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LATITUDE SUD
La latitude est une valeur angulaire mesurant la position d’un point sur Terre.
La latitude, c’est aussi la liberté, le pouvoir d’agir.
4 èmes
nouvelles d’Uruguay
Chères amies et chers amis,
Nos vacances ont été consacrées à notre
installation, laborieuse en raison des
surprises que nous a réservé la maison.
Quasiment inoccupée l’an dernier, elle a été
habitée du jour au lendemain par 5 locataires
et une amie de Suisse en visite. Tirée un peu
trop brutalement de son sommeil, notre
maison s’est rebellée : robinets qui fuyaient,
plombs qui sautaient, fenêtres qui ne
fermaient pas, serrures qui coinçaient,
pannes d’eau chaude, humidité, etc. Jorge
n’avait pas fini de réparer un dégât que
quelque chose d’autre se déglinguait! Nous
avons heureusement un peu de répit
maintenant
et
qu’importent
ces
désagréments ou le fait de ne pas avoir d’eau
chaude à la cuisine : nous avons des
compensations : la nature, le chant du coq le
matin, les grillons, les colibris et les
grenouilles. Il est arrivé déjà trois fois qu’un
oiseau entre par inadvertance par la porte
que nous pouvons laisser ouverte ! Les
enfants ont découvert quantité d’insectes
inconnus. Enfin, le plus beau, c’est le bruit
des vagues et la proximité de la plage.
Photo : Françoise Monin
mars 2010
C’EST LA RENTRÉE !
L’été a déjà un relent d’automne, avec des
soirées fraîches et une luminosité plus dorée.
La rentrée des classes a eu lieu, à notre
soulagement par rapport aux solutions de
garde bricolées ces derniers mois. Après
avoir essayé un centre aéré pendant deux
semaines en décembre, où les enfants ne se
sont pas plu, nous avons opté pour les faire
garder à la maison, lorsque nous avons repris
le travail en janvier. C’est par le bouche à
oreille que nous avons pu trouver une
personne de confiance, qui venait garder les
enfants, parfois avec sa fille de l’âge de
Yoan.
Après plus de deux mois à la maison, même
les enfants en avaient assez des vacances et
se réjouissaient de retourner à l’école.
Une autre rentrée, politique, a eu lieu le 1er
mars dernier avec l’accession du président
élu José « Pepe » Mujica au gouvernement.
Rompant le protocole habituel, la prestation
de serment s’est faite sur une place au centre
de Montevideo et a été retransmise par
télévision ainsi que sur des écrans placés sur
l’avenue principale de la capitale, où des
dizaines de milliers de personnes s’étaient
rassemblées.
Photo : www.larepublica.com
Le nouveau gouvernement va poursuivre
la lutte contre l’extrême pauvreté, avec un
accent particulier sur le logement et
l’éducation.
Le président de la République vit dans une maison
foraine, dans une région rurale du département de
Montevideo qui n’est pas encore reliée au réseau
d’eau potable. Il ne va pas déménager dans la
résidence présidentielle. La nouvelle ministre de
Développement social quant à elle, vit dans le
même immeuble qu’une bénéficiaire d’un des
programmes de son ministère réservé aux
personnes en situation d’indigence.
Par rapport au gouvernement précédent, il a
une perspective plus latino-américaine et
coopérera davantage avec les pays voisins. Il
mise sur la croissance économique et
favorisera les investissements nationaux et
étrangers, privilégiant ceux qui créent des
emplois… pas de quoi inquiéter le
capitalisme.
« LA VIE EST UN CARNAVAL »
Un des phénomènes culturels les plus
importants de l’Uruguay est le carnaval. Il
dure plus d’un mois, ce qui en fait le plus
long du monde. Il mêle différentes formes
d’expression
(la
« murga1»,
les
« comparsas 2» les écoles de samba, les
chars allégoriques, l’élection des reines, etc.)
dans divers espaces (défilés, « llamadas3 »,
« tablados4 »).
1
Chœur accompagné de percussions.
2
Ensemble de tambours et de danse afro-uruguayen.
3
Littéralement les « appels » car les esclaves utilisaient
les tambours pour communiquer. Il s’agit d’un défilé
Traditionnellement, les « murgas » étaient
composées exclusivement d’hommes. Ces
dernières années, certaines sont devenues
mixtes et récemment l’apparition de
« murgas » de femmes a enrichi le carnaval.
Au sein des « comparsas », femmes et
hommes avaient des rôles bien distincts. Les
hommes jouaient du tambour et les femmes
dansaient. Les femmes ont peu à peu intégré
les ensembles de tambours et, depuis
quelques années, une comparse composée
exclusivement de femmes a vu le jour5.
Lors des défilés et des « llamadas », des
personnages au long cou et avec une tête
énorme ouvrent le cortège. Il s’agit des
« cabezudos »
(les
grosses
têtes)
confectionnés en rotin et recouverts de
papier mâché. Ils réjouissent le public et
effraient les enfants.
La murga A Contramano gagnante du Carnaval 2010
Photo : H.N Producciones www.carnavaldelfuturo.com
Nous l’avons croisé au défilé principal du
Carnaval, avec sa fillette. Nous le connaissions de
Suisse. En vacances ? Quel heureux hasard !
En novembre dernier, il était parti travailler
comme d’habitude. L’inspection du travail est
arrivée. Il n’avait pas de permis de séjour. Il s’est
engagé à quitter le pays avec sa fille née en Suisse
et son épouse, demandant juste le temps
d’organiser leur départ. Mais il n’a pas pu rentrer
chez lui. Conduit de son travail au centre de
détention, il a été mis dans un avion à destination
de Montevideo. Il vivait en Suisse depuis 9 ans.
dans les quartiers historiquement peuplés par les
populations afro-uruguayennes.
4
Scènes en plein air où se présentent les murgas, des
parodistes, des humoristes, des revues, etc.
5
www.lamelaza.com
« LE TRAVAIL, C’EST …»
Nicole : « impossible de relater tous les axes
sur lesquels nous travaillons dans le quartier
de Goes, cela prendrait des pages. Je choisis
donc de partager deux activités en lien avec
la période de l’année.
Un des objectifs du projet de Goes est de
travailler sur le temps libre et l’appropriation
des espaces publics par les femmes. Nous
avons organisé, avec la commission de
culture, un atelier de « cabezudas » (nous
avons féminisé le nom) pour les femmes du
quartier, animé par une professeure et un
professeur de l’Ecole nationale des beauxarts. L’atelier incluait la confection des
« cabezudas », une introduction à la
perspective de genre et a culminé avec le
défilé des « cabezudas » au cortège de
l’avenue principale du quartier le 23 février.
L’originalité de l’activité et la beauté du
résultat ont eu un écho qui a dépassé nos
attentes. Plusieurs propositions nous ont été
faites de faire défiler les « cabezudas » lors
d’inaugurations, de marchés, etc. Les
« cabezudas » ont ouvert le spectacle du 8
mars, journée internationale de la femme au
théâtre Solis et elles vont probablement être
exposées au Musée du Carnaval !
Mars est le mois des femmes dans tout le
département de Montevideo. De nombreuses
activités ont lieu et la « Secretaría de la
Mujer » publie un agenda. Dans ce cadre,
nous avons organisé un cours de promotrices
légales à la ComunaMujer de la Région
Centre. Ce cours, composé de 4 rencontres,
le samedi de 15 à 18 heures, aborde la
législation sur le mariage, le divorce, le droit
de garde et de visite, l’autorité parentale, les
pensions alimentaires, l’union libre, la
filiation, la reconnaissance en paternité, etc.
Les aspects juridiques de la violence
familiale sont évidemment traités ainsi que
le nouvel article de loi sur le changement de
sexe, qui prévoit une procédure juridique
pour les transsexuel(le)s qui souhaitent
changer de prénom et de sexe sans se
soumettre à une opération chirurgicale.
Ce ne sont pas moins de 160 personnes qui
se sont inscrites au cours, surpassant de loin
nos prévisions. Nous avons dû adapter la
logistique du cours en conséquence, procurer
un micro aux intervenant(e)s, etc.
Les participantes sont d’âges, de niveaux
éducatifs et de classes sociales très
hétérogènes, allant de la militante d’un
groupe de femmes de quartier défavorisé à
l’étudiante en droit. Ce mélange permet des
échanges d’expériences très riches. »
Jorge : « Au Mides, il y a une nouvelle
ministre et
plusieurs
nouveaux/elles
directeurs/trices en raison du changement de
gouvernement. Il était prévu que Ana
Oliveira, jusqu’alors vice-ministre occupe le
poste de ministre, mais elle a refusé, pour se
porter candidate à la mairie de Montevideo
aux élections municipales de mai prochain.
La désignation de la nouvelle ministre de
développement social, Ana Vignoli, a été
une surprise pour tout le monde, elle
comprise. Assistante sociale avec une
trajectoire au niveau municipal, elle est peu
connue au niveau national, mais se trouve
être une connaissance de longue date !
Tout changement est l’occasion de faire un
bilan. Celui de 5 ans de programmes
d’insertion sociale et de lutte contre
l’extrême pauvreté met en lumière la
nécessité de mieux articuler et coordonner
les politiques sociales et d’insertion entre les
différents organismes publics et privés.
La période estivale est généralement
consacrée aux évaluations des programmes
qui se sont achevés et à la planification de la
nouvelle année.
Nous espérons qu’après votre hiver
rigoureux, le printemps va fleurir et nous
réjouissons de vos nouvelles.
Affectueusement,
Nicole Champion Vicente
Jorge Vicente
[email protected]
Photo : Uruguay Trabaja
« Uruguay Trabaja » est occupé à faire les
appels d’offres pour les ONG qui conduiront
les programmes de travail transitoire de 9
mois cette année. J’ai été chargé de rédiger
les bases. Une fois les ONG choisies sur tout
le territoire national, les personnes
intéressées s’inscrivent.
Il faut vérifier que les candidat(e)s sont bien
en situation de pauvreté et n’ont pas encore
participé au programme. Comme il y a
toujours plus d’intéressé(e)s que de places
(3'000), on procède par tirage au sort. Ils
sont publics par souci de transparence. C’est
un énorme boulot, quelque peu fastidieux, il
faut le dire.
En parallèle, j’ai systématisé les données
existantes sur l’insertion des participant(e)s
des programmes de 2008 – 2009 dans le
marché du travail formel, afin de disposer de
chiffres par âge, secteur d’emploi, région du
pays, etc. »
« Ils arpentaient les rues et campaient sur les places
Chargés d'objets obscurs, de graines ou bien de vent
Proposant tout ou rien et de bien peu vivant
Leurs grands cris appâtant la vaine populace… »
Ainsi débute la magnifique chanson interprétée
par Juliette sur les paroles de Pierre Philippe.
Des petits métiers, il en existe de nombreux en
Uruguay, rémunérés à la pièce :
Pompiste, peintre en lettres, nettoyeuse/eur de
pare-brise, ouvreuse/r de portes de taxi aux
stations de taxi, ascensoriste, emballeuse/eur
d’achats au supermarché, vendeuse/r de billets de
bus, aiguiseuse/eur de couteaux, cireuse/r de
chaussures, promeneuse/r de chiens, lavandière
(au masculin ?), portier d’immeuble (au féminin ?)
et celui que Yoan préfère : surveillant(e) de
voiture.
Le financement de notre travail en Uruguay est assuré
par l’ONG de coopération GVOM (Groupe
volontaires outre-mer) qui vous est reconnaissant
pour tout versement d’une contribution volontaire.
Rosemarie Fournier
Coordinatrice
Rue de Condémines 8
1950 Sion
[email protected]
www.gvom.ch
ccp 10 –20968–7 mention Nicole et Jorge