les series climatiques exploitables
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les series climatiques exploitables
Dossier Climat, N°7, septembre 2010 LES SERIES CLIMATIQUES EXPLOITABLES DANS LES ALPES FRANÇAISES Les Alpes françaises, qui s’étendent du massif du Chablais en Haute-Savoie aux Préalpes de Nice dans les Alpes-Maritimes, ne sont pas homogènes au niveau climatique. Tout d’abords, trois climats se chevauchent : le climat océanique, qui se caractérise par son apport de perturbations d’ouest pluvieuses ou neigeuses ; le climat continental, chaud en été et froid en hiver, d’origine orientale ; et le climat méditerranéen, chaud et très sec en été et doux et humide en hiver. Ainsi, en fonction de la période de l’année et de la position nord-sud, le climat de chaque zone est donc une dérivée de ces trois types de climat. Puis, il faut ajouter la composante altitudinale, matérialisée par le relief, qui s’élève de l’ouest vers l’est, des massifs calcaires préalpins aux massifs internes cristallins. A un niveau plus fin, le relief façonne des climats locaux, qui donnent à la climatologie alpine une extrême hétérogénéité. Le climat correspond à la distribution statistique des conditions atmosphériques dans une région donnée pendant une période de temps donnée. Sa caractérisation est effectuée à l'aide de moyennes établies à partir de mesures statistiques annuelles et mensuelles sur des données atmosphériques locales : température, précipitations, ensoleillement, humidité, vitesse du vent. Sont également pris en compte leur récurrence ainsi que les phénomènes exceptionnels. En raison des relations physiques entre ces paramètres, la température et la pluviométrie sont les plus influents. Le climat d’un lieu est généralement calculé sur des périodes de 30 ans. Cette approche a toutefois ces limites car c’est un constat à une période donnée, on ne peut donc pas suivre leurs évolutions sur le long terme. Or, avec les modifications climatiques anthropiques, les valeurs moyennes des paramètres climatiques ont tendance à changer. Le suivi de séries climatiques sur le long terme est primordial pour comprendre comment le changement climatique peut impacter nos territoires. Il faut bien distinguer les mesures météorologiques, qui sont effectuées chaque jour, des mesures climatiques qui sont les moyennes de ces mesures. Ainsi, toute rupture dans la série météorologique (changement de capteur, déplacement de la station de mesure, urbanisation, absence de mesure pendant une période) impactent la qualité de la série climatique et celle-ci peut ne plus être considérée comme fiable pour suivre un signal sur le long terme, dont la sensibilité est forte. Ces ruptures sont nombreuses dans les séries de Météo-France et un travail fastidieux et technique d’homogénéisation doit à chaque fois être entreprit pour corriger les erreurs, si cela est nécessaire. C’est pourquoi, malgré le grand nombre de stations de mesure dans les Alpes, peu sont en fait utilisées pour suivre l’évolution du climat. De plus, alors que le sujet du changement climatique n’était pas encore à l’ordre du jour, Météo-France a fermé un grand nombre de stations pour en installer de nouvelles mieux adaptées aux objectifs de l’organisme public, à savoir la prévision météorologique. Dans les Alpes françaises, les données météorologiques fiables remontent à 1949. Il existe une série située à Annecy, dont on a reconstitué les mesures et qui remonte à 1876. Cette série est concordante avec les autres séries climatiques provenant de capteurs situées en Suisse ou encore à Lyon. 1) Localisation des séries climatiques exploitables à l’échelle des Alpes françaises en 2009 Source des données : Météo-France Du fait du grand nombre de postes de mesure, le recensement n’est pas considéré comme exhaustif. Il existe une forte disparité spatiale de la densité des postes de mesure. Le département le plus équipées est la Savoie, avec 13 postes de mesures et les séries exploitables associées. Suivent les 1 départements des Hautes-Alpes avec 12 séries exploitables, l’Isère avec 10 séries, et enfin la HauteSavoie, les Alpes-de-Haute-Provence et les Alpes-Maritimes avec 3 séries chacune. Rajoutons la série de Lyon-Bron, et les séries suisses disponibles sur internet gratuitement. Seules les séries homogénéisées d’Annecy, de Lyon et les séries Suisses ont un recul de plus de 100 ans. En Savoie, six séries débutant en 1949 ont été homogénéisées. Ce sont les seules à l’échelle du massif alpin français, mais d’autres vont suivre grâce à Météo-France. On distingue deux zones qui n’ont pas de séries climatiques de long terme : une partie de la HauteSavoie et une zone située entre les massifs de l’Ubaye et du Mercantour. De même, il n’existe pas de série de neige exploitable sur une zone allant du sud du massif des Ecrins aux Alpes-Maritimes. Voir carte fig.4. 2) Analyse des données Les températures Les températures dans les Alpes françaises ont augmenté suivant les zones entre 1 à 2 °C depuis 150 ans. La décennie 2000/2009 fut la plus chaude. Ce réchauffement a eu principalement lieu au cours de la période 1985/1995. Les résultats sont assez uniformes dans l’espace, avec toutefois une accentuation du réchauffement climatique dans les zones de montagne. On passe en effet approximativement d’un réchauffement de +1,3 à +1,4°C en plaine (Lyon, Annecy, Chambéry) à +1,7°C en montagne, voir +2°C sur les versants d’altitude bien exposés. Un exemple de série exploitable : Embruns (Fig 1). 12 11,5 11 10,5 10 9,5 9 2008 2006 2004 2002 2000 1998 1996 1994 1992 1990 1988 1986 1984 1982 1980 1978 1976 1974 1972 1970 1968 1966 1964 1962 1960 1958 1956 1954 1952 1950 8,5 Fig 1 : Evolution des températures à Embruns (871m) de 1950 à 2009 Tendance : +1,45°C ; courbe rouge : moyenne mobile sur 10 période ; trait pointillé noir : tendance linéaire. Les précipitations Les quantités de précipitations annuelles n’ont pas évolué de manière significative au cours des 150 dernières années (série de Genève), ni depuis les cinquante dernières années (séries françaises). Toutefois, les données mettent en évidence une légère baisse non uniforme des précipitations hivernales sur les Alpes françaises, la baisse n’étant réellement significative que pour le poste de 2 Bessans en Haute-Maurienne. Comparativement, les postes de Saint Véran dans les Hautes-Alpes et Saint-Martin-de-Vésubie dans les Alpes Maritimes, aussi situés dans des vallées intra-alpines assez sèches, subissent aussi une érosion des cumuls hivernaux de précipitation ; mais les bons cumuls des deux dernières années font relativiser cette tendance observée. Le poste de Saint-Martin-de-Vésubie a aussi enregistré une légère baisse des précipitations estivales. Exemple d’une série exploitable : Saint-Véran (Fig.2). 500 450 400 350 300 250 200 150 100 50 20 10 20 07 20 04 20 01 19 98 19 95 19 92 19 89 19 86 19 83 19 80 19 77 19 74 19 71 19 68 19 65 19 62 19 59 0 Fig.2 : Evolution des totaux de précipitations hivernales à St-Véran (2006m) de 1969 à 2010 Courbe rouge : moyenne mobile sur 10 période ; trait pointillé noir : tendance linéaire. La neige Les cumuls de neige, tout comme le nombre de jours de présence du manteau neigeux, diminuent depuis le début des années 80 de manière assez uniforme sur les Alpes françaises. Cette baisse peut atteindre 30%. On a déjà perdu 1m de neige cumulée et un mois d’enneigement par rapport à la période 1950/1990. Les mesures de Saint-Christophe-en-Oisans mettent aussi en évidence la chute brutale des fréquences de jours avec une hauteur de neige supérieure à 30 cm (Fig.3) Cette diminution généralisée de l’enneigement semble être provoquée par la hausse des températures depuis 30 ans (et donc la remontée de la limite pluie-neige), une fonte plus intense lors des périodes anticycloniques hivernales et la stagnation voir la baisse des précipitations hivernales. L’enneigement est toutefois un phénomène complexe, localisé et très variable d’une année sur l’autre. L’absence de série sur la neige dans la moitié sud des Alpes françaises est donc assez préjudiciable pour l’observation de ce paramètre. On a déjà pu constater que l’enneigement est souvent différent entre les Alpes du nord et du sud, entre les Préalpes et les massifs internes. Cette indigence de données ne permet pas d’affiner ce constat et de mieux cerner les zones qui sont plus sensibles au changement climatique. 3 200 175 150 125 100 75 50 njneige >1cm njneige >10cm njneige >30cm 25 Linéaire (njneige >1cm) Linéaire (njneige >10cm) Linéaire (njneige >30cm) 0 1962 1964 1966 1968 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Fig. 3 : Nombre de jour avec une épaisseur de 1, 10 ou 30cm de neige au sol à St Christophe en Oisans (1570m) de 1965 à 2010. 4 Fig.4 : Localisation des postes de mesures qui disposent de séries climatiques exploitables (homogénéisées ou non) sur les températures, les précipitations et la neige dans les Alpes françaises en 2009. Climathèque Météo-France, Météo-Suisse, C.Chaix. 5