Formulaire à télécharger Recherche scientifique
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Le mot du président du conseil scientifique C réer une typologie de la centaine de projets de recherche qui ont vu le jour, se sont poursuivis ou achevés en 2010 au musée du Louvre est chose complexe tant les sujets sont liés à la spécificité des collections. Cependant, on voit se dessiner deux grandes orientations. La première a pour objectif de caractériser une technique, d’identifier un peintre, un atelier ou un centre de création : c’est ce qui a été fait autour de Raphaël, du mobilier Boulle, des terres cuites et de la taille des sculptures de la Renaissance italienne, de la technique du lustre métallique, de la dorure sur céramique glaçurée, de la production des céramiques de l’Espagne arabe dans les arts de l’Islam ou des tablettes cunéiformes. La seconde consiste à recenser et publier un corpus (même si, à bien des égards, ce type d’étude a quelque chose à voir avec les activités de recherche citées précédemment). Ce travail a été accompli pour les émaux méridionaux, les marques de collections en arts graphiques, les œuvres d’art américaines conservées sur le territoire français (base La Fayette), les sculptures souabes gothiques tardives, la correspondance de Delacroix ou la verrerie antique conservée au Louvre, ainsi que pour les collections mises au jour lors de fouilles anciennes comme à Arslan Tash (les ivoires) et Éléphantine. La réédition du premier guide rédigé par Champollion participe de cette même problématique. Les missions de fouilles ou de prospections archéologiques auxquelles participe le musée s’ancrent dans la recherche archéologique au sens large tout en gardant leur spécificité muséale : à Saqqara (Égypte), Baouit (Égypte) et Myrina (Turquie), les équipes du musée réétudient les lieux et les contextes d’où proviennent certaines œuvres de nos collections ; à Tulul el-Far (Syrie), Mouweis (Soudan) et Paykend (Ouzbékistan), elles contribuent à faire avancer l’histoire chronologique, sociale et culturelle des civilisations étudiées ; enfin, à Merenptah (Égypte), la compréhension du décor d’un vaste tombeau royal autant que sa conservation et présentation in situ constituent l’enjeu de la mission. Certains services et délégations du musée mènent, quant à eux, des projets de recherche transversaux : le service Études et recherche de la Direction de la politique des publics et de l’éducation artistique procède à de nombreuses études sur le comportement du public dans ses pratiques réelles et virtuelles et sur ses attentes en matière de médiation et d’aide à la visite ; la Délégation à la conservation préventive et à la coordination des régies, qui participe à la veille sanitaire des collections patrimoniales, suit certaines restaurations-conservations et les chantiers en cours afin de limiter les effets néfastes sur les œuvres ; le service du Récolement des dépôts antiques et des arts de l’Islam met en place, entre autres, le pilotage transversal du récolement des dépôts du Louvre dans les autres musées nationaux. Accompagné de mes collègues français et étrangers issus du monde universitaire et muséal, j’ai accepté de rejoindre le conseil scientifique que souhaitait créer le musée. Notre travail s’annonce passionnant, étant donné la gamme des collections dont dispose le Louvre, la qualité des chercheurs et la qualité globale de la recherche au Louvre. En histoire de l’art comme en archéologie, c’est la recherche « sur le champ », c’est-à-dire sur les objets, qui constitue la dimension commune entre le monde 14 universitaire et celui des musées. L’interaction entre la recherche du musée et celle pratiquée par les universitaires, sur une même œuvre ou sur un même artiste, est extrêmement enrichissante. Pour les universitaires, c’est un appel à se pencher sur l’œuvre, sur l’objet, ce que les milieux académiques tendent parfois à oublier. En même temps, la qualité de cette recherche doit atteindre le même niveau que celui de la recherche académique, soit le niveau le plus haut. L’idée couramment répandue est que les musées sont des « machines à conserver » et non des « machines à comprendre », oubliant donc cette connaissance approfondie des œuvres que seule procure la recherche. De plus, si la recherche dans certains musées est limitée à leurs seules collections, pour un musée comme le Louvre, il n’y a pas de limites, mais plutôt matière à défi. Salvatore Settis It would be quite a challenge to classify the hundred or so research projects that were initiated, pursued, or completed in 2010 at the Musée du Louvre, as the subjects covered are closely tied to the specific nature of the various collections. That said, the two main fronts of this vast research effort are fairly easily defined. The first type involves pinpointing a technique, a given painter, workshop, or production centre, and so far has included such varied subjects as the painter Raphael; Boulle furniture; Renaissance earthenware and sculpting techniques; metallic lustre technique; the gilding of glazed ceramics; ceramic production in Islamic Spain, and not least cuneiform tablets. The second approach entails the progressive inventorying and publishing of each corpus of works in the Louvre’s possession (though in many respects this type of study is similar to the previous one). Examples of this include listing the “champlevé Limoges” enamels; indexing collectors’ marks on drawings and prints; cataloguing all American artworks held in France (La Fayette database); the late Gothic Swabian sculptures; the Delacroix correspondence; the Louvre’s antique glassware; and the finds from past excavations at Arslan Tash (ivories) and Elephantine. This vast project comprises the publication of a new edition of Champollion’s first guide. The Musée du Louvre’s archaeological projects largely involve archaeological research oriented specifically to museum-based practices: at S.aqqārah (Egypt), Baouit (Egypt), and Myrina (Turkey), the Museum’s teams are re-examining the contexts and places from which many of the Louvre’s works originate; at Tulul el-Far (Syria), Muweis (Sudan), and Paykend (Uzbekistan) the teams are helping to chart the chronological, social, and cultural history of the civilisations studied; and, lastly, another Louvre team is analysing the decorations in a vast royal tomb at Merenptah (Egypt), while investigating new ways of conserving and exhibiting the finds in situ. Several of the Museum’s departments and delegations are involved in interdepartmental research projects: for example, the Study and Research Division for Audience Policy and Art Education has conducted numerous studies into audience behaviour, practices and expectations – both real (on site) and virtual (online) – with an eye to developing interactive communication of knowledge, and visitor aids; the Delegation of Preventative Conservation and Administrative Coordination, which contributes to the maintenance of the national heritage collections, oversees certain restorationconservation projects to minimise damage to the works; the Department responsible for locating and authenticating antique deposits and for the Islamic Arts, has established a interdepartmental management system for the location and verification of Louvre deposits in the other national museums. Along with various French and international colleagues from universities and museums, I have accepted to join the Advisory Board created at the Museum’s behest. Given the wealth of the Louvre’s collections, the quality of its researchers, and the globally high standards of the Louvre’s research, our work promises to be extremely interesting. In both art history and archaeology, fieldwork, that is the study of the objects themselves, is practised by both universities and museums alike, which makes close interaction between museum and university research on the same works or artists very enriching. This overlapping of interests enables university researchers to focus on a particular work or object that might otherwise be overlooked, and requires particularly high standards of academic research. In general, a museum tends to be viewed as a machine à conserver, that is, a “conservation machine”, rather than a place of learning, which overlooks the fact that a proper knowledge of any museum’s works can only be acquired through intensive research. Moreover, while research in some museums is limited to their own collections, at the Louvre there are no such limits, only challenges. 15