Rencontre avec Denis Jacquat Toc, toc, c`est le contrôleur

Transcription

Rencontre avec Denis Jacquat Toc, toc, c`est le contrôleur
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L’actualité
L’actualité
L’actualité
Michèle Delaunay
et les fédérations Handicap & vieillissement,
de nouveaux travaux
DomusVi s’installe
à domicile
n°158 I FÉVRIER 2013
Dossier
© milosluz ; Andrey Kuzmin ; ralko - Fotolia. Montage : Patrick Dagonnot.
de vue
Vous en avez entendu parler. Puis, silence radio ou, dans certains cas, faibles
grésillements lointains. Le Mensuel des
Maisons de Retraite a coiffé la casquette
de Sherlock Holmes pour pister les décrets, les arrêtés, les travaux, les expérimentations, restés coincés dans les tiroirs de l’État. Dommage que la Direction
générale de la cohésion sociale (DGCS),
sollicitée à maintes reprises, n’ait pas
voulu jouer le rôle du fidèle Watson. Voici donc la longue liste des disparitions
inquiétantes.
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Liberté d’aller et venir en Ehpad
Rencontre avec
Denis Jacquat
Toc, toc, c’est le contrôleur Ethique et TIC aux
général des prisons…
Terrasses de Meudon
Hémicycle
P
resque 27 ans
que
Denis
Jacquat est
député… et qu’il se
soucie de la prise
en charge des personnes âgées. Il
nous a reçus le
19 février dernier, pour nous expliquer
le rôle de l’Assemblée nationale dans
l’élaboration des politiques publiques
liées au grand âge, et délivrer quelques
convictions bien ancrées.
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Incongruité
O
n se demandait si
les Ehpad n’étaient
pas des « ersatz »
d’hôpitaux. Maintenant, il
faudrait, selon le contrôleur
général des lieux de privation
de liberté, se demander s’ils
ne sont pas, aussi, des « ersatz » de prisons. Jean-Marie
Delarue pose la question tout
de go dans son rapport 2012. Et souhaite ajouter
dans sa tournée d’inspection, les structures pour
personnes âgées dépendantes.
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Bonnes pratiques
C
omment concilier liberté d’aller et venir et
sécurité des résidents ?
Cette question est redevenue d’actualité, avec
la série de faits divers
entrainant la mort de
personnes âgées ayant
quitté leur hôpital ou
leur Ehpad. Le MMR est allé voir dans un établissement francilien comment cette problématique était appréhendée.
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MMR n°158 I FÉVRIER 2013
dito
Sommaire
3
Les nouvelles du front
. PAGES 4-11
L’ACTUALITÉ
• Denis Jacquat : Les députés
De l’huile sur le feu
planchent sur le grand âge
• Toc, toc, toc, c’est le contrôleur
O
général des prisons…
• Michèle Delaunay et les fédérations :
calumet de la paix et propositions
• La flambée des tarifs hébergement :
• Évaluation interne : le lièvre Ehpad
et la tortue Logement-foyer
• Handicap et vieillissement :
de nouveaux travaux
• DomusVi s’installe à domicile
• Brèves
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LE DOSSIER
Perdus de vue
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EN DIRECT DES ÉTABLISSEMENTS
Liberté d’aller et venir :
Ethique et TIC à Meudon
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PAROLES DE LECTEUR
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
droit dans le mur ?
• Ehpad, lieux de vie ou lieux de soins ?
n croyait la fièvre retombée, les débats apaisés, la sérénité revenue. Eh bien non ! Alors que la ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’Autonomie, après ses
déclarations contestée, s’est rabibochée avec les fédérations,
alors que les concertations débutent avec les professionnels
des Ehpad sur la future loi, voilà qu’un certain monsieur
Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté de
son état, remet de l’huile sur le feu.
Que dit donc celui que l’on nomme plus communément le
contôleur général des prisons, dans son rapport annuel ? Qu’il
veut faire des inspections dans les Ehpad, comme il en fait dans
les prisons, les centres de rétention, les lieux de garde à vue, les
hôpitaux psychiatriques. Parce que si les Ehpad ne sont « évidemment pas des lieux de privation de liberté assimilables à
ceux qui, par nature, ont été créés comme des lieux de captivité », « la faculté d’aller et venir
[des personnes âgées] n’est que théorique », puisque les Ehpad, « sont obligés d’être fermés »,
« contraints » qu’ils sont « d’assurer leur sécurité ». Et cette privation de liberté, non pas « de
droit », mais « de fait », peut entrer dans le champ de compétence du contrôle général.
Et de brandir, alors « le devoir de transparence pour les familles et le grand public » pour justifier la nécessité de ces contrôles « indépendants ». Ah le devoir de transparence ! Ne voyez-vous
pas venir, derrière cette formule, le spectre de la maltraitance ? En tout cas, Jean-Marie Delarue,
lui, y pense : « De fait, en dépit du dévouement de tous, n’y a-t-il pas risque de gestes d’impatience ou de contention utilisée un peu abusivement ? Nous, on pense que oui », a-t-il affirmé,
le 25 février, sur France Info. Mais attention, il « ne veut pas indisposer les professionnels » !
« Soyons réalistes et pensons aux risques qui pèsent sur les personnes âgées »…
Les bras nous en tombent… tant de méconnaissance des Ehpad, tant de légèreté face aux personnes qui y vivent et qui y travaillent, tant d’amalgames douteux… Comme le résume le député PS de l’Essonne, Jérôme Guedj, l’un des premiers à avoir réagi à cette proposition incongrue,
«assimiler les maisons de retraite à des lieux de privation de liberté est une inutile provocation », car « les Ehpad ne sont pas des lieux d’enfermement et les professionnels qui y travaillent
ne sont pas des geôliers ! Au contraire, depuis des années maintenant, les établissements se sont
ouverts sur l’extérieur, sur la ville, sur le tissu associatif… »
Et qu’on ne vienne pas nous dire que ce rapport du contrôleur des prisons a le mérite de relancer
le débat sur la liberté d’aller et venir dans les établissements. Il ne relance rien du tout ; il ne
fait que jeter le discrédit sur les Ehpad et conforter les fantasmes dont se repaissent les médias
grand public. Il fait fi des discussions qui ont déjà eu lieu et qui sont en cours sur le sujet. Il fait
injure aux professionnels, qui, tous les jours, réfléchissent, cherchent, inventent, pour placer le
curseur au meilleur endroit entre libertés et sécurité, comme nous le montre notre reportage de
ce mois-ci.
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Mais, j’y pense… notre lieu de travail ne serait-il pas, lui aussi, un lieu de privation de libertés ?
Pas « de droit » mais « de fait ». Avons-nous vraiment tous choisi notre boulot librement ? Pouvons-nous le quitter à tout moment, comme nous le voulons ? Ne serions-nous pas retenu par
notre entreprise/structure/établissement par des chaines invisibles, dans un lieu de travail qu’il
conviendrait d’inspecter de manière inopinée ? Super Delarue, où es-tu ?
Valérie Lespez
Rédactrice en chef
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MMR n°158 I FÉVRIER 2013
‘entretien
4
Hémicycle
Xxxxx
Denis Jacquat :
Les députés planchent
sur le grand âge
B
© Valérie Lespez - EHPA Presse
ientôt 27 ans que Denis Jacquat, député UMP de Moselle, arpente les
couloirs de l’Assemblée nationale. Et bientôt 27 ans qu’il se soucie de la
prise en charge des personnes âgées. Rapporteur de tous les textes de
loi importants qui régissent leur accompagnement, ce médecin de profession
s’est toujours positionné clairement pour un 5e risque, contre vents et marées,
et a voté contre son camp la loi créant l’APA. « Il n’y a pas de politique de gauche
ou de droite pour la prise en charge des personnes âgées. Il y a une politique
sociale », assure-t-il. Admettant tout de même en souriant, que « sur le montage
financier », des différences peuvent apparaître.
Véritable mémoire de l’Assemblée, il se souvient avec malice de travaux anciens
que tous ont oublié, qu’en 1992 par exemple, les députés avaient déjà réfléchi
aux immigrés âgés, thème de la mission d’information qu’il préside aujourd’hui,
ou que c’est en 1986 qu’il a intégré « la première commission sur la grande
dépendance ».
Bref, les vieux, il connait. Infatigable, il a, en ce début d’année 2013, une double
actualité. À la tête de la mission d’information sur les immigrés âgés, il enchaîne, depuis plusieurs semaines, avec ses collègues députés, les auditions,
les tables rondes, il prépare des déplacements, en banlieue parisienne, dans le
Rhône et le Gard, mais aussi, en mai, un voyage en Algérie et au Maroc. À la tête
du groupe d’études « Enjeux du vieillissement », il cogite, il brainstorme, avec
82 autres députés, sur une approche globale du vieillissement, « de la retraite à
la perte d’autonomie ».
Il nous a reçus dans son petit bureau perché au 5e étage de l’Assemblée nationale, le 19 février dernier, pour nous expliquer le rôle des députés dans l’élaboration des politiques publiques liées au grand âge, et délivrer quelques convictions bien ancrées.
Valérie Lespez
Le Mensuel des Maisons de Retraite : À quoi servent les
groupes d’études de l’Assemblée nationale en général, et
celui sur « Les enjeux du vieillissement » en particulier ?
Denis Jacquat : Il y a toujours eu des groupes d’études à l’Assemblée
nationale. Chaque député est libre de s’y inscrire ou pas et d’en faire ce
qu’il en veut. Plus concrètement, ces groupes servent à améliorer les
connaissances et le carnet d’adresses des députés sur un thème donné.
L’échange intellectuel entre ces parlementaires et les experts qu’ils
reçoivent leur permet ensuite de poser des questions écrites, d’élaborer des propositions de loi ou de participer, en meilleure connaissance
de cause, aux discussions des textes présentés dans l’Hémicycle. Ces
groupes d’études permettent aussi aux groupes politiques, grâce à l’expertise acquise par ceux qui y participent, de décanter certains sujets.
Ce sont des laboratoires d’idées extrêmement importants dans la vie de
l’Assemblée.
Celui que je préside, « Enjeux du vieillissement », est la fusion de trois
groupes qui existaient sous les précédentes législatures : « Maladie
d’Alzheimer », « Dépendance » et celui sur la longévité que je présidais.
Ce n’est pas moi qui ai choisi l’intitulé « Enjeux du vieillissement »,
mais j’en suis très satisfait car cela va nous permettre d’aborder notre
thème de manière large, de la retraite à la perte d’autonomie. Je suis
aussi très content que 82 députés soient inscrits. Nous avons organisé
notre réunion constitutive le 29 janvier, et j’ai proposé, comme pour le
groupe « Longévité », que le Pr Françoise Forette, directrice de la Fondation nationale de gérontologie (FNG) et de l’International Longevity
Center-France (ICL) nous aide à élaborer notre programme de travail.
J’ai proposé également que nos réunions – une par mois, avec l’intervention d’un expert – soient ouvertes aux membres de la FNG et de
l’ICL, même si les députés restent « prioritaires ».
Le MMR : Quels sont les thèmes qui intéressent vos collègues députés ?
D.J. : Lors de cette réunion constitutive, il a été beaucoup question
du reste à charge. C’est le problème numéro un. Il y a eu aussi plus
d’interventions que je ne l’aurais pensé sur l’aide aux aidants familiaux.
La pédagogie à déployer à leur égard, le soutien psychologique, voire la
compensation pour leur aide, sont des sujets qui intéressent les députés membres du groupe.
Pour notre première réunion, nous avons décidé de recevoir, le 12 mars,
la ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’Autonomie, Michèle
Delaunay, pour qu’elle nous éclaire sur les trois rapports qu’elle a commandés et qui auront été rendus publics d’ici là, et sur sa future loi.
Nous avons aussi prévu de recevoir le Pr Sicard, auteur du rapport sur
la fin de vie.
Le MMR : Vous dites que le reste à charge est le problème
numéro un. Vous attendez donc que la loi sur le vieillissement actuellement en chantier y réponde ?
D.J. : Il nous faut une loi sur les enjeux du vieillissement, c’est sûr.
Cela fait longtemps que je plaide pour un 5e risque. Il faut s’appuyer sur
la CNSA, puisqu’elle a fait les preuves de son efficacité, et trouver une
nouvelle recette lisible, visible et pérenne.
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
Je regrette évidemment que nous n’ayons pas pu le faire avant, les débats engagés par Roselyne Bachelot et Marie-Anne Montchamp étaient
de qualité, mais nous nous engagions sur des mesurettes et nous courions le risque de décevoir la population.
Effectivement, dans cette réforme, il faut traiter le problème du reste à
charge en Ehpad, mais aussi à domicile. C’était déjà vrai avant la crise,
cela devient encore plus aigu avec la crise.
Le MMR : La mission d’information sur les immigrés âgés,
que vous présidez également, s’inscrit dans un tout autre
cadre.
D.J. : La Conférence des présidents (composée notamment du président et des vice-présidents de l’Assemblée et des présidents des commissions, ndlr), qui prépare l’organisation du travail de l’Assemblée,
peut décider, sur des sujets sensibles ou des thèmes d’actualité, de
créer des missions d’information. C’est Bernard Accoyer, le précédent
président de l’Assemblée nationale,
qui avait souhaité que nous réfléchissions sur le thème des immigrés
âgés, sous le sceau de la commission
de contrôle de l’Assemblée, et en
lien avec la Cour des Comptes. Cette
idée a été reprise par l’actuel président du Palais Bourbon, Claude
Bartolone.
Dans une mission d’information,
la fonction de président ou de rapporteur revient de droit à un député
d’opposition ; j’ai hérité de la présidence et mon collègue PS Alexis
Bachelay en est le rapporteur.
Le MMR : Vous avez déjà mené plusieurs auditions. Quelles
sont vos premières impressions ?
D.J. : Nos premières auditions étaient destinées à dresser un état des
lieux du phénomène. D’après les chiffres qui nous ont été donnés, il y a
en France 890 000 personnes immigrées âgées de plus de 65 ans, dont
25 % ont plus de 80 ans et 350 000 sont issues de pays tiers à l’Union
européenne – ce sont elles qui nous intéressent dans le cadre de cette
mission d’information. Sur ces 350 000 personnes, 140 000 sont devenues françaises et 210 000 ont conservé leur nationalité étrangère.
Il s’agit notamment d’hommes venus le plus souvent seuls et dont le
logement était généralement lié à leur emploi, comme les foyers Sonacotra (devenu Adoma, ndlr). Certains sont repartis, certains ont fait
venir leur famille, mais d’autres ne l’ont pas fait et sont restés célibataires. Ils ont vieilli entre eux, dans le foyer qu’ils n’ont jamais quitté.
Nous essayons, dans cette mission, d’avoir une approche globale et
d’examiner tous les aspects, du logement à
l’organisation des droits sociaux en passant par
l’accès aux soins, et en nous intéressant aussi
à la situation particulière de ces personnes
qui résident dans des foyers de travailleurs
migrants. Et à ce stade de nos travaux, le problème du logement paraît être le plus crucial,
avant même celui des ressources.
Il faut traiter le
problème du reste à charge en
Ehpad, mais aussi à domicile.
C’était déjà vrai avant la crise,
cela devient encore plus aigu
avec la crise.
Le MMR : Est-ce un sujet
nouveau pour l’Assemblée ?
D.J. : Non, ce n’est pas la première fois que l’Assemblée nationale
s’intéresse à ce sujet, mais personne ne s’en souvenait ! En 1992, j’avais
été délégué par la commission des Affaires sociales pour participer à un
colloque sur ce thème ; on se rendait compte, alors, que les personnes
d’origine maghrébine qui étaient venues travailler en France dans les
années 70 ne retournaient pas dans leur pays d’origine à leur retraite.
Le MMR : Et le problème reste entier.
D.J. : Oui, parce qu’il y a un tournant qui n’a pas été pris, justement
quand le constat a été fait qu’ils ne rentraient pas dans leur pays d’origine au moment de leur retraite.
5
Le MMR : Avez-vous déjà abordé la
question du maintien à domicile ou de
l’accueil en Ehpad de ces populations ?
D.J. : Oui, nous avons commencé à en parler.
Une des personnes auditionnées proposait par
exemple de réserver, pour les immigrés âgés,
des quotas de place dans les Ehpad… je n’y suis
pas favorable. Le problème de cette population… c’est qu’elle ne demande rien ! Et pourtant, ces personnes ont des droits et peuvent prétendre au maintien à
domicile ou à une place en Ehpad si leur état le nécessite. Mais culturellement, ces immigrés âgés ne vont pas spontanément vers l’aide à
domicile et encore moins vers l’Ehpad. D’où la nécessité de repenser
l’offre d’hébergement notamment, de faire de l’institutionnalisation à
la carte, en privilégiant les structures de proximité, les petits lieux de
vie.
Nous avons prévu au cours du mois de mars, quelques déplacements en
région parisienne, dans le Rhône et dans le Gard, pour justement visiter
des foyers Adoma, et des structures d’hébergements ou médico-sociales.
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Propos recueillis par V.L.
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‘actualité
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Incongruité
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On se demandait déjà si les Ehpad n’étaient pas des « ersatz » d’hôpitaux. Maintenant, il faudrait, selon le contrôleur
général des lieux de privation de liberté, se demander s’ils ne sont pas des « ersatz » de prisons. Jean-Marie Delarue
pose la question tout de go dans son rapport 2012. Et souhaite ajouter, dans sa tournée d’inspection, les structures pour
personnes âgées dépendantes.
C
’est une proposition déjà formulée en
2009. Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation de
liberté, communément appelé contrôleur général des prisons, exprime, à nouveau, dans
son rapport 2012, sa volonté d’élargir son
périmètre d’action aux Ehpad. Et Jean-Marie
Delarue est coriace. Il a déposé, en mai 2012,
un avant-projet de loi allant dans ce sens
auprès de Matignon. Le Premier ministre n’a
pas encore répondu à cette demande.
Bien conscient que cette proposition d’ajouter les Ehpad dans sa liste des lieux d’enfermement – aux côtés des prisons, des
gardes à vue, des centres de rétention, des
hôpitaux psychiatriques – peut susciter une
levée de boucliers, le contrôleur général
apporte une nuance : « Les Ehpad ne sont
évidemment pas des lieux de privation de
liberté assimilables à ceux qui, par nature,
ont été créés comme lieux de captivité. »
Pour quelles raisons alors Jean-Marie Delarue veut-il pousser la porte des maisons de
retraite pour y contrôler ce qui s’y passe ?
« En théorie, il n’existe en Ehpad ni obstacles
à l’entrée, ni empêchement à la sortie. Mais
en pratique, de nombreux établissements,
pour la protection des personnes âgées ellesmêmes, sont fermés (on pense ici à certaines
unités dites « Alzheimer » par exemple). La
privation de liberté n’est pas ici de droit mais
de fait, et peut donc entrer dans le champ de
compétences du contrôle général », argumente-t-il. Pour rappel, la liberté d’aller et
venir ne compte pas dans la liste des 7 droits
fondamentaux de la personne accueillie de
la loi du 2 janvier 2002. Seule la charte des
droits et libertés de la personne accueillie,
qui n’a pas de valeur juridique, la mentionne
expressément.
La porte ouverte
aux débats éthiques
Qu’il y ait restriction de la liberté d’aller et
venir des résidents pour des raisons de sécurité, c’est un fait que le secteur n’a jamais
caché. Ainsi, selon l’étude bientraitance 2010
de l’Anesm, « la liberté de circuler à l’exté-
rieur de l’établissement est systématique dans 31% des Ehpad et fréquente
dans 66% d’entre eux ». Une enquête
de la Fondation Médéric Alzheimer estimait « que seulement 11 % des Ehpad
n’avaient jamais mis en œuvre de mesures limitant la liberté d’aller et venir ».
Ce débat éthique a déjà donné lieu à
nombre de réflexions : la conférence de
consensus sur la liberté d’aller et venir
en 2004, les travaux de l’espace éthique
Erema… Et ce débat – encore et toujours
d’actualité – a été réouvert récemment
par la ministre des Personnes âgées et de
l’Autonomie, suite aux décès de quatre
résidents ayant quitté leur établissement.
Jean-Marie Delarue soulève également, dans
son argumentaire, le problème du consentement des résidents. « La détresse psychique
due à un affaiblissement de la capacité de
consentement rend d’autant ces populations
vulnérables, c’est donc souvent pour les protéger d’elles-mêmes que ces personnes âgées
dépendantes sont enfermées. Cette privation
de liberté est une réalité humaine qui ne peut
être ignorée. »
La ministre des Personnes âgées et de l’Autonomie se dit réceptive aux arguments du
contrôleur général. En posant toutefois des
conditions sémantiques et déontologiques
préalables pour éviter tout amalgame. « Tout
d’abord les lieux « privatifs » de liberté
constituent par définition des lieux où l’on
entre contre sa volonté. Une révision de cette
définition imposerait un recours à la loi et
il faudrait sans doute compléter par « lieux
privatifs ou limitatifs de liberté », préciset-elle, sur son blog.
Oui, Michèle Delaunay est d’accord : il faut
également débattre du consentement des
résidents : « Le consentement d’entrer
[en Ehpad] des âgés est-il toujours plein
et entier ? Les conditions du recueil de ce
consentement sont-elles bien celles dans lesquelles on reçoit le « consentement éclairé »
des personnes entrant dans des essais de
recherche clinique et ce consentement répond-il à sa pleine définition? Ma réponse
© kadisbel - Fotolia.com
Toc, toc, toc,
c’est le contrôleur
général des prisons…
est : nous pouvons et nous devons améliorer
les unes et l’autre. Je compte beaucoup sur
notre loi d’adaptation de la société au vieillissement pour avancer dans ce domaine. »
Qui veut la peau
des maisons de retraite ?
De la privation de liberté au consentement,
Jean-Marie Delarue glisse très vite vers les
risques de maltraitance pour justifier de
l’intérêt de ses inspections. Et de dégainer le
sacro-saint « devoir de transparence pour
les familles et le grand public ». Mais où peut
bien se loger l’opacité des Ehpad, qui croulent
déjà sous les recommandations de bonnes
pratiques de l’Anesm et de l’HAS ? Qui font
l’objet d’inspections des autorités de tutelles.
Qui doivent rendre des rapports d’évaluation
interne et externe. Mais Jean-Marie Delarue
propose de faire mieux encore que les conseils
généraux, ou les agences régionales de santé :
« Le contrôle général a, aujourd’hui, une
expérience acquise qui permet de garantir la
réalité de son indépendance et l’efficacité de
son intervention pour vérifier l’état, l’organisation, et le fonctionnement de ces lieux. »
Sans surprise, recalée ou pas, la volonté du
contrôleur général des lieux de privation de
liberté de débarquer dans les établissements
a fait le tour des médias. De quoi alimenter
encore l’Ehpad bashing…
Nadia Graradji
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
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Peace
En signe de réconciliation après ses déclarations tonitruantes, Michèle Delaunay, la ministre déléguée aux Personnes
âgées et à l’Autonomie, a reçu les organisations du secteur, le 5 février, pour « lever les ambiguïtés ». L’occasion, évidemment, pour chacun des professionnels, de glisser aussi, desiderata et dadas... en perspective de la future loi sur le vieillissement.
Michèle Delaunay et les fédérations :
calumet de la paix et propositions
L
a Croix-Rouge, la Fnadepa, l’Uniopss, l’Unccas, le Synerpa,
la Fehap, la FHF, l’AD-PA, la Fnaqpa, la Mutualité française,
la Conférence nationale des directeurs d’Ehpad. Elles étaient
toutes là, toutes les organisations représentatives des établissements
pour personnes âgées, avenue Duquesne, au ministère, autour de
Michèle Delaunay. Réunies notamment pour lever les ambiguïtés et
les malentendus suite aux récentes sorties de la ministre déléguée aux
Personnes âgées et à l’Autonomie. Et il semble que l’opération séduction ait plutôt bien fonctionné : « La ministre a été à l’écoute et plutôt
rassurante, juge par exemple Didier Sapy, directeur de la Fnaqpa. Elle
a levé les malentendus et les raccourcis qu’elle avait pu faire, dans
son interview au Parisien. Elle nous a expliqué que si l’objectif était
l’accessibilité financière des Ehpad et que pour cela, toutes les pistes
devaient être explorées, c’était au sens large, non pas seulement sur
le tarif hébergement ou la mutualisation des postes de directeurs. »
Confirmation de l’entourage de la ministre, qui répète que « l’encadrement des loyers n’est qu’une piste parmi d’autres ». Et qui prévoit,
après cette « réunion exploratoire », d’autres rendez-vous avec les
professionnels pour avancer sur le troisième pan de la loi sur le vieillissement en préparation, celui de l’accompagnement.
Bureau des réclamations
Et de fait, la remise à plat n’était pas le seul ordre du jour de cette réunion, qui a donc également été l’occasion d’aborder les orientations à
engager dans la perspective de la loi sur le vieillissement.
Avec, en premier lieu, quand même, l’accessibilité financière des
Ehpad. Si nombre de fédérations s’accordent sur le diagnostic, beaucoup d’entre elles ne partagent pas les méthodes prônées par la ministre, comme le plafonnement des tarifs hébergement, « du mercurochrome sur une jambe de bois », dixit Didier Sapy, qui « rejoint la
position de l’AD-PA. La maison de retraite, ce n’est pas cher ; c’est
juste mal remboursé ! C’est un problème de répartition des coûts
entre les financeurs ». De son coté, le Synerpa, farouche opposant du
plafonnement, met en garde sur les dangers que constituent, dans un
dossier aussi complexe et enchevêtré que la réforme de la dépendance,
« les fausses bonnes solutions, comme la compression des charges ou
la mutualisation d’un directeur sur trois sites ». Pas très favorable
non plus à l’encadrement des tarifs, la Fehap est en revanche pour
modérer le reste à charge. Mais cette mesure doit notamment se baser,
selon la fédération, par une égalité de traitement entre le domicile et
les maisons de retraite. « Car, explique David Causse, coordonnateur
du pôle santé-social à la Fehap, les résidences service représentent
une concurrence déloyale très injuste pour les maisons de retraite.
Elles jouissent de l’APA à domicile, 3 à 4 fois supérieure à l’APA en
Ehpad, bénéficient du forfait soins des Ssiad et ont également des
aides fiscales. Si l’on compare les avantages et les contraintes entre
l’Ehpad classique avec la convergence tarifaire, et la résidence intermédiaire, les coûts de prise en charge sont bien supérieurs à ce qui est
permis en Ehpad. »
Autre proposition de Michèle Delaunay : rendre plus transparentes les
prestations complémentaires en établissement. Oui, sauf qu’a priori
tout doit être dans le contrat de séjour. Et que tout est déjà dans la loi !
Enfin... presque. En 2009, la Fehap avait en effet déposé un amen-
dement proposant de clarifier toutes les prestations des maisons de
retraite. Amendement adopté dans la loi de financement de la Sécurité
sociale. Mais le décret d’application n’est finalement jamais sorti.
Un « partenariat win win »
Mais bien d’autres sujets que le prix des Ehpad ont été abordés lors
de cette réunion, transformée pour l’occasion en bureau des réclamations pour fédérations méfiantes, suite aux déconvenues du 5e risque.
Le cahier des doléances était donc plutôt chargé, au vu de la montagne
de dossiers encore en souffrance (lire notre dossier p.13).
Ainsi de l’AD-PA, qui s’est fait fort de « rappeler les éléments de court
terme qui devront être suivis avec attention, afin d’être en cohérence
avec les axes tracés » : la convergence tarifaire, l’utilisation des crédits
de la CNSA, mais aussi « la mise en place d’analyses sur les besoins
des personnes âgées, avant les analyses strictement comptables et
financières ».
Ainsi, aussi, de la Fnaqpa, qui a largement insisté sur la « problématique beaucoup plus large, de l’attractivité des établissements pour
les personnes âgées et leurs familles, raconte Didier Sapy. Une image
malheureusement dégradée, alors qu’ils sont extrêmement performants en rapport qualité/coût. Nos adhérents attendent de leur ministre qu’elle soit aussi la première défenseure du secteur. Qu’il y ait
encore des progrès à faire, que tout ne soit pas rose, bien entendu !
Mais c’est pour nous très important que les Ehpad soient reconnus
comme un habitat à part entière pour personnes âgées, dans les parcours résidentiels. »
Ainsi, encore, du Synerpa, pour qui cette réforme de la dépendance
tant attendue, doit être l’occasion, « d’une part, d’uniformiser les tarifs dépendance et soins, très différents d’un établissement à l’autre
pour le même service rendu, et d’autre part, de mener une réflexion
approfondie sur l’habilitation à l’aide sociale et les aides à l’hébergement, qui ne remplissent pas aujourd’hui le rôle qui leur est assigné,
à savoir venir en aide aux personnes à faible revenu ». Pour Florence
Arnaiz-Maumé, déléguée générale du syndicat, « le simple fait que
l’accès aux lits habilités à l’aide sociale, qui sont des places subventionnées par les pouvoirs publics et qui représentent 80% de l’offre
globale, ne soit soumis à aucune condition de ressources est un vrai
défaut du système, puisqu’il constitue un effet d’aubaine à l’attention
de ceux qui peuvent payer le vrai prix, au détriment de ceux qui ne le
peuvent pas ».
Au-delà de la mission réconciliation et des positions de chacun sur
la réforme future, finalement, cette rencontre entre le gouvernement
et les acteurs du secteur était probablement une façon, pour chaque
camp, de montrer qu’il était prêt à travailler avec l’autre. À condition,
résume Didier Sapy, que « la ministre joue le jeu du partenariat winwin ». Et sur ce point, les professionnels restent prudents : « L’Uniopss
[…] restera vigilante à ce que les mesures prises correspondent à une
réelle avancée dans la couverture sociale des besoins d’aide à l’autonomie », concluait ainsi l’organisation, dans un communiqué paru le
lendemain de la rencontre…
Frédérique Josse
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
‘actualité
8
Gros
Xxxxxx
Xxxxx
sous
L’étude 2013 de l’Observatoire des Ehpad du cabinet KPMG vient nourrir le débat sur le tarif hébergement des structures.
Au-delà des chiffres qui ne concernent que les secteurs public et privé non lucratif, l’étude met en lumière le poids croissant de l’immobilier.
e tarif hébergement des maisons de retraite revient à la une. Michèle Delaunay a un peu maladroitement réouvert le débat (lire
page précédente). Quelques jours plus tard, c’est l’Observatoire
des Ehpad 2013 du cabinet KPMG qui en remettait une couche. Des
chiffres à prendre avec des pincettes, compte tenu de l’échantillon de
l’étude : 323 établissements publics et privés non lucratifs (associations, fondations, mutuelles, et congrégations). Selon cette étude, une
place en Ehpad coûte en moyenne 1 819 euros en province (soit 61 euros
par jour). En Île-de-France, un résident devra débourser chaque mois
2 242 euros. À titre indicatif, la Fehap annonçait, pour ses adhérents,
une moyenne de tarif hébergement de 1 544 euros par mois en province et de 2022 euros par mois en région parisienne (chiffres 2010).
« Le coût net journalier de l’hébergement poursuit sa progression,
quelque soit le statut de l’établissement et ce, malgré les opérations
de convergences tarifaires engagées par de nombreux départements.
La problématique du reste à charge est de plus en plus saillante et ne
sera pas résolue avant la future loi sur le vieillissement », commente,
dans l’avis d’expert de l’étude, Emmanuelle Aubert, directrice générale
adjointe du secteur médico-social d’Hospitalor.
L’immobilier, l’enjeu à venir
Il y a une donne imparable dans le coût de l’hébergement, c’est l’immobilier, d’où la disparité des tarifs en fonction des régions. En Île-deFrance, 25% du coût journalier d’un Ehpad (soit entre 9 et 10 euros par
lit et par jour) vient de l’immobilier. Et cette tendance sera à la hausse
© Noble Age
La flambée des tarifs hébergement :
droit dans le mur ?
L
car le patrimoine des Ehpad est vieillissant. 60 % des établissements
de l’échantillon de l’étude KPMG ont été construits il y a plus de 20 ans
et plus de 50 % n’ont pas opéré d’opérations de restructuration lourde
depuis plus de 15 ans (lire aussi MMR n°156). Et il va falloir s’y mettre.
« Les Ehpad de l’échantillon hébergent une population âgée (plus de
85 ans en moyenne) et un GMP proche de 700 en moyenne qui entraîne
l’implantation d’équipements immobiliers et médicaux spécifiques, et
pour lesquels la plupart des structures n’a pas encore opéré totalement
cette mutation. […] L’élaboration d’une stratégie patrimoniale foncière
et immobilière va constituer dans les dix prochaines années un enjeu
à part entière dans le devenir des Ehpad, des politiques publiques et
notamment pour contenir le tarif hébergement, car celui-ci pourrait
augmenter considérablement », avertit Annabelle Billy, manager au
sein du pôle « outils et recommandations » à l’Anap.
N.G.
À l’occasion de la publication de l’étude de l’Observatoire des Ehpad, le cabinet KPMG a organisé une table-ronde sur la
thématique : Ehpad, lieux de vie ou lieux de soins ? Points de vue croisés.
© KPMG
Ehpad, lieux de vie ou lieux de soins ?
L
’état des lieux : le niveau de
dépendance des résidents en
Ehpad augmente. En 2009,
les établissements du panel de
l’observatoire KPMG affichaient un
niveau de GMP moyen de 646, alors
qu’il atteint 670 en 2011. Les Ehpad
publics accueillent des résidents
plus dépendants : 50% des Ehpad
publics ont un GMP moyen supérieur à 700, contre 34% des structures privées non lucratives.
Le point de vue du praticien
Dr Michel Salom, président du syndicat national de gérontologie clinique
« Les troubles cognitifs et du comportement, et les moyens médicotechniques ont progressé dans les Ehpad. Mais plus le personnel soignant et le médecin coordonnateur sont âgés, plus ils ont tendance à
freiner la médicalisation ; le soin n’est pas l’alpha et l’oméga. Il faut
également tenir compte de la problématique des familles. La moitié
d’entre elles considèrent que l’Ehpad est un lieu de soins, pour l’autre
moitié, hors l’hôpital, point de salut. Nous devons être méfiants dans
nos décisions par rapport aux familles. C’est ce qui a le plus changé
dans nos pratiques dans les Ehpad. Nous devons consacrer un temps
considérable aux familles. De nombreuses questions cristallisent les
mécontentements : le reste à charge, les démences très difficiles à
gérer par les familles, l’agressivité plus lourde. »
Le point de vue des pouvoirs publics,
Xavier Dupont, directeur des établissements et services médico-sociaux à
la CNSA « Au niveau institutionnel, le curseur est de tirer les Ehpad vers des
lieux de soins. L’orientation principale des pouvoirs publics est d’achever la pathossification. Autre objectif : faire des établissements des
plateformes de services, des centres de ressources. La priorité est
moins quantitative, mais d’ordre organisationnel avec notamment
l’expérimentation des parcours de santé ».
Réaction dans la salle
Dr Yannick Éon, médecin conseil de la CNSA
« Dans un Ehpad de 85 lits, le médecin coordonnateur ne sera pas
d’accord avec la prise en charge médicale proposé par le médecin traitant pour 7 à 8 résidents. Les médecins coordonnateurs sont de plus
en plus formés mais ce ne sont pas eux qui soignent. On veut introduitre de la qualité… sans qu’elle ne puisse s’appliquer. »
N.G.
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
‘actualité
Bon point, mauvais point, petite piqûre de rappel… Dans sa quatrième
enquête nationale, l’Anesm dresse l’état des lieux du chantier de l’évaluation interne. Car l’horloge tourne : au plus tard le 3 janvier 2013, les
établissements et services autorisés avant 2002 doivent rendre leur
rapport. Côté Ehpad, le gros des troupes passera la ligne d’arrivée dans
les temps. Les logements foyers, eux, baguenaudent.
Évaluation interne :
le lièvre Ehpad et
la tortue logement foyer
P
ari tenu. 87 % des établissements et services sociaux et médico-sociaux autorisés
avant la loi du 2 janvier 2002 devraient transmettre les résultats de leur évaluation
interne avant la date fatidique du 3 janvier 2014. « Résultats très satisfaisants », félicite l’Anesm dans son enquête nationale, publiée le 8 février. Un compliment dont peuvent
se saisir les Ehpad : 60 % des structures interrogées par l’Anesm sont engagées dans la
démarche d’évaluation interne, et 27 % l’ont planifié. Seuls 17% des Ehpad sont à la traine.
Pour réussir à boucler ce dossier, mieux vaut ne pas la jouer en solo. L’appartenance à un
organisme gestionnaire, l’adhésion à une fédération ou à un réseau professionnel sont des
atouts. Les Ehpad accompagnés ont pu bénéficier d’actions d’information, de formation et
d’outils tels que des référentiels ou guides pratiques. 73% d’entre eux déclarent avoir utilisé
au moins une recommandation de l’Anesm pour conduire leur évaluation interne.
Le secteur public, lanterne rouge
Si les Ehpad sont de bons élèves aux yeux de l’Anesm, pour les logements foyers, ça se gâte.
Et c’est un euphémisme : 51 % des répondants n’ont pas encore donné le premier coup de
pioche de ce chantier. C’est du côté du secteur public que ça lambine le plus : « Si 48 % des
logements foyers privés déclarent ne pas être engagés dans la démarche en 2012, ce sont
68 % des logements foyers publics de moins de 50 places et 70% des logements foyers
publics de plus de 50 places », alerte l’Anesm. Qui en déduit – même si cela paraît un peu
tard – « la nécessité de clarifier les obligations légales et réglementaires pour certaines catégories d’établissements et de services, en particulier les logements foyers ». Clarification
ou pas, 13 % des structures médico-sociales prévoient de transmettre leurs résultats après
2014. Parmi elles, « une proportion importante de logements foyers publics » (encore eux).
Ces mêmes structures affirment qu’elles rendront également hors délais (soit après le 3 janvier 2015)… leur rapport d’évaluation externe.
Les raisons invoquées pour justifier ce retard ? 26 % des établissements et services du
secteur « personnes âgées » déclarent avoir eu d’autres obligations réglementaires (en
particulier le renouvellement de leur convention tripartite). 51 % mettent en avant le
manque de temps. Et 27 % des répondants considèrent que l’échéance est… éloignée.
Mais plus préoccupant que les structures retardataires, celles qui sont atteintes d’amnésie administrative : 10 % des répondants à l’enquête de l’Anesm déclarent en effet ne pas
connaître leur date d’autorisation et la date à laquelle ils doivent transmettre les résultats
de leur évaluation interne. C’est le cas de plus d’un quart des établissements publics dans le
secteur « personnes âgées » (Ehpad et logements foyers de plus de 50 places) !
N.G.
(1) Enquête réalisée auprès d’un échantillon représentatif de 4215 établissements et services en France
métropolitaine et d’outre-mer. Les réponses se sont échelonnées entre le 13 juin et le 27 juillet 2012.
La fin de vie au programme 2013 de l’Anesm
Ce n’est pas moins de trois institutions qui vont se pencher sur la problématique des conditions de la
fin de vie et des décès des personnes âgées et des personnes handicapées vieillissantes en Ehpad. En
2013 (même si le calendrier n’est pour l’instant pas plus précis), l’Anesm travaillera sur cette question
en partenariat avec l’Observatoire national de fin de vie (ONFV) et la Haute autorité de santé (HAS). Un
système de recueil de données via un réseau sentinelle de médecins coordonnateurs, sera mis en place.
« Les résultats de cette étude permettront de déterminer les recommandations nécessaires à élaborer
pour les professionnels des Ehpad et pour les professionnels hospitaliers des urgences », précise l’Anesm.
9
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
‘actualité
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Prise en Xxxxxx
charge
Xxxxx
Les ministres déléguées aux Personnes handicapées et aux Personnes âgées ont lancé, début février, un groupe de travail
sur les personnes handicapées vieillissantes. Il y a déjà eu des travaux sur le sujet, évidemment des initiatives sur le
terrain, mais Marie-Arlette Carlotti et Michèle Delaunay veulent aujourd’hui passer la vitesse supérieure.
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Handicap et
vieillissement :
de nouveaux
travaux
«L
es personnes handicapées deviennent vieilles
plus tôt, et le handicap s’accroit avec l’âge. »
Michèle Delaunay, ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’Autonomie, résume bien, par cette
simple phrase, les grands défis posés par le vieillissement
des personnes handicapées. Défis déjà explorés, en leur
temps, par exemple par le sénateur Paul Blanc, la CNSA ou le Conseil
économique et social, mais pour lesquels le gouvernement veut aujourd’hui « passer au stade supérieur », comme l’a dit Marie-Arlette
Carlotti, ministre déléguée aux Personnes handicapées, lors du lancement officiel d’un groupe de travail dédié, le 6 février dernier.
Patrick Gohet, Marie-Arlette
Carlotti et Michèle Delaunay,
le 6 février à Paris.
d’accompagner et de soutenir les proches… qui eux aussi sont confrontés aux effets de l’âge.
Enfin, troisième objectif assigné au groupe de travail : améliorer les
connaissances en la matière, c’est-à-dire quantifier, nationalement et
localement, la population concernée et mettre en face les statistiques
concernant l’offre existante.
Du FAM à l’Ehpad
© Valérie Lespez - EHPA Presse
Évidemment, il ne s’agit pas de partir de zéro puisque, on l’a vu, des
travaux ont déjà été réalisés et que sur le terrain, comme souvent, les
professionnels n’ont pas attendu d’éventuelles préconisations venues
d’« en haut » pour se remonter les manches. D’ailleurs, les « réponses
adaptées, durables et évolutives », dixit Patrick Gohet, le président du
groupe de travail, que doivent proposer la quarantaine d’« experts »
devront prendre en compte ce qui existe déjà, mais aussi « être mis à
l’épreuve des réalités de terrain ».
Trois objectifs pour une cible
Passer au stade supérieur, cela signifie, pour Marie-Arlette Carlotti, se
concentrer sur trois objectifs. D’abord, « adapter les établissements et
services médico-sociaux ». La ministre déléguée aux Personnes handicapées veut « repenser l’accompagnement et les soins dispensés par
les établissements et les services ». Vaste sujet s’il en est, qui va bien
occuper les 42 membres du groupe de travail, notamment des représentants d’associations de personnes handicapées, de gestionnaires,
des financeurs, et des collectivités locales. Mais si les principales fédérations d’établissements (Fehap, FHF, Uniopss, et même un syndicat
strictement « Ehpad », le Synerpa) sont présentes dans ce groupe de
travail, les représentants de l’aide et du soin à domicile brillent par leur
absence ; ils ne font pas partie de la liste des invités des ministres…
Le deuxième objectif de Marie-Arlette Carlotti : « Aider les aidants
professionnels ou familiaux à faire évoluer leur pratique. » « Questionnez le contenu des formations initiales et continues », propose par
exemple la ministre au groupe de travail, et réfléchissez à la manière
À propos de réalités de terrain, le groupe de travail serait bien inspiré
de relire les récents travaux de l’Observatoire prospectif des métiers
et des qualifications de la branche non lucrative sanitaire, sociale et
médico-sociale. « Le vieillissement des personnes en situation de
handicap ; quel impact sur l’accompagnement et les métiers » dresse
quelques constats intéressants sur l’évolution de l’offre d’établissements et donne quelques clés, notamment pour aider les gestionnaires
à établir une stratégie d’accueil (ou de transfert) des personnes handicapées vieillissantes – où l’on voit que 38 % des directeurs de structures
pour personnes handicapées ont déjà réorienté un de leurs résidents en
Ehpad (1). Le document relève aussi la nécessité de « réinterroger les
identités professionnelles et les pratiques » et notamment de mettre
de l’éducatif dans le soin, en faisant par exemple mieux travailler ensemble les aides soignants et les AMP.
V.L.
1. L’Observatoire a interrogé
par téléphone 270 directeurs
d’établissements, mené près de
50 entretiens de salariés dans
8 établissements, et exploité des
données statistiques publiques et
des travaux d’études.
Étude à lire sur
www.ehpa.fr
rubrique « À la
Une » en date du
28 février.
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
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Offensive
Xxxxxx
Xxxxx
En rachetant la vingtaine d’agences de Nurse Alliance, DomusVi Domicile, la branche d’aide et de soins à domicile
du 2e groupe d’Ehpad commercial français, devient l’un des leaders privés du maintien à domicile.
DomusVi s’installe à domicile
E
t de deux ! Après Orpéa en septembre dernier (lire MMR n°153),
voilà un autre poids lourd du secteur des Ehpad qui fait son
nid dans l’aide et le soin à domicile. La branche domicile de
DomusVi, 2e groupe d’Ehpad commercial français, vient en effet d’acquérir Nurse Alliance, filiale du groupe Assisteo, pour 4 millions d’euros. Mais la comparaison s’arrête là ; car DomusVi Domicile est bien
plus conquérant, aujourd’hui, qu’Orpéa.
D’abord parce que DomusVi n’est pas un débutant dans le secteur du
domicile. Il s’y est lancé dès 1996, via ce qu’il appelait à l’époque ses
Conciergeries. Bon an mal an, son réseau d’agences s’est développé au
fil des années, un peu dans l’ombre, masqué par le formidable boom
de la création d’Ehpad sur laquelle le groupe s’est concentré. Malgré
une rentabilité toute relative de cette activité domicile, DomusVi n’a
pas abandonné pour autant, persuadé qu’il était, dès le départ, de la
nécessité de proposer une offre complémentaire à ses établissements.
Un doublement des activités
« À partir de 2010, date de notre fusion avec Dolcéa, il nous a paru
nécessaire de compléter notre offre d’Ehpad par des résidences ser-
vices et de l’aide et du soin à domicile ; des offres qui concourent toutes
au parcours de santé des personnes âgées et à leur liberté de choix
entre différentes prises en charge », explique aujourd’hui Jean-François Vitoux, président de DomusVi.
Côté résidences services, le groupe a effectivement dans ses cartons
quelques projets pour des ouvertures en 2014-2015, afin de compléter
son parc actuel de 10 établissements.
Côté domicile, il avance beaucoup plus vite. Car le rachat de Nurse
Alliance au groupe Assisteo, officialisé le 6 février dernier, couronne
en fait une série de reprises, celles de deux structures en 2011 et deux
autres en 2012. Mais cette dernière acquisition est évidemment le
fait d’arme le plus spectaculaire, puisqu’elle double, d’un coup, l’activité de DomusVi Domicile. DomusVi Domicile, c’est donc désormais
45 agences (dont 13 Ssiad) sur 26 départements, et 2 millions d’heures
de prestations annoncées. À titre de comparaison, les deux grands
réseaux privés d’aide à domicile, Adhap services et Domidom, revendiquent respectivement 3,5 et 1,5 millions d’heures.
Valérie Lespez
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MMR n°158 I FÉVRIER 2013
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Xxxxxx
Brèves
Xxxxx
Taxe d’habitation :
Agences de l’État :
un couple social/médico-social ? la double imposition
D
ans un récent rapport, l’Igas pointait les « frottements » entre les différentes agences
sanitaires et médico-sociales de l’État (MMR n°153). Le Groupement national des
directeurs généraux d’associations (GNDA) offre un point de vue original, puisqu’il
prône non pas un rapprochement sanitaire/médico-social, mais un rassemblement médicosocial/social. Il propose la création d’une « Haute Autorité de l’action sociale et médicosociale (H2ASMS) », qui reprendrait la fonction d’observation, de développement et de mise
en cohérence des systèmes d’information de l’Observatoire national de l’enfance en danger ou de l’Observatoire de la pauvreté et de l’exclusion sociale ; la fonction d’évaluation et
d’amélioration de la qualité de l’Anesm et du Comité national pour la bientraitance et les
droits des personnes âgées et des personnes handicapées ; la fonction d’analyse de l’efficience
des actions avec la partie médico-sociale de l’Anap ou l’ANSP. Et le GNDA préconise aussi la
création d’une instance de coordination entre cette nouvelle agence et la HAS.
La croisière senior
L
es 5 000 m2 des quais de Saint-Cloud, dans les Hauts-de-Seine, ancien haut lieu politique du Front National, « Le paquebot », pour les intimes, accueillera bien des seniors. François Bouniol, directeur du groupe Repotel-Clinalliance, qui détient 9 Ehpad
et 4 cliniques en Île-de-France, a racheté cet espace pour quelque 9 millions d’euros qui,
assure-t-il dans Le Parisien du 1er février, n’ont pas satisfait l’ex-dirigeant du FN, Jean-Marie
Le Pen ! Le Paquebot sera donc transformé en résidence seniors de 65 appartements de 38 à
50 m2. Au programme : une piscine « presque olympique », aux dires du nouveau propriétaire, une salle de sport avec coach, un salon, un bar, une bibliothèque, un restaurant diététique et même une voiture électrique permettant aux nouveaux locataires du Paquebot de se
rendre dans le centre-ville de Saint-Cloud. Le montant des travaux, qui doivent commencer
d’ici deux mois, s’élève à 10 millions d’euros. Car il y a du boulot, si l’on en croit François
Bouniol : « Tout est à refaire ! Les planchers, le double vitrage, les murs… on ne gardera que
les fondations ». La future résidence doit être livrée fin 2014.
peut être allégée
D
ans notre série « L’Ehpad est-il un domicile ? », les services fiscaux répondent
oui… l’Ehpad pouvant même être considéré comme une résidence secondaire. En septembre dernier, le député PS du Pas-de-Calais,
Michel Lefait, interrogeait le ministère de l’Économie et des Finances sur la double imposition
pesant sur les couples dont l’un des conjoints est
hébergé en Ehpad, alors que l’autre demeure au
domicile.
Redevables de deux taxes d’habitation, celle
de la résidence principale et celle de l’Ehpad,
considéré donc fiscalement comme une résidence secondaire, les couples, en particulier
les plus modestes, rencontrent d’évidentes difficultés, expliquait le député, qui demandait
« par exemple [d’]établir une dérogation au
paiement de la taxe d’habitation en maison de
retraite dès lors qu’elle est acquittée au titre de
la résidence principale ». Réponse du ministère, le 22 janvier au JO : non, pas de dérogation, mais une exonération ou un allègement de
la taxe d’habitation de la résidence principale,
sous réserve que la personne entrée en Ehpad
(ou en SSR) remplisse les conditions d’âge, de
cohabitation et de revenus ouvrant droit à cet
allégement ou cette exonération…
Message aux vieux : soulagez la Sécu, dépêchez-vous de mourir !
«L
a problématique des dépenses faramineuses en gériatrie
ne sera résolue que si vous incitez [les personnes âgées] à
se dépêcher de mourir » : telle est la solution qu’a prônée
le vice-Premier ministre chargé des Finances du Japon, Taro Aso, le
21 janvier, devant le Conseil national sur la réforme de la Sécurité
sociale nippone, pour réduire les dépenses de santé. Et celui qui est
aussi ancien Premier ministre (et qui frise lui-même les 72 ans), toujours sur la même veine poétique, d’en appeler aux Cieux : « Que Dieu
vous préserve de continuer à vivre alors que vous voulez mourir.
Je ne pourrais pas me réveiller le matin en sachant que ces l’État
qui paie tout cela pour moi. » Nul doute qu’il ne connaîtra pas ce
malheur, lui qui a d’ores et déjà laissé une lettre à ses proches, dans
laquelle il demande à sa famille de refuser tout traitement médical
pour le maintenir en vie.
Fort heureusement, Taro Aso, apparemment coutumier du fait, s’est
rétracté dès le lendemain dans un communiqué, reconnaissant avoir
tenu des propos « inappropriés », qui ne reflétaient « que son opinion personnelle ». Au pays du Soleil Levant, où l’espérance de vie
est de 85,9 ans (chiffres de 2011), où près d’un quart des 128 millions
d’habitants a plus de 60 ans, cette sortie d’un haut dirigeant politique
est pour le moins ... irrévérencieuse.
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
e dossier
13
Alerte enlèvement
de vue
© milosluz ; Andrey Kuzmin ; ralko - Fotolia. Montage : Patrick Dagonnot.
Vous en avez entendu parler. Puis,
silence radio ou, dans certains cas,
faibles grésillements lointains. Le Mensuel des Maisons de Retraite a coiffé
la casquette de Sherlock Holmes pour
pister les décrets, les arrêtés, les travaux pouvoirs publics/ fédérations, les
expérimentations, restés coincés dans
les tiroirs de l’État. Dommage que la Direction générale de la cohésion sociale
(DGCS), sollicitée à maintes reprises,
n’ait pas voulu jouer le rôle du fidèle
Watson. Voici donc la longue liste des
disparitions inquiétantes…
Dossier réalisé par Nadia Graradji
1
L
a réforme de la tarification des Ehpad semble être une zone de
navigation à risques pour les pouvoirs publics. Phénomène
étrange, plusieurs projets engagés dans ces eaux-là ont disparu
du radar. Si la balise du décret tarifaire n’émet plus, d’autres travaux
rament, tanguent ou coulent à pic.
De tous les textes coincés dans les
tuyaux, le décret tarifaire est le
plus attendu par le secteur. C’est
l’Illustre disparu ! Un vrai scandale. La patate chaude que les ministres successifs chargés du secteur se refilent depuis 2009. On ne compte plus les avis de recherche
publiés dans le MMR à ce sujet. Sortira, sortira pas , les années passent.
Le suspens devient de l’enfumage, surtout après le fiasco des débats
sur le cinquième risque. « Le décret tarifaire est la pièce maîtresse
qui a été enterrée à tort. C’est le texte qu’il faut absolument remettre à
l’ordre du jour », martèle Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale
du Synerpa. Avec plus de trois ans de retard, l’État semble ne plus se
Avis de recherche :
Le décret relatif à
la tarification des Ehpad
souvenir de la jurisprudence du Conseil d’État en matière de « délais
raisonnables » pour la publication des textes réglementaires. Une amnésie qui n’est pas du goût des fédérations. Dès sa nomination au ministère délégué aux Personnes âgées et à l’Autonomie, Michèle Delaunay a
démontré qu’une patate peut rester chaude bien longtemps. « À chaque
fois que l’on aborde la question de la
tarification, la ministre renvoie à la
Didier Sapy,
future loi sur le vieillissement. Mais
directeur de la Fnaqpa.
pendant les travaux, la vente continue. Une réforme de la tarification,
ça demande du temps. Les dispositifs législatifs et réglementaires
existants ne sont pas mis en œuvre.
La convergence tarifaire était un
volet de la réforme. On attend toujours la contrepartie, la tarification
à la ressource. L’État ne joue pas le
jeu du donnant-donnant », s’exaspère Didier Sapy, directeur de la
Fnaqpa.
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Tarification : Le triangle des Bermudes
Ce sujet a fait l’objet de passes
d’armes dès les débats parlementaires. Et rétrospectivement, on
aurait tout lieu de penser : « tout
ça pour ça ? ». Car l’article 67 de
la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2012 est bien
parti pour faire “pschitt”. L’idée,
portée par Roselyne Bachelot,
alors ministre des Solidarités et
de la Cohésion sociale, était d’introduire une majoration du forfait global en fonction d’indicateurs de qualité et d’efficience.
Avis de recherche :
L’expérimentation
d’une majoration de
la dotation soins en
fonction d’indicateurs
de qualité
Avant de lancer cette expérimentation d’une durée de trois ans, fin 2012
– en vue d’une généralisation en 2015 – un décret en Conseil d’État
devait définir le cahier des charges de l’expérimentation et un autre
décret fixait la liste des indicateurs. C’est sur la pointe des pieds que les
fédérations se sont rendues, tout au long de l’année 2012, aux réunions
de travail avec la DGCS. Car d’avis unanime, il eût été préférable de publier le décret tarifaire avant d’engager cette réflexion. « Les échanges
avec la DGCS ont été très fournis mais avec des avis divergents sur les
indicateurs qualité. Il paraît difficile de calquer le concept hospitalier
sur les Ehpad avec des logiques lourdes de recueil des données », juge
René Caillet, responsable du pole santé social à la FHF. La dernière réunion s’est tenue à la mi-novembre 2012. « La DGCS nous a annoncé
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des nou
de…
L’étude nationale de coûts
ATIH/CNSA/DGCS
L
’Agence technique
de l’information sur
l’hospitalisation
(ATIH), vous connaissez ?
Ce spécialiste des études
de coûts dans le sanitaire
fait ses premiers pas dans
le secteur médico-social.
Commande lui a été passée
de réaliser une enquête nationale des coûts des Ehpad. Des travaux ont débuté en 2012… non
sans retard. Les membres du comité de pilotage (CNSA, DGCS,
DSS, Cnam, ATIH, syndicats et fédérations gestionnaires) se sont
rassemblés à trois reprises et sept comités techniques se sont réunis. Objectif de cette étude : évaluer la corrélation entre le service
rendu par les établissements et services et l’allocation de leurs ressources d’assurance maladie.
Pour Roselyne Bachelot, en son temps, les résultats de cette étude
étaient un élément de réflexion nécessaire avant d’ouvrir à nouveau le tarif global. « L’échantillon de l’étude sera composé de 80
à 100 d’Ehpad tarifiés au GMPS, dont la coupe Pathos a été validée en 2010 ou en 2011. L’objectif est de mettre en relation l’activité (hôtellerie, soins, vie sociale, accompagnement) par rapport
à la mesure du coût d’exploitation. Les données porteront sur
10 journées d’activité, de juin à novembre 2013. Les résultats de
l’étude seront connus début 2014. Cette étude flash est une première marche vers l’étude nationale de coûts », explique Frédéric Quichon, chargé d’études financières au service valorisation
et synthèse pôle ENC, ATIH. Voilà pour la leçon de comptabilité
analytique. Mais sur l’objectif visé par l’étude, voire même sur sa
nécessité, c’est loin d’être clair pour tout le monde. « Quelle est la
finalité de cette étude ? Est-ce la tarification ? Nous n’avons pas la
réponse de la DGCS à cette question », souligne Adeline Leberche
(Fehap). « Cette étude a été engagée trop tard, c’est un travail purement comptable », considère Alain Villez, conseiller technique
personnes âgées à l’Uniopss. En effet, l’État qui souhaite définir sa
loi sur le vieillissement dès 2013 ne pourrait pas l’exploiter.
14
que le gouvernement allait déposer
René Caillet, responsable du
un amendement au PLFSS 2013 pour
pôle santé social à la FHF.
modifier l’article 67. Et que nous allions
retravailler les indicateurs et la méthodologie de l’expérimentation dans ce
cadre. Une proposition que nous avons
refusé », explique Adeline Leberche, directrice du secteur social et médico-social à la Fehap. Le gouvernement a bien
tenté de diluer ces travaux dans une
refonte globale de la tarification. Mais
l’amendement (cavalier législatif) a été
retoqué par le Conseil constitutionnel.
Et depuis… disparition du radar de ce
dossier reporté sine die. « La DGCS
semble embarrassée par cette commande du précédent gouvernement », estime René Caillet.
Pour l’heure donc, aucune date dans l’agenda de la DGCS n’a été fixée
pour reprendre les discussions. « Elles peuvent reprendre sur la définition d’indicateurs qualité mais sans lien avec une majoration de
la dotation soins. Rien n’a été prévu dans la LFSS 2013 pour financer ces expérimentations », souligne Alain Villez, conseiller technique
personnes âgées à l’Uniopss. Pourtant, question gros sous, 3 millions
d’euros ont été programmés pour financer ces expérimentations dans le
budget prévisionnel 2013 de la CNSA adopté en novembre dernier. En
voilà quelques-uns de plus qui ne seront pas dépensés…
Avant le 30 juin 2012, le gouvernement devait remettre un
rapport au Parlement sur le différentiel de charges sociales et
fiscales des Ehpad selon leur statut juridique (public, privé à but
non lucratif, commercial). C’est
ce qui était en tous cas prévu
par l’article 71 de la LFSS 2012 (encore elle). Ces travaux devaient également concerner les Ssiad. Une étude qui, on s’en doute, tient tout
particulièrement au cœur de
la Fehap. « Y a-t-il distorsion
ou équité de traitement entre
les établissements ? Qui paye
quoi en fonction de son statut
juridique ? Cette étude visait à
être une opération vérité. Une
mission Igas/IGF a été mise en
place au printemps 2012, mais
nous n’avons aucune connaissance de l’issue de son travail.
Le rapport a-t-il bien été rendu
au gouvernement ? Là aussi,
aucune information », déplore
Adeline Leberche, directrice du
secteur social et médico-social
de la fédération.
Avis de recherche :
L’étude sur le
différentiel de charges
sociales et fiscales
des Ehpad
Y a-t-il
distorsion ou équité
de traitement entre
les établissements ?
Qui paye quoi en
fonction de son
statut juridique ?
Avis de recherche :
L’obligation de
signer un Cpom pour
les Ehpad à partir d’un
certain seuil
La loi HPST du 21 juillet 2009 a
introduit une obligation de signature d’un Cpom pour les Ehpad.
Un arrêté devait en définir le seuil.
32 mois après la publication de la
loi HPST, toujours rien, ce texte n’a
toujours pas été publié.
L’Assemblée des départements de France (ADF), sous la plume de
Jean-Pierre Hardy, son chef de service Politiques sociales, grand
« Cpomophile » du secteur, avait rappelé l’importance de publier cet arrêté. « Dans le secteur des Ehpad, ces Cpom permettraient des économies d’échelle sur les fonctions supports (restauration, administration
générale, entretien des locaux) qui sont les composantes principales
des tarifs hébergement et diminueraient le nombre de budgets an-
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
e dossier
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
e dossier
nexes. Ces Cpom offriraient aux départements la possibilité de mieux
maitriser les dépenses d’hébergement et donc le reste à charge des résidents ». Cet argument fera-t-il tilt dans la tête de la ministre qui souhaite lancer une réflexion sur l’augmentation des tarifs hébergement ?
© Valérie Lespez - EHPA Presse
En tous les cas, lors de son audition devant le Sénat le 7 novembre dernier, Michèle Delaunay considérait que la publication de l’arrêté n’était
pas une urgence : « Compte tenu du caractère très contraignant de
cette procédure, nous préférons que le dispositif demeure volontaire
tant que nous n’avons pas procédé à une réforme de la tarification. »
Donc, si on a bien compris, rien ne sort tant qu’il n’y a pas de réforme
de la tarification. Et pas de réforme de la tarification tant que le gouvernement ne lance pas le chantier
de la loi sur le vieillissement. Et
tout ça avant fin 2013…
Adeline
Leberche,
directrice
du secteur
social et
médicosocial de la
Fehap.
Mais sur la nécessité de publier
cet arrêté, les avis sont partagés.
« Le secteur personnes âgées
n’est pas prêt à se voir imposer
le Cpom. Il faut laisser le terrain s’approprier les outils »,
considère Didier Sapy, directeur
de la Fnaqpa. Un point de vue
que ne partage absolument pas
2
15
Adeline Leberche (Fehap) : « Les directeurs sont prêts ! Le Cpom permet une visibilité pluriannuelle sur cinq ans, une souplesse de gestion.
En le rendant obligatoire, les autorités de tutelle seront tenues de travailler avec les Ehpad qui souhaitent s’engager dans cette voie. Mais la
définition du seuil est importante. Il ne faut pas faire basculer la totalité
du secteur dans le Cpom obligatoire, mais commencer par les établissements qui ont des capacités de mutualisation importante pour aller
progressivement vers les Ehpad d’envergure plus modeste. »
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de…
Du neuf pour les logements foyers
L
e guide de bonnes pratiques des logements foyers
devrait bientôt être publié. La DGCS avait annoncé sa
sortie pour le premier trimestre 2013. « Le document
fait la navette entre la DGCS et la Cnav pour relecture », précise
l’Unccas. D’avis unanime, ce texte ne sera qu’un lot de consolation
pour faire passer la pilule de l’abandon des travaux sur le cahier
des charges. Aux dernières nouvelles, on ne sait toujours pas sous
quelle forme il sera publié. « Une recommandation de l’Anesm ? »,
s’interroge Alain Villez (Uniopss).
L
’Etat ne manque pas d’inspiration pour améliorer les soins en
Ehpad. Rien qu’en 2013, on peut citer l’expérimentation des parcours de santé et du partenariat Ehpad/hôpital ; la mission sur la
prise en charge médicamenteuse ; la poursuite des travaux de la commission scientifique sur Pathos et Aggir. C’est prometteur. Mais une
piqûre de rappel s’impose sur les dossiers, jugés prometteurs en leur
temps, qui sont aujourd’hui en coma profond.
Disparue, évaporée, volatilisée...
sans laisser de traces. Le mystère est complet. Qu’est devenue l’expérimentation de la présence d’infirmières de nuit dans
les Ehpad, prévue dans le programme de développement des
soins palliatifs 2008-2012 ? Aucune fédération du secteur n’a d’information à ce sujet.
Avis de recherche :
L’expérimentation
de la présence d’infirmières de nuit en Ehpad
Et pourtant, on n’a pas rêvé. L’annexe 5 de la circulaire budgétaire 2010
précisait bien aux Agences régionales de santé (ARS) la méthodologie à
suivre pour lancer cette expérimentation de six mois à compter de juillet 2010. La comparaison devait porter sur trois modes d’organisation :
les Ehpad disposant d’infirmier de nuit (sur place et de façon permanente), ceux mettant en place une astreinte opérationnelle d’infirmier
de nuit et ceux, enfin, ne disposant d’aucun temps disponible d’infirmier la nuit. En voilà une étude intéressante pour inspirer la réflexion
des pouvoirs publics sur les moyens de réduire ou d’éviter l’admission
en catastrophe des personnes âgées dépendantes aux urgences. En
voilà une étude intéressante pour mieux définir la prise en charge palliative en Ehpad. Sauf que… personne ne sait ce qu’elle est devenue.
Pour le Dr Michel Salom, président du syndicat national de la gérontologie clinique (SNGC), le coupable est tout désigné ; la Direction générale de l’offre des soins : « C’est la DGOS qui bloque ce dossier. Selon
elle, une étude a été menée sur la présence des infirmières de nuit en
Ehpad et aucun gain particulier n’a été constaté sur le nombre d’hospitalisations des résidents. Mais quand on demande à voir cette fameuse étude, il n’y a plus de réponse !, tempête-t-il. Les ARS sont partisanes de la présence des infirmières de nuit en Ehpad pour limiter
et contrôler le flux des personnes
âgées aux urgences. Expérimentons afin d’avoir des éléments
sur les taux d’hospitalisations
comparés ». Justement, c’est le
choix fait par l’ARS Île-de-France
en 2011 et plus récemment par
l’ARS Pays de Loire. Objectif : expérimenter des astreintes d’infirmières de nuit mutualisées entre
plusieurs Ehpad. Quelle pertinence sur les hospitalisations non
programmées la nuit ? On pourra
s’en faire une idée d’ici deux ou
trois ans. Pour Florence ArnaizDr Michel Salom,
Maumé (Synerpa), il faut surtout
président du SNGC.
renforcer les moyens en personnel
soignant : « Renforcer le niveau
d’aides soignants et d’infirmières,
augmenter le temps de présence du médecin coordonnateur. Si l’assurance maladie veut éviter les hospitalisations des résidents grâce à la
présence d’infirmières de nuit, qu’elle le finance. Ce n’est pas à nous
d’arbitrer. »
Qui peut dire aujourd’hui quel
pourcentage de médecins libéraux a signé une convention
avec un Ehpad ? Pas le gouvernement en tous cas, car le bilan
officiel qui devait être rendu fin
2012 n’a pas été établi. Faute de
données, le secteur a recours à l’estimation au doigt mouillé. Grosso
modo, il y aurait 20 à 30 % de médecins signataires. En somme, pas
de décollage en vue, l’estimation était sensiblement la même en 2011.
« C’est un flop. Les Ehpad qui ont passé les 50 % de conventions se
comptent sur les doigts d’une main », évalue Alain Villez, conseiller
technique personnes âgées à l’Uniopss. Même le SMC-Ehpad, syndicat des médecins coordonnateurs en Ehpad qui, en avril 2012, s’était
Avis de recherche :
le bilan des signatures des conventions
médecins libéraux/Ehpad
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Soins : Z’avez pas vu Mirza ?
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
e dossier
Avis de recherche :
A
le décret PDA
et la convention
officine/ Ehpad
3
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alors secrétaire d’Etat chargée
de la Santé déclarait « que ces
textes avaient été signés par
les ministres chargés de
la Santé et de la Cohésion
sociale. Ils devraient être
publiés au Journal Officiel
dans les prochains jours ».
On attend toujours. Et c’est
peu dire que l’impatience
est grande. Le 18 février, lors
de la première réunion du
comité de suivi de la mission
Verger, plus d’une cinquantaine
de personnes étaient présentes : ordres professionnels, syndicats de
pharmaciens, syndicats de médecins libéraux, fédération des médecins
coordonnateurs en Ehpad, CNSA, HAS, ARS, Igas…
insurgé, dans un communiqué de presse contre des estimations jugées
trop faibles, arrive aujourd’hui au même constat.
Ah, le médicament en Ehpad ! En
voilà un dossier tentaculaire. Vous le
savez, l’expérimentation de la réintégration des médicaments dans le forfait soins des Ehpad sans PUI a fini
au classement vertical, en novembre
dernier. Et le rapport de l’Igas, Michel Thierry, classé dans les étagères
à côté de celui de Pierre Naves et Muriel Dahan. C’est maintenant Philippe Verger, directeur adjoint du CHU de Limoges, qui est le nouveau
Monsieur Médicament nommé par Michèle Delaunay. Sa mission : glaner les bonnes pratiques dans la prise en charge médicamenteuse. Son
rapport est attendu en septembre 2013. Quatre groupes de travail ont
été installés, le 18 février. Au programme : agir sur la prescription grâce
à l’amélioration des pratiques professionnelles ; travailler ensemble : clarifier les rôles des professionnels et
renforcer la coopération ; intégrer le
circuit du médicament dans une organisation du travail adaptée ; maîtriser
et piloter le circuit du médicament en
Michel
Ehpad grâce aux systèmes d’inforThierry,
mation. Une occasion en or pour les
Igas,
groupes de travail de reparler de deux
auteur d’un
textes dont la publication imminente
rapport sur
a été annoncée puis repoussée : le
l’expéridécret PDA (préparation des doses à
mentation
administrer) et la convention officine/
médicalent.
Ehpad. En juillet 2011, Nora Berra,
16
Et aussi…
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Le projet de loi de protection des consommateurs
Changement de gouvernement oblige, le projet de loi de protection des consommateurs concocté par l’ancien secrétaire d’État à la Consommation, Frédéric
Lefebvre, est tombé aux oubliettes. Ce texte comprenait un article visant à interdire la facturation par les établissements de prestations d’hébergement non
délivrées du fait du décès de la personne hébergée. Au programme également :
l’interdiction des frais de remise en état des locaux, le gouvernement soulignant
que ces frais sont exigés sans qu’aucun état des lieux d’entrée et/ou de sortie
n’ait été établi. Ces mesures pourraient-elles revenir sur la table à l’occasion
du projet de loi sur la consommation préparé par Benoit Hamon, ministre de
l’Économie sociale et solidaire et de la Consommation ?
La quantité ne fait pas la qualité
Une révolution est attendue dans
les cuisines des Ehpad à partir du
1er juillet prochain. Pas de quoi
faire saliver les directeurs, bien
au contraire. Tout a commencé
en janvier 2012, par la publication
du décret qui fixe les principes
que doivent respecter les services de restauration des établissements
sociaux et médico-sociaux pour « assurer une qualité nutritionnelle
suffisante des repas ». L’arrêté qui en définit les exigences n’est toujours pas publié. Une chance ! Le fameux décret sur la qualité nutritionnelle des repas a été difficile à avaler pour les fédérations du
secteur. D’abord, il a été concocté sans concertation par le ministère
de l’Agriculture. On imagine à quel point ce ministère a une connaissance approfondie des Ehpad… Ça c’est pour la forme. Ensuite, ce
texte prévoit qu’un établissement doit proposer aux résidents « 4 ou
5 plats à chaque déjeuner et repas ». Ça c’est pour le fonds. Plusieurs
fédérations (Fehap, FHF, Synerpa) ont déposé, en mars 2012, un recours devant le Conseil d’État pour annuler ce décret. Chou blanc. Recours rejeté en novembre dernier. « Servir 4 à 5 plats par repas, cela
signifie, pour un établissement, externaliser de façon systématique
la production des repas. C’est trop coûteux et cela n’est pas envisageable avec des budgets gérés au cordeau. On ne peut pas transposer aux Ehpad le principe des plateformes hospitalières qui servent
des milliers de repas. Il faut adapter les textes à la réalité des Ehpad.
Être en phase avec le réel », critique René Caillet, responsable du
pôle santé social à la FHF.
Avis de recherche :
l’arrêté sur la
qualité nutritionnelle
des repas en Ehpad
Raison de plus pour le secteur d’être à la
table des discussions quand l’arrêté sera
sur le feu. Un rendez-vous a été demandé
avec Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture. Les discussions porteront sur
un point de sémantique important. Que
faut-il entendre par « plat » ? « Si l’arrêté
qui concernera le secteur médico-social
ressemble à celui publié pour la restauration scolaire, nous serons rassurés.
À savoir que par 4 ou 5 plats, il faut
entendre un plat principal, une garniture, un produit laitier et au choix, une
entrée et/ou un dessert », insiste Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale
du Synerpa.
Attendezr
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des nou
de…
Florence Arnaiz-Maumé,
déléguée générale du
Synerpa.
Du neuf pour l’évaluation externe
C
haque directeur d’établissement bien informé le sait,
la date limite pour rendre le rapport d’évaluation externe, c’est le 3 juillet 2015. Un décret publié en janvier 2012 reconnaît aux Ehpad que certaines démarches de certification peuvent être prises en compte dans le cadre de l’évaluation
externe. C’est une bonne chose. Mais on attend toujours l’arrêté
qui doit définir cette correspondance entre les certifications Afnor
et Qualicert et l’évaluation externe. Il est prêt à sortir des tuyaux.
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
L
es textes qui bornent la qualité en Ehpad, le secteur n’en manque
pas. Certains sont encore en attente de publication. Vous reprendrez bien une louche de législation ?
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
17
4
I
l y a les jours avec. Les jours où la DGCS et les fédérations du secteur
se retrouvent autour de la table pour discuter. Et puis il y a les jours
sans. Les jours où les groupes de travail disparaissent. Voici la série
des dossiers reportés… aux calendes grecques.
Quand est-ce qu’on discute ?
NE Le cahier des charges
PAS
déranger
et la tarification de l’hébergement temporaire
Interrogé en novembre dernier par le MMR, le Dr Jean-Philippe Flouzat, alors gériatre et conseiller technique de la DGCS, reconnaissait bien
la nécessité de reprendre la réflexion sur l’hébergement temporaire
dans le cadre du Plan Alzheimer : « Un groupe de travail doit définir
des modalités plus précises. Ce groupe comprendra des personnes qui
ont un dispositif qui fonctionne. Certes, le secteur est en attente d’un
modèle de tarification, mais avant de tarifer, il faut savoir ce que l’on
met dans l’hébergement temporaire, quelles sont les activités proposées, quels professionnels. » La DGCS a donc bien conscience qu’il faut
travailler sur un cahier des charges et une tarification adaptée à l’hébergement temporaire. Mais pour Alain Villez, conseiller technique personnes âgées de l’Uniopss, la parole publique se résume, pour l’heure,
à « y a qu’a, faut qu’on » : « J’ai rappelé l’urgence de ce dossier à Joël
Ankri, chargé de la mission d’évaluation du plan Alzheimer en vue de
sa prolongation. » Michèle Delaunay, qui compte faire du maintien à
domicile, l’axe fort de sa future loi sur le vieillissement, prendra-t-elle
en compte l’hébergement temporaire dans sa réflexion ?
les fédérations (entre autres l’Uniopss
et l’Unccas) réclamaient la poursuite
des travaux – amorcés en septembre
2011 et stoppés net au printemps 2012
– sur l’adaptation du cadre législatif et
réglementaire des logements foyers.
L’objectif du groupe de travail était de
réfléchir à l’élaboration d’un contrat de
séjour unique permettant d’harmoniser
les dispositions du CASF et du CCH et
celles du conventionnement APL. « La
poursuite des travaux engagés depuis
septembre 2011 est primordiale. Il se- Sabine Fourcade, la direcrait regrettable de perdre, une nouvelle trice générale de la cohésion
fois, à l’instar du rapport Grunspan de sociale est demandée en salle
2002, les bénéfices de toute la réflexion de réunion.
engagée », conclut le courrier. Et Didier
Sapy, directeur de la Fnaqpa d’insister :
« À l’heure actuelle, quoiqu’ils fassent,
les logements foyers sont hors la loi. Soit ils contreviennent au CASF,
soit ils contreviennent au CCH. Les deux ministères n’arrivent pas à
travailler ensemble. En plus, maintenant il faut compter avec Bercy.
Il est urgent que la DGCS rouvre ce chantier. »
Le 13 février dernier, une réunion s’est tenue à l’initiative de la Cnav
pour préparer un cahier des doléances et solliciter à nouveau l’État sur
ce dossier. Partie prenante dans ce dossier, la Cnav pourrait davantage
peser dans la balance qu’un cartel de gestionnaires.
Quand est-ce qu’on discute ?
NE Logements foyers : l’harmonisation
PAS
déranger
CCC/CASF/Code de l’habitat de la construction
Les logements foyers sont soumis à trois réglementations : le code de
l’action sociale et des familles (CASF) et le code de la construction et
de l’habitation (CCH) et le code de la consommation (CCC). Des réglementations antinomiques et contradictoires. Bienvenue dans le monde
d’Ubu. À ma droite, l’article L.633-2 du CCH stipule que les occupants
de logements foyers disposent d’un contrat écrit d’un mois renouvelable tacitement. À ma gauche, l’article L.342-2 du code de l’action
sociale et des familles qui prévoit un « contrat de séjour » à durée
indéterminée. Conséquence, le locataire doit signer deux contrats :
un contrat de séjour pour toujours et un contrat d’occupation pour
un mois, afin de répondre aux exigences respectives du CASF et du
CCH. S’ajoute à cela l’éventuel conventionnement APL, par lequel on
relève aussitôt du CCC. Dans un courrier en date de décembre 2012,
adressé à Sabine Fourcade, directrice générale de la cohésion sociale,
Quand est-ce qu’on discute ?
NE Les dérogations tarifaires des petites unités de vie
PAS
déranger
Les petites unités de vie (PUV) – établissements de moins de
25 places – bénéficient d’une dérogation à l’obligation de négocier une
convention tripartite dès lors que leur GMP excède 300. Cette dérogation, fixée par le décret du 10 février 2005, repose sur un droit d’option
entre trois solutions : signer une convention pluriannuelle et devenir
un Ehpad ; bénéficier d’un forfait journalier de soins ; faire intervenir un service de soins infirmiers à domicile (Ssiad) pour les résidents
ayant une prescription médicale. « Cette option courait sur une période de 5 ans, sans que la réglementation ne prévoie ni la possibilité
de changer d’option pendant la durée des 5 ans ni les modalités de
reconduction de cette option au-delà des 5 ans », explique l’Uniopss.
Depuis 2011, les droits d’option sont tombés, l’incertitude la plus
grande plane pour les PUV. L’Uniopss et la MSA ont alerté la DGCS sur
l’urgent besoin d’assurer une sécurisation juridique pour ces établissements. Toujours pas de réponse à ce jour.
Et aussi…
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
La mesure 39 du plan Alzheimer
« C’est un vilain petit canard que l’on espère
bien ne pas voir réapparaître », commente David Causse, coordonnateur du pôle santé-social
de la Fehap. En 2009 un projet de texte ministériel visait à donner une assise juridique à des
décisions restrictives de liberté que pourraient
prendre un directeur d’Ehpad à l’égard d’une
David
personne atteinte de la maladie d’Alzheimer
Causse,
dont les troubles rendraient la vie en collectiFehap.
vité difficile. Source d’inspiration de ce projet de
texte, la mesure 39 du plan Alzheimer qui vise
au lancement d’une réflexion sur le statut juridique de la personne atteinte de
la maladie d’Alzheimer en établissement : « La prise en charge de la personne
atteinte peut conduire – dans son intérêt – à recourir à des techniques restreignant gravement ses libertés (unité fermée, bracelets magnétiques, ceintures de
contention) ». En juin 2011, l’Espace éthique Alzheimer a saisi le Comité consultatif national d’éthique (CCNE). « Entre sécurité de la personne, surveillance à distance pour favoriser des interventions si nécessaire, et captation de ses activités
dans sa sphère privée, mise en cause de ses libertés dans le cadre d’un contrôle,
l’équilibre paraît parfois incertain. Il convient de préciser un cadre qui, dans la
singularité des situations générées par la maladie d’Alzheimer, ne saurait se limiter aux grands principes que s’efforce d’accompagner la Cnil », argumentait-il.
L’Avis du CCNE était attendu pour le fin 2012… Michèle Delaunay, ministre des
Personnes Âgées et de l’Autonomie, a récemment réouvert ce débat – encore et
toujours d’actualité - entre liberté d’aller et venir et sécurité des résidents atteint
d’Alzheimer (lire page 6 et 19).
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
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Ce prix comprend la formation,
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n direct des établissements
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
19
Bonnes pratiques
Comment concilier liberté d’aller et venir et sécurité des résidents ? Cette question est violemment redevenue d’actualité,
avec la série de faits divers entrainant la mort de personnes âgées ayant quitté leur hôpital ou leur Ehpad. Le Mensuel des
Maisons de Retraite est allé voir dans un établissement francilien comment cette problématique était appréhendée. Entre
éthique et technique, voici la vision de l’équipe des Terrasses de Meudon, que nous avons rencontrée le 20 février dernier.
Liberté
d’aller et venir :
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Ethique et TIC
à Meudon
s’est toujours bien terminé. « Mais on est toujours très modeste, reconnaît Thierry Hannesse. Nous ne sommes jamais à l’abri d’un drame
comme il en est arrivé ces dernières semaines dans un hôpital gériatrique parisien… »
Thierry Hannesse, directeur
des « Terrasses de Meudon ».
Les professionnels des Ehpad ont tous une anecdote à raconter quand
vous les interrogez sur les risques de « fugue » ou d’errance de leurs
résidents. Aux Terrasses de Meudon, cet établissement associatif de
65 lits du groupe Arepa, installé dans un quartier résidentiel de cette
ville aisée des Hauts-de-Seine, l’équipe en discute avec le sourire, malgré la panique et la désorganisation engendrées sur le moment, car tout
Le travail en équipe, indispensable
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
«T
u te souviens ce jour où
tu m’as appelé à 21h pour
me dire qu’un résident
avait disparu ? En fait, il était allé
voir les travaux d’à côté ! », se remémore, avec une collègue infirmière,
Yann Jalicoux, infirmier coordonnateur de l’Ehpad Les Terrasses
de Meudon. « Un jour, je reçois un
appel : Vous n’auriez pas perdu
quelqu’un ? C’était une personne
dans la rue, qui était avec une vieille
dame visiblement désorientée. Cette
dame n’était pas de chez nous, mais
je l’ai ramenée à l’établissement et
passé des coups de fil à mes confrères
du coin. Et effectivement, elle était
partie d’un établissement voisin »,
raconte Thierry Hannesse, le directeur de l’Ehpad.
Même si, aux Terrasses de Meudon comme ailleurs, « le risque zéro
n’existe pas », rappellent en cœur le directeur, l’infirmier coordonnateur et la psychologue, Estèle Jaquet, l’établissement s’est doté de
quelques garde-fous pour tenter d’éviter les fugues ou les errances de
ses résidents. « Fugue et errance, ce n’est pas la même chose, rappelle
Estèle Jaquet. En général, plus que vouloir quitter l’établissement, les
résidents ont surtout envie de se promener, et ne sont pas capables de
retrouver le chemin de l’Ehpad. »
En tout cas, pour éviter les fugues, il faut… éviter les fugueurs. Comme
71% des Ehpad, selon la dernière enquête de la Fondation Médéric
Alzheimer, l’établissement meudonnais reconnait limiter les admissions. « Nous faisons en fonction des moyens que nous avons, s’excuse
presque Thierry Hannesse, le directeur. Nous ne pouvons pas accueillir
les personnes qui développent déjà des syndromes violents, celles qui
sont déjà fugueuses, et les extrêmes fins de vie. Même si, évidemment,
nous prenons en charge jusqu’au maximum de nos capacités, et en
général jusqu’au bout, les personnes qui développeraient ces troubles
chez nous ou les fins de vie de nos résidents. » Du coup, dans cet
Ehpad, « même si un incident peut se produire avec n’importe lequel
n direct des établissements
Ensuite ? Ensuite, « c’est notre
métier de mettre le curseur au
bon endroit entre le respect
des libertés de la personne et
sa protection, ajoute Thierry
Hannesse. Même si ce sont
parfois deux éléments antinomiques. Et ce n’est évidemment
pas le seul fait du directeur. » Le travail en équipe, sur ce sujet qui mêle
éthique, bon sens et petites astuces, est indispensable. Classiquement,
« en équipe, nous essayons de trouver le projet personnalisé le plus
adapté, avec le résident et la famille, relève ainsi Estèle Jaquet. Par
exemple, pour palier au fait que certains résidents aient des difficultés
à aller et venir seuls, nous mettons en place des promenades organisées. » Et justement, alors que les odeurs du déjeuner commencent à
envahir le salon de l’Ehpad, contigu à la salle à manger, deux résidents
rentrent d’une petite balade en ville, aux bras de bénévoles.
« Sur ce sujet en particulier, comme en gériatrie tout court, d’ailleurs,
il n’y a pas de recette miracle, reconnaît Estèle Jaquet. Ce qui fonctionne avec une personne ne marchera pas forcément avec une autre.
On doit toujours chercher, réfléchir, se renouveler. » Et utiliser des
petits trucs ; ne jamais dire, par exemple, « vous n’avez pas le droit
de sortir », puisqu’évidemment, les résidents d’Ehpad ont le droit de
sortir, mais tenter de détourner l’attention par un « rentrons ensemble
prendre votre manteau », qui, bien souvent, fait oublier la raison de la
sortie, voire la sortie tout court.
En tout cas, « il faut savoir raison garder », estime Thierry Hannesse,
pour éviter les excès dans un sens comme dans l’autre. Liberté d’aller
© Photos - Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Le système anti-fugue
Une montre « appel résident »
avec une fonction anti-fugue en
option, mise en service après
discussion collégiale au sein de
l’Ehpad et concertation avec la
famille et le résident.
Une alerte anti-fugue sur les
téléphones du personnel dès que
le résident passe sous un capteur à la sortie de l’Ehpad.
Un système qui centralise dans
un ordinateur dédié, à l’infirmerie, toutes les données concernant les porteurs de la montre.
et venir, oui, au maximum, mais ne jamais oublier que « vous et moi
qui n’avons pas de troubles cognitifs, ne sommes jamais complètement libres d’aller et venir ! Il y a des endroits qui nous sont interdits,
c’est comme ça. » À l’inverse, « pas question d’embêter inutilement
les personnes qui ne sont pas à risque. Pas question de généralisation des systèmes de protection pour ceux qui n’en ont pas besoin ».
La preuve avec ce résident, qui s’est mis en frais ce midi, et qui, alors
que tout le monde se presse vers la salle à manger, s’apprête à quitter
l’établissement. « Vous partez M. Martin* ? », demande amicalement
le directeur. « J’ai un rendez-vous », répond sans plus de précision le
vieil homme, en s’éloignant d’un bon pas…
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
• Ehpad créé en 1971 par la Carmf (Caisse
autonome de retraite des médecins de
France), repris par Arepa en 1995
• 65 résidents
• 35 salariés (y compris ceux de soustraitants pour la cuisine et le ménage),
dont 0,5 ETP de médecin coordonnateur,
0,5 ETP de psychologue, 3,5 ETP d’infirmier, 6,5 ETP d’aide soignant, 9,25 ETP
d’agent de soin, 1 ETP d’animateur
• GMP : 711
• Prix de journée : 115 euros
de nos résidents, les risques
avérés de fugue ou d’errance
ne concernent aujourd’hui
que cinq à six personnes, explique Yann Jalicoux, l’Idec.
Les risques sont donc assez
ciblés. Nous sommes donc particulièrement attentifs et vigilants pour ces résidents-là. »
20
La technique et l’électronique,
ces précieux alliés
Au-delà des discussions éthiques en équipe, Les Terrasses de Meudon
ont également mis en place des outils, pour simplifier la vie du personnel, tout en laissant la liberté, ou au moins le sentiment de liberté, aux
résidents.
D’abord, l’outil le plus spectaculaire. Les 65 personnes âgées de
l’Ehpad ont tous à leur poignée
une montre « appel résident ».
Une chute, un souci, une frayeur ?
Il suffit d’appuyer sur la montre
pour prévenir le personnel. Cette
montre, « qui donne l’heure et s’allume la nuit », précise Yann Jalicoux, est également équipée de capteurs permettant de visualiser, sur
l’écran d’ordinateur dédié au système, l’activité de son propriétaire.
Bien utile, par exemple, lorsqu’une
personne assure ne pas avoir fermé
l’œil de la nuit, pour mesurer son
activité réelle et adapter son éventuel traitement en conséquence.
Yann Jalicoux, infirmier
coordonnateur et Estèle
Jaquet, psychologue.
Mais, pour une poignée de résidents, la montre comporte une fonctionnalité supplémentaire, une fonction anti-fugue. Le principe est simple :
si le porteur de la montre passe un capteur fixé juste après le sas d’entrée et de sortie, à quelques pas de la grille qui sépare l’Ehpad de la
rue, les téléphones du personnel et l’ordinateur dédié de l’infirmerie
émettent un signal caractéristique.
Le coût de cet équipement ? 305 euros la montre, imputée, dans
l’Ehpad de Meudon, en totalité sur le tarif hébergement, 1 300 euros
par mois sur trois ans et demi l’installation du système en location
vente, étant imputée sur la section hébergement également.
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Les Terrasses de Meudon
en chiffres
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
MMR n°158 I FÉVRIER 2013
21
L’acceptation d’un tel objet ? « Les personnes âgées et les familles comprennent bien
et acceptent volontiers la première fonction d’appel résident. Quant à la fonction
anti-fugue, la plupart des familles sont bienveillantes et essayent de trouver, avec
nous, la meilleure solution pour leur proche. Les personnes désorientées, elles, n’entendent pas qu’un signal bipe quand elles passent sous un capteur… »
Alors que la géolocalisation est, en ces temps de malheureux faits divers, sur toutes
les lèvres, en particulier celles de la ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’Autonomie, Michèle Delaunay, le directeur des Terrasses de Meudon « n’est pas contre,
à titre personnel ». Il l’a même déjà envisagée, avec une famille, pour l’une des résidentes particulièrement insaisissable ; « elle se mettait devant la porte et attendait
que quelqu’un entre ou sorte », se souvient le directeur. « Mais cela ne s’est pas
fait, poursuit Thierry Hannesse, et cette dame a été intégrée dans une unité de vie
protégée. »
Tout en étant conscient de leurs limites – « ces outils ne protègent pas de tout »,
résume Estèle Jaquet, la psychologue – ils sont d’une aide précieuse pour les équipes,
mais aussi les résidents.
Qu’attendent donc ces professionnels des discussions actuelles qui ressurgissent sur
la liberté d’aller et venir en Ehpad ? « Qu’on fasse confiance aux professionnels ! »,
tonne Thierry Hannesse. Selon lui, tout est déjà dans la loi 2002-2. Et quant à la responsabilité du directeur, qui peut être engagée ? « Que les juges fassent leur travail.
Mais il faudrait qu’ils soient un peu plus spécialisés, relève Thierry Hannesse. Qu’ils
sachent ce qu’est un Ehpad, ce qu’on peut y faire et ne pas y faire. Et qu’ils soient
conscients que le risque zéro n’existe pas »…
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Moins spectaculaire, plus commun mais efficace aussi,
l’Ehpad est doté d’un digicode pour les deux portes vitrées
du sas d’entrée ; plus original, un digicode est également
aposé sur la poignée d’une porte qui donne accès au soussol et au parking. Moins spectaculaire aussi mais plutôt ingénieux, l’utilisation de lecteurs et de cartes magnétiques,
comme dans les hôtels, en lieu et place des serrures et
des clés. Si l’on ne parle plus ici
d’entrée ou de sortie de l’Ehpad,
ce système « permet de réserver l’accès de certains zones
de l’établissement à certaines
personnes, tout en assurant une tracabilité des allers et
venues en cas de besoin », explique Thierry Hannesse. En
clair, impossible, pour une personne désorientée, de se retrouver par erreur dans la chambre d’un autre résident, ou
de se « perdre » dans l’infirmerie, sa carte magnétique ne
lui donnant l’accès ni à l’une ni à l’autre.
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* Le nom a été changé.
Personnes désorientées et normes incendie
«I
l y a une vraie incompatibilité entre la prise
en charge des personnes désorientées et nos
obligations en terme de sécurité incendie »,
résume Thierry Hannesse, le directeur des Terrasses de
Meudon. De fait, c’est un peu la quadrature du cercle :
comment à la fois sécuriser les accès de l’établissement
et permettre son évacuation rapide en cas d’incendie ?
Ce dilemme, tous les Ehpad l’ont, mais plus encore les
unités de vie protégées. Aux Terrasses de Meudon, le
petit boitier vert qui ouvre la porte, est bien en vu près du sas d’entrée et de sortie. Un simple pression après avoir soulevé le couvercle et hop… c’est la liberté
absolue… « sachant que, heureusement les résidents les plus désoriéntés comprennent difficilement ce mécanisme », ajoute le directeur.
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
© Patrick Dagonnot - EHPA Presse
Une puce GPS dans une montre est donc tout à fait envisageable pour ce directeur, à
condition que « nous travaillions tous ensemble sur le sujet, familles, tutelles, personnes de confiance, etc. ». Une puce GPS, aussi, pourquoi pas, dans un téléphone
portable. Si peu de résidents ont des téléphones aujourd’hui, il en sera tout autrement
demain.
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MMR n°158 I FÉVRIER 2013
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Réactions
Notre nouveau site Internet tout beau tout nouveau est aussi plus interactif.
Chaque mois, nous posons une question à nos directeurs internautes sur un sujet
d’actualité ou un thème que nous traitons dans le Mensuel. N’hésitez pas, vous
aussi, à donner votre avis. Rendez-vous sur la page d’accueil d’ehpa.fr
vos avis
La Question du mois de février :
Votre Ehpad fonctionne-il bien
sans infirmière de nuit ?
Je suis directeur d’un Ehpad et je n’ai pas d’infirmière de nuit, car c’est une petite structure de 46 résidents en milieu rural.
Notre convention tripartite a mis en avant le fait d’avoir deux agents de soins. Cependant, il est de plus en plus difficile de prendre
soin des personnes – la nuit, je suis souvent dérangé pour répondre aux inquiétudes des personnels – je suis un ancien infirmier, je
peux donc y répondre. Nous avons aussi des difficultés avec nos appels vers le Samu. Les résidents et les familles préfèrent maintenant rester dans nos établissements. Je crois qu’il faut repenser et «repanser» la manière de sécuriser un établissement – la
nuit est signe d’angoisse, de troubles nocturnes, de fin de vie aussi...
Nous avons effectivement une présence infirmière la nuit. Nous avons paticipé à un test avec une infirmière la nuit, en 2012,
pendant six mois sur un remplacement d’une aide soignante en congé maladie. À ma grande surprise, sur un Ehpad de 121 résidents, la plus value a été minime, et une seule hospitalisation de nuit a été évitée.
Nous avons la chance d’avoir une équipe d’infirmières qui accepte de rester disponible téléphoniquement et, éventuellement,
de se déplacer en cas d’urgence, sans indemnisation financière. Tout cela grâce à la qualité du climat social et le fait que les IDE
résident à faible distance de l’Ehpad…
vos réactions
Vous pouvez aussi réagir sur le thème de votre choix, via le formulaire de contact pour la rédaction
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Sujet : Nonagénaire
Message : Une crise sanitaire se développe en France et le ministre, M. Le Foll défend... l’honnêteté de la filière. Un chômeur s’immole et le ministre, M. Sapin, défend… les salariés du Pôle Emploi. Une personne âgée ne paie pas son dû à sa maison de retraite et
est maladroitement redirigée a son domicile et la ministre… accuse la maison de retraite et son incompétence, malgré les excuses de
cet établissement. À retenir pour l’avenir… Deux poids... deux mesures.
Gérard Brami, directeur de l’Ehpad la Verçoise (06)
Sujet : Mutualisation
de direction
Message : Que voila une idée nouvelle ! Il me semble déjà avoir entendu cette musique là sous d’autres cieux : « 30 000 directeurs ?
Nous en garderons 3000 » ! C’est vrai que ça ne sert à rien, un directeur de maison de retraite... C’est juste bon à faire un budget !
Ah non, c’est vrai… ça ne sert plus à rien les budgets, puisque nous allons avoir les EPRD ! C’est vrai que le directeur « âme de la maison », le directeur porteur du projet de vie, garant des valeurs, de l’organisation, de l’hygiène, de la sécurité, proche des résidants, des
personnels, des familles... ça ne sert à rien ! Alors, un directeur pour 200 lits... pourquoi pas? Mais ne venez plus jamais nous parler
d’évaluation, de bientraitance, de prévention !
J’attendais mieux de cette nouvelle équipe... du changement !?
Une modeste représentante d’une espèce en voie de disparition : les maisons de retraite de moins de 60 lits
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