du diabète

Transcription

du diabète
Soins de santé
Les soins primaires en Tunisie
pour améliorer la gestion
du diabète
` Hugh Alberti, Nessiba Boudriga, Mounira Nabli
La Tunisie, comme la plupart des pays du monde, est
confrontée à une augmentation alarmante du nombre de
personnes atteintes de diabète : la prévalence du diabète de
type 2 chez les adultes de plus de 30 ans est passée de 4,2 %
en 1976 à 10 % en 1995. Face à cette augmentation, le
Ministère tunisien de la Santé publique a développé un
Programme national de gestion du diabète et de l'hypertension
à travers les soins primaires. Introduit initialement en 1993,
ce Programme a ensuite été mis en oeuvre dans tout le pays
en 1998.
>>
Le but ultime du Programme est de
réduire l'impact des complications du
diabète sur la santé. Pour atteindre
cet objectif, il est essentiel de
garantir aux personnes atteintes de
diabète des soins de qualité, réguliers
et standardisés. Les quatre objectifs
intermédiaires sont :
Š la prévention des facteurs de
risque de développement du
diabète,
Š le dépistage des personnes
risquant de développer le diabète,
Š l'offre de soins réguliers aux
personnes atteintes de diabète,
Š l'offre d'une éducation à la santé
pour les personnes atteintes de
diabète et leur famille, et pour la
population en général.
Stratégie
En termes de planification
stratégique, les quatre domaines clés
du Programme national sont
l'éducation à la santé, l'évaluation, la
supervision et la formation.
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Education à la santé
La stratégie du Programme est basée
principalement sur l'éducation à la
santé. Elle inclut l'utilisation des médias
par le biais de campagnes publicitaires,
la production et la distribution de
matériel éducatif, ainsi que l'éducation
des personnes atteintes de diabète,
individuellement ou en groupe, dans
leur centre local de soins de santé
primaires.
( )
Pour réduire les
complications du
diabète, il est
essentiel de garantir
des soins de qualité,
réguliers et
standardisés.
Evaluation
Des rapports annuels régionaux
évaluent l'efficacité du Programme.
Ils reprennent des données sur le
nombre total de cas (la prévalence)
et la fréquence d'apparition
(l'incidence) du diabète et de ses
complications, le nombre de personnes
atteintes de diabète impliquées dans >>
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Volume 48 Numéro 3
Soins de santé
local, sont utilisés pour évaluer le
Programme. Une analyse quantitative
des rapports annuels est réalisée et
des centres de santé choisis au hasard
sont visités afin de réviser les dossiers
et s'entretenir avec le personnel et les
personnes atteintes de diabète.
Résultats de l'évaluation
Bien que l'évaluation du Programme
national n'en soit encore qu'à ses
débuts, un certain nombre de
conclusions instructives sont
actuellement intégrées au Programme.
Par exemple, l'analyse de plus de 500
dossiers de santé a démontré que leur
utilisation résulte en un meilleur
enregistrement des données et des
résultats des recherches.
( )
La stratégie du
Programme tunisien
est basée
principalement sur
l'éducation à la
santé.
© superbild
le Programme et le nombre de celles
n'y participant pas.
Supervision
Elle est réalisée au niveau central par
un superviseur national et au niveau
local par des coordinateurs régionaux
qui sont responsables de :
Š garantir que le Programme national
est mis en oeuvre dans les centres
de santé,
Š collecter des informations en vue
des rapports annuels,
Š organiser le programme de
formation pour les médecins en
soins primaires.
de santé dans différents centres du
pays. Elle inclut les aspects théoriques
du diabète et de ses complications ainsi
qu'une formation pratique à l'utilisation
de la nouvelle documentation. Celle-ci
inclut de nouveaux dossiers pour les
personnes atteintes de diabète et
d'hypertension, un registre de toutes
les personnes atteintes de ces
conditions et des dossiers de gestion
du diabète conservés par les personnes
elles-mêmes. Les médecins en soins
primaires deviennent alors responsables
de la formation du personnel
paramédical dans leur centre de santé.
Evaluation complémentaire
Formation
Une formation d'une semaine est
proposée aux professionnels des soins
Octobre 2003
Volume 48 Numéro 3
Des questionnaires structurés,
complétés par les professionnels des
soins de santé primaires au niveau
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Un second exemple concerne les
examens des yeux. Actuellement, ils
sont effectués exclusivement par des
ophtalmologistes basés dans des
hôpitaux ; le nombre de personnes
atteintes de diabète qui se soumettent
à un examen annuel de la vue s'est
avéré être bas. Un certain nombre de
raisons ont été identifiées à travers des
discussions avec le personnel soignant
impliqué dans le Programme au niveau
local. Parmi celles-ci, on trouvait les
longues distances que certaines
personnes doivent parcourir pour
rejoindre leur hôpital local et le temps
d'attente excessif pour pouvoir
consulter un spécialiste dans certains
hôpitaux. En réponse à cela, des
médecins en soins primaires d'une des
grandes régions du pays sont
Soins de santé
actuellement formés à réaliser
des examens de la vue et il est
envisagé d'étendre cette approche
à d'autres régions.
(
impaired glucose tolerance) est une
des nouvelles idées qui sera intégrée
au Programme. L'éducation à un
nouveau mode de vie en est une
autre. Certaines autres avancées
dépassent actuellement les
ressources financières du
Programme. Toutefois, des
innovations tel que l'utilisation de
rétinographes digitaux constituent
de futurs objectifs.
Le dépistage des
personnes atteintes
de tolérance
abaissée au glucose
et l'éducation à un
nouveau mode de
vie font
actuellement partie
du Programme.
)
Un troisième problème mis en
évidence à travers l'expérience des
médecins en soins primaires est celui
de la communication entre les soins
primaires et secondaires. Auparavant,
les médecins en soins primaires
recevaient rarement des informations
ou des résultats relatifs aux
personnes qu'ils avaient dirigé vers
les soins secondaires ou tertiaires.
Afin d'améliorer le flux
d'informations, un nouveau formulaire
d'orientation a été conçu, reprenant
les commentaires des médecins en
soins primaires et secondaires,
permettant à ces derniers de
communiquer les résultats d'examens
ou d'analyses.
Enfin, l'introduction d'une
consultation individualisée dans de
nombreux centres de soins primaires
semble avoir amélioré la qualité des
soins offerts aux personnes atteintes
de diabète. Une fois par semaine, la
priorité est donnée aux personnes
atteintes de diabète et
d'hypertension. L'équipe de soins
primaires travaille en étroite
collaboration pour offrir éducation et
soins : un diététicien est disponible
Il reste évidemment encore
beaucoup à faire pour atteindre les
objectifs du Programme, mais cela
progresse. Ce Programme pourrait
servir de modèle de prise en charge
pour d'autres pays confrontés à des
ressources limitées et à un nombre
croissant de personnes atteintes de
diabète.
` Hugh Alberti, Nessiba
Boudriga, Mounira Nabli
© superbild
pour des consultations individuelles
ou en groupe et des infirmières
procèdent à des tests d'urine et de
contrôle de la glycémie à l'aide de
glucomètres fournis dans le cadre
du Programme national.
L'avenir
Bien qu'il n'en soit qu'à ses débuts,
le Programme national semble
améliorer la gestion du diabète
dans les soins primaires en Tunisie.
A mesure que les résultats des
recherches mettent en évidence de
nouvelles sources de préoccupation,
le Programme doit rester flexible et
ouvert à de nouvelles données. Le
dépistage des personnes atteintes de
tolérance abaissée au glucose (IGT,
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Hugh Alberti est Médecin
généraliste et a un intérêt
particulier pour le diabète. Il
mène actuellement des recherches
sur la prise en charge du diabète
en Tunisie.
Nessiba Boudriga est
Coordinatrice nationale du
Programme pour le diabète et
l'hypertension auprès du
Ministère de la Santé en Tunisie.
Mounira Nabli est Responsable du
Département des maladies non
transmissibles auprès du
Ministère de la Santé en Tunisie.
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