Stage Pédagogie de la Natation

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Stage Pédagogie de la Natation
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Stage Pédagogie de la Natation
S.TINAYRE CPC EPS + M.BARRAUD PIUFM EPS
1- MIEUX COMPRENDRE POUR MIEUX AIDER LES ELEVES
-LA PEUR DE L’EAU
Il ne s’agit pas d’une pathologie mais d’une réponse normale de l’organisme qui doit faire face à la
perte de ses repères lorsque le corps est immergé dans l’élément liquide. Il faut bien distinguer cette
peur justifiée de celle liée à des fantasmes ou fausses idées, l’écho de craintes formulées dans
l’environnement familial ou les peurs ancestrales qui appartiennent à notre patrimoine culturel et
qui associent l’eau à la mort ou à un passage initiatique.
Toutes ces peurs ne doivent pas être ignorées mais reconnues, verbalisées pour mieux être
combattues ensuite. Certains albums de littérature jeunesse évoquent l’aquaphobie. On peut donc
s’en servir comme support de discussion.
-DES OBSTACLES PHYSIOLOGIQUES
Notre corps perd donc ses repères de corps-terrien. Il a des réflexes conditionnés.
Plus d’appui plantaire donc une tendance au pédalage désordonné à la recherche d’appuis.
L’oreille interne perd la notion d’équilibre vertical, elle cherchera donc à le rétablir en provoquant un
redressement de la tête ayant également pour but la libération des voies respiratoires et la
recherche de repères visuels. Les bras se placent en extension.
La perturbation émotionnelle est aussi importante face à la modification du milieu.
-LA SCIENCE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE DE LA NATATION
Il est donc primordial pour l’apprenti nageur d’avoir une approche scientifique des phénomènes liés
à l’élément liquide. Faire des parallèles entre les expériences « flotte-coule » et les expériences
vécues à la piscine est un excellent moyen de se débarrasser des idées fausses usuelles qui sont de
trois natures : -la peur de se remplir (les jeunes enfants pensent que l’eau peut entrer dans le corps
par la bouche, le nez et même parfois les yeux)
-la peur de couler
-la peur de rester au fond
En instaurant des petits moments d’expérience permettant de tester les hypothèses des élèves, on
écarte une fois pour toutes ces craintes.
-EDUCATION AU DANGER
Il ne s’agit pas de nier le danger, au contraire : on apprend à l’enfant à mieux connaître le milieu
aquatique et les limites du corps de l’homme. Il a donc une notion des véritables risques (non des
risques fantasmés) et de la manière de se conduire pour garder la maîtrise des situations.
Un volet « sauvetage » peut être ajouté à la fin du cycle de natation pour sensibiliser aux gestes
appropriés et aux attitudes à éviter.
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2- QUELS OBJECTIFS DERRIERE LE « SAVOIR NAGER »
-DEFINITION
Le concept de « savoir nager » a évolué. Une définition appropriée à la philosophie scolaire est celleci : « prendre le risque de s’aventurer dans le milieu aquatique profond en autonomie complète, sans
aucune reprise d’appui immédiat avec le monde solide »
On a donc deux objectifs principaux :
-un objectif utilitaire : savoir se sortir de l’eau
-un objectif plaisir : savoir rester dans l’eau le plus longtemps possible
3- LES ETAPES ESSENTIELLES
Certaines étapes sont primordiales à l’apprentissage de la natation :
-ACCEPTER L’IMMERSION : avoir la capacité de s’immerger volontairement. En découleront d’autres
aspects comme la gestion de la respiration (apprendre l’apnée, apprendre à gérer les expirations
sous-marines et les inspirations en surface avec un rythme particulier). La vision sera également un
élément à prendre en considération dans l’immersion : apprendre à ouvrir les yeux, à prendre de
nouveaux repères sous-marins, se concentrer sur la verticalité du regard dirigé vers le fond.
-ACCEPTER DE LAISSER L’EAU FAIRE : avoir la capacité de se penser en tant que « corps flottant »,
gérer le déséquilibre. On apprendra à se laisser porter par l’eau, que ce soit en expérimentant la
« boule », la « méduse », l’ « étoile » ou en testant la remontée passive.
-ORGANISER LA PROPULSION : avoir la capacité de se rééquilibrer et s’orienter à des fins
propulsives. Nager n’est pas avoir un équilibre le plus stable et le plus horizontal possible, c’est au
contraire une gestion du déséquilibre. L’enfant passera de l’exploration désordonnée (rassurante
mais inefficace) à la coordination experte avec des étapes intermédiaires de mélange des deux
pratiques, parfois des régressions.
-ACCEPTER LA CHUTE : avoir la capacité de gérer le déséquilibre, de se pencher avant dans l’eau.
De l’entrée par le saut vertical jusqu’au plongeon, tout un travail d’acceptation de la « bascule » est à
accomplir.
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4- ENSEIGNER LE « SAVOIR-NAGER »
A) Organisation
-LE MATERIEL ET LES ACCESSOIRES
Ceintures, brassards, planches, frites…nombreux sont les accessoires dont on barde les enfants pour
se rassurer, ils s’inscrivent dans un enseignement traditionnel que l’on essaye de faire évoluer car
l’élève qui a d’emblée le matériel flotte artificiellement et voit renforcées ses représentations et ses
craintes (« c’est donc que mon corps ne peut pas flotter naturellement »). Raymond Catteau fut un
des pionniers à lancer des non nageurs en grande profondeur sans matériel.
Si la ceinture peut servir d’appui sur des séances types « water polo » lors desquelles l’enfant doit se
maintenir longtemps en surface en fournissant des efforts physiques importants, on évitera de
l’employer au départ pour des activités d’apprentissage.
On conçoit cependant que la frite, ou la planche qui constituent un matériel « mobile » (dont on se
sépare facilement et non attaché au corps comme la ceinture), peuvent être des outils précieux dans
certaines situations. Le principe est que ces accessoires doivent être tenus le plus près de l’axe
médian du corps pour éviter la verticalité.
Les lunettes peuvent constituer un déclencheur libérateur pour l’immersion, facilitant la prise de
repères dans une eau dont les composants peuvent irriter les yeux. Elles ne doivent pas être gardées
sur le nez tout le long de la séance.
-L’ORGANISATION EN GROUPES : HOMOGENES OU HETEROGENES
Traditionnellement, les enseignants travaillent en groupes homogènes, facilitant ainsi la préparation
des séances et la gestion du groupe et sa répartition entre les intervenants.
On se prive cependant ainsi du tutorat, de la valeur d’exemple et de la stimulation que peuvent
apporter des éléments forts au sein de groupes hétérogènes. Les deux solutions ont leurs avantages
et leurs inconvénients.
-UN TRAVAIL COLLABORATIF ENTRE DES ADULTES DIFFERENTS (enseignant, MNS, parent)
L’enseignant organise sa séance. Il a donc la charge de répartir les tâches au niveau des différents
intervenants. Le MNS se voit souvent confier les élèves nageurs, or, ses qualités de spécialistes
peuvent bénéficier avantageusement à des élèves non nageurs ou pré-nageurs, tandis qu’il est plus
simple pour l’enseignant de mener sans risque un groupe de nageurs vers des activités diversifiées
comme le water-polo, la natation synchronisée ou le sauvetage.
Le parent est en renfort du dispositif. Il peut avoir à sa charge un groupe d’enfants à condition qu’il
ait eu connaissance des consignes de manière précise.
B) Contenu
-LE CONTENU DES SEANCES
Il est défini par les programmes et de nombreux outils permettent de trouver des situations
d’apprentissages adaptées (cf CDRom départemental et son document d’accompagnement).
Il se décline en 4 domaines principaux :
entrer dans l’eau
s’immerger (adapter sa respiration)
s’équilibrer
se déplacer (propulsion)
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Il est nécessaire de garder en tête quelques idées conductrices ou idées force (cf document
annexe).
-LES SITUATIONS PEDAGOGIQUES :
Il est important de faire varier les situations. On pourra proposer
-des parcours (scénarisés pour les plus petits) qui déclinent les 4 thèmatiques
-des jeux collectifs (lors desquels la situation plaisir et l’objectif de l’élève fontt souvent oublier les
craintes)
-des ateliers « expériences » (à relier à l’aspect scientifique)
-des situations de travail technique ciblées sur des objectifs précis
-LE DEROULEMENT DE LA SEANCE
On pourra alterner ou faire se succéder les situations et les dispositifs. Il peut être judicieux de parler
en classe en amont de ce qui va être fait ou en aval de ce qui a été fait. L’évaluation peut être une
auto-évaluation ou une co-évaluation à l’aide de fiches illustrées. Le cahier de natation peut être un
outil précieux.
Sources :
Tar/ Devaux Le fabuleux voyage de Lola Editions Revue EPS
R.Catteau Devenir meilleur nageur à l’école
Maury/Coudrier Natation pour les 6/12 ans Editions Revue EPS
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ANNEXE
LES IDEES –FORCES POUR L’ENSEIGNEMENT LA NATATION
A L’ECOLE PRIMAIRE
(Livret d’accompagnement de l’album « Le fabuleux voyage de Lola)
1 : l’apnée
Un débutant est capable de réaliser des apnées.
Lui demander de souffler en continu, c’est souvent compliquer le problème du débutant à ce stade :
-sentiment d’oppression ;
-reprise d’air plus fréquente.
Un grand volume d’air retenu dans les poumons (inspiration) accentue la flottabilité par
augmentation du volume corporel et diminue ainsi la sensation de chute (équilibration).
Ce qui ne veut pas dire que l’on demande aux élèves de réaliser des prouesses en matière d’apnée…
2 : le corps flottant
Une immersion la plus complète possible conditionne les sensations de l’enfant.
- Le début de l’apprentissage vise la conquête d’une première autonomie qui permet de lâcher le
bord au moins momentanément.
- Ceci implique l’acceptation d’une immersion préalable, verticale au départ puis de plus en plus
horizontale.
- La sensation de chute diminue dans les deux cas parce que l’enfant flotte d’autant plus qu’il est
immergé.
- Cette sensation d’abandon à l’eau et d’absence de pesanteur est fondamentale : boule, méduse,
étoile… Il s’agit de se laisser flotter en se relâchant
3 : la position de la tête
Le corps humain à tendance à chuter du côté des jambes.
- Quand la tête est hors de l’eau, l’enfant s’enfonce et pense alors qu’il coule.
- Il s’enfonce certes mais il suffirait d’attendre un peu pour ressentir la poussée d’Archimède vers le
haut.
- La réponse de l’enfant relève d’un comportement archaïque lié à la sensation de chute, au besoin
de s’équilibrer et à l’envie de se repérer visuellement.
La tête dans l’eau rééquilibre le corps vers l’avant tout en augmentant le volume immergé et, en
décontractant la nuque et le dos, diminue le réflexe de redressement.
4 : la remontée passive
L’exploration de la profondeur est une nouvelle étape pour mettre en évidence le fait que non
seulement « je ne tombe pas » mais qu’au contraire « je monte ».
-L’élève crispé sur la goulotte, le buste hors de l’eau, ne ressent pas la poussée de l’eau vers le haut.
- Si l’enfant cherche à toucher avec le ventre le fond du petit bassin, il s’apercevra de la difficulté.
-S’il accepte de rejoindre la profondeur avec la perche, il constatera en lâchant le support qu’il
remontera.
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5 : la coulée ventrale
Objectif : prendre la forme d’une torpille avec la tête dans l’alignement du tronc, les bras derrière les
oreilles.
- C’est un moyen pour aller plus loin avec un meilleur hydrodynamisme : « profil ».
- L’enfant doit être capable de retrouver cette position lorsqu’il nage, c’est-à-dire lorsqu’il y a
propulsion.
- La coulée ventrale est donc une charnière entre l’équilibration et la propulsion ; une certaine
tonicité est nécessaire pour maintenir le « profil » lors de la recherche d’appuis pour créer le
mouvement.
Rupture dans l’apprentissage : le sujet ne s’adapte plus au milieu mais est amené à construire luimême son nouvel équilibre.
Ces perceptions ne peuvent se ressentir qu’avec un minimum d’autonomie et de sécurité affective.
6 : le moteur avant
Pour le nageur, la réalisation et la régulation des actions doivent être orientées vers une recherche
sensible d’appuis. C’est le sensoriel qui guide le mouvement.
- Les bras ont un rôle perceptif, donc moteur essentiel.
- Les jambes ont aussi des choses à apprendre mais l’enfant s’en sert pour se propulser plus que pour
s’équilibrer.
- Il est donc souhaitable de l’inciter à mettre «un moteur avant » y compris sur une coulée ventrale
en profondeur.
- Les bras plus les jambes…et privilégier le repère de la sensation pour organiser le mouvement (et
non la forme du mouvement par exemple).