Bodymat: vers une informatique adulte

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Bodymat: vers une informatique adulte
Bodymat: vers une informatique adulte
Pratique
Par Brigitte Doucet · 07/10/2016 à 08:30
Voici un peu moins de deux ans, BodyMat
(la holding qui chaupeaute notamment
l’enseigne Big Mat – voir encadré ci­
dessous) disposait encore d’une
infrastructure informatique somme toute
caractéristique d’une société qui a
construit, aménagé, parfois contorsionné
son IT au fil du temps.
L’environnement existant avait certes ses
avantages – telle la stabilité de
l’environnement AS/400 – mais aussi ses
inconvénients, ses faiblesses et – surtout –
ses lacunes. De celles qui rendent toute
évolution et modernisation pour le moins
périlleuse et lourde.
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Petit inventaire: AS/400, un ERP venu de France, certes conçu pour
les besoins spécifique du négoce du bois et des matériaux de
construction, mais passablement vieilli ; un serveur Exchange, qui ne garantissait pas une boîte mail à tous les utilisateurs ; et un
embryon de business intelligence.
La véritable révolution qu’a entamée le nouveau directeur IT, Wim Gouwy, inclut une centralisation des données (achats,
commandes, livraisons, contrôle budgétaire…) et la mise en oeuvre d’une réelle BI, d’un WMS (solution de gestion d’entrepôt) et
d’un TMS (gestion des transports).
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Pas de vue unifiée
L’un des problèmes majeurs de l’ancienne situation résidait dans la fragmentation des données. Chaque société du groupe – et il
était en extension constante, notamment via rachat d’agences – opérait dans une sorte de silo personnel, isolé du reste.
“Impossible dans ces conditions de procéder à l’extraction d’une
fiche client pour obtenir les chiffres ou son “profil” sur l’ensemble
du groupe”, souligne Wim Gouwy, directeur IT de BodyMat. “Il
fallait procéder à une extraction – fastidieuse – société par
société.”
Impossible aussi d’envisager le nécessaire partage et échange
de données qu’impliquerait l’arrivée, planifiée, d’un Warehouse
Management System (WMS) et que nécessitait par ailleurs le
déploiement d’une véritable solution de business intelligence. Et,
dès lors, impossible, par le passé, d’optimiser les stocks, la
logistique, la gestion, le suivi client…
Pour résoudre ses problèmes d’intégration et d’harmonisation de
son infrastructure, BodyMat s’est tourné vers la base de données
Caché et la solution middlewareEnsemble d’Intersystems.
L’occasion de procéder à un grand nettoyage: restauration de la
rigueur dans la manière dont les différents champs (base de
données, ERP) étaient utilisés, réalignement de la
nomenclature…
Cette migration était pour la société la promesse de confier à cet
outil d’interface l’intégration entre les différents éléments de son
infrastructure IT, sans devoir réécrire toutes les interfaces, et
imaginer des connecteurs entre les différents pans qui la
constituent. L’occasion aussi d’instaurer de la rigueur dans la
définition des données, des objets, des classes…, d’utiliser
désormais une base d’articles commune, garant d’une gestion
client et fournisseur mais aussi de changements rapides et
cohérents.
En Wallonie, BodyMat possède 13 points de
vente/dépôts de matériaux (enseigne BigMat)
répartis en 8 sociétés (Entrepôts de la Famenne,
Namur Habitat, Ghetobloc, Ardennes Matériaux,
Condroz Matériaux, Antenne Mat, Marlier et
Doyen).
A noter que 12 autres points de vente BigMat
existent sur le territoire wallon mais ne font pas
partie du groupe BodyMat.
Ces 8 sociétés sont réunies en une holding,
baptisée HolMat, elle­même détenue par
BodyMat.
S’y ajoute encore une société de transport et de
manutention de matériaux (TransNam) qui se
charge des livraisons aux clients.
La plate­forme logistique (LogistiMat) a été
créée en 2009.
Le groupe a par ailleurs procédé à l’acquisition
de Delvaux Bois (Ciney), spécialisée dans le
commerce du bois, afin de développer un pôle
d’activités complémentaire, désormais baptisé
BoisMat.
Ensemble, par ailleurs, assiste les utilisateurs en générant
automatiquement des propositions de réapprovisionnement, par
exemple pour commander en temps et heure les quantités qui
optimiseront les coûts.
Autre progrès en passe d’être concrétisé: un processus d’extraction temps réel des données (qui se faisait jusqu’ici en batch,
chaque soir) afin de pouvoir réagir immédiatement à chaque commande ou besoin en stocks. De quoi connecter en live l’ERP et
le WMS.
Vision sur les stocks
Ce potentiel temps réel est non seulement utile pour la gestion des stocks au quotidien mais aussi pour le contrôle de gestion.
Jusqu’à présent, il fallait encore “figer” la situation de stocks en fin de mois pour obtenir une idée de la situation. Délai de
traitement: 3 jours. Désormais, le calcul de la situation clients/fournisseurs, par exemple, pourra se faire en temps réel.
La chose a été rendue possible grâce à un développement
de la société nivelloise Easi qui a conçu une solution de
réplication entre les serveurs de ces deux sites, de quoi
garantir une extraction, surveillance et mise à jour
cohérentes des données en vue d’alimenter le WMS.
Par ailleurs, grâce aux outils Caché et Ensemble, BodyMat
pourra désormais analyser la situation de ses divers types
de ventes – ventes enlevées [emportées par le client],
livrées, livrées agence, ou livrées plate­forme [à partir des
deux plates­formes logistiques centralisées de Malonne et
de Ciney]. Avec possibilité d’analyser les chiffres par type de
produit, catégorie professionnelle… Les extractions et
analyses s’effectuent la nuit, permettant aux collaborateurs
d’avoir un état précis de la situation chaque matin.
La fonctionnalité d’Ensemble permet également d’orchestrer
la circulation des données et leur intégration entre, d’une
part, l’ERP et le module de gestion des commandes client et
des ventes livrées et, de l’autre, le TMS (Transport
Management System). Chaque saisie dans le module vente déclenche une lecture de journalisation, permettant à Ensemble de
détecter une commande de livraison qui est dès lors transposée sur le portail où le vendeur peut compléter les données
nécessaires à la livraison (par exemple, des formes de matériaux inhabituelles, les volumes concernés, le type de matériau qui
peut ou non être empilé…).
A noter toutefois que le logiciel de composition des cargaisons n’est pas seul maître à bord. L’automatisation a ses limites. “Pour
composer efficacement une cargaison de camion, c’est encore l’expérience de l’homme qui prime”, souligne Wim Gouvy.
Du tableur à la business intelligence
Autre avantage: un contrôle de gestion plus efficace. Jusqu’ici, l’outil utilisé était tout simplement le tableur Excel. Un outil qui a
montré ses limites en termes d’analyse des paramètres qui influent les chiffres.
BodyMat a décidé de s’équiper d’outils de business intelligence: MicroStrategy
pour les tableaux de bord, son outil Visual Insight pour la consultation des
rapports – en ce compris au départ de tablettes numériques, pour les
responsables commerciaux. “Cela nous permettra une analyse plus pointue
des rapports, avec possibilité de zoom sur les détails.”
Les destinataires des tableaux de bord ne seront pas pour autant très
nombreux. La nouvelle responsable du contrôle de gestion, en tout cas, sera
du nombre. “Jusqu’ici, il lui fallait extraire les chiffres d’Excel et les transvaser
dans Open Report qui moulinait à mort…”, déclare Wim Gouwy. “L’opération
accaparait aisément 3 semaines chaque mois. On finissait certes par avoir
tous les chiffres mais on ne les analysait pas. On soulignait simplement
certains éléments au fluo. Le temps manquait d’ailleurs pour une analyse
puisqu’à peine les chiffres établis, il fallait déjà lancer l’exercice pour le mois
suivant. Aujourd’hui, l’opération est bouclée en 36 heures.”
Le gain de temps réalisé pour la collecte et la production des chiffres permet à
BodyMat d’avoir une bien meilleure connaissance de sa situation. “Nous
facturons deux fois par mois. Désormais, nous connaissons les résultats des
ventes avant même que la facture ne soit produite le jour suivant…”
Wim Gouwy: “On finissait certes par avoir tous
les chiffres mais on ne les analysait pas. Le
temps manquait d’ailleurs puisqu’à peine les
chiffres établis, il fallait déjà lancer l’exercice pour
le mois suivant.”
La vision est également plus immédiate sur les indicateurs­clé ou les éléments
que la société veut pouvoir surveiller ou analyser. Par exemple, la proportion
de commandes payées en argent liquide, la localisation des stocks “morts”
(aucune vente depuis 12 mois et pas de remise en stock depuis 6 mois).
“Et nous pourrons également analyser de manière plus fine les raisons pour
lesquelles certaines conditions spéciales sont accordées, par tel ou tel
vendeur, à tel ou tel client. Les vendeurs sont tenus à des règles bien précises
mais nous pourrons par exemple analyser sur quels prix ou sur quelles
familles de produits les conditions spéciales sont les plus appliquées, à quelle
période, etc.”
Autrement dit, l’analytique permettra de mieux “décrypter” les comportements des commerciaux.
Centraliser et optimiser
Si BodyMat a décidé de s’équiper d’un TMS (interfacé avec TomTom pour assurer une géolocalisation et un suivi temps réel des
véhicules), ce n’est pas pour “pister” et surveiller en temps réel le “comportement” ou les “performances” des chauffeurs et
employés. “Nous voulons tout simplement savoir quand un camion arrive et repart de chez un client et être dès lors en mesure de
déterminer les délais de livraison de la commande suivante.”
Les informations, intégrées, qui alimentent les modules WMS et TMS
permettent d’optimiser à la fois le stockage et les chargements, en
fonction des longueurs, volumes et dimensions, poids, fragilités…
“Jusqu’à présent, les matériaux disponibles en stocks n’étaient pas
(géo)localisés. Tout repose sur le fait que les collaborateurs savent,
d’expérience, où se trouve chaque type de matériau. Cela pose
parfois malgré tout des problèmes de stockage”, constate Wim Gouwy.
L’arrivée du WMS va changer profondément les habitudes et les
réflexes. L’encodage de la localisation et des paramètres précis de
chaque lot devient obligatoire. De nouvelles compétences en
logistiques devront aussi être assimilées par les collaborateurs. “Le
logiciel implique de nouvelles habitudes parce qu’il se nourrit de
données. Sans connaissance des volumes de palettes, le WMS, par
exemple, ne peut localiser les matériaux…” Il s’agit dès lors
d’instaurer une nouvelle culture”, souligne Wim Gouvy.
Sa mantra: “constater, mesurer, analyser, adapter…”
Les collaborateurs devront accepter que ce qui “a toujours été fait comme ça” change soudain. C’est donc tout un travail de
préparation et d’appropriation de processus et d’une méthodique qui doit se faire car, comme le souligne encore Wim Gouvy,
“cela ne sert à rien de mettre en place le système le plus pointu qui soit s’il n’y a pas de la rigueur à la base. Le déploiement du
logiciel doit se traduire par une organisation efficace sur le terrain.”
Wim Gouvy: “Cela ne sert à rien de mettre en place le système le plus pointu qui soit s’il n’y a pas de la rigueur à la base.
Le déploiement du logiciel doit se traduire par une organisation efficace sur le terrain.”
WMS et TMS devraient par ailleurs permettre d’optimiser volumes et espaces de stockage et coûts logistiques de manutention et
de transport. “L’organisation des transports se faisait jusqu’ici en manuel. Par ailleurs, chaque agence disposait de son propre
responsable Transport. Mais ces responsables ne se coordonnaient pas entre agences.
Résultat: l’agence de Marche pouvait parfaitement envoyer un camion pour livraison à un client se situant dans la région
d’Andenne alors que l’agence d’Andenne desservait un client proche de celle de Marche…”
Désormais, la centralisation à la fois de la majorité des stocks et des données va permettre d’améliorer la planification des
livraisons et des tournées et éviter ce spectacle étonnant de camions chargés se croisant sur les routes.
Centralisation et optimisation sont également à l’ordre du jour du côté des achats. “Nous dénombrions jusqu’ici une quarantaine
de responsables Achats. C’est trop, d’autant qu’ils n’utilisaient aucun logiciel de planification.”
Si la décision de centraliser la gestion des achats a été prise, la manière de procéder, elle, doit encore être déterminée.
Wim Gouvy: “Il y avait parfois de la concurrence entre agences. Elles ne voient pas qu’elles font en fait partie d’un même
groupe.” La centralisation des outils, données et processus va donc induire l’appropriation d’une nouvelle “culture”.
L’ERP WinnMat, lui, est condamné à être remplacé. D’une part, parce que son évolution technologique n’est plus assurée et qu’il
a pris, lui aussi, plus d’une ride (impossible d’utiliser la souris, il faut encore en passer par des raccourcis clavier). De l’autre,
“parce qu’il reflète trop des procédures de petites négoces et non celles d’un grand groupe. Au fil du temps, la société a été
amenée à appliquer trop de rustines. Le tout est devenu très… spaghetti. Pour s’en tirer, si on devait le garder, il faudrait opérer
un énorme workaround…”
La nouvelle composition de l’IT de BodyMat
Pour résoudre ses problèmes d’intégration et d’harmonisation de son infrastructure, BodyMat s’est tourné vers la base
de données Caché et la solution de middleware Ensemble d’Intersystems (ETL, EAI, MOM, data warehouse).
Autres outils choisis:
Business Intelligence: MicroStrategy
Comptabilité analytique: Easi Financials
WMS (Warehouse Management System): solution sur­mesure développée par la société liégeoise TLS (Technical
Logistics System)
calcul des propositions de réapprovisionnement: Planipe, de GFI
TMS (Transport Management System): Smartour de PTV Group
gestion documentaire: AbilDoc (Lille)
géolocalisation: TomTom