RACINES233 - juillet 2012
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RACINES233 - juillet 2012 21/06/12 16:57 Page28 RACINES. Vivre entre Sèvre et Loire Par Valérie Godement Ces phobies qui nous pourrissent la vie ! Agoraphobie, hypocondrie, claustrophobie… Ces peurs irraisonnées représentent une véritable souffrance. Elles peuvent être traitées si l’on parvient à identifier leur origine. Q u’on soit enfant ou adulte, il est courant d’avoir peur. C’est un phénomène normal puisque la peur est une émotion de base, et elle est même bénéfique puisqu’elle permet de réagir de manière adaptée. Mais quand la peur devient incontrôlable et irraisonnée, lorsqu’elle se fait obsédante et handicapante et qu’avec le temps se crée une envie permanente d’y échapper, il s’agit là d’une phobie qui pourrit bien souvent la vie. “La peur du noir pour les enfants est une peur développementale, elle oblige à apprendre à affronter le monde sous sa forme menaçante, mais si elle est encore là à l’adolescence, elle relève alors de la pathologie”, explique Herman de Vries, psychologue comportementaliste et cognitif, membre de l’Association française de thérapie comportementale et cognitive (AFTCC) qui poursuit : “Les phobies ne sont en rien héréditaires ou génétiques. On ne naît pas phobique.” Elles surviennent souvent à la suite d’un traumatisme (échapper à une noyade peut provoquer l’hydrophobie ou la phobie de l’eau par exemple) ou bien découlent de l’environnement qui nous a bercés : une mère inquiète qui ne cesse RACINES 28 de mettre en garde son enfant contre le danger de l’eau va provoquer chez lui une méfiance qui peut se transformer en peur. Anxiété sociale Les phobies sont multiples. Les plus courantes : la peur des chiens, des chats, des souris, des insectes ; de parler en public, de l’avion, de l’ascenseur, du tonnerre, de passer des examens. Elles peuvent se classer en plusieurs grandes catégories. Les pho- juillet 2012 La reproduction ou l'utilisation sous quelque forme que ce soit de nos articles informations et photos est interdite sans l'accord du magazine RACINES233 - juillet 2012 21/06/12 16:57 Page29 bies spécifiques sont causées par un objet externe comme les araignées (arachnophobie) ou le sang (hématophobie). L’agoraphobie est, quant à elle, la peur de quitter son environnement proche et de se retrouver dans des lieux publics, y compris des espaces ouverts. Il y a aussi toutes les peurs liées aux moyens de transport et celles engendrées par la peur de l’enfermement (claustrophobie). L’hypocondrie ou la phobie des maladies, comme l’agoraphobie, fait suite à une attaque de panique et entraîne la personne qui en souffre dans un véritable cercle vicieux : en évitant la situation crainte, elle va en avoir de plus en plus peur. Les phobies les plus répandues sont celles ayant trait à l’anxiété sociale. “Ce genre de phobie est une peur d’interagir avec les autres et elle engendre une grande souffrance. Elle rend plus égocentré. Plus on est mal, plus on a l’impression que les autres nous jugent négativement” explique Herman de Vries. Il ne s’agit pas de timidité mais bel et bien d’une réelle anxiété car la phobie sociale peut même déboucher sur une dépression. Hypnose ? Médicaments ? Les symptômes ressentis par une personne confrontée à son objet phobique sont très nombreux : ils vont d’une transpiration abondante à une accélération du rythme cardiaque, en passant par des difficultés à respirer. Ou encore des sensations de tête qui tourne, de gorge serrée, d'oppression thoracique, jusqu'aux douleurs musculaires ou troubles du transit intestinal. Pour venir à bout de ces phobies qui font souffrir un grand nombre de personnes, certains médecins optent pour l’hypnose. D’autres prescrivent des médicaments, comme les antidépresseurs, qui sont susceptibles de faire baisser les crises d’angoisse. “Les médicaments sont la plupart du temps un facteur de chronicisation. Avec eux, la personne phobique ne gère pas son L’arachnophobie (peur des araignées) est bien anxiété et si les connue mais ce sont d’abord les phobies liées à une anxiété sociale qui sont les plus répandues. médicaments calment, ils ne guérissent pas car ils ne s’attaquent pas à la cause de la phobie” déplore Herman de Vries qui privilégie le traitement comportemental et cognitif. “Il faut essayer de comprendre pourquoi la personne n’a pas dépassé sa peur. La thérapie se fait dans le présent de façon progressive. Il faut faire en s orte qu e l a personne phobique se retrouve dans la situation crainte, ce que l’on appelle "l’exposition" et que la peur s’éteigne petit à petit.” Une personne ayant la phobie des dre dans une animalerie ou une oiseaux, va, avec cette thérapie, basse-cour. Le processus est certes d’abord regarder des images de long mais efficace et affiche un volatiles dans un livre puis toucher atout de taille : il inclut un aspect ces images. Elle va ensuite franconstructif puisqu’il permet à la perchir une étape supplémentaire en sonne phobique de découvrir un acceptant de regarder et toucher univers dont elle ignorait jusque-là une plume. Enfin, elle va observer les caractéristiques. de loin des pigeons, puis se ren- Des peurs étranges… Selon certaines études, 20 à 25 % de la population française seraient atteints de phobie et il y aurait deux fois plus de femmes que d’hommes phobiques. L’association psychiatrique américaine, qui est spécialisée dans la recherche sur les phobies, en a dénombré près de 6 500 différentes. Certaines peuvent apparaître pour le moins étranges comme l’aérophobie (la peur des courants d’air), l’apopathodiaphulatophobie (la peur de la constipation), l’hylophobie (la peur des forêts), la bibliophobie (la peur des livres), la trichophobie (la peur des cheveux et poils), la mellophobie (la peur du miel) ou la triskaïdékaphobie (la peur du chiffre 13), en passant par la prosophobie (la peur des visages) ! RACINES 29 juillet 2012 La reproduction ou l'utilisation sous quelque forme que ce soit de nos articles informations et photos est interdite sans l'accord du magazine (Photo : Sébastien Damoiseau) RACINES. Vivre entre Sèvre et Loire