contact - Conseiller

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CONTACT
Dans l’ordre habituel : Jean Poiré
et Rémy Therrien, ingénieurs et
informaticiens, Carol Jean,
conseiller en placement,
les fondateurs de Unigiciel.
Les cerveaux derrière
CRÉSUS
De Sainte-Anne-des-Monts à l’Australie, l’histoire de
Crésus revisitée ou celle d’un logiciel de gestion de
portefeuille «made in Québec» et de ses trois créateurs.
Yves Bonneau
Photos : Sonia Jam
OBJECTIF CONSEILLER
12
L
’Histoire nous offre parfois des retour-
Objectif Conseiller Carol, quel a été l’élément déclencheur
nements insoupçonnés. Il y a environ
de l’aventure Crésus?
2 500 ans, le Roi de Lydie (un empire
d’influence grecque qui occupait la par-
tie ouest de la Turquie contemporaine) est devenu si riche
qu’encore aujourd’hui, une expression courante lui fait référence : «Riche comme Crésus», dit-on. Ce Crésus accumula
sa richesse légendaire grâce à l’essor du commerce des biens
et des gisements aurifères de son royaume. Visionnaire et
méthodique, Crésus fut aussi un souverain qui se préoccupa
d’organiser les échanges de valeurs de l’époque et devint
ainsi le premier à faire frapper des pièces de monnaie, en or
et en argent. Les marchands coéchangistes économisaient
alors du temps parce qu’ils n’avaient plus à peser cette monnaie pour en vérifier la valeur, ils n’avaient qu’à
compter les pièces. Ce fut donc l’amorce de la
monnaie fiduciaire, c’est-à-dire de la monnaie
fondée sur la confiance.
Au tournant du 21e siècle, c’est en se référant
à ce roi qui s’est enrichi grâce à son sens prodigieux de l’organisation que trois partenaires ont désigné
leur logiciel de gestion de portefeuille. Avec pareille généalogie, Crésus aurait-il laissé des étrangers enregistrer son
propre nom en marque de commerce? Les trois
cerveaux derrière le logiciel – Rémy Therrien, Jean Poiré
et Carol Jean – fin de la trentaine, croient que oui.
Objectif Conseiller s’est intéressé à leur histoire.
Un peu à l’image de Crésus qui voulait améliorer et organiser le commerce dans son royaume en créant la monnaie
frappée, le logiciel de gestion de portefeuille Crésus est simplement né d’un besoin. Le besoin pour Carol Jean, alors
conseiller en placement chez Lévesque Beaubien Geoffrion,
de suivre les transactions de ses clients. En 1986, il œuvre
à Sainte-Anne-des-Monts en Gaspésie : le courtier est loin
du siège social montréalais de sa firme, et toutes ses transactions, prises d’ordre et élaboration de portefeuille se font
à la main… la préhistoire quoi!
Carol Jean Je n’avais pas d’outil informatique. Je n’avais
pas ISM (le système de gestion des services de postmarché [back office]) et je n’avais pas de cotes pour travailler. Je recevais ce qu’on appelait à l’époque des
«status» (situation comptable du client), trois jours
après les transactions. Pour suivre les marchés, j’ai voulu
m’informatiser. J’ai donc cherché quelqu’un qui élaborerait un logiciel pour gérer les comptes de mes clients.
Rémy Therrien, qui est aujourd’hui président de Unigiciel, étudiait en génie à l’époque, on me l’a présenté.
OC Pourquoi avoir choisi cette voie… embaucher
quelqu’un pour créer un logiciel?
CJ Il n’y avait absolument rien sur le marché pour
quelqu’un comme moi qui était seul. Les conseillers en
placement avaient accès aux données de ISM et ils
voyaient les portefeuilles, ils avaient des
systèmes de cotes. Comme j’œuvrais dans un sous-bureau, je
n’avais pas ces outils. Et
comme les marchés fluctuaient beaucoup, j’ai voulu
avoir un outil qui me permettrait de mieux gérer les comptes
de mes clients. J’ai donc embauché
un étudiant…
OC Après avoir expliqué vos besoins à Rémy,
comment votre association s’est-elle concrétisée?
Durant l’été de 1986, Rémy a élaboré le logiciel.
Voyant le potentiel de développement de ce logiciel,
nous avons fondé la compagnie Unigiciel. J’utilisais
Crésus quotidiennement, mais nous n’avions pas le
temps de penser à le commercialiser. Puis, à l’automne
1989, Lévesque Beaubien Geoffrion (LBG), devenu par
la suite Financière Banque Nationale (FBN), s’est intéressé au logiciel. C’est là que l’aventure a vraiment
débuté. Avec un client comme LBG, il fallait que tout
se fasse automatiquement, à partir des données fournies
par ISM. C’est à ce moment que Jean Poiré s’est joint à
nous et donc que Rémy et Jean ont débuté à temps
plein pour Unigiciel. En septembre 1992, nous
signions finalement notre premier contrat avec
Lévesque Beaubien Geoffrion.
RÉMY THERRIEN Il ne faut pas oublier également
que certaines personnes chez LBG nous appuyaient.
Richard Lupien, premier vice-président à la FBN, est
un de ceux-là. C’est quelqu’un qui a beaucoup contriCJ
FÉVRIER 2000
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ment, Merril Lynch Canada. Aujourd’hui, il y a
plus de 7000 utilisateurs au Canada, sans compter
les utilisateurs en Australie!
OC Que fait justement Crésus pour ses utilisateurs?
«
Il n’y avait absolument
rien sur le marché
pour quelqu’un qui
était seul.
»
— Carol Jean
Profil
• CAROL JEAN, conseiller financier, B.A. A. FICVM
• Financière Banque Nationale, Rivière-du-Loup
• Années de services financiers : 14
• Actionnaire de Unigiciel
bué au succès de Crésus. Il a été le premier à avoir cru
en Unigiciel, en Crésus. Il nous a encouragé et continue
de le faire. C’est d’ailleurs lui qui représente la
Financière Banque Nationale au conseil d’administration Unigiciel. (La FBN est actionnaire minoritaire).
OC Carol, au cours de l’élaboration du logiciel, n’as-tu
jamais cessé de travailler pour LBG?
CJ Non, j’ai toujours continué à travailler pour la
firme, sauf que je suis déménagé à la sous-succursale de
Matane en 1989 et en 1996, je suis devenu directeur de
la succursale de Rivière-du-Loup, qui supervise les
bureaux de Rimouski et Matane. Rémy et Jean, par
contre, ont dû quitter leur emploi pour travailler à plein
temps chez Unigiciel. Après notre premier contrat avec
LBG, il y a eu d’autres clients qui ont suivi et c’est ainsi
que Unigiciel s’est développé. Notre deuxième client a
été le Groupe Option Retraite en juin 1994.
JEAN POIRÉ Par la suite, de nombreuses autres firmes
de courtage se sont ajoutées à la liste des utilisateurs de
Crésus : TD Evergreen, Valeurs mobilières Desjardins,
Mac Dougall, Mac Dougall & MacTier Inc.,
BLC Valeurs mobilières, Fiducie Desjardins et dernière-
CJ Crésus est un logiciel de gestion de portefeuille
pour les conseillers en placement. Il permet de consulter toute l’information concernant les clients, les titres
qu’ils détiennent, les rendements, les revenus annuels,
l’historique de leur performance, etc. Toutes les données sont mises à jour quotidiennement par le système
post-marché. C’est donc un logiciel qui permet de vraiment faire le suivi des clients. Pour un conseiller, c’est
un outil de travail aussi essentiel que le stéthoscope du
médecin. Nous obtenons quotidiennement avec
Crésus toutes nos transactions de la journée précédente,
et il peut produire différents rapports de portefeuille,
de rendements, de projections de liquidités, etc. Le rapport des gains et pertes en capital avant Crésus était fait
manuellement, avec tous les risques d’erreur que cela
comportait pour le comptable et surtout le client.
Vous pouvez aussi élaborer des portefeuilles modèles
qui s’adaptent à chaque type d’investisseur. Ainsi, un
conseiller peut présenter à son client un projet de portefeuille dès qu’il a bien compris les objectifs de placement de ce dernier. Une fois le montant à investir déterminé, Crésus va automatiquement le répartir selon
chacune des catégories d’actif qui correspondent aux
besoins du client.
RT Crésus peut servir aussi de gestionnaire de
contacts. Ceci permet de qualifier la clientèle en ajoutant ses propres paramètres d’informations. Ainsi, vous
pouvez créer des champs qui sont spécifiques au type
de clientèle que vous avez développée. Ces informations, comme la profession du client, son anniversaire,
ses loisirs ou autres, vous permettent de bien les identifier lorsque votre clientèle devient nombreuse.
Une fonction très utile permet de sélectionner une partie de sa clientèle à partir de critères précis. Vous pouvez
par exemple faire une recherche et dresser une liste des
clients dont la contribution REER de 1999 n’a pas encore
été faite pour ensuite les contacter, ou encore isoler les
clients dont le portefeuille vaut plus de 250 000 $ et dont
la répartition en actions est inférieure à 35 %.
OC Qu’est-ce qui a été le plus difficile?
CJ Ce fut d’obtenir notre premier contrat avec une
firme nationale alors que l’entreprise Unigiciel ne
comptait que deux employés. La concurrence décrivait
notre produit comme étant un logiciel fabriqué dans un
sous-sol, avec un support technique déficient, etc.
OBJECTIF CONSEILLER
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JP Pour l’obtention du contrat avec LBG, il y
avait aussi un concurrent de l’Ouest canadien en lice.
Certains conseillers en placement appuyaient
la solution concurrente alors que d’autres croyaient
en la nôtre. La firme a dû trancher éventuellement.
Après un essai d’une semaine chacun, ils ont
redemandé l’avis des conseillers. C’est alors
qu’ils ont dit : faites venir les deux jeunes de Laval.
RT Il faut préciser aussi que la gestion de
la croissance de Unigiciel a été un défi pour nous.
Il était primordial de bâtir sur du solide.
Nous croyons y être parvenus. Il y a maintenant
plus de 30 employés à Unigiciel, nous pouvons
compter sur une équipe jeune, dynamique,
motivée et compétente; c’est la force de
notre entreprise.
«
Après un essai d’une
semaine, LBG ont dit :
faites venir les deux
jeunes de Laval...
OC Pourquoi un conseiller opterait pour Crésus plutôt
CJ Ce qui a fait la différence, c’est qu’au départ, ce
sont des conseillers en placement qui ont permis de
développer le tout premier Crésus qui a été installé chez
LBG, et le logiciel continue toujours d’évoluer à partir
des idées des utilisateurs.
RT Crésus est un logiciel assez simple à utiliser. Sa
simplicité est d’ailleurs sa force. Il est aussi capable de
gérer un volume de comptes-clients très important.
Plus de 2 500 utilisateurs de Merril Lynch Canada
se servent de Crésus. Ce sont d’énormes bases de données. Il faut les traiter tous les soirs et c’est là que
Crésus se démarque : il peut traiter des volumes de
données substantielles.
OC Vous desservez plusieurs entreprises au Canada
et en Australie, avez-vous des visées mondiales?
Nous ne voulons pas trop en parler, nous n’aimons
pas parler des clients que nous n’avons pas encore. Il ne
faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué.
C’est notre approche : un client à la fois.
RT
OC Avez-vous l’intention éventuellement d’aller
chercher des capitaux à l’extérieur?
Unigiciel veut évoluer en fonction de ses besoins.
Pour le moment, nous n’avons pas besoin de financement extérieur, nous sommes autosuffisants.
Éventuellement, quand les marchés vont s’ouvrir, le
marché américain, entre autres; nous verrons.
CJ
OC Qui sont les actionnaires actuels de Unigiciel?
Ce sont les trois actionnaires fondateurs.
Il y a aussi la Financière Banque Nationale qui a investi
dans l’entreprise et Spectra Software, notre distributeur,
qui a son siège social à Toronto.
RT
»
— Jean Poiré
qu’un autre logiciel semblable?
Profils
• RÉMY THERRIEN, ingénieur et informaticien
• Président et actionnaire de Unigiciel
• JEAN POIRÉ, ingénieur et informaticien
• Vice-président et actionnaire de Unigiciel
OC En terminant, si un jour venait où tous les conseillers
en placements avaient Crésus, que feriez-vous?
Nous serions encore motivés! Crésus sera toujours
en constante évolution. Par exemple, nous travaillons
actuellement à développer une nouvelle version en JAVA
avec laquelle les conseillers en placement accéderont à
Crésus à travers leur fureteur Internet. De plus, une
interface permettra aux clients des firmes de courtage
utilisant Crésus de consulter leur portefeuille en ligne.
Finalement, nous développons aussi un nouveau
module, appelé «Trade Wizard», qui assistera le
conseiller en placement par une gestion systématique de
ses comptes. À l’aide de ce module, le conseiller pourra
modifier les paramètres intrinsèques de chacun des portefeuilles d’un ensemble de comptes, en générant automatiquement les transactions selon des contraintes et
des critères préétablis. Ainsi, à titre d’exemple, on
pourra en quelques clics augmenter ou diminuer la
durée de plusieurs comptes.
Nous avons vraiment à cœur de faciliter et d’améliorer le travail des conseillers en placement, c’est notre
objectif en bout de ligne.
RT
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