RACINES233 - juillet 2012

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RACINES. Vivre entre Sèvre et Loire
Par Valérie Godement
Ces phobies qui
nous pourrissent la vie !
Agoraphobie, hypocondrie, claustrophobie…
Ces peurs irraisonnées représentent une véritable souffrance.
Elles peuvent être traitées si l’on parvient à identifier leur origine.
Q
u’on soit enfant ou adulte, il
est courant d’avoir peur. C’est
un phénomène normal
puisque la peur est une émotion de
base, et elle est même bénéfique
puisqu’elle permet de réagir de
manière adaptée. Mais quand la peur
devient incontrôlable et irraisonnée,
lorsqu’elle se fait obsédante et handicapante et qu’avec le temps se crée
une envie permanente d’y échapper,
il s’agit là d’une phobie qui pourrit
bien souvent la vie. “La peur du noir
pour les enfants est une peur développementale, elle oblige à apprendre à
affronter le monde sous sa forme
menaçante, mais si elle est encore là
à l’adolescence, elle relève alors de
la pathologie”, explique Herman de
Vries, psychologue comportementaliste et cognitif, membre de l’Association française de thérapie
comportementale et cognitive (AFTCC)
qui poursuit : “Les phobies ne sont en
rien héréditaires ou génétiques. On ne
naît pas phobique.” Elles surviennent
souvent à la suite d’un traumatisme
(échapper à une noyade peut provoquer l’hydrophobie ou la phobie de
l’eau par exemple) ou bien découlent
de l’environnement qui nous a bercés : une mère inquiète qui ne cesse
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de mettre en garde son enfant contre
le danger de l’eau va provoquer chez
lui une méfiance qui peut se transformer en peur.
Anxiété sociale
Les phobies sont multiples. Les plus
courantes : la peur des chiens, des
chats, des souris, des insectes ; de
parler en public, de l’avion, de l’ascenseur, du tonnerre, de passer des
examens. Elles peuvent se classer en
plusieurs grandes catégories. Les pho-
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bies spécifiques sont causées par un
objet externe comme les araignées
(arachnophobie) ou le sang (hématophobie). L’agoraphobie est, quant
à elle, la peur de quitter son environnement proche et de se retrouver dans des lieux publics, y compris
des espaces ouverts. Il y a aussi toutes
les peurs liées aux moyens de transport et celles engendrées par la peur
de l’enfermement (claustrophobie).
L’hypocondrie ou la phobie des
maladies, comme l’agoraphobie, fait
suite à une attaque de panique et
entraîne la personne qui en souffre
dans un véritable cercle vicieux : en
évitant la situation crainte, elle va en
avoir de plus en plus peur.
Les phobies les plus répandues
sont celles ayant trait à l’anxiété
sociale. “Ce genre de phobie est une
peur d’interagir avec les autres et elle
engendre une grande souffrance. Elle
rend plus égocentré. Plus on est mal,
plus on a l’impression que les autres
nous jugent négativement” explique
Herman de Vries. Il ne s’agit pas de
timidité mais bel et bien d’une réelle
anxiété car la phobie sociale peut
même déboucher sur une dépression.
Hypnose ?
Médicaments ?
Les symptômes ressentis par une
personne confrontée à son objet phobique sont très nombreux : ils vont
d’une transpiration abondante à une
accélération du rythme cardiaque,
en passant par des difficultés à respirer. Ou encore des sensations de
tête qui tourne, de gorge serrée, d'oppression thoracique, jusqu'aux douleurs musculaires ou troubles du
transit intestinal.
Pour venir à bout de ces phobies
qui font souffrir un grand nombre de
personnes, certains médecins optent
pour l’hypnose. D’autres prescrivent
des médicaments, comme les antidépresseurs, qui sont susceptibles de
faire baisser les crises d’angoisse.
“Les médicaments sont la plupart du
temps un facteur de chronicisation.
Avec eux, la personne phobique ne
gère pas son
L’arachnophobie (peur des araignées) est bien
anxiété et si les
connue mais ce sont d’abord les phobies liées
à une anxiété sociale qui sont les plus répandues.
médicaments calment, ils ne guérissent pas car ils ne
s’attaquent pas à
la cause de la
phobie” déplore
Herman de Vries
qui privilégie le
traitement comportemental et
cognitif.
“Il faut essayer
de comprendre
pourquoi la personne n’a pas
dépassé sa peur.
La thérapie se fait
dans le présent
de façon progressive. Il faut faire
en s orte qu e l a
personne phobique se retrouve
dans la situation
crainte, ce que
l’on appelle "l’exposition" et que la
peur s’éteigne
petit à petit.” Une
personne ayant
la phobie des
dre dans une animalerie ou une
oiseaux, va, avec cette thérapie,
basse-cour. Le processus est certes
d’abord regarder des images de
long mais efficace et affiche un
volatiles dans un livre puis toucher
atout de taille : il inclut un aspect
ces images. Elle va ensuite franconstructif puisqu’il permet à la perchir une étape supplémentaire en
sonne phobique de découvrir un
acceptant de regarder et toucher
univers dont elle ignorait jusque-là
une plume. Enfin, elle va observer
les caractéristiques.
de loin des pigeons, puis se ren-
Des peurs étranges…
Selon certaines études, 20 à 25 % de la population française
seraient atteints de phobie et il y aurait deux fois plus de femmes que d’hommes
phobiques. L’association psychiatrique américaine, qui est spécialisée dans la
recherche sur les phobies, en a dénombré près de 6 500 différentes. Certaines peuvent apparaître pour le moins étranges comme l’aérophobie (la
peur des courants d’air), l’apopathodiaphulatophobie (la peur de la constipation), l’hylophobie (la peur des forêts), la bibliophobie (la peur des livres),
la trichophobie (la peur des cheveux et poils), la mellophobie (la peur du miel)
ou la triskaïdékaphobie (la peur du chiffre 13), en passant par la prosophobie (la peur des visages) !
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(Photo : Sébastien Damoiseau)
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