2. Phase de déclenchement
2. DIAGNOSTIC
2.1. Diagnostic positif
2.1.1. Forme typique : eczéma aigu
2.1.2. Formes cliniques
2.1.2.1. Formes topographiques
2.1.2.2. Formes symptomatiques
2.1.2.3. Formes chroniques
2.1.2.4. Photoallergies
2.1.3. Examen histologique
2.2. Diagnostic différentiel
2.2.1. Dermite d’irritation
2.2.2. Dermatite atopique
2.2.3. Dyshidrose
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2.2.4. Oedème du visage
3. ETIOLOGIE
3.1. Interrogatoire
3.1.1. La topographie initiale
3.1.2. Les circonstances de déclenchement
3.1.3. La chronologie
3.1.4. Les traitements locaux utilisés
3.2. Examen clinique
3.3. Tests épicutanés ou patch-tests
3.4. Causes identifiées
3.4.1. Allergènes professionnels
3.4.2. Médicaments topiques
3.4.3. Cosmétiques
3.4.4. Produits vestimentaires
3.4.5. Photoallergènes
4. EVOLUTION
4.1. Complications
4.1.1. Surinfection
4.1.2. Erythrodermie
4.1.3. Retentissement socio-professionnel
5. TRAITEMENT
TABLEAU I : Diagnostic différentiel entre eczéma de contact et dermite
d’irritation
TABLEAU II : Batterie standard européenne des allergènes
POINTS-CLES
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L’eczéma de contact est une dermatose très fréquente. Elle est due à une
sensibilisation à des substances en contact avec le revêtement cutané.
1. PHYSIOPATHOLOGIE
L’eczéma de contact est une forme particulière de réaction d’hypersensibilité
retardée à médiation cellulaire secondaire à l’application sur la peau d’une
substance exogène.
L’eczéma de contact évolue en deux phases :
1.1. Phase de sensibilisation
Cette phase peut durer de quelques jours à plusieurs années. Le produit
sensibilisant exogène est le plus souvent un haptène, c’est-à-dire une substance
non immunogène par elle même, qui pénètre dans la peau, où elle s’associe à une
molécule porteuse pour former un couple haptène-protéine qui constitue l’allergène
complet. L’allergène est pris en charge par les cellules de Langerhans (cellules
dendritiques) de l’épiderme. Les cellules de Langerhans traversent la membrane
basale, et migrent à travers le derme vers la zone paracorticale des ganglions
lymphatiques. Pendant cette migration, elles subissent une maturation qui les rend
capable d’activer des lymphocytes T « naïfs ».Ces lymphocytes T prolifèrent et se
différencient alors en lymphocytes « mémoires » circulants. Cette première phase
est cliniquement asymptomatique.
1.2. Phase de déclenchement
Elle survient chez un sujet déjà sensibilisé, 24 à 48 heures après un nouveau
contact avec l’antigène. Des lymphocytes T mémoire portent à leur surface des
molécules qui favorisent leur extravasation dans la peau. Ces lymphocytes
reconnaissent l’allergène présenté à ce niveau par les cellules de Langerhans. Ils
prolifèrent et sécrètent des cytokines qui recrutent des cellules inflammatoires. Les
kératinocytes et les cellules endothéliales sont également activées. Les cytokines
pro inflammatoires sont produites au tout début de la réaction, interleukine (IL)-1,
TNF (facteur de nécrose tumorale)-alpha, suivies de la production de cytokines qui
régulent négativement les phénomènes inflammatoires (IL-10). L’eczéma de
contact est une réaction de type Th1, associée à la production d’IL-2 et d’interféron
gamma.
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2. DIAGNOSTIC
2.1. Diagnostic positif
2.1.1. Forme typique : Eczéma aigu
L’eczéma aigu, de diagnostic clinique facile, évolue en quatre phases successives,
le plus souvent intriqué :
* phase érythémateuse : placard érythémateux
* phase vésiculeuse : vésicules remplies de liquide clair, confluant parfois en
bulles
* phase suintante : rupture des vésicules, spontanément ou après grattage
* phase desquamative, suivie d’une guérison sans cicatrice
Les lésions sont très prurigineuses +++
Elles réalisent des placards à contours émiettés.
2.1.2. Formes cliniques
2.1.2.1. Formes topographiques
- Au visage et sur les organes génitaux, l’eczéma prend un aspect très œdémateux
en particulier sur les paupières.
- Aux mains et aux pieds, l’eczéma se présente sous forme de vésicules
prurigineuses dures, enchassées.
2.1.2.2. Formes symptomatiques
- L’eczéma nummulaire réalise des lésions érythémato-vésiculeuses en placards
arrondis de quelques centimètres de diamètre.
- L’eczéma papulo-vésiculeux est une forme d’eczéma où les papulo-vésicules
restent isolées les unes des autres.
- Dysidrose. Elle est caractérisée par des vésicules très prurigineuses des faces
latérales de doigts. Ce tableau peut être dû à un eczéma de contact ou à d’autres
causes (dermatite atopique, formes idiopathiques à récidives saisonnières…).
2.1.2.3. Formes chroniques
- Elles sont caractérisées par un épaississement quadrillé de la peau
(lichénification) et une hyperpigmentation.
- Sur les paumes et les plantes, les lésions sont fissuraires et hyperkératosiques.
2.1.2.4. Photoallergies
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- La substance exogène n’induit un eczéma de contact qu’après irradiation par les
rayons ultra-violets.
- Les lésions débutent et prédominent sur les zones-photo exposées (visage,
oreilles, dos des mains…).
2.1.3. Examen histologique
Une biopsie cutanée n’est pratiquée que dans les cas où le diagnostic est hésitant.
L’examen histologique montre :
- des lésions essentiellement épidermiques: spongiose (œdème dissociant les
kératinocytes et aboutissant à la formation de vésicules intra-épidermiques) et
exocytose (infiltrat de cellules mononucléées entre les kératinocytes).
- un œdème et un infiltrat lympho-monocytaire à prédominance périvasculaire.
2.2. Diagnostic différentiel
2.2.1. Dermite d’irritation
Elle est secondaire à des agressions physiques ou chimiques directes, qui ne
nécessitent pas l’intervention de mécanismes immunologiques.
- Les lésions siègent le plus souvent aux mains.
- Le tableau 1 donne les principaux éléments de diagnostic différentiel entre
eczéma de contact et dermite d’irritation.
- En réalité, la dermite d’irritation favorise la pénétration des allergènes et la
survenue d’un eczéma de contact, et les deux entités sont souvent intriquées (main
du cimentier liées à une allergie au chrome, dermite des ménagères liée à une
allergie aux détergents).
2.2.2. Dermatite atopique
La dermatite atopique réalise un tableau très différent.Cependant, les altérations
cutanées liées à cette affection et l’application d’un grand nombre de produits
topiques favorisent la survenue d’eczémas de contact chez les patients ayant une
dermatite atopique.
2.2.3. Dysidrose
C’est un tableau clinique dont l’eczéma de contact n’est que l’une des causes
possibles.
2.2.4. Oedème du visage
Le diagnostic différentiel doit être fait avec les autres causes d’oedème aigu du
visage :
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- Erysipèle. Le placard inflammatoire bien limité peut être recouvert de vésicules.
Frissons, fièvre, hyper leucocytose sont caractéristiques.
- Œdème de Quincke. Pale, indolore sans prurit ni fièvre, souvent accompagné
d’urticaire.
- Zona. Douleurs, vésicules hémorragiques ou croûteuses, topographie suivant un
territoire nerveux permettent le diagnostic
Le prurit et l’absence de fièvre sont des éléments en faveur du diagnostic
d’eczéma.
Tout eczéma doit faire l’objet de la recherche acharnée de l’allergène en cause,
dont l’éviction conditionne l’absence de rechute.
3. ETIOLOGIE
3.1. Interrogatoire
L’interrogatoire est un élément très important de l’enquête étiologique. Il permet
parfois de suspecter un ou plusieurs allergènes et oriente les tests épicutanés. Les
éléments importants à rechercher sont :
3.1.1. La topographie initiale
Les lésions, initialement localisées à la zone de contact avec l’allergène, ont ensuite
tendance à diffuser à distance et à se disséminer. La Topographie initiale des
lésions a une grande valeur d’orientation (par exemple lésions initialement
localisées à la zone d’application d’un antiseptique, aux mains ou aux pieds).
3.1.2. Les circonstances de déclenchement
Il faut faire préciser les activités ayant pu conduire à un contact avec un allergène
particulier 24 heures à quelques jours avant le début des lésions : jardinage,
bricolage, menuiserie, peinture...
3.1.3. La chronologie
Il faut préciser l’évolution des lésions au cours du temps, leur amélioration ou leur
aggravation pendant les week-ends, les vacances ou d’éventuels arrêts de travail.
3.1.4 Les traitements locaux utilisés
Il faut préciser tous les traitements locaux utilisés, ainsi que les produits d’hygiène,
parfums et cosmétiques.
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3.2. Examen Clinique
Certaines localisations ont valeur d’orientation : un eczéma du lobule des oreilles,
du poignet et de l’ombilic fait évoquer une sensibilisation au nickel, un eczéma des
paupières oriente vers une allergie aux cosmétiques ou au vernis à ongles, un
eczéma des pieds oriente vers une allergie à un constituant des chaussures.
3.3. Tests épicutanés ou patch-tests
- Ils sont indispensables pour le diagnostic de certitude de l’allergène en cause, qui
conditionne souvent son éviction efficace.
- Ils doivent être orientés par l’interrogatoire et l’examen clinique.
- Ils sont réalisés à distance de la poussée d’eczéma. Différents allergènes sont
appliqués sous occlusion sur le dos pendant 48 heures. La lecture est faite à 48
heures, 15 minutes après avoir enlevé les tests. Une deuxième lecture est réalisée
après 72 à 96heures, parfois à 7 jours pour certains allergènes (corticoïdes).
- Lecture :
Test négatif : peau normale
Test positif : reproduisant la lésion d’eczéma
+ érythème
++ érythème et œdème et/ou vésicules
+++ érythème, vésicules, vésiculo-bulles
Réaction d’irritation
- On réalise habituellement la batterie standard européenne, qui comprend les 23
substances les plus fréquemment en cause, les produits apportés par les malades
et éventuellement des batteries spécialisées orientées (coiffure, cosmétiques,
photographie, peintures...)
- Les photopatchtests sont des patch-tests suivis d’une irradiation par certaines
longueurs d’ondes de rayons ultraviolets. Ils sont pratiqués lorsque les lésions sont
localisées sur les zones exposées au soleil.
- La pertinence d’un test positif doit toujours être discutée
- Il existe des faux-positifs et des faux-négatifs.
- Il existe des sensibilisations de groupe, attribuables au rapport de deux ou
plusieurs allergènes avec des groupes chimiques qu’ils ont en commun. Ces
réactions croisées expliquent la possibilité de récidives malgré l’éviction de
l’allergène : groupe de la paraphénylènediamine (PPD) dit groupe para (fonction
amine en para) réunissant des teintures capillaires, des sulfamides et des
anesthésiques
locaux,
groupe
des
parahydroxybenzoates
(parabens)
(conservateurs).
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3.4. Causes identifiées
Les allergènes en cause sont très variés. Les allergènes les plus fréquents sont les
métaux, en particulier le nickel. La batterie standard européenne des allergènes
comprend les allergènes les plus fréquemment en cause dans les pays européens
(Tableau 2).
3.4.1. Allergènes professionnels
- Les eczémas de contact de cause professionnelle sont parmi les plus fréquents
des maladies professionnelles indemnisables. Les lésions sont plus fréquentes
chez les hommes. Elles débutent et prédominent aux mains. Elles s’améliorent
pendant les vacances.
- Les professions les plus souvent à l’origine d’eczémas professionnels sont :
- Métiers du bâtiment : sels de chrome (ciment), cobalt (peinture, émail), résines
époxy (colle, vernis, peinture), formaldéhyde (colle, textile), térébenthine
(menuiserie, peinture), colophane (gants, pneus)...
- Coiffeurs : paraphénylène-diamine (teintures), thioglycolate (permanentes),
caoutchouc (gants), conservateurs (shampoings), nickel (instruments)...
- Professions de santé : antiseptiques (iodés, mercuriels, hexamidine), aminosides,
anti-inflammatoires non stéroïdiennes, phénothiazines, anesthésiques locaux,
caoutchoucs (gants), acrylates des résines composites (prothésistes)...
- Horticulteurs : lactones sesquiterpéniques (ex: chrysanthèmes), primevères,
pesticides, gants...
3.4.2. Médicaments topiques
- Les lésions débutent sur la zone d’application.
- Les topiques les plus fréquemment en cause sont : néomycine, antiseptiques
iodés et mercuriels, sparadrap (colophane), topiques anti-prurigineux, baume du
Pérou...
- Les corticoïdes locaux peuvent se comporter comme des allergènes et induire des
sensibilisations. Il faut penser à cette éventualité chez les patients qui appliquent de
manière régulière des corticoïdes topiques ou dont les lésions sont non améliorées
ou aggravées par l’application de corticoïdes. Les tests aux corticoïdes locaux sont
positifs dans 2 à 4 % des eczémas chroniques.
3.4.3. Cosmétiques
- Les lésions sont plus fréquentes chez les femmes. Elles prédominent sur le
visage.
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- Les produits responsables sont : parfums, conservateurs, excipients,
formaldéhyde (vernis à ongles), déodorants, shampoings, laques, baume du Pérou
(rouge à lèvres, crèmes), paraphénylène-diamine (teintures)...
3.4.4. Produits vestimentaires
- Les lésions prédominent sur le tronc et les plis (colorants textiles, produits de
teinturerie...) ou sur les pieds : cuir, colle des chaussures, caoutchouc...
- Les allergies au nickel sont très fréquentes. Elles sont causées par des bijoux
fantaisie ou des accessoires : montre, boucle de ceinture
3.4.5. Photoallergènes
- Les lésions prédominent sur les régions découvertes.
- De nombreux médicaments peuvent induire des réactions de photosensibilité, soit
par voie systémique (sulfamides, phénothiazines, fénofibrate), soit par voie
topique (kétoprofène)...
- L’eczéma photo-allergique de contact comporte même après éviction de
l’allergène un risque de photosensibilité persistante.
4. EVOLUTION
L’éviction de l’allergène est suivie de la guérison de l’eczéma en dix à quinze jours.
En l’absence d’éviction, les lésions passent à la chronicité.
4.1. Complications
4.1.1. Surinfection
L’impétiginisation des lésions est suspectée devant la présence de croûtes
jaunâtres, parfois associées à des adénopathies et à de la fièvre. Peu fréquente,
elle doit être distinguée des croûtes succédant à la phase suintante.
4.1.2. Erythrodermie
L’érythrodermie est une généralisation des lésions sous forme d’érythème
disséminé prurigineux squameux ou vésiculeux.
4.1.3. Retentissement socio-professionnel
Le handicap induit par les eczémas de contact chroniques, en particulier des mains,
peut être considérable.
5. TRAITEMENT
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- L’éviction de l’allergène est une condition indispensable de la guérison. L’ubiquité
de certains allergènes rend leur éviction difficile et rend compte de la chronicité de
certains eczémas de contact.
- Le traitement repose sur l’application de corticoïdes locaux de classe 2 pendant 1
à 2 semaines, associé à l’utilisation d’antiseptiques. Il n’y a pas d’indication à une
corticothérapie systémique.
- En cas d’infection, on associe une antibiothérapie générale pendant 7 jours, sans
retarder le traitement par corticoides topiques.
- Les eczémas de cause professionnelle justifient un arrêt de travail, la réalisation
de tests épicutanés, ainsi que la possibilité de déclaration en maladie
professionnelle indemnisable. L’activité professionnelle doit être aménagée en
collaboration avec le médecin du travail.
- Il n’y a pas de possibilité de désensibilisation dans l’eczéma de contact.
- La prévention repose sur l’éviction des contacts avec les substances
sensibilisantes (gants, vêtements de protection). Il est important d’informer les
patients sensibilisés et de leur remettre des listes de produits à éviter. Il faut
déconseiller aux atopiques certaines professions où existe un contact avec les
substances fréquemment à l’origine de sensibilisations de contact.
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TABLEAU I
Eléments de diagnostic différentiel entre
eczéma de contact et dermite d’irritation
Eczéma de
contact
Dermite
d’irritation
Lésions cutanées
Bords émiettés
Bords nets
Topographie
contact
Peut déborder la
zone de contact
avec l’allergène
Limitée à la zone
de contact avec
l’allergène
Symptomatologie
Prurit
Brûlure
Epidémiologie
Atteint quelques
sujets en contact
avec le produit
Atteint la majorité
des sujets en
contact avec le
produit
Histologie
Spongiose,
exocytose
Nécrose
épidermique
Tests épicutanés
Positifs (lésions
d’eczéma)
Négatifs ou lésions
d’irritation
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TABLEAU 2
Batterie standard européenne des allergènes
1. Bichromate de potassium (ciment)
2. Sulfate de Néomycine (topiques médicamenteux)
3. Thiuram Mix (caoutchoucs)
4. Para-phénylènediamine (PPD) (colorants foncés, teintures)
5. Chlorure de Cobalt (ciment, métaux, colorants bleus)
6. Benzocaïne (anesthésique local)
7. Formaldéhyde (conservateur)
8. Colophane (adhésifs, vernis, peintures)
9. Clioquinol (antiseptique, conservateur)
10. Baume du Pérou (cosmétiques, topiques médicamenteux)
11. N-Isopropyl-N’-Phényl Paraphénylènediamine (IPPD)( caoutchoucs noirs)
12. Lanoline (cosmétiques, topiques médicamenteux)
13. Mercapto Mix (caoutchoucs)
14. Résine Epoxy (résines)
15. Parabens Mix (conservateurs)
16. Résine Paratertiaire Butylphénol Formaldéhyde (colle à chaussures)
17. Fragrance Mix (parfums)
18. Quaternium 15 (conservateur)
19. Sulfate de Nickel (bijoux fantaisies, objets métalliques)
20. Kathon CG (chlorométhyl isothiazolinone) (conservateur, cosmétiques)
21. Mercaptobenzothiazole (caoutchoucs)
22. LactoneSesquiterpene Mix (plantes « composées »:
artichauts, dahlias,
chrysanthèmes...)
23. Primine (primevères)
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POINTS-CLES
-Les eczémas de contact de cause professionnelle sont parmi les plus
fréquentes des maladies professionnelles indemnisables.
- L’éviction de l’allergène est une condition indispensable de la guérison
- La réalisation des tests épicutanés doit être orientée par l’interrogatoire
et l’examen clinique.
- La pertinence de la positivité des tests épicutanés doit être discutée.
- Les allergènes les plus fréquents sont les métaux, en particulier le nickel.
- En cas de persistance ou d’aggravation des lésions sous traitement,
il faut penser à une allergie aux corticoïdes.
- L’ubiquité de certains allergènes rend leur éviction difficile et rend compte
de la chronicité de certains eczémas de contact.
- L’eczéma photo-allergique de contact comporte même après éviction
de l’allergène un risque de photosensibilité persistante.
- Il faut savoir prévenir les allergies croisées.
- Le traitement repose sur l’application de corticoïdes locaux. Il n’y a pas
d’indication à une corticothérapie systémique.
DERMATITE ATOPIQUE:
DIAGNOSTIC, EVOLUTION, TRAITEMENT
B. ALBES - J. MAZEREEUW-HAUTIER - J. BAZEX - J.L. BONAFÉ
Collège des Enseignants de Dermato-Vénéréologie de France
Services de Dermatologie de Purpan et Rangueil
Juillet 2002
ITEM 114 : Allergies cutanéo-muqueuses
Mots clés : eczéma atopique, dermatite atopique, allergie, acariens,
Kaposi-Juliusberg, dermocorticoïdes, xérose.
1. INTRODUCTION-GENERALITES
2. DIAGNOSTIC
3. DIAGNOSTIC POSITIF
3.1. Nourrisson et jeune enfant jusqu’à 2 ans
3.2. Chez l’enfant
3.3. Chez l’adolescent et l’adulte
4. EVOLUTION
5. COMPLICATIONS
5.1. Surinfections cutanées
5.2. L’herpès
1
5.3. Retard de croissance
5.4. Complications ophtalmologiques
5.5. Dermites de contact
6. TRAITEMENT
6.1. Prévention
7. PRISE EN CHARGE
7.1. Education et observance
7.2. Réalisation pratique du traitement
7.2.1. En poussées
7.2.1.1. Les dermocorticoïdes
7.2.1.2. Antiseptiques-antibiotiques
7.2.1.3. Antihistaminiques
7.2.2. Le traitement de maintenance
7.2.3. Traitements d’exception
7.2.4. Contrôle des facteurs d’aggravation
TABLEAU I : Critères de diagnostic de la dermatite atopique
TABLEAU II : Mesures adjuvantes
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1. INTRODUCTION-GENERALITES
La dermatite atopique (ou eczéma constitutionnel) est une affection
inflammatoire prurigineuse chronique commune chez l'enfant et l'adulte jeune,
qui est sous la dépendance de facteurs héréditaires mais dont l'augmentation de
prévalence au cours des dernières décennies s'explique préferentiellement par
l'influence de facteurs environnementaux encore mal compris.
Le mot dermatite regroupe des aspects sémiologiques divers qui ont un trait
histopathologique commun : une atteinte épidermique prédominante avec un
afflux de lymphocytes T (exocytose) et un oedème intercellulaire (spongiose)
réalisant des vésicules microscopiques. Le derme superficiel comporte un
infiltrat mononucléé périvasculaire. La dilatation des capillaires superficiels est
responsable de l'érythème et l'extravasation de protéines plasmatiques de
papules oedémateuses.
Les vésicules sont exceptionnellement visibles macroscopiquement et c'est leur
rupture à la surface de la peau qui détermine le caractère suintant et croûteux
des lésions, et constitue un excellent milieu de culture pour les contaminants
bactériens, d'où la fréquence de l' impétiginisation staphylococcique. Du fait du
grattage, l'épiderme s'épaissit (lichénification) et devient, chez l'enfant et l'adulte
moins susceptible à un suintement issu de vésicules microscopiques. Dans ce
cas les excoriations peuvent cependant déterminer des brèches épidermiques et
une exsudation secondaire.
Deux tiers des patients atteints de dermatite atopique ont un parent au premier
degré atteint de dermatite atopique, d'asthme ou de rhinite allergique, en
comparaison avec un tiers pour les sujets non atopiques. Il existe un certain
degré de spécificité d'organe-cible dans la transmission du trait atopique: les
patients atteints de DA ont 50% de leurs enfants atteints de DA et jusqu'à 80%
en cas de mariage entre deux parents atteints de DA.
Toutes les études épidémiologiques indiquent une augmentation rapide de
prévalence des maladies rattachées à l'atopie en Europe. La dermatite atopique
est présente chez 10 à 25% des enfants dans les études récentes, alors que les
enquêtes des années 1960 indiquaient des prévalences aux environs de 5%.
Ces données sont interprétées comme reflétant l'influence de l'environnement,
en particulier l'urbanisation des populations.
2. DIAGNOSTIC
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Le diagnostic de Dermatite Atopique (DA) est clinique et anamnestique
[Tableau I].
Aucun examen complémentaire n’est nécessaire au diagnostic positif. Une
éosinophilie et une augmentation des
IgE sériques sont fréquemment
observées. Leur recherche n’est pas indispensable.
3. DIAGNOSTIC POSITIF
3.1. Nourrisson et jeune enfant (jusqu'à deux ans)
La DA commence communément dans les premiers mois de vie généralement
vers 3 mois, mais parfois dès le premier mois, et comporte une atteinte
symétrique des convexités des membres, du visage avec un respect assez net
de la région médio faciale, en particulier la pointe du nez. Sur le tronc, les
lésions s'arrêtent généralement à la zone protégée par les couches-culottes.
L'atteinte des plis est parfois notée dès cet âge. Au cuir chevelu, certains
enfants ont une atteinte initialement "séborrhéique", comportant des squames
jaunâtres, grasses, et la xérose cutanée n'est pas toujours au premier plan.
Dans la deuxième année la peau tend à devenir sèche de façon plus constante.
L'aspect des lésions est variable selon la gravité de la DA et le moment de
l'examen (poussées ou rémission). Les lésions aigües sont suintantes puis
croûteuses, et souvent impétiginisées. Elles sont mal limitées le plus souvent.
Dans les formes mineures, les lésions sont peu inflammatoires et palpables
sous forme de rugosité cutanée des convexités. Les éléments de description les
plus utiles pour établir un score lésionel d'intensité chez le nourrisson sont:
l'érythème, l'oedème (papules oedémateuses), les excoriations qui témoignent
objectivement du prurit, et le suintement associé aux croûtes qui témoigne de
l'acuité des poussées vésiculeuses. Le prurit est souvent net et responsable de
troubles du sommeil dès les premiers mois. Le grattage manuel est souvent
précédé de mouvements équivalents dès le deuxième mois (frottement des
joues contre les draps et les vêtements, agitation et trémoussement des
membres et du tronc). Les lichénifications ne commencent à apparaître que
dans l'enfance, mais parfois plus tôt dans la deuxième année chez les enfants
noirs ou asiatiques.
Dans cette tranche d’âge, le diagnostic différentiel inclut la gale, la dermatite
séborrhéique et le psoriasis.
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Un examen physique complet est impératif pour ne pas porter par excès un
diagnostic de DA devant toute dermatose "eczématiforme". La notion de
chronicité et d'évolution à rechute est importante pour le diagnostic: les formes
débutantes sont d'interprétation difficile. En cas de doute, une biopsie sera
effectuée.
En cas de point d'appel supplémentaire : infections cutanées et/ou profondes
répétées, anomalie de la croissance, purpura, fièvre inexpliquée, des examens
complémentaires immunologiques seront nécessaires à la recherche d'une DA
ou d'un tableau eczématiforme révélateur d'un syndrome génétique impliquant
un déficit immunitaire..
3.2. Chez l'enfant
Au delà de deux ans, Les lésions cutanées sont volontiers plus localisées aux
plis (cou, coudes, genoux), ou comportent des zones bastion : mains et
poignets, chevilles, mamelon, fissures sous auriculaires qui subsistent de façon
chronique et parfois isolées. Des poussées saisonnières sont notées le plus
souvent en automne et en hiver. Certains enfants restent handicapés par des
poussées plus généralisées qui peuvent revêtir un aspect de prurigo aux
membres. La lichénification prédomine sur l'érythème et l'oedème. Les signes
mineurs comme la pigmentation infra orbitaire, les plis sous-palpébraux (DennieMorgan) sont plus nets. La sécheresse cutanée (xérose) est un élément plus
constant que chez le nourrisson et pose fréquemment le problème d'une
ichtyose vulgaire associée. Ce trait est fréquemment retrouvé chez un des
parents. L'amélioration de cette xérose est constante en été et nécessite des
soins émollients redoublés en hiver. Au visage, mais aussi parfois de façon plus
diffuse, des «dartres» achromiantes (pityriasis alba) constituent un motif de
consultation esthétique, en particulier après l'été.
Diagnostic différentiel : il est d'autant plus restreint que la notion de chronicité
avec évolution à rechutes est bien établie. Les diagnostics de dermite de contact
et parfois de psoriasis doivent être éliminés. Les tests allergologiques peuvent
être utiles..
3.3. Chez l'adolescent et l'adulte
5
La DA manifeste une période de recrudescence à l'adolescence souvent à
l'occasion de conflits psychoaffectifs ou de stress. Si le début de l'affection est
situé à cette époque de la vie, les critères anamnestiques pour la période
infantile sont souvent pris en défaut. Un début tardif à l'âge adulte, bien que
difficile à exclure, doit faire effectuer des examens complémentaires, pour
éliminer une autre affection (gale, dermite de contact, dermatite herpétiforme ou
pemphigoide, maladie de Hodgkin ...). Parmi les aspects symptomatiques, les
formes graves peuvent se manifester à l'extrême sous un aspect
érythrodermique, ou plus communément sous forme de prurigo lichénifié
prédominant aux membres. Des aspects cliniques similaires à la période de
l'enfance sont associés, en particulier l'atteinte lichénifiée flexurale. L'atteinte
"tête et cou" est commune.
4. EVOLUTION
4.1. Evolution globale
La période du nourrisson est celle qui comporte le plus de formes étendues mais
l'évolution est spontanément bonne, avec une rémission complète dans la
majorité des cas; les formes persistant dans l'enfance sont plus localisées. La
résurgence à l'adolescence ou chez l'adulte jeune est possible, fréquemment
dans un contexte de stress.
La survenue de manifestations respiratoires (asthme, vers 2 à 3 ans, puis
rhinite) est d'autant plus fréquente qu'il y a des antécédents familiaux atopiques
au premier degré. Les épisodes cutanés peuvent coexister avec l'atteinte
respiratoire ou alterner. L'asthme patent (ou les équivalents asthmatiques, sous
forme de toux sèche nocturne, gêne respiratoire avec wheezing –sifflement
expiratoire- au froid, à l'effort, au rire ou lors d'épisodes infectieux ORL ou
respiratoires) devient souvent plus gênant pour l'enfant que l'eczéma.
4.2. Marqueurs biologiques de pronostic et de gravité Le taux des IgE
sériques est proportionnel à la gravité de la dermatite atopique. Aucun autre
marqueur n'a actuellement sa place en routine.
5. COMPLICATIONS
6
5.1. Dans toutes les périodes d'activité de la maladie, les surinfections
cutanées bactériennes ou virales sont les complications les plus communes.
Le staphylocoque doré colonise habituellement la peau de l'atopique.
L'impétiginisation est difficile à apprécier dans les formes aigues exsudatives. La
présence de lésions vésiculo bulleuses inhabituelles fera évoquer le diagnostic
de surinfection et prescrire un traitement antibiotique local ou général pour éviter
une infection systémique.
5.2. L'herpès (HSV1 essentiellement) est responsables de poussées aigües
parfois dramatiques. Une modification rapide de l'aspect des lésions avec
présence de vésiculo pustules, de lésions nécrotiques, en association avec de
la fièvre doivent suggérer cette complication et faire mettre en oeuvre d'un
traitement antiviral en urgence, pour éviter un tableau de pustulose disséminée
de Kaposi-Juliusberg.
5.3. Un retard de croissance peut être associé dans les DA graves et se
corrige souvent de façon spectaculaire quand la DA est traitée efficacement. Le
rôle des dermocorticoides dans le retard de croissance n'est par contre pas
démontré.
5.4. Complications ophtalmologiques : Elles sont rares (kérato conjonctivite,
cataracte)
5.5. Dermites de contact Compte tenu de l'importance des soins locaux dans
cette affection, il y a un risque important de sensibilisation de contact au long
cours. Il est donc nécessaire d'évoquer cette hypothèse et de tester les patients
qui répondent mal aux traitements habituels. Ces données obligent à une
attitude préventive dans l'utilisation des topiques potentiellement à risque
(conservateurs, parfums, néomycine ...), et des métaux, nickel en particulier
(percement d'oreilles, bijoux fantaisie).
6. TRAITEMENT
6.1. Prévention
7
L'atopie est un problème émergent de santé publique en particulier pour les
pays riches. Les coûts directs et indirects liés à la dermatite atopique et à
l'asthme sont importants en raison du nombre des patients et de la
chronicité des symptômes. Des recommandations générales sur l'habitat,
l'alimentation infantile et les facteurs adjuvants qui accroissent de façon non
spécifique la réponse IgE comme le tabagisme passif font l'objet d'un
consensus.
Prévention et diététique : Les informations sur la prévention diététique sont
les plus controversées. L’intérêt de l'allaitement maternel reste discuté. La
diversification alimentaire précoce semble augmenter la fréquence de la DA,
et secondairement les sensibilisations aux aéro-allergènes.
Prévention aéro-allergénique: il importe de prendre pour cible essentielle de la
prévention primaire et secondaire les aéro-allergènes d'intérieur : dans les pays
occidentaux, les enfants passent 90% du temps à l'intérieur. Les aéro-allergènes
domestiques (acariens, animaux à fourrure, jouets en peluche, «pièges à
poussière») sont surtout des cibles pour la prévention de l'asthme, mais il est
souhaitable de les intégrer dans le schéma de prévention global de l'atopie. Les
aéro-allergènes domestiques comme les acariens peuvent contribuer aux
symptomes cutanés en tant qu'allergènes de contact. L'utilisation préventive de
housses d'oreiller et de matelas en polyurethane est efficace pour diminuer
l'exposition aux acariens.
7. PRISE EN CHARGE
7. 1. Education et Observance
Dans une affection chronique comme la dermatite atopique, la demande des
malades ou de leurs parents est importante à cerner pour obtenir une
adhésion aux projet thérapeutique. Les points majeurs sont les suivants:
- la dermatite atopique est une affection chronique. Son traitement doit
l'être également. Ceci doit être clair dans l'exposé du projet thérapeutique. La
"guérison" n'est pas l'objectif proche.
-
les
soins
locaux
sont
8
indispensables:
ils
permettent
de
rétablir la barrière cutanée compromise par l'eczéma.
- les dermocorticoïdes sont efficaces et non dangereux quand ils sont
utilisés judicieusement, sous surveillance médicale. Ils ne favorisent pas
l'apparition de l'asthme. Leur utilisation inadéquate ou leur sous-utilisation est
la cause majeure de la sensation d'impuissance ou de refus thérapeutique de
certaines familles.
- les alternatives aux traitements locaux sont limitées et doivent être
pesées en fonction de l'observance de cette prise en charge de base. Les
traitements généraux, en dehors des antibiotiques et antiviraux, qui sont
parfois nécessaires, ne viennent qu'en complément lors des poussées ou en
cas d'échec d'un traitement local correctement effectué.
- les explorations allergologiques qui peuvent avoir pour conséquence de
modifier l'environnement ou l'alimentation, si les arguments sont solidement
étayés pourront être envisagées en cas d’échec d'un traitement local
correctement effectué.
- une information sur les facteurs aggravants doit être donnée (Tableau II)
- dans les formes graves, une hospitalisation reste totalement justifiée pour
parfaire l'éducation, effectuer des soins locaux ou pour réaliser correctement
certains tests.
7.2. Réalisation pratique du traitement
7.2.1. En poussées
L’objectif est de réduire l'inflammation et le prurit pour soulager le patient. Dans
la majorité des cas, les soins locaux permettent de traiter efficacement les
poussées de DA. Ils associent :
7.2.1.1. Les dermocorticoides
Un dermocorticoïde puissant ou modérément puissant sera utilisé en fonction de
la gravité (une seule application quotidienne jusqu'à amélioration franche,
généralement 4 à 8 jours). Noter le nombre de tubes utilisés. Contre-indiqués
sous la couche.
7.2.1.2. Antiseptiques/antibiotiques
La peau doit être soigneusement nettoyée pour éliminer les croûtes et effectuer
ainsi une désinfection de surface. Une solution antiseptique à la chlohexidine
pourra être utilisée. Les
produits topiques sont appliqués sur la
9
peau encore humide. Un traitement antibiotique local biquotidien (Fusidate de
sodium) poursuivi sur 2 à 3 jours améliore nettement le score lésionnel au stade
aigu. Il ne doit pas être poursuivi de façon chronique pour éviter l'émergence de
souches résistantes
7.2.1.3. Antihistaminiques
Donnés seuls ils sont habituellement insuffisants pour traiter une poussée de
DA. A titre d'appoint, ils peuvent être indiqués pendant quelques jours. Les
produits à composante sédative sont jugés généralement plus efficaces.
7.2.2. Le traitement de maintenance comprend
- utilisation quotidienne de quantités importantes d'émollients, d'autant plus que
la xérose cutanée est plus marquée. Il est souhaitable d'appliquer les émollients
après le traitement de la poussée aigue, car leur tolérance est médiocre sur
peau inflammatoire. Les savons sont à éviter pour l'irritation causée par la
libération de bases et les syndets surgraissés seront préférés
- applications intermittentes de dermocorticoïdes sur les zones inflammatoires
(1 à 3 fois par semaine). Des quantités de l'ordre de 15 à 30 grammes de
dermocorticoides peuvent être utilisées sur une base mensuelle sans effet
adverse systémique ou cutané pour un enfant de moins de 2 ans. La quantité de
dermocorticoides utilisée par mois joint à l'utilisation de scores cliniques permet
l'ajustement du traitement.
7.2.3. Le recours éventuel à des traitements d’exception
-La photothérapie combinée UVA-UVB permet de délivrer des doses faibles
avec un bon résultat thérapeutique en 6 semaines de traitement. L'accessibilité
à ce type de traitement est un facteur limitant chez des enfants scolarisés
pouvant en bénéficier (à partir de 7-8 ans) et chez l'adulte.
-La ciclosporine a été utilisée chez l'adulte et plus rarement dans les formes
graves de l'enfant avec une bonne efficacité. Ce médicament peut faire passer
un cap quand tout a échoué dans une DA grave, sur une période de quelques
mois seulement, pour éviter les effets secondaires rénaux.
7.2.4. Le contrôle des facteurs d'aggravation (Tableau II) et les conseils
d’hygiène de vie. Le patient doit pouvoir mener une vie la plus normale
possible et il n'est pas souhaitable d'introduire des mesures trop
contraignantes. Il faut donc adapter les mesures à la gravité de la
symptomatologie. Chez le nourrisson, la détection précoce et les mesures de
prévention de l'asthme sont
une partie importante de l'information. Les
10
vaccinations peuvent être effectuées sans risque sur peau non infectée.
7.2.5. L’identification et/ou l’éviction de certains allergènes. On conseillera
d'éviter l'exposition aux allergènes les plus communs chez les patients atteints
de formes mineures ou modérées, sur une base probabiliste et préventive, et on
réservera une enquête approfondie en milieu spécialisé aux formes graves ou
résistant aux traitements conventionnels bien conduits. Les séjours climatiques
en altitude peuvent constituer une alternative thérapeutique dans les formes
cutanéo-respiratoires graves d'atopie chez l'enfant avec sensibilisation aux
acariens, quand la maladie retentit sérieusement sur la scolarité.
11
TABLEAU I
Critères de diagnostic de la dermatite atopique de l'United Kingdom
Working Party (d'après Williams et al, Br J Dermatol,1994; 131:406-416)
Critère obligatoire: dermatose prurigineuse associé à 3 ou plus des critères
suivants :
1. Antécédents personnels d'eczéma des plis de flexion (fosses antécubitales, creux poplités, face antérieure des chevilles, cou) et/ ou des joues
chez les enfants de moins de 10 ans
2. Antécédents personnels d'asthme ou de rhume des foins (ou antécédents
d'asthme, de dermatite atopique, ou de rhinite allergique chez un parent au
premier degré chez l'enfant de moins de 4 ans)
3. Antécédents de peau sèche généralisée (xérose) au cours de la dernière
année
4. Eczéma des grands plis visible ou eczéma des joues, du front et des
convexités des membres chez l'enfant au dessous de 4 ans
5. Début des signes cutanés avant l'âge de 2 ans (critère utilisable chez les
plus de 4 ans seulement)
12
TABLEAU II
MESURES ADJUVANTES
A- mesures non spécifiques
• Habillement: Eviter les textiles irritants (laine, synthétiques à grosse fibres);
préférer coton et lin.
• Eviter l'exposition au tabac
• Maintenir une température fraîche dans la chambre à coucher. Ne pas trop se
couvrir la nuit.
• Exercice physique, sports; à conseiller. Douche et émollients après, en
particulier pour la natation (irritation des désinfectants chlorés)
• Augmenter les applications d'émollients par temps froid et sec
• Se méfier des contages herpétiques
• Vacciner normalement en dehors des poussées.
B- mesures spécifiques vis à vis des allergènes
• Nourrisson: Allaitement maternel prolongé, pas de diversification alimentaire
précoce
• Eviter l'exposition aux animaux domestiques (chat, chien, cobaye...)
• Acariens domestiques, moisissures: dépoussiérage (aspiration régulière,
éponge humide ...), housses de literie anti acariens recommandées, contrôler
l'humidité par une ventilation efficace de l'habitation
13
1
URTICAIRE ET OEDEME DE QUINCKE :
DIAGNOSTIC, ETIOLOGIE, TRAITEMENT
J. MAZEREEUW-HAUTIER, B.ALBES, J.L. BONAFÉ, J. BAZEX
Collège des Enseignants de Dermato-Vénéréologie
Services de Dermatologie de Purpan et Rangueil
Septembre 2002
ITEM 114 : Allergies cutanéo-muqueuses
Mots clés : urticaire, oedème de Quincke.
1. PHYSIOPATHOLOGIE
2. DIAGNOSTIC
2.1. Urticaire superficielle
2.2. Urticaire profonde
2.3. Formes cliniques
2.3.1. Manifestations associées
2.3.2. Morphologiques
2.3.3. Evolutives
2.3.4. Le syndrome de vascularite urticarienne
2.4. Diagnostic différentiel
3. DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
3.1. Urticaires médicamenteuses
3.2. Urticaires alimentaires
3.3. Urticaires de contact
3.4. Urticaires physiques
3.4.1. Dermographisme
3.4.2. Urticaire retardée à la pression
2
3.4.3. Urticaire cholinergique
3.4.4. Urticaire au froid
3.4.5. Urticaire aquagénique
3.4.6. Urticaire solaire
3.5. Urticaires de cause infectieuse
3.6. Urticaires d’environnement
3.7. Oedème angio-neurotique héréditaire
3.8. Urticaires idiopathiques
4. TRAITEMENT
4.1. Traitements symptomatiques
4.1.1. Médicaments diminuant la synthèse d’histamine ou bloquant ses effets :
4.1.2. Médicaments bloquant la dégranulation des mastocytes
4.2. Indications
4.2.1. L’urticaire aiguë superficielle isolée
4.2.2. L’urticaire chronique ou récidivante « idiopathique »
4.2.3. L’oedème de Quincke
4.2.4. Le choc anaphylactique
4.2.5. L’oedème angio-neurotique héréditaire
5. CONDUITE A TENIR PRATIQUE
6. TABLEAU I
7. TABLEAU II
8. POINTS CLES
3
L’urticaire, terme féminin venant du mot latin urtica signifiant ortie, est une dermatose
inflammatoire fréquente. Son diagnostic est en général facile : il repose sur
l’interrogatoire et l’examen clinique.
Elle peut être aiguë, chronique ou récidivante. Il s’agit d’un syndrome dont les causes
sont multiples, parfois intriquées dans les formes chroniques, ce qui rend la démarche
étiologique difficile et souvent décevante.
1. PHYSIOPATHOLOGIE
La lésion d’urticaire correspond à un oedème dermique (urticaire superficielle) ou
dermo-hypodermique (urticaire profonde) due à une vasodilatation avec augmentation
de la perméabilité capillaire consécutive à un afflux de médiateurs inflammatoires.
L’histamine est le principal médiateur mais de nombreux autres sont également
impliqués : complément, prostaglandines, leucotriènes, cytokines, sérotonine, tyramine,
kinines, substance P.. Leurs sources sont multiples : cellulaire (mastocytes, basophiles,
éosinophiles, cellules endothéliales...), plasmatique et nerveuse. L’histamine et la
tyramine peuvent également être apportées par certains aliments.
On distingue 2 types de mécanisme : immunologique, faisant intervenir une
sensibilisation préalable, et non immunologique. Dans ce dernier cas, le déclenchement
d’une urticaire est dépendant de la susceptibilité individuelle (notion de seuil de
dégranulation des mastocytes).
Mécanismes immunologiques
- Hypersensibilité de type anaphylactique médiée par les IgE ou les IgG4 (type I)
- Hypersensibilité par activation du complément avec ou sans formation de complexes
immuns circulants.
Non immunologiques ou pharmacodynamiques
- apport ou libération d’histamine
- défaut d’inhibition de médiateur (α-1-antitrypsine, C1 estérase ...)
- cholinergique.
2. DIAGNOSTIC
2.1. Urticaire superficielle
Il s’agit de la forme commune dans laquelle l’oedème est dermique. Le diagnostic
clinique est en général facile.
Les lésions sont des papules ou plaques érythémateuses ou rosées, oedémateuses à
bords nets. Elles sont fugaces (disparaissant en moins de 24 heures), migratrices et
prurigineuses. Les lésions de grattage sont cependant rares. Le nombre, la taille et la
forme des éléments sont extrèmement variables.
Les lésions sont parfois absentes au moment de la consultation, mais l’interrogatoire
retrouve ces caractéristiques cliniques. La biopsie cutanée n’est jamais nécessaire au
diagnostic. Elle n’est justifiée qu’en cas de vascularite urticarienne (cf plus loin).
4
2.2. Urticaire profonde
Il s’agit de l’oedème de Quincke ou angio-oedème dans lequel l’oedème est
hypodermique. Il peut toucher la peau ou les muqueuses et peut être isolé ou associé à
une urticaire superficielle, aiguë ou chronique. La lésion est une tuméfaction ferme, mal
limitée, ni érythémateuse ni prurigineuse, qui provoque une sensation de tension
douloureuse. La localisation aux muqueuses de la sphère oro-laryngée conditionne le
pronostic. L’apparition d’une dysphonie et d’une hypersalivation par troubles de la
déglutition sont des signes d’alarme qui peuvent précéder l’asphyxie si l’oedème siège
sur la glotte. L’oedème de Quincke peut être le signe inaugural d’un choc
anaphylactique.
2.3. Formes cliniques
2.3.1. Manifestations associées
Une hyperthermie modérée, des douleurs abdominales ou des arthralgies peuvent être
associées tant dans l’urticaire superficielle que profonde, surtout dans les formes
profuses.
2.3.2. Morphologiques
- Formes figurées : secondaires à la guérison centrale et à l’extension centrifuge des
plaques. La taille des anneaux ou des arcs de cercle ainsi formés peut être très variable.
- Vésiculo-bulleuses : rares mais possibles quand l’oedème est très important.
- Micropapuleuses : évocatrices de l’urticaire cholinergique.
2.3.3. Evolutives
- urticaire aiguë : Il s’agit le plus souvent d’un épisode unique et rapidement évolutif.
Aucun examen complémentaire n’est nécessaire. Il faut chercher par un interrogatoire
patient, un élément déclenchant dans les heures ayant précédé l’éruption. Les
médicaments (tableau I) et certains aliments (tableau II) sont les principales causes
d’urticaire aigue.
- urticaire chronique : Les poussées, le plus souvent quotidiennes, évoluent depuis plus
de 6 semaines. Les urticaires récidivantes sont définies par un intervalle libre plus ou
moins long entre chaque poussée. L’interrogatoire et l’examen clinique restent les
éléments essentiels de la démarche étiologique. Les bilans exhaustifs et systématiques
sont coûteux et inutiles, la majorité des urticaires chroniques ne faisant pas leur preuve
étiologique.
Après échec d’un traitement antihistaminique bien conduit (posologie et durée
suffisantes), un bilan minimum comprenant NFS et VS peut être demandé.
Secondairement, la réalisation d’un bilan biologique complet à la recherche des
étiologies des urticaires chroniques (cf diagnostic étiologique).
2.3.4. Le syndrome de vascularite urticarienne
Il s’agit d’un syndrome anatomo-clinique, qui ne peut donc être retenu qu’en présence
d’une urticaire chronique et d’une image histologique de vascularite.
- particularités cliniques :
5
Il s’agit de lésions fixes, peu ou pas prurigineuses. Un purpura peut être associé qui
explique les traces pigmentées persistantes après disparition des lésions. Elles doivent
faire réaliser une biopsie avec immunofluorescence directe (IFD).
- signes histologiques :
Il existe une vascularite avec nécrose fibrinoïde des petits vaisseaux dermiques et non
une simple turgescence des parois vasculaires. Par ailleurs, l’IFD, négative dans
l’urticaire commune, est ici positive avec dépôts d’IgG, d’IgM et C3 dans la paroi des
vaisseaux.
- signes cliniques associés :
- Hyperthermie, arthralgies et troubles digestifs sont les plus fréquents.
- Des manifestations pulmonaires, rénales, oculaires peuvent également s’observer et
conditionnent le pronostic.
- signes biologiques :
y l’élévation de la VS est fréquente,
y l’hypocomplémentémie (CH 50, C1q, C4, C2) n’est trouvée que dans la moitié des cas.
y la découverte d’autres anomalies, notamment immunologiques doit faire chercher une
affection systémique qui peut apparaître secondairement, particulièrement un lupus
érythémateux.
2.4. Diagnostic différentiel
La question se pose rarement car le diagnostic est en général évident. On peut parfois
discuter :
- un eczéma aigu du visage qui se distingue par l’absence de lésion muqueuse et
surtout par le suintement qui ne s’observe jamais dans l’urticaire.
- une pemphigoïde bulleuse au stade des placards urticariens pré-bulleux.
- un érythème polymorphe.
- une maladie de Still qui se caractérise classiquement par une éruption fébrile à
tendance vespérale, maculeuse ou parfois urticarienne, chez un sujet jeune.
3. DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
3.1. Urticaires médicamenteuses
Il s’agit d’une cause assez fréquente d’urticaire aigue. Parfois, l’urticaire est chronique
(avec la pénicilline, une pérennisation des lésions peut être liée à la présence de traces
de cet antibiotique dans les aliments, principalement les produits laitiers). Les lésions
apparaissent dans les minutes ou les heures qui suivent la prise du médicament. S’il
s’agit d’un médicament jamais pris par le patient, les lésions apparaissent après un délai
de 7 à 21 jours.
Tous les médicaments peuvent être en cause et ce quelles que soient leurs voies
d’administration.
Les urticaires médicamenteuses sont peu sensibles aux différents traitements et sont de
résolution plus longue que les autres ; de nouvelles lésions peuvent ainsi apparaître
pendant plusieurs jours malgré l’arrêt du traitement responsable.
Il faut distinguer les médicaments qui interviennent par un mécanisme immunologique
nécessitant donc une sensibilisation préalable de ceux qui sont histaminolibérateurs.
Certains peuvent être responsables des deux mécanismes. Les principaux
médicaments induisant une urticaire figurent dans le tableau I, page 12.
6
3.2. Urticaires alimentaires
De très nombreux aliments mais également des additifs et des conservateurs peuvent
être impliqués, le plus souvent par un mécanisme immunologique : aliments
histaminolibérateurs ou riches en histamine ou en tyramine, consommés en grande
quantité. Parfois, il s’agit d’une allergie vraie, IgE dépendante comme c’est le cas avec
les protéines du lait de vache, l’arachide, l’oeuf chez l’enfant.
L’urticaire survient rapidement après l’ingestion et la responsabilité de l’aliment doit être
mise en doute au delà d’un délai de 3 heures.
L’interrogatoire, l’analyse du cahier alimentaire, le dosage des IgE spécifiques (RAST),
les prick-tests, voire le test de réintroduction en milieu hospitalier doivent permettre de
cibler le ou les aliments responsables et débouchent sur l’éviction définitive chez l’adulte
ou sur les corrections des déséquilibres alimentaires.
Chez l’enfant, l’allergie alimentaire disparaît avec l’âge.
3.3. Urticaires de contact
Elles sont fréquentes et peuvent, comme les précédentes, être de mécanisme
immunologique (latex, aliments, médicaments...) ou non immunologique (orties,
méduses, chenilles processionnaires...). Les lésions apparaissent rapidement (moins de
30 minutes) au point de contact mais peuvent se généraliser secondairement avec
risque de choc anaphylactique. Le diagnostic est confirmé par les tests allergologiques
lus entre la 20 ème et la 60 ème minute après leur pose.
L’allergie au latex est de plus en plus fréquente en particulier chez les personnels de
santé, les sujets atopiques et les malades multi-opérés. Cette sensibilisation est à
l’origine d’accidents per-opératoires liés au contact avec les gants du chirurgien.
3.4. Urticaires physiques
Elles doivent être cherchées systématiquement à l’interrogatoire et confirmées par les
tests physiques après arrêt de tout traitement anti-histaminique au moins une semaine
auparavant.
3.4.1. Dermographisme
Encore appelé urticaire factice, il est déclenché par la friction cutanée. Il se traduit par
des stries urticariennes en regard des lésions de grattage et peut être reproduit par le
frottement à l’aide d’une pointe mousse. Le dermographisme peut être isolé ou associé
à une urticaire d’autre étiologie. De cause inconnue, son évolution peut être prolongée.
3.4.2. Urticaire retardée à la pression
L’urticaire retardée à la pression se traduit par un oedème douloureux survenant le plus
souvent 3 à 12 heures après une forte pression (plante des pieds après une longue
marche, fesses après une station assise prolongée, paume après le port d’un sac...). La
durée d’évolution est très variable, allant de quelques semaines à plusieurs années. Le
diagnostic est confirmé par la reproduction de la lésion après le port d’un poids. La
lecture du test doit être tardive.
3.4.3. L’urticaire cholinergique
7
Elle se manifeste par de petites papules urticariennes de durée excédant rarement 30
minutes, siégeant principalement sur le tronc et déclenchées par la chaleur, la sudation,
les émotions ou les efforts.
3.4.4. L’urticaire au froid
Elle touche typiquement les mains et le visage. Les circonstances déclenchantes sont
variées : eau ou air froid, pluie, neige, baignade. Le test au glaçon ou l’immersion du
bras dans l’eau glacée, réalisée en milieu hospitalier, permet de reproduire la lésion.
Cette urticaire est le plus souvent idiopathique, parfois liée à une virose, mais doit faire
chercher une cryoglobulinémie ou des agglutinines froides. Cette urticaire impose de
prendre beaucoup de précautions lors des baignades : risque d’hydrocution.
3.4.5. L’urticaire aquagénique
Elle est rare et reproduite par l’application sur le dos d’une compresse mouillée à
température ambiante pendant 30 minutes.
3.4.6. L’urticaire solaire
Rare, elle survient dans les premières minutes d’une exposition des zones
habituellement couvertes et disparaît en moins d’une heure après la mise à l’ombre. Elle
peut être très invalidante lorsque le seuil de déclenchement est bas et nécessite une
prise en charge en milieu spécialisé.
3.5. Urticaires de cause infectieuse
La plupart des viroses (hépatite B, MNI, CMV...) sont des causes classiques et très
fréquentes chez l’enfant, d’urticaire aigüe. Cette étiologie est rare chez l’adulte. Les
parasitoses (giardiase, ascaridiase, toxocarose ...) sont plutôt responsables d’urticaire
chronique.
La responsabilité d’un foyer infectieux chronique (granulome apical, sinusite chronique,
candidose vaginale ...) dans les urticaires chroniques « idiopathiques » est une notion
ancienne qui ne repose que sur quelques observations isolées.
3.6. Urticaires d’environnement
Les piqûres d’hyménoptères (abeilles en particulier) sont des causes fréquentes. Leur
répétition expose au risque de choc anaphylactique (apiculteurs). Des tests
allergologiques permettent de confirmer le diagnostic.
Les pneumallergènes (poussières, plumes, poils, pollens) sont rarement en cause.
L’urticaire est alors souvent associée à des signes respiratoires et oculaires. La
recherche d’IgE spécifiques et les tests cutanés permettent de confirmer le diagnostic.
3.7. Oedème angio-neurotique héréditaire
Il est lié à un déficit quantitatif ou plus rarement qualitatif en inhibiteur de la C1 estérase.
Il se traduit par les épisodes récidivants d’angio-oedème sans urticaire superficielle. Ces
épisodes sont évocateurs lorsqu’ils respectent les paupières et prédominent aux
extrémités ansi qu’aux organes génitaux externes. Le pronostic est conditionné par
l’atteinte laryngée. L’atteinte digestive, fréquente et trompeuse, à type de douleurs
abdominales ou de syndrome pseudo-occlusif, est souvent révélatrice. La notion de
8
facteurs déclenchants est très évocatrice en particulier les traumatismes (chirurgie,
endoscopie) et certains médicaments dont les oestrogènes.
La transmission est autosomique dominante mais il existe de rares formes acquises.
Le diagnostic repose sur le dosage du C1 inhibiteur et des fractions du complément.
3.8. Urticaires idiopathiques
Les urticaires idiopathiques ou « en attente de diagnostic » regroupent la plupart des
urticaires chroniques, puisque plus de 50 % d’entre-elles ne font ou ne feront pas leur
preuve étiologique. Dans ce contexte, il faut garder présent à l’esprit que les causes
d’urticaire peuvent être intriquées (urticaires multifactorielles), que les urticaires
alimentaires sont probablement sous-estimées car difficiles à prouver et que le facteur
psychogène représente un élément favorisant qu’il faut chercher et prendre en
considération.
4. TRAITEMENT
Il doit évidemment être celui de la cause quand cela est possible : éviction d’un
médicament, d’un ou plusieurs aliments ou agents contacts, traitement d’une infection
ou d’une maladie systémique associée, suppression du facteur physique déclenchant ...
4.1. Traitements symptomatiques
4.1.1. Médicaments diminuant la synthèse d’histamine ou bloquant ses effets
Les antihistaminiques H1
Les molécules de première génération sont également anticholinergiques et sédatives :
dexchlorphéniramine (Polaramine®), hydroxyzine (Atarax®), méquitazine (Primalan®).
Elle sont contre-indiquées en cas de glaucome et d’adénome prostatique. La
méquitazine ne doit pas être associée aux IMAO.
Les molécules de seconde génération sont peu ou pas sédatives et généralement
prescrites en première intention : cétirizine (Virlix®, Zyrtec®, fexofénadine (Telfast®,
loratadine (Clarytine®), mizolastine (Mizollen®), oxatomide (Tinset®). Toutes sont
contre-indiquées chez l’enfant de moins de 2 ans et pendant la grossesse au cours de
laquelle seules deux molécules peuvent être prescrites : méquitazine avant le troisième
mois et hydroxyzine après le troisième mois.
Ls deux types de molécule peuvent être prescrits en association en cas d’échec de l’une
ou de l’autre. De très rares effets indésirables à types d’allergie sont possibles.
Les antihistaminiques H2
peuvent être prescrits en association avec les anti H1 dans les urticaires chroniques
rebelles.
Antidépresseurs tricycliques
Bien qu’ils soient anti-H1, anti-H2 et parfois anti-cholinergiques, ils ne sont jamais
prescrits en première intention mais peuvent l’être dans certaines urticaires chroniques
« idiopathiques » après échec des traitements classiques.
4.1.2. Médicaments bloquant la dégranulation des mastocytes
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Le kétotifène (Zaditen®) : s’utilise en association aux anti-H1 et peut être utile dans
certains cas d’urticaire cholinergique.
Le cromoglycate disodique (Nalcron®, Intercron®) : peut être prescrit dans certains cas
d’urticaire alimentaire mais ne dispense pas du régime d’éviction.
Les corticoïdes : ils sont souvent prescrits en association à un anti-H1 et sur une courte
durée (3 à 5 jours) dans les urticaires aigues étendues et très prurigineuses. Dans ces
formes profuses, leur intérêt est de soulager plus vite le malade de son prurit avec un
risque assez faible d’effets secondaires. Leur prescription systématique reste discutable.
En revanche, leur utilisation par voie I.V. n’est pas discutée dans l’oedème de Quincke.
4.2. Indications
4.2.1. L’urticaire aigue superficielle isolée
Anti-H1 pendant 15 jours minimum éventuellement associée aux corticoïdes pendant les
premiers jours, ces derniers étant donnés per os ou par voie parentérale dans les
formes profuses.
4.2.2. L’urticaire chronique ou récidivante « idiopathique »
Les anti-H1 sont toujours prescrits en première intention et pendant au moins trois mois
puis arrêtés progressivement.
En cas d’échec après 4 semaines de traitement, on peut soit augmenter la posologie,
soit associer l’anti-H1 à une autre molécule (autre anti-H1, anti H2, kétotifène, doxépine
...). Il faut essayer plusieurs asociations avant de conclure à l’inefficacité du traitement.
L’hydroxyzine est souvent efficace dans l’urticaire cholinergique.
Le dermographisme peut nécessiter la prescription d’un anti-H1, éventuellement associé
à un anti-H2 pendant plusieurs années.
4.2.3. L’oedème de Quincke
L’adrénaline est le traitement d’urgence des formes graves. ++
- si gêne laryngée : adrénaline en aérosol (Dyspne-inhal®)
- si dyspnée (oedème de la glotte) : adrénaline par voie sous-cutanée 0,25 mg à 1 mg, à
répéter éventuellement toutes les 15 minutes) oxygène et hospitalisation d’urgence en
réanimation.
- corticoïdes : Célestène® ou Soludécadron® (4 à 8 mg) ou Solu-médrol® (20 à 40 mg)
par voie IM ou IV en fonction de la gravité.
- anti-H1 : Polaramine® 1 amp par voie IM ou IV à renouveler en cas de besoin.
4.2.4. Le choc anaphylactique
- adrénaline par voie sous-cutanée (0,25 mg à 1 mg) ou en IV lente (0,25 mg à 1 mg en
fonction de la gravité de l’état de choc.
- remplissage vasculaire, oxygène, intubation ...
4.2.5. L’oedème angio-neurotique héréditaire
- traitement prophylactique si plus d’une crise par mois
* androgènes : danazol (Danatol®)
*acide tranexamique (Exacyl®) en cas de contre-indication
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- traitement des crises
* acide tranexique si crises peu importantes
* perfusion de C1 inhibiteur purifié : 1000 à 1500 U.
5. CONDUITE À TENIR PRATIQUE
Urticaire aigue
Urticaire aigue
simple
+ oedème de Quincke
ou choc anaphylactique
Traitement
- adrénaline
- réanimation
- corticoïdes
+
Traitement antihistaminique
+ corticothérapie courte
Interrogatoire : aliments ?
médicaments ?
virus (enfant) ?
Pas de bilan
Evolution
persistance
urticaire chronique
+
ou intermittente
Traitement anti-histaminique
guérison
Bilan
- électrophorèse des protéines
- complément
- anticorps antinucléaires
- bilan hépatique
- sérologies hépatiques
- sérologies parasitaires
- interrogatoire
- examen clinique
- NFS, VS
- Labstix
- TSH
- anticorps anti-thyroïdiens
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6. TABLEAU I
PRINCIPAUX MEDICAMENTS RESPONSABLES D’URTICAIRES
β-lactamines
anesthésiques (curare)
AINS, acétylsalicylique
IEC
produits de contraste iodés
sérums et vaccins
7. TABLEAU II
ALIMENTS HISTAMINO-LIBERATEURS
poisson
porc
oeufs
crustacés
lait
tomate
fraise
chocolat
arachide
noisette
alcool
fruits exotiques
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8. POINTS-CLES
- Les urticaires sont un motif fréquent de consultation : 15 % des individus sont
concernés au moins une fois dans leur vie.
- La lésion élémentaire est une papule oedémateuse « ortiée », prurigineuse, fugace et
migratrice.
- L’histamine est le principal médiateur inflammatoire impliqué dans la survenue des
lésions que l’urticaire soit d’origine immunologique ou non immunologique.
- L’urticaire aigue correspond le plus souvent à un épisode unique et ne nécessite
aucune exploration complémentaire.
- Les médicaments et certains aliments sont les principales causes d’urticaire aigue
chez l’enfant . L’origine virale est très fréquente.
- L’urticaire est un syndrome aux multiples causes, parfois intriquées, particulièrement
dans les formes chroniques. Il peut nécessiter un bilan étiologique.
- L’oedème de Quincke ou angio-oedème est une urticaire profonde qui peut mettre le
pronostic vital en jeu quand elle concerne la sphère oro-laryngée.
- Le diagnostic d’oedème angio-neurotique héréditaire est très souvent fait tardivement.
- Le syndrome de vascularite urticarienne doit faire chercher une affection systémique
qui peut apparaître secondairement.

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