Enceinte très jeune, et après?

MERCREDI 18 MARS 2015 LE JOURNAL DU JURA
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ACEYOUNG
MAMAN ET ÉTUDIANTE Une vie à 100% à l’heure pour conjuguer les deux rôles
Enceinte très jeune, et après?
LES JEUNES À LA PAGE
Elle est à la fois maman et étudiante. Samia Djeddaï a donné
naissance à une magnifique Camila, alors qu’elle n’avait que 19
ans. Elle n’a pas pour autant interrompu ses études. Aujourd’hui, elle mène de front
l’éducation de sa petite fille,
une vie de famille et une formation à l’Ecole supérieure de
commerce de La Neuveville. Les
journées n’ont que 24 heures.
Elles pourraient en compter
bien plus pour Samia… Avec
deux autres étudiantes et l’appui de leur enseignante de français Sylvie Zaech, la jeune maman témoigne dans cette page
Faceyoung de sa vie bien particulière. Parole est aussi donnée
à d’autres mamans qui partagent la même expérience, celle
de vivre très jeune un grand
bouleversement. NH
seules après la naissance à élever leur enfant.
De plus, à ce moment-là de
leur vie, beaucoup de jeunes
mamans perdent le contact
avec leurs proches. Elles sont
en proie à des critiques et à
des rejets. Mais est-ce vraiment une bonne chose de leur
manifester un désaccord ainsi? Non, car lorsqu’une personne passe par des étapes
très difficiles, il lui est important d’être accompagnée par
des amis et ses proches, ainsi
que par le père de l’enfant.
De l’aide? Oui mais…
SANDRINE WALAMBA
En Suisse, le nombre de jeunes femmes, devenues maman
entre 15 et 19 ans, est très faible. Il a en outre considérablement diminué depuis les années 1970. En 2012, 4 femmes
sur 1000 étaient de très jeunes
mamans, contre 16 sur 1000 en
1970. Les grossesses précoces
sont donc dans notre pays un
phénomène minoritaire. En
comparaison, la France comptait en 2012 9,4 jeunes mamans sur 1000, l’Espagne 9 sur
1000 et l’Italie 6,4 sur 1000.
Mais les champions sont sans
conteste les Etats-Unis avec
Dans une société où les femmes deviennent mères de plus en plus tard, il y en a qui pouponnent à peine l’école obligatoire terminée. A l’âge où
PHOTO PRÉTEXTE: KEYSTONE
leurs copines pensent au shopping, aux sorties et aux flirts, elles ont d’autres priorités ...
31,3 jeunes mamans sur 1000
et la Roumanie avec 37,5 sur
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1000, ceci en 2012 toujours.
Interrompre une
grossesse?
Tomber enceinte très jeune signifie réfléchir si on veut ou peut
garder son bébé ou non. Le taux
d’interruptions volontaires de
grossesse (IVG) chez les 15 – 19
ans n’indique pas une tendance à
la hausse dans notre pays. En effet, cette dernière est plutôt à la
baisse et se situe en 2013 à quatre
femmes sur mille de cette classe
d’âge. Dans le canton de Berne
en 2013, 103 jeunes femmes de
15 à 19 ans ont subi une IVG contre 147 en 2008.2
Enfant et études?
Derrière ces chiffres, il y a
des situations quotidiennes
compliquées à gérer, surtout si
la jeune maman décide de garder son enfant et est encore
aux études. Ce choix est très
dur à faire car l’enfant est un
nouvel être qui, pour sa mère,
demandera la priorité au quo-
TÉMOIGNAGE Une aventure au quotidien
Moi, Samia, devenue maman à 19 ans
Etre maman est un travail à
plein-temps qui compte autant
d’avantages que d’inconvénients. Mais c’est surtout un
bonheur qui porte le nom de son
enfant. Mon bonheur à moi s’appelle Camila.
Voilà un peu plus d’une année
que j’ai eu ma fille et, à sa naissance, ce fut comme un coup de
marteau sur la tête qui m’a sonnée et m’a ramenée à la réalité.
Petit à petit, je me suis rendu
compte de mes nouvelles responsabilités, j’ai réalisé qu’un
enfant était totalement dépen-
dant de moi. L’adolescente que
j’étais a fait place à la femme que
je suis devenue.
Quelques mois après la naissance de Camila, j’ai repris des
études à l’Ecole supérieure de
commerce de La Neuveville.
Aujourd’hui, mes journées se
Samia n’en démord pas: avec de la motivation, de la volonté, de l’organisation et, surtout, avec l’amour que
l’on porte à son bébé, il est possible de mener une vie d’étudiante et son rôle de maman de front. KEYSTONE
ressemblent mais ne sont jamais
identiques.
Des journées qui n’en
finissent pas
5 h 30 du matin, le réveil
sonne, je m’habille, me prépare
puis je réveille ma fille. Je l’apprête et je l’allaite. Ensuite, je
l’amène chez la maman de jour
où elle passe le plus clair de ses
journées. Là-bas, elle joue avec
d’autres enfants, elle mange et y
fait ses siestes.
Pendant ce temps, je suis à
l’école. J’y passe une trentaine
d’heures par semaine. Le soir
venu, je vais chercher Camila et
nous rentrons. En général, on
arrive à 18 h 30 à la maison, je la
nourris et la douche, puis je la
berce pour qu’elle s’endorme.
Après cela, je fais mes devoirs et
je répète mes tests. Même si Camila est toute petite, son père et
moi organisons chaque weekend une activité en famille pour
elle. Visite de château, tour en
bateau, foire, elle a déjà vu du
pays!
Récemment, nous avons déménagé. Mon stress s’est allégé.
J’ai un peu de temps pour moi.
J’en profite pour faire du sport et
préparer des projets musicaux.
Camila se plaît dans son nouvel
environnement. SAMIA DJEDDAÏ
tidien. En effet, avoir un enfant tout en étudiant est quelque chose de très difficile à vivre car les mères doivent
trouver la force de s’occuper
du petit et de suivre leur formation en parallèle. Et c’est
une chose que très peu de jeunes femmes arrivent à faire,
surtout si elles se retrouvent
Les très jeunes mamans qui
ont choisi de se construire un
avenir professionnel en parallèle peuvent parfois bénéficier
d’aide. En effet, il existe des
foyers où se réfugient celles
qui sont sans partenaire ou qui
ont des soucis familiaux. Elles
restent dans ces institutions
jusqu’à ce qu’elles retrouvent
un peu d’indépendance ou
que leur enfant ait grandi.
Malheureusement, ces foyers
sont rares dans notre pays et
les plus proches sont la Fondation pour Femmes & Enfants
Bienne, ainsi que la Fondation
Jeanne-Antide à La Chaux-deFonds. La jeune maman et son
enfant peuvent y être accueillis pour des séjours à
court et moyen terme et la petite famille y est entourée de
professionnels attentifs.
1
2
Office fédéral de la statistique
www.svss-uspda.ch
RENCONTRE Si jeunes et déjà mamans
Deux parcours,
une expérience
Donner la vie devrait être un
événement magique, synonyme
de joie pour les mamans. Mais
en est-il vraiment ainsi pour toutes les mères qui, enceintes très
jeunes, ont décidé de garder leur
enfant? Deux jeunes mamans
au parcours très différent témoignent.
Un long combat, mais
gagné
Première constatation: cela
peut très mal se passer, au début
du moins. Patricia, qui a été rejetée par sa famille et le père de
son bébé, raconte: «Ma grossesse n’a pas été évidente, il me
manquait le confort utile à une
femme enceinte. A cette époque
j’avais tout juste 16 ans et j’ai dû
apprendre à me débrouiller toute
seule alors que jusqu’alors j’habitais chez mes parents. Se retrouver
du jour au lendemain sans personne sur qui compter, j’ai vite été
obligée d’innover. Vraiment, ce
n’était pas une partie de plaisir.
Mais à la naissance de mon fils,
j’ai compris que j’avais une raison
de vivre et je suis heureuse. Je suis
fière de dire aujourd’hui que je
me bats pour lui. J’ai même repris
mes études!»
Mes enfants? Une
bénédiction!
«Vivre la naissance d’un enfant
est notre chance la plus accessible
de saisir le sens du mot miracle»,
dit-on. Augustine Domingos est
bien d’accord, elle qui est tombée enceinte alors qu’elle était
encore aux études. Avec le soutien de sa famille, elle a continué
à suivre un enseignement normal et malgré un premier échec,
elle a fini par obtenir son diplôme. «J’ai eu beaucoup de chance, j’ai été très bien entourée et très
bien préparée psychologiquement», explique-t-elle. Aujourd’hui, à 23 ans, elle vient de
donner une petite sœur à Jayson,
le fils qu’elle a eu si jeune. «Je ne
cesserai jamais de dire haut et fort
à quel point mes enfants sont une
bénédiction. Pour moi, c’est un
combat magnifique que je mène, et
mon copain et moi n’avons pas hésité une seule seconde à l’idée
d’avoir un deuxième enfant.»
Ces deux témoignages très différents arrivent à la même constatation: la venue d’un enfant
désiré est un événement heureux pour la maman, aussi
jeune et inexpérimentée soitelle. LISPINE MAWETE