Interview Kordjé Bedoumra, Directeur du département Eau et

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Interview Kordjé Bedoumra, Directeur du département Eau et
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Interview Kordjé Bedoumra, Directeur du département
Eau et Assainissement à la Banque africaine du Développement,
Directeur de la Facilité africaine de l’Eau, Tunis, Tunisie
Journaliste: Aude Gensbittel, Deutsche Welle, Durée: e’ff
Monsieur Kordjé Bedoumra, bonjour, vous êtes directeur
du département Eau et Assainissement à la Banque africaine
du Développement et directeur de la Facilité africaine de
l’Eau. Tout d’abord, est-ce que vous pouvez m’expliquer en
quoi l’assainissement est important et pour quelles raisons
il a pu être négligé jusqu’à présent dans certaines par<es
du monde?
L’assainissement est important parce qu’il est à la base
de toutes les quesAons de santé et de protecAon des
ressources en eau. Et donc quand on prend les pays
africains, surtout les pays au sud du Sahara, on se rend
compte que les maladies d’origine hydrique touchent une
grande majorité de la populaAon et donc il est important
de s’aBaquer directement à la quesAon de l’assainissement et de l’hygiène. Tout simplement, les Etats pendant
longtemps peut-être se sont d’abord préoccupés de
l’accès à l’eau potable et la dimension assainissement
n’a pas été considérée, mais je pense que depuis déjà
quelques années, notamment il y a déjà cinq ans, il y a
eu le premier sommet africain sur l’assainissement. Il y a
également l’Année internaAonale de l’assainissement
ceBe année, donc il y a un ensemble d’efforts qui visent à
sensibiliser les uns et les autres pour qu’ils accordent l’importance qu’il convient à la quesAon de l’assainissement.
Et quels sont les plus grands défis en ce qui concerne
l’assainissement en Afrique?
Déjà on est dans une situaAon de très très faible accès.
Les chiffres sont difficiles à donner, mais les dernières
esAmaAons de l’étude de l’OMS et de l’UNICEF font état
de plus de faa millions de personnes qui n’ont pas accès
à des services d’assainissement adéquats. Il s’agit ici
d’abord de la quesAon de l’éducaAon à l’hygiène qui
reste un élément assez important pour amener les gens à
prendre un minimum de précauAons pour faire face aux
quesAons de santé, aux quesAons de bien-être social.
Mais il y a également toute la quesAon de l’assainissement sous tous les angles, à savoir, le traitement des
eaux usées, le ramassage des déchets solides, la protecAon contre les déchets industriels. Il y a un certain
nombre d’invesAssements assez importants qu’il faut
faire pour apporter un assainissement adéquat. Il y a également l’évacuaAon des eaux, notamment des eaux de
pluie, dans le contexte urbain, qui consAtue également
des éléments importants, donc il y a un besoin d’invesAssements assez important. Il y a également au niveau de
l’Afrique, et je pense que c’est aussi un peu partout, une
nécessité d’avoir une meilleure coordinaAon des quesAons d’assainissement dans chaque pays. Parce que
l’assainissement est souvent partagé entre le Ministère
de la Santé, le Ministère de l’Eau, les municipalités, le
Ministère de l’Environnement, donc parfois c’est très
difficile de savoir qui doit prendre le leadership dans la
coordinaAon des acAvités liées à l’environnement. Ceci
consAtue certainement un des grands défis à relever à
savoir, amener des pays à créer un meilleur cadre, un
meilleur mécanisme de coordinaAon entre eux pour
traiter des quesAons d’assainissement.
Et à votre avis, en quoi des inves<ssements dans le
domaine de l’assainissement peuvent-ils contribuer au
développement économique du con<nent africain?
De plusieurs façons. D’abord, comme je l’ai dit tout à
l’heure, il faut que les gens soient en bonne santé pour
parAciper à la producAon d’un pays. Donc aujourd’hui,
l’absence d’assainissement coûte très cher. Ça coûte cher
d’abord en termes d’absentéisme sur le lieu du travail à
cause des maladies. Ça coûte cher en termes d’enfants
qui ne vont pas aller à l’école, ça coûte cher au niveau de
la mortalité infanAle qui touche également les familles, ça
coûte cher parce que les femmes doivent rester s’occuper
des enfants. L’absence d’assainissement a un coût
énorme. Quand vous comptez déjà le palu qui est une des
principales sources de mortalité en Afrique, et que vous
savez combien l’éradicaAon du paludisme commence
par un assainissement adéquat, vous vous rendez compte
que l’assainissement consAtue un grand facteur du sousdéveloppement, donc un bon assainissement est un
préalable pour pouvoir aBaquer effecAvement la quesAon du développement économique.
La situa<on est inégale sur l’ensemble du con<nent africain, est-ce que vous pouvez me dire quels sont les pays
les plus avancés en ma<ère d’assainissement et à l’inverse
quels sont les moins avancés?
Les plus avancés, c’est tous les pays d’Afrique du Nord en
général, ce sont des pays qui ont un certain niveau de
développement économique donc qui sont relaAvement
bien avancés. Vous avez des pays qui ont un minimum de
revenus comme les Seychelles, des pays comme l’île
Maurice qui sont relaAvement avancés. L’Afrique du Sud
également, qui est en train de faire des progrès. Au
niveau de l’Afrique subsaharienne de façon générale, la
moyenne reste relaAvement faible, bien que le niveau
soit varié, on ne peut pas dire aujourd’hui que le niveau
total dans ces régions soit un niveau qui est très saAsfaisant. Et donc je crois que ce sont des pays qui ont besoin
de faire beaucoup d’efforts pour corriger ceBe situaAon,
mais je crois que la réunion qu’on a eue récemment à
Durban montre à quel point les ministres qui étaient
présents en étaient conscients et s’engagent réellement
à faire de l’assainissement une de leurs priorités.
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