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RENDEZ-VOUS DE L’ACIER FUSIONS ET ACQUISITIONS AU-DELÀ DU BÂTIMENT PARAMÈTRES L’EMPREINTE QUÉBÉCOISE PLUS GRANDE V10 N4.14 POSTE PUBLICATION 41060025 6,96 $ CAN QUE NATURE Une présentation de Ce dossier décline aussi notre patrimoine, inscrit dans nos paysages – l’un en particulier, immense, singulier, intimement lié à notre quotidien et notre imaginaire, l’emblématique « fleuve aux grandes eaux », que malheureusement une certaine forme d’insouciance risque d’altérer. L’Ordre des urbanistes du Québec en a fait le thème intégrateur de son récent congrès. Ce dossier s’intéresse à toutes les échelles, celle de l’immensité de son bassin, des grands enjeux environnementaux et territoriaux, qui se répercutent tout autant à plus petite échelle avec l’exemple singulier de l’île aux Pommes, « un microcosme tourné vers le monde », titre notre auteure. Dans son texte d’introduction, trait d’union entre toutes les composantes du dossier, Marie résume l’esprit du propos : « Malgré la diversité des contextes abordés ici, un fait demeure : nature, histoire, pérennité, créativité sont des constantes évoquées à travers tout le dossier, qui agissent comme des ressorts appuyant sur nos cordes sensibles. Ces marques confèrent à toute œuvre une valeur ajoutée, pour peu qu’on les marie à un design innovant, une architecture contemporaine, un jardin ou une île laboratoire. » mot de l’éditeur Du côté de la section Réalisations, un nouveau collaborateur, Thierry Petelle, présente une belle initiative de l’Association des designers industriels du Québec (ADIQ). La nouvelle publication annuelle de l’ADIQ, Paramètres, « un déclencheur de dialogue », invite la communauté à prendre connaissance des divers visages du design industriel. Pour sa part, Marie Dallaire présente les projets lauréats des Holcim Awards 2014, région Amérique du Nord. Cette compétition souligne l’excellence de concepts qui se démarquent sur le plan des enjeux environnementaux. Projets fascinants... Quant à François G. Cellier, il nous fait découvrir sous un angle inédit les travaux de réaménagement du Casino de Montréal, « un renouveau qui passait par la R et D ». Enfin, la section Matériaux nous donne rendez-vous avec l’acier grâce à la présentation des Prix d’excellence de l’ICCA, texte signé par Pierre Turbis. Pierre nous entretient également de Maisons efficaces, un nouveau programme d’Hydro-Québec. Bonne lecture! Claude Paquin Éditeur édacteur et journaliste depuis vingt ans, François G. Cellier collabore au magazine FORMES ainsi qu’à d’autres publications qui traitent d’immobilier. À cheval sur le pragmatisme et la rigueur, il affectionne les dossiers fouillés qui requièrent une certaine recherche. Le secteur des communications est une autre sphère qui l’intéresse plus particulièrement. Animé par le désir du travail bien fait, il est de ceux qui pensent que la reconnaissance n’a pas de prix. Pour lui, l’honnêteté intellectuelle et une application à la tâche, sans concession, sont le gage d’une satisfaction personnelle et d’une crédibilité indispensables pour durer dans le métier. Dans ce numéro, il aborde la question des fusions et acquisitions dans le domaine de l’architecture au Québec. À une époque où les frontières tombent un peu partout dans le monde, assiste-t-on à une tendance lourde en cette matière chez nous? T hierry Petelle, diplômé en design industriel (Université de Montréal – 2005), fait partie des meubles chez TACTIX, bureau spécialisé en design de produits de sport. Depuis peu, Thierry partage également ses connaissances et son enthousiasme pour la profession à titre de chargé de cours à l’université. C’est son désir de mettre l’épaule à la roue pour la reconnaissance du design qui l’amène à joindre le comité éditorial de la première édition de Paramètres, parution annuelle sur le design industriel au Québec, une initiative de l’Association des designers industriels du Québec (ADIQ). L’écriture et l’édition l’ayant toujours attiré, il signe ici un premier papier sur cette récente réalisation de l’ADIQ et ses collaborateurs. - • Territoire de 3,5 millions de km2 • 18 % des ressources mondiales d’eau douce de surface • Deux pays • Six provinces canadiennes • Quatre États américains • Près de 50 millions d’habitants • Plus de 15 000 organismes de développement et d’aménagement • Cœur économique, industriel et agricole du continent Notre collaboratrice Valérie Levée propose un papier sur des réflexions sur le bâtiment durable discutées lors d’un colloquesymposium organisé par l’Initiative Bâtiments Durables et Climat du Programme des Nations Unies pour l’environnement (UNEP-SBCI) et ses partenaires, dont la Section du Québec du Conseil du bâtiment durable du Canada (CBDCa-Qc). R Parmi les autres sujets de ce numéro, notre collaborateur François G. Cellier propose un texte fort intéressant sur la mouvance observée dans les bureaux d’archi- 1 Une référence aux ouvrages Le fleuve aux grandes eaux, livre et film de l’auteur Claude Villeneuve, magnifiquement illustrés par Frédéric Back – Éditions Québec Amérique et Société Radio-Canada. formes UNE EXPOSITION – DES ENJEUX À propos de Jean-Claude Poitras, sa contribution à une réflexion sur le meuble québécois s’est concrétisée en équipe par la réalisation d’un référentiel d’écoconception de mobilier baptisé « L’Empreinte québécoise », un outil novateur qui a permis l’éclosion d’une signature à notre image. tectes : fusions et acquisitions, un thème d’actualité, des points de vue exprimés par des architectes. « Manifestation d’une tendance lourde qui ne fait que commencer selon certains, petit feu d’artifice en voie de s’éteindre pour d’autres, les fusions et acquisitions de firmes d’architecture au Québec sont bel et bien réelles. Et elles ne laissent personne indifférent », observe François. v10 n4 - 2014 Ce numéro est en continuité avec le précédent, sans nécessairement en constituer une suite. Il puise dans des éléments incontournables de notre identité, notamment le « fleuve aux grandes eaux1 », sujet de notre précédent numéro d’été. Signé de la plume de son auteure, notre rédactrice en chef Marie Dallaire, ce dossier se décline en divers thèmes, tous entrelacés. Marie explore nos racines, notre patrimoine, s’inspire d’ancêtres et de leurs contemporains pour exprimer notre histoire, notre empreinte québécoise. «Vus d’ici ou de loin, à quoi ressemblons-nous? Quelle image de nous voulons-nous projeter et pourquoi?» Différents experts ont guidé Marie dans sa réflexion : Pierre Thibault en architecture, Jean-Claude Poitras en design, Alexander Reford en art des jardins. collaborateurs Notre empreinte 3 Inaugurée lors du récent congrès de l’Ordre des urbanistes du Québec, l’exposition Grandes Villes/Grands Lacs/Grand Bassin s’apprête à prendre la route. Soyez parmi les premiers à l’offrir à vos populations. Une trentaine de clichés fascinants amènent le visiteur à découvrir les beautés du fleuve majestueux et à s’interroger sur ce qui menace l’harmonie de ses paysages. Apprécier le sens et la valeur de ce patrimoine exceptionnel, comprendre qu’il mérite d’être protégé et développé dans le respect de son évolution, voilà l’impact de cet outil de sensibilisation. Une exposition itinérante dans votre région Si vous entendez prendre part à un idéal de planification, de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine fluvial; si vous souhaitez promouvoir dans votre région une meilleure compréhension de la géographie humaine, naturelle et économique du bassin versant du Saint-Laurent, selon une approche durable et environnementale; cette exposition est pour vous! Pour accueillir cette exposition dans sa région ou pour information, on peut communiquer avec Vladimir Arana au Secrétariat international de l’eau. 514-849-4262 [email protected] Le Secrétariat international de l’eau, l’Ordre des urbanistes du Québec, les Amis de la vallée du Saint-Laurent et la firme d’architectes Provencher Roy s’allient pour promouvoir et diffuser cette exposition éducative dans toutes les villes riveraines du tronçon québécois du fleuve et de l’estuaire. L’exposition Grandes Villes/Grands Lacs/Grand Bassin est née d’une rencontre de deux visions : celle de Skidmore, Owings & Merrill LLP (SOM) appuyés par la Fondation d’architecture de Chicago, et celle du Secrétariat international de l’eau et de ses partenaires. Une présentation de Claude Paquin Éditeur Illustration : Skidmore, Owings & Merrill LLP Les Holcim Awards pour la construction durable récompensent l’innovation et l’écoefficacité Holcim Awards Or Poreform : surface hydroabsorbante et bassin souterrain, Las Vegas Holcim Awards Argent Le BIG U : infrastructure de protection urbaine contre les inondations, New York Holcim Awards Bronze Hy-Fi : structure compostable zéro carbone, New York Amy Mielke et Caitlin Gucker Kanter Taylor, Water Pore Partnership, New Haven, CT Un consortium international dirigé par Bjarke Ingels et Kai-Uwe Bergmann , BIG, Danemark et New York David Benjamin, Living Architecture Lab, New York Prix Holcim Awards Acknowledgement Édifice Chrysanthemum : complexe urbain de logements abordables sur terrain intercalaire, Boston Prix Holcim Awards Acknowledgement Revitalisation patrimoniale : rénovation et agrandissement d’un édifice universitaire, Toronto Prix Holcim Awards Acknowledgement In-Closure : parc et mur interactif publics pour la revitalisation urbaine de Seattle Prix Holcim Awards Acknowledgement Divining LA : outil numérique d’esthétique urbaine et de planification de l’utilisation de l’eau, Los Angeles Sheila Kennedy et J. Frano Violich, Kennedy & Violich Architecture, Boston Nader Tehrani et Katherine Faulkner, NADAAA, Boston Deuxième prix « Next Generation » Machine Landscape : utilisation de mines de charbon pour l’accumulation d’hydroélectricité par pompage, Greene County, PA Troisième prix « Next Generation » Pleura Pod : mur de purification de l’air transformant le dioxyde de carbone en oxygène, Cambridge Quatrième prix « Next Generation » Timberlink : système de construction en panneaux de bois à enclenchement, Cape Dorset, NU Cinquième prix « Next Generation » Infrastructure évolutive : réutilisation adaptative d’une structure de stationnement pour des activités culturelles, San Francisco Kenya Endo, l’Atelier Dreiseitl asia, Singapour Beomki Lee, Suk Lee et Daeho Lee, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge Jonathan Enns, Enns Design, Toronto Mark Turibius Jongman Sereno, l’Université Harvard, Cambridge; Mira Irawan, l’Université de New York; David O’Brien, l’Université de l’Iowa State, Ames Les projets gagnants en Amérique du Nord sont à la fine pointe de l’efficience et de l’innovation dans la construction durable. En tout, treize projets imaginés par des praticiens chevronnés, de jeunes professionnels et des étudiants du Canada et des ÉtatsUnis ont été récompensés à la hauteur de 330 000 $US américains. Premier prix « Next Generation » Réutilisation des déchets : centre municipal de récupération des déchets, New York Debbie Chen, New York Étienne Feher, Paul Azzopardi et Noé Basch, d’ABF-lab, Paris, France Peter et Hadley Arnold, Arid Lands Institute, Woodbury University, Burbank, CA Sixième prix « Next Generation » Latex Formwork : méthode de construction de minces panneaux de béton, Cambridge Namjoo Kim, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge Le Holcim Awards pour la construction durable vise à récompenser des projets de construction novateurs, avant gardistes et tangibles qui proposent des solutions viables aux problèmes technologiques, environnementaux, socioéconomiques et culturels dans les domaines du bâtiment et de la construction à l’échelle locale, régionale et mondiale. Il est géré par la Holcim Foundation en Suisse depuis 2004 et offre deux millions de dollars américains en prix par cycle triennal. Pour obtenir plus d’information sur le concours et sur chaque projet gagnant, visitez le : www.holcimawards.org. index Adresse de retour : Magazine FORMES 6718, rue Chambord, Montréal (Québec) H2G 3C3 Canada ISSN 1911-8333 CDPQ..........................................17 cecobois.......................................14 CEFdi.....................................30, 33 CIRAIG........................................12 CLEB............................................49 CPCI............................................19 DAA.............................................17 Datadraft.....................................49 Demilec......................................50 Econoler.......................................12 Enerlab 2000...............................50 Festival international de jardins (Métis)...................................27, 39 Gauthier Designers.....................20 Glendyne...............................32, 37 Groupe Canam...........................47 Hettich........................................37 Holcim Awards................... 4, 5, 22 Holcim Foundation....................22 Hydro-Québec......................13, 44 Institut canadien de la construction en acier...........45, 46 International Living Future Institute.......................................12 Jardins de Métis...........................38 JLP architectes............................18 L’oeuf...........................................22 Lemay...........................................17 Lemay + MMA............................17 Les bois d’eau..............................32 Living Architecture Lab..............23 Living Building Challenge..........12 Maison de l’architecture du Québec.........................................35 MAISON&OBJET........................8 Martin Marcotte Architectes......17 MSDL...........................................24 Ordre des architectes du Québec.18 Ordre des urbanistes du Québec.....................C-2, 27, 41 Batty Louis-Olivier.....................44 Benjamin David..........................23 Bergmann Kai-Uwe....................23 Bourassa André...........................18 Broz Michel.................................18 Carelli Eugenio............................24 Christodoulou Hellen.................46 Coutu Étienne.............................17 Croteau Linda..............................42 Dagenais Yves..............................24 Demers Bruno.............................12 Déry David-Alexis.......................40 Déry Gaston................................40 Dion Nathalie..............................18 Drouin Louis...............................20 Dubé Christian............................17 Dubois Antoine...........................20 Dubuc Michel..............................17 Favreau Guy.................................18 Fontana Bernard.........................22 Gagnon Mario.............................20 Gironnay Sophie.........................35 Graves Richard............................12 Hoballah Arab.............................12 Hunziker Rolland........................42 Ingels Bjarke................................23 Jacobs Peter..................................39 Laforest Alain........................35, 36 Lahoud Pierre..............................36 Pinard Paul..................................20 LaPierre Robert...........................16 Poirier Sylvain.............................32 Langlois Pierre.............................12 Poitras Jean-Claude...............27, 28 Léonard Nadine...........................12 Ponte Alessandra.........................35 LeTourneux Pierre......................24 Pouffary Stéphane.......................12 Levasseur Annie..........................12 Provencher Claude......................24 Lord Mount Stephen...................38 Ranger Nicolas............................18 Martin Robert.............................17 Reford Alexander........................39 Mazria Edward............................14 Reford Elsie..................................38 Mielke Amy.................................23 Sauriol Claude.............................30 Paradis Véronique.......................30 Taylor Caitlin...............................23 Paquin Claude.............................20 Teyssot Georges...........................35 Pearl Daniel.................................22 Thibault Pierre.......... 12, 27, 35, 36 Perrault Sylvie.............................18 Thoreau Henry David.................35 19 et 20 novembre La ville conflictuelle Université Cergy-Pontoise, France www.lavilleconflictuelle.u-cergy.fr 18 novembre Montréal et Bruxelles en projet UQAM http://crtp.esg.uqam.ca 3 au 5 décembre Construct Canada Metro Toronto Convention Centre www.constructcanada.com 3 février 2015 Concours Énergia – AQME Hôtel Hyatt Regency, Montréal www.aqme.org 20 novembre au 18 janvier 2015 L’objet japonais Exposition sur le design d’objet japonais Centre de design de l’UQAM www.centrededesign.com Jusqu’au 23 novembre Biennale d’architecture de Venise www.labiennale.org/en/ architecture 10 au 12 décembre Smart City Expo Montréal Palais des congrès www.smartcityexpomtl.com/fr 25 novembre Toronto Wood Solution Metro Convention Centre http://wood-works.ca/ontario/wsf 9 janvier 2015 Concours Commerce Design Montréal Date limite du dépôt des candidatures http://mtlunescodesign.com 17 et 18 avril 2015 Conférence internationale Maison passive Leipzig, Allemagne www.passivehouseconference.org Paramètres...................................20 Pomerleau....................................12 Provencher_Roy.................C-2, 24 Saucier + Perrotte Architectes....18 Secrétariat international de l’eau......................................C-2 SICO..........................................C-4 Société de protection et d’aménagement de l’île aux Pommes.......................................41 SOPREMA..................................50 TECOLAM..................................50 Technopôle Angus.......................12 UNEP-SBCI.................................12 Vanico-Maronyx...................32, 37 Water Pore Partnership...............23 WBCSD.......................................12 WSP Global.................................16 26 au 29 octobre Conférence APT – Métissage Fairmont Le Château frontenac, Québec www.apti.org Jusqu’au 11 janvier 2015 Architecture and national identity Charlottetown, IPE www.confederationcentre.com/en/ exhibitions.php 3 au 6 juin 2015 Festival d’architecture IRAC Hyatt Regency Calgary http://festival.raic.org Août 2016 3 et 4 décembre Forum social mondial 2016 IIDEX 22 au 25 janvier 2015 Montréal Metro Toronto Convention Centre Interior Design Show www.fsm2016.org www.iidexcanada.com/2014 Metro Toronto Convention Centre www.interiordesignshow.com Dossier spécial bois – Construction en hauteur - La formation en design - M&O en Amériques - Prix Habitat Design et la pluridisciplinarité Information : [email protected], 514 256-1230 v10 n4 - 2014 PROCHAIN NUMÉRO 13 novembre 2014 Contech Palais des congrès, Montréal www.contech.qc.ca 2 décembre Colloque sur les transports de demain Université Laval, Québec www.itis.ulaval.ca/cms/site/itis/itis/ colloque2014_Electrification Jusqu’au 19 avril 2015 Des pièces à ne pas manquer Exposition CCA www.cca.qc.ca - agenda Toute demande de reproduction des textes et des illustrations doit être acheminée par écrit à l’éditeur en expliquant 21 au 24 novembre Congrès annuel ASLA Colorado Convention Center, Denver www.aslameeting2014.com COLLABORATEURS François G. Cellier, Sylvie Lallier, Valérie Levée, Thierry Petelle, Pierre Turbis. [email protected] www.formes.ca Tél. : 514- 256-1230 1 877 FORMES 9 Télécopieur : 514-736-7637 PRODUCTION ADICC Impression : Lithochic AAPPQ........................................18 ACQ.............................................44 ADICC.........................................43 ADIQ.....................................20, 32 Ædifica.........................................17 AFMQ...........................................9 Amis de la vallée du Saint-Laurent.....................C-2, 40 APCHQ.......................................44 Aquabrass...................................37 Architectes de l’urgence.............17 Architecture49.......................6, 16 Bjarke Ingels Group....................23 BASF Canada..............................10 Bourassa Maillé Architectes........18 BSDQ...........................................15 Cardinal Hardy Architectes........17 Casino de Montréal.....................24 CBDCa-Qc..................................12 CCQ...........................................C-3 formes POSTE PUBLICATION N0 41060025 FORMES est une pu blication objective et indépendante, libre de tout lien avec quelque association, organisme ou regroupement sectoriel que ce soit, associés de près ou de loin à l’industrie. Sa mission : informer par ABONNEMENT (Taxes incluses) $CA Canada 1 an : 27 $, 2 ans : 50 $ Amérique 1 an : 50 $, 2 ans : 85 $ Outre-mer 1 an : 90 $, 2 ans : 155 $ Étudiant -15 % PUBLICITÉ 514 736-7637, poste 5 FORMES appuie toute initiative favorisant le développement durable et une saine gestion de l’environnement. Le magazine utilise une encre écologique et est imprimé sur du papier recyclé. RÉDACTRICE EN CHEF Marie Dallaire Notre image change, mais notre engagement reste le même. Ensemble, nous donnerons le meilleur de nous-mêmes. CHIRURGIEN DE L’IMAGE Gabriel-Thomas Leclerc Pour en savoir plus architecture49.com le but de cette demande. L’éditeur se réserve le droit de refuser toute demande de reproduction. des sujets d’actualité, débattre des enjeux de l’industrie, conseiller sur des techniques et des produits, cerner les tendances. Notre désir est de devenir, ensemble, un chef de file national dans le domaine de la conception intégrée et dans la réalisation de projets significatifs. Les annonceurs apparaissent en caractères gras Individus ADMINISTRATION Magazine FORMES 6718, rue Chambord, Montréal (Québec) H2G 3C3 Canada Aujourd’hui, une nouvelle ère se dessine avec Architecture49. Notre nouvelle firme se fonde sur l’héritage laissé par Arcop auquel s’ajoutent les forces de 5 firmes d’architecture respectées – AE Consultants, North 46 Architecture, PBK Architects, Smith Carter Architects et WHW Architects. COUVERTURE Photo : Pierre Lahoud Depuis plus de 60 ans, le nom Arcop est synonyme d’expertise et de passion dans la création de projets emblématiques tant au Québec qu’à l’étranger. VOL.10 Nº4 2014 ÉDITEUR Claude Paquin Une expertise ciblée, nationale, tournée vers l’avenir. Organismes et entreprises 7 PARIS / 23-27 JANVIER 2015 PARIS NORD VILLEPINTE À PARIS, CRAQUEZ POUR... UNE SOUPIÈRE C M Y CM MY CY CMY K Vivez avec le confort, le style et la qualité d’ici Les meubles du Québec, un choix bénéfique pour nos fabricants et pour les emplois locaux WWW.MAISON-OBJET.COM Un choix respectueux de l’environnement, puisque moins de kilomètres séparent le fabricant de meubles du consommateur Un choix empreint de la fierté des entrepreneurs du Québec PROMOSALONS - SERVANE GUÉRIN - T. +1 514 861 5668 - [email protected] ORGANISATION SAFI, FILIALE DES ATELIERS D’ART DE FRANCE ET DE REED EXPOSITIONS FRANCE / SALON RÉSERVÉ AUX PROFESSIONNELS / IMAGE © ELODIE DUPUIS / DESIGN © BE-POLES Artopex - Mobilier collaboratif Downtown RCM Architectural - Restaurant La Bête Amisco - Collection Urban, Lit Attraction Trica - Table d’appoint Gravity Canadel - Collection High Style afmq.com Fusions et acquisitions Points de vue d’architectes 12 16 sommaire Le système d’isolation/pareair WALLTITE convient perspectives METTEZ-Y DU MAUVE. Colloque-symposium UNEP-SBCI Au-delà du bâtiment durable 7 Agenda Index parfaitement à presque tout espace que vous concevez. Paramètres Déclencheur de dialogue 20 en couverture MD L’EMPREINTE QUÉBÉCOISE 26 Jean-Claude Poitras Pour un design distinctif Pierre Thibault De paysage, de bois, de pierre… VOICI WALLTITE LA RÉSISTANCE THERMIQUE À LONG TERME LA PLUS ÉLEVÉE DE L’INDUSTRIE † réalisations Holcim Awards Enjeux environnementaux 22 Casino de Montréal Renouveau et R et D 24 Maisons efficaces L’initiative d’Hydro-Québec 44 Rendez-vous de l’acier Appel à la réciprocité 46 Jardins de Métis Un paysage qui nous ressemble L’île aux Pommes et le fleuve Paysages fait de mémoire R 12.4 à 2 po | R 19.2 à 3 po | R 26.2 à 4 po Selon les rapports de décembre 2011 du Centre canadien de matériaux de construction (CCMC) concernant la mousse de polyuréthane à densité moyenne vaporisée. WALLTITE est une marque déposée de BASF Canada Inc. EcoLogo est une marque de commerce d’Environnement Canada. Le programme de certification de la qualité intérieure de l’air GREENGUARD intitulé « GREENGUARD Indoor Air Quality Certified » est une marque déposée, et le programme GREENGUARD enfants et écoles intitulé « GREENGUARD Children and Schools » est une marque de service, de leurs propriétaires respectifs ; toutes utilisées sous permission par BASF Canada Inc. © 2014 BASF Canada inc. formes † matériaux Pour savoir comment WALLTITE peut améliorer votre prochain projet, visitez www.walltite.com ou composez sans frais le 1 866 474-3538 . Chez BASF, nous créons de la chimie. v10 n4 - 2014 Vous apportez beaucoup de soin à la conception d’un bâtiment pour qu’il soit à la fois fonctionnel, harmonieux et confortable. Le choix du système d’isolation/pare-air mérite autant de considération. Notre isolant/pare-air à alvéoles fermées a fait ses preuves. Il résiste aux années et améliore la durabilité d’un bâtiment. WALLTITE s’adapte à presque toutes les formes, adhère à presque tous les recoins et n’a pour limite que votre imagination. Cette mousse permet de créer une enveloppe ayant une bonne étanchéité à l’air, ce qui procure à votre bâtiment l’isolation à haute performance qu’il mérite. 11 Nattakit perspectives AU-DELÀ DU BÂTIMENT DURABLE Valérie Levée L formes - v10 n3 - 2014 es 12 et 13 mai derniers, le Centre des congrès de Québec a résonné de réflexions sur le bâtiment durable. C’était lors d’un colloque-symposium intitulé « Le futur de l’environnement bâti, durabilité, carboneutralité et au-delà », organisé par l’Initiative Bâtiments Durables et Climat du Programme des Nations Unies pour l’environnement (UNEPSBCI) et ses partenaires, dont la Section du Québec du Conseil du bâtiment durable du Canada (CBDCa-Qc). Dans son allocution, l’architecte Pierre Thibault a évoqué ce qu’il a appris de son grand-père charpentier et de la conception des maisons ancestrales. « Ils faisaient des maisons presque LEED OR, des maisons bien orientées, au sud, avec peu d’ouvertures au nord. Ils avaient pris les roches sur place, avaient coupé les arbres au bon moment », évoque-t-il. Ils travaillaient en équipe en suivant les conseils des sages du village. Art de bâtir et concertation ont été repris durant tout le congrès, mais aujourd’hui, le village devient planétaire. 12 Bâtir vert Matériaux sains et locaux, efficacité énergétique, faible empreinte écologique... En Amérique du Nord, les bâtiments certifiés LEED se multiplient. Mais au-delà du bâtiment LEED, il y a la certification Living Building Challenge, créée par l’International Living Future Institute dont Richard Graves est le directeur. Il explique que l’idée de la certification est de se rapprocher de la beauté, de la propreté et de l’efficacité de la nature. Il s’agit de construire le meilleur bâtiment possible avec des systèmes passifs, quitte à les améliorer avec des systèmes actifs. Il s’agit aussi de considérer ensemble les questions de l’énergie, de l’eau, des matériaux au lieu de les traiter en silos. Il donne l’exemple du recyclage des eaux usées, bénéfique pour la consommation d’eau, mais qui peut être néfaste pour la consommation d’énergie. Ces principes permettent, selon Richard Graves, de concevoir des bâtiments qui consomment 50 % moins d’énergie qu’un bâtiment standard. Des outils basés sur l’analyse de cycle de vie comme celui présenté par Annie Levasseur, ingénieure et chercheuse au CIRAIG, le centre d’expertise en cycle de vie, installé à Polytechnique, pourront aussi aider à verdir le bâtiment. Les travaux du groupe de travail de l’UNEP-SBCI pour verdir la chaîne d’approvisionnement du bâtiment vont également dans le même sens. Mais il y a le bâtiment et ce qu’en font ses occupants; c’est là que se démarque la certification Living Building Challenge. Le programme est basé sur des performances démontrées pendant au moins douze mois d’utilisation du bâtiment. « Vous devez éduquer les occupants, les entraîner à consommer moins d’énergie. C’est ce qui permet de passer de 50 % à 85 % moins d’énergie que les bâtiments standards », souligne Richard Graves. Au-delà du bâtiment, il y a donc les gens et leurs relations avec le milieu construit, allant du logement au quartier. Pierre Thibault rappelle que l’architecture organise et favorise la vie en société et que le développement durable consiste aussi à rendre les gens plus heureux. Nadine Léonard, vice‐présidente de Pomerleau pour la région de Toronto, déplore d’ailleurs que les considérations techniques prennent le pas sur l’humain. « On n’a jamais parlé d’impacts sociaux. Dans mon esprit, le développement durable et le développement social, ça va de pair », clame-telle. Elle rapporte qu’au Technopôle Angus, pas un projet ne se réalise sans qu’il comporte une démarche de développement social. En plus d’être verts, les projets permettent à des personnes de se réinsérer dans le monde du travail. Ils bonifient la communauté adjacente et contribuent à la société. « Si on se sert de nos projets non seulement pour réduire l’empreinte écologique et construire mieux, mais en plus pour en faire un moteur économique, je crois qu’on commence à parler », espère-telle. Elle émet même l’idée que 1 % du coût du projet soit investi dans un volet de réinsertion sociale, à l’instar du 1 % dévolu à la réalisation d’œuvres d’art. Une idée qui dérange? Justement, Bruno Demers, le coordonnateur de la formation CBDCa-Qc, estime qu’« à titre d’ambassadeurs du développement durable, il faut déranger les mentalités ». Cette contribution élargie du bâtiment au développement durable a aussi été reprise par le chef de service, consommation et production durables à l’UNEP, Arab Hoballah. Selon lui, « la performance énergétique du bâtiment est liée à la performance économique, à la qualité de vie, la santé, le bien-être, l’intégration sociale ». Défragmenter et se concerter Du même souffle, Arab Hoballah rappelait aussi le lien entre la ville et les bâtiments : « Il ne peut pas y avoir de développement durable sans les villes et, dans les villes, sans les bâtiments. » Le problème est que l’acte de construire le territoire et l’acte de vivre sur ce territoire sont fragmentés, croit Stéphane Pouffary, président exécutif de UNEP-SBCI. Par exemple, la performance énergétique d’un bâtiment dépend de son bon usage par l’occupant, et un quartier vert pâlit s’il est mal desservi par le transport en commun. « On arrive à plein de situations schizophrènes », constate-t-il. « Qui va bénéficier de cette vertu environnementale qu’on essaie de mettre dans l’acte de construire? Le territoire, l’architecte, l’utilisateur, le fournisseur de matériaux? » questionne-t-il. Et qui financera un projet s’il n’est pas certain d’en recevoir les bénéfices? À Genève, une coalition de 200 dirigeants d’entreprises d’envergure internationale (WBCSD pour World Business Council for Sustainable Development) réfléchit à la manière d’intégrer le développement durable aux affaires. Roland Hunziker, qui travaille sur des projets d’efficacité énergétique des bâtiments pour le WBCSD, explique qu’il faut montrer la plus-value environnementale des parties prenantes du bâtiment pour surmonter les barrières financières. De son côté, Pierre Langlois, le président de l’entreprise de services écoénergétiques Econoler, soutient qu’un projet d’efficacité énergétique se paie sur les économies d’énergie. Mais « installer des équipements efficaces ne génère pas hydro-québec, un partenaire de choix pour les constructeurs d’ici Hydro-Québec peut vous soutenir dans la réalisation de vos projets résidentiels proposant des maisons efficaces, une nouvelle catégorie d’habitations éconergétiques. Vos projets offriront ainsi une valeur ajoutée et se démarqueront aux yeux des acheteurs. De plus, vous recevrez des primes à la construction et à la vente de maisons efficaces et bénéficierez d’outils promotionnels gratuits. Démarquez-vous et participez au programme dès maintenant ! www.hydroquebec.com/constructeurs/maisonsefficaces Jordi Clave Garsot d’économie. Bien les utiliser génère des économies », nuance-t-il. Autrement dit, l’important n’est pas fondamentalement la technologie, mais le résultat, l’économie d’énergie réalisée qui permettra de rembourser le projet. Le problème revient à savoir comment mesurer cette économie d’énergie. « On va devoir témoigner de plus en plus de la performance de ce que l’on met en œuvre », disait justement Stéphane Pouffary. Il faut développer des méthodes de comptabilité, établir des situations de référence pour mesurer les économies d’énergie, traduire une vertu environnementale en dollars et accéder à des flux financiers. La mesure de la performance environnementale des bâtiments était un sujet récurrent au fil des présentations du Au-delà du bâtiment, il y a les gens et leurs relations avec le milieu construit, allant du logement au quartier. congrès et devrait être une priorité pour les ententes internationales à venir. Pour faciliter la concertation, l’UNEPSBCI souhaite développer une plateforme internationale de réflexion et de promotion de pratiques universelles pour réduire l’impact du bâtiment sur le climat. Et pour parler d’une seule voix lors des prochaines négociations sur le climat qui se tiendront à Paris en 2015, Arab Hoballah enjoint tous les acteurs du bâtiment à unir leurs forces « pour déve- lopper une feuille de route commune, pour agir et contribuer à la réalisation des objectifs globaux du développement durable et du potentiel du secteur du bâtiment pour atténuer les changements climatiques ». Architecte fondateur du Défi 2030, Edward Mazria n’attend pas d’éventuels accords internationaux. En avril dernier, il lançait Roadmap to Zero Emissions, une approche pour neutraliser les émissions de CO2 de l’environnement bâti d’ici 2050. Terminal de collecTe des maTières résiduelles – ciTé VerTe CATÉGORIES Bâtiment industriel et détails architecturaux Architecte : bmd architectes inc. Structure : Douglas Consultants inc. Génie mécanique : Genecor inc. v10 n4 - 2014 Photos : bmd architectes inc. Premier du genre au Québec, ce projet de grande qualité abrite les équipements mécaniques nécessaires au système d’aspiration des matières résiduelles par voie souterraine « ENVAC ». Ce bâtiment se distingue des bâtiments industriels du même type par sa capacité à répondre aux contraintes du secteur résidentiel dans lequel il est implanté. Le design propose des proportions équilibrées ainsi qu’une rigueur architecturale exemplaire. formes - PROJET LAURÉAT 14 www.cecobois.com 2014 FUSIONS ET ACQUISITIONS ARCHITECTE. L’ARCHITECTURE SANS FRONTIÈRES PROFESSION DE v10 n4 - 2014 formes 16 Centre : Robert LaPierre, Robert Martin, Nicolas Ranger Bas : André Bourassa, Sylvie Perrault, Michel Dubuc FAIT QUE COMMENCER SELON CERTAINS, PETIT FEU D’ARTIFICE EN VOIE DE S’ÉTEINDRE POUR D’AUTRES, COEUR ! LES FUSIONS ET ACQUISITIONS DE FIRMES D’ARCHITECTURE AU QUÉBEC SONT BEL ET BIEN RÉELLES. les années 1980, elle assumait 40 % de ses projets à l’international, dont plusieurs étaient privés. Cette firme disposait de bureaux associés à New Delhi (Inde) et à Karachi (Pakistan), avec lesquels Architecture49 continue de travailler. Pendant la décennie 1990, Arcop a en outre travaillé en consortium dans le cadre de projets locaux, notamment pour la construction du complexe hôtelier, salle de spectacle et rénovation du Casino du Lac-Leamy ainsi que pour l’agrandissement (phase 1) de l’aéroport de Montréal. Ces consortiums sont, en fait, les catalyseurs du phénomène des fusions et acquisitions vécues actuellement. Rappelons qu’Arcop a notamment collaboré à la conception et au développement de la Place Ville-Marie. Ce bureau a aussi élaboré les plans et devis de la Place des Arts et de la Place Bonaventure, sans compter ceux d’hôtels et de centres de villégiature au Canada, en Inde, au Moyen-Orient et dans les Caraïbes. Lemay : acquisitions et coentreprise Une autre transaction a récemment fait écarquiller les yeux, soit le 2 octobre dernier, quand Lemay a annoncé, par voie de communiqué, qu’elle acquérait trois filiales québécoises du groupe torontois IBI, soit DAA, Cardinal Hardy Architectes et Martin Marcotte Architectes. Lemay a également annoncé la formation d’une coentreprise avec le Groupe IBI, en Chine. « Au cours des prochaines années, plusieurs hôpitaux de la taille du CUSM pourraient être construits dans ce pays », rapporte Robert Martin, associé principal d’une nouvelle entité baptisée Lemay + MMA, et également l’architecte chargé de projet du nouveau CUSM à Montréal. Forte d’un éventail d’activités déjà bien implantées au Canada, en Amérique centrale et en Afrique du Nord, en plus d’une nouvelle présence dans les Caraïbes et en Asie, Lemay rassemble désormais près de 500 professionnels et, par le fait même, « renforce » son statut de numéro un québécois dans le domaine des services de conception intégrés. Quatrième en importance au Canada, elle se classe désormais dans le top 100 « des plus importantes sociétés du domaine ». Lemay proposera des services d’architecture, d’urbanisme, de design urbain, de design intérieur, d’architecture de paysage, de conception LEED et de développement durable. Les joueurs qu’elle a acquis sont visiblement bâtis pour relever d’importants défis. Ils ont entre autres participé au projet de réaménagement de l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau, au plan d’ensemble du campus d’Outremont de l’Université de Montréal, au plan de reconstruction du centre-ville de Lac-Mégantic, au métro de Laval et à la Tour des Canadiens. La fibre nationaliste Le blogueur Étienne Coutu, un architecte et designer urbain qui travaille à Montréal, résume cette transaction qui a de quoi flatter la fibre nationaliste québécoise. Et pour cause, puisque la Caisse de dépôt et placement du Québec a investi six millions $ (sous forme de prêt) dans l’aventure. « Cette transaction s’inscrit dans notre volonté d’accompagner les entreprises québécoises à croître non seulement ici, mais également dans de nouveaux marchés », affirmait Christian Dubé, premier vice-président, Québec, à la Caisse. « La création de ce gros joueur forcera les architectes à s’organiser pour mieux se défendre. Lemay aura les ressources pour jouer un rôle primordial auprès des instances professionnelles, afin de contribuer à l’avancement de la profession. Les architectes n’ont jamais été reconnus pour s’unir entre eux. Le chacun pour soi est plutôt de mise », d’affirmer Étienne Coutu. À ses yeux, il ne fait aucun doute qu’avec des acquisitions de ce genre, l’architecture québécoise obtiendra bientôt une reconnaissance mondiale. Si d’autres pays et nations ont atteint cette renommée, pourquoi pas nous? Une approche obligée « La consolidation, les fusions ou le réalignement des pratiques architecturales sont une réponse à la dématérialisation des activités humaines, ainsi qu’à la mondialisation des marchés qu’engendrent les communications virtuelles, estime pour sa part Michel Dubuc, président d’Ædifica. Cela induit un appétit croissant à vouloir faire les choses différemment, tant sur le plan culturel que technique, et par un désir de rejoindre des marchés plus lointains qui deviennent acces- v10 n3 4 - 2014 TE S EC Haut : Nathalie Dion, Michel Broz, Guy Favreau Expertise et reconnaissance Les partisans de l’amalgame des compétences en architecture ressentent, plus que jamais, le besoin de se regrouper pour offrir une expertise complète à la même enseigne, et ainsi être en mesure d’assumer des projets d’envergure au Québec ou ailleurs. « L’expérience et le savoir-faire sont synonymes de crédibilité. Ces deux qualités se veulent rassurantes pour une clientèle qui doit gérer des projets majeurs », affirme sans ambages Robert LaPierre, architecte patron chez Architecture49 (anciennement Arcop). Ce bureau d’architectes a vu grand, en 2011, à l’issue d’une « alliance stratégique » conclue avec WSP Global (ex-Genivar) et Arcop. Cet arrimage lui a permis de recentrer ses activités autour de six champs d’expertise clés : science et technologie, sécurité et défense, soins de santé, sports et divertissement, transport ainsi qu’hôtels et villégiature. Un tel scénario a été rendu possible grâce aux acquisitions des firmes Arcop, AE Consultants, North 46 Architecture, PBK Architects, WHW Architects et Smith Carter. Architecture49 emploie plus de 260 personnes. Elle compte désormais 6 bureaux répartis dans 13 villes canadiennes, dont Montréal et Toronto, mais également dans d’autres cités situées entre Vancouver et Halifax – de là son appellation incluant le chiffre 49, qui évoque le 49e parallèle. Il appert que jusqu’à présent, Architecture49 et WSP Global travaillent en symbiose et se complètent très bien, tant au Canada qu’à l’international. Pour Robert LaPierre, il ne fait aucun doute que ce mariage propulsera Architecture49 en avant : « Nous avons tous accepté cette transaction afin de progresser au regard des nouveaux marchés », tranche-t-il avec conviction. Il faut dire que cette alliance s’inscrit dans une logique propre à l’ex-Arcop, créée en 1955. Déjà, dans MANIFESTATION D’UNE TENDANCE LOURDE QUI NE DEVENEZ MEMBRE OU FAITES UN DON architectes-urgence.ca - E V UE anifestation d’une tendance lourde qui ne fait que commencer selon certains, petit feu d’artifice en voie de s’éteindre pour d’autres, les fusions et acquisitions de firmes d’architecture au Québec sont bel et bien réelles. Et elles ne laissent personne indifférent. À une époque où les frontières tombent un peu partout sur la planète, ce phénomène peut-il être décrit comme la semence d’une graine qui fera pousser l’arbre, ou une simple mode éphémère appelée à mourir avant longtemps? Les avis sont loin d’être unanimes sur cette question. Ces fusions et acquisitions s’inscrivent dans l’air du temps et sont devenues nécessaires, disent ceux qui adhèrent à l’idée. Le Québec est à l’heure des « conceptions et des services intégrés » dans le domaine de l’architecture. Cette profession doit s’internationaliser car les occasions d’affaires à l’étranger sont énormes, contrairement au Québec, où l’État est devenu le principal donneur d’ouvrage. Or, plusieurs firmes se battent pour obtenir leur part d’un gâteau très convoité. formes D M ARCHIT D’ POINTS perspectives François G. Cellier 17 VUE E D POINTS 232 à 421. L’actuelle présidente du bureau de la direction de l’AAPPQ, Sylvie Perrault, a ramené ce chiffre à 407 en 2014. « Quelque 80 % de nos membres sont des firmes qui emploient 10 employés et moins », précise-t-elle. Cette association représente 87 % des bureaux d’architecture québécois. « Il y a plus de 1 200 firmes d’architecture pour les 3 616 architectes que compte le Québec. Près de 900 de ces firmes n’ont qu’un seul architecte. Il y a donc encore beaucoup de très petits bureaux chez nous, nous confie pour sa part la présidente de l’OAQ, Nathalie Dion. En ce sens, je ne pense pas que l’on puisse parler d’une vague de fusionsacquisitions pour l’instant. À tout le moins, les avis sont partagés sur cette question. » Une opinion que partage Sylvie Perrault. « Plutôt que de bâtir leurs expertises, certains joueurs vont préférer l’acquérir. Il s’agit d’une façon plus rapide de répondre à la demande du marché actuel, bien que ce modèle d’affaires puisse être tout aussi valable que celui des consortiums. Cela étant, travailler à l’international exige de s’adapter. Une entreprise doit être bien structurée et solide sur le plan financier. D’autres pays ne cultivent pas les mêmes coutumes et façons de faire. En ce sens, le retour sur l’investissement peut être long à venir. Il faut également savoir que les fusions et acquisitions peuvent être le fait, parfois, d’un manque de relève pour certains associés », signale Sylvie Perrault. Les dirigeants du bureau Jodoin Lamarre Pratte architectes se sont justement posé la question, à un certain moment, à savoir s’il y avait un avantage, pour eux, de fusionner ou d’être acquis par d’autres joueurs. « Les trois fondateurs de notre firme ne sont plus là; néanmoins, elle a été bâtie sur la continuité. On n’a pas eu à se dire qu’il fallait fermer à défaut d’avoir une relève, ce qui signifiait de se faire acheter », confie Michel Broz, coassocié principal. M. Broz fut, notamment, chargé de la planification fonctionnelle pour l’Institute of Integrated Medical Sciences and Holistic Therapies, à New Delhi, en Inde. Ce projet a été réalisé entre 2004 et 2007 au coût de 250 millions $. Ce cabinet, qui embauche environ 80 professionnels, jouit d’une grande stabilité depuis 1958. Le carnet de commandes y est bien rempli, spécialement dans le domaine institutionnel (ex. : hôpitaux, aéroports et projets culturels). Les patrons de la boîte sont impliqués dans chacun des projets, ce que la clientèle apprécie énormément. « Ma crainte serait de perdre ce contact direct et cette motivation, si nous formions une très grande entreprise », lance pour sa part Nicolas Ranger, également coassocié principal chez Jodoin Lamarre Pratte architectes. « Les fusions et acquisitions représentent un autre modèle d’af- TE S EC Un autre son de cloche Les fusions et acquisitions sont une chose, mais les nuances qu’il faut y apporter en sont une autre. Le magazine de l’Ordre des architectes du Québec (OAQ), Esquisses, a publié en 2012 un article sur cette question. Intitulé « Fusions et acquisitions. Mariage de convenance », son auteure prévient, d’emblée, que cette tendance « n’en est peut-être pas une ». En fait, les chiffres qui sont rapportés dans le texte donnent matière à réflexion. L’Association des architectes en pratique privée du Québec (AAPPQ) y affirmait qu’entre 2000 et 2012, le recrutement de jeunes firmes n’a cessé d’augmenter, passant de faires, lequel suppose une gestion d’entreprise complètement différente. Les grandes organisations peuvent être plus lourdes, ce qui pourrait conduire à une hiérarchisation et à un corporatisme exacerbés », affirme Michel Broz. Si les besoins en expertises plus pointues se font sentir, cette firme optera pour la création de consortiums. Tout comme le pense Nathalie Dion, l’ex-président de l’OAQ, André Bourassa, estime qu’il n’est pas toujours nécessaire d’être gros pour tirer son épingle du jeu. Copropriétaire d’un bureau dans la région de Victoriaville et d’un second à Trois-Rivières (Bourassa Maillé Architectes), il pense même que cela peut nuire à une entreprise, selon ce que certains collègues lui ont raconté. « Dans le passé, on a vu des firmes d’ingénieurs peiner à assumer des petits projets, en raison d’une structure administrative devenue trop lourde. Ces projets n’étaient pas rentables pour elles, ne leur apportaient rien en termes de prestige et les empêchaient d’innover », note André Bourassa. De même, certains grands bureaux d’architecture québécois ont vécu une pression administrative énorme, après avoir fait l’objet d’une fusion ou d’une acquisition. Ils sont devenus des machines à produire afin d’être rentables. Le plaisir de travailler s’était avili. » A R CH I T D’ sibles. » La complexification des procédés est un autre facteur à considérer dans les changements qui s’opèrent, et auxquels il faut répondre rapidement. L’une des façons d’y parvenir consiste à créer des équipes pluridisciplinaires. « Mais encore faut-il éveiller les consciences à ce nouveau contexte de travail en entreprise, afin que nos collaborateurs puissent s’y adapter et y adhérer », de dire Michel Dubuc. Également portée vers les nouveaux défis et un désir d’expansion, Ædifica a elle aussi procédé à des fusions depuis ses débuts, en 1979. Il y a quinze ans, elle intégrait à son entreprise l’exfirme d’architecture TPL. Ædifica compte également dans ses rangs un bureau d’ingénierie américain en électromécanique, qui s’est joint à elle en 2000. Celui-ci a intégré son expertise en génie aux activités montréalaises d’Ædifica, laquelle a aussi pu asseoir sa présence aux États-Unis, où elle brasse des affaires. Une quatrième firme (Innova Design) spécialisée en aménagements intérieurs, plus particulièrement ceux relatifs aux espaces de travail, a fusionné avec Ædifica en 2009. Et pas plus tard qu’en 2013, l’équipe montréalaise du bureau ABCP s’y est greffée. Cette démarche a permis à Ædifica d’accéder à de nouveaux marchés, ainsi que d’approfondir son expertise dans le secteur hospitalier. Si bien que cette firme réunit, actuellement, quelque 150 professionnels autour d’une « offre de services intégrés », sans compter 35 ingénieurs qui travaillent aux ÉtatsUnis. Chez Ædifica, les architectes, designers, ingénieurs, gestionnaires de projets et spécialistes en communication travaillent en « solidarité ». « De cette façon, on réunit beaucoup plus facilement les acteurs d’un projet autour d’une même table, en devenant les gestionnaires des talents en place. Sur le plan contractuel, cette façon de faire simplifie les rapports avec la clientèle et génère de la valeur pour chaque projet, particulièrement dans une perspective axée sur le développement durable », explique Guy Favreau, architecte associé chez Ædifica. ENVELOPPES DE BÂTIMENT HAUTE PERFORMANCE EN BÉTON PRÉFABRIQUÉ Le béton préfabriqué a été utilisé depuis de nombreuses décennies avec succès afin de fournir des enveloppes de bâtiment durables. Avec les exigences de performance thermique, de contrôle des fuites d’air et de pénétration de la pluie augmentant dans les bâtiments modernes, le béton préfabriqué offre des enveloppes de bâtiment à faible entretien, durables et dotées d’une longue vie. Les murs d’enceinte en béton préfabriqué se démarquent de la plupart des murs « pare-pluie » à plusieurs égards essentiels : comment ils contrôlent la pénétration de la pluie, la façon don ils fournissent l’étanchéité à l’air, ainsi que par leur séquence de construction. La « walmartisation » des services Il est donc souhaitable que des bureaux d’architectes de petites, moyennes et grandes tailles coexistent, car l’envergure des mandats à réaliser peut varier. Cela vaut pour le Québec et le reste du monde. Sylvie Perrault cite en exemple la firme d’architecture Saucier + Perrotte Architectes, dont l’équipe est constitué de 19 personnes, ce qui ne l’empêche pas de rayonner localement et à l’international. En d’autres termes, il faudra éviter une « walmartisation » des services et maintenir l’architecture régionale de proximité, pense André Bourassa. « Il serait intéressant de créer un réseau d’architectes, à travers la province, qui offrirait un complément d’expertise en dehors des grands centres comme Montréal », image-t-il. Chaque bureau maintiendrait son indépendance, mais au besoin, une firme pourrait mettre ses connaissances spécifiques en commun avec d’autres, afin d’assumer des projets de plus grande envergure. À une époque où les occasions d’affaires en architecture se multiplient au-delà de nos frontières, la tentation est grande d’aller voir ce qui se passe ailleurs. Toutefois, il faut avoir un tempérament d’entrepreneur pour réussir ce pari. « Nonobstant le modèle d’affaires choisi, il importe, au final, que la profession continue d’innover et soit à la hauteur des attentes », conclut André Bourassa. ALBERTA CHAPTER Visitez le www.cpci.ca/publications pour télécharger votre exemplaire gratuit exemplaire gratuit du guide High Performing Precast Concrete Building Enclosures – Rain Control. formes - v10 n4 - 2014 Hilton de l’aéroport Logan, Boston, MA Architecte : Cambridge Seven Associates 18 Rédigé par : John Straube, Ph.D., ing. Building Science Corporation www.BuildingScience.com Tél : 877.937.2724 Paramètres LA NOUVELLE CARTE DE VISITE POUR LES DESIGNERS INDUSTRIELS, BÂTIE PAR SA COMMUNAUTÉ. UNE INITIATIVE DE L’ASSOCIATION DES DESIGNERS INDUSTRIELS DU QUÉBEC (ADIQ) QUI PROMET. formes 20 UNE FACTURE VISUELLE COHÉRENTE AVEC LA LIGNE ÉDITORIALE D par les études de cas qui sont extrêmement diversifiées. On touche à différents univers », mentionne Claude Paquin, un éditeur particulièrement sensibilisé à la promotion d’une vision pluridisciplinaire des professions du design. Se doter d’une parution est un pas de plus dans la bonne direction, encore faut-il qu’elle soit lue. Elle sera présente dans certains salons professionnels ciblés. Selon Mario Gagnon, avoir en main un objet à remettre ou à laisser derrière sera certainement un bon déclencheur de dialogue. L’avantage, mais aussi le but de faire une publication annuelle, c’est que celle-ci devienne un outil de référence pour les lecteurs, qui pourront la consulter tout au long de l’année. Cet outil de référence provient de la section Guide, en tête-bêche de la section Articles et à l’intérieur de laquelle on trouvera entre autres un répertoire des membres de l’ADIQ. Paramètres vise aussi à être distribuée dans les centres locaux de développement (CLD) pour amorcer ce dialogue avec les entrepreneurs et les sensibiliser aux avantages de la pratique. Le projet servira assurément la cause des designers industriels et de leur association dans un avenir rapproché. Le travail colossal accompli par les designers bénévoles des différents comités aura été rassembleur et aura permis à la publication d’exister. Au fil des ans, l’équipe s’efforcera de trouver les projets démontrant qu’on fait ici du design industriel de façon stratégique et conséquente. Cela permettra de positionner la profession comme un des vecteurs générateurs d’innovation et de retombées pour les entreprises d’ici. Selon Louis Drouin, les entreprises doivent prendre des dispositions pour accomplir cet idéal : « Paramètres est l’outil de référence pour les éclairer sur les dispositions à prendre. » éfinir le langage esthétique de Paramètres était fondamental dans l’exercice du développement de la publication. L’étude de positionnement, en amont, a amené un échantillonnage exhaustif de magazines qui devaient avoir comme thème le design, les affaires ou l’innovation. Ceci dans le but de se définir par rapport aux publications existantes, mais surtout pour donner à la direction artistique des références visuelles et des modèles où les interventions graphiques sont justes. La facture recherchée devait être en symbiose avec le ton pragmatique du contenu. Selon Paul Pinard, codirecteur artistique de Paramètres, la durabilité, la fonctionnalité et une esthétique qui survivrait bien, constituaient les lignes directrices de l’annuel. Une utilisation substantielle d’informations sous forme d’illustrations et des exergues pour mettre en relief certains passages donnent à l’ouvrage un caractère unique qui se veut agréable à consulter. Grâce à son expertise, Gauthier Designers a été retenue pour matérialiser les intentions de l’équipe. Une intervention importante de la firme est d’avoir proposé des couvertures en tête-bêche, fonctionnalité qui permet d’accéder à la publication d’un côté pour plonger dans les articles de fond et, de l’autre, dans la section guide, pour trouver de l’information utile et accéder au répertoire. Deux façons d’entrer en contact avec le design industriel québécois. v10 n4 - 2014 v10 n4 - 2014 E n lançant Paramètres, l’ADIQ (Association des designers industriels du Québec) franchit une autre étape pour attirer l’attention des entrepreneurs. La publication annuelle traitera évidemment de design industriel, mais surtout de son potentiel comme vecteur d’innovation et de créativité pour générer des retombées économiques en entreprise. Le lancement s’est déroulé le 21 octobre à Montréal lors du salon Développement de produits + innovation, une série de conférences organisées par Événements Les Affaires. Le thème de la première édition expose les perspectives du design industriel au Québec. Il sert à « mettre la table » pour aborder les entreprises, comme aime le rappeler Mario Gagnon, président de l’ADIQ. Il faudra d’abord démystifier la pratique : « Il faut encore rappeler ce que l’on fait, même après trente-cinq ans de pratique. (…) Le design industriel au Québec a évolué pour en arriver à la grande qualité professionnelle d’aujourd’hui. On était rendu là [publication dédiée] », poursuit M. Gagnon. C’est en voulant remédier à la situation, mais aussi pour financer les activités de l’ADIQ, que Mario Gagnon a eu l’idée de créer Paramètres. « Le bilan financier de l’Association des architectes en pratique privée démontrait que sa publication générait des revenus. On voyait là une bonne inspiration », souligne-t-il. Le processus créatif d’une revue étant nouveau pour l’ADIQ, un comité d’orientation a mandaté deux designers bénévoles et enthousiastes, Louis Drouin et Paul Pinard, pour élaborer une étude sur le positionnement d’une publication. Elle a servi de référence pour établir et construire l’identité de marque de Paramètres : sa facture visuelle, son axe de communication et son lectorat. « La publication doit cibler les donneurs d’ordres pour les convaincre des bénéfices des pratiques du design industriel (…) C’est cette prémisse qui est le point de départ. La définition du cahier de charge qui s’ensuit a défini concrètement ce que serait le produit en termes de fond. Pour la signature graphique et la recherche du nom de la publication, on a ensuite travaillé avec les gens de Gauthier Designers », soutient Louis Drouin. La publication se définit autour d’un axe éditorial et d’un axe artistique. Rapidement, la rédaction s’est tournée vers l’expérience pour remplir le mandat. Claude Paquin, éditeur de FORMES, et Louis Drouin, ancien rédacteur en chef de Poiesis (magazine des étudiants en design industriel de l’Université de Montréal), reprennent le même rôle au sein de Paramètres. Des journalistes qui collaborent fréquemment au journal Les Affaires ont été choisis pour leur aisance à traiter des sujets économiques. Antoine Dubois et Paul Pinard, codirecteurs artistiques, ont étroitement collaboré à l’image de marque élaborée par Gauthier Designers (voir encadré), une agence intégrée, spécialisée en design graphique. Ces partenaires et collaborateurs ont été sélectionnés dans le but d’asseoir la crédibilité de la parution et d’optimiser ses chances de rejoindre son lectorat. Paramètres se différencie des revues de design habituelles par son ton pragmatique. Dans le but de retenir l’attention des entrepreneurs, les projets de design étudiés y seront abordés selon un angle valorisant leurs retombées économiques. Un comité éditorial a bâti un cahier de charge définissant les sujets intéressants. Un appel de projets a ensuite été lancé aux designers industriels du Québec pour trouver les projets les plus concluants. « On ne voulait surtout pas adopter la posture d’un magazine qui traite de projets exploratoires avec une identité très forte, mais qui ne sont pas connectés avec le marché. On cherchait des projets avec un contenu qui supporte des besoins, une industrie, des impératifs et des retombées économiques intéressantes, soit les challenges typiques des designers industriels. Pour montrer aux gens d’affaires que le produit n’est pas le résultat d’une action magique, mais qu’il y a une prise de position stratégique à adopter pour que l’efficacité en recherche et développement puisse porter ses fruits », précise Louis Drouin. La ligne éditoriale met de l’avant l’axe des retombées économiques donc, tout en soulignant le paysage industriel québécois : une forte présence de petites et moyennes entreprises et une grande hétérogénéité des industries. « L’annuel démontre les différentes applications du design industriel - Thierry Petelle formes réalisations DÉCLENCHEUR DE DIALOGUE 21 OR LES HOLCIM AWARDS 2014 formes 22 « People » Standards éthiques, équité et responsabilité sociale « Planet » Ressources naturelles et performance environnementale pour toute la durée du cycle de vie « Prosperity » Faisabilité et compatibilité économique au regard des exigences et des contraintes du projet « Place » Impact architectural et esthétique Présent à l’événement, Bernard Fontana, chef de la direction de Holcim ltée et président du conseil d’administration de la Holcim Foundation, a rappelé que le secteur de la construction consomme à lui seul, pour la durée d’un cycle de vie, 40 % de toute l’énergie primaire produite mondialement. « Tout ce que nous construisons aujourd’hui façonne la manière dont nous vivrons demain. C’est pourquoi, en tant que premier fournisseur de matériaux de construction dans plus de 70 pays à travers le monde, Holcim partage la responsabilité de l’avenir de notre planète et 1 En juillet 2014, l’Evergreen Brick Works s’est vu décerner l’accréditation LEED Platine pour l’achèvement de la construction de son dernier bâtiment, le « Centre for Green Cities ». C’est la toute première fois en Amérique du Nord que cette reconnaissance est accordée à un centre communautaire dont le développement est basé sur la décontamination et la requalification écoresponsable d’installations industrielles patrimoniales. 2 Bernard Fontana, « Thinking about the future is a part of our DNA », Conférence prononcée à l’occasion des Holcim Awards, Toronto, 18 septembre 2014 (traduction libre). 3 Source : Id., Idem, (traduction libre). On peut se procurer gratuitement la version numérique du livre, ou la version imprimée au coût de 15 $. Information à www.holcimfoundation.org/canada. L’Argent pour une infrastructure de protection urbaine contre les inondations Poreform, une surface hydroabsorbante et un bassin souterrain de récupération de l’eau de pluie qui permettent à Las Vegas de profiter de plus de 75 000 mégalitres (20 milliards de gallons) d’eau supplémentaires, a décroché le grand prix. Ce système se compose d’une surface de béton drainant alvéolé de drains d’évacuation, d’une fondation, d’un bassin de captation et de plusieurs réservoirs capable d’absorber l’eau de ruissellement rapidement dans le but de prévenir les inondations. L’eau est acheminée dans les réservoirs souterrains, dans l’attente d’être réutilisée. Ses conceptrices, Amy Mielke et Caitlin Taylor de Water Pore Partnership (New York), repositionnent l’infrastructure hydraulique à l’échelle municipale. Le jury a vu cette infrastructure comme une initiative architecturale d’intérêt public, trouvant un juste équilibre entre impératifs sociaux et esthétiques. Ce projet propose une excellente solution au problème général de pénurie d’eau, proposition simple mais néanmoins efficace liée à un enjeu mondial. Le projet BIG U, qui s’attaque à la vulnérabilité de New York aux inondations côtières au moyen d’une berge soulevée et d’une série d’espaces publics au bord de l’eau, a remporté le prix Argent. Cette barrière longue de 13 km (8 milles), capable de résister à des tempêtes de la force de l’ouragan Sandy, a été conçue par un consortium dirigé par les architectes Bjarke Ingels et KaiUwe Bergmann de BIG (Bjarke Ingels Group, Danemark/New York). BIG U est une approche de développement polyvalente qui tient compte des besoins de la population environnante. Ici, la réalisation – en plus de relever les berges – permet d’accéder à pied aux espaces de loisirs tout en accroissant les espaces verts. Le jury a été sensible à la volonté du projet de concilier une infrastructure solide et les besoins de la collectivité. Le Bronze pour une structure compostable zéro carbone : une innovation biotechnologique prodigieuse C’est un groupe de tours circulaires construites de briques réfléchissantes, commandées par le programme Young Architects du MoMA PS1 et érigées à New York, qui a remporté le prix Bronze. Cette structure de David Benjamin du Living Architecture Lab (New York) met à profit les récentes avancées de la biotechnologie et des techniques informatiques et d’ingénierie de pointe pour créer un nouveau matériau de construction presque entièrement compostable et cultivé biologiquement. Le potentiel architectural est infini. Le jury a salué l’ingéniosité du projet, tant pour sa quête de matériaux de construction novateurs que pour son potentiel architectural grâce aux briques biologiques, faites d’un mélange de tiges de maïs et d’organismes fongiques. v10 n4 - 2014 Lancé lors de la cérémonie de remise des prix à Toronto, un nouveau livre publié par la Fondation Holcim se penche sur des projets progressistes et influents de l’architecte montréalais Daniel Pearl et de son équipe de l’ŒUF. Relatant une nouvelle façon de construire et de concevoir les communautés, notamment par la mise en œuvre de technologies vertes, l’ouvrage s’intéresse au redéveloppement du site Benny Farm, le tout premier gagnant en 2006 du prix Bronze des Holcim Awards internationaux. Le livre porte également un regard sur deux immeubles à logements communautaires et abordables de l’arrondissement Rosement–La Petite-Patrie à Montréal, le Coteau vert et Un toit pour tous, érigés à proximité de la station de métro Rosemont, ainsi que sur le projet de la Coopérative de solidarité Bois Ellen à Ville de Laval, un complexe conçu pour les familles et les personnes âgées. Toutes ces initiatives innovent en matière d’enveloppe du bâtiment, d’efficacité énergétique, de confort thermique et de qualité de l’air intérieur, des caractéristiques qui se retrouvent rarement avec autant de profondeur et d’envergure dans des projets de logements abordables. L’Or pour un projet d’atténuation des inondations et d’approvisionnement en eau - - v10 n4 - 2014 Logement social et vert Les leçons tirées du secteur Benny Farm à Montréal « Progress » Innovation et transférabilité du projet à d’autres applications de la société […] L’industrie des matériaux de construction a un impact à long terme. Nous construisons des structures qui sont utilisées par de nombreuses générations, nous négocions des permis d’exploitation minière et collaborons à la réalisation de plans architecturaux qui servent les marchés pour des décennies. Donc, penser à l’avenir est une partie de notre ADN. Nous voyons la nécessité d’agir avec dévouement, ce qui se traduit non seulement par le fait de parler de durabilité, mais de poursuivre une action significative2. » Holcim ltée arrive au premier rang mondial comme producteur de ciment et d’agrégats, de béton et d’asphalte et dans la prestation de services reliés à cette industrie. En 2003, soutenue par les sociétés de son groupe établies dans plus de 70 pays, l’entreprise a fondé la Holcim Foundation afin de promouvoir de façon active et significative le développement durable en construction. À travers ses activités – forum, publications, concours – l’organisme agit auprès des professionnels et du public en général et n’a de cesse d’attirer de nouveaux partenaires grâce, entre autres, à la nature prestigieuse des Holcim Awards for Sustainable Construction. En promouvant l’avancement et l’interrelation des connaissances, l’innovation technique, l’excellence architecturale et l’amélioration de la qualité de vie, de même qu’en soutenant les initiatives qui renforcent de telles approches, la Holcim Foundation démontre fièrement depuis dix ans son engagement en matière de développement durable en construction3. formes D es briques sans poids, compostables et cultivées biologiquement; des pores anti-inondation, « véritables peaux urbaines », avec leurs bassins souterrains d’une capacité de 20 milliards de gallons d’eau; une infrastructure de protection contre les inondations urbaines côtières, résistant aux pires ouragans : ce sont là quelques-uns des projets gagnants dévoilés à Toronto le 18 septembre dernier dans le cadre de la compétition Holcim Awards 2014, région Amérique du Nord. La cérémonie de remise des prix avait lieu à l’Evergreen Brick Works de Toronto, un endroit de grande prédilection pour la tenue d’un événement visant à récompenser l’interdisciplinarité, la créativité et l’efficience en matière de construction durable. La reconversion de ce site industriel de fabrication de briques désaffecté, en centre communautaire d’éducation, d’exposition et de services entièrement dévolu à la promotion du développement durable, en fait d’ailleurs l’une des destinations les plus prisées de la grande région de Toronto1. Treize lauréats ont littéralement ébloui par le degré d’innovation et d’écoefficacité de leurs projets. Ils ont tour à tour défilé sur la scène pour recevoir leurs prix, devant un auditoire déjà sensible aux valeurs de la Holcim Foundation dont l’engagement à promouvoir le développement durable en construction est mondialement reconnu. Praticiens d’expérience, jeunes professionnels et étudiants se sont partagé des bourses dans trois catégories : 180 000 $ US pour la « Catégorie principale », dont les projets « Or », « Argent » et « Bronze » se qualifient automatiquement pour la finale internationale des Global Holcim Awards 2015; 80 000 $ US répartis en quatre prix dans la catégorie « Acknowledge- ment »; et enfin, 70 000 $ visant à récompenser six candidats au talent prometteur. La sélection des projets a été réalisée par un jury indépendant constitué d’experts internationaux de tous horizons, en fonction de cinq critères : ARGENT Marie Dallaire BRONZE réalisations PROJETS ET ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX 23 Quelques données Travaux de modernisation Investissement de 305 millions $ Annonce du projet : 23 mars 2009 Début de la construction : 19 novembre 2009 Ouverture au public : 28 novembre 2013 réalisations Maîtres d’œuvre Gestionnaire du projet : Casiloc inc., filiale de Loto-Québec Architecture : Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes (MSDL) et Provencher_Roy (PRA) en consortium Génie mécanique/électrique : Tecknica HBA / Bouthilliettte Parizeau et associés (BPA) Génie structural/civil : Pasquin St-Jean et associés Gérance des travaux de construction : Pomerleau inc. Données architecturales Superficie totale brute du complexe (excluant les stationnements intérieurs) : 665 177 pi2 Capacité d’occupation : 11 000 personnes (excluant la salle de spectacle dont la réouverture est prévue pour 2015) Le Casino de Montréal c’est… 3 100 machines à sous 113 tables de jeu et appareils de jeu électronique 18 tables de Poker Texas Hold’em 4 bars 4 restaurants CASINO DE MONTRÉAL UN RENOUVEAU QUI PASSAIT PAR LA R ET D sur le plan esthétique. Les panneaux muraux qui s’y trouvent sont en pierre facilement lavables. Les préposés à l’entretien ménager n’en diraient que du bien, affirme-t-on, car procéder au nettoyage des lieux peut se faire en utilisant de la vapeur d’eau. Cette configuration plaît aussi aux préposés à la sécurité, car toutes les aires y sont ouvertes, incluant celles des toilettes individuelles pour lesquelles des chicanes font office de portes. Quant aux miroirs, leur partie inférieure diffuse des images vidéo en permanence. Les plafonds du Casino, qui sont constitués de lamelles en bois verticales ou horizontales, se trouvent aux étages du roi et de la dame. Repérables d’un simple coup d’œil, ces lamelles s’intègrent au décor en tant qu’éléments de signalisation identifiés à des aires de jeu. Les lamelles horizontales indiquent la zone réservée aux machines à sous, tandis que les verticales sont associées aux tables de jeu. Le Casino de Charlevoix s’est lui aussi invité dans l’imaginaire des concepteurs. « Nous sommes allés y voir les nouvelles installations multimédias, ce qui nous a aidés à comprendre ce que le service du marketing voulait faire à Montréal », d’expliquer Eugenio Carelli. Si le nouveau Casino de Montréal n’est pas le plus grand du monde, il se distingue néanmoins par une création digne d’un enchevêtrement d’idées, lequel a conduit à une finalité d’une grande magnificence. Il n’en fallait pas plus pour lui donner une personnalité unique, et en faire un endroit où le jeu redevient ludique, divertissant et imagé. À n’en point douter, cette enceinte réservée au divertissement a de quoi faire des envieux. L’une des priorités visait à ramener le Casino à une seule entrée, lui qui en comptait naguère trois. On voulait ainsi en rendre l’accès beaucoup plus simple. Et pour que cette entrée soit digne de l’un des établissements phares du Québec, celle-ci devait être magistrale. Vêtue de murs-rideaux et d’un éperon orienté vers le ciel, elle s’harmonise au langage particulier de cet ancien pavillon de la France de l’Expo 67, devenu ensuite le vaisseau amiral des casinos québécois. Photo : Stéphane Groleau À l’intérieur de l’établissement, des concepts originaux ont été déployés sur les cinq étages, au moyen d’un amalgame regroupant des matériaux tels le verre, le bois et l’acier ainsi que des coloris tantôt conservateurs, tantôt éclatés, mais toujours de circonstance. À titre d’exemple, le troisième niveau consacré au roi de pique est dominé par le bleu. Qualifié « d’unique au monde » – rares sont les casinos qui comptent plus d’un étage –, il a donc fallu créer une suite logique entre eux : le premier est identifié au valet de carreau (or), tandis que les deuxième et quatrième symbolisent respectivement la dame de coeur (rouge) et le joker (cuivre). Quant aux restaurants, ils ont tous été relocalisés au cinquième étage. Le nouveau hub central constitue un autre élément vital des nouvelles configurations. Véritable catalyseur du but recherché en matière de conception, il permet une redistribution fluide des espaces, en raison de son réaménagement qui sépare clairement les escaliers des ascenseurs. Les circulations intérieures sont ainsi beaucoup plus conviviales. Pour tout dire, on a dégagé les espaces intérieurs en les articulant autour d’un cœur circulaire, où se concentrent les bars et les lounges. Quant aux aires de jeu, elles gravitent autour de cette colonne vertébrale que constitue le hub. On remarque également dans ce cœur circulaire le mur multimédia (la colonne de haut en bas à droite de la photo). Sans contredit, l’une des attractions par excellence des lieux, il s’inscrit dans un exercice de créativité intense qui est allé très loin. La « perception traditionnelle des fonctionnalités de l’espace » s’en est trouvée modifiée. En somme, tous les murs de cet établissement sont devenus « signalétiques, éclairage d’ambiance et supports d’identité visuelle », résumait un communiqué de presse publié il y a quelques mois. Photos : Marc Cramer v10 n4 - 2014 v10 n4 - 2014 formes 24 R et D et innovation Démarche ambitieuse et plutôt rare dans un projet de ce genre, cette initiative est née de rencontres d’avant-projet avec l’équipe des opérations marketing, hautes mises et service à la clientèle du Casino de Montréal, en 2009. « Pendant ces réunions préliminaires, on nous a clairement expliqué la nouvelle vision de l’établissement en matière d’image de marque », souligne Yves Dagenais, cofondateur de MSDL, chargé de projet et l’un des architectes à avoir créé le concept. La nouvelle recette préconisée devait donner l’exemple aux autres casinos de la province, qui allaient emboîter le pas dans la même direction. Se mettre au travail Pour s’assurer de ne pas rater le coche, un véritable « laboratoire de créativité » axé sur « l’expérimentation » a été mis sur pied. Des réunions consacrées à la R et D ont eu lieu tous les jeudis après-midi pendant un an. Elles pouvaient durer jusque tard le soir. « On en profitait pour créer des diversions. Un jour, nous sommes allés acheter des jouets dans un magasin à un dollar. Placés au centre de la table, ils suscitaient différentes réactions de la part des participants », se rappelle Yves Dagenais. Ces moments ludiques avaient pour but de créer un « brassage d’idées », afin de stimuler l’imaginaire des architectes et des designers engagés dans ce projet, dont JeanPierre LeTourneux et Claude Provencher ont été les principaux concepteurs. Nombreuses sont les idées qui ont pu émerger grâce à ces brainstormings, pour ensuite être approfondies en R et D. « À titre d’exemple, des prototypes de matériaux ont été créés, en collaboration avec des fabricants et des fournisseurs québécois et canadiens », explique pour sa part Eugenio Carelli, associé chez Provencher_Roy, qui a travaillé en osmose avec l’équipe de design dans ce réaménagement majeur. Ces matériaux ont ensuite été testés, question de savoir comment ils pouvaient être utilisés et dans quelles conditions. Les casinos de Las Vegas se sont aussi avérés une source d’inspiration intarissable. « Après les avoir visités de fond en comble pendant trois jours et demi, nous avons par la suite assisté à une véritable explosion créative », d’avouer Yves Dagenais et Eugenio Carelli. Cette explosion a permis un décloisonnement de la pensée, en quelque sorte, qui a conduit à plusieurs décisions sensées, comme l’utilisation de la couleur blanche sur les murs, afin d’y projeter des images colorés aux moments opportuns. Le noir n’aurait pas permis de le faire. Autre idée originale empruntée de Vegas : l’installation de tapis comportant des segments carrés qui peuvent être soulevés, mais que l’on ne voit pas quand ils sont à plat. Tous les planchers surélevés du Casino de Montréal arborent des tapis de ce genre. Les caméras de sécurité sont tout aussi discrètes. Dissimulées parmi les différents luminaires et motifs accrochés aux plafonds, il est impossible d’en détecter la présence. Et que dire des nouvelles installations sanitaires du Casino qui, elles, ne passent pas inaperçues. Conçues et construites avec des matériaux très solides, elles n’en sont pas moins remarquables - E ntreprise de rénovation colossale qui s’est échelonnée sur les cinq dernières années, le réaménagement en profondeur du Casino de Montréal a exigé du doigté, beaucoup d’intuition et a impliqué des décisions judicieuses sur le plan architectural. L’objectif avoué de ce mégaprojet visait à rendre les déplacements intérieurs et extérieurs logiques, à améliorer les espaces consacrés au jeu, aux volets détente et restauration ainsi qu’à insuffler aux différents aménagements une unité thématique. Au cœur des efforts consentis pour répondre à des attentes très élevées, le consortium constitué des firmes d’architecture Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes (MSDL) et Provencher_Roy a misé plusieurs billes dans la recherche et le développement (R et D). Loto-Québec a préalablement mené plusieurs consultations auprès d’usagers du Casino, question d’établir les critères qui mettraient la table à la création d’environnements de qualité, pour ainsi combler les goûts d’une clientèle variée. Celle-ci change passablement selon l’heure du jour et de la nuit. Avant seize heures, les visiteurs sont des retraités pour la plupart. Ils viennent au Casino pour se détendre et se divertir. Par la suite, les joueurs plus jeunes entrent en scène. « C’est là que se trouvait le défi : comment allions-nous créer un environnement axé sur le jeu qui allait plaire à tout le monde, sans avoir à y changer les décors en fonction des groupes d’âge? » confiait récemment Yves Dagenais. Pour y parvenir, il a fallu élaborer diverses déclinaisons et imageries sur l’ensemble des étages, et harmoniser le tout afin d’interpeller un vaste spectre d’individus. formes François G. Cellier 25 Q U É B É C O I S E Marie Dallaire Pierre Lahoud - formes 26 Le Gardien de pierre est le résultat de l’érosion hivernale sur les formations de grès, de schistes et de roches sédimentaires, érosion qui a sculpté au fil des millénaires un visage humain solidement campé dans la paroi rocheuse de l’île aux Pommes, qui fait face à la mer. v10 n4 - 2014 D onnons à Jean-Claude Poitras ce qui lui revient. C’est en effet de lui que nous est venue l’idée de traiter de l’empreinte québécoise. Ce créateur visionnaire cherche l’inspiration aux quatre coins du monde auprès de ceux qui savent bousculer les idées reçues et initier les grands bouleversements. Dans son désir affirmé de jeter les assises d’un design québécois distinctif, il laisse des traces partout où il passe. Vue de loin, à quoi ressemble notre signature? Quelles en sont les composantes? Quelle image de nous voulons-nous projeter? En design, Jean-Claude Poitras nous a proposé de suivre la piste d’un tout nouveau Référentiel d’écoconception du meuble québécois. Destiné à favoriser le rayonnement de cette industrie, on découvre que les critères de matériaux, de conception et d’esthétisme mis de l’avant dans cet outil réveillent notre sensibilité à la grande nature. Côté architecture, l’exposition rétrospective sur le corpus de l’architecte Pierre Thibault a retenu notre attention. Ici encore, la mise en valeur de ses « maisons paysage » toutes de verre et de bois vêtues fait ressentir une sorte de parenté, comme si les paysages et le rythme des saisons appuyaient sur nos cordes sensibles. Appel de la nature? Retour aux sources? Revitalisation de la tradition? La récurrence de ces traits a tôt fait d’orienter nos recherches. Fruit du hasard, le Festival international de jardins à Métis ainsi que le microcosme de l’île aux Pommes mis à l’honneur au congrès de l’Ordre des urbanistes du Québec (OUQ) nous ont fourni des terreaux d’analyse fertiles en ce sens. Réunis à Baie-Saint-Paul, au cœur de paysages pittoresques où le fleuve est un élément de centralité, d’émerveillement et de contemplation, les participants au congrès de l’Ordre ont pu survoler en image le Saint-Laurent grâce à la projection d’une iconographie à portée emblématique, supportée par un commentaire inspiré du génie du lieu. « Un fleuve fondateur, dira Henri Dorion, identitaire à plusieurs niveaux, un fleuve de villes et de civilisation, la ligne de vie d’un demi-continent, une puissance fragile, un don de la nature exigeant qui inspire un émerveillement responsable [et qui] ne pardonnerait pas qu’on ne respecte pas son intégrité. » De tels propos ont sans doute pour effet de rallier les esprits au sujet des rapports homme-nature. Ils ont été pour nous une grande source d’inspiration. Malgré la diversité des contextes abordés ici, un fait demeure : nature, histoire, pérennité, créativité sont des constantes évoquées à travers tout le dossier, qui agissent comme des ressorts appuyant sur nos cordes sensibles. Ces marques confèrent à toute œuvre une valeur ajoutée, pour peu qu’on les marie à un design innovant, une architecture contemporaine, un jardin ou une île laboratoire. Ce dossier s’est développé sur cinq mois. De nombreux échanges, rencontres et événements auxquels nous avons assisté lui ont donné sa couleur. Nous remercions tout particulièrement Jean-Claude Poitras, Pierre Thibault, Alexander Reford, Peter Jacobs, Gaston Déry, Serge Filion qui ont été pour nous des figures d’inspiration autant que de précieux collaborateurs. Enfin, l’équipe du congrès de l’OUQ. Sylvain Poirier, du CEFdi, et Sophie Gironnay, de la MAQ, nous ont accordé leur soutien et nous les en remercions également. formes L ’ E M P R E I N T E v10 n4 - 2014 en couverture PLUS GRANDE QUE NATURE 27 JEAN-CLAUDE POITRAS POUR UN DESIGN QUÉBÉCOIS DISTINCTIF Marie Dallaire Ils ont saisi qu’il se passait ici quelque chose d’unique. Un mode de vie, une culture et une histoire qu’il ne fallait pas oublier. Pierre Lahoud, historien Le maintien de l’attractivité du Vieux-Montréal auprès des visiteurs et l’intérêt d’accroître les retombées touristiques et les effets positifs sur le développement du Vieux-Montréal font clairement ressortir l’importance d’en faire une destination offrant un produit original de calibre supérieur, axé sur la qualité de l’expérience du visiteur, quel qu’il soit, dans sa découverte du quartier et de l’histoire qu’il raconte. QUELQUES TRACES LAISSÉES ICI ET LÀ, PAR LE DESIGNER ET IDÉATEUR JEAN-CLAUDE POITRAS Je n’ai pas assez répandu autour de moi l’idée de ce monde auquel je rêve. Il faut oser créer et croire en sa créativité. JCP Photo : Pierre Choiniere Bronze de Charles Le Moyne, figure du monument à Maisonneuve, œuvre de Louis-Philippe Hébert, place d’Armes, Montréal. Photo : Jean Gagnon. Carte tirée de l’ouvrage de Roger Chartrand, Le VieuxMontréal. Une tout autre histoire, Septentrion, 2007, 146e de 348 pages HONNEUR À LA CRÉATIVITÉ D’ICI Le Vieux-Montréal est une destination touristique à valeur patrimoniale exceptionnelle. Comme il l’a toujours fait depuis plus de quatre décennies, Jean-Claude Poitras témoigne brillamment ici de ce qui nous distingue comme collectivité. Exposés en permanence sous le titre générique De corps et d’âme, ses tableaux sont accrochés à la sortie de l’ascenseur des cinq étages de l’hôtel transformé en galerie d’art. Grâce à un guide mobile numérique ou un simple téléphone intelligent3, le visiteur est plongé dans l’univers à la fois poétique et pictural de l’artiste, soutenu par des variations du compositeur, François Dompierre, et de la célèbre violoniste, Angèle Dubeau. Cette immersion dans l’œuvre du designer a de quoi étonner. Elle permet au visiteur de l’hôtel de vivre une expérience authentique d’art visuel, en plus de lui offrir une perspective inattendue au regard des composantes historiques environnantes. Valeur ajoutée à la destination, cette réinvention unique du monde n’est pas sans illustrer le passage du temps, où nos origines se fondent à une renaissance, où le façonnement de notre identité se poursuit, pour nous-mêmes et pour les autres, aujourd’hui et pour demain, et où enfin quartier historique et vie contemporaine ne font plus qu’un. • Fidèle chroniqueur au journal Le Devoir depuis cinq ans, il souhaite démocratiser le design sous toutes ses formes. Son intention : défier l’ordre établi, éveiller les consciences, susciter la réflexion. • Communicateur recherché, il ne cesse de se réinventer à travers des conférences inspirantes et une offre de service de consultant taillée sur mesure. Proche des artistes, il n’hésite pas à s’associer à des causes au profit des jeunes. Le cocktail Osez le rouge au profit de la maison des jeunes La Symbiose, organisé en mai dernier, est un bel exemple de ce qu’inspire la présence du designer (voir <www.cocktailosezlerougedelasymbiose.com>). Conscient de l’importance de proposer des guides pour accompagner les jeunes et les rassurer quant à leur avenir, il n’hésite pas à parler des embûches rencontrées sur son propre parcours. • Récipiendaire de l’Ordre du Canada en 1995; Chevalier de l’Ordre national du Québec depuis 1996 et promu Officier en 2012; gagnant de nombreux prix nationaux et internationaux, dont le prestigieux Fil d’or à Monte-Carlo – qu’il est le seul Canadien à avoir remporté; il continue d’enrichir notre patrimoine culturel actuel de sa vaste production en arts visuels. v10 n4 - 2014 v10 n4 - 2014 formes 28 Jean-Claude Poitras devant ses toiles exposées à l’hôtel Le Saint-Sulpice à Montréal. - M archands de Montréal parmi les plus riches, associés dans la traite de fourrures, milicien et interprète en pays iroquois pour le second, les sieurs Jacques Le Ber et Charles Le Moyne furent aussi beaux-frères dans la vie. Entre 1660 et 1664, ils s’établirent au centre de la Ville-Marie naissante sur un grand terrain offert par Paul de Chomedey de Maisonneuve, à l’angle nord-ouest des rues SaintPaul et Saint-Sulpice, emplacement qui leur servit d’assises familiales et commerciales. Aujourd’hui, l’occupation de ces concessions ancestrales est dominée par la présence du luxueux hôtel Le Saint-Sulpice, dont la façade latérale donne dans la rue Saint-Paul (no 125) et l’entrée principale dans la rue Saint-Sulpice (no 414). Côtoyant la basilique Notre-Dame, le Vieux Séminaire, la résidence des pères sulpiciens et la chapelle du Sacré-Cœur, on peut dire du complexe hôtelier qu’il niche au cœur des plus beaux joyaux du Vieux-Montréal, baignant dans une histoire et des personnages qui ont marqué le site1. À l’ombre du plus ancien jardin entretenu en permanence en Amérique du Nord, et gardé secret par les pères sulpiciens depuis plus de trois siècles2, une dizaine de tableaux ornent les murs de l’hôtel. Ils sont l’œuvre du grand designer, Jean-Claude Poitras, qui renaît de lui-même pour nous faire apprécier sa recherche d’authenticité, dont les tendances actuelles à une consommation débridée et une recherche de profits étouffante tendent à nous détourner. L’histoire a engrangé ses pierres. Or, voici des œuvres contemporaines bien vivantes, qui en font rayonner les traces distinctives au cœur de ce quartier fondateur. formes Plan de protection et de mise en valeur du Vieux-Montréal, Direction de la culture du patrimoine, Division du patrimoine, Ville de Montréal, octobre 2013, p. 27. • Après s’être consacré pendant plus de quarante ans au domaine du design de mode, après avoir créé à travers le vêtement, les marques distinctives de notre personnalité et les avoir placées sous les feux des plus hauts podiums, Jean-Claude Poitras poursuit sa trajectoire en explorant de nouveaux créneaux. À soixante-cinq ans, il rêve de mettre en place une plateforme pour faire de la métropole une vitrine incontournable de la créativité et du lifestyle à l’échelle internationale, vitrine aux allures multidisciplinaire, intergénérationnelle et multiculturelle. Chaque fois qu’il en a l’occasion, il contribue concrètement à l’épanouissement des jeunes qui formeront la société de demain. 29 POITRAS S’ASSOCIE À UNE RÉFLEXION SUR LE MEUBLE QUÉBÉCOIS Atout de différenciation I : L’écoconception Atout de différenciation II : Le Branding 1. Les critères économiques Critère 1.1 : Le positionnement Critère 1.2 : Le marché cible Critère 1.3 : L’investissement en recherche et développement 2. Les critères concernant les matériaux Critère 2.1 : Le bois Critère 2.2 : L’aluminium Critère 2.3 : Le verre Critère 2.4 : Le cuir Critère 2.5 : Les textiles Critère 2.6 : Le rembourrage 3. Les critères de conception Critère 3.1 : La modularité Critère 3.2 : La qualité Critère 3.3 : Le cycle de vie du produit Critère 3.4 : La multifonctionnalité formes 4. Les critères esthétiques Critère 4.1 : Les formes asymétriques Critère 4.2 : Les surfaces organiques Critère 4.3 : La construction hybride (multimatériaux) Critère 4.4 : Les couleurs naturelles Critère 4.5 : Le caractère avant-gardiste Critère 4.6 : Le style néo-traditionnel formes - v10 n4 - 2014 La démarche Empreinte québécoise et les prototypes de la collection « Premières empreintes » Depuis 2012, six fabricants québécois – membres du créneau ACCORD Design d’ameublement de Lanaudière et de la Mauricie – ont pris part à l’aventure; ils ont imaginé et réalisé un produit chacun, en tenant compte des 19 critères du référentiel. Baptisée « L’Empreinte québécoise », cette nouvelle phase du projet a suscité la collaboration entre fournisseurs, manufacturiers, designers, distributeurs et détaillants. Elle a surtout permis l’éclosion d’une signature nouvelle et à notre image. « Le Québec est une terre de défricheurs et de bâtisseurs, explique Jean-Claude Poitras, ainsi qu’une source inépuisable de créativité où le design tarde toutefois à révéler sa véritable empreinte. Nous sommes convaincus que le temps est venu de penser différemment et de faire les choses autrement. C’est pourquoi nous proposons collectivement et solidairement de nous appuyer sur une plateforme innovatrice et collective misant sur le design comme outil de développement de nos entreprises pour nous permettre de nous différencier, de nous réinventer et de nous faire rayonner7. » Publié par le CEFdi en 2012, l’outil prend l’allure d’un cahier des charges. Il est illustré. Une bibliographie constituée d’articles, de sites Web, de documents et d’organismes complète l’ensemble. Les 19 critères distinctifs et atouts de différenciation sont présentés ici à titre indicatif seulement. Dans le référentiel, chaque critère est assorti d’explications, d’exigences à prendre en compte ou de recommandations. Le tout s’inscrit dans une démarche de conception pluridisciplinaire. Pour toute information au sujet du référentiel, on s’adresse à Sylvain Poirier, coordonnateur, CEFdi, au www.cefdi.ca ou au 450 470-0933, poste 5217. v10 n4 - 2014 Un référentiel d’écoconception de mobilier québécois aux retombées surprenantes Le CEFDI, en collaboration avec le créneau ACCORD et le designer JeanClaude Poitras, s’est donné pour mission de définir un style rendant l’ameublement d’ici reconnaissable partout à l’étranger. Une fois passé en revue le patrimoine du meuble québécois et ses courants, après nombre d’entrevues et de consultations, l’analyse a permis de faire ressortir « les cordes sensibles des Québécois en matière de design6 ». Ces données ont par la suite servi à la réalisation d’un outil novateur unique en son genre dans l’industrie de l’ameublement : Un référentiel d’écoconception de mobilier québécois. Simple d’utilisation et convivial, ce référentiel vise à encadrer la démarche de conception d’un produit. Élaboré sur le modèle d’un cahier des charges, il contient 19 critères et leurs justificatifs, répartis en 4 catégories ainsi que 2 atouts de différenciation. Pour qui veut allier innovation, respect de l’environnement et créativité, créer une synergie entre différents acteurs de l’industrie, et par là contribuer au rayonnement d’un style proprement québécois, ces critères doivent être vus comme des conditions gagnantes au développement de produits. Un référentiel d’écoconception de mobilier québécois - Sollicité comme figure de proue par un groupe de chercheurs en janvier 2012, Jean-Claude Poitras se joint aux designers Véronique Paradis et Claude Sauriol, tous deux affiliés au Centre d’expertise et de formation en design industriel (CEFdi) du Cégep régional de Lanaudière, afin de mener une réflexion audacieuse et nouvelle visant à définir une stratégie de rayonnement du design québécois ici et à l’étranger. Un constat troublant place l’industrie québécoise de l’ameublement face à un tournant, notent les chercheurs. La croissance fulgurante de la concurrence asiatique et la compétition du marché européen toujours de plus en plus menaçant obligent les fabricants à revoir leurs produits, moderniser leurs équipements et ajuster leurs modèles d’affaires. Il devient pressant, selon eux, de se démarquer sur les marchés internationaux par l’introduction de produits à valeur ajoutée. Dans ce contexte et en collaboration avec le créneau ACCORD Design d’ameublement de Lanaudière et de la Mauricie4, l’équipe se mobilise afin de poser un diagnostic sur les perspectives et les enjeux de cette industrie en péril. Les recommandations ne se font pas attendre : elles portent sur la dimension économique, l’approvisionnement, l’écoconception et l’esthétique de produits. L’issue des travaux est claire : « Répondre à la demande ne suffit plus; il faut l’anticiper5. » 30 31 formes - v10 n4 - 2014 Félix Leclerc 32 Une baignoire aux formes calquées sur nos lacs québécois; un lavabo inspiré de l’empreinte des glaciers sur la pierre, dont le profil sinueux est sculpté dans l’ardoise; un mobilier de bois d’eau portant les marques de l’histoire de la drave… Chacune des composantes de la collection Origine illustre le désir de dépassement du fabricant Vanico-Maronyx. Leurs surfaces organiques, leurs lignes asymétriques, leurs couleurs naturelles déclinent la grande nature québécoise. Elles sont le fruit d’une démarche exemplaire fondée sur une culture d’entreprise axée sur la recherche, le développement et l’innovation, qui souhaite demeurer à l’abri d’influences étrangères. En prenant part à la démarche d’écoconception chapeautée par le CEFdi, en s’appuyant sur les exigences bien définies du référentiel, les dirigeants de l’entreprise se sont engagés à vivre l’expérience d’un design véritablement québécois. Ils ont misé sur le savoir-faire et l’expertise de leurs artisans et sur la créativité de leurs designers; ils se sont adjoint des fournisseurs de matériaux de qualité exceptionnelle; ils ont permis aux distributeurs de participer à la réflexion. Le résultat est là : il traduit un style, une esthétique typiquement québécoise, capable de nous raconter une histoire. Les créateurs de Vanico-Maronyx ont puisé leur inspiration dans la grande nature. L’ardoise noire et le bois d’eau leur ont prêté tout leur pouvoir d’évocation. Pierre sculptée par le passage millénaire des glaciers, bois de drave endormi sous l’eau pendant plus de cent ans, ces matériaux naturels et intemporels, recueillis une pièce à la fois, ont fait l’objet d’un traitement artisanal de la part d’exploitants – Glendyne pour l’ardoise et Les bois d’eau pour le bois – qui leur ont consacré patience et minutie. Dans la chaîne de conception de la collection Origine, le choix d’entreprises écoresponsables dans la gestion de la ressource a été un facteur déterminant dans la valeur ajoutée à ce mobilier haut de gamme. La collection Origine surprend par sa beauté, son caractère innovateur, son audace. Puisant à même les racines et traditions québécoises, éveillant aux beautés du territoire, elle illustre un repositionnement réussi du fabricant. L’équipe du CEFdi, en collaboration avec ACCORD, a élaboré une démarche d’accompagnement destinée à stimuler la synergie des acteurs du milieu. Les photos de mobilier des pages 31 à 33 représentent les réalisations des six équipes invitées à travailler ensemble à la conception des meubles de la collection Premières empreintes. Source et information : www.designameublement.org/data/2555b56b1 Chartrand, Roger. Le Vieux-Montréal. Une tout autre histoire, Éditions du Septentrion, Québec, 2007, 144 e et 145e de 348 pages. 2 Le site historique du Vieux-Séminaire-de-SaintSulpice, édifice conventuel érigé à partir de 1684 avec jardin arrière, selon les plans du supérieur François Dollier de Casson, le plus ancien édifice dans le Vieux-Montréal, <http://fr.wikipedia.org/ wiki/Vieux_S%C3%A9minaire_de_Saint-Sulpice>. 3 L’appareil mobile intelligent peut également tenir lieu de guide. Il suffit d’atteindre le <www. hotelgalerie.ca>. 4 La démarche ACCORD (Action concertée de coopération régionale de développement) s’appuie sur les forces régionales (ici Lanaudière, Mauricie, Estrie et Centre-du-Québec) et sur la recherche de l’excellence dans des créneaux commerciaux névralgiques. Gens d’affaires et entrepreneurs d’une même région se regroupent sous cette bannière, afin de se donner une vision commune de leur secteur d’activité ainsi que des stratégies de mise en valeur à long terme. 5 PARADIS, V., J.-C. POITRAS et C. SAURIOL. Un référentiel d’écoconception de mobilier québécois, CEFdi, Octobre 2012, p. 3. 6 Expression inspirée d’un ouvrage de Jacques Bouchard ayant pour titre Nouvelles cordes sensibles des Québécois, Éditions des Intouchables, 2006. 7 Guide référentiel du meuble québécois. Cahier de recherche, CEFdi, Juillet 2013, 88e de 101 pages. 8 Conférence prononcée à l’occasion du Salon International du Design de Montréal (SIDIM), le 27 mai 2014. 9 Jean-Claude Poitras. Portrait d’un homme de style, Les Éditions de l’Homme, Montréal, 2002, 265 pages. v10 n4 - 2014 Quarante-cinq ans de forêt, de gelée, de gaffes et de souliers, de barrages à défoncer | une forêt est morte | la tâche des draveurs | transporter cette forêt par les chemins étroits Lorsque l’on parcourt la biographie de Jean-Claude Poitras rédigée par Anne Richer9, on réalise à quel point l’homme qu’elle dépeint a très peu changé. Toujours imprégné de la lucidité qui a coloré son plus jeune âge, le designer regarde au loin, droit devant. Les quarante années de son parcours exceptionnel de créateur de mode témoignent d’une œuvre remarquable et d’une somme colossale de travail. Elles ont fait de lui un ambassadeur reconnu dans le monde entier. À soixante-cinq ans, Jean-Claude Poitras se consacre aujourd’hui à l’art du dessin et de la sculpture. Rêvant d’un monde éblouissant de beauté, il demeure bien engagé dans le présent, toujours fidèle aux convictions qui lui ont servi de point d’appui toute sa vie. Parfois, l’homme interroge son parcours, il doute. Alors, l’artiste en lui renaît, propageant sa générosité, ses valeurs de solidarité et d’harmonie dans un monde qui en a cruellement besoin. On aura beau chercher : on ne trouve rien de ses actions récentes ou passées, qui ne témoigne de sa conviction profonde qu’il faut définir qui nous sommes, grâce au croisement des disciplines, et ce, pour créer le patrimoine de demain. - Pour que les têtes se retournent, mettez-y un peu d’histoire! L’exemple de la collection Origine FIGURE D’INSPIRATION DE TOUTES LES GÉNÉRATIONS formes Une mise en garde s’impose À celui ou celle qui serait tenté d’utiliser la matrice d’écoconstruction de mobilier québécois (voir le tableau ci-contre) et de mettre à profit les critères et atouts de différenciation qui y sont proposés, une mise en garde s’impose. En effet, selon Sylvain Poirier, membre de l’Association des designers industriels du Québec (ADIQ) et coordonnateur du CEFdi, l’Empreinte québécoise se veut une démarche d’accompagnement, de développement et de mise en marché qui force à penser et à faire différemment. Selon lui, la synergie issue d’un travail collaboratif est un principe incontournable, catalyseur d’une signature distinctive, audacieuse et novatrice8. Pour Jean-Claude Poitras, un fabricant qui fait le choix de miser sur un savoir-faire, sur des matières nobles et essences typiques du Québec, sur une esthétique inspirée de notre histoire et qui exploite les principes de design durable et d’écoresponsabilité affirme et raconte notre héritage pluriel. La collection Premières empreintes démontre bien, selon lui, qu’un design pertinent et bien intégré devient un outil de croissance et de repositionnement d’une image de marque, en ce qu’il permet de proposer des produits distinctifs, originaux et séduisants sur les marchés locaux et internationaux. 33 DE PAYSAGE, DE BOIS, DE PIERRE... formes 34 Gilles Vigneault P ierre Thibault est du bois dont on fait les flûtes. Installé au fond d’une salle dans un mobilier rudimentaire, il laisse aller ses mots dans le microphone d’une journaliste. Malgré quelques traits de fatigue, il se prête aux règles du moment : interviews, séances photo, poignées de main… En cette matinée du 29 mai 2014, la MAQ (Maison de l’architecture du Québec) dévoile une nouvelle exposition doublée du lancement d’une monographie, soulignant les vingt-cinq ans de carrière de l’architecte. C’est dans une caserne de pompiers désaffectée que la MAQ tient ses événements depuis qu’elle y a emménagé en 2005. De cet édifice civique1 plus que centenaire, la façade et son couronnement ont été soigneusement préservés. On dirait que sa vieille âme inonde la halle blanche : l’exposition y prend une allure tout à fait intemporelle. Ayant pour titre L’architecture comme paysage, l’installation se présente un peu comme un territoire partagé. Elle invite à cheminer dans les sentiers de l’artiste : à scruter ses biais, adopter ses détours, avancer, reculer. Tout au long du voyage, le spectateur louvoie entre modernité et tradition, paysage et brindille, invention et nature. L’exiguïté des lieux, la disposition des objets – déploiement horizontal sur tréteaux, exploitation des parois verticales – gardent l’œil en mouvement. À devoir ainsi sans cesse ajuster le regard, le visiteur éprouve une sorte de « tension », celle-là même, pourrait-on croire, dont se nourrit l’architecte pour créer. La caserne numéro 20 fut construite au tout début du 20e siècle, en remplacement d’une caserne de la fin du 19e sur le même site qui avait logé à l’étage le quartier général du Service des incendies de Montréal jusqu’à l’installation de ce dernier en 1904 dans le bâtiment de la place d’Youville. En 1985, le jury de Sauvons Montréal avait attribué une « Mention honorable » à la Ville de Montréal dans le cadre des prix Orange et Citron, pour la rénovation de la caserne 20. Le prix soulignait, d’une part, la préservation de cette fonction protectrice pour le Vieux-Montréal et, d’autre part, l’attention 1 portée au maintien de l’architecture – façade et volumétrie – du bâtiment. Par la suite, les travaux d’agrandissement du Palais des congrès ont eu pour conséquence de relocaliser les pompiers sur SaintUrbain et de ne garder de la caserne que la façade et un volume au rez-de-chaussée, réaménagé pour les besoins de l’actuel occupant. Informations recueillies auprès de Dinu Bumbaru, 6 juin 2014. 2 Pierre Thibault vu par Teyssot + Ponte. L’architecture comme paysage. Monographie MAQ, numéro 03, Maison de l’architecture du Québec, mai 2014, p. 5 C réé en 2001, ce catalyseur d’activités artistiques suscite création, diffusion, et réflexion en architecture, architecture de paysage et urbanisme. En permettant, depuis sa fondation, à plus de 400 firmes, professionnels et artisans de s’illustrer au moyen d’expositions, d’événements, de laboratoires de création, de débats, la Maison de l’architecture du Québec contribue à faire connaître à un large public ce qui a cours en recherche et dans le développement des connaissances liées aux disciplines de l’aménagement. C’est en collaboration avec les médias télévisuels et journalistiques, en s’associant à des partenaires d’ici et d’ailleurs, en jumelant les praticiens aux théoriciens, aux créateurs des arts visuels et de la littérature que la MAQ contribue au rayonnement du Québec. L’exposition Pierre Thibault vu par Georges Teyssot et Alessandra Ponte : l’architecture comme paysage qui s’est tenue à la Maison de l’architecture du Québec, est reprise jusqu’à Noël à l’École d’architecture de l’Université Laval, salle Jean-Marie-Roy, 1, côte de la Fabrique, Québec. v10 n4 - 2014 Dans la blanche cérémonie Où la neige au vent se marie Dans ce pays de poudrerie Mon père a fait bâtir maison Et je m´en vais être fidèle À sa manière, à son modèle La chambre d´amis sera telle Qu´on viendra des autres saisons Pour se bâtir à côté d´elle Maison de l’architecture du Québec - - v10 n3 - 2014 Marie Dallaire Les commissaires, Georges Teyssot et Alessandra Ponte, aidés du personnel de la MAQ, ont travaillé avec intelligence et finesse. Trois thèmes : Cabanes/Abris, Installations/Performances, Équipement/Monument; pour chacun, trois projets – dont des dessins d’esquisse, aquarelles, maquettes d’étude et notes manuscrites – révèlent la démarche conceptuelle préalable aux représentations numériques de chaque réalisation architecturale. L’exposition démontre la complémentarité des savoir-faire de l’artiste et rend son travail d’autant plus intelligible pour le visiteur. « Une soixantaine de résidences privées, des bâtiments publics, des installations-performances en milieu naturel, c’est là une œuvre considérable. Chaque projet est le fruit d’une démarche de recherche spécifique et unique, jamais de “copier-coller”, et pourtant une signature que l’on peut reconnaître entre toutes, dit Sophie Gironnay, directrice générale et artistique de la MAQ. Nous avons choisi d’illustrer ce corpus abondant de multiples façons, afin que le visiteur prenne la juste mesure du travail de l’architecte. » Dans leur monographie, Teyssot et Ponte jettent un regard savant sur l’œuvre de Pierre Thibault. Les rapports entre sa production architecturale, les arts visuels et plastiques et la cinématographie sont mis en relief. Les auteurs soulignent l’importance des savoir-faire de l’architecte qui privilégie un décloisonnement disciplinaire, si caractéristique de son travail. « Malgré la révolution du numérique, écrit Teyssot, dessin et figuration graphique offrent les outils incontournables du métier d’architecte […] Une telle virtuosité [chez Thibault] […] permet d’affirmer la prééminence du dessin conceptuel dans son œuvre2. » Pierre Thibault a travaillé avec plusieurs communautés autochtones. Leurs constructions traditionnelles ont influencé ses recherches. Il a également trouvé dans Walden ou la vie dans les bois (1854) d’Henry David Thoreau une source inépuisable d’inspiration sur la nature et sur la vie en forêt, qui sont pour lui des thèmes de prédilection. D’ailleurs, la maison ancestrale dans laquelle il a grandi, la grange de son grand-père, le « petit paradis » de son oncle qui avait lui-même construit son chalet sur une île, sont des souvenirs précieux qui l’ont placé dès l’enfance en dialogue avec le paysage. L’exposition prévoit un mur de photos de ses projets, choisies parmi celles qu’a réalisées le photographe Alain Laforest, collaborateur de Pierre Thibault depuis vingt ans. Devant cette mosaïque, l’envie nous vient de chantonner : « Ma maison ce n’est pas une maison, c’est un lac… la forêt… une rivière… et la neige… » Étonnamment, lorsque nous l’interrogeons sur les caractéristiques de l’architecture québécoise, Pierre Thibault nous parle de ses voyages à l’étranger et de son rapport au temps. Un temps pour lui qui se « dilate » lorsqu’on est devant la grande nature. Des voyages qui l’aident à mieux comprendre la lumière, les paysages et le ciel d’ici. Reflet d’un ensemble d’expériences – mémorielles, artistiques, vernaculaires, sensorielles –, d’un rapport au temps « lent » pour ne rien perdre en intériorité et en mémoire, son travail de réflexion et de création intègre les traits particuliers de nos paysages. Sa signature unique fait ressortir l’unicité et la beauté d’un territoire où l’on ressent encore la présence du passé dans son présent et son devenir. Au-delà de la rampe, Pierre Thibault offre un regard pacifique et bienveillant sur notre monde. formes Alain Laforest THIBAULT À LA MAQ 35 PIERRE THIBAULT SIGNE MAISONS PAYSAGE Marie Dallaire formes - v10 n4 - 2014 A 36 lors que dans son livre Maisons nature (2010), l’architecte offrait pour chaque projet dépeint un espace de parole à ses clients, ici ce sont plutôt les paysages de lac, de forêt, de fleuve et de ville qui, tour à tour, entrent en dialogue avec le lecteur et agissent sur ses souvenirs prégnants de grande nature. Aucun effort à faire : les images, grandioses, suffisent. De notre enfance à aujourd’hui, nous sommes « de lacs et de rivières1 ». Abondamment décrits par nos ancêtres découvreurs et colonisateurs, repris par nos poètes, représentés en peinture, détaillés dans nos soirées d’antan, les paysages québécois sont figures d’émerveillement. Ils sont un référent. Les émotions qui y sont rattachées habitent nos mémoires. Elles illustrent pour nous la valeur emblématique et identitaire du territoire. Pierre Thibault visite chaque lieu d’un projet. Le travail de conception débute à l’instant même où il y pose pied, dans l’appréciation d’un moment d’échange avec son client, dans un arrêt sur image, dans le cadrage d’un point de vue, dans la découverte d’un panorama. L’architecte réalise des croquis, retourne plusieurs fois sur un site pour en comprendre l’essence. Il se laisse happé par les variations de lumière, une monochromie hivernale, de nouvelles perspectives, une pierre sculptée, un dénivelé qu’il n’avait pas vu à la première déambulation, une percée sur un lac – ce « morceau d’infini ». Il se constitue ainsi un répertoire d’expériences contemplatives, sensorielles et esthétiques très puissant. En quelque sorte, il conjure le temps. Chaque réalisation résulte d’un lent processus. De bois et de verre le plus souvent, arborant des volumes simples et des lignes pures, chaque maison épouse la topographie du lieu, sa lumière, ses éléments de nature. Des ambiances uniques, riches, diversifiées sont ainsi créées, en toute harmonie avec leur environnement. Elles ont cette particularité d’unifier le monde autour de soi, d’être propices à la contemplation et de redonner du temps aux occupants. Maisons paysage se feuillette au présent. L’ouvrage invite à plonger dans l’immédiateté d’instants fabuleux. L’iconographie étudiée d’Alain Laforest, photographe attitré de l’architecte, circonscrit habilement l’intégration du bâti dans le silence et la beauté. En outre, une sélection inédite de photos aériennes du photographe et historien Pierre Lahoud donne la mesure d’une nature quasi inaltérée. À suivre la trajectoire des 16 réalisations qui composent l’ouvrage, à voyager dans leur cartographie respective et à découvrir en chacune l’élément – lumière, variation, horizon, marée… – déclencheur d’inspiration pour l’artiste, à voir enfin des formes simples s’unir au paysage, on accède, grâce à Maisons paysage, à un nouvel espace-temps d’imaginaire et de liberté. Maisons paysage, le tout récent ouvrage de Pierre Thibault, porte en épigraphe ce mot de l’architecte Alvaro Siza : « Imaginer signifie se souvenir de ce que la mémoire a écrit en nous. » COLLECTION ÉCOLOGIQUE O R IGIN E EXPRESSION DE L’EMPREINTE QUÉBÉCOISE Ardoise des lavabos ESKR et murets par Robinet écologique RU, en collaboration avec Quincaillerie et mécanisme Technik für Möbel 1 Claude Gauthier, Le plus beau voyage. Hettich Canada L.P. Technik · 9435, Transcanadienne für Möbel · Ville St-Laurent, Québec · H4S 1V3 · Tél.: (514) 333-3952 · www.hettich.com Hettich Canada L.P. · 9435, Transcanadienne · Ville St-Laurent, Québec · H4S 1V3 · Tél.: (514) 333-3952 · www.hettich.com PubCoop.indd 1 16.09.11 10:26 LES JARDINS DE MÉTIS UN PAYSAGE QUI NOUS RESSEMBLE Marie Dallaire formes 38 Ici, en ces nuits d’été, le monde semble imprégné d’une rare immobilité et enveloppé dans un silence sacré à peine ponctué par le doux clapotis de l’océan; ici, la lune d’argent clair brille d’une céleste limpidité et règne sur un ciel sans nuage, vaporisant sa lumière sur les pétales des lis et sur le visage radieux, tourné vers les cieux, de chaque fleur. L’ineffable beauté du paysage transcende le temps et l’espace et exhale un parfum d’éternité. Elsie Reford, A Lily Garden in the Lower St. Lawrence Valley4 Photo : Robert W. Reford L’engagement de Lord Mount Stephen dans le monde des affaires coïncide avec l’avènement de progrès technologiques importants : télégraphe, téléphone, électricité, gaz, moteur à explosion; il contribue à la mise en place d’une société moderne. Photo : Russell & Sons REFORD, Alexander. Les Jardins de Métis. Le paradis d’Elsie Reford, Les Éditions de l’Homme, 2004, p. 38. 2 NADEAU, Gaétan. Angus. Du grand capital à l’économie sociale, Éditions Fides, 2009, p. 36. 3 Il s’agit du nom dont Sir George Stephen baptisa son camp de pêche. 4 Cité par Alexander REFORD, Op. cit., p. 53e de 180. 5 Joliet, Fabienne et Peter Jacobs. « Le Wilderness, une manière de voir et d’être à la nature sauvage : le prisme paysager de Tremblant, Québec », Cahiers de géographie du Québec, vol. 53, n° 148, 2009, p. 27-46, <http://id.erudit.org/iderudit/038140ar>. 1 La Villa Estevan, maison d’intérêt historique, fut le domicile d’été d’Elsie Reford. Construite en 1887 pour Lord Mount Stephen, Elsie Reford fait agrandir la maison en 1926 selon les plans de l’architecte montréalais Galt Durnford. Photo : © 2008, Robert Baronet, Jardins de Métis/Reford Gardens Peter Jacobs est membre de l’Association des architectes paysagistes du Canada et professeur titulaire à l’École d’architecture de paysage de la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal. Il nous a offert son soutien pour la présente section. 7 Fabienne Joliet et Peter Jacobs, Op. cit., p. 28. 8 Ibidem, p. 29-30. 9 Ibidem, p. 29-30. 10 Ibidem, p. 173. 6 Ce projet a été réalisé en 2000 à l’occasion de l’inauguration du Festival international de jardins de Métis. L’inspiration découle de deux caractéristiques uniques aux Jardins de Métis : le célèbre pavot bleu de l’Himalaya emblématique des Jardins; et les platesbandes à l’anglaise du jardin historique des années 1920 […] Le Jardin de bâtons bleus a été conçu à partir d’une image du pavot bleu numérisée, pixélisée et métamorphosée en bâtons afin de créer une abstraction moderne du jardin tra ditionnel victorien. Trois des quatre côtés sont peints bleu et le quatrième orange, produisant ainsi un effet chromatique d’une simplicité déconcertante et des points de vue toujours changeants. Cette œuvre invite, non pas à la contemplation, mais plutôt à une déambulation qui permet d’éprouver les deux temporalités comprimées dans le même lieu et dialoguant entre elles. On traverse ce jardin en s’abandonnant à une expérience sensorielle saisissante marquée par le parcours labyrinthique de l’installation. En actualisant notre expérience du jardin, cette installation réinterprète le savoir-faire […] d’Elsie, sans toutefois en diluer l’essence. Le Jardin de bâtons bleus, œuvre de Claude Cormier, architecture de paysage + Design urbain. Année de création : 2000 Source : Festival international de jardins Photos: Louise Tanguay v10 n4 - 2014 v10 n4 - 2014 Jardins paysage et Wilderness La création des Jardins de Métis auxquels Elsie Reford consacre les trente dernières années de sa vie n’est pas sans évoquer son inclination à préserver la beauté de la nature et à endiguer sa dégradation. Le jardin des bâtons bleus - C’ est ainsi qu’en 1896, Lord Mount Stephen se confie à son ami Garnet Wolseley sur la raison qui le pousse à se départir de sa résidence secondaire à Grand-Métis, à la suite du décès de sa femme. Écossais d’origine établi à Montréal, cet éminent homme d’affaires s’enrichit de manière colossale principalement grâce au développement du chemin de fer aux États-Unis. Il fut également président et financier du Canadien Pacifique, chemin transcontinental qu’il mène à terme en 1885. Son engagement dans le monde des affaires coïncide avec l’avènement de progrès technologiques importants : télégraphe, téléphone, électricité, gaz, moteur à explosion; il contribue à la mise en place d’une société moderne. À elle seule son entreprise florissante – terrains, transport ferroviaire et maritime, hôtels luxueux en soutien à ses marchés… – illustre « le Québec du capital, un Québec anglophone, britannique, victorien, qui vit tout à fait au rythme de l’Empire2 ». C’est à sa nièce, Elsie Reford, qu’il lègue son domaine le 12 septembre 1918 : 40 acres de terres boisées et de vastes pâturages ainsi qu’un camp de pêche et des fosses à saumons sur la rivière Mitis, avec dépendances offrant une vue imprenable sur le fleuve Saint-Laurent. Dans les années 1900, Elsie séjourne à Grand-Métis au mois d’août de chaque année pour la chasse, la pêche, l’équitation et le canotage. Elle en profite pour écrire à son oncle qui désormais vit à Londres, puis dans la campagne avoisinante à Brocket Hall : elle le tient informé de ses succès à la pêche. Les fréquents déplacements pour affaires de son époux Robert Wilson Reford, entre Montréal et Liverpool, lui permettent aussi de lui rendre visite. Entre elle et lui existe un lien de complicité, d’estime et d’admiration qui ne se démentira jamais. Elsie Reford accepte d’hériter d’un domaine aussi rude qu’immense, peu paysagé et implanté de bâtiments sommaires, requérant un personnel nombreux durant la saison estivale. La paisible propriété d’Estevan Lodge3, bien que vaste et accueillante, est modeste et sans aucune parenté avec l’opulence de la bourgeoisie montréalaise à laquelle appartient l’héritière. De toute évidence, les vacances à Grand-Métis offrent bonheur et répit contre les exigences dues au rang. Plus encore permettent-elles à Elsie de marcher dans les pas de son oncle comme dans le réceptacle d’une promesse, de rêver de cette terre et de son ciel comme d’un havre d’éternité. En ce début de siècle mouvementé, Elsie est aux premières loges pour constater l’impact du développement du tissu urbain et la fragilité du territoire aux prises avec l’industrialisation des secteurs agricoles et forestiers. La création des Jardins de Métis auxquels elle consacre les trente dernières années de sa vie n’est pas sans évoquer son inclination à préserver la beauté de la nature et à endiguer sa dégradation. formes « Je ne peux plus retourner là. Je n’allais jamais sur la rivière sans elle […] aussi son souvenir me hanterait-il à chaque instant1. » Les Jardins de Métis non seulement évoquent la grande nature mais la magnifient. Leur déploiement qui s’étend sur plus de trois décennies s’appuie sur un désir individuel de nature, rappelant les règles d’un mode de vie traditionnel inspiré des grands espaces vierges de l’Amérique du Nord, explorés par nos premiers découvreurs. Si la sublimité des Jardins s’explique de multiples façons, l’angle du Wilderness5 – expression que nous tirons d’un article de F. Joliet et P. Jacobs6 – permet d’y voir l’expression habitée de la nature québécoise originelle dans ce qu’elle a de plus grandiose et de plus fondamental au plan historique. Le Wilderness incarne cette idée de « première nature » ou de « grandeur sauvage » à la base de l’identité de notre continent. Façonné en Amérique du Nord à partir du XVIe siècle, le paysage mythique qu’il évoque « s’est construit à partir d’une relation spécifique entre une géographie et une population particulière, dans un espace-temps culturel donné7. » Plus précisément, la puissance évocatrice du Wilderness « réside dans la métaphore d’un univers de nature dépouillé et résistant […] mais aussi dans le défi de l’épreuve que cette nature […] impose pour y accéder. […] siège du danger […] miroir de l’immensité […] parcours initiatique […] sa trajectoire historique puise son origine dans la colonisation européenne de l’Amérique dès le XVIe siècle8. » Racontée dans les soirées familiales, décrite dans notre littérature ou nos œuvres picturales, l’histoire de nos ancêtres colonisateurs est imprimée dans notre ADN. C’est entre autres pourquoi toute destination de nature tend à revêtir un caractère identitaire ou emblématique particulier. À travers une pratique bien à elle, Elsie Reford est entrée en résonance avec la nature sauvage. Sa détermination à apprivoiser une nature primitive, isolée, parfois hostile, se sera matérialisée à la faveur d’une communion exceptionnelle avec son environnement, une communion libre, solitaire, authentique et vraie, des qualités qui, dans un paysage de Wilderness, selon les mots de Peter Jacobs, « [s’acquièrent] par l’Expérience, soit l’épreuve directe de l’apprivoisement ou de l’adversité9 ». Nous avons eu le privilège de visiter les Jardins en compagnie d’Alexander Reford, arrière-petit-fils d’Elsie Reford. Ce dernier a eu l’art de nous faire découvrir l’héritage exceptionnel légué par son ancêtre. Historien de formation, il a choisi de quitter son poste de doyen du Collège St. Michael de l’Université de Toronto en 1995 pour assumer la direction des Jardins de Métis et de l’organisme de bienfaisance qui en a la propriété. Alexander est aussi l’un des cofondateurs du Festival international de jardins. Depuis l’inauguration de son tout premier événement en 2000, ce Festival est mondialement reconnu comme l’un des plus importants dans le domaine du design paysager contemporain10. Architectes paysagistes et concepteurs y viennent de partout afin d’élargir le sens traditionnellement dévolu au jardin. Audacieux, innovant, expérimental, leur travail confère au fragment de nature qui leur est confié des formes inédites, de nouvelles sensations même, reflets de leur vision de créateurs. Leurs propositions interrogent les liens qui unissent l’homme à la nature, le bâti à l’imaginaire, la culture au paysage. Enfanté dans l’historicité du site, chaque jardin-paysage devient un prolongement du travail d’Elsie où la naturalité, bien qu’évoquée, demeure souvent illusoire. Plus qu’une aventure horticole, le site de Métis constitue un vaste héritage qu’Alexander Reford porte en lui-même. Son travail rétrospectif sur les Jardins a mis au jour une histoire remarquable dont on peut apprécier toute la portée et l’importance aujourd’hui. À travers ces joyaux, c’est un peu le paysage québécois tout entier qui s’insinue dans l’esprit de celui qui regarde, à la fois mythique et changeant, sans cesse réinventé. Depuis qu’il dirige les Jardins de Métis, Alexander revisite jour après jour le parcours de ses ancêtres. Inspiré par la sensibilité artistique et les valeurs de son arrière-grand-mère, il a su conserver et transmettre son précieux héritage, tout en réinventant la tradition. Ici l’innovation et la créativité, l’interdisciplinarité et le décloisonnement des frontières ajoutent à la portée du geste, tout en étant le reflet d’une identité collective en mutation. 39 L’ÎLE AUX POMMES UN MICROCOSME TOURNÉ VERS LE MONDE Marie Dallaire Pierre Lahoud Sur cette toute petite île du très grand fleuve, blottie entre l’immensité du ciel et de la mer, entre tempêtes et marées, le propriétaire et le Gardien de pierre partagent une grande responsabilité : tous deux veillent à ce que l’esprit des lieux, enraciné dans un paysage original fait de mémoire et d’exemplarité, ne s’étiole pas et perpétue son éloquent témoignage. Henri Dorion formes - v10 n4 - 2014 Linda Croteau 40 Nichée dans le Saint-Laurent, au carrefour des rivières Trois-Pistoles, Verte et Saguenay, l’île aux Pommes est mentionnée dans les récits de voyages de nos premiers découvreurs. Sans couvert forestier, impropre à l’agriculture, elle fut essentiellement un lieu de halte et de ravitaillement de fortune pour les voyageurs. Les Amérindiens, dans leurs grands canots chargés de marchandises ou de fourrures, et les chasseurs de baleines y ont accosté pour cueillir ses petits fruits. Plus tard, les « pilotes du fleuve », responsables de conduire à bon port les grands voiliers océaniques, ainsi que les capitaines de goélettes chargées de bois de chantier ont profité de ses criques tranquilles pour s’échouer et refaire provision auprès de l’ermite de l’île2. Au tournant du XXe siècle, abandonné à son sort, ce refuge de la faune ailée a été la proie des braconniers et des pilleurs de nids. Pire encore, l’explosion démographique des populations de goélands et de cormorans eut certainement achevé d’en décimer les couvaisons et d’en dégrader la flore en la couvrant de fientes. Heureusement, la chance tourne lorsque l’île passe aux mains de la famille Gaudreau-Déry en 1927. Attiré par l’île aux Pommes, le docteur David-Alexis Déry convainc son beau-frère Stanislas Gaudreau d’acheter l’archipel. « Écologiste avant l’heure, féru de biologie, de science et d’histoire, défenseur d’une conservation pérenne de la faune et de la flore3 », « il veut lui-même concrétiser les premiers gestes de protection et de conservation de la faune ailée qu’il prône. Dans l’immensément grand l’infiniment petit comme modèle de pratique Septembre 2014. L’Ordre des urbanistes du Québec (OUQ) tient son congrès annuel. Experts d’ici et de l’étranger, gens d’affaires reconnus, gestionnaires émérites, praticiens sont réunis pour échanger sur des pratiques de gestion efficaces et durables du bassin hydrographique du Saint-Laurent. L’exposition Symphonie Grands Lacs – Saint-Laurent. Des solitudes au ralliement est inaugurée8. À travers une trentaine de clichés, les présentoirs font découvrir l’étendue du bassin et surtout l’interdépendance entre son territoire d’environ 3,5 millions de kilomètres carrés, ses 55 millions d’habitants et les 15 000 organismes qui en assurent le développement et l’aménagement. Dans cette immensité, le fleuve n’est présenté par le congrès ni comme « une frontière, ni une coupure, mais plutôt comme une épine dorsale, une ligne de vie qui a, de ce fait, une vocation identitaire, urbaine et internationale9 ». En toile de fond : le pessimisme environnemental actuel qui inquiète, le commerce mondial, le développement des rives, qui ajoutent à la menace de voir disparaître les derniers espaces de nature. Ces enjeux renforcent l’importance et l’urgence de protéger le Saint-Laurent selon une vision réfléchie et concertée embrassant l’entièreté de son bassin versant. Dans le déroulement des activités d’ouverture du congrès, on nous invite à refaire le périple de nos découvreurs à travers la projection d’un corpus d’images révélant l’immensité de la voie maritime et la beauté de ses pay- v10 n4 - 2014 De la rive, l’île aux Pommes forme à peine une ligne sur l’horizon, léger affleurement qui se perd dans les vagues lors des grandes marées1. Savamment documenté et magnifiquement illustré L’île aux pommes en héritage est un ouvrage aux mille facettes. Tous les profits tirés de la vente de ce livre sont versés à la Société de protection et d’aménagement de l’île aux Pommes, une fondation privée détenant le statut d’organisme de bienfaisance dont le mandat consiste à planifier, coordonner et gérer l’ensemble des activités de protection et d’aménagement de l’île et de ses infrastructures tout en développant des activités de mise en valeur du milieu naturel, dans le respect des divers écosystèmes et de la faune ailée. Pour en savoir plus : www.ile-auxpommes.org. - Une histoire fascinante Devenir propriétaire d’un refuge de la sauvagine signifie pour lui un accomplissement personnel et un exemple à donner aux gestionnaires publics4 ». David-Alexis Déry est un visionnaire. Son discours environnementaliste avant-gardiste axé sur la « protection de la nature » et la « sauvegarde des espaces naturels » est peu commun à l’époque5. Aujourd’hui, en fidèle descendant de son grand-père David-Alexis, Gaston Déry, entouré de ses proches, assure la sauvegarde et la mise en valeur de son héritage. Grâce à une planification rigoureuse et des mesures entérinées par la garde scientifique, l’île accueille désormais une faune ailée des plus diversifiée. Le refuge appartient surtout à une colonie d’eiders à duvet, la deuxième en importance de l’estuaire du Saint-Laurent. En 2004, Gaston Déry pose un geste qui aurait fait la fierté de son aïeul : il sollicite et obtient pour l’île aux Pommes le statut de « Réserve naturelle en milieu privé pour une durée perpétuelle » auprès du ministre de l’Environnement, en vertu de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel6. « L’homme, écrit-il, a la fâcheuse habitude de s’approprier tous les beaux espaces sur cette terre pour ses propres fins. Mais certains sites doivent demeurer à la nature et aux éléments pour que tous aient un endroit où vivre et se reproduire. L’île aux Pommes possédait cette destinée et ne demandait qu’à être développée. De voir une si belle nature accueillir une faune ailée heureuse et en harmonie avec son habitat est source de bonheur et de valorisation pour nous7. » formes C’ est la fête à l’Association de la Maison de Loire en Anjou. Pour la quatrième fois en six ans, la vallée tient sa Biennale des Grands Fleuves du Monde. À l’honneur cette année notre fleuve Saint-Laurent. Du pique-nique au totem, du marché du terroir à la randonnée de chiens de traîneaux, les communautés locales se mobilisent durant tout le mois de mai autour d’activités pédagogiques ou festives qui visent à célébrer leur fleuve et à découvrir aussi comment les liens qui unissent un axe fluvial à ses riverains se tissent ailleurs dans le monde. Le colloque, point culminant de la programmation, offre l’occasion aux représentants de la région angevine et du Québec d’échanger leurs vues sur l’histoire, la gestion du territoire et le patrimoine fluvial. C’est à Gaston Déry, président des Amis de la vallée du Saint-Laurent, qu’est confié l’honneur de débuter les conférences. Ce dernier sait invariablement émouvoir lorsqu’il présente le travail accompli par sa famille depuis près d’une décennie pour sauvegarder et mettre en valeur une toute petite île qui a bien failli être oubliée. 41 sages, « mille tableaux où on sent le rythme de l’espace, avec l’étagement de ses zones géographiques et sa mosaïque de formes et de couleurs agencées par la nature ou inventées par l’homme10 ». La conférence sur l’île aux Pommes vient juste après. Étonnante variation d’échelle que ce récit de la revitalisation d’un territoire d’au plus 25 hectares, qui devient une sorte de laboratoire d’observation pour les congressistes. Dans la magie du moment, on croirait presque voir se dérouler sous nos yeux la formidable évolution de cet écosystème. Elle s’explique par l’attention dont l’archipel a fait l’objet depuis quatre générations, et qui a mené à une série d’actions ciblées et concertées – historique, écologique, culturelle, réglementaire… Le récit de l’île inspire respect et admiration. Microcosme préservé, développé puis partagé, porteur d’histoire et d’identité, l’île permet de réfléchir au rôle de chacun dans l’aménagement et le développement durable d’un territoire, ainsi que sur l’impact d’une action holistique. À terme, le décodage de ce récit familial incitera à la comparaison ou à la généralisation sur des territoires voisins, qu’ils appartiennent au fleuve ou au continent... Une île qui nous ressemble Pour accéder à la nature sauvage, cette valeur suprême du monde contemporain, il ne suffit pas d’un 4x4; au contraire, même : il faut d’abord travailler sur soi-même… et sur l’histoire des représentations qui nous motivent. intemporelle originale flexible Berque, 200911 Pour Linda Croteau, l’île est le témoin tranquille de « la force, de la grandeur et de la puissante résilience de la nature. En mai, 5 000 eiders et des milliers de migrateurs s’y donnent rendez-vous. Le chant des mâles eiders ressemble à une longue romance qui s’élève et nous atteint en plein cœur. […] il exprime la beauté de la vie et sa renaissance annuelle et il donne le désir de participer, à notre façon, à cette nature. Côtoyer une espèce d’oiseaux sauvage pendant un mois est une indicible joie qui permet de réaliser combien la vie est un mystère12 ». L’île aux Pommes est une nature québécoise aux affleurements rocheux emblématiques, en même temps qu’une expérience familiale émouvante. Dans sa dérive solitaire, elle évoque un lieu du recueillement. C’est la singularité de cet archipel – sa faune, sa flore, ses marées… – qui a motivé les premiers gestes historiques de protection à son endroit. Puis est venue la conscience du lien aussi vital que fragile qui unit l’homme à la nature. En marge de la côte, l’île, c’est bien sûr « ses horizons […] à perte de vue, perdus dans la mer, dans les reliefs contrastants des Appalaches13 »… Mais, dans l’infiniment petit de son étendue, elle abrite, comme son propre trésor, une beauté immaculée. Protection, détermination, patience, abnégation, dépouillement, appartenance au territoire, renaissance en sont les pierres précieuses. On peut les trouver, enfouies sous les grappes d’églantiers ou de framboisiers. Au soleil de midi, leurs reflets s’accrochent aux aigrettes plumeuses des épilobes pour peu que le vent se lève un peu. Comme se plaisent à le dire ses gardiens, la petite île a une âme, ce qui fait sa grandeur à leurs yeux. Terre d’appartenances, d’appropriations, d’intentions, elle fait miroiter cette singulière relation que l’homme entretient face à l’immensité. Berceau de valeurs et de sens, c’est à cette île que nous voulons ressembler. CROTEAU, Linda et Gaston DÉRY. L’île aux Pommes en héritage, Les éditions GID, Québec, 2014, p. 66. 2 En 1855, Anselme Bélisle père achète l’île aux Pommes. Cultivateur, il écoulera les produits de sa ferme sur l’île, où il a construit une maisonnette, ravitaillant pilotes et capitaines de goélettes. Par la suite, son fils Anselme, veuf surnommé le « père Coucou » s’y installera près de huit mois par année pour poursuivre les activités de son père. Il demeurera propriétaire de l’île pendant quarante-cinq ans. Ibid., p. 80. 3 CROTEAU, Linda et Gaston DÉRY, op. cit., p. 92. 4 Ibid., p. 97. 5 Ibid., p. 99. 6 Ibid., p. 181. 7 Gaston DÉRY, Correspondance privée, 9 octobre 2014. formes - v10 n4 - 2014 1 42 L’île aux Pommes est un important site de nidification. En mai, 5 000 eiders et des milliers de migrateurs s’y donnent rendezvous. Photos: Pierre Lahoud http://www.sie-isw.org/fr/la-symphonie-grandslacs-a-saint-laurent Programme du Congrès de l’Ordre des urbanistes du Québec 2014. Aménager le Québec des régions, au-delà des frontières, « Le Saint-Laurent, un fleuve pluriel », p. 5. 10 LAHOUD, Pierre. « Le Saint-Laurent, un fleuve pluriel », Conférence, Congrès de l’Ordre des urbanistes du Québec 2014. 11 Joliet, Fabienne et Peter Jacobs. « Le Wilderness, une manière de voir et d’être à la nature sauvage : le prisme paysager de Tremblant, Québec », Cahiers de géographie du Québec, vol. 53, n° 148, 2009, (p. 2746), p. 42, <http://id.erudit.org/iderudit/038140ar>. 12 Linda CROTEAU, Correspondance privée, 9 octobre 2014. 13 CROTEAU, Linda et Gaston DÉRY, op. cit., p. 20. POUR UNE IMAGE D’ENTREPRISE CONÇUE AVEC UN TRAIT DE GÉNIE ! 8 9 CHIRURGIEN DE L’IMAGE D’ENTREPRISE CONCEPT • LOGO • SITE WEB • EMBALLAGE CAMPAGNE • PUBLICITÉ • RAPPORT ANNUEL MAGAZINE • KIOSQUE ADICC.COM 1 877 272-3422 MAISONS EFFICACES matériaux UN NOUVEAU PROGRAMME D’HYDRO-QUÉBEC Pierre Turbis formes - v10 n4 - 2014 ydro-Québec invite les entrepreneurs à s’inscrire à son nouveau programme visant la promotion de maisons efficaces et d’habitations écoénergétiques neuves. « Nous voulons ainsi encourager les acheteurs de maisons neuves à se tourner vers des habitations s’inscrivant dans un objectif de développement durable », explique Louis-Olivier Batty, conseiller stratégique, Affaires publiques et médias, chez Hydro-Québec. M. Batty ajoute que par ce programme, le choix de construire une maison efficace représente de nombreux avantages, tant pour l’entrepreneur que pour le client. « Alors que la dimension énergétique et le respect de l’environnement revêtent une importance grandissante dans notre société, le constructeur se positionne comme un chef de file en matière d’habitations écoénergétiques. Ce positionnement devrait notamment se traduire par une augmentation du nombre de visiteurs dans les maisons modèles des participants à ce programme. » 44 Une adhésion gratuite M. Batty ajoute qu’en affichant son inscription au programme Maisons efficaces, un entrepreneur indique son appartenance à un groupe sélect de constructeurs pour qui le développement durable constitue une priorité. Concrètement, en s’inscrivant au programme, un constructeur s’engage à appliquer des mesures réparties en deux catégories : – Les mesures de base comprennent l’installation d’un fenestrage homologué ENERGY STAR et l’utilisation d’ampoules DEL homologuées ENERGY STAR. On installera également des thermostats électroniques, une prise pour borne de recharge de véhicule électrique ainsi qu’un chauffe-eau à trois éléments. – Les mesures facultatives comprennent l’installation d’un récupérateur de la chaleur des eaux grises (RCEG) ainsi qu’un système géothermique. Selon les estimations d’Hydro-Québec, les maisons construites selon les spécifications du programme devraient permettre des économies d’environ 2 200 kWh par année. Une visibilité accrue La vente d’une maison efficace (dans laquelle on a mis en application les mesures de base ou facultatives) vaut à l’entrepreneur des points correspondant à de la visibilité sur les outils promotionnels d’Hydro-Québec, depuis les oriflammes sur pied jusqu’à une parution imprimée personnalisée dans un hebdo régional. De plus, la mise en œuvre de mesures écoénergétiques sur une maison modèle vaut une aide financière à la promotion de cette unité pouvant aller jusqu’à 5 000 $. Le montant dépend des mesures mises en application. Le programme Maisons efficaces, qui a été développé en partenariat avec l’APCHQ et l’ACQ, devrait se poursuivre jusqu’en 2017. Mentionnons enfin que les entrepreneurs inscrits avant le 1er décembre 2014 au programme Maisons efficaces sont éligibles pour le tirage d’un voyage pour deux personnes à la BaieJames. Information : www.hydroquebec.com/maisons-efficaces MESURES DE BASE Fenêtrage homologué ENERGY STAR® Ampoules à DEL homologuées ENERGY STAR® Thermostats électroniques Chauffe-eau à trois éléments Prise pour borne de recharge de véhicule électrique MESURES FACULTATIVES Récupérateur de la chaleur des eaux grises (RCEG)* Système géothermique Source: Hydro-Québec CECI N’EST PAS UN SIMPLE PLANCHER RENDEZ-VOUS DE L’ACIER 2014 MAIS UN SYSTÈME ÉCONOMIQUE POUR TOUS PROJETS MULTIRÉSIDENTIELS Brewster Travel Canada matériaux UN APPEL À LA RÉCIPROCITÉ Pierre Turbis Le 30 octobre dernier, l’Institut canadien de la construction en acier (ICCA) tenait la 6e édition du Rendezvous de l’acier, placé sous le thème La contribution de l’industrie de l’acier au monde du transport et des infras- formes - v10 n4 - 2014 tructures. Même si l’industrie est en bonne santé, loin de se reposer sur leurs lauriers, les participants ont discuté de moyens concrets permettant d’assurer son développement et sa pérennité. Comme l’explique la directrice régionale Québec de l’ICCA, Hellen Christodoulou, il ne fait aucun doute que la quantité de projets majeurs en transport et en infrastructures présentement en marche laisse présager une belle période de croissance. « Même si le marché national est prometteur, c’est au niveau de l’international que nous devons regarder. L’industrie canadienne de l’acier a besoin d’une meilleure reconnaissance et d’un plus large appui de la part des élus. De plus, nous avons besoin d’une plus grande réciprocité avec les autres pays, dans l’optique d’un marché plus juste pour tout le monde. Nous souhaitons notamment que les ententes commerciales soient revues pour que nous puissions jouer à armes égales. Seules des ententes à long terme permettront d’assurer la pérennité et la stabilité de notre industrie », explique Mme Christodoulou. 46 Le Prix d’excellence Au terme du colloque, l’ICCA a tenu sa soirée annuelle de mise en valeur de la construction en acier au Québec. Ce gala de remise des Prix d’excellence a permis une fois de plus de célébrer les réussites de l’industrie. Encore cette année, de nombreux projets ont retenu l’attention d’un jury interdisciplinaire. Les dossiers de candidature se démarquaient par leur qualité ainsi que par l’ingéniosité et la créativité des professionnels qui les ont soumis. On notera spécialement un souci marqué pour le développement durable et la pérennité des ouvrages. Le jury était composé de Jocelyn Charron, ing., directeur général, Acier Charron; Rose Fierimonte, présidente de Dorbec Construction, présidente des Elles de la construction, vice-présidente de l’APECQ; Anik Girard, MBA, directrice générale et éditrice, Groupe Constructo, TC Média; Sébastien Lafontaine, vice-président Achats, American Iron & Metal; Marie-Claude Michaud, ing., M. Sc. A., associée, directrice principale Transport – Ponts, CIMA+ Partenaire de génie; Claude Paquin, éditeur, magazine FORMES; et Sylvie Perrault, architecte, PA LEED, Atelier Urban Face inc. Soulignons enfin qu’au cours du gala, nous avons eu droit à une allocution d’un invité d’honneur : Marc Perreault, ing., vice-président, Structures, ponts et ouvrages d’art, chez SMI. Survivant du séisme en Haïti, il nous a raconté son expérience et son cheminement personnel. Catégorie Projets hors Québec Catégorie Projets Escaliers/Passerelles architecturales Catégorie Projets commerciaux/ Projets institutionnels GLACIER SKYWALK Construction Beauce Atlas Brewster Travel Canada Sturgess Architecture Read Jones Christoffersen Ltd. PCL Construction Management inc. Installation facile et rapide Rigidité, solidité et durabilité du bâtiment grâce à une conception mixte acier-béton Longue portée sans étaiement pour un nombre réduit de murs porteurs Usage réduit de béton et d’armature par rapport aux dalles conventionnelles Catégorie Projets ponts STRANDHERD – ARMSTRONG BRIDGE Les dessins de structure Tenca Ville d’Ottawa Du Toit, Allsopp, Hillier Architects Parsons Horseshoe Hill Construction, Ltd. Harbourside Engineering Consultants (HEC) Montacier International Compatible avec tous les systèmes structuraux traditionnels hambro.canam-construction.com - 1 866 506-4000 Catégorie Projets commerciaux/ Projets institutionnels RÉAMÉNAGEMENT DU CASINO DE MONTRÉAL Pasquin St-Jean et associés Tecno-Métal inc. Casiloc inc. Menkès Shooner Dagenais LeTourneux, en consortium avec Provencher Roy + associés Architectes Pomerleau Catégorie Bâtiment verts Catégorie Projets industriels Catégorie Jeunes architectes/ ingénieurs CENTRE DE TRANSPORT STM RUE STINSON Pasquin St-Jean et associés Société de transport de Montréal Lemay Associés VET Dessin Pomerleau LA CALCULATRICE DE CONSTRUCTION 48 Catégorie Coup de cœur du jury La calculatrice Jobber 6... C’est l’outil idéal pour les personnes qui doivent mesurer des dimensions de toutes sortes : constructeurs, entrepreneurs, charpentiers, ingénieurs, architectes, etc. BIBLIOTHÈQUE MONIQUE-CORRIVEAU Dan Hanganu Architectes Les Aciers Fax inc. Ville de Québec Côté Leahy Cardas Architectes BPR Pomerleau Prix à partir de 100 $. Mention spéciale Taxes et frais de livraison non compris. - Une plaque commémorative a été remise à STRUCTAL PONT (Division de Canam) à titre de « Leader dans la fabrication de ponts d’acier au Québec ». Consultez n’importe lequel usager de la calculatrice de construction Jobber 6 : il vous dira qu’il n’existe aucun autre appareil qui peut effectuer des opérations aussi simplement et facilement. Une fois que vous aurez utilisé une calculatrice de construction Jobber 6, vous ne pourrez plus vous en passer! v10 n4 - 2014 La calculatrice Jobber 6 convient parfaitement à toute personne qui doit mesurer rapidement et précisément des dimensions, qu’il s’agisse de pieds, de pouces, de fractions, de mètres, etc. Pour toute demande de Prix, ComPosez Le 514.748.6161 formes formes - v10 n4 - 2014 Stéphane Groleau LA PLUS PERFECTIONNÉE JAMAIS CONÇUE! 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