2013-11-24 Predic ELB - deutéronome 30 et Gn2

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2013-11-24 Predic ELB - deutéronome 30 et Gn2
Prédication pour le culte du 24 novembre 2013 à Rennes
Deutéronome 30, 11-20 et Genèse 2, 4 à 17
Écoute, et choisis la vie !
« J’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction : choisis la vie,
afin que tu vives »… il nous arrive sans cesse d’avoir à faire des choix. Des choix qui
ne concernent pas toujours des questions de vie ou de mort, mais toujours des choix.
C’est le lot d’une humanité libre et responsable. Cet état de fait est très bien rendu
dans un film que vous connaissez certainement : MATRIX.
Pour ceux qui n’auraient pas vu ce joyau du cinéma de science fiction, un petit
résumé s’impose :
En 2199, les machines règnent en maîtres sur l'espèce humaine, dont la civilisation
est anéantie. Les humains en sont réduits à mener une vie végétative et à fournir de
l'énergie à la Matrice. Mis en sommeil, ils sont projetés dans le monde fictif de 1999,
alors que la réalité n'est que chaos et destruction. Pourtant, un groupe de résistants,
conduit par Morphéus, a réussi à échapper à l'emprise de la Matrice et parvient à
réveiller Néo, un informaticien.
Quand Néo rencontre Morphéus pour la première fois, celui-ci lui propose deux
petites pilules : s’il prend la pilule bleue, rien ne change pour lui. Mais s’il prend la
rouge, il commence une aventure dont il ne sait pas grand-chose sinon qu’elle va
bouleverser son existence, jusqu’aux fondements du monde qui l’entoure.
Bien sûr, Néo choisi la pilule rouge, sinon il n’y aurait pas de film ! Il est alors libéré
et va combattre avec le groupe de résistants pour libérer le reste des humains encore
sous contrôle de la Matrice. Mais, l’un deux va trahir le groupe… et il dira alors pour
justifier son choix : « les ignorants sont bénis ».
Nous aussi nous avons à faire des choix. Des choix décisifs, des choix douloureux,
des choix quotidiens. C’est toujours après coup que l’on peut évaluer la pertinence
d’un choix : était-ce un bon choix ? Ai-je fait le mauvais choix ? On ne peut pas
revenir en arrière et dire : « finalement je prendrais bien la pilule bleue ». Les auteurs
bibliques ont illustré ce dilemme à leur manière avec l’arbre de la connaissance de ce
qui est bon et de ce qui est mauvais, planté au milieu du jardin d’Eden.
Avoir la connaissance de ce qui est bon, et de ce qui est mauvais, c’est se retrouver en
position de liberté et de responsabilité. Il nous faut exercer un discernement. Dans le
récit de la Genèse que nous avons lu, le SEIGNEUR veut préserver Adam d’avoir à
faire des choix. Il veut lui épargner le poids de la responsabilité et ses échecs
inévitables.
Qu’est ce qui nous permet de faire nos choix ? Sur quoi nous appuyons-nous quand
nous avons une décision difficile à prendre ? Adam et Eve, vous le savez, confrontés
au premier choix de l’humanité ont décidé de faire confiance au serpent et de goûter
au fruit défendu. Premier choix, première erreur ! Ça commence bien !
En tant que chrétiens, nous sommes exhortés plutôt à mettre notre confiance en JésusChrist, à fonder nos choix dans sa Parole. C’est aussi ce à quoi nous invite le texte du
Deutéronome : Écoute, et choisis la vie ! C’est bien par l’écoute que tout commence,
c’est elle qui permettra de choisir la vie.
Mais l'écoute dont il s'agit ici est une invitation au cheminement, à une quête. C'est
une démarche libre et dynamique. On est loin de l'écoute-obéissance aveugle qui
ferait de nous des moutons prêts à tondre, ou des humains sous contrôle de la
Matrice. Non, ici il s'agit de se mettre en route. L’Eglise est le peuple qui se met en
route à l’écoute la Parole. « Écoute Israël »... le verbe écouter, qui ouvre la prière
quotidienne du judaïsme, résume toute l'attitude demandée par Dieu à son peuple :
être un peuple qui écoute.
Cette Parole qu'il s'agit d'écouter n'est pas un commandement, une certitude, ou
même un savoir... D'ailleurs, dans le texte hébreu, le mot commandement est
remplacé par le mot parole. Le commandement est de l'ordre de l'inaccessible, c'est la
loi qui asservit. La Parole, toute proche, c'est la loi qui libère. Ici, la Parole dont il est
question ce n'est pas le texte biblique lui-même. Mais c'est la Parole que l'on
rencontre à l'écoute de ce texte, une parole pleine d'altérité, d'étrangeté même, mais
pourtant proche, intime.
Lorsque nous avons à faire un choix, la lecture de la Bible ne peut nous apporter
aucune réponse toute faite. Elle ne peut que nous inviter à cheminer vers plus de
liberté et de responsabilité. Elle peut nous donner, si on veut bien se donner la peine
de la lire vraiment, de voir notre vie autrement, sous d’autres angles. D’apercevoir
des brèches pour la vie là où l’on ne voyait qu’impasse.
La Parole de Dieu ne nous dit pas ce qui est bien, ou ce qui est mal. D’ailleurs, le
bien et le mal évoqués au v.15, sont remplacés par la bénédiction et la malédiction au
v.19. Il n'existe aucun bien, ni aucun mal en soi. Mais nous pouvons vivre sous la
bénédiction de Dieu, coram deo comme disait Luther, c'est à dire devant Dieu, en
écoutant sa parole, libres et responsables, ou bien nous en détourner.
Un pasteur protestant bien connu, Dietrich Bonhoeffer, a eu à faire des choix de vie
ou de mort. Dans le contexte de la 2nd guerre mondiale, il a participé à la tentative
d’attentat contre Hitler. Un choix des plus étonnant pour un pasteur ! Il a été
emprisonné et tué pour cela.
Bonhoeffer a développé ce que l’on nomme une éthique de « situation » : chaque
choix étant attaché bien plus à un contexte et à une écoute dynamique de la Parole de
Dieu, qu’à des convictions aussi nobles soient-elles.
Dans un texte qu’il écrit en 1943 et qui s’intitule « Dix ans plus tard », il fait le bilan
de dix années de nazisme et pose la question : « qui tient bon ? ». Il répond : « seul
celui dont le dernier critère n’est ni sa raison, ni son principe, ni sa conscience, ni sa
liberté ou sa vertu, mais qui est prêt à sacrifier tout cela lorsque, attaché à Dieu seul,
il est appelé à la foi à une action obéissante et responsable ; celui dont la vie ne veut
être autre chose qu’une réponse à la question et à l’appel de Dieu ».
Alors mon frère, ma sœur, quand la vie t’amène devant des choix, ne laisse personne,
pas même toi, savoir ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Mais écoutes, et laisses-toi
rejoindre par Celui qui dès le commencement a choisi de nous bénir, quelques soient
les chemins que nous empruntons.
Amen.