Édition 2013-09-01 (PDF document)

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Édition 2013-09-01 (PDF document)
Numéro 79 - septembre - octobre 2013
Les
NOUVELLEs
ROUMANIE
de
SOMMAIRE
A la Une
Recensement
Impunité, Privatisations
Rumeur, Corruption
Roi des Tsiganes
Lettre d’information bimestrielle
2 et 3
4à7
8 et 9
10 et 11
Actualité
Vie internationale
Politique
Economie, Social
Moldavie
Actualité en images
12 et 13
14 et 15
16 et 17
18 à 20
21
Société
Evénements
Faits divers
Vie quotidienne
Environnement
Enseignement
Minorités, Emigration
Religion, Sports
Insolite, Page photos
22 à 26
27 à 29
30 et 31
32 et 33
34 à 39
40 et 41
Connaissance
et découverte
Cinéma
Patrimoine, Mémoire
Histoire, Sciences
Tourisme, Médias
Humour
Abonnement
Coup de coeur
42 et 43
44 à 47
48 à 53
54 à 57
58
59
60
Démocratie et besoin d’exigence
D
ans une Europe en crise, où la sinistrose s'est installée, les images accablantes pour les démocraties du continent ne viennent plus seulement de
la Roumanie et de la Bulgarie. Des dirigeants sont mis en cause pour corruption, manquement à l'éthique ou financement illégal de leur parti.
En Italie, Berlusconi a vu la Cour de cassation confirmer sa condamnation à une
peine de quatre ans de prison ferme pour fraude fiscale. Les faits qui lui sont reprochés soulignent combien le système politique italien est gangrené et à bout de souffle.
En Espagne, où la monarchie a été minée par des scandales, le chef du gouvernement a dû se livrer devant les députés, à une humiliante confession sur le financement
irrégulier de son parti et les avantages qu'il en avait tirés personnellement. La France
n'offre malheureusement pas une meilleure image avec son lot quotidien d'affaires,
touchant la galaxie Sarkozy ou des notables socialistes accusés de corruption.
Depuis le commencement des temps de la "démocratie", on entend toujours la
même rengaine: “tous ses scandales ne peuvent faire que le lit des extrémistes” ; les
politiciens suggéreraient-ils donc qu'il faut les taire ? Ne serait-il pas plus simple - et
plus sain - qu'ils fassent en sorte qu'ils ne se reproduisent pas ?
Au moment de l'affaire Cahuzac, et devant la volonté exprimée par François
Hollande d'apporter de la transparence dans la vie publique française, les Roumains,
non sans fierté, ont relevé la tête. Eux, toujours montrés du doigt... Cela faisait belle
lurette que leurs élus étaient tenus de déclarer leur patrimoine, pour qu'on puisse déceler les enrichissements illicites… ce qui ne les empêche pas bien sûr de tricher. Les
parlementaires français, eux, ont freiné des quatre fers, emmenés par un président de
l'Assemblée nationale au bord de l'apoplexie devant cette exigence “innommable”.
Ces reculades n’entraînent-elles pas les démocraties occidentales vers un scénario
à la roumaine ? Un récent sondage montrait qu’en Roumanie, toutes les institutions,
de l’armée à l’église, en passant par la justice, la police, l’école, l’administration - sans
parler bien sûr du parlement, des partis et syndicats - étaient en très net recul dans la
confiance que leur accordait la population.
Les Roumains s’en remettent désormais en priorité à ceux qui traquent les filous
et escrocs - Direction Nationale Anti-corruption, Agence Nationale d’Intégrité, etc. A
leur récent tableau de chasse: une directrice de lycée qui monnayait les succès de ses
élèves au bac, une juge qui encaissait des bakchichs d’un millon d’euros, un tortionnaire de l’époque communiste rattrapé par l’Histoire. Dommage que cela n’aboutisse
que grâce à des voies d’exception et à l’opiniatreté de quelques citoyens exigeants.
Henri Gillet
1
A la Une
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Recensement
l
SUCEAVA
l
ORADEA
CLUJ
l
IASI
TARGU
MURES
ARAD
CHISINAU
l
l
Ils sont vingt millions de Roumains…
l
l
BRASOV
GALATI
l
l
l
TIMISOARA
PITESTI
CRAIOVA
l
l
TULCEA
n
BUCAREST
l
La population
des 42 judets
22
2
Le pays a perdu 13 % de sa population
depuis la chute de Ceausescu
La population des 42 judets par ordre
alphabétique, telle qu’elle a été enregistrée lors du dernier recensement:
Alba (Alba Iulia) : 342 000 habitants
Arad : 431 000
Arges (Pitesti) : 614 000
Bacau : 616 000
Bihor (Oradea) : 575 000
Bistrita-Nasaud: 286 000
Botosani : 413 000
Brasov : 549 000
Braila : 321 000
Buzau : 461 000
Caras Severin (Resita) : 296 000
Calarasi : 307 000
Cluj : 691 000
Constantsa : 684 000
Covasna (Sfânt. Gheorghe): 210 000
Dâmbovita (Târgoviste) : 519 000
Dolj (Craiova) : 661 000
Galati : 536 000
Giurgiu : 281 000
Gorj (Târgu Jiu) : 342 000
Harghita (Miercurea Ciuc) : 311 000
Hunedoara (Deva) : 419 000
Ialomita (Slobozia) : 274 000
Iasi : 772 000
Ilfov: 389 000
Maramures (Baia Mare) : 479 000
Mehedinti (Turnu Severin) : 265 000
Mures (Târgu Mures) : 550 000
Neamt (Piatra Neamt) : 471 000
Olt (Slatina) : 436 000
Prahova (Ploiesti) : 763 000
Satu Mare : 344 000
Salaj (Zalau) : 224 000
Sibiu : 397 000
Suceava : 635 000
Teleorman (Alexandria) : 380 000
Timis (Timisoara) : 684 000
Tulcea : 213 000
Vaslui : 395 000
Vâlcea (Râmnicu Vâlcea) : 371 000
Vrancea (Focsani) : 340 000
Mun. Bucarest : 1 883 000
L'Institut national des statistiques (INS) a publié les résultats définitifs du
recensement de 2011, le premier depuis l'entrée de la Roumanie dans l'Union
Européenne, en 2007. Il en ressort que le nombre d'habitants a baissé fortement,
de plus de 13 % depuis la chute de la dictature communiste, à la fin de 1989, ou le
pays en comptait 23,21 millions, ceci en raison d'une forte émigration, alors que la
population roumaine vieillit de manière inquiétante.
L
a population de la Roumanie est passée sous la barre des 21 millions, les femmes en représentant 51,4 %. Elle atteint tout juste 20 millions avec ses 20
121 641 habitants, ce qui représente une perte de plus 1,5 million de personnes face au recensement de 2002 (-7,2 %). Selon l'INS, cette perte est due principalement aux "migrations externes", des estimations faisant état de deux à trois millions de
Roumains qui se sont établis
principalement en Espagne
et en Italie. Ce chiffre baisse
encore à 19 042 936 personnes si on ne prend en compte que la population stabilisée durablement dans le
pays, 910 640 Roumains
l'ayant quitté pour une
période indéterminée et 301 666 n'y étant présents que par intermittence. Bucarest reste
bien sûr la ville la plus peuplée de Roumanie, suivie de Cluj, Iasi ayant rétrogradé à la
3ème place. La minorité hongroise représente 6,5% de la population. 621 573 Roumains
se sont déclarés Roms, soit 3,3 % de la population totale, un indicateur en augmentation
face à celui d'il y a 10 ans, mais on estime en fait qu'ils seraient deux millions, nombre
d'entre eux hésitant à se déclarer ouvertement, par peur des discriminations.
Une moyenne d'âge de 40,6 ans
Par ailleurs, l'INS s'inquiète des signes alarmants du vieillissement de la population.
Outre l'émigration, la natalité a aussi diminué. En effet, des données collectées, il ressort que les enfants entre 0 et 14 ans représentent 15,9% des Roumains, les jeunes, 12%,
et les plus de 65 ans 16%. En 1992, le nombre de personnes âgées rapporté à 100 jeunes s'élevait à 48. En 2002, ce chiffre atteignait 80, et en 2011, 102. Si en 1992, la
moyenne d'âge était de 35,1 ans, elle est maintenant de 40,6 ans. Certains politiciens en
ont profité pour faire part de leur préoccupation quant aux perspectives économiques du
pays, et ont sollicité des mesures pour encourager la natalité. En revanche, côté positif,
il faut relever que depuis son retour à la démocratie, la Roumanie a vu le niveau d'instruction de sa population progresser de manière importante. Si en 1992, seulement 5,2
% de la population avait suivi un cursus universitaire, ce taux est monté à 14,4 % en
2011. Le nombre d'analphabètes y a diminué de 3,1% en 1992 à 1,4% en 2011.
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les recensements successifs effectués
ont donné les résultats suivants : 1948 :15 873 00, 1956 :17 489 00, 1966 : 19 103 000,
1977 : 21 560 000, 1992 : 22 800 000, 2002 : 21 681 000, 2011 : 20 121 640.
Le clasement des dix premières villes
1er Cluj (324 576, recensement de 2002: 318 027, 2ème), 2ème Timisoara (319
279, 317 651, 3ème), 3ème Iasi (290 422, 321 580, 1er), 4ème Constantsa (283 872, 310
526, 4ème), 5ème Craiova (269 506, 302 622, 5ème), 6ème Brasov (253 200, 283 901,
7ème), 7ème Galati (249 432, 298 584, 6ème), 8ème Ploiesti (209 945, 232 452, 8ème),
9ème Oradea (196 367, 206 527, 10ème), 10ème Braila (180 302, 216 929, 9ème).
A la Une
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Recensement
Les villes de plus en plus majoritaires
A
lors que la population urbaine continue sa progression (+ 1,3 % depuis 2002) et est maintenant
largement majoritaire (54 %), la hiérarchie des
villes les plus peuplées a été bousculée, hormis la capitale
(1 883 400 habitants), seules deux d'entre elles dépassant désormais le cap de 300 000 habitants (Cluj et Timisoara), Iasi
étant rétrogradée de la 1ère à la 3ème place. Certaines enregistrent même un recul important, Galati perdant 16,4 % de ses
citoyens et Focsani (Vrancea) chutant de 103 000 habitants à
79 000 (- 23,15 %).
Les six premiers judets sont, dans l'ordre : Iasi
(772 300 habitants), Prahova (Ploiesti, 762 900), Cluj
(691 100), Constansa (684 100), Timis (683 500), Dolj
(Craiova, 660 500). Les moins peuplés: Covasna (Sfântu
Gheorghe, 210 200), Tulcea (213 100), Salaj (Zalau, 224 400),
Mehedinti (Turnu-Severin, 265 400), Ialomita (Slobozia,
274 100), Giurgiu (281 400).
Les préfectures de judets avec plus de 300 000 habitants:
En 2002: 5 (Cluj-Napoca, Constanta, Craiova, Iasi, Timisoara)
En 2011: 2 (Cluj-Napoca et Timisoara)
Entre 200 000 et 300 000 habitants :
En 2002: 5 (Braila, Brasov, Galati, Oradea, Ploiesti)
En 2011: 6 (Brasov, Constanta, Craiova, Galati, Iasi, Ploiesti)
Entre 100 000 si 200 000 habitants:
En 2002: 14 (Arad, Bacau, Baia Mare, Botosani, Buzau,
Drobeta Turnu Severin, Focsani, Piatra Neamt, Pitesti,
Râmnicu Vâlcea, Satu Mare, Sibiu, Suceava, Târgu Mures)
En 2011: 11 (Arad, Bacau, Baia Mare, Botosani, Braila,
Buzau, Oradea, Pitesti, Sibiu, Târgu Mures)
Moins de 100 000 habitants :
En 2002: 16 (dont une avec moins de 50 000 habitants :
Mircurea Ciuc)
En 2011: 22 (dont trois avec moins de 50 000 habitants:
Alexandria, Miercurea Ciuc, Slobozia).
16,8 millions de “vrais” Roumains
Une vingtaine de minorités
Sur les 20 121 641 habitants recensés, 16,8 millions se sont déclarés entièrement roumains (88,9 %), les autres
appartenant à la vingtaine de minorités
composant la population du pays. Ce
chiffre est faussé dans la mesure où seulement 3,3 % des personnes recensées se
sont déclarées Roms, alors
qu'on estime leur pourcentage
à 10-11 % (environ 2 millions).
Suivent les Magyars (1 227
600, 6,5 %), les Ukrainiens (50
900), les Allemands (36 000),
les Turcs (27 700), les RussesLipovènes (23 500, photo), les
Tatars (20 300). 90,9 % des
personnes questionnées ont déclaré pratiquer le roumain en langue principale.
86,5% d'orthodoxes
18 861 900 recensés se sont déclarés
orthodoxes (86,5%), 4,6% romano-catholiques, 3,2% protestants réformés, 1,9%
penticostaux, 0,8% gréco-catholiques,
L'Italie, terre d'émigration privilégiée
P
lus de 727 000 Roumains sont partis à l'étranger pour
une période de plus d'un an, mais ce chiffre est largement sous-estimé car il ne prend pas en compte les
familles qui les ont rejoints. Ce sont les judets moldaves et de
Bucovine qui fournissent le plus gros contingent d'émigrés, Bacau
étant en tête (57 000), suivi du Neamt (53 000), Suceava (49 000),
Iasi (35 000), Galati (33 000), Brasov (26 000).
L'Italie est, de très loin la première destination choisie
(341 000, mais en fait plus d'un million), suivie de l'Espagne
(171 000), la Grande Bretagne (40 000), l'Allemagne (33 000),
France (23 000), Grèce (16 000), les USA (14 000), la Belgique
(12 000), Hongrie (10 000), l'Autriche (9000). Mais ces chiffres
sont largement en-dessous de la réalité. A noter qu'Israël a disparu
des destinations privilégiées. Il existe de petites communautés roumaines en Suisse, Tchéquie, Norvège, Suède, Irlande et Portugal.
0,6 % baptistes, 0,4 % adventistes du
7ème Jour, 1,8 % appartiennent à d'autres
rites… et seulement 0,2 % se déclarent
sans religion ou athée.
10 des veufs et 4,2 % de divorcés
Si on compte 16,3 millions d'adultes
de plus de 18 ans, les plus de 85 ans ne
représentent que 1,3 % de l'ensemble.
9,7 millions de Roumains sont actuellement mariés, 745 000 vivant maritalement, les veufs représentant 10 % de la
population et les divorcés 4,2 %. 44,2 %
de la population a un niveau d'éducation
faible (primaire, collège), 41,4 % moyen
(lycée) et 14,4 % supérieur. On compte
245 000 analphabètes.
Très peu d'étrangers en Roumanie
E
n 2012, seuls 36 500 étrangers habitaient en
Roumanie, soit 0,2% de la population, d'après
Eurostat. Il s'agit du plus petit pourcentage au
sein des pays de l'UE, après la Pologne où l'on ne compte
que 0,1% d'étrangers (57 500). La Roumanie fait donc partie du club restreint des pays européens dont la proportion
des étrangers dans la population autochtone est inférieure à
1%. Après la Pologne et la Roumanie, la Croatie (0,5%), la
Bulgarie (0,6%) et la Lituanie (0,7%) enregistrent elles
aussi un pourcentage commençant par zéro.
A l'opposé, le Luxembourg compte 44% d'étrangers,
Chypre 20%, la Lettonie et l'Estonie 16%. L'Allemagne
mène le classement des grands pays avec 7,4 millions, soit
9% de sa population; la France compte 3,9 millions d'étrangers, soit 6% de sa population.
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3
A la Une
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La justice roumaine
Impunité
SUCEAVA
ORADEA
CLUJ
IASI
l
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CHISINAU
l
TG. MURES
l
AIUD
BRASOV
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RM. SARAT
TIMISOARA
l
PITESTI
CRAIOVA
l
l
BUCAREST
GALATI
l
l
TULCEA
n
l
JILAVA
La prison d'Aiud
en tête du "hit parade"
de l'horreur
4
se penche sur les crimes du régime Ceausescu
n'auront pas une mort tranquille"
l
l
ARAD
"Ceux qui ont tué
l
SIGHET
l
l
A la Une
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Les anciens détenus, rescapés de
ces épreuves, ont établi un classement des dix prisons où ont été
employées les méthodes et les tortures les plus brutales. Un hit-parade
certes subjectif, mais révélateur, qui
fait froid dans le dos, d'autant plus
que les tortionnaires qui s'y sont illustrés coulent des jours paisibles, bénéficiant de retraite confortables.
1. Aiud : prison de grande capacité pour les détenus aux longues peines de tous milieux ; froid, faim, insalubrité, pas de soins médicaux, acharnement contre les détenus refusant
d'être rééduqués. Des caractéristiques que l'on retrouve plus ou moins
dans les autres centres pénitenciers.
Les ossements de nombreux prisonniers morts de mauvais traitements y
ont été découverts.
2. Sighet : centre d'extermination
de l'élite politique, intellectuelle, religieuse, économique et militaire.
3. Jilava : n'est pas considérée
comme un centre d'extermination
(sauf pour les peines capitales), mais
comme une des prisons les plus
dures, de par son humidité permanente, le froid intense ou la chaleur
insupportable qui y régnait.
Surpeuplée. Les détenus étaient
accueillis par un cordon de gardiens
qui les rouait de coups.
4. Râmnicu Sarat : de dimension
modeste, fonctionnait sur le régime
de l'isolement des détenus, sans
aucun contact avec l'extérieur.
Considérée comme un centre d'extermination, elle a enregistré le plus
grand nombre de décès rapporté à sa
capacité.
(suite page 6)
La porte se ferme. Les charnières grincent, c'est comme le cri d'un homme
désespéré. Dans la cellule, seul un rayon de lumière traverse les barreaux. Il suffit de rester quelques minutes dans ce silence de plomb pour ressentir le quotidien
des prisonniers enfermés dans ces cellules de deux mètres carrés. La prison de
Râmnicu Sarat, petite ville située dans l'est de la Roumanie, était réservée aux
opposants au régime communiste. On l'appelle aussi l'"enfer du silence" en raison de sa méthode de torture, imaginée par la Securitate, la police politique.
L
a torture brevetée dans cette prison était le silence", affirme Marius Oprea,
fondateur de l'Institut d'investigation des crimes du communisme (IICCR)
et surnommé le "chasseur de la Securitate". Les prisonniers étaient obligés
de garder le silence pendant des années. Un simple chuchotement était sévèrement
puni. Je me suis enfermé quelques minutes dans une cellule. Ici, je suis toujours terrorisé. C'est une peur difficile à expliquer parce qu'elle vient des murs, des portes des cellules, des barreaux. J'ai surtout peur parce qu'ici la parole était interdite".
La prison de Ramnicu Sarat est devenue depuis quelques années un lieu de
mémoire pour les jeunes qui essaient de comprendre ce qu'a vécu la génération de leurs
parents. Tous les ans, Marius Oprea les invite à ce voyage à travers l'histoire récente
de leur pays et leur fait rencontrer d'anciens détenus politiques. "On ne peut pas imaginer ce que l'absence de mots peut faire de la vie d'un homme, leur explique-t-il. Un
ancien détenu m'a dit qu'il lui a fallu deux ans pour réapprendre les mots les plus simples. Par exemple, comment demander à manger, comment se souvenir du nom de sa
fille qui venait de naître au moment de son arrestation. Ou encore se souvenir du nom
de sa femme, et même de ce qu'est une femme".
Silence total, torture systématique, violences
Les années de terreur de cet "enfer du silence" portent un nom: Alexandru
Visinescu. Nommé à la tête de la prison en 1956, à l'âge de 31 ans, il y a institué l'un
des pires régimes de détention du bloc communiste : silence total, torture systématique,
violences physiques et psychiques. A l'instar d'autres tortionnaires, il vit tranquillement
depuis la chute de la dictature communiste, en
décembre 1989, dans son appartement situé en
plein centre de Bucarest. Sa retraite de 1500
euros est ressentie comme une insulte par les
anciens détenus politiques qui doivent se contenter d'une pension de 200 euros.
Mais le 30 juillet, à l'âge de 88 ans, l'Histoire
le rattrape en pleine rue, à Bucarest. Il descend
faire une course quand soudain, sortis de nulle
part, des journalistes équipés de caméras le pressent de questions : "Savez-vous que vous allez
faire l'objet d'une enquête?", "Qu'allez-vous faire?", "Comment répondez-vous aux
accusations ?" Le vieux tortionnaire n'a aucune envie de répondre. Son visage trahit la
colère. Il envoie quelques coups de poing pour punir ces jeunes venus le harceler. Un
geste par lequel il voudrait aussi chasser un passé qui ne le lâche plus (photos ci-dessus et page 5).
Inspiré de la stratégie du Centre Simon-Wiesenthal
En avril, l'IICCR a déposé une plainte pénale contre 35 tortionnaires. Cette institution publique créée en 2005 par Marius Oprea, l'un des rares opposants au régime
communiste, a essayé à plusieurs reprises de rendre justice aux victimes de la dictature, mais la volonté politique n'était pas au rendez-vous.
Le "chasseur de la Securitate" sillonne la Roumanie
depuis des années, exhume les dépouilles des résistants anticommunistes exécutés sommairement et s'acharne à trouver
leurs bourreaux.
"Rétablir la vérité sur ces assassinats est un procès semblable à celui de la Shoah, affirme-t-il avec détermination.
L'ampleur des crimes du nazisme n'a été reconnue qu'à la fin
des années 1960, une génération après la seconde guerre mondiale. Nous sommes en train de faire la même chose et j'avoue
que je me suis inspiré de la stratégie du Centre SimonWiesenthal, qui chasse encore les anciens bourreaux nazis. On
découvre la vérité, on identifie les tortionnaires et on rend
leurs noms publics. Les hommes qui ont tué et torturé n'auront
pas une mort tranquille". Presque un quart de siècle après la
chute du régime communiste, la Roumanie fait une première
tentative judiciaire pour faire la lumière sur les années noires
de la dictature. La jeune
génération
ne paraît pas
prête à passer l'éponge
sur un demi-siècle de tortures et de violation systématique des
droits de l'homme les plus élémentaires.
Et, pour la première fois, les instances judiciaires semblent
concernées par cette démarche. Le 8 août, le parquet de la
Haute Cour de cassation et de justice de Bucarest s'est déclaré
prêt à démarrer une enquête à l'encontre d'Alexandru
Visinescu. "Des gens meurent partout, dans la prison ou à l'extérieur", a déclaré ce dernier en guise de défense. Reste à
savoir où la justice roumaine lui réservera une place.
Mirel Bran (Le Monde)
Les prisons communistes ont enfermé
540 000 détenus politiques, 100 000 en sont morts
On estime à 540 000 le nombre de détenus politiques sous le communisme, 100 000 sont morts à cause des conditions
de leur détention. La durée moyenne des peines était de cinq ans et demi. Jusqu'ici, aucun tortionnaire n'a été poursuivi.
L
e régime communiste est entré
dans son ère d'épuration violente des élites politiques de
l'Entre Deux Guerres, dès 1946, s'acharnant notamment sur le Parti National
Libéral et le Parti National Paysan. Créée
en 1948, la Securitate avait pour mission
de débusquer et de mettre hors d'état de
nuire les éléments hostiles au pouvoir et
a été conçue sur le modèle soviétique, Le
code pénal a été alors modifié pour y
introduire des infractions nouvelles:
conspiration contre l'ordre social, menées
visant à saper l'économie nationale, sabotage contre-révolutionnaire. Tout opposant était immédiatement catalogué
comme ennemi de classe et du communisme. Enfermés dans des prisons fonctionnant sur le modèle soviétique: isolement, travaux forcés, tortures et violences, terreur, privation de sommeil, les
détenus s'efforçaient de survivre dans la
faim, le froid ou des chaleurs épouvantables, sans hygiène. Les condamnés à de
longues peines seront libérés dans les
années 63-64 quand on jugera qu'ils sont
suffisamment "rééduqués".
Les établissements pénitentiaires ont
connu plusieurs classifications, entre
1945 et 1948, pour prendre une forme
définitive en 1949, suivant la catégorie
socio-professionnelle, l'âge et l'orientation politique de leurs pensionnaires. A
Pitesti, on enfermait les étudiants, à Aiud,
Suceava, Râmnicu Sarat les légionnaires
(extrême droite nationaliste), à Sighet,
l'élite dirigeante d'avant guerre, à Gherla,
les paysans et travailleurs, à Craiova et
Galati, les libéraux et nationaux paysans.
Aiud recevait aussi les criminels de guerre, les intellectuels et les anciens membres du gouvernement Antonescu. Pitesti
et Gherla ont été le centre d'expérimentations de rééducation atroces. Deux hôpitaux-prisons existaient, Vacaresti et
Târgu Ocna, ainsi que deux prisons pour
femmes, Mislea et Miercurea Ciuc.
Le canal Danube-Mer Noire renfermait indistinctement les prisonniers de
toutes catégories, aussi bien politiques
que de droit commun.
Des tortionnaires au profil-type
Les gardiens-tortionnaires avaient le
plus souvent un profil-type: sans éducation, issus du milieu rural, membres du
parti communiste ou de son syndicat,
l'UTC, appréciés pour leur excès de zèle.
Comme il n'existait pas de bases claires
du régime de détention, ils pouvaient se
permettre tous les débordements, appliquant avec sadisme une atmosphère de
terreur. Le calvaire des détenus commençait dès leur arrestation, de nuit ou de
jour, à la maison ou en pleine rue. Ils
étaient transportés dans les sinistres et
redoutées voiture noires de la Securitate,
affublés de lunettes opaques, la tête
enfouie entre les jambes.
L'enquête commençait immédiatement, où on les laissait moisir à l'isolement afin de leur mettre la pression. Ne
connaissant pas les motifs de son arrestation, le suspect se perdait en conjectures,
culpabilisant, devenant plus malléable.
Il découvrait l'enfer carcéral, les
conditions épouvantables de détention,
les journées et les nuits étant ponctuées
des cris des autres détenus soumis à la
torture. L'enquête commençait immuablement par une autobiographie, confrontée aux éléments réunis sur lui, avant de
se poursuivre par l'interrogatoire sur les
actes hostiles au régime qu'il devait
avouer. Coups, tortures et hurlements s'abattaient sur lui s'il ne se montrait pas
coopératif, avant d'être ramené dans sa
cellule où on le laissait mijoter quelques
heures et reprendre le fil de l'enquête.
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
Privatisations
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CONSTANTA
BUCAREST
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(suite de la page 4)
6
grand chose de roumain en Roumanie"
sur injonction du FMI
IASI
GHERLA
FAGARAS
Un pays en soldes
BOTOSANI
l
BAIA SPRIE
"Il n'y aura bientôt plus
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
5. Pitesti : centre de rééducation
basé sur les mutilations physiques et
spirituelles irréversibles. Base d'une
expérimentation tristement célèbre où
les détenus étaient amenés à se torturer les uns les autres.
6. Baia Sprie : les détenus étaient
transformés en travailleurs de force
dans les mines de plomb, bénéficiant
de repas plus copieux, mais exposés à
la chaleur des galeries, aux accidents
et à l'inhalation des minerais détruisant
leur santé.
7. Peninsula : appelée aussi la
Vallée noire ou la vallée des pleurs.
S'y entassaient les détenus destinés à
creuser le canal Danube-Mer Noire.
Climat insupportable, normes de travail
aberrantes, sans matériel adéquat
(creuser avec de l'eau jusqu'à la poitrine), hygiène précaire, alimentation
insuffisante, pas d'assistance médicale. Accidents mortels nombreux, rééducation du type de Pitesti. Peut être
considéré comme un centre d'extermination par le nombre de ses victimes.
8. Gherla : surpeuplée malgré ses
grandes dimensions, avec 8 à 12 détenus entassés dans une cellule prévue
pour deux. Centre de rééducation où
des méthodes aussi atroces qu'à
Pitesti ont été utilisées. Tortures systématiques. En 1958, une révolte a
encore accentué son régime inhumain.
9. Miercurea Ciuc : prison pour
femmes détenues politiques ; gel, faim,
violences. Le nombre de décès enregistré y est important.
10. Fagaras : appelée "la prison
des policiers", elle enfermait les policiers de l'ancien régime et les agents
de la Siguranta (Securitate royale). Les
gardiens et l'administration faisaient
payer de manière brutale ceux qu'ils
considéraient comme l'instrument
répressif du régime bourgeois.
Poste, fret, aéronautique, énergie, santé : dans tous les secteurs, la Roumanie
brade. Des soldes pour rationnaliser l'économie du pays, imposées par le Fonds
monétaire international dont la directrice Christine Lagarde était en visite le 15
et 16 juillet dernier. "Il n'y aura bientôt plus grand chose de roumain en
Roumanie", plaisante-t-on amèrement à Bucarest.
L
e pays est à vendre, ou du moins une dizaine de sociétés publiques, afin d'éponger les dettes. En 2009, frappée par la crise, la Roumanie emprunte 20
milliards d'euros au FMI, à Bruxelles et à la Banque mondiale pour ne pas
couler. Sa croissance vient de chuter de 8,5 points et son déficit public culmine à 7,2%
du PIB.
Pourtant, l'économie roumaine se portait plutôt bien quelques années auparavant,
avec une croissance annuelle moyenne de 6,3% entre 2002 et 2008. La Roumanie préparait son entrée dans l'UE (devenue effective en 2007), tous les indicateurs étaient au
vert. Le 1er juillet 2010, le président de centre-droit Traian Basescu est obligé de baisser les salaires des fonctionnaires de 25% et les retraites de 15%. La TVA passe de 19
à 24%. Environ 200 000 fonctionnaires sont remerciés les deux années qui suivent. Un
véritable traitement de choc requis en contrepartie des 20 milliards d'euros d'aide.
Outre cette politique d'austérité qui dure depuis trois ans, la troïka a imposé au
pays de privatiser ses entreprises d'Etat pour attirer des capitaux et rendre ces sociétés
profitables. "Inefficace", juge l'économiste roumain Ilie Serbanescu. "Ce sont des
liquidations masquées. On brade des entreprises déficitaires sous la pression du
FMI".
Ainsi, la compagnie publique de fret ferroviaire CFR Marfa vient d'être rachetée
par le Groupe Ferroviaire Roumain (GFR) pour 202 millions d'euros. Cependant, la
valeur de CFR Marfa était estimée à 2 milliards d'euros il y a encore six ans. Dans le
secteur du transport aérien, trois entreprises publiques endettées ou sur le déclin (IAR
Ghimbav, Avioane Craiova et Romaero Baneasa) figurent aussi sur la liste des transactions. Le gouvernement roumain vendra aussi un quart de ses 96% de parts dans la
compagnie nationale Tarom, membre de l'alliance SkyTeam.
Gaz, avions et nucléaire à vendre
Côté énergies, le gouvernement a proposé à la Bourse des paquets de 10 à 15 %
de ses actions dans les sociétés d'État. Ces privatisations partielles concernent
Transgaz (un transporteur de gaz), Romgaz (un producteur de gaz) et Hidroelectrica
(un producteur d'hydroélectricité). Le gouvernement a aussi ouvert aussi 10% du capital-actions de Nuclearelectrica, la compagnie qui gère l'unique centrale nucléaire du
pays. Une compagnie chinoise est intéressée. Détenue à 75% par le gouvernement roumain, la Poste n'a pour l'instant pas trouvé d'acquéreur. Et pour cause, l'entreprise a
accumulé plus de 120 millions d'euros de pertes ces quatre dernières années. Pour la
rendre plus attractive, 3650 salariés, soit 11% des effectifs, viennent d'être licenciés.
Toutes privatisations confondues, les syndicats estiment que 17 000 emplois sont
menacés à court terme. Déjà essorée par les mesures sur les salaires, la population
encaisse aussi la hausse des prix du gaz et de l'électricité. La Roumanie s'est en effet
engagée à libéraliser graduellement ces deux marchés, toujours pour se conformer aux
attentes des institutions financières internationales.
Un rattrapage des prix inévitable depuis l'entrée dans l'UE. "Vieil héritage du communisme, le gaz et l'électricité étaient encore vendus en dessous du prix de production", note Sandrine Levasseur, qui observe à l'OFCE la transition économique des
pays d'Europe de l'Est. Tous ces changements ont fini par faire descendre les
Roumains dans la rue en janvier 2012. Elément déclencheur, le projet du gouvernement de privatiser une partie du système de santé en faisant entrer quatre assureurs
complémentaires privés sur le marché.
Ce qui reviendrait donc à réduire le champ de la couverture médicale publique.
Des privatisations qui ont mauvaise presse
Les privatisations ont mauvaise presse en Roumanie.
Après la chute du régime de Nicolae Ceausescu en 1989, elles
ont surtout profité à quelques hommes d'affaires corrompus
qui se sont enrichis lors de la transition des années 1990. Le
manque de transparence des transactions est toujours pointé du
doigt aujourd'hui. Une opacité qui rend les investisseurs étrangers assez frileux.
Les tergiversations de la Justice devant les malversations
d'Adrian Nastase a fourni une preuve supplémentaire de l'incapacité de l'Etat roumain à sanctionner les corrompus haut placés. L'ancien Premier ministre avait été condamné en juin
2012 à deux ans de prison ferme pour avoir détourné plusieurs
millions d'euros, en accordant sans appel d'offres un contrat de
construction d'autoroute. Il a n’été finalement incarcéré que
quelques mois.
Les Roumains gardent aussi en tête le feuilleton rocambolesque autour de l'usine de produits chimiques Oltchim. Mise
en vente l'été dernier à la demande du FMI, attribuée à un
homme politique et magnat des médias pour 45 millions d'euros, l'entreprise a finalement été placée en liquidation volontaire car le repreneur n'avait pas les moyens de payer…
"L'ouverture du capital a un côté violent pour les anciens
communistes", analyse Sandrine Levasseur. Mais ça peut marcher selon elle. "La République Tchèque a vendu des entreprises à des investisseurs étrangers à la fin des années 1990 et
retrouvé la croissance en quelques années". Brutal, mais efficace, donc.
Les félicitations de Christine Lagarde
au "bon élève" roumain
Le changement de majorité en Roumanie n'a pas remis en
cause les engagements du pays auprès des bailleurs de fonds,
car le gouvernement a intérêt à se tenir à carreau pour déblo-
quer d'autres
aides. Depuis le
prêt de 2009, le
gouvernement a
signé un deux
ième accord de
type préventif
en 2011, soit un
prêt de 5 milliards d'euros utilisables en cas
Christine Lagarde "mère fouettard" du FMI
d'urgence.
Cela ne se voit pas encore au quotidien, mais la Rouma nie
sort doucement la tête de l'eau. "L'économie s'est stabilisée,
même si la croissance est faible et qu'il faudra rester vigilant
afin que la situation ne se détériore pas", déclarait fin juin
Nemat Shafik, premier adjoint au directeur du FMI. Les prévisions affichent 1,6% de croissance pour 2013, après 0,9% en
2012 et 2,2 en 2011.
Bien, mais pas top, nuance l'économiste Ilie Serbanescu:
"La Roumanie est un pays émergent, il faut au moins 5 à 6%
de croissance pour voir des effets sur les salaires".
Christine Lagarde était à Bucarest les 15 et 16 juillet, pour
sa première visite en tant que directrice générale du FMI. Le
journaliste économique roumain Moise Guran a vu cette visite d'un mauvais œil. "On se félicite mutuellement et on remercie le FMI d'avoir servi de ceinture de sécurité. Mais soyons
honnêtes : la Roumanie a perdu quatre ans. Un accord du FMI
est en réalité un blocage. Une période au cours de laquelle le
gouvernement n'a fait qu'exécuter les décisions prises par
quelques comptables obtus", a-t-il écrit sur son blog.
Il est encore un peu tôt pour dire si le FMI a réussi en
Roumanie. En tout cas, l'institution aurait bien besoin d'un
succès après les erreurs (reconnues) de son action en Grèce.
Quant au gouvernement roumain, il espère être félicité pour
ses efforts accomplis, en vue d'obtenir une nouvelle tranche de
prêt pour 2013-2015. Mais, il faudra pour cela continuer à vendre le pays.
Marianne Rigaux (Slate Magazine)
Les lieux de l'exécution des Ceausescu ouverts au public
L
'ancienne caserne militaire de
Targoviste, dans laquelle
Nicolae Ceausescu, l'ancien
dictateur roumain, et sa femme, Elena
Ceausescu, ont été exécutés en décembre
1989 sera ouverte au public dès ce mois
de septembre.
"Les visiteurs pourront voir le mur
où ont été fusillés les époux Ceausescu",
a indiqué à l'agence de presse locale
Mediafax le directeur du complexe
muséal de Targoviste, Ovidiu Carstina.
"L'intérieur du bâtiment a été repeint
dans les mêmes couleurs que celles de
1989, le mobilier sera également identique. Nous sommes en train d'aménager
la pièce où a été improvisé le procès mais
aussi la chambre où les Ceausescu ont
passé leur dernière nuit", a-t-il ajouté.
L'ouverture au public de cette ancienne
caserne a été décidée à la suite de demandes de groupes de touristes étrangers
quiavaient suivi le procès à la télévision,
ont expliqué les autorités locales.
Le 22 décembre 1989, les époux
Ceausescu décident de fuir Bucarest à
bord d'un hélicoptère alors qu'une manifestation contre le pouvoir dégénère
devant le siège du comité central du parti
communiste.
Ils sont arrêtés par l'armée, passée du
côté des protestataires, à une centaine de
kilomètres de la capitale et conduits dans
une caserne militaire où ils seront fusillés
trois jours plus tard après un procès sommaire, resté dans toutes les mémoires.
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A la Une
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Rumeurs
L'ancien secrétaire d'Etat américain et l'eurodéputée roumaine avaient-ils une liaison?
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RM. SARAT
CONSTANTA
BUCAREST
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Sismologues
soucieux
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Une photo qui fait les délices de la presse
Plusieurs secousses telluriques
supérieures à 4 sur l'échelle de
Ritcher ont été enregistrées dernièrement dans la zone de Vrancea,
près de Paltin-Nereju, siège de tous
les principaux séismes de
Roumanie, ce qui conduit les sismologues à se montrer soucieux et à
ne pas écarter l'hypothèse d'un
tremblement de terre majeur, cette
année. Ils notent en effet des similitudes avec 1977, année du dernier
cataclysme enregistré dans le
pays, faisant 2000 morts à
Bucarest. Habituellement il se produit 15 secousses par mois dans la
zone, dont le grade est classé entre
1 et 4. Or depuis mars, quatre tremblements de terre ont été mesurés
entre 4,2 et 4,5. Plusieurs villes sont
situées près de leur épicentre :
Focsani (39 km), Covasna (42 km),
Marasesti (44 km), Râmnicu Sarat
(50 km), Târgu Secuiesc (51 km).
Bucarest se trouve à 150 km.
Exploitation
de Rosia Montana
dans trois ans ?
Le gouvernement espère lancer
l'exploitation de la mine d'or de
Rosia Montana à partir de fin 2016,
après que le plan d'urbanisme local
ait été approuvé. L'Etat a augmenté
sa participation dans le projet de
près de 6 %, en devenant actionnaire à hauteurs de 25 %. L'exploiteur,
la firme canadienne Gabriel
Resources et Rosia Montana Gold
Corporation, lui reversera une redevance de 6 % sur la production,
somme qui pourra être payée en
nature, c'est-à-dire en or.
Exhumée de vieilles archives, une photo montrant bras-dessus-bras-dessous
Colin Powell et Corina Cretu a fait la une des journaux roumains qui en ont tout de
suite déduit que l'ancien secrétaire d'Etat de George W. Bush, chef d'état-major de
l'armée américaine et conseiller à la sécurité nationale de Ronald Reagan, et l'eurodéputée roumaine avaient une liaison. Au grand dam du général américain en
retraite, âgé de 75 ans, qui s'est toujours efforcé de passer pour un mari fidèle,
Corina Cretu, 46 ans, soutenant qu'il ne s'agissait que d'une relation d'amitié.
A la Une
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Corruption
Bakchich d'un million d'euros pour la juge
Une juge de la Cour d'appel de Bucarest, soupçonnée d'être au cœur d'une importante affaire de corruption, a été placée en détention provisoire début août. Veronica Cîrstoiu (notre photo) est accusée d'avoir perçu des pots-de-vin et de complicité de trafic d'influence dans une affaire où la somme totale versée pour corrompre plusieurs juges atteint un million
d'euros. Le parquet anticorruption (DNA) a mis à jour un réseau de magistrats aux ramifications multiples, atteignant le
plus haut niveau de la justice roumaine, la Haute cour de Cassation et de Justice, visant à faire échapper des hommes d'affaires véreux aux sanctions qui les attendent, moyennant de copieux bakchichs.
J
ette explication a laissé sceptique Ion Mihai Pacepa (85 ans), l'ancien chef des
services secrets de Ceausescu, passé à l'Ouest en 1978, et qui vit aux USA
depuis. L'auteur du best seller Horizon rouge soutient que l'euro-parlementaire peut très bien faire partie de cette cohorte de taupes "sexy" que les réseaux d'espionnage roumain et soviétique tentaient de mettre dans les bras de leurs cibles. "Ce serait
très regrettable pour ce prestigieux général quatre étoiles, et grand patriote, mais il n'est
pas du tout impossible qu'il ait été victime des manigances du KGB (devenu FSB)" a-t-il
commenté, ajoutant qu'il était une proie de choix, puisqu'il a même été envisagé un
moment qu'il soit candidat à la succession de George W. Bush au poste de président et
que son origine noire le rendait sans-doute plus vulnérable et malléable aux yeux des services secret russes, qui ont toujours eu
la fibre raciste.
Pacepa rappelle que Corina Cretu,
dont le père avait fait ses études à
Moscou, est membre du PSD (héritier
de l'ancienne nomenklatura),est entrée
en politique sous l'aile protectrice d’
Iliescu comme membre occulte de son
cabinet. Celui-ci, formé également à
Moscou, est resté très longtemps proche
des Soviétiques et hostile aux USA, les
aidant à recruter comme informateurs
des diplomates américains envoyés à
Bucarest. Les cibles des services secrets de l'Est n'avaient pas toujours le sens de l'à-propos de cet ambassadeur français en poste à Bucarest qui avait répondu à son maître-chanteur lui montrant des photos compromettantes et menaçant de les envoyer à sa femme
"Oh, celle-ci manque à ma collection… vous pouvez m'en faire un double ?".
uge à la Cour d'Appel de Bucarest, cumulant plusieurs
fonctions à Ploiesti et Târgoviste, Veronica Cîrstoiu
vit confortablement avec un revenu mensuel de plus
de 2000 euros. Son salaire ne lui suffisait sans-doute pas et elle
a accumulé une véritable fortune par des chemins de traverse.
Le 8 août, la DNA a pris en flagrant délit son fils, un prêtre, en
train d'empocher la somme de 50 000 euros à remettre à sa
mère pour les services qu'elle rendait.
Il ne s'agissait que d'une tranche sur le
million d'euros obtenus pour son
intervention aboutissant à l'annulation
de la peine de 7 ans de prison à
laquelle avait été condamné un malfrat notoire de Craiova, Dinel Staicu.
Une partie de la somme a été utilisée pour convaincre avec succès les
juges de la Haute cour de Cassation et
de Justice de rendre une décision
favorable. Deux autres de ses collègues, Dumitrita Piciarca et Liliana
Badescu, lui avaient aussi donné un sérieux coup de main dans
cette affaire. En fait, celle-ci avait démarré en mars dernier,
avec l'arrestation pas la DNA d'Antoanela Costache et Viorica
Dinu, deux autre juges femmes de la Cour d'Appel de
Bucarest, pas regardantes, filmées par une caméra cachée alors
qu'elles négociaient un "pourboire" de 150 000 euros pour
faire sortir de prison un détenu fortuné. Elles avaient demandé
800 000 euros dans le cas de Dinel Staicu. Les juges anti-corruption n'avaient alors plus qu'à tirer sur le fil pour dévider
toute la pelote du système, impliquant 24 personnes pour l'instant, dont des greffiers et des avocats.
Bucarest piège idéal pour les diplomates occidentaux
Admirateur de Ceausescu
L'ancien chef espion rappelle le cas de Mark Sullivan, premier secrétaire de l'ambassade US qui avait refusé de coopérer et avait été rappelé à Washington. Harold Nicholson,
chef de l'antenne de la CIA en Roumanie, avait, lui, cédé aux sirènes placées par Moscou
dans son lit, avec l'aide des services secrets roumains. Démasqué, il purge une peine de
23 ans et 7 mois de prison dans son pays, qui s'est encore alourdie de 8 ans, en 2011, son
fils étant condamné à 5 ans avec sursis.
Pacepa souligne que Colin Powell et Corina Cretu ont lié connaissance à Bruxelles,
l'un pour ses attributions au conseil de l'OTAN, l'euro-députée parce qu'elle y siège.
"Pourquoi cette photo -pourtant assez innocente - est-elle sortie maintenant?" s'interroge-t-il, se demandant si elle n'a pas été en son temps un moyen de chantage utilisé au sein
du Parti Républicain sur le général américain, au zénith de sa popularité, pour lui faire
renoncer à sa candidature à la Maison Blanche. Une liaison présumée avec "un agent de
l'est", la fichait vraiment trop mal. A moins qu'il ne s'agisse d'une vengeance de son
ancien parti. Colin Powell avait appelé à voter pour le démocrate Barack Obama en 2008
et a récidivé, l'an dernier.
Né dans un village proche de Craiova, Dinel Staicu est
devenu à 21 ans sous-officier dans la milice sous Ceausescu,
qu'il porte en grande estime. Après la "Révolution", il a ouvert
un kiosque dans une rue de Craiova, vendant des saucisses et
des mici. Très vite, ses affaires, occultes, ont pris une autre
dimension, Staicu rachetant même le club de football
C
Drame
L
Universitatea Craiova pour le revendre 5 millions d'euros en
2005. Admirateur du régime précédent, il a ouvert le musée de
l'Epoque d'Or (Epoca de Aur) à Scornicesti, la ville natale de
Ceausescu, et un palais à la gloire du communisme, où s'entassent ses symboles.
Son implication dans l'escroquerie de la Banque
Internationale des Religions lui vaudra en 2011 sa condamnation à 7 ans de prison… mais l'oiseau
s'était envolé 3 jours auparavant pour
se réfugier en Hongrie, où il sera
arrêté et ramené en Roumanie, deux
semaines plus tard. Grâce à ses
appuis, la sentence sera invalidée le
22 février 2012, mais Staicu retournera quasi immédiatement en prison
pour une autre affaire de fraude,
concernant la société Transgaz de
Medias, délestée de 11 millions d'euros. Il sera à nouveau libéré au début
de cette année, son carnet de chèques
se montrant particulièrement persuasif.
Un fils pope, roulant en BMW
La juge Veronica Cîrstoiu n'est pas seulement serviable
avec ses "amis" justiciables, elle se montre aussi une mère de
famille attentive. Son fils Florin, prêtre de la paroisse de
Laculete, n'a toujours pas été convoqué devant le tribunal de
Târgoviste, où elle intervient, pour répondre de sa responsabilité dans l'accident qu'il a provoqué en 2011. Au volant de sa
BMW, en état d'ébriété et roulant à plus de 100 km/h dans un
village, il avait embouti la Dacia du prêtre d'une autre paroisse, le tuant ainsi que sa femme et sa fille de 15 ans. Dans un
premier temps, il avait affirmé à la police qu'il ne conduisait
pas, avant de se raviser devant les preuves. Sa seule sanction,
pour l'instant, a été l'interdiction de dire la messe qui lui a été
signifiée par sa hiérarchie.
Ayant cependant joué les intermédiaires dans l'affaire
Staicu, il a toutefois rejoint sa mère en prison, laquelle lui a
annoncé mettre un terme à sa carrière dans la magistrature.
La terrible fin d'une championne
a championne de canoë Oana Albu, 20 ans, est morte à l'hôpital des grands brûlés de
Bucarest, après une semaine d'agonie. Son mari, Gabriel Albu, l'avait aspergée d'essence
et craqué une allumette, la jeune femme s'embrasant aussitôt comme une torche. Le couple vivait dans la maison des grands parents d'Oana à Tutora, une commune près de Iasi. Gabriel
Albu se montrait furieux que ses beaux-parents refusent de signer un papier leur cédant la maison
où il vivait et, jaloux maladif, suspectait sans raison apparente sa femme de le tromper.
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
A la Une
Disparition
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SATU MARE
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IASI
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BACAU
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VASLUI
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CRAIOVA
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TARGOVISTE
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BUCAREST
GIURGIU
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Son décès subit a frappé sa communauté
Le “roi” Cioaba a rapproché
les Tsiganes de la modernité
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SUCEAVA
ORADEA
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
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CONSTANTA
Le "roi" autoproclamé des Roms, le Roumain Florin Cioaba, 58 ans, est mort
le dimanche le 18 août dans un hôpital de Turquie où il avait été admis dans un état
grave le mardi précédent à la suite d'un infarctus, alors qu'il séjournait dans la station balnéaire d'Antalaya, et après avoir subi vainement une opération.
F
10
Deux pour
une couronne
Au lendemain de l'inhumation de
Florin Cioaba, suivie par environ
2500 personnes, une trentaine de
membres de l'Union internationale
des Roms se sont réunis à Sibiu pour
désigner son successeur. Finalement,
la décision reviendra à un congrès
qui sera convoqué ultérieurement.
Dans l'attente, son fils aîné, Dorin, 44
ans, qui a fait des études supérieures
poussées et est titulaire de deux
licences, dont une de sciences politique, a été élu président intérimaire
de l'organisation, alors que le cadet,
Daniel, a été promu à la tête de la
communauté rom de Roumanie.
Dorin a créé voici quelques années la
première juridiction officielle tsigane,
le tribunal rom de Sibiu, qu'il préside
et est appelé à statuer sur les problèmes internes de la communauté.
Toutefois, la succession n'est pas
réglée d'avance. La famille du "roi"
se serait émue du fait que le fils de
Dorin n'appartienne pas pleinement à
la communauté, alors que Daniel a
trois enfants roms.
ils de Ion Cioaba, leader respecté des Tsiganes qui avait survécu à la
déportation en Transnistrie sous le régime du maréchal pro-Nazi Ion
Antonescu, Florin Cioaba s'était autoproclamé "roi des Tsiganes du
monde entier" en 1997, titre qui lui avait été reconnu par sa communauté en
avril dernier, lors du congrès international qui s'était tenu dans sa ville de Sibiu,
mais n'était guère reconnu qu'en Roumanie, et encore par seulement une partie
de sa communauté.
Lui-même marié dès l'âge de 14 ans, il avait suscité un tollé en 2003 lorsqu'il avait organisé les noces de sa fille âgée à peine de 12 ans avec un jeune
Rom de trois ans son ainé. A la demande des autorités roumaine, les deux aînés
n'avaient finalement pas eu le droit de cohabiter avant leur majorité. Devant les
critiques, il avait ensuite milité contre le mariage des Roms dès leur adolescence, voire enfance, une tradition très répandue au sein de cette minorité. Par
ailleurs, il avait encouragé les familles roms à briser le cercle vicieux de la pauvreté en envoyant leurs enfants à l'école, alors que le taux de scolarité au sein de
cette minorité est très inférieur à la moyenne nationale. En 2004, il avait brigué,
sans succès, un siège de sénateur au Parlement roumain.
Le président Traian Basescu, qui au long des années avait assisté à plusieurs fêtes
des Roms à ses côtés, et avait invité Florin Cioaba au mariage de sa fille, avait envoyé
un cardiologue roumain de renom à son chevet, en Turquie, ce que lui a reproché son
adversaire, le Premier ministre, Victor Ponta, lequel l'a accusé de vouloir tirer un profit
électoral de son geste, la communauté rom comptant deux millions de personnes. Une
polémique a suivi, le chef de l'Etat démentant qu'il ait fait prendre en charge les frais
d'hospitalisation et de rapatriement par avion spécial du corps du défunt. Le chef de
l'Etat s'est d'ailleurs déplacé à Sibiu pour venir saluer la dépouille du dignitaire. Par la
suite, un autre litige est apparu entre la famille Cioaba et la direction de l'hôpital turc,
laquelle, selon les dires du fils aîné, apprenant que son patient était le "roi" des Tsiganes
aurait multiplié par dix la facture qu'elle lui a présentée, menaçant de ne pas rendre le
corps, réclamant 350 000 € pour l'intervention chirurgicale et les différentes prestations
au lieu de 30 000 €, somme qu'elle se serait finalement contentée d'empocher.
Un protocole allégé
Les obsèques du "roi Cioaba" se sont déroulées le vendredi 23 août dans sa ville de
Sibiu, selon un protocole beaucoup plus simple que celui observé habituellement. Après
trois jours passés dans la maison, au lieu des trois habituels, pendant lesquels les femmes ni se lavent, ni se peignent pour marquer leur désespoir, les hommes se succédant
pour veiller le défunt, le corps, sans sceptre ni couronne, a été inhumé dans un caveau
ordinaire du cimetière communal, sans le faste annoncé - cercueil avec air conditionné,
tombe aménagée en salon - ni le rituel qui va avec : deuil de 30 jours pendant lequel la
communauté tsigane doit s'abstenir de procéder à des mariages ou baptêmes.
Toutefois, le cortège mortuaire a respecté la tradition, les femmes marchant derrière, les accompagnateurs jetant des pièces de monnaie pour le chemin vers le ciel du
mort, chiens et chats étant bannis à son passage.
De religion baptiste, Florin Cioaba était marié et avait quatre enfants, deux garçons
et deux filles. Il laisserait derrière lui une fortune estimée à deux millions d'euros et des
lingots d'or.
11
Avec le
metteur
en scène
Kusturica.
Ses deux
fils, de g.
à dr.,
le cadet
Daniel
et l’aîné
Florin
Florin a créé et préside le tribunal Rom de Sibiu.
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Vie internationale
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TARGOVISTE
n
BUCAREST
GIURGIU
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CONSTANTA
Les oreilles
de l'espionnage
américain à Bucarest
Le site américain Cryptome.org a
publié une carte montrant l'emplacement des 150 serveurs de la NSA, qui
permettent aux services de renseignement américains de surveiller l'activité
sur internet. Présents dans 85 centres
de par le monde, principalement au
sein des ambassades américaines, et
notamment celle de Bucarest qui s'est
refusée à toute déclaration, arguant
que "les problèmes de sécurité ne sont
pas commentés".
12
L'extrême droite hongroise
attise les tensions entre
Bucarest et Budapest
Nouveaux autocrates
De Viktor Orban en Hongrie à Victor
Ponta en Roumanie,ou Milos Zeman en
République tchèque, The Guardian a
dressé le panorama de ces "nouveaux
autocrates" qui émergent en Europe de
l'Est et sont premiers ministres de leur
pays; des hommes prêts à tout pour
assouvir leur inextinguible soif de pouvoir conclut le journal britannique.
Fuite des médecins
aussi en Hongrie
Près de 1 000 médecins quittent
chaque année la Hongrie pour s'installer ailleurs en Europe, s'inquiète
Népszava, qui constate que le phénomène touche principalement les spécialistes. Le quotidien explique que les
médecins hongrois ne gagnent qu'une
fois et demie le salaire moyen du pays
et souligne l'insuffisance des ressources
pour assurer et développer les soins
médicaux. Ils partent donc pour trouver
ailleurs des conditions de vie et de travail plus adaptées. Selon les statistiques officielles, il manque déjà 1 634
médecins et 3 433 personnels de santé
pour assurer le bon fonctionnement du
système de santé.
Les relations diplomatiques entre la Roumanie et la Hongrie sont mises à
mal. Au cours d'une université d'été du Jobbik organisée pour les jeunes
Hongrois de Transylvanie, Gabor Vona, chef de file du parti hongrois d'extrême
droite, a plaidé le 10 août pour un conflit ouvert avec la Roumanie. "Nous ne
sommes pas intéressés par la qualité des relations entre la Roumanie et la Hongrie,
a-t-il affirmé devant une foule de jeunes radicaux. Si la défense des droits des
Hongrois qui vivent en Roumanie mène à un conflit avec la Roumanie, le Jobbik
assumera cette responsabilité. La Hongrie entière devrait le faire".
A
ntisémite, ultranationaliste, anticapitaliste, le mouvement de la jeunesse
radicale hongroise Jobbik ("les meilleurs") s'est transformé en parti politique en 2003. Depuis, il a conquis une place de choix en remportant
16,6 % des voix aux législatives de 2010. Le Jobbik s'est fait l'avocat des minorités
hongroises des pays voisins,
en particulier du 1,2 million de
Roumains d'origine hongroise
(6,5 % de la population roumaine). "Nous ne faisons que
défendre notre race et notre
nation, ses valeurs et ses
droits, a martelé Gabor Vona
lors de l'université d'été. Tous
les pays d'Europe centrale
sont exploités par le capital
international venu d'Europe
occidentale. Nous devons agir
Une entrevue musclée entre Viktor Orban,
ensemble contre ce capital".
le Premier ministre hongrois et le Président Basescu
Les déclarations belliqueuses de Gabor Vona ont provoqué la colère de Bucarest. "La Hongrie est en ce
moment un foyer d'instabilité pour toute la région, et pas seulement pour la
Roumanie, a déclaré, lundi 12 août, le président Traian Basescu. Budapest crée des
problèmes aux Etats qui ont une minorité hongroise sur leur territoire et la Roumanie
a bien l'intention de ne pas laisser faire".
Le rêve d'un retour de la grande Hongrie
Le ministère roumain des affaires étrangères a, lui aussi, demandé aux autorités
hongroises de préciser leur position. "Les propos du représentant du Jobbik sont
extrêmement graves, affirme une note du ministère. Ils sont en contradiction flagrante avec l'esprit et les réalités européennes contemporaines". Son homologue hongrois s'est dissocié des démarches des jeunes du Jobbik en Roumanie.
Ces tensions interviennent en pleine réforme administrative de la Roumanie qui
compte réduire ses 41 départements à huit grandes régions. Or le rêve d'un retour de
la Grande Hongrie commence à échauffer les esprits en Transylvanie, région qui a
longtemps été au centre de la discorde entre Bucarest et Budapest. Partie intégrante
de l'Empire austro-hongrois, la Transylvanie, où vit une majorité de Roumains, a été
intégrée à la Roumanie en 1918, à la fin de la première guerre mondiale. Après la
chute des dictatures communistes en Europe centrale et orientale, en 1989, Bucarest
et Budapest ont peiné à s'entendre au sujet de la minorité hongroise de Transylvanie.
L'intégration européenne des deux pays avait calmé le jeu des deux côtés de la frontière. Le Jobbik promet de changer la donne.
Mirel Bran (Le Monde)
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Vie internationale
Années 60-70 : duplicité ou émancipation ?
L
a distance prise avec Moscou par la Roumanie en
matière politique étrangère, dans les années 60-70
n'était-elle qu'un attrape-nigauds ? Certains analystes le pensent, concluant à un scénario mis au point par
Ceausescu et Brejnev pour berner les Occidentaux, mais, avec
le recul, il n'en apparaît pas moins que sur des dossiers brûlants, Bucarest avait pris du recul vis-à-vis du grand frère
soviétique, comme le soulignent aujourd'hui des historiens
roumains.
Contrairement aux autres pays satellites, la Roumanie n'avait pas pris position dans le conflit idéologique opposant
l'URSS à la Chine. Elle avait aussi maintenu ses relations
diplomatiques avec Israël, après la Guerre des Six jours, en
1967, et refusé de participer à l'invasion de la Tchécoslovaquie
avec les troupes du Pacte de Varsovie, lors du Printemps de
Prague, en août 1968. C'est d'ailleurs en mai de cette année là
que le général De Gaulle s'était rendu en Roumanie, sa visite
précédant celle de Richard Nixon.
Bucarest avait par ailleurs renoué avec Bonn, ouvrant une
ambassade en République fédérale d'Allemagne et soutenu
quelques initiatives de paix de l'ONU, malgré les froncements
de sourcils de Moscou. Sa diplomatie s'était aussi impliquée
dans la recherche d'une solution négociée à la guerre du
Vietnam, financée au nord par l'URSS, en pesant auprès de ses
alliés de l'Est. Il est vrai que le livre Horizon Rouge du général Pacepa, le chef des services secrets roumains passé à
l'Ouest, montrera également toute la duplicité du régime
Ceausescu.
A savoir
La navigation
reprend sur le Prut
Après un quart de siècle de stagnation, la navigation commerciale sur le
Prut a repris, fin juin. La rivière qui fait la
frontière entre la Moldavie et la
Roumanie, assurait avant la fin de
l'URSS le désenclavement de la petite
République, privée de tout accès maritime, vers la Mer Noire, en empruntant le
dernier tronçon du Danube, via l'Ukraine.
La portion réouverte ne concerne pour
l'instant que 86 kilomètres entre Cahul et
Giulesti, port frontalier avec l'Ukraine,
ouvert en 2006, et devrait être portée
ultérieurement à 250 km, remontant jusqu'à Ungheni.
Le coût du transport des marchandises en sera réduit des trois quarts, concernant notamment les matériaux de construction, nécessaires à la réfection des
routes au sud du pays, mais aussi servant
à l'exportation des produits agricoles.
20 % de femmes
parlementaires en Moldavie
Avec 20 % de femmes parlementaires, la Moldavie se situe au 82 ème rang
dans le monde, selon une étude de la
Banque Mondiale, loin des premiers, les
pays scandinaves, Suède en tête, dont la
présence féminine dans les assemblées
nationales se situe entre 39 et 45 %. Il
faut noter le net recul des ex pays communistes, autrefois largement en avance
pour la féminisation de leurs représentants. La Russie figure désormais en
119ème position (14 %), le Géorgie en
134ème (12 %), l'Ukraine 142ème (9 %).
Seul le Belarus tire son épingle du jeu,
43ème (27 %), mais il faut y voir sans
doute une volonté de propagande et de
manipulation électorale de son dictateur
Alexandre Loukachenko, à la mode
soviétique d'autrefois (en 2011, le taux
était de 5 %), tout comme cette fausse
promotion des femmes se retrouve dans
les régimes dictatoriaux d'Asie centrale
(entre 22 et 24 %).
La Bulgarie traversée d'est
en ouest par une autoroute
Bien que considérée comme le pays
le plus pauvre de l'UE, la Bulgarie, après
avoir mis en service cet été le pont frontière sur le Danube, entre Vidin et
Calafat, a inauguré la première autoroute
traversant tout le pays, d'est en ouest, de
Sofia à Burgas, sur la Mer Noire. Longue
de 370 kilomètres, sa construction avait
commencé dans les années 70.
Interrompue, elle avait été relancée en
2004 grâce à des fonds européens et
devait être terminée en 2009.
Cet axe complète le couloir européen
n°8, menant de l'Adriatique aux portes de
la Turquie. Bien que deux fois et demi
plus petite que la Roumanie, la Bulgarie
possède autant d'autoroutes, soit 400
kilomètres.
Le Hezbollah
et l’attentat de Burgas
Les deux complices de l'auteur de
l'attentat de Bourgas, en 2012, devraient
être jugés en Bulgarie avant la fin de l'année, explique 24 Tchassa.
La dernière pièce à conviction présentée par les enquêteurs est un émetteur
radio utilisé par les suspects qui aurait été
acheté par des membres du Hezbollah.
Elle serait entrée en jeu dans la décision
de l'UE d'inscrire le bras armé du mouvement chiite libanais sur la liste des organisations terroristes.
Les deux suspects, Meliad Farah et
Hassan el Hajj Hassan, auraient été
recrutés par le Hezbollah en 2010, alors
qu'ils étaient étudiants à l'université de
Beyrouth. Ils auraient rejoint l'auteur de
l'attentat kamikaze, qui a utilisé le
pseudonyme Jacques-Philippe Martin. 6
personnes, dont 5 citoyens israéliens,
avaient trouvé la mort.
La mafia bulgare investit
Selon le dernier rapport du Bureau
pour les stupéfiants internationaux du
département d'Etat américain, la criminalité organisée bulgare investit dans tous
les secteurs de l'économie en vue de blanchir l'argent obtenu de ses activités illicites, comme le trafic de drogue, la prostitution, la contrebande de cigarettes, la
revente de voitures volées ou la fraude
fiscale.
La Bulgarie continue d'agir comme
un aimant pour les capitaux douteux à
cause de la croissance de son secteur
financier, l'importance de son secteur
économique informel et la proportion
élevée de paiement en liquide.
13
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Politique
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Un avocat du Peuple
bien compréhensif
14
Près de la moitié
des maires élus en 2012
au cœur de conflits d'intérêts
Près de la moitié des 2 665 maires de Roumanie élus en juin 2012 devraient
abandonner leur poste en raison de conflits d'intérêts. C'est le constat accablant
que vient de faire publiquement l'Agence nationale d'intégrité (ANI), institution
chargée de veiller sur les fonctionnaires. Les maires et les conseillers locaux montrés du doigt figurent dans les conseils d'administration de plusieurs sociétés commerciales.
P
Le quotidien România Libera critique le recours abusif aux ordonnances d'urgence par le gouvernement
Ponta 2, bien aidé par "la passivité […
et] la sympathie de l'Avocat du peuple". Selon le journal, le Médiateur de
la Roumanie ne critique presque
jamais les ordonnances du gouvernement, permettant ainsi à ce dernier de
"contourner la Cour constitutionnelle".
L'Avocat du peuple, seule institution
capable de contester une ordonnance
du gouvernement devant la Cour
constitutionnelle, n'a eu recours à ce
pouvoir qu'une seule fois cette année,
à la demande du gouvernement.
L'article mentionne également que pas
moins de 80 ordonnances d'urgence
ont été émises par le gouvernement
Ponta 2 depuis le début de l'année,
malgré la super-majorité de l'USL au
Parlement (70%). En comparaison, au
cours des six premiers mois de 2012,
les gouvernements Boc, Ungureanu et
Ponta 1 n'ont délivré que 37 ordonnances d'urgence. Avant même d'être
renforcé par sa majorité parlementaire
en décembre, le gouvernement Ponta
1 (7 mai - 21 décembre 2012) a délivré 58 ordonnances d'urgence dans la
seconde moitié de 2012.
our le directeur de l'ANI, Horia Georgescu, juriste de 36 ans, "des milliers
de conseillers locaux ont signé des contrats avec leurs propres sociétés. Une
bonne partie des personnes embauchées dans ces sociétés se retrouvent
ensuite dans les équipes qui gèrent les projets financés par les fonds européens".
Le premier ministre socialiste, Victor Ponta, qui dirige un gouvernement de coalition composé de socialistes et de libéraux, promet de trouver une solution, mais il ne
cache pas son embarras. "Il est important de ne pas entamer une nouvelle dispute avec
la Commission européenne, mais la moitié des maires et des conseillers locaux sont
dans cette situation. Faut-il envisager leur démission et prévoir des élections dans
l'ensemble du pays? Je ne crois pas que ce soit une bonne idée".
Naturellement, cette perspective est rejetée en bloc par les maires concernés qui
ont fait pression sur le gouvernement afin d'empêcher l'ANI de nuire.
Un avis que le gouvernement roumain s'est empressé de prendre en compte. "Ce
n'est pas normal de refuser à une communauté d'avoir des représentants dans une
société commerciale, a déclaré le vice-premier ministre Liviu Dragnea. J'ai démarré
une procédure visant à modifier la loi qui sera soumise à l'avis du ministère de la justice". Si un maire a un problème
avec la loi, plutôt que de lui
demander de s'en aller, changeons la loi... Néanmoins, lundi
29 juillet, cette solution a reçu un
avis défavorable de la part du
ministère de la justice, pourtant
lui aussi membre du Parti socialiste: la proposition de Liviu
Dragnea, lui-même impliqué
dans des affaires, était tellement
grossière que son propre parti a
refusé de la prendre au sérieux.
La monarchie
valeur refuge
Au-delà de la polémique, l'enjeu de l'affaire est extrêmement important : l'intégration de la Roumanie dans l'espace Schengen en dépend. Le gouvernement s'efforce de
prouver à la Commission européenne qu'il fait ce qu'il faut pour endiguer la corruption
endémique, et l'application des accords de Schengen en Roumanie est conditionnée à
une amélioration des conditions dans lesquelles est rendue la justice.
Outre le Parquet national anticorruption, l'Agence nationale d'intégrité est la pièce
maîtresse du dispositif. Tous les ans, au mois de mai, les fonctionnaires de l'administration centrale et locale doivent déposer une déclaration de patrimoine que l'ANI rend
publique. "Nous avons beaucoup travaillé pour mettre au point ce mécanisme, d'autant qu'il n'existait aucun modèle similaire ailleurs, affirme Horia Georgescu. Certains
hommes politiques nous critiquent sans arrêt, notre budget a été diminué et nos inspecteurs sont parfois menacés. Mais nous ne céderons pas".
Mirel Bran (Le Monde)
Selon une enquête d'opinion du
journal Adevarul, 27 % des Roumains
seraient prêts à ce que leur pays
devienne une monarchie, pourcentage
le plus élevé depuis la chute de
Ceausescu, 41 % préférant un régime
républicain, 32 % n'ayant pas d'avis
arrêté. 30 % verraient même d'un bon
œil, le roi Michel, 91 ans, monter sur
le trône.
Des enquêteurs menacés
Pour le vice premier ministre Liviu Dragnea,
ici à gauche de son "patron " Victor Ponta, la solution
est simple: si la loi rend incompatible un maire…
c'est la loi qu'il faut changer !
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Corneliu Vadim Tudor expulsé de son parti
Politique
L
e chef de l'extrême droite roumaine, l'eurodéputé
Tudor avait échoué en 2008 puis en 2012 à faire entrer son
Corneliu Vadim Tudor, a été exclu samedi 27 juillet
parti au Parlement, mais avait été élu eurodéputé en 2009.
par ses pairs du Parti de la Grande Roumanie
(PRM) qu'il avait fondé en 1991. Les quelque 700 délégués de
Jésus Christ pris à témoin
cette formation, réunis en congrès à Alba-Iulia, ont voté à une
très large majorité pour l'exclusion de
Son successeur à la tête du PRM a
Tudor de cette formation qu'il était
pour sa part suscité de nombreuses criaccusé de diriger de manière "dictatotiques pour ses virulentes positions
riale". L'ancien maire de Cluj (nordanti-hongroises. Maire de Cluj entre
ouest), Gheorghe Funar, considéré
1992 et 2004, Funar s'était notamment
comme ultranationaliste, a été élu à la
fait remarquer par l'initiative de peindtête du parti pour le remplacer.
re les bancs publics et les poubelles de
Connu pour ses déclarations raciscette ville comptant une forte minorité
tes et xénophobes, Corneliu Vadim
hongroise dans les couleurs du drapeau
Tudor, 63 ans, est visé par plusieurs
roumain.
procès pour diffamation et outrage. Cet
Dans la tradition des partis extréancien chantre de l'ex-dictateur commistes, les règlements de comptes
"Plus extrémiste que moi… tu meurs" entre les deux rivaux a donné lieu à des
muniste Nicolae Ceausescu était arrivé
avait-dit Vadim Tudor à son rival Gheorghe Funar
à la surprise générale au second tour de
(ici, à droite). L'ancien maire de Cluj a pris débordements verbaux ou écrits d'une
sa revanche en s'emparant de son parti.
la présidentielle de 2000 mais avait été
violence extrême, chacun se traitant de
battu par Ion Iliescu, un scénario précédant de quelques mois
"canaille", "sale type", "saloperie", "dément"… Jésus Christ
celui opposant Jean-Marie Le Pen à Jacques Chirac, en
et ses origines juives étant même pris à témoin, alors que l'un
France. En forte baisse de popularité depuis, Corneliu Vadim
des protagonistes soutenait qu'il était Dace !
Première : un ministre en exercice condamné à cinq ans de prison
L
e ministre roumain des
Transports, Relu Fenechiu, a
été condamné à cinq ans de
prison ferme dans une affaire de corruption, une première pour un ministre en
exercice. Il a présenté sa démission et a
fait appel de sa condamnation.
Selon le réquisitoire, des sociétés du
ministre ont vendu entre 2002 et 2005
des transformateurs et commutateurs
électriques usagés à une entreprise d'Etat
au prix de produits neufs. Le préjudice
pour l'Etat s'est élevé à environ 1,7
million d'euros selon les procureurs. Le
frère de Fenechiu a lui aussi été condamné à cinq ans de prison.
La Commission européenne avait
appelé à plusieurs reprises les ministres
poursuivis à démissionner. Dans son dernier rapport sur la justice dans le pays,
elle avait notamment critiqué la présence
au sein du gouvernement de ministres
renvoyés en justice ou sous le coup d'une
enquête pénale.
Elu député de Iasi en 2004, considéré comme un "baron" du judet, Fenechiu
est un poids lourd du Parti national
Libéral (Crin Antonescu) dont il est un
Traian Basescu songe
à devenir Moldave
Pas si blanc que çà
C
onsidéré comme un parangon de vertu par ses
concitoyens de Sibiu, à l'image de la communauté allemande, et reconduit régulièrement à
la tête de la mairie, Klaus Iohannis n'échapperait pas aux
tentations de nombres de ses collègues maires, lesquels
confondent volontiers leurs intérêts avec ceux de leurs
communes. L'Agence Nationale d'Intégrité a constaté plusieurs infractions dans le cadre de l'exercice de ses fonctions, relevant du conflit d'intérêt. Le maire de Sibiu a
ainsi attribué des contrats municipaux pour des prestations
d'une société commerciale appartenant au Forum
Démocrate des Allemands de Roumanie dont il était président, certaines étant financées par des fonds européens.
sponsor. Il a été réélu en décembre dernier avec 62 % des suffrages. Le président Basescu avait refusé de lui serrer la
main lors de sa nomination au gouvernement, ainsi qu'à deux autres ministres,
Gabriel Oprea et Radu Stroe, poursuivis
également dans des affaires de corruption. Il était poursuivi depuis 8 ans, mais
avait toujours réussi à échapper à la justice. Le ministre s'était montré parmi les
partisans les plus décidés de la destitution
du président l'an dernier et de la limitation des pouvoirs de la DNA (Direction
Nationale Anti-corruption).
L
e président Traian Basescu a assuré qu'il demanderait la
double nationalité roumaine et moldave à l'issue de son
mandat, fin 2014. Ne pouvant plus se présenter à une nouvelle élection présidentielle dans son pays, il a indiqué qu'il n'envisageait nullement entamer une carrière politique en Moldavie. Le
chef de l'Etat s'est rendu à plusieurs reprises à Chisinau, où il a toujours été bien reçu, et se montre un ferme partisan d'un rapprochement fort entre les deux pays ainsi qu'un supporter de l'entrée de la
Moldavie dans l'UE. "Je voudrais que tous les Roumains habitent
dans un seul pays et qu'ils aient une seule citoyenneté. Je voudrais
avoir deux citoyennetés s'il est impossible que les Roumains des deux
côtés du Prout en aient une seule" a-t-il déclaré.
15
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La nouvelle PAC veut
encourager les jeunes agriculteurs
Economie
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Croissance en hausse
Le FMI a revu légèrement à la
hausse ses prévisions de croissance
économique pour la Roumanie, les
portant à 2 % pour l'année en cours et
à 2,25 % en 2014, le secteur des
exportations se montrant plus vigoureux et la production agricole annuelle
meilleure, malgré la canicule.
Inflation en recul
16
Social
"Code orange" pour les travailleurs
d'Europe centrale et orientale
UNGHENI
l
ARAD
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Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La Banque Nationale de Roumanie
(BNR) a revu légèrement à la baisse
(- 0,1 %) ses prévisions d'inflation pour
2013, tablant sur + 3,1 %, rejointe dans
son pronostic par la Banque Commerciale Roumaine (BCR) qui l'estime à
3,3 % (-0,3 %). Cette contraction est
due à la bonne récolte céréalière et à
l'abondance de la production agricole
qui pèsent sur les prix.
Réduction du
déficit commercial
Au cours du premier semestre, les
exportations roumaines ont augmenté
de 5,9 %, à 23,7 milliards d'euros, les
importations baissant de 2,7 %, à 26,2
milliards. Le déficit commercial s'est
réduit ainsi de 2 milliards par rapport à
l'année précédente, s'établissant à 2,5
milliards d'euros.
Boom de l'or
La BCR (Banque Commerciale
Roumaine) a vendu plus de deux tonnes d'or à ses clients depuis 2009,
pour une valeur de 70 millions d'euros,
les transactions les plus importantes
dépassant 40 kilos, le plus souvent
réalisées en une seule fois, sous forme
de lingots ou de pièces de monnaie.
L'activité de ce marché a doublé
depuis le début de l'année. Les achats
minimum sont de 100 grammes.
D
ébut juillet, les ministres européens de l'Agriculture et le Parlement européen ont donné leur accord concernant la nouvelle Politique Agricole
Commune (PAC), qui entrera en vigueur en 2014. Le Roumain Dacian
Ciolos, commissaire européen à l'Agriculture, considéré comme l'initiateur de cette réforme, était à
Bucarest pour détailler les grandes lignes de cette
PAC. La nouvelle PAC, entérinée à Bruxelles, apporte une bonne nouvelle pour la Roumanie: le pays
bénéficiera de fonds européens plus importants, et de
programmes adaptés à ses priorités. Sur 363 milliards
d'euros de budget prévu, la Roumanie recevra 19
milliards d'euros, dont 11,7 milliards de subventions
destinées aux fermiers - le double par rapport à la
PAC actuelle - et 8,1 milliards d'euros pour le développement rural. De plus, certains domaines, comme
Dacian Ciolos, commissaire
le secteur laitier ou la pomiculture, seront restructurés
européen à l'Agriculture.
et favorisés par des programmes spécifiques. "La nouvelle PAC prend davantage en compte la spécificité de l'agriculture roumaine", a souligné Dacian Ciolos, le commissaire européen à l'Agriculture.
Une autre volonté de la PAC est de favoriser l'implantation des jeunes fermiers,
surtout dans un pays comme la Roumanie où la population agricole vieillit de manière
inquiétante. Ces jeunes bénéficieront donc pendant cinq ans d'un bonus équivalant à
25% de leurs subventions. La PAC pourra également aider à résoudre un autre problème qui gangrène l'agriculture roumaine : les fermes et les terres agricoles non exploitées. Si leurs propriétaires se décidaient à les vendre ou à les louer, ils percevraient une
compensation. Le but est que la terre soit réellement travaillée, d'autant que les subventions s'élèvent à 195 euros par hectare.
Julia Beurq (lepetitjournal.com/Bucarest)
Production agricole record
L
'agriculture enregistre des
résultats exceptionnels cette
année, notamment dans celui
des cultures céréalières (7,3 millions de
tonnes), meilleure récolte depuis 8 ans, et
seconde depuis 1970.
Conditions météorologiques, subventions et politique d'irrigation expliquent ce chiffre. Blé et seigle ont enregis-
tré une production supérieure de 37 % à
l'an passé, marqué par la sécheresse, pour
des surfaces équivalentes de 2 millions
d'hectares, mais le rendement passant de
2650 kg/ha à 3472 kg/ha.
A 1,5 million de tonnes, la production d'orge a quintuplé par rapport à 1990
et celle de colza (647 000 tonnes) multipliée par 6 en un an.
Baisse des taux d'intérêt
L
a banque centrale roumaine a procédé à une baisse de 50 points de base de
sestaux d'intérêt, début août, les ramenant à un creux historique de 4,5%,
profitant ainsi de perspectives favorables en matière d'inflation pour donner un coup de pouce à l'économie. C'est la deuxième fois en deux mois que la banque
centrale du pays a réduit ses taux - en juillet elle les avait baissés de 25 points de base,
à 5%. Mais, avant le 1er juillet, elle avait observé le statu quo pendant plus d'un an en
raison de la persistance de pressions inflationnistes, alors que certains des voisins de
la Roumanie s'étaient engagés dans un cycle de baisse des taux. "Avant cette baisse,
j'avais tablé sur un taux de 4,25% à la fin de l'année, mais un niveau encore plus bas
est possible", a déclaré Florentina Cozmanca, économiste chez RBS Romania. A la fin
juillet, la Roumanie a conclu un accord d'aide avec le Fonds monétaire international
(FMI) portant sur un prêt de quatre milliards d'euros sur deux ans.
ans une lettre ouverte publiée par De Volkskrant
et The Independent, le ministre néerlandais des
Affaires sociales et de l'emploi Lodewijk Asscher
et le directeur du think tank britannique Demos David
Goodhart mettent en garde l'Union Européenne contre les
"conséquences négatives" de l'arrivée des travailleurs
d'Europe centrale et orientale. Ils invoquent le déclenchement
d'un "code orange" comme celui en vigueur aux Pays-Bas, qui
indique que l'eau des rivières a atteint un niveau inquiétant.
Les dernières restrictions à la libre circulation des travailleurs
roumains et bulgares seront levées, en Allemagne, aux PaysBas et au Royaume-Uni, le 1er janvier 2014.
Asscher et Goodheart estiment en particulier que cela provoquera un "dumping salarial" de la part des travailleurs
d'Europe centrale et orientale, au détriment de leurs confrères
D
les moins diplômés sur place - les plus instruits tirant, au
contraire, profit de cette libre circulation. Ils proposent ainsi
des sanctions pour les sociétés qui exploitent ces travailleurs
en appliquant les règles salariales de leur pays d'origine.
Pour De Volkskrant, cela ouvre le débat des accords salariaux au niveau européen. Dans sa chronique publiée par le
quotidien amstellodamois, l'écrivain néerlandais Arnon
Grunberg, critique le manque de "propositions concrètes" et
de preuves de "la nocivité de l'immigration du travail" évoquée dans la lettre d'Asscher et Goodhart.
Pour Grunberg, l'immigration pour des raisons économiques va sans doute de pair avec quelques abus, des travailleurs immigrés reçoivent par exemple moins que le salaire
minimum. Mais le fait de prendre parfois les transports en
commun sans payer n'est pas une raison pour les stigmatiser.
Salaire minimum à 179 euros
A
u mois de juillet, le salaire minimum roumain était de 179 €, situant le pays en avant dernière position dans l'UE, juste
devant la Bulgarie (159 €). Un an auparavant, il était de 158 € (123 € en Bulgarie). Ces deux pays sont précédés par
la Lettonie (285 €), la Lituanie (290 €), la République Tchèque (308 €). Dans le "peloton" des moins de 500 €, on
trouve aussi l'Estonie (320 €), la Hongrie (322 €), la Slovaquie (338 €), la Pologne (369 €), la Croatie et la Turquie, candidate à l'UE (405 €), ce qui explique que des Roumains vont encore travailler dans ce dernier pays.
Un deuxième groupe, entre 500 et 1000 € comprend le Portugal (566 €), la Grèce (684 €), Malte (697 €), l'Espagne
(753 €) et la Slovénie (784 €). A noter que, d'après Eurostat, le salaire moyen minimum aux USA est évalué à 961 €.
En tête du classement, au dessus de 1200 €, figurent dans l'ordre: le Luxembourg (1874 €), la Belgique (1502 €), les pays
Bas (1478 €), l'Irlande (1462 €), la France (1430 €), la Grande Bretagne (1190 €). Plusieurs pays ne figurent pas dans le classement, soit parce qu'ils n'ont pas de salaire minimum garanti, comme l'Allemagne ou Chypre ou qu'il est défini par branche, négociation au niveau de l'entreprise ou individuelle (Danemark, Italie, Autriche, Finlande, Suède, Islande, Norvège et Suisse).
A savoir
Un Moldave et Roumain sur
quatre a un emploi assuré
Seulement 26 % des Moldaves adultes disposent d'un emploi stable, contre
27 % l'an passé et 38 % dans les pays de
l'ancienne URSS de la région (41 % en
Ukraine), où le chômage recensé est de
36 %. Cette étude de l'institut Gallup
relève également que 25 % des Roumains
ont un travail assuré.
Plus on est d'enfants…
Les deux tiers des pays européens
sont "proportionnalistes" en ce qui
concernent les allocations familiales: le
montant de la prestation par enfant est
identique. La France est même particulièrement "progressive", tout comme la
Belgique et Chypre. A l'opposé, certains
pays ont des aides pour lesquelles la "part
enfant" se réduit à partir du deuxième.
C'est le cas de la Roumanie (16 € mensuels pour le premier enfant, 23 € pour
deux et 30 euros pour trois), de la
Macédoine et du Royaume-Uni. Pour les
mères de familles roumaines qui tiennent
les cordons de la bourse… plus on est
d'enfants… moins on rit !
quement du géant mondial russe
Gazprom qui acheminait son gaz via
l'Ukraine. La Moldavie consomme
annuellement 0,9 milliards de m3 et la
Roumanie 14 milliards, à 80 % production interne. Dans les 2-3 ans à venir, la
Roumanie devrait également exporter son
gaz vers la Bulgarie et augmenter ses
livraisons à la Hongrie.
Gazoduc vers la Moldavie
Coca-Cola marque le pas
Le gazoduc reliant Iasi à Ungheni, à
la frontière moldave, vieux projet d'un
coût de 27 M€ dont 7 M€ financés par
l'UE, devrait être opérationnel dans 18
mois, assurant un surplus de sécurité
énergétique à la Moldavie, en diversifiant
ses sources d'approvisionnement et en lui
permettant de payer son gaz au prix du
marché. Il transportera 500 millions de
m3 par an, dans un premier temps. La
petite république dépendait jusqu'ici uni-
Coca-Cola Roumanie a enregistré
une baisse de 10 % de ses ventes. La
firme américaine occupe 30 % du marché
roumain des boissons rafraîchissantes,
estimé entre 1,8 et 2,3 milliards d'euros,
qu'il domine en compagnie de son rival
Pepsi, loin devant les concurrents locaux.
Les Roumains consomment chacun 130
litres de ces boissons et d'eau minérale
par an, dont 43 litres de Coca.
17
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Moldavie
Les Moldaves de Bruxelles avaient
Gugutsa et son
La Moldavie célèbre en 2013 l'auteur d'ouvrages pour la jeunesse Spiridon
Vangheli, héritier direct de l'écrivain roumain Ion Creanga, avec lequel il partage
un fort attachement à la culture rurale et son personnage emblématique Gugutsa.
D
Le roumain
langue officielle ?
18
La Cour Constitutionnelle de la
République de Moldavie devait examiner le 12 septembre la requête de
la députée Ana Gutu, demandant qu'il
soit mentionner désormais dans la
constitution que la langue officielle du
pays est le roumain et non plus le
moldave, comme actuellement, une
définition datant du régime communiste de l'époque soviétique, où le
roumain s'écrivait avec des caractères cyrilliques. Cette proposition doit
être approuvée par les six juges de la
Cour, dont quelques uns disposent
d'un passeport roumain, comme le
permet la loi.
Exception culturelle
Le Conseil coordinateur de l'audiovisuel de Moldavie a décidé que les
chaînes de télévision et radio du
pays devront diffuser au moins 30 %
de leur programme musical à des
productions moldaves. Ce seuil était
jusqu'ici de 20 %, ce qui a entraîné
les protestations des artistes locaux.
Environnement
La Moldavie occupe la 108ème
place sur 132 pays objets d'une enquête effectuée par l'université américaine de Yale, sur le niveau de protection de l'environnement. La petite
République obtient 45,2 points sur
100 possibles et est classée 128ème
au chapitre de la bio-diversité et l'habitat, 88ème pour l'eau, mais 22ème
pour l'agriculture et 1ère pour la protection des forêts. Les trois premiers
rangs sont occupés, dans l'ordre, par
la Suisse, la Lettonie, le Norvège.
ans la jeune République de Moldavie, définir les valeurs nationales et trouver les personnalités pouvant les incarner est une affaire sérieuse. Ainsi
pour 2013, le Parlement a décidé de célébrer l'auteur et traducteur de livres
pour la jeunesse Spiridon Vangheli. Dans la vingtaine d'histoires qu'il a publiées à partir de 1962, on trouve des personnages généreux, ingénieux et rêveurs. Pour eux, nul
besoin de grands moyens, et une dose de bonne volonté semble leur suffire pour aider
leur entourage.
L'auteur a défendu l'alphabet latin pour l'écriture du roumain, notamment en cosignant le premier abécédaire publié en graphie latine en 1990. Pendant la période soviétique, la langue roumaine - ou moldave - était écrite à l'aide de l'alphabet cyrillique.
Aujourd'hui, seule la république sécessionniste de Transnistrie maintient cette pratique.
A Chisinau, un café pour enfants à son nom
Gugutsa (prononcer Gougoutza) est une figure
indissociable de Spiridon Vangheli. Il porte le costume national moldave comprenant une chemise paysanne brodée, un pantalon collant en lin ("itari"), une
touloupe ("bundita") en peau de mouton avec applications en cuir et des mocassins paysans ("opinci").
Mais il est surtout inséparable de son bonnet en fourrure d'agneau ("caciula de cârlan)".
Un des récits de Vangheli est entièrement dédié à
ce bonnet, dans le premier recueil d'histoires paru en
1967 et intitulé Les Exploits de Gugutsa: grâce à ce
bonnet, Gugutsa protégera du froid ses camarades de
classe et, plus tard, le village entier en les invitant à se
blottir dedans pour se réchauffer. En effet, notre héros
a fait une grande découverte: son bonnet grossit à
mesure que sa générosité et sa bonté se manifestent.
Cette histoire, la plus célèbre de toutes, suscite encore une grande tendresse de la part
de ses lecteurs en Moldavie et dans plus de 40 pays du monde, grâce aux traductions
effectuées pendant l'ère soviétique et aux diapositives en russe créées à partir des livres.
Pendant cette période, Gugutsa et son bonnet apparaissaient déjà comme un symbole national. En 1981, dans le parc central de Chisinau, la municipalité inaugure un café
pour enfants nommé "Gugutsa", des poupées à son effigie sont fabriquées entre 1982 et
1990 dans la ville de Durlesti. Aujourd'hui encore, le petit héros jouit d'un grand prestige puisqu'un théâtre de marionnettes, une marque d'uniformes scolaires ou encore des
chocolats et une pâtisserie utilisent son nom et son image. Le 27 août 2010, la diaspora
moldave avait même affublé le Manneken Pis, à Bruxelles, du costume de Gugutsa.
Pionnier du cinéma d'animation moldave
Les célébrations organisées cette année visent à étendre cette popularité, principalement auprès des jeunes générations, grâce à une série de concours, spectacles et expositions organisés en partenariat avec les bibliothèques et établissements scolaires de tout
le pays. Tous les livres de Gugutsa sont réédités et une émission, l'Univers de Gugutsa,
a fait son apparition à la télévision nationale. Les poupées réapparaissent sur les marchés, ainsi que des badges et autres aimantins. On promet également la frappe d’une
pièce de monnaie, l’inauguration d'un monument et d'un parc Gugutsa dans la capitale.
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
même affublé le Manneken-Pis de son costume
bonnet, symbole national
Tout y est. Ou presque. Car, dès 1970, soit trois ans après
la première édition du livre mettant en scène ce personnage, il
est également apparu dans un film d'animation. L'histoire du
cinéma d'animation moldave a commencé en 1968 et 1969,
avec deux films inspirés de contes classiques de la littérature
roumaine La chèvre aux trois chevreaux et La Petite bourse à deux sous de l'écrivain Ion Creanga. Ces films ont été
réalisés par le peintre Anton Mater,ancien étudiant de
l'Académie des beaux-arts de Leningrad. Ils utilisent la technique d'animation en volume avec des poupées.
Fort de ce succès, Victor Andon, secrétaire du Parti communiste de Moldavie, formé au VGIK de Moscou, la première
école de cinéma d'État au monde ouverte en Russie en 1919,
rédacteur en chef et critique de films au studio Moldova-Film,
souhaitait poursuivre l'expérience avec un auteur contemporain. C'est ainsi qu'il a fait appel à l'écrivain Spiridon Vangheli:
"Nous avons rapidement lié une grande amitié et je lui ai proposé d'animer son petit personnage et son bonnet espiègle
pour le porter sur le grand écran".
tion de maisons typiques du village de Sadova, enclos de la
région de Orhei, gimblettes et autres rites du nouvel An auxquels se mêlent des éléments plus modernes tels que les casquettes portées par les jeunes balayeurs, une voiture décapotable et l'architecture de l'école ou du magasin de jouets. La
musique fut confiée aussi bien à des compositeurs classiques
comme Eugen Doga et Gheorghe Mustea qu'au groupe de
variétés Contemporanul (également appelé Noroc). Ces
contrastes donnent un caractère unique aux films.
Victime de la chute de l'empire soviétique
Des salles bondées pour suivre
les aventures du petit personnage
Jusqu'en 1991, Moldova-Film a produit plus de 100 films
d'animation. Une grande partie fut d'ailleurs réalisée par des
enfants, élèves de Victoria Barba, au sein du studio Floricica.
Gugutsa se confond ainsi avec l'apparition du cinéma d'animation en Moldavie et l'a accompagné tout au long de la
période faste, jusqu'en 1985. La chute de l'empire soviétique et l'absence de financement public pour le cinéma
en général après l'indépendance du pays ont eu de lourdes conséquences, non seulement sur la production, mais
aussi sur l'état de conservation des films. La projection de
la série de films animés inspirée de Gugutsa n'aura donc
pas lieu en cette année de célébrations officielles.
Le 6 novembre 2011, pourtant, non sans quelques
difficultés techniques, 8 films d'animation avec Gugutsa
ont pu être projetés lors de la première édition du Festival
Anim'est à Chisinau. La plupart des jeunes spectateurs
ont découvert ce personnage à cette occasion.
Les projections de Gugutsa sur grand écran rencontrèrent
un vif succès. Victor Andon, par ailleurs en charge de la direction de salles de cinéma,
raconte que, lors des projections, on pouvait compter jusqu'à 750 entrées
dans une salle prévue pour
500 spectateurs, car il arrivait souvent que deux
enfants s'installent sur un
même siège. Chaque
dimanche, deux séances
étaient proposées, dans
une salle de projection
pour enfants, sorte de hanSpiridon Vangheli est
gar en bois, aujourd'hui
le créateur de la petite figurine.
disparu. Plus tard, une des
Un franco-camerounais incarne le héro
3 salles du cinéma d'État Odéon, dans la capitale, sera nommée
"Gugutsa", réservée aux séances pour les enfants.
Gugutsa animé, c'est aussi ce que propose un chanteur
La série de huit films d'animation d'après les aventures de
français d'origine camerounaise qui vit en Moldavie, MC
Gugutsa est ainsi lancée: suivront Le pupitre de Gugutsa
Gootsa. Il a récemment animé une émission intitulée Gootsa
(1975), Gugutsa facteur (1976), Le cadeau de Gugutsa
Show sur la chaîne pro-communiste NIT et fut candidat (mais
(1980), Gugutsa coiffeur (1980), Gugutsa capitaine de navinon retenu) en 2012 pour représenter la Moldavie au concours
re (1981), La nuit du nouvel An (1983) et Les balayeurs
Eurovision. "L'exotique", comme le nomment les médias moljoyeux (1984). Tous ont une durée moyenne de 9 minutes. À
daves, a adopté le nom et le costume du personnage Gugutsa,
l'exception de La nuit du nouvel An, les films sont d'abord
ainsi qu'un large répertoire de chansons folkloriques et popuréalisés en langue russe puis adaptés en langue roumaine, pour
laires avec lequel il se propose d'animer les mariages moldafavoriser leur circulation sur le territoire soviétique et, avant
ves. Périodiquement, il apparaît dans les articles sulfureux des
tout, pour obtenir l'autorisation du Goskino, Comité d'État au
tabloïds locaux. Une variante de Gugutsa curieusement ignocinéma, l'appareil de contrôle du cinéma officiel soviétique.
rée dans le plan d'actions défini par le gouvernement…
Les films sont empreints de folklore moldave: reproducDiana Raluca Dumitru (Regard sur l'Est)
19
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Les NOUVELLES de ROUMANIE
L’actualité en images
Moscou devrait verser
22 milliards d'euros à Chisinau
Moldavie
Images d’actualité
La facture pour crimes d'occupation
L
Perceuses pour opérer
20
Un scandale a éclaté dans un
hôpital pour enfants de Moldavie, à
Chisinau, une vidéo montrant que le
personnel soignant utilisait des perceuses de bricolage pour opérer les
jeunes patients. La vidéo a été diffusée par la chaîne Euronews. L'affaire
a fait grand bruit mais le directeur de
l'établissement a mis en cause l'authenticité de l'information, accusant
ses médecins de vouloir le discréditer. Les chirurgiens ont maintenu eux
leurs révélations: ''Oui, nous utilisons
ces perceuses depuis des décennies
car nous n'avons jamais pu obtenir
le matériel médical que nous avons
espéré'', a expliqué l'un d'eux.
Le Ministre de la Santé moldave a
été prié de lancer une enquête.
Interrogé par les médias locaux, il a
affirmé que l'hôpital en question avait
reçu du matériel de perçage hospitalier récemment et a tenté de dédramatiser les faits: ''D'un point de vu
médical, si les conditions de stérilisation et de sécurité sont remplies,
n'importe quelle perceuse peut être
utilisée pour donner un mouvement
de rotation au foret qui perce l'os''.
Baisse du leu
Fin août, le cours du leu moldave
a atteint son plus bas niveau depuis
trois ans, face à la monnaie européenne, cotant 17,14 lei pour un
euro, alors qu'il se changeait auparavant, invariablement, entre 15,5 et
15,9 lei. Cette baisse, moins prononcée toutefois, se fait également ressentir face au dollar (12,8), au rouble
(0,38), au leu roumain (3,85) , la hrvina ukrainienne (1,57) et au forint
hongrois.
'historien moldave Veaceslav Stavila a calculé que Moscou devrait payer
22 milliards d'euros à Chisinau en dédommagement des exterminations et
déportations auxquelles l'URSS s'était livrée pendant son occupation de la
Moldavie (1940-1991). 5 milliards seraient dûs pour l'extermination de 54 000
citoyens de Bessarabie sur la ligne de front germano-soviétique pendant la guerre,
5 autres pour la déportation et la répression de 72 500 personnes et 12 milliards pour
l'extermination de 173 700 Moldaves, lors des famines de 1946-1947.
Pour établir ce bilan, l'historien s'est plongé pendant trois ans dans les archives de
la petite république et a basé ses calculs sur le revenu annuel moyen par personne au
moment où ces crimes étaient commis (76 €) et en tenant compte de l'espérance de vie
à l'époque (47 ans en 1937), arrivant à un chiffre de 73 000 € par personne disparue à
verser, en tenant compte de l'inflation depuis.
Il est à noter que deux pays baltes se sont livrés à la même estimation, dès 1992,
une commission arrivant à la somme de 16 milliards d'euros pour la Lituanie et
14,5 milliards d'euros pour la Lettonie.
La somme due par l'actuelle Fédération de Russie -1 % de son PNB annuel - à la
Moldavie, qui représente 4 fois son PNB actuel, se monterait à l'équivalent des livraisons de gaz qu'elle lui fournit pendant 85 ans.
Chisinau verra-t-elle un jour la couleur de ce dédommagement ? Veaceslav Stavila
doute de la détermination du gouvernement moldave mais, pour lui, l'important est que
la société russe prenne conscience des monstruosités commises en son nom et que
Moscou les reconnaisse… tout en espérant que l'énormité de l'addition à payer fasse
réfléchir à deux fois ceux qui voudraient recommencer ces atrocités.
Nouveaux impôts, pont sur le Danube en service, vacances
et vague de chaleur, bénédictions de voitures officialisées,
manifestations d’extrémistes hongrois: c’est l’actualité de l’été.
21
Thèse financée grâce à Internet
O
lga Turcan, jeune doctorante
moldave à Strasbourg, a
récolté 6800 dollars en deux
mois pour finir sa thèse, grâce au "crowdfunding", cette nouvelle méthode de
financement qui consiste à lancer un
appel sur internet pour épauler un projet.
Des étudiants, des retraités, des cousins,
se sont mobilisés pour qu'elle puisse finir
ses études.
Jusqu'alors, la jeune femme de 32 ans
répartissait sa vie entre ses études et des
petits boulots. Aujourd'hui, elle peut se
concentrer pleinement à ses recherches
sur le français et la francophonie en
Moldavie. Finis les emplois de vacataire
à l'université ou de secrétaire.
La chercheuse est épatée par le succès de sa démarche et se dit "touchée,
étonnée et reconnaissante.". Elle entend
bien remercier ses 130 donateurs, qui ne
reverront pas leur argent, par des cartes
postales ou des chocolats moldaves (pour
les plus généreux)...
Parmi ces mécènes, beaucoup "d'étudiants fauchés" qui se sont mobilisés, des
membres de sa famille, des "moldaves
installés en France" comme elle et "des
retraités français" connaissant la
Moldavie.
Timisoreana à la place de Baltica
D
epuis fin mai, les Chisinautes peuvent déguster un demi de
"Timisoareana", celèbre bière roumaine fabriquée depuis 1718 à l'initiative du prince Eugène de Savoie qui avait ouvert à Timisoara la première
brasserie roumaine. Le groupe Efes qui la distribue en Moldavie commercialise également les bières "Chisinau", "Festival", "Kvassica", "Velkopopovicky Kozel",
"Warsteiner", "Grolsch", "Pilsner Urquell", "Miller Genuine Draft", "Efes".
Malheureusement, toutes ces bières ne remplacent pas la célèbre "Baltica", d'origine
russe dont la fabrication a été rapatriée par Moscou, ce qui lui donnait un parfum de
mystère.
Car dans le précipice:
Dacia a battu encore des records de 18 Roumains tués au Montenegro
vente en Europe au second trimestre.
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Société
Evénements
Un programme
SUCEAVA
l
ORADEA
BAIA
MARE
l
ARAD
l
SIBIU
IASI
BACAU
l
BRASOV
l
GALATI
l
TIMISOARA
BUZAU
PITESTI
CRAIOVA
l
l
l
l
TULCEA
l
n
BUCAREST
l
SLOBOZIA
l
CONSTANTA
63 % des enfants
roumains déclarent
qu'ils sont battus
22
à pied d'œuvre en Roumanie, Bulgarie et Moldavie
pour la protection de l'enfance
l
l
l
l
l
TARGU
MURES
ALBA IULIA
PROCOPIL ("Pour l'enfant")
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Environ 63 % des enfants roumains affirment qu'ils sont battus par
leurs parents, 38 % de ceux-ci le
reconnaissant, d'après une enquête
effectuée par l'association "Salvati
Copiii" (Sauvez les enfants) auprès
de 1500 familles réparties entres 60
communes du pays. 18 % indiquent
qu'ils ont été frappés avec une badine, 12 % à l'aide d'une ceinture, les
autres recevant fessées ou gifles… et
20 % des parents trouvent qu'il s'agit
de la meilleure façon de les éduquer,
bien que ces pratiques familiales
soient théoriquement proscrites par la
loi depuis 2004.
Pour les psychologues, ces comportements des adultes
révèlent principalement leur impuissance à gérer les situations parentales.
Les violences faites aux enfants sont
également présentes
à l'école. Verbales
en premier lieu,
86 % des élèves se
faisant houspiller par leurs instituteurs ou professeurs quand ils font
des fautes, 33 % étant injuriés et
montrés du doigt devant leurs camarades.
6 % seraient même battus,
ce pourcentage passant à 14 % dans
le cas des enfants roms.
"Salvati Copiii" insiste sur le fait
que les humiliations subies par les
enfants les marqueront pour la vie et
qu'ils ont de grandes chances de
reproduire ces comportements quand
ils seront eux-mêmes adultes.
Pays particulièrement marqués par la crise et la pauvreté, la Roumanie, la
Moldavie et la Bulgarie bénéficient depuis quelques années d'un programme de
coopération pour les droits de l'enfant, le PROCOPIL. Depuis 2005, il a enregistré des résultats encourageants, comme l'évoquent dans Regard sur l'Est, deux
protagonistes du projet, Marie Laluque et Mariama Diallo.
L
e programme PROCOPIL ("Pour l'enfant" en roumain), est un dispositif de
coopération initié par des acteurs non-gouvernementaux de solidarité internationale et soutenu par le ministère français des Affaires étrangères.
Dynamique collective, ce programme a contribué depuis 2005 à améliorer les
conditions de vie de nombreux enfants en Roumanie, en Bulgarie et en République de
Moldavie, dans un contexte marqué par la pauvreté mais aussi par des discriminations
envers les minorités et les enfants handicapés, des violences et abus à l'encontre d'enfants vivant en situation vulnérable et des cas d'exploitation de mineurs.
Après plusieurs années de forte croissance, la Roumanie et la Bulgarie ont été
durement touchées par la crise financière de 2008. Le contexte économique demeure
aujourd'hui dégradé et ces pays présentent les taux de pauvreté les plus élevés de
l'Union européenne, touchant plus de 20% de la population. La Moldavie demeure,
elle, le pays le plus pauvre d'Europe, avec près d'un quart de la population vivant sous
le seuil de pauvreté. La région est marquée par une instabilité politique qui fragilise la
pérennité des actions entreprises. En Roumanie, la durée de vie des gouvernements est
brève. En Bulgarie, des mouvements de protestation contre la pauvreté ont entraîné la
démission du Premier ministre et la chute du gouvernement en février 2013. Malgré les
vastes réformes auxquelles elle a procédé, la Moldavie, quant à elle, n'a pas échappé à
une grave crise économique et politique depuis 2009.
La crise restreint les politiques de santé et d'éducation
Ces troubles - économiques, financiers et
politiques - ont notamment entraîné la réduction des dépenses publiques consacrées aux
services de santé et à l'éducation, affectant particulièrement le bien-être des enfants. En 2010,
44,6% des enfants de 0-17 ans en Bulgarie et
48,7% en Roumanie vivaient en risque de pauvreté ou d'exclusion sociale. Pourtant, au cours
des dix dernières années, des efforts certains
ont été entrepris dans ces trois pays pour rénover le cadre législatif et instaurer un système
moderne de protection sociale, notamment
dans le domaine de l'enfance.
La Bulgarie s'est dotée en 2000 d'une loi sur la protection de l'enfance, dans laquelle figurent des engagements politiques formels en faveur de la "désinstitutionalisation"
de milliers d'enfants placés dans des établissements publics.
La situation critique de la Roumanie - irrégularités dénoncées des adoptions internationales et plus de 100 000 enfants placés dans des institutions lors des années 1990
- l'a contrainte, suite aux pressions extérieures, à développer en 2004 une loi sur la protection de l'enfance conforme à la Convention des Nations unies relative aux droits de
l'enfant.
La Moldavie a peiné à mettre en œuvre le plan d'action, pourtant détaillé, de la
stratégie nationale pour la protection de l'enfance et de la famille adoptée en 2003. Ces
difficultés ont incité les autorités à démarrer en 2012 des consultations en faveur d'une
nouvelle stratégie qui prendrait mieux en compte le travail interministériel indispensable pour, mener à bien la réforme en cours de désinstitutionalisation des enfants.
Néanmoins, ces progrès d'ordre législatif sont insuffisants
face aux défis réels que doivent relever aujourd'hui les sociétés des trois pays.
Une mortalité infantile toujours triple
Ceux-ci sont en effet confrontés à une mortalité infantile
qui, comparativement à la moyenne européenne (4‰), reste
alarmante: en 2011, ce taux était de 11‰ en Roumanie et en
Bulgarie et de 14‰ en Moldavie. Dans certaines localités, ce
taux atteint même 20‰. Les enfants de ces pays souffrent de
conditions inégales d'accès à l'éducation: l'abandon scolaire
constitue un problème majeur, surtout en milieu rural, principalement en raison des conditions économiques précaires et du
niveau d'éducation des familles, notamment chez les populations roms.
En Roumanie, 4 enfants en décrochage scolaire sur 5 sont
ros. En Moldavie, 13% des enfants roms de 7 à 15 ans ne vont
pas à l'école, contre 6% d'enfants non roms.
Par ailleurs, si le phénomène de ségrégation scolaire des
enfants issus de cette minorité est encore bien réel, les enfants
à besoins éducatifs spéciaux souffrent, eux aussi, d'une inégalité d'accès à l'éducation. En Moldavie, 20% seulement des
enfants handicapés en âge scolaire sont inscrits à l'école.
On note aussi une grande vulnérabilité des enfants délaissés par leurs parents partis à l'étranger: l'attrait économique de
l'Ouest a créé un phénomène grandissant, avec des conséquences graves sur le développement psychosocial des enfants
confiés à la famille élargie ou livrés à eux-mêmes et sans référent adulte. Leur nombre est difficilement quantifiable. En
Roumanie, les estimations font état de 80 000 à 300 000
enfants dont l'un ou les deux parents sont partis à l'étranger.
Enfin, le dispositif de décentralisation prévu dans la
région, solution la plus adaptée pour assurer des services
sociaux de qualité à destination des populations, peine à se
mettre en place et des zones d'ombre subsistent sur la mise en
œuvre des textes juridiques, freinant ainsi l'application des
pratiques locales de bientraitance.
80 projets ont été mis en route
Dans ce contexte, le programme PROCOPIL a permis une
série d'avancées. Coordonné depuis 2005 par Solidarité
Laïque, avec trois réseaux locaux de protection de l'enfance, il
est soutenu par le ministère français des Affaires étrangères et
co-financé depuis 2009 par l'Agence française de développement. Avec la mise en place d'une concertation entre société
civile et pouvoirs publics nationaux et locaux, cet "outil programme" a facilité leur rapprochement, mobilisant quelque
150 acteurs publics et associatifs.
Il a permis tout d'abord la création de nouveaux services
sociaux en faveur de 1200 enfants et 500 familles, à travers
plus de 80 projets liés à la prévention et à la protection.
700 professionnels ont été formés dans les domaines de l'animation socio-éducative, du handicap, de la maltraitance infantile, de l'insertion des jeunes, de l'éducation parentale. Acteurs
devenus incontournables, les plateformes associatives ont
contribué à définir et faire évoluer les politiques publiques, en
trouvant leur place dans les lieux de concertation et de production des législations (groupes de travail, comités, groupes parlementaires).
À ce jour, l'ensemble des pays de l'UE, du Partenariat
oriental et des Balkans ont ratifié la Convention internationale des droits de l'enfant, s'engageant ainsi dans la promotion,
la protection et le respect de leurs droits.
Marie Laluque (Solidarité Laïque)
Mariama Diallo (Ambassade de France en Roumanie)
Au bout du rouleau, un chômeur demande qu'on l'achève
F
in juillet, un chômeur divorcé de 58 ans, en fin de droits, a entrepris une grève de la
faim, car les autorités n'avaient pas répondu à sa demande d'être euthanasié. Il avait
envoyé des courriers au Président, au gouvernement et au parlement, les implorant de
l'aider à mettre fin à ses jours, car il n'avait plus les moyens de vivre. Mircea Florea, de Turda
(judet de Cluj) s'est retrouvé sans travail en 2012, à trois ans de la retraite. Sa femme l'a quitté sur
les entrefaites et il n'a plus d'autre famille. Depuis, malgré ses démarches, il n'a retrouvé aucun
emploi. Ses indemnités de chômage, de 120 euros au départ sont tombées à moins de 50 euros, ce
qui ne lui permet pas de se nourrir, ni plus de se loger. Il a passé l'hiver, particulièrement rigoureux, sans chauffage, usant pratiquement pas d'eau et d'électricité (moins de 5 euros par mois),
mangeant ce qu'il pouvait, tout en cachant sa détresse. Au bout du rouleau, il demande donc qu'on
l'achève, affirmant qu'il "est un homme de parole", qu'il n'a pas particulièrement envie de mourir "mais de travailler". La mairie
de Turda a promis de lui trouver un emploi ou une solution dans les deux jours suivant le début de sa grève de la faim.
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Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Evénements
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CONSTANTA
Pour contrecarrer les déficiences du système éducatif en matière d'éducation sexuelle, une jeune étudiante a décidé de parler elle-même de sexualité aux
adolescents. Les petites vidéos qu'elle propose sur Internet offrent une alternative sûre et moderne dans un pays encore très conservateur sur le sujet.
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Passages à niveau et
routes: Arad sinistré
24
Briser les tabous
du sexe chez les jeunes
Depuis plus d'une dizaine d'années,
l'accès routier nord à Arad est bloqué
une dizaine d'heures par jours au
niveau des passages à niveau des
lignes de chemins de fer menant à la
frontière hongroise (Curtici) et à
Oradea. Des queues interminables de
plusieurs kilomètres se forment. Sur la
ligne Arad-Bucarest, les barrières se
ferment à 74 reprises chaque jour,
entravant pendant trois heures le trafic.
Deux passages aériens sont en construction depuis le début des années
2000, l'un terminé à 85 %, l'autre à
65 %, mais ils restent en l'état, faute de
financement, de volonté politique, malgré les promesses répétées des ministres en visite dans la région, et d'incompétence, les ouvrages se détériorant
même, avec notamment des vols de
matériaux. La situation
n'est pas près de changer, aucune ligne budgétaire n'étant prévue
aux budgets 2014 et
2015.
Cette situation qui
handicape fortement le
développement économique du judet est
aggravée par l'état de
certaines de ses routes,
au premier plan l'axe
départemental reliant
Arad et Ineu qui compte
dans plusieurs secteurs une densité
d'un trou par mètre (photo), dissuadant
les automobilistes de l'emprunter. Fin
juillet, la décision de le réparer avant la
fin de l'année avait été prise, le ministre
des transports promettant l'aide de
l'Etat… mais le Premier ministre a fait
marche arrière, en confiant que ce n'était plus à l'ordre du jour.
A
dolescente, Adriana Radu se rappelle avoir cherché dans des manuels en
français ou en allemand les réponses aux questions qu'elle se posait sur
la sexualité. En roumain, il n'y avait rien. Aujourd'hui, cette jeune étudiante enthousiaste aux cheveux courts de 23 ans a décidé de changer les choses, et
plutôt que de perdre son énergie à faire du lobbying auprès du ministère de
l'Education pour que les programmes scolaires évoluent, elle a lancé un site Internet
(www.sexulvsbarza.ro) afin de parler directement aux adolescents.
"Nous avons voulu quelque chose de dynamique, facilement accessible et non
pas suivre une méthode classique comme des ateliers dans les classes", raconte-telle. Avec l'aide de plusieurs associations et un budget d'à peine 5000 dollars, elle a
réussi à tourner une vingtaine de petites vidéos et créer un site. La puberté, l'homosexualité, le droit des élèves enceintes ou encore la pornographie sont quelques-uns
des thèmes abordés.
Pour être au plus près des préoccupations des adolescents, Adriana Radu s'est
entourée d'une jeune lycéenne de 17 ans. Monica Saulea est en quelque sorte l'agent
infiltré du projet. "Je communique avec mes collègues et envoie des retours à
Adriana, dit-elle. Beaucoup s'éduquent en regardant des films porno, ce qui est une
erreur colossale." Même si les professeurs sont censés répondre à toutes les interrogations de leurs élèves durant une heure dédiée au thème de la sexualité, et que dans
chaque lycée il existe un psychologue abordant ces sujets, le sexe reste une grande
inconnue pour les jeunes Roumains. "En famille, on peut parler d'argent mais pas de
notre corps", confirme Adriana Radu.
Les services existent mais ne sont pas utilisés
Sujet tabou dans une société très
conservatrice, l'éducation sexuelle est quasiment absente du système scolaire roumain.
Une situation qui se traduit par des taux
records d'accouchements de mineures, d'avortements et de maladies sexuelles. La
Roumanie possède, avec plus de 17 000
accouchements de mineures en 2011, l'un
des taux les plus élevés de grossesses parmi
les adolescentes en Europe. Surtout, près de
1500 nourrissons sont abandonnés par an.
Sous le communisme, la question de la
sexualité a été très peu abordée et l'interdiction des avortements n'a pas encouragé à
briser ce tabou.
"A cela s'ajoutait l'aspect très puritain de notre société, explique la sociologue
Raluca Popescu. Il n'y avait pas de rupture entre la sexualité, la famille et l'amour."
Après la révolution, une libéralisation un peu chaotique des méthodes de contraception a eu lieu. Au début des années 90, on a compté jusqu'à trois IVG pour une naissance. Et aujourd'hui encore, l'avortement reste pour les femmes un "moyen de
contraception". "L'Etat a relaxé les lois et développer de nombreux services de planning familial, mais son erreur a été de ne pas avoir investi dans l'éducation sexuelle, soutient Raluca Popescu. Aujourd'hui, ces services restent très peu utilisés."
Jonas Mercier (www.lepetitjournal.com/Bucarest)
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Evénements
Accidents de la route mortels : triste record
S
i le nombre de décès causés par les accidents de la
route dans l'UE ont reculé de 9 % en 2012, s'établissant à 27 721 (- 2 % par rapport à 2011), la
Roumanie fait partie des trois pays où ils ont augmenté (+ 1 %)
avec la Lituanie et le Luxembourg.
Depuis 2001 (54 000 morts,
31 000 en 2010), le chiffre des victimes a chuté de près de 60 % dans
l'ensemble de la communauté,
mais de seulement 17 % en
Roumanie, où on enregistre la
décroissance la plus faible des 28
états membres. La Bulgarie fait
beaucoup mieux que la Roumanie
avec 605 tués en 2012 et une baisse de 40 % depuis 2008.
L'an passé, on a enregistré 3600 tués en France, en Italie
et en Pologne et 2042 en Roumanie (3 fois moins d'habitants
qu'en France, ce qui comparativement donne près de 7000
tués). Si on rapporte le nombre de victimes à la population de
l'UE (510 millions d'habitants avec la Croatie), le nombre de
décès est de 55 par million d'habitants. On obtient les résultats
suivants : 100 morts par million d'habitants en Lituanie, 96 en
Roumanie, la Serbie, la Pologne et la Grèce dépassant les 90
victimes. A l'autre bout de l'échelle, Malte (influence anglaise)
se situe en tête (22 tués), suivie de la Grande Bretagne (28), et
de la Norvège… France (55).
Le rapport européen qui a établi ces données, chiffre aussi à
313 000 le nombre de blessés graves en 2012 dans les 27 pays de
l'UE (-11 000 par rapport à 2011 et
-128 000 depuis 2001). En
Roumanie, on a enregistré 8860
blessés graves… soit 3000 de plus
que dix ans auparavant! L'objectif
de l'UE est d'arriver à 15 500 tués en 2020, soit une baisse
annuelle de 1600 victimes. Dans la dernière décennie, celle-ci
atteignait parfois 3-4000, mais aussi plafonnait à moins de
mille. Les causes du bilan désastreux de la Roumanie sont
proverbiales: mauvais état des routes, des véhicules, indiscipline et mauvaise formation des conducteurs, détournement
des fonds de rénovation du réseau routier.
Ivresse et vitesse
à Chisinau: 8 jeunes tués
C
Cyclistes et passagers ivres
onduite par un jeune de 17 ans, sans permis, en état d'ébriété, une voiture lancée à près de 200 km a percuté un
arbre sur un boulevard de Chisinau, le 14 août. Les sept
passagers et le conducteur, 5 garçons et 3 filles, ont été tués. Le groupe revenait d'une tournée dans les boites de nuit où il avait fêté le
proche départ de l'un d'entre eux en Russie où il travaillait, un autre
retournant en Italie.
Le conducteur avait reçu sa Mégane Renault en cadeau de son
père, émigré en France. En 7 mois, la Moldavie a enregistré 1185
accidents qui se sont soldés par 131 morts et 1453 blessés.
L
es aménagements du code de la route, entrés
en vigueur le 8 août, concernent surtout les
cyclistes et motocyclistes qui n'ont plus le
droit de transporter des passagers ivres sur leur portebagage, doivent posséder des papiers en règle, ne pas
gêner la circulation en serrant le bord de la chaussée, circuler sur une seule file et descendre de leur véhicule
quand ils traversent la route sur un passage piétonnier.
Quand aux automobilistes, s'ils possèdent le permis B,
BE, C ou CE, ils ont désormais aussi le droit de conduire… des tracteurs.
Deux escrocs se font leur "huile"
sur le dos de l'UE, de l'Etat et des pauvres
L
e parquet anti-corruption (DNA) a fait procéder à l'arrestation d'Aurel Pana (notre
photo), directeur adjoint de l'Agence de Paiement et d'intervention de l'Agriculture
(APIA) et de Mugur George Voinea, directeur d'une société commerciale, pour trafic
d'influence, corruption et prise d'intérêt illégale au détriment de l'UE. Les deux hommes sont
membres du Parti Conservateur, créé par le magnat de la presse Dinu Voiculescu. Le premier en
est le secrétaire exécutif, le second des relations diplomatiques.
De par sa fonction, Aurel Pana avait la haute main pour attribuer des fonds européens d'un
montant de 16 millions d'euros dans la cadre du programme PEAD 2013, destiné à venir en aide
aux démunis en accordant des subventions sur les produits alimentaires, afin de les rendre moins
chers. L'UE prenait en charge le montant de la ristourne accordée ainsi que le prix du transport
des denrées.
Les deux hommes se sont immédiatement mis d'accord pour trafiquer l'appel d'offre portant sur la fourniture d'huile, écartant
d'emblée les autres postulants. Voina avait justement un stock d’huile disponible. Moyennant une commission de 10 %
(1,2 millions d'euros), Pana lui a attribué le contrat. L'huile "pour les pauvres" s'est ainsi retrouvée dans les rayons de supermarchés roumains… où le litre était vendu à un prix supérieur au marché, nécessitant une nouvelle subvention, d'Etat celle là, pour le
ramener à un prix concurrentiel. D'après la DNA, il n'a pas fallu plus de cinq secondes aux deux escrocs pour dire "top là"… et se
partager 4 à 5 millions d'euros de commissions sur le dos de l'UE et de l'état roumain.
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Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La troisième fille
du roi Michel arrêtée aux USA
Evénements
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SLOBOZIA
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CALARASI
Gratuité
des bus à Lugoj
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Faits divers
A la recherche des tableaux volés, perdus… et sans-doute brûlés
Le vol du siècle toujours plein de mystères
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BACAU
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Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Le maire de cette petite ville de
46 000 habitants située dans l'ouest
du pays a mis en place de la gratuité
des transports en commun à partir du
1er juillet. Il s'agit d'une première en
Roumanie. Un billet de bus coûte
aujourd'hui 60 bani (environ 10 centimes d'euro), mais l'organisation des
trajets est chaotique et les horaires
peu fiables. "Nous avons acheté et
installé dix stations, nous avons également créé une grille d'horaires et
des trajets", a indiqué le maire,
Francisc Boldea, qui compte encore
monter cinq nouvelles stations.
Bucarest du haut de
sa plus grande tour
La tour Sky Tower, le plus haut
immeuble de Roumanie avec 37
étages et 137 mètres, située dans le
nord de Bucarest, ouvre ses portes
au public depuis le 9 août jusqu'à fin
septembre. Elle permet d'avoir une
vue sur toute la capitale, depuis son
dernier niveau. Le bâtiment a été
construit à la vitesse record de cinq
étages par jours. Il propose 41 200
m2 de bureaux en location.
Bakchich inopérant
Surpris par un policier alors qu'il
dérobait une cinquantaine de litres
de diésel dans un dépôt de locomotives de la gare de triage de Dej, un
conducteur de train a tenté d'acheter
son silence en proposant de lui verser 600 euros. Une pratique qui marche habituellement. Le policier a joué
le jeu, tout en prévenant la Direction
Nationale Anti-Corruption de Cluj, qui
a monté une souricière et a pu le
prendre en flagrant délit.
T
roisième des cinq filles du Roi Michel et de sa femme Ana, la princesse Irina
(60 ans), cinquième dans l'ordre de succession royale roumain, a été arrêtée
par la police fédérale américaine le 15 août dans l'Oregon où elle vit avec
son mari, John Walker (67 ans). Le couple (notre photo) est accusé, en compagnie de
12 autres personnes, d'avoir organisé dans sa ferme, depuis un an, une dizaine de combats de coqs, formellement interdits aux USA, qui lui rapportait chaque jour 2000 dollars. Plaidant non coupable, il a été remis en liberté le surlendemain et sera jugé mioctobre. Mais le procureur jugeant que la nationalité suisse de la princesse pourrait lui
permettre de se soustraire à la
justice américaine, il lui a
confisqué son passeport, ainsi
qu'à son mari, leur interdisant
de quitter le comté où ils
habitent, sauf pour aller faire
des courses de voisinage… et
leur a fait poser un bracelet
électronique.
Le couple encourt une
peine de cinq ans de prison et
une amende de 250 000 dollars, pour organisation de
jeux illégaux et cruauté
envers les animaux, ce qui l'obligerait à vendre sa propriété estimée à 175 000 dollars.
Née à Lausane, en Suisse, la princesse Irina a vécu une grande partie de sa vie aux
USA. Elle s'était mariée en 1983 dans l'Arizona avec John Kruger, dont elle divorcera
en 2003, le couple ayant eu deux enfants, Mihai né en 1985 et Angelica, née en 1986.
Elle s'est remariée en 2007 avec John Walker, un ancien adjoint d'un shériff.
22 000 euros par mois pour l'ancien souverain
L
e Roi Michel dispose d'un revenu mensuel de 22 000 euros en tant que propriétaire louant les châteaux de Peles et son annexe de Pelisor au ministère
de la Culture, ce qui lui rapporte 12 000 euros. Dans la même vallée de la
Prahova, l'ancien souverain met en location deux hôtels, Stavilar et l'Hôtel Bastion
ainsi que la pension Cutitul de Argint, ce qui lui fait une autre rentrée de 6000 €.
Ces revenus sont imposables et le Roi Michel doit aussi payer l'entretien des
demeures royales qui appartiennent à l'Etat mais dont il a la jouissance, le Palais
Elisabeth à Bucarest et le château de Saversin près d'Arad, transformé aussi en hôtel. Il
perçoit une pension de retraite de 200 € et une indemnisation de 900 € comme ancien
chef de l'Etat, complétées par une rente de 450 € en tant que membre de droit de
l'Académie roumaine.
Premier parc scientifique roumain à Cluj
C
luj-Napoca pourrait héberger
le premier parc scientifique
roumain. Sous la subordination du Conseil départemental de Cluj, le
projet, qui espère être financé par des
fonds européens, pourrait être lancé à
partir de 2015. Tetapolis, tel sera son
nom. Ce parc sera composé de bâtiments
hébergeant des laboratoires de recherches
et des centres d'affaires. Selon Viorel
Gavrea, directeur de Tetarom, la société
qui administrera le parc Tetapolis, "le
projet est déjà prêt, on attend seulement
l'ouverture des lignes de financement
européens pour le déposer". La somme
dont a besoin l'Association des parcs
scientifiques - dont Tetarom fait partie s'élève à 50 millions d'euros. Le Conseil
départemental ainsi que l'université de
Cluj ont aussi été mis à contribution. Si
les financements sont accordés, le parc
sera construit à partir de 2015.
Le procès de six Roumains, accusés d'un des plus spectaculaires vols de tableaux du siècle, a été reporté. L'audience,
qui devait débuter le mardi 13 août à Bucarest, a été suspendue jusqu'au 10 septembre. Les six suspects sont accusés d'avoir dérobé sept œuvres au Kunsthal de Rotterdam, dont des Monet, Picasso et Gauguin, la mère du chef du gang les ayant
ensuite brûlés pour faire disparaître toute trace compromettante. Ce butin est évalué à 18 millions d'euros pour lequel, les
malfaiteurs risquent vingt ans de prison. Avant la suspension du procès, le principal accusé a proposé un marché: rendre
cinq tableaux en échange d'une peine de prison aux Pays-Bas où les peines sont plus faibles, remettant en cause la version
de leur incinération… mais sans pouvoir prouver qu'il en dispose bel et bien.
C
'est le vol de tableaux le plus étrange du XXIe siècle. L'opération tenait de la comédie hollywoodienne, mais la fin s'est révélée tragique pour les
œuvres dérobées. Le 12 octobre 2012, Radu Dogaru et Adrian
Pricop, deux jeunes Roumains de passage à Rotterdam, se
mettent en tête de braquer un musée. Ils n'en connaissent
aucun et font alors appel au système de navigation de leur voiture. Ils composent "musées à Rotterdam" et le véhicule les
emmène au Musée d'histoire naturelle. Ils y entrent mais se
rendent vite compte qu'il sera difficile de vendre des animaux
naturalisés...
En sortant, ils remarquent une affiche annonçant une
exposition de grands maîtres au Musée Kunsthal. Ils font un
repérage rapide dans l'établissement et, le lendemain, décident
de passer à l'action. Les lacunes du système de sécurité du
musée étaient nombreuses.
Les tableaux étaient accrochés au mur à l'aide de simples
crochets et une porte non sécurisée située derrière le musée
pouvait facilement être ouverte de l'extérieur. Dans la nuit du
15 octobre, les braqueurs s'y introduisent en forçant cette
porte. Le choix des tableaux fut aléatoire: les toiles ne devaient
pas dépasser 50 cm pour rentrer dans les petits sacs des
voleurs. Cibles du vol: sept tableaux signés Pablo Picasso,
Henri Matisse, Claude Monet, Paul Gauguin, Meyer de Haan
et Lucian Freud, estimés par les enquêteurs à 18 millions d'euros. Des noms pourtant inconnus aux deux jeunes issus de la
Roumanie profonde.
Les tableaux ont traversé l'Europe jusqu'en Roumanie,
cachés dans deux coussins dans le coffre d'une voiture. Mais
entre-temps, la police néerlandaise avait mis les deux
Roumains sur la liste des suspects après avoir visionné les
images vidéo du musée les jours précédant le vol. L'enquête
est aussitôt lancée en Roumanie. Les voleurs et leurs complices n'arrivent pas à trouver un client et déposent les tableaux
chez la mère de Radu Dogaru dans le village Carcalia, situé
dans le delta du Danube.
La vieille paysanne n'y comprend rien et les met dans une
valise qu'elle enterre dans le cimetière du village. Les procureurs roumains lui rendent une première visite au mois de
février, elle nie tout mais a peur et décide de brûler les tableaux
dans la cheminée de sa maison. "J'ai mis le colis dans lequel
étaient les tableaux dans le poêle, j'ai mis quelques bûches,
des pantoufles, des chaussons en caoutchouc que j'avais portés et j'ai attendu qu'ils brûlent complètement", a-t-elle raconté à la fin de l'enquête.
Une histoire portée bientôt à l’écran ?
Six Roumains ont été inculpés par le parquet de Bucarest
dans cette affaire, dont un est en fuite. Le procès de ces voleurs
atypiques devait débuter le 13 août, mais leur histoire suscite
déjà l'intérêt de plusieurs producteurs de films qui envisagent
de porter leur histoire à l'écran. "La rapidité du vol, le fait que
les inculpés sont issus d'une communauté isolée sont des éléments qui donneront une couleur spécifique à une histoire universelle", affirme le producteur roumain Tudor Giurgiu, qui
négocie déjà le futur film avec des coproducteurs britanniques,
néerlandais et américains.
Mirel Bran (Le Monde)
La bonne moldave et le curé italien
P
endant douze ans, Valentina (notre photo), a été la bonne dévouée du curé de la
paroisse de Lumezzane, près de Brescia, au nord de l'Italie, Don Giulio Gatteri. La
moldave a veillé sur lui, jusqu'à son décès des suites d'une longue maladie à l'âge
de 74 ans, en avril dernier. Pour la remercier, le prêtre en a fait son héritière exclusive, lui
donnant toute sa fortune, soir 800 000 euros, lui assurant que tout était en ordre quelques
jours avant sa mort. Mais certains paroissiens ne l'entendent pas de cette oreille. Ils suspectent leur ancien curé d'avoir mis dans sa poche l'argent destiné à restaurer l'église, provenant
notamment de leurs dons. L'administrateur de la paroisse a demandé à la justice de mettre
sous séquestre tous ses biens afin de faire la lumière sur cet héritage, notamment les 320 000
euros destinés aux travaux de l'église et qu'il avait fait transférer sur son compte personnel, six jours avant son décès.
Valentina s'est montrée outrée de ses soupçons, a saisi le Vatican pour qu'il enquête, affirmant qu'elle a été sidérée en apprenant les intentions de son bienfaiteur, les découvrant à la lecture du testament, et qu'elle aurait préféré donner tout son argent pour
qu'il guérisse. Et afin de couper court aux insinuations de ceux qui la voyaient retourner vite en Moldavie, son pactole sous le bras,
elle assiste tous les jours à la messe dans l'église "San Sebastiano" de la commune.
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Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Vie quotidienne
Vins roumains:
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BUCAREST
CONSTANTA
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Et un verre de sec …
La consommation de vins en
Roumanie semble se raffiner lentement mais sûrement. Laurentiu
Achim Avram, président de la
Fédération des sommeliers de
Roumanie, se dit optimiste. Là preuve, il à récemment lancé une Web
TV spécialement dédiée aux vins et
aux arts de la table: savorhd.tv.
28
on trouve des crûs fantastiques et d'autres exécrables
pour le meilleur et pour le pire
CHISINAU
l
BRASOV
Dans un périmètre très restreint
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Regard : Comment les habitudes
de consommation du vin évoluentelles ?
Laurentiu Achim Avram : Même en
ville, la plupart des gens ne sont pas
éduqués à boire du vin. Néanmoins,
ils se mettent à boire du vin en bouteille, c'est déjà pas mal... Au-delà
des habitudes, c'est surtout le goût
qui a commencé à changer chez certains consommateurs. Même si
après près d'un siècle à boire du vin
sucré, il n'est pas simple de s'arrêter.
Chez lez amateurs, les premiers vins
secs ont déjà du succès.
Aujourd'hui, 80% des consommateurs avisés boivent des vins secs
roumains qu'ils découvrent en allant
au restaurant, le plus souvent. Mais
pour que cela devienne un marché
de masse, il faut du temps et du
marketing.
On observe déjà une légère évolution dans les supermarchés, où de
plus en plus de clients se tournent
vers des vins de milieu de gamme,
demi-doux ou demi-secs. Et lorsqu'ils
voient des bouteilles roumaines aux
étiquettes différentes, parfois ils
essaient. Par contre, lorsqu'ils achètent un vin, c'est souvent pour le
boire quelques jours après ou pour
l'offrir. Rares sont les Roumains qui
cherchent à se constituer leur propre
réserve.
(suite page 30)
Avec plus de quatre millions d'hectolitres de blanc, rouge ou rosé produits en
2011, 200 000 hectares consacrés à la vigne et une tradition viticole millénaire, la
Roumanie fait partie des dix pays au monde qui comptent en matière de vin. Des
dizaines de cépages autochtones ou importés permettent d'en produire plus de 400
types différents. Depuis dix ans, le marché vinicole roumain est en pleine restructuration. Tandis que les vins haut de gamme se construisent un bel avenir, la très
grande majorité de la production subit le revers de la médaille. En période de crise,
les vins roumains "moyens", totalement dépendants des logiques commerciales
actuelles, risquent de devenir de moins en moins bons.
L
a crise s'aggrave chez les producteurs roumains de vins bon marché: la production et la consommation de masse sont en chute libre, du fait de la récession et des conditions climatiques défavorables des dernières années. Le vin
de table distribué en vrac, dont les coûts de production ont considérablement augmenté,
est devenu de moins en moins rentable. Dans un marché européen ouvert, la concurrence entre les producteurs locaux fait rage et laisse place à des dérives, comme l'importation de vins frelatés, qui mettent en danger la réputation des appellations.
La grande distribution est un acteur incontournable pour le vin de table. En ville, le
consommateur moyen achète au supermarché du vin doux ou demi-doux, souvent "bas
de gamme" ou "entrée de gamme". La grande distribution assure ainsi la vente de la
majeure partie de la production déclarée. En Roumanie, le passage par un négociant,
étape habituellement primordiale des ventes et souvent gage de contrôle qualité, est le
maillon manquant entre le producteur et le distributeur pour les vins de qualité moyenne. Ainsi, le vin en vrac destiné à être mis en bouteille puis distribué passe le plus souvent par de simples grossistes.
Le goût tenace des Roumains pour le vin doux reste un obstacle
A l'opposé, on assiste au développement d'un marché de vins "premium" - secs pour
la plupart - qui a pris le risque d'être en rupture avec la tradition roumaine très attachée
aux vins doux. Pari gagné pour ces producteurs locaux (une vingtaine parmi la centaine
de producteurs roumains), qui ont misé sur le renouvellement de leurs vignobles. Selon
Cristian Preotu, directeur associé de la société Le Manoir, distributeur de vins haut de
gamme à Bucarest, ce nouveau marché en Roumanie ne peut que progresser. "Les bons
producteurs améliorent la qualité de leurs vins tous les ans, parce qu'ils ont toujours
plus de demandes, quels que soient les prix qu'ils fixent", affirme-t-il. Si cette niche ne
représente aujourd'hui qu'entre 5 et 10% du marché, les producteurs bénéficient d'un
phénomène que l'on retrouve dans tous les grands pays producteurs: la préférence des
consommateurs pour les vins nationaux ou régionaux. Malgré cet avantage considérable
face aux vins importés, le goût tenace des Roumains pour le vin doux reste un obstacle
à une reconversion générale.
En ce qui concerne ces vins haut de gamme, ce sont souvent les producteurs euxmêmes qui distribuent leurs produits auprès des grandes et moyennes surfaces (GMS) et
auprès des cafés, hôtels et restaurants (CHR). C'est par exemple le cas des plus anciens
et plus réputés producteurs de vins de qualité de Roumanie, comme les sociétés d'exploitation Halewood ou Serve, établies depuis le début des années 1990. Mihaela Tyrel
de Poix, patronne de Serve, explique que le métier de négociant n'a pas encore sa place
en Roumanie pour des raisons structurelles et historiques: "Les unités de production qui
se sont développées intègrent toute la chaîne, jusqu'au produit fini: marketing, vente,
parfois même distribution. Dans le négoce, on a besoin de fournisseurs fiables, ce qui n
'était pas le cas au départ, avant 2003, avec les anciennes fermes d'Etat".
L'apparition des GMS en 1995, soutenue par des investissements étrangers, a
posé les bases d'une consommation différente, plus moderne (l'achat de vins mis
en bouteille, par exemple). D'ailleurs, parmi les nouveaux producteurs dont fait partie
Serve, nombreux sont ceux qui sont venus de l'étranger avec
leurs œnologues pour renouveler l'offre du vin roumain.
Les vins "premium" ont du mal
à faire leur place dans les caddies
Mais dans l'état actuel de la distribution du vin, Mihaela
Tyrel de Poix ne souhaite pas voir la grande distribution prendre plus d'importance: "Du fait de prix et des marges pratiquées par les GMS, les relations sont en général directes entre
le producteur et le distributeur. Personnellement, j'apprécierais que les GMS ne fassent pas plus de 50% des ventes des
vins, que les CHR en fassent entre 30 et 40%, et que le reste
représente de la vente directe. Internet inclus".
Lorsqu'on évoque la crise économique, la dirigeante de
Serve confirme que ses produits haut de gamme ne sont pas
touchés. Mais, malgré les efforts des bons producteurs pour
améliorer le rapport qualité-prix, les vins "premium" ont du
mal à faire leur place dans les caddies des Roumains.
Cela ne préoccupe pas pour autant Mme Tyrel de Poix:
"Je crois que l'offre de vin de qualité correspond à la demande du marché, mais elle est trop récente, elle n'a commencé à
se développer que depuis trois, quatre ans seulement, et n'a
atteint pour l'instant que le segment CHR. Lorsque les grands
investissements de modernisation des caves et des vignobles
seront terminés, le processus se déroulera naturellement (l'état où se trouvaient les vignobles roumains a obligé les entrepreneurs privés à renouveler la grande majorité des vignes, ce
qui a retardé la sortie des premières bouteilles, ndlr).”
Elle pense même que le rapport entre les vins de table et
les vins de qualité devrait s'inverser un jour: "Désormais, les
moyens existent pour que la Roumanie pousse sa production
de vin vers le haut (...). Les habitudes de consommation sont
déjà en train de changer, c'est plutôt l'adaptation du rapport
qualité-prix des vins roumains à un niveau européen qui augmentera et que le consommateur deviendra de plus en plus
exigeant". Encore faut-il que la grande distribution s'adapte,
tout en composant avec la crise qui ne joue pas en faveur d'une
démocratisation du bon vin.
Les appellations d'origine
contrôlée ne sont pas toujours fiables
En pratique, établir le rapport qualité-prix des vins roumains s'avère souvent compliqué. Certes, quelques règles
existent pour permettre au consommateur de s'y retrouver,
comme les appellations d'origine contrôlée. Mais ce type de
critère n'est pas toujours fiable en Roumanie, comme l'indique
Cristian Preotu: "A la différence de la France, ce sont les producteurs qui font eux-mêmes leur réputation, et non pas les
régions. Dans un périmètre très restreint, on trouve des vins
fantastiques et des vins exécrables".
Aux éléments objectifs (coût de revient, concurrence et
préférences des consommateurs) s'ajoute la notion subjective,
mais primordiale,
de prix psychologique. Celle-ci
est généralement
fonction de la
popularité du vin
concerné. Sur le
marché naissant
des vins de qualité roumains, la
part de psychologie dans le choix
du vin se manifesterait plutôt en
faveur des habiLe comte corse Tyrel de Poix a lancé
tudes du consomla gamme réputée des vins du chevalier
(Vinul Cavalerului), dont le consommateur
mateur, au détriest assuré de la régularité de la qualité.
ment
de
la
recherche de la bonne affaire. "Le rapport qualité-prix des
vins roumains n'est généralement pas bon, en particulier lorsqu'ils sont vendus en Roumanie. (...) Dans certains supermarchés allemands par exemple, on trouve des vins roumains
"premium" vendus 40% moins cher que le prix auquel les distributeurs roumains les achètent". ajoute Cristian Preotu. Ce
phénomène paradoxal à l'exportation pourrait s'expliquer par
le faible niveau d'éducation du consommateur roumain face au
produit.
Les amateurs de vin
se tournent vers la bière moins chère
Globalement, si les professionnels de la distribution et de
la production de vins haut de gamme se réjouissent, le contexte actuel a toutefois de quoi inquiéter l'ensemble de la filière.
Selon une source proche de la chaire de viticulture et d'œnologie, la vente au détail assurée par les supermarchés reflète la
diminution constante du pouvoir d'achat et la pression des distributeurs pour faire baisser les prix.
"Les vins haut de gamme sont considérés comme hors de
prix, y compris par les connaisseurs. Ces vins de niche ne sont
que la vitrine de ce que ce pays est capable de produire. Mais
la réalité, c'est que les consommateurs dépendants de leur
pouvoir d'achat constamment en baisse abandonnent le vin
pour la bière pas chère, ou se tournent vers des vins toujours
moins chers et plus mauvais. (...) Si l'industrie vinicole roumaine veut se construire un véritable avenir, elle doit d'abord
soigner ses vins d'entrée de gamme vendus sous des appellations d'origine contrôlée roumaines. Dans ce secteur, la
concurrence féroce mène à de graves dérives, notamment l'afflux de vins pas chers et frelatés en provenance de pays de
l'UE (l'Espagne et l'Italie sont par exemple capables de vendre des vins à 30 centimes d'euros le litre, ndlr) qui parviennent
à être vendus en tant que vins roumains de milieu de gamme."
François Gaillard
29
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Environnement
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BUCAREST
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(suite de la page 28)
30
La frénésie de centrales
hydroélectriques menace
les Carpates, selon le WWF
Quelle est la place du bon vin
dans la gastronomie roumaine ?
Il faut séparer le marché en
deux catégories de consommateurs: ceux qui achètent leur vin en
grande surface pour le boire à la
maison, et ceux qui boiront du vin
au restaurant ou qui l'achètent
chez des spécialistes. En cuisine,
les Roumains ont le même problème de perception culturelle qu'avec
le vin, ils ont du mal à changer.
Pour ceux qui vont au restaurant,
c'est différent, car ils y vont parfois
pour essayer quelque chose de
nouveau, et les cartes proposent
plutôt des vins secs ou demi-secs.
Plus la gastronomie s'orientera
vers les standards internationaux,
plus les consommateurs de vins se
tourneront vers la qualité.
Quels nouveaux concepts de
vente pourraient soutenir cette
évolution ?
La mode des vins au verre dans
les cafés, les hôtels et les restaurants peut déjà agrandir le microcosme des consommateurs avisés.
A ma connaissance, il existe déjà
une douzaine de bars à vins à
Bucarest et en Roumanie, mais
d'ici cinq ans, cela pourrait devenir
un vrai phénomène de société,
comme l'œno-tourisme pour les
vins de qualité. On pourra alors
voir de plus en plus de gens désireux de se constituer une cave, qui
iront directement chez les producteurs, voire chez des cavistes a
posteriori, et non plus au supermarché. Déjà de nos jours, les
vrais amateurs de vins en
Roumanie commandent leurs bouteilles par Internet.
Propos recueillis
par François Gaillard
D
ix ans après la signature d'une convention pour la protection des Carpates,
des milliers de projets de centrales hydroélectriques menacent la faune et la
flore de cet ensemble montagneux d'Europe de l'Est, a mis en garde le Fonds
mondial pour la nature (WWF). "La construction planifiée de milliers de centrales
hydroélectriques à travers les montagnes des Carpates représente une menace immédiate pour des centaines de torrents et de rivières", ainsi que pour la faune et la flore, souligne l'ONG de défense de l'environnement dans un communiqué.
"Le risque est particulièrement élevé en Ukraine et en Roumanie" où plus de 430
microcentrales hydroélectriques sont en cours de planification ou de construction, dont
plus d'un quart dans ou près de zones protégées. Cette frénésie, encouragée par de juteux
certificats pour l'énergie dite "verte", a suscité de nombreuses polémiques.
Fin 2011, les images d'excavateurs labourant le lit de torrents situés dans une zone
protégée Natura 2000 - les monts Fagaras, dans les Carpates du Sud - avaient fait scandale. Mais depuis, une cinquantaine de ces microcentrales hydroélectriques ont "envahi"
ce site, "causant la destruction de torrents et d'espèces" dénonce le WWF qui pointe également du doigt les projets d'infrastructures de transports régionaux. "Cette fragmentation de l'habitat est inquiétante pour le futur des ours et des grands carnivores", indique
l'ONG. En Roumanie, un projet d'autoroute entre Deva et Lugoj risque ainsi de "couper
des corridors cruciaux de déplacement pour les ours", selon le WWF.
Sept pays - Bulgarie, Hongrie, Pologne, République Tchèque, Roumanie, Serbie et
Slovaquie - ont signé il y a dix ans une convention pour la protection des Carpates, massif unique qui abrite parmi les plus importantes populations d'ours, de loups et de lynx
en Europe. Cette convention a permis de dynamiser la coopération entre pays, avec
notamment pour résultat des progrès sur la gestion durable des forêts, selon le WWF.
Les Anglais au secours
des ours et loups des Apuseni
P
rotéger les ours bruns et les
loups des monts Apuseni, tel est
le but d'un projet anglais qui
sera financé en partie par le programme
Life +, représentant le fonds pour l'environnement de l'UE. "Life Connect
Carpathian" va intervenir pour la restaura-
tion et la conservation des habitats naturels
en danger et pour la promotion d'une gestion adéquate de la zone.
Cette proposition a été sélectionnée
par la Commission européenne parmi 1159
autres - à noter qu'aucun projet roumain ne
s'est présenté.
Futurs professeurs tricheurs
C
inquante trois candidats à la titularisation de professeurs ont été exclus de
l'examen pour tentative de fraude et perdent leur droit d'enseigner, même
comme remplaçant, pour l'année qui commence. Les tricheries les plus nombreuses ont été enregistrées dans les judets de Mehedinti (Turnu Severin) et Constantsa.
En 2012, 40 candidats, enseignant déjà, avaient été éliminés pour ce motif. L'exemple
leur vient d'en haut, puisque le Premier ministre Victor Ponta lui-même est fortement
soupçonné d'avoir plagié sa thèse de doctorat, soutenue avec l'aide d'Adrian Nastase.
Indulgences
T
rois lycéennes de Bacau, élèves d'un établissement de formation dans les
métiers de la santé, ont été arrêtées pour avoir tenté de remettre un bakchich
de 50 euros aux professeurs devant leur faire passer un examen. Elles avaient
détourné l'argent collecté auprès de leurs camarades pour organiser le repas de fin d'année. Pour leur défense, elles ont expliqué que c’était la tradition...
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Le taux de réussite
au baccalauréat s'est redressé
Enseignement
L
e ministre de l'Education Remus Pricopie a annoncé que le taux de réussite au baccalauréat 2013 s'élevait à 55,4%, soit 11 points de plus que l'an passé.
Plus précisément, le taux de réussite des candidats inscrits en
classe de Terminale cette année atteint 62,32%.
Depuis deux ans, les
taux de réussite au
Baccalauréat sont historiquement bas en Roumanie
(45,7% en 2011 et 44,4%
en 2012), alors qu'en
2009, il était encore de 80
%. Le ministre a expliqué
les "meilleurs" résultats de
cette année par le fait que
les sujets ont été différenciés selon les filières, mais
aussi, sans qu'on voit trop
le rapport, par le nombre
plus faible d'inscrits à
l'examen (188 000 candidats cette année contre
200 000 l'an dernier).
Depuis 2011, le ministère de l'Education a mis en place
plusieurs méthodes de contrôle draconiennes pour surveiller
les épreuves, dont des caméras, ce qui a fait chuter le taux de
réussite de manière drastique. Mais cette année encore, des
soupçons de fraude ont marqué le début des épreuves, notamment au lycée Dimitrie Bolintineanu de Bucarest. Alors que la
directrice de l'établissement a été mise en détention préventive, 37 enseignants et plus d'une centaine d'élèves sont soupçonnés de corruption. A Târgu Jiu, trois tricheurs ont été évacués vers l'hôpital pour qu'on puisse leur extraire les mini-cassettes pré-enregistrées qu'ils avaient introduites dans leur
oreille et qu'ils n'arrivaient plus à ressortir.
La baisse des taux de réussite au bac a des effets concrets
sur les inscriptions en université, le nombre d'étudiants étant
passé de 891 000 en 2009 à 600 000 l'an passé et ne devrait pas
dépasser les 550 000 en cette rentrée. Cela se traduit à une
chute des droits d'inscription, estimée à 200 millions d'euros
cumulés depuis 2008, que
n'ont pas compensé l'augmentation des différentes
taxes dans les universités
privées (600 euros à Spiru
Haret ou aussi à Dimitrie
Cantemir de Bucarest) ou
leur instauration dans celles d'état. A noter que le
laxisme de l'ancienne version du bac - certains candidats achetant leur diplôme ou versant des bakchichs aux examinateurs pèse toujours lourdement
sur la crédibilité de l'enseignement roumain. Ainsi,
aucune université roumaine ne figure dans les 500 premiers meilleurs établissements du
monde, selon le classement de "QS World University
Rankings", qui fait autorité en la matière.
Moldavie : 68 % de réussite
En Moldavie, avec un certain retard sur sa voisine, le
taux de réussite au bac est en baisse et ne flirte plus avec les
scores électoraux du Parti communiste d'autrefois. De 92 % en
2011, puis 88% en 2012, il est passé à 68% cette année, 19 000
candidats sur 28 000 ayant réussi l'épreuve. Les 8800 recalés
ont le droit de repasser l'examen dans les trois années à venir.
Le roumain comme langue
officielle communale en Ukraine
Les échecs à l'école pour
se rapprocher en Moldavie
D
e chaque côté du fleuve Nistru (Dniestr)
qui sépare leur pays en deux entités
(République de Moldavie et province
sécessionniste de Transnistrie), les élèves moldaves
vont pouvoir apprendre les échecs à l'école, dès cet
automne, avec des professeurs qualifiés. Ce projet sur
3 ans entre dans le cadre d'un programme de
10,6 millions d'euros, mis sur pied avec l'UE qui le
finance à hauteur de 9,5 millions d'euros, les Nations
Unies fournissant le reste. Son objectif est de rapprocher les enfants des deux rives, en leur donnant des
thèmes d'intérêt à partager et en leur permettant de
participer à des tournois communs, les échecs étant
une discipline reine dans la région.
S
ituée en territoire ukrainien, près de la frontière avec la
Roumanie, la commune de Dimca, annexée par l'URSS au
lendemain de la Seconde Guerre mondiale, comme toute la
Bucovine du nord, a décidé d'adopter le roumain comme langue locale officielle. Les conseillers municipaux ont voté cette décision à l'unanimité et le maire, Mihai Sârbu, a précisé que le roumain serait dorénavant utilisé dans les actes communaux, au côté de la langue d'Etat.
Dimca est connu pour avoir donné des écrivains de renom, dont Olga
Kobîleanska, native de Gura Humorului, ou le professeur de roumain
et poète Gheorghe Mihailic, persécuté sous le communisme pour avoir
défendu sa langue maternelle. Illustration du conflit linguistique qui
perdure dans la région, la tête d'un buste d'Eminescu, décapité au mois
de juin dans la ville proche de Hliboca, a été retrouvée au fond du lac
de la commune.
31
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
En Hongrie, lourdes
condamnations contre
des auteurs de crimes anti-Roms
Minorités
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TULCEA
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L'émigration
qui rend fou furieux
32
Devenu fou furieux parce que sa
femme voulait divorcer et retourner
avec leur fils de 4 ans en Italie où
elle travaillait, un homme de 28 ans
du village de Balanesti dans le judet
de Neamt, s'est emparé d'une scie
électrique, a décapité l'enfant puis
s'est suicidé en se tailladant la gorge
de la même façon, sous le regard
horrifié de son épouse, prise d'une
crise de panique.
Outre le contexte personnel, cette
tragédie illustre les drames provoqués par l'émigration, séparant des
familles, laissant sur place des
enfants avec un seul ou sans
parents. Ils seraient 82 000 actuellement en Roumanie, surtout dans
l'est du pays, pour 34 000 familles
concernées, chiffre en léger recul
par rapport à 2011 (85 000), à cause
de la crise économique en Europe
Occidentale. Avant celle-ci, en 2007,
on en dénombrait 170 000.
Un film, "Singur acasa-O tragedie romaneasca" ("Seul à la maison-Une tragédie roumaine") retrace
les situations que doivent affronter
les enfants demeurés seuls chez
eux, en s'appuyant sur le cas de
trois garçonnets qui se sont suicidés. Selon un scénario classique, il
les montre pleurant quand leur mère
monte dans les bus d'Eurolines à
destination d'Italie ou d'Espagne, se
rendant ensuite seuls à l'école, communiquant normalement avec le
reste de la famille, se précipitant
vers le téléphone quand ils reçoivent
un appel de leurs parents, se
réjouissant lorsqu'ils reçoivent un
paquet avec des cadeaux… sans
que personne ne devine leur profonde détresse.
La justice hongroise a reconnu coupables de "crimes racistes", mardi 6 août,
quatre hommes qui avaient assassiné six Roms et grièvement blessé cinq autres en
2008 et en 2009. Zsolt Peto et les frères Arpad et Istvan Kiss ont été condamnés à la
réclusion à perpétuité. Le quatrième accusé, Istvan Csontos, a, lui, été condamné à
treize ans de prison pour complicité.
E
ntre juillet 2008 et août 2009,
les accusés, alors âgés de 28
à 42 ans et membres d'un
noyau de supporteurs de l'équipe de
football de Debrecen aux penchants
néonazis, ont mené contre des membres
de la communauté rom neuf attaques à
la grenade, au fusil et au cocktail
Molotov dans le nord-est du pays. Ces
meurtres avaient frappé l'opinion par
leur cruauté. Un enfant de 5 ans et son
père avaient été tués par balles alors
Szolt Peto, l'un des trois
condamnés à la réclusion à perpétuité pour le
qu'ils tentaient de fuir leur maison qui
meurtre de six Tsiganes entre 2008 et 2009.
avait été incendiée. Des centaines de
personnes s'étaient rassemblées au tribunal, sous haute surveillance policière, pour attendre l'issue de ce procès symbolique, dans un pays où le racisme anti-Roms, à l'origine de
nombreux faits divers, se nourrit depuis plusieurs années du climat politique.
Le parti d'extrême droite Jobbik, entré au Parlement avec 47 députés en 2010, avait
créé trois ans auparavant une milice, la Magyar Garda ("garde hongroise"), pour "soutenir moralement et physiquement la nation hongroise" et "lutter contre la criminalité tzigane". Accusée de racisme, la formation paramilitaire avait été interdite en 2009.
En avril 2011, à Gyöngyöspata, village situé au nord-est de Budapest, des heurts
avaient opposé une centaine de Roms et des membres du groupe paramilitaire Vederö
("force de protection"). Le gouvernement nationaliste conservateur de Viktor Orban avait
alors pris de timides mesures: tout "exercice illégal de la force publique" serait puni
d'une amende de 380 euros au maximum ou de prison en cas de récidive.
"Animaux lâches, répugnants et nuisibles" à "éliminer"
Les Roms, qui représentent de 5 % à 8% de la population hongroise (10 millions
d'habitants), se heurtent à de nombreuses discriminations, que ce soit pour accéder à l'éducation aussi bien qu'au logement ou à l'emploi. En janvier, Zslot Bayer, membre
influent du parti au pouvoir Fidesz, avait comparé les Roms à des "animaux lâches, répugnants et nuisibles", appelant à les "éliminer". Le premier ministre avait refusé de
condamner les propos de "son ami" alors qu'en 2012, déjà, Zslot Bayer déclarait: "Dans
la Hongrie d'aujourd'hui, des millions de gens sont victimes de Tziganes qui les volent,
les frappent, les humilient ou les tuent". Dans ce contexte, le verdict rendu est exemplaire. L'Association pour les droits civiques des Roms nuance: "Les accusés voulaient créer
une guerre civile entre Hongrois et Roms hongrois. Les chefs d'inculpation auraient dû
être "crime contre l'humanité, terrorisme et racisme".
Amnesty International a salué ce verdict tout en prévenant: "Les autorités hongroises n'en font toujours pas assez pour empêcher les violences contre les Roms". Le ministre des ressources humaines, Zoltan Balog, a déclaré que ce jugement "renforce la
conviction qu'aucun auteur de crime raciste ne peut échapper à la loi en Hongrie et que
les meurtriers particulièrement sauvages paieront à la hauteur de leurs actes".
Anne Solesne Tavernier (Le Monde)
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Emigration
Société
"Plus je vis en France
plus je me rends compte que je suis Roumaine"
Née en Roumanie d'un père libanais et une mère roumaine, Sarah Taher vit en France depuis 2006. A 25 ans, elle a
réalisé son premier court-métrage, "Ziad", présenté à Cannes cette année. Amoureuse de sa culture maternelle, et notamment de la poésie roumaine, Sarah a tenu à dire "Je suis Roumaine aussi".
S
arah a vécu les premières années de sa vie à la camde révolte, voire de fierté: "C'était tellement révoltant de voir
pagne roumaine, dans le village de sa grand-mère,
ce mépris envers les Roumains. Cela a renforcé mon identité pas loin de Pitesti (dans le sud de la Roumanie):
j'ai commencé à me sentir plus Roumaine. Être Roumaine était
"Les Français ne pourraient pas comprendre ce que c'était de
une façon d'affirmer ma différence, ma sensibilité".
vivre là-bas. Les gens ont un rapport particulier aux ancêtres,
Tout juste diplômée en Cinéma et documentaire à l'École
à la terre. Il y a une façon de vivre différente".
Pratique des Hautes Études de Nanterre, Sarah a réalisé son
Dans la vie de tous les jours, la famille Taher préférait ne
premier court-métrage. "Ziad", c'est l'histoire d'un jeune
pas attirer les regards circonspects : "On n'affichait pas trop
pêcheur un peu perdu, qui cherchait à échapper à sa condition
nos origines arabes en Roumanie.
sociale. Très attachée à la culture
C'est un pays assez fermé par raproumaine, Sarah s'intéresse égaleport à l'immigration, même si à la
ment au cinéma que l'on classifie
base c'est très cosmopolite. En
encore de "nouvelle vague": "Pour
même temps, la communauté libamoi c'est très étonnant de voir comnaise de Roumanie est assez fermée
ment les réalisateurs roumains arrisur elle-même".
vent à faire des chefs-d'œuvre, alors
A Nice, la jeune Sarah a éprouque niveau budget, c'est tellement
vé un sentiment de honte par rapdifficile". Présente au Festival de
port à ses origines: "Pour paraphraCannes cette année, Sarah a profité
ser Albert Camus - j'ai eu honte d'ade l'occasion pour échanger avec les
voir eu honte".
jeunes réalisateurs venus de
En 2006, après avoir fini le
Roumanie.
Sarah : "J'ai eu honte d'avoir honte" (Camus).
lycée à Tripoli, deuxième ville
Libanaise, Sarah est venue étudier
Un manque de solidarité
en France: "Ma patrie, c'est la langue française, avoue Sarah.
J'ai toujours lu en français, venir en France c'était la chose la
"Je vois souvent des gens déposer des fleurs devant la staplus évidente pour moi". Elle débarque ainsi à Nice et entame
tue d'Eminescu, dans le quartier latin. Ils lisent ses poèmes,
des études de communication à l'Université Sophia Antipolis.
pénètrent dans son monde féerique, proche de la nature"confie
Après 7 ans vécus en Roumanie et 11 autres au Liban, le chanSarah qui s'esclaffe: "J'ai les deux nationalités, roumaine et
gement de décor a été assez brutal pour la jeune fille : "J'ai été
arabe, j'ai les deux mauvais côtés". Laquelle serait plus dure à
confrontée pour la première fois de ma vie à une honte par
assumer en France? "Si les Arabes ont réussi à créer une comrapport à mes origines. J'avais le même accent que les prostimunauté, à obtenir une certaine reconnaissance, pour les
tuées qui déambulaient sur la Promenade des Anglais. J'avais
Roumains ce n'est pas encore le cas. Probablement par
l'impression que mon appartenance était une raison pour les
manque de solidarité".
gens de me rabaisser".
C'est la raison pour laquelle Sarah a pris l'initiative de participer au projet "Je suis Roumain (aussi)", avec lecafédesroumains.com: "Je veux aider à combattre les clichés auxquels
"Le Roumain est devenu le bouc émissaire"
les gens s'accrochent. Et je veux aussi dire aux Roumains de
Passionnée par le septième art, Sarah décide de monter à
s'accrocher bien à leur identité, à leurs souvenirs, car c'est
la Capitale en 2009, poursuivre ses études dans le domaine du
quelque chose d'irremplaçable".
cinéma: "A Paris il y a plus d'ouverture à l'égard des minoriTous les ans, Sarah retourne en Roumanie revoir sa
tés, des différentes communautés. C'est l'endroit où il faut être
famille: "Je me sens à chaque fois un peu dépaysée. Les gens
en tant qu'artiste". L'origine (roumaine) de Sarah a été, à nousont plus directs qu'en France, plus eux-mêmes, du coup ils ont
veau, le facteur déclencheur d'un sentiment d'incompréhension
des rapports plus authentiques, plus personnels, en étant
chez la jeune femme: "Quand la médiatisation autour des
moins dans la convention". Pour l'avenir, ce n'est ni de
Roumains ou Roms s'est accentuée, j'ai été frappée par un senBucarest, ni de Tripoli dont rêve Sarah. C'est bien à Paris qu'eltiment d'injustice. Le Roumain était devenu le bouc émissaire
le envisage réaliser ses prochains projets cinématographiques :
des Français, les blagues faciles, à la limite du racisme,
"J'y ai rencontré l'amour et réalisé mon premier court-métrafusaient. J'ai senti qu'être Roumain et l'afficher était devenu
ge. La France m'a permis de me projeter dans l'avenir et de
subversif". Mais à la différence de la période passée dans le
développer mes projets".
sud de la France, à Paris Sarah a vu naître en elle un sentiment
Madalina Alexe (www.cafedesroumains.com)
33
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Religion
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Un prêtre martyr, adversaire
du nazisme et du communisme
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La BBC met en colère
le Patriarcat orthodoxe
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Sports
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Vladimir Ghika, prince roumain converti
au catholicisme a été béatifié, fin août
La BBC a soulevé l'ire du patriarcat
orthodoxe roumain, après la diffusion
d'un reportage qui soulignait qu'on
construisait une église tous les trois
jours dans le pays, lequel en compte
au total 18 429, d'après le secrétariat
d'état roumain aux cultes, dont 70 %
dédiées à la religion orthodoxe (près
de 13 000), alors que la Roumanie ne
dispose que de 4022 écoles et
128 521 lits d'hôpitaux. La chaîne britannique a souligné aussi le coût pharamineux de la construction en cours
de la grande cathédrale de Bucarest,
catedrala Mantuira Neamului, à côté
du palais de Ceausescu: près de 100
millions d'euros, soit l'équivalent de
300 kilomètres d'autoroute, ou de
1500 écoles, ou encore de 40 centre
médicaux d'excellence. Le patriarcat a
répliqué que "les Anglais devraient
balayer chez eux avant de critiquer les
autres et avoir honte de vendre leurs
propres églises pour en faire de boites
de nuit".
Quasiment 60 ans après sa mort à la prison communiste de Jilava, près de
Bucarest, survenue en mai 1954, à 80 ans, le prêtre et martyr Vladimir Ghika,
prince orthodoxe converti au catholicisme, a été béatifié le 31 août, dans la capitale roumaine.
L
a cérémonie a regroupé 8000 fidèles dans
la capitale roumaine , dont certains venus
de France, 200 prêtres, 20 évêques et
3 cardinaux. Envoyé spécial du pape Francis, le cardinal Angelo Amato, officiait la messe de célébration. Après sa béatification, Vladimir Ghika sera fêté
chaque année le 16 mai, anniversaire de sa mort.
Vladimir Ghika, né à Constantinople le 25
décembre 1873 et mort à la prison de Jilava (près de
Bucarest) était un prince roumain orthodoxe qui se
convertit au catholicisme romain et fut ordonné prêtre. Diplomate du Saint-Siège, fondateur d'hospices,
adversaire du nazisme comme du communisme, il
fut arrêté à près de 80 ans et mourut en prison. Il était
le cinquième enfant du prince Jean Ghika, général et ambassadeur auprès de l'Empire
ottoman, et de son épouse, née Alexandrine Moret de Blaremberg. Il appartenait à la
dynastie des princes Ghica, qui régnèrent sur la Moldavie et la Valachie du XVIIe au
XIXe siècle. Son grand-père était Grigore V Ghica.
Élevé dans la religion orthodoxe comme le reste de sa famille, le jeune homme
suivit ses études à Toulouse et à Paris, puis chez les Dominicains à l'Angelicum de
Rome. Il fit profession de la foi catholique en 1902 et obtint un doctorat en théologie.
De retour en Roumanie, Vladimir Ghika fonda un dispensaire des Filles de la
Charité et organisa en 1913 un lazaret pour les victimes du choléra. Il regagna Paris
quelques années plus tard et, à l'âge de 50 ans, fut ordonné prêtre en 1923 par l'archevêque de Paris. Le pape lui accorda l'autorisation de célébrer la messe selon les deux
rites, romain et byzantin. En ce sens, l'abbé Ghika se situait "à la croisée des mondes
oriental et latin", comme un " précurseur en œcuménisme moderne".
Bénédictions
de voitures
Ami proche de l'élite intellectuelle catholique française
La patriarchie de l'Eglise orthodoxe
a donné son approbation au rituel de
bénédiction des voitures que leurs
propriétaires viennent d'acquérir, avec
aspersion d'eau bénite, prières et présentation d'icones, afin de leur assurer
protection et sécurité. Ces messes, à
la liturgie adaptée, se déroulent déjà
pour l'acquisition ou la construction de
maisons, de commerces, le lancement
de bateaux, et apportent des ressources non négligeables aux prêtres qui
officient. 55 % des Roumains apprécient cette mesure, 27 % y ont eu
déjà recours dans le passé, 43 % sont
décidés à s'en dispenser.
À Paris, Vladimir Ghika s'installa d'abord à l'Église des étrangers du 33, rue de
Sèvres (actuelle église Saint-Ignace). Il était un ami proche de Jacques Maritain,
d'Emmanuel Mounier, de Paul Claudel, de Charles Du Bos, et, d'une manière plus
générale, des intellectuels catholiques qui se retrouvaient autour des Maritain et des
Bénédictines de la rue Monsieur. Il choisit alors de vivre parmi les déshérités et partit
exercer son apostolat dans un bidonville de Villejuif.
En 1931, Pie XI le nomma protonotaire apostolique et l'envoya en mission au
Japon et aux Congrès eucharistiques internationaux de Sydney, Carthage, Dublin,
Buenos Aires, Manille et Budapest. Quand éclata la Seconde Guerre mondiale,
Vladimir Ghika sollicita l'autorisation, qui lui fut accordée, de rentrer à Bucarest. En
liaison avec la nonciature, il s'occupa principalement des réfugiés polonais qui avaient
fui l'invasion nazie, et pendant plusieurs années il se consacra aux plus démunis.
Arrêté le 18 novembre 1952 par la police communiste, accusé de haute trahison,
il subit un simulacre de procès en même temps que cinq autres prêtres. Menacé, battu
au sang, torturé, il fut condamné à trois ans d'incarcération. Il mourut le 16 mai 1954
à l'infirmerie de la prison de Jilava, des suites des mauvais traitements.
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Prévu contre les intempéries, le toit
du National Arena ne fonctionne… que s'il ne pleut pas !
Un "champ de patates" à plus de 200 millions d'euros
Le National Arena de Bucarest devrait, à priori, accueillir les 6 et 10 septembre deux rencontres préliminaires de la
coupe du monde 2014, que la Roumanie doit disputer à domicile contre la Hongrie et la Turquie. Si l'état de la pelouse,
changée déjà quatre fois depuis l'inauguration du stade national en septembre 2011, le permet… Il n'y a rien de moins sûr
pour cet équipement qui réserve chaque jour de mauvaises surprises et a déjà coûté plus de 200 millions d'euros.
S
orin Oprescu a reconnu en juillet que la pelouse du
National Arena devrait être à nouveau remplacée,
partiellement ou totalement, avant les deux matchs
décisifs des préliminaires du Mondial 2014 qui attendent les
Roumains. Le maire de Bucarest n'en est pas à sa première
déconvenue avec ce stade dont il a fait transformer et accélérer le projet pour le porter à son crédit en vue des élections
municipales de 2012 qui se profilaient. Il en a fait un des scandales les plus ahurissants de la Roumanie actuelle, illustrant
l'incompétence et la gabegie de ses dirigeants mais aussi, malheureusement, attirant les moqueries de l'Europe entière.
Prévu pour un coût initial de 119 millions d'euros, bien au
dessus des moyens du pays, le stade de 55 000 places en a déjà
coûté quasiment le double - 213 millions - soit un dépassement de 94 millions d'euros… et ce n'est pas fini !
Retour sur investissement dans 166 ans
A la signature du contrat par l'ancien maire, Adrian
Videanu, en 2007, la Cour des Comptes roumaine avait déjà
attiré l'attention sur ses irrégularités, soulignant que les
conditions posées par le constructeur étaient inacceptables.
Le coût du projet a littéralement explosé depuis que Sorin
Oprescu a pris les choses en
main, en 2009. Le chantier
avançait difficilement jusque
là, mais dans sa folie des grandeurs, le nouveau maire fit
déraper le budget, dotant le
stade de parkings et d'équipements non prévus, d'un toit
couvrant plus important. En
outre, il fallut faire avec de mauvaises surprises, comme la
nappe phréatique dont le volume avait été sous-estimé, à l'image d'études menées à la va-vite.
Prévu pour protéger les évènements sportifs ou culturels
des intempéries, le toit qui recouvre le stade ne peut se
déployer que lorsque la température est proche de 0 °… et qu'il
ne pleut pas ! Il a coûté à lui seul 20 millions d'euros. Le surcoût du seul entretien dû aux malfaçons du stade se monte à
plusieurs centaines de milliers d'euros annuellement, depuis
son inauguration. Le National Arena est ainsi devenu un véritable gouffre pour les finances municipales. Sorin Oprescu
avait pourtant claironné qu'il devait rapporter à la capitale, en
servant aussi à accueillir de grandes manifestations culturelles.
Jusqu'ici, la mairie n'a empoché qu'1,2 millions d'euros de
recettes et aucun concessionnaire ne s'est présenté pour exploiter l'enceinte. A ce rythme, le retour sur investissement se
fera… dans 166 ans ! La Direction Nationale Anti-corruption
a commencé à mettre son nez dans le dossier au début de l'année, convoquant des cadres municipaux.
La grande “gazoniada” de Roumanie-France
Le scandale est devenu une honte nationale avec l'inauguration du National Arena, le 6 septembre 2011. Prévue initialement en juillet pour roder les installations, à l'occasion d'une
rencontre amicale contre l'Argentine, celle-ci faisant finalement faux bond, elle se déroula lors d'un match de qualification pour l'Euro 2012, contre la France. Spectateurs et téléspectateurs se montrèrent éblouis devant la splendeur de l'arène, Sorin Oprescu paradant avec fierté devant les caméras.
Hélas, la magie s'évanouit vite quand, au bout de 20 minutes
de jeu, les premières mottes de terre de mirent à voler. En une
mi-temps, sous les crampons de joueurs ahuris, l'Arena
National était devenue un
"champ de patates" comme le
qualifia la presse étrangère
qui, pour se rappeler de l'évènement parle aussi de "la
grande gazoniada".
Sorin Oprescu clama haut
et fort qu'il allait remédier à
ce fiasco, consulter les
meilleurs spécialistes en
gazon, lequel fut vite remplacé, trop vite… deux jours plus
tard, par une firme hollandaise. Coût de l'opération : un
million d'euros… et résultat
identique. Au passage, on remarqua que la première société
qui l'avait mis en place appartenait au frère du "baron" corrompu du judet de Vrancea, Marius Oprisan, de la même
famille politique que celle du maire de Bucarest.
Le 9 mars suivant, la pelouse dut être a nouveau changée
pour pouvoir accueillir la finale de la Ligue Européenne (ex
coupe UEFA), premier grand évènement footbalistique international se déroulant en Roumanie, décroché de haute lutte,
avec l'appui de Michel Platini qui voulait tester les capacités
de la Ligue de football roumaine à organiser de grandes manifestations. C'est à cette occasion qu'on se rendit compte que le
toit du stade ne marchait pas quand on en avait besoin.
(suite page 36)
35
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Sports
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IASI
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TIMISOARA
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TÂRGOVISTE
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CONSTANTA
BUCAREST
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(suite de la page 35)
Arrosée… avec un jet
d'eau de jardinier
36
avait été appelé à la tête d'un football tricolore moribond
"le grand Monsieur" auquel la France doit beaucoup
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SIBIU
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Stefan Kovacs,
SUCEAVA
SATU
MARE
ORADEA
L'entraîneur roumain
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Rebelote, le 3 septembre 2012, en
prévision du match de qualification au
Mondial 2014 contre Andorre. La
pelouse était dans un état lamentable, entretenue avec un jet d'eau de
jardinier. Les spécialistes décrétèrent
que le climat ne lui permettait pas de
résister, situation aggravée par les
nombreuses malfaçons ayant émaillé
la construction du stade. Ils livrèrent
même leur solution: refaire le gazon
quatre à cinq fois par an !
Un nouveau scandale européen
intervint encore le 6 mars dernier à
l'occasion de la rencontre de l'Europa
League opposant le Steaua, qui avait
pourtant pris la précaution de faire
refaire à ses frais une partie du terrain, à un "grand" d'Europe, Chelsea,
tous les joueurs se plaignant de son
état à l'issue du match.
Comme si de rien n'était, la mairie
louait le stade pour le concert du
groupe rock Depeche Mode, le 28
mai dernier, ce qui entraîna à nouveau la destruction du gazon qu'il fallut refaire en trois jours pour que se
déroule la finale de la coupe de
Roumanie.
En prévision des rencontres programmées en cette rentrée, le président de la Fédération de Football,
Mircea Sandu a voulu se rendre
compte de l'état actuel du terrain,
début juillet. La mairie ne l'a pas laissé pénétrer dans le stade, Sorin
Oprescu reconnaissant toutefois que
60 % de la pelouse était à refaire.
L'agrément des instances européennes pour que le National Arena puisse recevoir des rencontres internationales n'était valable que jusqu'au 31
août.
S'il n'est pas le plus connu, Stefan Kovacs est incontestablement l'entraîneur
roumain le plus titré de l'histoire. Décédé en 1995, son palmarès est resté éclipsé
dans l'histoire footballistique roumaine par la victoire du Steaua en Coupe
d'Europe des clubs champions 1986. Kovacs est victime de son origine hongroise
et du fait qu'il a conquis ses plus grands titres en dehors de Roumanie. S'il reste
donc en retrait dans le souvenir collectif, son apport au football n'a en rien été
anecdotique. Au point que les plus hautes sphères des états français, hollandais et
roumain se sont penchées de près sur sa trajectoire. Retour sur une belle carrière,
qui a largement dépassé le cadre du football.
N
é à Timisoara en 1920, Kovacs est
donc issu de la minorité hongroise de
Transylvanie. Son frère Nicolae, international roumain, portera même le maillot hongrois
en 1941 suite à l'annexion du nord de la
Transylvanie par la Hongrie. Sa carrière d'entraîneur débute à l'U Cluj, en 1956. Après deux saisons
sur le banc transylvain, Kovacs retourne travailler
au sein de la FRF, où il avait occupé un poste d'adjoint. Il est nommé entraîneur des Espoirs, de la
sélection B et enfin, en 1964, de la sélection A,
poste qu'il occupe jusqu'en 1967. C'est durant ces
années qu'il organise de nombreuses réunions entre
les entraîneurs et sélectionneurs européens (dont les Français Albert Batteux et Georges
Boulogne). Ces rencontres sont ses premiers contacts avec le football français, qu'il aura
l'occasion de mieux connaître par la suite.
A l'Ajax d'Amsterdam… parce qu'il était le moins cher
Kovacs quitte la fédération en 1967 pour entraîner le Steaua Bucarest, un club à qui
le titre échappe depuis 1961. Le pari sera relevé dès la première saison. Steaua remporte le championnat en 1967-68, devant le FC Arges Pitesti. Le doublé championnatcoupe est raté, mais le club remportera par la suite 3 coupes de Roumanie (1969, 1970
et 1971).
Son aventure bucarestoise prend fin en 1971. Rinus Michels, l'entraîneur du grand
Ajax, part à Barcelone. Il laisse alors à ses dirigeants une liste de 15 entraîneurs susceptibles de lui succéder. Ceux-ci font le choix le moins onéreux: Stefan Kovacs. Ce choix
est un choc. Même s'il a disputé une saison à Charleroi lorsqu'il était joueur, l'entraîneur
roumain n'est absolument pas connu hors de son pays. Lui même a du mal à croire qu'il
est nommé à la tête du club champion d'Europe en titre. On raconte qu'il avait pris un
billet aller-retour Bucarest-Amsterdam, pensant que son séjour serait de courte durée.
Son arrivée à l'Ajax reste encore un mystère. Pourquoi la plus grande équipe du
moment choisit-elle un entraîneur inconnu? La réflexion tenait vraisemblablement dans
le fait qu'elle détenait déjà avec Cruyff un leader tactique, l'âme du football total prôné
par Michels. "Que dois-je dire à Cruyff ou Neeskens de faire? Absolument rien. Je les
laisse jouer" disait-il d'ailleurs. Kovacs apportait un atout psychologique indéniable.
Emerich Ienei, joueur entraîné par Kovacs puis entraîneur champion d'Europe en
1986 avec Steaua, commentait: "C'était un grand homme, d'une intelligence hors du
commun. Il aimait laisser les joueurs jouer et avoir leur propre personnalité.
Techniquement, il leur a appris une ou deux choses devant la surface. Lorsqu'il est arrivé là-bas, les Néerlandais jouaient avec de longs ballons, comme les Britanniques. Il a
réussi de telles performances parce qu'il avait les joueurs pour. Il disait de Cruyff qu'il
était le joueur parfait: un homme modeste et effacé mais qui aimait parler beaucoup sur
le terrain".
Ion Voinescu, grand gardien du Steaua dans les années 60,
lorsque le club s'appelait encore CCA, loue lui aussi ses qualités humaines: "Il avait un talent extraordinaire pour comprendre les joueurs, un talent psychologique que peu d'entraîneurs
ont aujourd'hui".
Cet inconnu sera pourtant celui qui continuera de prôner le
football total cher à son prédécesseur. Avec la même réussite.
A Amsterdam, Kovacs remporte deux titres de champion de
Hollande, une Coupe de Hollande, mais surtout la Coupe
d'Europe des clubs champions en 1971 et 1972, la Coupe
Intercontinentale en 1972 et la Supercoupe de l'UEFA en 1973.
reçu, quand d'autres était refusés ou devaient rester des jours
entiers à la porte du dictateur".
Un fait confirmé par Ienei: "Je ne savais pas qu'on avait
essayé de l'empêcher d'aller en France, d'autant plus qu'il
avait d'excellentes relations avec la famille Ceausescu, surtout
Elena, avec qui il avait sympathisé".
Deuxième sélectionneur
étranger de l'équipe de France
Kovacs a des statistiques éblouissantes avec l'équipe néerlandaise: 85% de victoires en 123 matchs, et 3,3 buts marqués
par match en moyenne. Celui-ci sent néanmoins venir la fin du
Le talent de se faire bien voir…
grand Ajax. De grands clubs européens tels que Benfica,
même du couple Ceausescu
l'AEK Athènes ou l'Inter de Milan s'intéressent à lui (le club
Même s'il est plus discret que Rinus Michels, qui attirait
italien devra cependant vite renoncer, le règlement de sa fédél'attention des médias, Kovacs devient une star en Hollande.
ration interdisant l'engagement d'un entraîneur étranger).
Lorsque Nicolae Ceausescu rend une visite officielle à la
Mais, informé de l'intérêt que lui porte le football français par
Reine Béatrix en mars 1973, celle-ci lui demande lors du banl'intermédiaire de Jacques Ferran, Kovacs accepte la proposiquet: "Que peut-on vous offrir à
tion de la FFF. Fernand Sastre,
ramener en Roumanie? Vous
président de la fédération françaidevez accepter quelque chose en
se et Georges Boulogne, le sélecéchange de Kovacs". Cette questionneur à qui il succède, se sont
tion n'est pas anodine.
rendus eux-mêmes à Amsterdam
Le gouvernement roumain a
pour le convaincre.
en effet entamé depuis quelques
Il quitte ainsi l'Ajax en pleine
mois une politique de repli vis-àgloire. Sage décision, puisque
vis de l'extérieur. Le culte de la
Johann Cruyff, le leader de l'épuissance socialiste roumaine est
quipe, rejoint Rinus Michels peu
en marche, et toutes les forces
après à Barcelone, accélérant
vives du pays doivent contribuer
ainsi la fin de la grande époque
à sa grandeur. Le journal Scânteia
de l'équipe amstellodamoise.
(L'étincelle), organe officiel du
Sélectionneur de l'équipe de
PCR, titre après la deuxième de
France en 1973, le deuxième
l'Ajax en Coupe d'Europe: "Un
Fêté pour ses succès, l’entraineur roumain a été vite oublié. étranger à ce poste après
grand succès du valeureux techl'Anglais George Kimpton durant
nicien qu'est Stefan Covaci (notez la roumanisation du nom de
le mondial de 1934, arrive à la tête d'une équipe moribonde. A
famille), mais aussi du mouvement sportif de Roumanie."
la dérive depuis les années 60, le football français espère retroToutes les forces vives du pays doivent contribuer à son
uver une place dans l'échiquier mondial en faisant venir l'enrayonnement. Le gouvernement de Ceausescu décide donc de
traîneur du moment.
refuser de prolonger le contrat de travail à l'étranger de
Très francophile, comme de nombreux Roumains, il souKovacs. Il est nommé directeur technique national au sein de
haite ardemment relever le niveau du football français et quala FRF. Le Président Ceausescu a lui-même pris une résolution
lifier les Bleus pour le prochain championnat d'Europe qui
ferme et implacable: "Qu'il rentre au pays". Mais lors de cette
aura lieu en 1976 en Yougoslavie. Mais rien n'est simple.
visite aux Pays-Bas, il fait un virage à 180 degrés et indique à
En effet, son contrat à la FFF n'est établi que pour une
Kovacs qu'il peut décider seul de son avenir.
année. Et alors que les éliminatoires doivent commencer en
Cornel Dragusin, ancien de la FRF et proche de Kovacs
1974, Kovacs attend toujours la confirmation du gouverneraconte que ce dernier se trouvait dans les petits papiers du
ment roumain pour la reconduction de son contrat. C'est à ce
couple dictatorial. "Il avait un talent pour bien se faire voir.
moment que Ceausescu décide de faire du cas Kovacs une
Contrairement aux autres techniciens, il bénéficiait de ceraffaire d'Etat. Depuis le début de l'année 1974, des tensions
tains privilèges, notamment celui d'aller selon son bon vouloir.
existent en France avec l'ambassadeur roumain, M. Flitan, et
De ce que j'en sais, Elena avait une faiblesse pour lui, et il
un conflit franco-roumain est né, portant sur une série de proentretenait d'excellentes relations avec Nicolae Ceausescu. Il
blèmes économiques et politiques.
pouvait aller chez lui n'importe quand, il était immédiatement
(suite page 38)
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Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
(suite de la page 37)
Négociations au sommet de l'Etat entre Paris et Bucarest
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Un palmarès
impressionnant
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Stefan Kovacs est considéré
comme l'entraîneur le plus titré de
l'histoire du football.
Avec l’Ajax Amsterdam :
Vainqueur de la Coupe
Intercontinentale en 1972
Vainqueur de la Supercoupe
d'Europe en 1973 et 1972
Vainqueur de la Coupe d'Europe
des Clubs Champions 1973, 1972
et 1971
Champion des Pays-Bas 1973
et 1972
Vainqueur de la Coupe des
Pays-Bas 1971 et 1972
Champion de Roumanie 1968 et
1967 avec le Steaua Bucarest
Vainqueur de la Coupe de
Roumanie en 1970, 1969 et 1968
avec le Steaua Bucarest
Vainqueur de la Coupe de
Grèce 1982 avec le Panathinaïkos
Carrière en club (entraîneur)
du 07/1962 au 06/1967
Roumanie (adjoint)
du 06/1963 au 06/1962 Universita
Cluj (Roumanie)
du 07/1967 au 06/1970 Steaua
Bucarest (Roumanie)
du 07/1971 au 06/1973 Ajax
Amsterdam (Pays-Bas)
du 07/1976 au 06/1980Roumanie
du 07/1981 au 06/1983
Panathinaïkos (Grèce)
du 07/1986 au 06/1987 A.S.
Monaco
Carrière de sélectionneur
France A du 09/1973 au 11/1975
15 matchs, dont 6 en qualification
pour le championnat d'Europe et 9
en amical.
De plus, au mois de mai 1974, une église parisienne, propriété de l'Etat roumain a
été occupée de façon illicite sans que les forces de l'ordre n'interviennent, à la plus grande colère des Roumains. Ainsi, les relations politiques se sont tendues et se retrouve au
milieu de ces divergences. Une nouvelle fois, le président roumain ordonne lui-même
l'ordre de le nommer directeur technique national.
Le départ du sélectionneur français apparaît inéluctable en août 1974. Mais comme
lors de l'épisode hollandais, la pression médiatique et politique va une nouvelle fois
faire plier le gouvernement roumain. Quelques jours seulement après sa nomination
comme DTN en Roumanie, il est autorisé par Nicolae Ceausescu à rester une année de
plus en France. Les relations entre les deux hommes et le désir de Ceausescu de bien se
faire voir par Paris sont à la base de cette décision.
Symbole de l'importance que cette décision revêt, Pierre Mazeaud, secrétaire d'Etat
à la Jeunesse et aux Sports, déclare que: "le gouvernement français peut être fier d'avoir mené à bien cette opération, cela dans l'intérêt du sport et notamment du football".
Quelques heures plus tard, c'est le Premier ministre français en personne, Jacques
Chirac, qui déclare: "Je tiens à vous dire combien je me réjouis pour la France, et
notamment pour le football français, que M. Kovacs puisse rester en France. […] De
toute façon, il n'y a pas eu là de discussion de compensation; simplement je me réjouis
que la Roumanie ait accepté de maintenir la présence de Kovacs en France et j'espère
que l'équipe de France de football pourra ainsi voler de victoire en victoire, ce dont elle
a besoin, et ce dont nous avons tous besoin".
Des compensations, il y en a pourtant eu. Un document du CNEFS (conseil national roumain pour l'éducation physique et sportive) fait la lumière sur
les conditions contractuelles offertes par les Français à Kovacs et
dévoile au passage ainsi le prix de
la liberté d'entraîner hors des frontières de l'état communiste: "La
demande d'engagement a été présentée par le président de la
Fédération Française à l'ambassade de la République Socialiste de
Roumanie à Paris […]. De son
salaire, l'entraîneur déposera
Stefan Kovacs a formé
le groupe Platini et ouvert la voie à Michel chaque mois la somme de 200 dolHidalgo qui remportera l'Euro 84 avec les Tricolores.
lars sur le compte de la FRF".
Le Roumain met le pied à l'étrier à Michel Hidalgo et Platini
Sortie de la pire décennie de son histoire, l'équipe de France a entamé son redressement sous la houlette de Georges Boulogne. La remise à niveau se poursuit sous le
commandement du Roumain, mais cela ne suffit pas à qualifier l'équipe pour l'Euro yougoslave. La Belgique et la RDA terminent les éliminatoires devant les Bleus. Kovacs
quitte alors son poste, laissant son adjoint Michel Hidalgo lui succéder.
Si le Roumain n'a eu aucun résultat notable durant ses deux années à la tête de l'équipe de France, sa venue a été d'un riche apport pour les Bleus. A côté d'un travail renforcé sur la formation (il est à la base de la création du centre de Clairefontaine, inspiré des centres de formation mis en place en Roumanie par le pouvoir communiste),
Kovacs a beaucoup fait pour la progression des joueurs dans les domaines physique et
tactique ainsi que dans leur approche psychologique des rencontres de haut niveau.
Lorsqu'on lui demandait à son arrivée combien de temps il faudrait pour faire de l'équipe de France une grande équipe, il répondait visionnaire: "avec des structures, en
huit ans, dix ans, on peut faire une belle équipe nationale".
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Michel Hidalgo, son adjoint et successeur,
a su profiter de ce travail et le poursuivre pour
mener l'équipe de France à la victoire lors de
l'Euro 84, dix ans plus tard… "C'est lui qui a
formé le groupe de Platini, celui qui a remporté l'Euro 84, soutient Ienei. Il a fait comprendre
aux Français qu'il fallait reformer tout le football, des juniors jusqu'à l'équipe nationale,
pour avoir des performances."
déplace en Hongrie pour
y rencontrer l'ennemi
héréditaire dans le cadre
des éliminatoires pour le
Mondial 82. La Hongrie
s'impose 1-0. Dans un
pays conduit par une dictature prête à tout pour
promouvoir L'homme
nouveau, une défaite
contre l'ennemi hongrois
Accusé d'avoir fait perdre
est insupportable.
la Roumanie devant la Hongrie
Victime de ses oriEnfin, Kovacs revient en Roumanie.
gines, Kovacs est accusé
Stefan Kovacs a été l’inventeur du football total avec l’Ajax.
L'équipe roumaine a également échoué lors
d'avoir volontairement
des éliminatoires de l'Euro 76, terminant derrière l'Espagne.
fait perdre le match. Devant la cabale dont il est la cible, il jette
Nommé vice-président de la FRF et sélectionneur national,
l'éponge et part à la retraite. On le retrouvera quelques années
Kovacs ne fait pas mieux que son prédécesseur lors des élimiplus tard brièvement sur le banc du Panathinaïkos puis de l'AS
natoires pour le Mondial 78, l'Espagne termine encore premièMonaco, mais sans succès. Arsène Wenger est d'ailleurs son
re du groupe, devant la Roumanie et la Yougoslavie. Ces trois
successeur à la tête du club de la Principauté.
équipes se retroStefan Kovacs meurt le 11 mai 1995, à 75 ans.
uvent lors des élimiFumeur invétéré, il succombe à un cancer pulmonaire.
natoires pour l'Euro
Bien qu'il ait apporté un grand prestige au football rou80, et encore une
main et qu'il ait gagné beaucoup d'argent durant sa carrièfois, l'Espagne élire, il est mort dans la pauvreté. Lorsque, en pleine séanmine ses concurce du conseil des ministres, le Président Chirac, avec qui
rents. Kovacs termiil était resté très lié, a appris son décès, celui-ci a arrêté
ne sa carrière de
les discussions pour marquer une minute de silence en
sélectionneur
en
hommage à celui qu'il considérait comme "le fondateur
1981, sur une derdu football moderne français". Inconnu hors de
nière affaire d'état.
Roumanie lorsqu'il en est parti, Kovacs est mort bien plus
Le 13 mai 1981,
respecté à l'étranger que dans son propre pays.
la Roumanie se
Parlons foot (lire aussi en dernière page)
Faux pas interdit contre la Hongrie
D
ans le cadre des préliminaires de la coupe du monde
2014 de football qui se
déroulera au Brésil, la Roumanie rencontre à domicile la Hongrie, son principal
rival, ce 6 septembre, dans un match
déterminant, et la Turquie, le 10 septem-
bre. Il lui restera à se déplacer à Andorre,
le 11 octobre et à recevoir l'Estonie, le 15
octobre.
La Roumanie est actuellement 3ème
du groupe D, seul le premier étant directement qualifié, le second devant disputé
un match aller-retour de barrage avec le
second d'un autre groupe. Elle n'a le droit
à aucun faux pas.
Le classement actuel (toutes les
équipes ayant disputé 6 matchs) :
1. Pays Bas 18 pts, 2. Hongrie 11 pts,
3. Roumanie 10 pts, 4. Turquie 7 pts, 5.
Estonie 6 pts, 6. Andorre 0 pt.
Rugby : l'histoire européenne a commencé en Roumanie
L
e 7 janvier 1996, Emile Ntamack, joueur du stade
toulousain, est entré dans l'histoire de son sport,
quand il est devenu le premier joueur à brandir la
Coupe d'Europe de rugby. La compétition continentale avait
débuté en Roumanie:
Emile Ntamack, vous souvenez-vous du premier match
de l'histoire de la Coupe d'Europe ?
Emile Ntamack: Bien sûr, c'était un déplacement en
Roumanie, contre le club de Farul Constanta. On ne savait pas
trop où on allait. Enfin... On savait que c'était en Roumanie et
qu'à l'époque, le rugby roumain était de bon niveau et pénible.
Mais le pays en lui-même n'était pas en phase accélérée de
développement. Donc, ce fut assez folklorique. Dans nos
chambres, les lits mesuraient 60 cm de large et 1 m 80 de long.
Je me souviens aussi qu'à table, lors d'un déjeuner, il n'y avait
pas d'eau, mais que des carafes de jus d'orange. Du jus d'orange qui nous avait semblé un peu douteux d'ailleurs... On n'y
avait pas touché, mais impossible d'avoir de l'eau.
Le jour du match, quand on était arrivé au stade, ça m'avait marqué, il y avait plein de militaires qui balayaient la
pelouse. Il y avait une grosse quantité de feuilles sur le terrain
et ils essayaient de le rendre présentable. Aux abords du stade,
il n'y avait pas les habituelles baraques à frites, mais des vendeurs de fruits secs, de pois chiches... C'était un peu bizarre.
39
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
On ira tous au paradis
Insolite
L
es paradis qu'il promettait à ses ouailles, c'était
bien… Mais quand les paradis terrestres vous tendent la main, comment résister? C'est sans-doute ce
que pensait un éminent pope de la métropolie de Chisinau qui,
après avoir célébré ses offices, changeait de tenue pour se rendre dans les clubs de nuit de la capitale moldave. Là, il se
déchainait sur les derniers succès karaoké qui n'avaient rien à
voir avec ses cantiques habituels, enfilant cognac sur cognac,
payant des tournées à ses voisins, ses genoux se montrant
Photos
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Radu Mazare
ubu-maire de Constantsa
C’est la Roumanie...
aussi accueillants pour les jeunes pécheresses que les bancs du
confessionnal.
Mais voilà… un fidèle, qui n'avait pourtant aucune justification pour se trouver en ces lieux, a eu l'indélicatesse de prévenir une chaine de télévision. L'impénitent pope a refusé de
se repentir devant l'équipe de cameramen qui le guettait au
petit matin, à la fermeture de la boite, leur claquant la portière
de sa luxueuse voiture au nez… et filant préparer sa messe du
dimanche matin.
Radars en panne
P
40
endant plusieurs jours, fin juillet, les automobilistes du judet de Cluj ont échappé aux
contrôles des radars… le stock d'essence attribuée à la police routière départemental ayant été épuisée.
Cette situation aurait même pu durer plus longtemps si la
presse locale n'avait pas eu la mauvaise idée de la révéler ce qui a conduit les autorités de la police nationale à
réagir immédiatement et à approvisionner dans les
24 heures les dépôts de carburant en cause.
Toutefois, elles ont décidé de mener une enquête sur
le dépassement du quota attribué, se rappelant que le chef
de la police routière du judet est sous le coup de onze
procédures pénales, sa famille dépensant 35 000 euros
mensuellement, bien qu'il n'en gagne que 2000, et son
adjoint s'étant fait construire une maison à plus de
300 000 euros, qu'il a oubliés de déclarer.
L
e comédien Jean Yanne a fait
au moins un émule en
Roumanie. L'humoriste, figure de Français moyen, râleur mais au
grand cœur, s'était rendu célèbre pour
avoir raconté à ses auditeurs de RTL,
avec sa gouaille très parisienne, comment
il s'était débarrassé avec son simple
trousseau de clés du sabot de Denver qui
entravait les roues de sa voiture mal
garée dans les rues de Paris.
Ce dispositif utilisé dans un premier
-Eh Jojo, t’as retrouvé ta femme ?
-Laisse tomber, j’espère au moins retrouver ma voiture !
41
Emule de Jean Yanne
temps à des fins de sécurité, pour éviter
qu'un véhicule, ne soit volé, avait été
copié par la police de Denver aux USA
qui trouvait plus commode d'immobiliser
une voiture que de l'enlever, avant d'arriver en France au milieu des années ‘60. Il
a essaimé aussi dans les pays de l'Est
depuis la chute du communisme… les
voitures y étant désormais plus faciles à
"mettre à l'ombre" que les citoyens.
Un vacancier roumain en villégiature
à Mamaia en a fait les frais alors qu'il sor-
tait du casino et voulait récupérer sa
BMW garée à cheval sur le trottoir.
Furieux, il a sorti un chalumeau qui traînait dans son coffre - on se demande
pourquoi - et à commencer à découper le
système qui l'empêchait de repartir. Hélas
pour lui, il avait oublié que le casino
disposait d'un système de sécurité et de
caméras de surveillance. Alertée, la police n'a pas tardé à rappliquer.
L'automobiliste irascible a terminé la nuit
au poste et sa voiture à la fourrière.
La sorcière mal aimée
L
e tribunal de Graz, en Autriche, a condamné une
"sorcière " roumaine de 63 ans à cinq mois de prison avec sursis et à rembourser 21 000 des 26 000
euros qu'elle avait réussi à soutirer pendant près de 5 ans d'un
de ses clients, abusant de sa naïveté.
L'homme, un Slovaque, était venu la trouver, désespéré
par le départ de son grand amour, Janka. Pour 99,99 euros une promotion à ne pas rater - la voyante lui promit de la faire
revenir. La prédiction tardant à se concrétiser, son client revint
toutes les semaines, acquittant chaque fois la même somme,
pour faire dire des messes, désenvouter l'amante volage partie
avec un autre homme, etc… Sans résultat pendant des mois…
jusqu'à ce qu'il apprenne que Janka s'était finalement mariée.
La "sorcière" lui proposa alors une autre stratégie: faire mourir celui qui avait pris sa place dans son cœur par les sorts
qu'elle lui jetterait… toujours au même tarif promotionnel.
Ce manège ne dura pas trop longtemps, l'amoureux éconduit se rendant compte qu'on le menait par le bout du nez, ce
qui le conduisit à porter plainte. Les juges, prenant en compte
sa naïveté et sa sincérité touchantes, ont donc condamné la
sorcière indélicate à lui restituer les sommes versées… sauf
les derniers 5000 euros qui étaient destinés à jeter un sort
funeste au rival. Les juges n'allaient quand même pas se rendre complice d'un crime avec préméditation !
Sous le portrait des candidats,
une petite annonce innocente:
“Porcs à vendre”...
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Cinéma
SUCEAVA
l
l
BAIA
MARE
ORADEA
l
l
IASI CHISINAU
l
l
GHERLA
l
l
l
ARAD
CLUJ
l
l
TIMISOARA
SIBIU
TARGU
MURES
l
l
GALATI
BRAILA
PITESTI
l
l
l
l
TULCEA
l
CRAIOVA
BACAU
BRASOV
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Les photos de
Brancusi retrouvées
42
En février 2010, Luminita Mincu
Patrascu Brancusi, 53 ans, descendante de la 3ème génération
du sculpteur, se rendait compte
que les photos de son illustre
ancêtre, dédicacées pour la plupart, et dont elle estime la valeur
à 600 000 euros, avaient disparu
du tiroir où elle les conservait. La
police bucarestoise, chargée de
l'enquête, vient de mettre la main
sur le coupable. Il s'agit du gardien de sa maison, un homme de
33 ans, qui les avait subtilisées en
2009 et négocié en juillet dernier,
ayant des soucis d'argent, pour la
dérisoire somme de 2300 euros,
auprès d'un atelier d'arts plastiques… lequel les avait déjà
revendues pour 6300 €. Les précieuses photos ont été rendues à
leur propriétaire.
Un Roumain dans
Année de Fame et du Dernier Métro, 1980. L'élan de mai 1968 est retombé depuis
longtemps et le changement de décennie referme pour de bon, à l'Institut des hautes
études cinématographiques (Idhec) comme ailleurs, la porte des années politiques.
Dans cette école créée en 1944, pour définir, comme l'avait posé Marcel L'Herbier, son
fondateur, "le cinématographe envisagé comme un art", la décennie 1970 avait placé
le cinéma dans l'orbite du combat politique. Et voilà qu'en 1980 une nouvelle promotion arrive, la 36e, décidée à l'en arracher. Parmi elle, un "martien" débarqué de sa
planète roumaine, Radu Mihaileanu, futur César du cinéma français.
C
es étudiants ont 20 ans à peine. Ils s'appellent Arnaud Desplechin, Pascale
Ferran, Eric Rochant, Philippe Le Guay, Pierre Trividic... Dix ans plus tard, ils
incarneront ce que l'on appellera "le jeune cinéma français". "Ils avaient un
intérêt très vif et tout à fait nouveau pour l'art, se souvient Jean Douchet qui enseignait
alors l'analyse de film, depuis 1969 (et fut directeur des études de l'école de 1976 à 1978).
On sentait que certains avaient quelque chose en eux. Ils repensaient le cinéma, se plongeaient dans les écrits, dans Les Cahiers du cinéma d'avant la Nouvelle Vague, critiquant
parfois ce qui s'y écrivait. A partir de là, toute une génération de réalisateurs est arrivée,
qui a marqué le cinéma français."
Après les années 1970 durant lesquelles l'école avait formé d'excellents techniciens
(Caroline Champetier, Agnès Godard...), mais peu
de metteurs en scène majeurs, le cinéma français
apparaissait à ces jeunes gens fous de cinéma américain, entrés avec le bac et la promesse de leur talent,
comme une friche à réinvestir. La voie avait été
ouverte par quelques autres, entrés à l'école un an
plus tôt comme Christian Vincent, Eric Barbier ou
Gérard Krawczyk, le futur auteur de Taxi, dont le
film de fin d'études avait marqué les esprits. "C'était
un film noir, inspiré de Woody Allen, qui pouvait être
vu comme une sorte de manifeste contre l'Idhec des
années militantes", se souvient Philippe Le Guay.
La fosse aux lions
Radu Mihaileanu en compagnie
Après deux années de khâgne, passées auprès
de Dolores Chaplin en 2010,
lors de la35e cérémonie des César
d'étudiants qui n'avaient pas une once d'intérêt pour le cinéma, Philippe Le Guay espérait trouver à l'Idhec une "communauté d'esprit bienveillante". Ce fut la fosse aux lions. "Quand j'ai ouvert la porte et
que j'ai vu les vingt élèves assis, je me suis dit: "Mais je ne vais pas passer trois
ans avec ces types!" Quelque chose de farouche, de violemment antisocial se
dégageait de ces individualités opaques. Cela tenait, je crois, à la nature de ce
concours si étrange, qui visait plus à identifier des tempéraments qu'à tester des
connaissances". Les griffes se sont rétractées, mais la promo est restée divisée en
deux bandes, entre lesquelles Philippe Le Guay et Pierre Trividic faisaient plus ou
moins la passerelle. D'un côté Pascale Ferran, Arnaud Desplechin, Eric Rochant,
trio d'inséparables qui passait ses soirées au cinéma, puis au fast-food, à débattre
fiévreusement pendant des heures. "On avait 20 ans, se souvient la réalisatrice de
Lady Chatterley. L'école nous donnait la légitimité pour croire à cette idée quand
même invraisemblable qu'on allait devenir cinéastes. Une fois reçus, on se sentait
incroyablement forts et supérieurs".
Blue jean contre costume trois pièces
"Eux, c'étaient les intellos, et nous la plèbe", résume Radu Mihaileanu, qui
appartenait à la bande adverse, dont la cinéphilie était "plus ouverte, englobant
aussi bien Bergman ou Tarkovski que le dernier Rocky", estime-t-il.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
la pépinière du "jeune cinéma français"
Le réalisateur du Concert, Train de Vie et Vas, vis et
élèves qui faisaient le cours aux profs". Un des premiers cours
deviens, se souvient de ces jeunes gens qui "parlaient de liberauxquels il a assisté était consacré au scénario et donné par
té de manière théorique", se baladant avec trois livres dans les
Pascal Kané : "Toute la matinée ç'a été : "Non, ça, on connaît
poches. "Je leur demandais s'ils lisaient les trois à la fois! Je
déjà, non ça on s'en fout"... A la fin je me suis énervé, j'ai dit
les trouvais assez arrogants... Mais on était jeunes. Et puis c'éque j'avais fait 4 000 km et que ce n'était pas pour perdre mon
tait la France aussi. J'étais mal dans ma peau, je ne parlais
temps de cette manière. On m'a répondu que, si je n'étais pas
pas bien la langue... Aujourd'hui, je revois Pascale Ferran et
content, je n'avais qu'à rentrer chez moi...".
on s'entend très bien. J'ai croisé
Alors on apprenait en voyant
Rochant, c'était sympathique..."
des films, grâce à une précieuse
Arrivé de Roumanie deux mois
carte qui permettait d'aller au cinéaprès le début des cours, Radu
ma gratuitement (sauf chez MK2,
Mihaileanu a débarqué à l'école, sise
raconte Philippe Le Guay, Marin
dans les locaux de l'Institut national
Karmitz, ancien de l'école, ayant
de l'audiovisuel à Bry-sur-Marne
expliqué aux étudiants que leur
(Val-de-Marne), avec sa bourse d'éoffrir ce privilège constituerait une
tudiant, et sur le dos le costume
injustice énorme vis-à-vis du reste
trois-pièces que venait de lui offrir
de la population).
son père. "C'était quand même
On apprenait les uns des autres:
l'Ecole des "hautes études cinémato"Arnaud Desplechin et Pierre
graphiques!" Nous en avions une
Invité à la Résidence de France à Londres, Trividic étaient des personnalités
le cinéaste franco-roumain trône au milieu
très haute image. Quand je suis arriaffirme
Pascale
de toute une pléiade d'artistes et réalisateurs incroyables,
français, pour beaucoup issus aussi de l'IDHEC. Ferran. Sans eux, je ne sais pas si je
vé dans ce repère de post-soixantehuitards, que je les ai tous vus en jean et baskets, il y a eu un
ferais des films aujourd'hui." On apprenait aussi en faisant des
éclat de rire général. J'avais la honte !".
courts-métrages, en occupant tous les postes, selon les projets.
"Il y avait un côté utopique très fort dans cette manière de
réunir une vingtaine de personnes, à égalité, note Arnaud
"C'était les élèves
Desplechin. Il n'y avait pas comme aujourd'hui de spécialisaqui faisaient les cours aux profs"
tion a priori. J'ai beaucoup appris d'Eric Rochant et de
L'Idhec, qui allait disparaître au milieu des années 1980,
Pascale Ferran. Philippe Le Guay a beaucoup compté aussi."
absorbée par la Femis, souffrait alors de divers maux. Les
Comme Pascale Ferran, Arnaud Desplechin estime que
cours, notamment, n'étaient guère appréciés, à l'exception de
l'école a perdu de son âme en devenant Femis, et en se profesceux de Jean Douchet. "Les seuls que l'on suivait avec assiduisionnalisant. Ce que Radu Mihaileanu, 55 ans, qui siège
té, souligne Arnaud Desplechin. J'ai reçu avec lui les leçons de
aujourd'hui à son conseil d'administration, conteste vertement.
cinéma les plus impressionnantes que je n'ai jamais eues".
Le clivage n'est pas totalement refermé.
Radu Mihaileanu confirme: "C'était le plus souvent les
Isabelle Régnier (Le Monde)
Un style marqué par la fantaisie et l'ironie mordante
R
adu Mihaileanu est un cinéaste français d'origine roumaine. Son style, marquée par la
fantaisie et l'ironie mordante est imprégnée de la thématique de l'exil. Il a commencé à
tourné au début des années 90 avec quelques oeuvres remarquées comme Train de Vie
et Vas, vis et deviens.
Né à Bucarest, il est le fils de Mordechaï Buchman, journaliste juif et communiste, déporté qui
s'est échappé d'un camp de concentration. Il change d'identité et c'est sous ce nom (Mihaileanu) que
le jeune Radu fait ses premières armes en tant que scénariste pour Lucian Pintillie.
Il fuit la dictature de Ceaucescu au début des années 80 pour se rendre en France et intégrer
l'IDHEC. A la fin de ses études, il travaille régulièrement pour le cinéaste Marco Ferreri en tant
qu'assistant puis en tant que monteur. Parallèlement à cela, il réalise des courts-métrages qui lui permettent de se faire remarquer et de signer, en 1993, son premier long-métrage, Trahir, fortement
ancré dans l'histoire politique de son pays.
C'est pourtant avec son deuxième opus, Train de vie, en 1998, qu'il obtient la reconnaissance critique avec des prix au festival de Venise et à Sundance. Les marques de son style, humour noir et goût pour la fable, s'y déploie à la perfection. Il passe ensuite sept ans à travailler à son troisième film, vaste réflexion sur l'exil: Va, vis et deviens. C'est cette fois l'histoire des juifs
d'Ethiopie qu'il met en scène dans ce film particulièrement remarqué. Radu Mihaileanu revient en 2009 pour Le concert, histoire
abracadabrante de vengeance loufoque et musicale avec toujours les mêmes thèmes en toile de fond (l'exil, la quête d'identité, la
peinture d'une communauté haute en couleurs...). Il a tourné depuis La source des femmes, en 2011, au succès plus mitigé.
43
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Patrimoine
La plus vieille cité
de Transylvanie…
sous les pelleteuses
de l'autoroute
44
Au cours de leurs fouilles
dans le judet d'Hunedoara, les
archéologues roumains ont mis
à jour un site d'une centaine
d'hectares sur lequel avait été
édifiée ce qui est à l'heure
actuelle considérée comme la
plus ancienne cité de
Transylvanie, remontant à 4200
ans avant Jésus-Christ, et donc
plus vieille que les pyramides
d'Egypte (2600 avant JC). Cette
découverte a été faite dans la
localité de Turda, à l'occasion
des travaux en cours pour la
construction de l'autoroute SibiuNadlac. Le site comporte des
ruines de fortifications, de quartiers entiers et nombre d'objets
comme des vases ou statuettes.
La plus ancienne cité répertoriée
en France, Courthézon, dans le
Vaucluse, date de la même
époque (4640 avant JC).
D'autres surprises ne sont pas à
exclure. Le premier peuplement
de la Roumanie remonte à l'époque du néolithique, 6000 ans
avant JC, venue d'Asie mineure,
l'homme se mettant à pratiquer
culture et élevage et se sédentarisant. Ces populations progresseront ensuite à partir des
Carpates en suivant le Danube,
franchissant le Rhin vers 57005500 avant JC, pour s'établir
dans le bassin parisien et au
nord de la Loire jusqu'en
Bretagne. Ainsi une parenté
commune avec les Daces
seraient établie… tout comme
avec les Celtes, dont le foyer
originel se trouve en Autriche
(Hallstatt)-Suisse et Est de la
France (800 avant JC), qui ont
essaimé par la suite dans une
grande partie du reste de
l'Europe, en France mais aussi
sur les deux rives du Danube
jusqu'à la Mer Noire.
Connaissance et découverte
L'irrésistible attraction poétique
du Musée du paysan roumain
Le musée qui ne cherche pas à séduire
De ce côté-ci de l'Europe, son intitulé prête à sourire. "Les étrangers nous demandent fréquemment pourquoi avoir choisi ce nom, rapportait l'ethnologue roumaine Irina
Nicolau (1946-2002) qui a participé à la création du Musée national du paysan roumain
à Bucarest. Ils trouvent que "paysan", ça sonne péjoratif, limitatif, anachronique."
L
ors d'une conférence donnée en
octobre 2012 à la Cité de l'architecture et du patrimoine à
Paris, l'historien de l'art Jean-François
Chevrier avait placé ce lieu au panthéon
des réussites muséographiques, aux côtés
de celles de Carlo Scarpa au Museo civico
di Castelvecchio à Vérone (Italie) et de
Lina Bo Bardi au Musée d'art de Sao Paulo
(Brésil). En 1996, le Muzeul Taranului
Roman a obtenu le Prix du musée européen de l'année. L'établissement, qui comporte un laboratoire d'anthropologie culturelle, est un antimusée. L'on préfère ici les ressources de l'attraction poétique ou du sensible
à celles de l'injonction didactique: cette "obsession d'expliquer", résumait le peintre Horia
Bernea (1938-2000), président de l'Union des artistes plasticiens roumains.
En février 1990, au lendemain de la "révolution de décembre", c'est à lui que le nouveau
ministre de la culture, Andrei Plesu, confie la refondation des collections nées de la création,
en 1906, du Musée d'ethnographie. Soit 100 000 objets, longtemps disséminés, auxquels s'ajoutent 10 000 acquisitions. Le nouveau musée s'installe dans l'ancien bâtiment de style néoroumain, réquisitionné quarante plus tôt pour accueillir le Musée du Parti communiste.
"La pauvreté des moyens est érigée en style"
La mise en espace des œuvres (vêtements, outils, objets de culte, tapis, croix, vases, stèles, icônes, cloches, tables, vitrines ou maison de bois...) échappe à tout modèle. Le recours,
parfois, à de sommaires constructions, frêles ou brutes, relève plus de l'installation artistique
éphémère que de la scénographie au long cours. Pour comprendre le sens de cet ensemble
rigoureux et déroutant, point trop d'explication, sinon dans de sommaires notices, certaines
épinglées ou scotchées à même le mur. "La pauvreté des moyens est érigée en style, expliquait en 1993 la spécialiste de patrimoine Isabelle Longuet dans la revue Terrain. Un style
volontaire et naïf qui fait écho au côté rudimentaire de la vie paysanne."
La même année, dans le catalogue de l'exposition inaugurale sur le thème de "La croix",
Bernea confiait: "Dans un musée, je ne perçois pas le discours muséal. Je le remarque, éventuellement s'il est mauvais... Est-ce que l'homme ne peut pas y venir seulement pour se
confronter à l'objet?".
Dans le journal qu'elle a tenu au moment où s'élaborait le Musée du paysan roumain,
Irina Nicolau expliquait la méthode de son condisciple. Il voulait, dit-elle, "pratiquer une
muséographie qui renaisse à travers chaque geste, une muséographie en état de perpétuelle naissance, opposée à la routine, à la recette, aux formules". Sous la forme d'un mode
d'emploi ironique conçu en 1996, l'inventive ethnologue définissait ce qu'elle appelait le
Musée antidote (M.A.), cousin imaginaire de celui du paysan roumain. L'article 8 explique
que "le M.A. ne veut pas séduire. Il ne vend pas de souvenirs, il ne nourrit pas. Il ne dorlote pas les enfants. Il fatigue". En 2012, l'artiste français Florian Fouché a revisité ces "commandements" dans des installations photographiques qui restituent sa vision du musée qu'il
compare à "un théâtre d'objets sans acteur". Que l'on se rassure, quiconque, où qu'il soit,
peut en être le spectateur. Le site Web du musée propose une impeccable visite à 360°.
Dépaysement garanti.
Jean-Jacques Larrochelle (Le Monde)
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
De 1973 à 1985, le Cénacle Flacara a fait vibrer la jeunesse roumaine
Mémoire
Le Woodstock roumain ou l'illusion de la liberté
L'époque d'or de Ceausescu s'est résumée, pour les jeunes, à la litanie télévisuelle des grandes réalisations du régime,
une culture cinématographique réduite aux "nanars" soviétiques et de bars fermant à 22 heures. Heureusement, tous ces
jeunes, condamnés à adhérer aux jeunesses communistes et au port de la cravate de pionnier, ont pu trouver auprès du
Cénacle Flacara l'illusion que quelque chose changeait. Ce mouvement est apparu, avec la bénédiction des autorités communistes, après l'euphorie du festival de Woodstock de 1969 en Occident. Loué par les uns pour le courage qu'il affichait
et les talents qu'il révélait, décrié par les autres pour de coupables compromissions, le Cénacle Flacara resta controversé
jusqu'à son interdiction en 1985.
L
e 17 septembre 1973, le comité central de l'Union
de la jeunesse communiste de Roumanie confia au
poète Adrian Paunescu la direction d'un cénacle itinérant, nommé Flacara ("la Flamme"), dans le but explicitement exprimé de mener de la jeune génération sur la voie de
"l'homme nouveau". Il s'agissait d'une manifestation qui, par
l'intermédiaire de la musique folk et de la poésie, "se proposait
de faire de chaque spectateur un admirateur de l'art de substance, de l'art engagé, par lequel lui et tout ce qui l'entoure,
monte avec tout ce qu'il y a de meilleur les marches ascendantes du socialisme et de promouvoir un art vrai, conçu pour les
gens, un art d'un profond militantisme civique et patriotique".
Le Cénacle Flacara reste donc le plus important et le plusmarquent phénomène de masse comportant une filiation culturelle
avec la période communiste.
du message de tout ce qui existait à l'époque.
Lucia Dragomir a rencontré de nombreux et anciens participants. Ses travaux ont mis en évidence la rupture entre les
buts officiels affichés à la création du Cénacle et la perception
que les spectateurs avaient de cette manifestation. Les participants affirment tous qu'ils n'avaient pas pris conscience du
message idéologique transmis pendant les spectacles. Il y
aurait eu une manipulation subtile des masses, par le biais de
symboles, d'exercices d'exaltation et de suggestion collective,
qui aurait produit une impression de liberté comme dans un
vrai rituel. Les anciens participants déclarent qu'ils "s'intéressaient beaucoup moins à la dynamique et à la politique qui
étaient à l'origine de cette manifestation et plus à la poésie et
à la musique qu'on pouvait y écouter".
"Çà n'avait rien à voir avec Ceausescu"
Un jeune public berné
Alors que le critique littéraiLa direction du Cénacle a été
re Eugen Negrici affirme que
confiée au poète Adrian Paunescu,
Paunescu a mieux que quiconque
figure représentative du rapport
servi le régime et la propagande
poésie-politique sous un régime
de Ceausescu, encourageant le
autoritaire. A travers la trajectoire
national-communisme, cristallilittéraire et politique de cet auteur,
sant et incarnant la doctrine du
on peut observer non seulement le
régime, beaucoup de participants
double jeu des écrivains envers le
considèrent que les poésies à
pouvoir communiste, mais aussi
caractère politique n'étaient qu'ules stratégies du pouvoir pour prone sorte de cadre, nécessaire à
mouvoir sa politique par l'interl'époque, "un masque". A ce
médiaire des artistes.
Avec son cénacle itinérant, le poète Adrian Paunescu entendait moment-là, ils affirment ne pas
mener la jeune génération sur la voie de "l'homme nouveau". s'en être rendu compte.
La sociologue roumaine,
Lucia Dragomir a réalisé une
Aujourd'hui, il est établi qu'il
enquête très fouillée sur le phénomène "Cénacle Flacara".
s'agissait de propagande, d'exaltation du patriotisme. "Mais on
Dans ses écrits, elle rappelle que "la thématique et les symbos'en fichait pas mal. On s'en fichait de leur communisme. Moi
les qui faisaient appel aux mythes de la propagande nationaje ne me sentais ni communiste, ni patriote, j'y allais pour m'ale-communiste étaient mis en avant pendant les spectacles du
muser. C'était ça, la distraction, on était avec des amis, on
Cénacle. Mais tout y était présenté d'une manière plus subtile,
écoutait des poésies et on chantait. Quel communisme? Qui
plus insidieuse, dans une forme plus conforme aux goûts du
venait là pour ça?". D'autres ne se rappellent même pas les
jeune public auquel ils s'adressaient". Les organisateurs
chansons imprégnées d'idéologie: "Ça n'avait rien à voir avec
étaient peut-être conscients qu'un style direct, trop rigoureux,
Ceausescu, moi j'allais là par plaisir, s'il y avait eu quelque
n'aurait pas réussi à attirer des foules de jeunes.
chose avec Ceausescu, qui serait allé à la fête? Il n'y avait rien
D'ailleurs, c'est ce que les participants interviewés,
de forcé là" ou alors: "Je ne me rappelle rien de politique, ou
lycéens à l'époque, ont souligné: "Si cela avait été comme pour
bien il n'y en avait pas, ou bien moi je me souviens de rien de
le 23 août (fête nationale roumaine sous le communisme), on
tout ça". Et encore plus: "on n'avait pas un sentiment d'endocn'y serait pas allé". Cette manifestation a eu pour principale
trinement comme à l'école ou comme à la télé".
qualité de se détacher par la poésie, la musique et la subtilité
(suite page 46)
45
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Jours magyars de Cluj
(suite de la page 45)
La quatrième édition des jours culturels magyars de Cluj s'est tenue sur
une semaine, fin août, autour d'un festival de musique et danses populaires,
les troupes se produisant dans le centre-ville ayant revêtu leurs costumes
traditionnels. Des expositions étaient
également proposées aux curieux qui
pouvaient aussi accéder à la tour de
l'église catholique Saint Michel, donnant une vue plongeante sur la capitale de la Transylvanie.
Communisme vendu à la sauce occidentale
Festival des tarafs
et fanfares à Bucarest
46
Le musée national du village de
Bucarest a accueilli la huitième édition
du festival des
tarafs (musique
tsigane) et fanfares des villages
qui s'est déroulée
le dernier weekend d'août.
Organisée par le musicien Grigore
Lese, il a permis aux spectateurs de
se plonger dans l'atmosphère des
cours de voivodes et de la Roumanie
séculaire. Au programme, le lautar Nea
Costina de Cezieni (Olt), les tarafs de
Goicea (Dolj), du judet de Gorj, de
Ianca (Olt), de Soporu de Câmpie
(Cluj), de Boroaia (Suceava), les fanfares de Dârvari (Mehedinti), Vinerea
(Alba), Lapusnicu Mare (Caras
Severin), des musiciens et danseurs
du Maramures.
Nicu Alifantis
à Toulouse
A l'occasion de la journée de la langue roumaine, l'Association FrancoRoumaine de Toulouse avait invité le
chanteur Nicu Alifantis, tête d'affiche de
la musique folk roumaine, pour deux
concerts le 31 août. Fort d'une carrière
débutée en 1973, l'artiste a déjà signé
18 albums, donné 4 500 concerts et
composé plus de 100 musiques de
théâtre et de film. Il est un défenseur
de l'authenticité et de la langue roumaine, mettant en musique ses plus beaux
poèmes et a notamment fait la première partie du spectacle de Bob Dylan,
lors de sa tournée roumaine.
Tant qu'on n'y parlait pas de communisme et de communistes, les jeunes étaient
contents de participer au Cénacle: "Des poésies avec une nuance patriotique, oui, il
y en avait, mais pas
avec le parti, pas avec
Ceausescu". Certains
se souviennent pourtant que, de temps en
temps, Paunescu faisait acclamer le nom
du président ou que les
poésies étaient même
modifiées, "contenant
tout d'un coup un vers
qui
parlait
de
Ceausescu". Parfois
on ovationnait même
le nom de Paunescu
Le Cénacle Flacara a ouvert la voie au rock et à la musique folk.
lorsque celui-ci faisait
semblant de mettre fin au spectacle.
Cependant, les témoignages laissent l'impression que cet aspect était secondaire,
que c'était un comportement de "fans" criant pour faire plaisir à l'idole afin qu'à son
tour elle leur fasse plaisir en prolongeant le spectacle.
Ouvrant le chemin au rock et à la musique folk
Alors, comment expliquer le succès du Cénacle Flacara? Tout d'abord par l'atmosphère qu'engendraient la musique, la danse et la poésie, une atmosphère particulière qui se distinguait de tout ce qui existait à l'époque. Alors que le politique s'exprimait brutalement en direction d'une population de plus en plus réticente, le
Cénacle savait traduire d'une manière plus efficace les thèmes privilégiés du discours
officiel et s'adresser aux jeunes gens dans un style qui leur était propre, à l'occidentale. La musique folk était conçue comme un moyen propice à la transmission de
créations patriotiques et révolutionnaires, favorable à "l'expression des sentiments les
plus aigus, transfigurant l'attitude de la jeune génération envers son époque, envers
tel ou tel aspect politique, social ou culturel de notre réalité immédiate". Pourtant,
les jeunes spectateurs, privés de musique moderne, ressentaient ce genre musical
comme un équivalent des courants musicaux protestataires de l'Occident. Le Cénacle
a ouvert le chemin au rock et au folk.
Récupérer le défoulement du public
Tout dans la conception des manifestations concourait à une surexcitation collective : les poésies récitées par Paunescu et par des acteurs professionnels, les vers
scandés par le public, les chansons que tout le monde connaissait et chantait dans un
balancement collectif, les briquets allumés.
Ce spectacle "interactif" donnait la sensation de pouvoir s'exprimer librement
dans une époque de censure et d'autocensure. Rien de l'endoctrinement n'a été retenu par les anciens participants. Au contraire, ils se rappellent les billets audacieux
envoyés à Paunescu pour lui réclamer telle ou telle poésie ou chanson, pour lui transmettre des impressions sur le spectacle ou pour lui poser toutes sortes de questions,
billets qu'il lisait sur la scène.
On ne saura jamais s'il y avait un tri de ces messages. En même temps, le spectacle donnait la possibilité aux spectateurs d'exprimer leurs qualités artistiques : "Si
moi j'étais doué, il me laissait là, sur la scène, me manifester, chanter…"
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Le mot liberté est vraiment le mot clef de tous les témoignages des interviewés. Ils ont perçu le Cénacle avant tout
comme une possibilité de s'amuser librement, ensemble. A une
époque où les distractions étaient contrôlées, où les discothèques fermaient à 22 heures, "là on pouvait rester jusqu'au
matin et après cela, on rentrait tous à pied à la maison.
Pratiquement on continuait la distraction dans la rue, on
chantait ensemble. C'était extraordinaire, ces rues pleines de
gens qui chantaient…". "Il n'y avait pas d'autre événement où
on pouvait s'amuser comme ça, nous on n'a pas eu autre
chose". De sorte que le Cénacle était attendu dans chaque ville
: "Chaque fois que Paunescu venait dans notre ville, j'adorais
y aller, je n'ai pas raté un seul de ses spectacles".
Oasis de liberté ou soupape de sécurité ?
Spectacles qui contribuaient à la création d'une illusion de
liberté, à la mise en place d'un cadre apparemment dénué de
toute contrainte et faisaient office de soupape de sécurité pour
toute une génération. Cela
permettait aussi de rassembler les jeunes sur les stades
et de leur offrir une distraction collective contrôlée. En
fait, le Cénacle Flacara,
sous une forme plus souple,
remplissait la même fonction de renforcement du
régime. Il tenait son rôle
avec efficacité : beaucoup
d'anciens participants disent
qu'ils préféraient le cénacle
à la discothèque ; les
parents des adolescents de
15-17 ans permettaient plus facilement à leurs enfants d'aller
"chez Paunescu" plutôt qu'en boîte. Chez Paunescu, il y avait
"quelque chose de sérieux, de la poésie, de la musique, pas
comme dans les boîtes. Si j'avais dit à mon père que je voulais
aller en boîte, il n'aurait jamais
accepté".
Certains interviewés se rappellent que Paunescu critiquait
parfois le régime communiste,
"qu'il récitait des poésies contre
les communistes, je me souviens
d'une poésie qui disait: "Il est
long le chemin vers le communisme"… Là, il se dressait contre eux. Il écrivait des odes à
Ceausescu, peut-être, mais il a
écrit aussi une poésie intitulée "Les Analphabètes", où il s'attaque aux communistes, non ?". Paunescu, lui-même, affirmait
bien plus tard "avoir dépassé l'interdiction et remis en circulation les chansons censurées". D'autres se souviennent qu'il
tolérait et encourageait chez les jeunes un comportement "à
l'occidentale": "J'étais très heureuse, je me sentais vraiment
libre quand il nous appelait la génération en blue-jeans et
Adidas, moi qui pouvais à peine trouver une paire de vrais
Connaissance et découverte
jeans à l'époque!". Certains croient même aujourd'hui que
Paunescu "se servait du parti pour faire connaître aux gens la
poésie, sa poésie".
Paunescu jeté aux orties après avoir servi
En 1985, Paunescu est éloigné par le pouvoir communiste. Rançon de sa position ambiguë ? Il est difficile de savoir
avec certitude ce qui s'est passé exactement, mais en 1985 le
Cénacle Flacara et, avec lui, la revue et l'émission de radio
portant le même nom sont interdits par le pouvoir communiste. Selon la version officielle, l'interdiction du Cénacle serait
due à un accident survenu dans un stade pendant un spectacle.
A en croire Paunescu, l'interdiction est la conséquence de l’attitude contestataire qu’il manifestait vis-à-vis du régime communiste de l'époque.
Il est possible cependant que le Cénacle, créé dans le but
de former une génération attachée aux valeurs communistes,
n'ait pas apporté les résultats escomptés. Il augmentait la popularité du poète au détriment
du culte de Ceausescu.
D'ailleurs, la plupart des
participants se rappellent
avoir scandé dans les stades le nom de Paunescu et
pas celui de Ceausescu. En
même temps, sur la scène
et dans le public, il y avait
parfois des manifestations
qui dépassaient les limites
imposées par le régime.
Paunescu encourageait
à la fois un comportement
patriotique et dans l'esprit
communiste, mais aussi une manière d'être non conformiste: il
faisait l'apologie d'une certaine liberté - comme de porter des
blue-jeans et les cheveux longs -, comportement mal vu par le
régime en place. L'impression de liberté offerte par cette manifestation était si grande que les
rumeurs qui circulaient à l'époque sont significatives: on parlait d'une certaine liberté sexuelle
pendant les spectacles, d'une
consommation exagérée d'alcool,
de "débauche".
Les dirigeants communistes
ont-ils pensé que cette soupape
offerte aux jeunes risquait de
devenir dangereuse à un moment
donné? L'absence de réponse
précise à toutes ces questions montre la difficulté d'analyser
une telle époque dont les mécanismes sont d'autant plus complexes qu'ils étaient le plus souvent dissimulés. Mais le poète
Adrian Paunescu, décédé en novembre 2010, est bien représentatif du double jeu du pouvoir autocratique qui se servait
des artistes tant qu'il en avait besoin et les éloignait lorsqu'ils
dépassaient les limites imposées.
Réalisé par Yves Lelong
47
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Histoire
Sur les pas
de Badea Cârtsan
Mirel Magop, un globe trotter de
Suceava de 44 ans, est parti le 7
août de la maison mémoriale de
Badea Cârtsan, à Cartisoara, près de
Des méthodes qui ont
Inquisition et chasse
"Si un homme ou une femme ont en eux l'esprit d'un mort ou un esprit de divination, ils seront punis de mort; on les lapidera: leur sang retombera sur eux.
(Lévitique 20:26-27)". L'Ancien testament n'y va pas par quatre chemins: les
esprits impurs, sorcières ou voyantes ne méritent pas de vivre. Au cours du Moyenâge, la papauté - notamment à partir de 1320 sous le pontificat du pape Jean XXII
- a émis plus d'une centaine de bulles condamnant l'hérésie associée au péché. En
Europe, de nombreuses personnes innocentes - surtout des femmes - furent brûlées
vives ou décapitées. Hélas, les prélats transylvains n'ont pas été en reste: ils se sont
scrupuleusement conformés aux ordonnances papales. Et, plusieurs siècles plus
tard, leurs méthodes ont inspiré les bourreaux staliniens.
L
48
'Eglise de Rome jugeait hérétiques la sorcellerie et la voyance. Elles étaient
punies de mort. En décembre 1484, le pape Innocent VIII publie la bulle
"Summis desiderantes affectibus" qui autorise l'Inquisition à intervenir dans
les affaires de sorcellerie à la suite de laquelle paraît en 1486 "Malleus maleficarum" (le
marteau des sorcières) à Strasbourg. Cet ouvrage rédigé par deux inquisiteurs dominicains allemands, Heinrich Kramer et Jacob Spenger, est resté pendant trois cents ans le
manuel de référence en matière de torture et de procès de sorcières. En Transylvanie, les
procès en sorcellerie se sont répandus sous le règne du prince Mihai Apafi (1661-1691).
La plupart eurent lieu aux XVIème et XVIIème siècle. La simple suspicion de pratique
de la sorcellerie suscitait alors l'opprobre de la communauté. Les suspects étaient bannis
et menacés de mort en cas de velléité de retour. En Europe occidentale, les tortures et les
exécutions appliquées aux suspects de sorcellerie étaient monnaie courante. Beaucoup
moins en Transylvanie. Les premiers procès en sorcellerie apparurent au XVIème siècle.
25 d'entre eux se sont déroulés à Cluj.
Sibiu, en opinci (savates) et costume
populaire. Il entend répéter l'exploit
du fameux berger autodidacte des
monts Fagaras, 117 ans plus tard et
A Cluj, une rue baptisée "allée des sorciers"
102 ans après sa mort. Badea
Cartsan avait rejoint la colonne de
Une verrue piquée avec une aiguille et qui ne saignait pas suffisait à accuser une
Trajan, après 2000 kilomètres parfemme de sorcellerie. Il y avait aussi l'épreuve par l'eau. "L'accusée était jetée dans l'eau
courus à pied. Le Sucéavain espère
pieds et poings liés et, si elle ne coulait pas, preuve était faite qu'elle était innocente",
arriver à Rome le 1er décembre, jour
écrivait en 1926, Gheorghe Manzat, dans la Monographie de la ville de Dej. Sinon, elle
de la fête nationale roumaine. A la
était déclarée coupable… si ce n'était pas trop tard.
différence de son modèle, qui n'avait
Le cas de Katalin Szabó est exemplaire. Elle a succombé dans de terribles souffranemporté que le strict nécessaire pour
ces, simplement parce qu'elle ne pouvait pas répondre aux accusations portées contre
voyager, il s'est équipé de quatre
elle. De toute façon, quelle qu'ait été sa réponse, son sort aurait été le même. Même le
paire d'opinci et de plusieurs chemisilence jouait en défaveur du supplicié. L'Eglise se référait à l'adage "qui tacet, concenses, sans oublier de se munir de livtiret" - qui ne dit mot, consent - Mieux, le refus de répondre constituait pour le jury une
res en langue roumaine, comme le
dissimulation qui entraînait d'autres séanberger qui les parcourait en surces de tortures et ainsi de suite. Le résultat
veillant son troupeau.
aurait été le même.
Mirel Magop fera un détour par
"Attendu que la sorcellerie est incomSarmizegetusa, berceau de la
patible avec les pratiques chrétiennes, de
Roumanie, pour y ramasser une poimême que le Seigneur la punit, vous,
gnée de terre qu'il veut déposer au
Katalin Szabó, serez conformément à la loi
pied de la colonne de Trajan, geste
torturée puis mise à mort". Cette sentence
qu'avait fait son prédécesseur.
fut prononcée le 15 mai 1584, première
Quand il était arrivé dans la cité
condamnation consignée dans les archives
papale, pendant l'hiver 1896, Badea
de la ville de Cluj. D'autres suivirent.
Cartsan, épuisé, s'était endormi,
Citons celle de la baronne Szaniszlo, en
adossé au célèbre monument. Un
1723, innocentée après son premier procès.
gendarme italien, le voyant affublé
Elle fut libérée. Mais, accusée de poursuivde sa tenue s'était exclamé: "Un
re ses coupables pratiques, elle fut condamSuivant l’itinéraire de Badea Cârstan, Mirel Magop
Dace est descendu de la colonne !".
espère arriver à Rome le 1er décembre. née au bûcher trois ans plus tard.
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
inspiré les bourreaux staliniens
aux sorcières en Transylvanie
Une mère dénoncée par ses propres enfants
Le plus grand nombre d'accusations furent prononcées à
Dej (département de Cluj). Ainsi, le 20 août 1742, la femme
d'Ioan Balazs fût dénoncée par ses propres enfants. Ils affirmèrent ne voir aucun inconvénient à ce que leur mère soit torturée, décapitée, son corps brûlé et ses biens saisis.
11 mai 1749, Stefan Iakatos et sa femme sont accusés par
Borbara Oras de "la maltraiter et de la transformer en chat".
Les époux ont été condamnés.
Le 12 mars 1712, Ana Lazar du village de Mica, près de
Dej, est accusée de pénétrer dans les maisons sous la forme
d'une chienne et d'y faire des
dégradations. On raconte qu'un
homme, dans la maison duquel
elle était entrée, l'a attrapée
puis attachée avec des chaînes.
La chienne se serait transformée en femme. Elle aurait été
soumise à l'épreuve par l'eau
(on ne connait pas la sentence).
D'autres procès en sorcellerie
eurent lieu à Dej en 1755,
1756, 1760, 1763 et 1764.
A Cluj, les exécutions par
le bûcher, la décapitation ou la
pendaison, avaient lieu habituellement sur la place centrale, face à l'église Saint-Michel.
Ensuite, les cendres ou les
corps des suppliciés étaient
apportés à la périphérie de la
ville, en face de la Tour des
tailleurs (Turnul croitorilor) et
laissés là quelques temps pour
l'exemple. D'ailleurs, la voie
empruntée entre le lieu de
l'exécution et celui de l'exposition des corps fut baptisée
"Allée des sorciers" (Aleea
vrajitoarelor).
Certaines sources affirment que, au cours des siècles de
persécution religieuse en Europe, près de neuf millions de
femmes furent exécutées pour sorcellerie, chiffre beaucoup
plus élevé que celui de l'Holocauste. Au cours de la même
période, 40 000 hommes environ furent accusés des mêmes
pratiques.
Les procès de sorcières sur le territoire de la Transylvanie
furent interdits en 1768 par l'impératrice Marie-Thérèse.
Le séminariste Staline
inspiré par le modèle médiéval
L'Inquisition est une forme de procès pénal médiéval. Le
"témoignage" de l'accusé, c'est-à-dire la reconnaissance de sa
culpabilité, est le but principal de l'enquête et vise avant tout à
obtenir des aveux. Pour arriver à ce résultat, la torture était
admise et les preuves objectives totalement négligées. Peu
importait les pressions physiques et psychiques sous lesquelles
l'accusé "témoignait". Seuls ses aveux comptaient.
Les pratiques inquisitoriales découlaient de l'interprétation libre d'un passage de la Bible. Notamment celui-ci, attribué à Jésus-Christ, qui dit que : "Si quelqu'un ne demeure pas
en moi, il est jeté dehors et il sèche comme le sarment ; et on
ramasse ces sarments, et on les jette au feu, et ils brûlent."
C'est à partir de là qu'on destina le bûcher aux hérétiques et
aux adeptes de pratiques diaboliques comme la sorcellerie et
la voyance.
Le but religieux - et en
grande partie politique - de ces
pratiques dans le monde chrétien était d'ancrer les récents
convertis dans leur orthodoxie
et d'affirmer l'unité de l'Eglise.
Les exécutions publiques,
spectaculaires par leur cruauté
et leur atrocité, devaient hypothéquer la "sagesse" des
pécheurs. Les tortures sont une
souffrance qui atteint la "chair
du péché", mais purifie l'âme.
Le "pécheur" est tel une brebis
perdue que le berger doit ramener de force dans le troupeau.
Paradoxalement, la dénonciation absout le péché. C'est-àdire que si un accusé dénonce
d'autres "coupables" et apporte
la preuve de leur culpabilité,
celui-ci échappera à la peine
capitale.
Les procès staliniens qui
ont agité l'Union soviétique
dans les années 30 mais aussi le camp communiste européen,
dans les années 50, se sont directement inspirés des pratiques
de l'Inquisition. Bon élève du petit séminaire de Tbilissi,
Staline en connaissait bien la lettre et l'esprit. Comme dans les
procès médiévaux, les accusés étaient condamnés sur la base
d'aveux obtenus sous la torture. Une pratique identique aux
supplices de l'Inquisition espagnole. Pour les juges de l'Eglise,
la puissance de la foi était censée donner au présumé coupable
la force de résister à la torture. Pour les enquêteurs et les juges
communistes, la foi dans le parti communiste, en revanche,
devait renforcer les âmes au-delà de tout tourment du corps.
Comme pour les procès de l'Inquisition, les dénonciateurs
et les indicateurs pouvaient voir leur peine allégée ou absoute.
Yves Lelong
49
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Histoire
Brasov avait aussi reçu le nom d'Orasul Stalin…
Vichinsky citoyen d'honneur de Sibiu
Il y a des honneurs dont on se passerait bien… ou qu'on préfèrerait oublier. Ainsi, entre le 8 septembre 1950 et 24
décembre 1960, Brasov fut nommée Orasul Stalin (Staline-ville) en l'honneur du "Petit Père des peuples". Durant cette
période, sur le versant du mont Tâmpa, la forêt fut "découpée" pour y incruster avec des arbres d'espèces différentes, sur
tout le versant, les lettres " STALIN " dont les dernières traces de coloration ont presque disparu ces dernières années.
S
ibiu ne se vante pas de la distinction qu'elle a accordée à un des pires bourreaux staliniens, en visite
dans la ville, en 1947. Le maire de l'époque, Vasile
Hada, personnage servile imposé par les communistes en mars
1945, décidait de nommer Andreï Ianouarievitch Vichinsky
(photo), procureur soviétique au procès de Nuremberg et futur
ministre des affaires étrangères de l'URSS, citoyen d'honneur
de la ville. Vichinsky avait été dépêché en 1945 par Staline
pour mettre au pas la Roumanie et la faire entrer dans le giron
de Moscou. Terreur et brutalité - Il menaça de son poing dans
la figure le jeune roi Michel qui refusait de céder à ses injonctions - furent ses principaux moyens de persuasion… avec la
présence de l'Armée Rouge. C'est lui qui avait imposé Petru
Groza, un transfuge du PC proche de Moscou, à la tête du gouvernement qui conduira la Roumanie au communisme.
Un Fouquier-Tinville des temps modernes
50
Pour le remercier, Vasile Hada organisa des festivités en
l'honneur de celui dont le patronyme est devenu un nom commun, symbole absolu des dictatures et des régimes totalitaires,
sorte de Fouquier-Tinville moderne, dont la notoriété a dépassé dans la postérité la renommée terrible de l'accusateur public
de la Révolution française, au temps de la Terreur.
Né à Odessa, en 1883, dans une famille polonaise catholique, juriste de formation, parlant bien le français, Vichinsky,
avocat à Bakou, a fait très tôt la connaissance de Staline.
D'abord universitaire, il devient procureur en 1931. A ce titre,
il sera l'accusateur public des vieux bolchéviks lors des trois
procès de Moscou et le théoricien du "droit prolétarien", dont
le principe était que des aveux suffisent à condamner un prévenu. Collaborateur essentiel du système stalinien, Vichinsky
a donné à ce pouvoir totalitaire le visage du droit et de la légalité pour justifier l'élimination physique de tous les opposants.
Les Procès de Moscou, vaste mise en scène, qui reprenaient les
éléments judiciaires présents dans les systèmes démocratiques
- procureurs, avocats, plaidoiries, droit d'information, etc. -n'étaient qu'une caricature de leurs modèles occidentaux. Mais
cet apparent respect des formes était d'autant plus redoutable
qu'il légitimait ainsi les accusations les plus inacceptables et
les plus abjectes. Les procès nazis n'auront rien à lui envier.
Artisan de la constitution
"la plus démocratique du monde"
Les accusés reconnaissaient eux-mêmes les forfaits qu'on
leur reprochait parce qu'ils étaient soumis à des menaces, tortures, qui n'épargnaient par leurs familles, ou, pire, parce qu'ils
avaient reçu des promesses de clémence s'ils agissaient ainsi.
Cette stratégie ne requérait aucune preuve alors même -
comme le montra le procès
de Zinoviev - que les engagements du procureur et de
ses collaborateurs du
NKVD n'ont jamais été
tenus, la sentence de mort
étant immédiatement exécutée après l'énoncé du
verdict.
Vichinsky deviendra
l'expert de l'apparence juridique d'une dictature
implacable, comme le
montre l'exemple de la
constitution de 1936, dont la rédaction lui est revenue en partie et qui a été qualifiée en Union Soviétique de "plus démocratique du monde", alors qu'elle n'a jamais envisagé, notamment, la pluralité politique ou la liberté de la presse.
En 1940, Vichinsky était envoyé comme commissaire en
Lettonie. Chargé de l'annexion de cet État par l'URSS, il y
déclencha des purges sanglantes. Sans doute pour le remercier
de son aide décisive lors des procès de Moscou, Staline le
récompensa en faisant de lui un membre éminent du corps
diplomatique soviétique. Il l'accompagna en février 1945 à la
conférence de Yalta, puis l'assista lors de la Conférence de
Potsdam en juillet 1945.
Tribun de la Guerre froide
Vichinsky devint ensuite, en 1945, représentant permanent
de l'Union soviétique au Conseil de sécurité de l'ONU. Il fut à
ce titre, un des artisans de la Guerre froide, prononçant plusieurs discours qui font date à la tribune des Nations unies.
Des détails aujourd'hui mieux connus, démontrent ses travers moraux. Vichinsky était capable de traiter avec certains
accusés pour exiger d'eux de l'argent tout en les dépouillant de
leurs biens (cas de la datcha de Serebriakov en janvier 1937,
devenue propriété du procureur, où Staline fut ensuite reçu
plusieurs fois). De même, prendre la défense de certains prévenus pouvait être dangereux. On cite l'exemple de cet officiel
du parti qui, venant au secours de sa nièce, osa exprimer des
critiques envers les juges, le conduisant aussitôt à être accusé
d'espionnage puis à être exécuté sans délai.
Le décès de Staline en mars 1953 ne mit pas un terme à la
carrière de l'ancien procureur, qui conserva son poste.
Quelques mois plus tard, le 22 novembre 1954, il mourut brutalement à New York. Ce décès subit fera quelque temps planer des rumeurs d'assassinat imputé aux nouveaux dirigeants
soviétiques. Quoi qu'il en soit, il reçut des funérailles nationales à Moscou avant d'être inhumé au pied du Kremlin.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Histoire
Bourreau des Moldaves, Serghei Goglidze
a terminé exécuté comme son maître, Beria
S
erghei
Goglidze
(1901-1953) a été l'un
des adjoints les plus
efficaces de Lavrenti Beria, le
chef du NKVD, l'ancêtre du
KGB, et fut appelé à sévir en
Moldavie. Né dans une famille
de cuisiniers de Géorgie, compatriote donc de Staline, il rejoint l'Armée rouge dès ses 17 ans,
et est très vite chargé de la lutte contre les ennemis de classe
et les saboteurs. Le jeune révolutionnaire se distingue en
Ukraine, puis en au Caucase, où il fait la connaissance de
Beria, l'assistant dans la répression de masse en Géorgie.
Nommé responsable du NKVD pour la région de Leningrad,
en 1938, il s'y fait remarquer par sa férocité et est chargé par
Beria de l'élimination du chef du NKVD central, Nicolai Ejov,
qui a conduit d'une manière impitoyable la terreur stalinienne
en 1937-1938, mais est tombé en disgrâce.
Après l'annexion de la Bessarabie par l'URSS, le 28 avril
1941, Goglidze devient le représentant du comité central du
Parti communiste soviétique pour la Moldavie. Avec l'assenti-
ment de Staline, il entreprend alors la déportation en masse des
"éléments antisoviétiques" de Bucovine et de Bessarabie. Elle
commence dans la nuit du 12 au 13 juin 1941. Plus de 30 000
personnes sont entassées dans des wagons et acheminées vers
le Kazakhstan et la Sibérie: membres des anciens partis politiques, juges, fonctionnaires, policiers, gendarmes, officiers de
l'armée royale roumaine, commerçants, maires, etc. et leurs
familles. 8500 Moldaves finiront au goulag.
Au début des années 50, Goglidze devient ministre de la
sécurité nationale de l'URSS, mais la mort de Staline, en mars
1953, entraine la chute et l'exécution de son protecteur Beria
qui a tenté de s'emparer du pouvoir. Goglidze se trouve alors
en RDA. Il est arrêté le 3 juillet 1953, transféré à Moscou,
condamné à mort pour acte terroriste, haute trahison et activité antisoviétique et exécuté comme le sera son maître, dans
une cave du NKVD.
Goglidze ne s'était pas contenté de déporter, torturer les
Moldaves et ses autres victimes, il volait aussi ses victimes. En
1948, sa femme et sa fille avaient été assassinées par des cambrioleurs qui s'étaient introduits dans sa maison où s'entassaient des objets de valeur, tableaux, bijoux, antiquités.
La savante Stefania Maracineanu victime
d'une bourde de la Poste roumaine 51
L
a Poste roumaine a décidé d'honorer des femmes roumaines qui se sont distinguées dans le domaine de la science et a émis une série spéciale de 3 timbres
en début d'année. Malencontreusement, l'un d'entre d'eux, dédié à la chercheuse de renommée internationale Stefania Maracineanu, s'il mentionne bien son nom…
porte l'effigie de Marie Curie. Une bévue monumentale, car la Roumaine associée dans
ses travaux au sein du même laboratoire parisien avec Irène Joliot-Curie, la fille de la
savante polonaise, et de son mari, Frédéric Joliot, revendique à leur place la découverte
de la radioactivité artificielle. La brune Bucarestoise apparait donc maintenant sous les
traits de la blonde Polonaise.
La découverte de la radioactivité artificielle qui a valu le Prix Nobel aux Joliot-Curie,
en 1935, prête à polémique. Pour certains historiens, il semblerait que ce pas en avant de
la science revienne à Stefania Maracineanu, arrivée en France en 1922 grâce à une bourse, et qui travaillait avec le célèbre couple dans le laboratoire parisien de l'Institut du
radium, tout en préparant sa thèse à la Sorbonne qu'elle obtiendra en 1924.
La scientifique, qui a alors 42 ans, avait remarqué que le plomb des conteneurs utilisés pour stocker le radium continuait à être radioactif. Poussant plus loin ses observations,
elle notait que le polonium, en se décomposant, émettait des particules alfa qui transformait certains matériaux. Elle avait mis à jour le phénomène de radio-activité artificielle.
Dans une interview au "Neues Wiener Journal", Frédéric et Irène Joliot-Curie reconnurent volontiers que cette découverte revenait à leur jeune collègue roumaine… mais ce
Le bon nom... mais la mauvaise photo furent eux qui reçurent le Prix Nobel, en 1935. Stefania Maracineanu en fut mortifiée car,
le couple ne mentionna pas ses mérites, alors qu'il avait utilisé ses travaux.
Restée jusqu'en 1930 en France, la Roumaine, chimiste et physicienne, se consacra à l'étude des effets du rayonnement solaire sur les substances radioactives. Elle en tira une théorie très controversée établissant des liens entre les rayons du soleil, la pluie,
les séismes et la radioactivité artificielle, ses conclusions contribuant à l'isoler de l'équipe de chercheurs gravitant autour des Curie.
Rentrée en Roumanie, en 1930, elle persévérera et réussira à déclencher la première pluie artificielle au monde, en 1931, dans
le Baragan, en injectant des sels radioactifs dans les nuages bas. Elle créera au sein de l'Université de Bucarest, où elle enseignera, le premier laboratoire de recherches sur la radioactivité artificielle de Roumanie. Stefania Maracineanu est décédée le 15 août
1944, à 62 ans, des suites d'un cancer professionnel, comme Pierre et Marie Curie et les Joliot-Curie.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Fort 13 de Jilava…
Histoire
La valse
des prisonniers
52
1907 : prison militaire dans laquelle
des paysans rebelles sont détenus.
Première Guerre mondiale : soldats réfractaires, puis gradés roumains
sous occupation allemande.
1921-1944 : militants communistes
et antifascistes
1933 : communistes tels que
Gheorghe Gheorghiu-Dej, Chivu
Stoica, Alexandru Draghici, Gheorghe
Vasilichi...
Novembre 1940 : exécution de 64
membres de la Garde de fer.
A partir de 1944 : prisonniers de
droit commun et "ennemis du peuple"
anticommunistes.
Juin 1946 : exécution d'Ion
Antonescu.
1948 : la prison devient " civile " et
non plus militaire.
1954 : elle devient un site de transit
pour les prisonniers politiques, entre
deux lieux de détention, ou avant d'être
envoyé dans un camp de travail.
1967 : il n'y a officiellement plus de
prisonniers politiques.
1973 : début de la construction du
nouveau bâtiment.
1977 : abandon complet de l'ancien
site.
Décembre 1989 : des manifestants
y sont détenus brièvement.
Les archives de la prison
"Il existe des archives sur le Fort 13,
indique Constantin Vasilescu de
l'IICCMER, à l'administration pénitentiaire. Depuis 2007, nos collègues les
dépouillent. C'est très intéressant car
jusqu'alors, nous ne disposions que
des témoignages des victimes, sans
preuve scientifique. Or, si les fiches sur
les prisonniers sont succinctes, les
dossiers sur le personnel de la prison,
les gardes, les officiers, les fonctionnaires, sont pour leur part extrêmement
détaillés. Certains comportent jusqu'à
300 pages ! Malheureusement, ils ont
été conservés dans de mauvaises
conditions, certains sont endommagés,
mais on peut quand même les utiliser".
Le 4 décembre dernier, le ministère de la Justice et celui de la Culture se sont
mis d'accord pour attribuer le statut de monument historique au Fort 13 de
Jilava, une première étape pour faire de cette prison - par laquelle sont passés la
plupart des prisonniers politiques victimes du communisme - un lieu préservé.
Reste à trouver comment honorer la mémoire de ceux qui y ont souffert.
C
'est un lieu dont les murs moisis suintent l'horreur, la souffrance, la désespérance. Des murs humides, imprégnés de sueur, de larmes, de tout ce
qui fait qu'un homme se liquéfie d'effroi. Le Fort 13 de Jilava porte trop
bien son numéro porte-malheur, car pendant des années, ceux qui y pénétraient ne
savaient pas s'ils en ressortiraient, ou alors dans quel état, ou encore pour quelle autre
funeste destination.
Treizième sur les dix-huit forts qui ceinturent Bucarest, il a été construit comme
les autres, sous Carol 1er, pour défendre la ville contre les éventuels assauts ottomans,
entre 1870 et 1890. Creusé jusqu'à dix mètres sous terre, entouré de surplombs terreux
et de tours de guet, il se trouve à proximité de la commune du même nom, Jilava, qui
signifie "humide", du fait de la nature marécageuse des alentours.
Les paysans de la "rascoala" de 1907 enfermés
Initialement pensé pour abriter artilleries et munitions, rien ne le destinait à devenir prison. C'est pourtant ce qu'il est devenu dès 1907, en détenant les paysans qui se
révoltèrent contre les grands propriétaires terriens au cours de la funeste "rascoala",
immortalisée par Rebreanu. Passeront dès lors entre ces murs prisonniers politiques de
tous bords, selon les
vicissitudes de l'His toire (voir ci-contre).
Si séjourner au
Fort 13 ne fut jamais
la panacée, il est communément admis que
la période qui y fut la
plus éprouvante s'étend de 1948 à 1964.
"En 1948, la prison
est passée de l'administration militaire à
l'administration civile, explique Constantin Vasilescu, chercheur à l'IICCMER (Institut d'investigation des crimes du communisme et de la mémoire de l'exil roumain), et dès lors, si l'on ne peut pas dire que le
but principal était clairement l'extermination des détenus, c'était pourtant le cas dans
les faits. En raison des traitements inhumains, des conditions sanitaires déplorables,
de l'absence totale d'hygiène, de la sous-alimentation, etc.". C'est à cette époque
notamment qu'un ancien garde qui a gravi peu à peu les échelons devient directeur et
s'avère particulièrement cruel: Nicolae Moromete.
Depuis que la Roumanie a basculé dans le giron communiste au lendemain de la
Seconde Guerre mondiale, les prisonniers sont pour quelques-uns de droit commun,
mais pour la plupart, des "ennemis du peuple", des "contre-révolutionnaires" dont le
principal crime est d'appartenir à l'ordre d'avant, à l'élite, à l'armée, à l'aristocratie, à
l'intelligentsia... "C'est une des raisons pour lesquelles on parlait de l' "université de
Jilava", raconte Dinu Zamfirescu, qui y séjourna par deux fois. Car pour tuer le temps,
des sortes de conférences y avaient lieu, lors desquelles chacun, selon sa spécialité,
présentait un exposé, une discussion, qui n'avait rien d'improvisée; on se préparait.
"Ainsi, je me suis trouvé pour ma part à raconter Le Petit prince de Saint-Exupéry que
j'avais traduit !"
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
la mémoire qui suinte
"Le savoir faire des Soviétiques"
des centaines de milliers de personnes ont souffert, se sont
sacrifiées. J'ai fais des recherches, rencontré d'anciens déteL'anecdote est plaisante, mais le quotidien ne l'était guère.
nus, appris par exemple que mon professeur d'anglais avait
"J'y ai fait mon premier séjour en 1945, à l'âge de 16 ans,
fait 12 ans de prison et était passé plusieurs fois par là".
poursuit l'alerte octogénaire,
Et c'est ainsi que depuis
président du conseil scientifique
plusieurs années, Dana
de l'IICCMER et membre du
Cenusa se bat pour que le
collège du CNSAS (Conseil
Fort 13 soit transformé en
national pour l'étude des archilieu de mémoire… "Ce n'est
ves de la Securitate), à une
pas un hobby. J'appartiens
époque où le régime était relatiau système, et il faut que ce
vement normal, mais j'y suis
système assume son passé".
retourné ensuite, en 1956-57, et
Parce que cette prison était
le régime avait alors beaucoup
un lieu de transit, il est quasi
changé, suite aux suggestions et
certain que tous les prisonau savoir-faire des Soviéniers politiques y ont séjourtiques… Mais j'ai eu la chance
né à un moment ou à un
de tomber gravement malade et
autre, ce qui en fait un lieu
d'être soigné par un médecin
particulièrement symbolique.
formidable qui tentait d'adoucir
"J'essaie de comprendre,
“il faut que les jeunes d'aujourd'hui prennent
conscience de ce qu'est un régime totalitaire”. et je crois qu'il faut le montnotre traitement".
La méthode soviétique va des coups à l'absence complète
rer, comment la terreur peut s'instaurer au niveau d'un pays
de contact avec l'extérieur, de l'isolement complet à l'entassetout entier. (…) Un musée, on le visite et on n'y revient plus. Il
ment des prisonniers dans des espaces confinés - dont deux
faudrait plutôt une sorte de centre culturel, avec des évènesalles sans ouverture aucune, dans laquelle ils étaient près de
ments différents qui le fassent vivre", comme quelques-uns ont
200, sans air ni eau, et dans le noir complet. "D'après les docudéjà été organisés, telle l'exposition d'Alexandru Poteca en
ments que nous avons pu consulter, commente Constantin
février 2012 (http://alexandrupoteca.wordpress.com).
Vasilescu, la prison comptait en moyenne 3000 prisonniers.
Des témoignages rapportent qu'il y en avait quatre fois plus
Des visites au compte-goutte
que de place disponible".
Les cellules, toutes plus insalubres les unes que les autres,
Dana Cenusa œuvre à impliquer institutions et organismes
proposent pour certaines des alignements de lits superposés
privés - dont la Fondation roumaine pour la démocratie de l'ansans matelas ni couverture, qu'il faut se partager à deux ou
cien président Emil Constantinescu - afin de faire aboutir ce
trois, avec deux seaux : l'un pour les besoins, l'autre rempli
projet, mais ce n'est pas facile, notamment parce que plusieurs
d'eau pour boire et se laver, le tout pour plusieurs dizaines de
intervenants ont des vues différentes. "Il faut que cela découle
personnes. Il reste aujourd'hui quelques fantômes de ces châd'une véritable volonté politique, estime le chercheur
lits de misère, comme il reste sur le sol la terre battue d'alors,
Constantin Vasilescu. "Que le site ait été reconnu en décembet sur les murs, la même sinistre moisissure.
re dernier comme monument historique est une première victoire, car cela signifie qu'aucune modification majeure ne
pourra lui être apporté".
"J'appartiens au système, et il faut
" Si cela tarde tant, note pour sa part Dinu Zamfirescu,
que ce système assume son passé"
c'est parce qu'il y a encore en fonction des gens qui ont apparCar le Fort 13 est resté en l'état. Les inondations qui y
tenu au système communiste. Mais j'ai bon espoir qu'avec le
sévissent régulièrement n'y changent rien: le Fort 13 reste
renouvellement des générations, les choses changeront".
identique à ce qu'il a été. Et c'est que ce qui en fait maintenant
Mobiliser les volontés est une première montagne à
tout l'intérêt, car il est un témoignage brut, authentique, palpadéplacer, trouver des financements en est une autre, et enfin, il
ble, de ce que fut la répression communiste. " La première fois
est un autre obstacle majeur à surmonter : le Fort 13 se trouve
que je l'ai visité en 2004, raconte Dana Cenusa, chargée des
actuellement dans l'enceinte d'un centre pénitentiaire de droit
relations publiques à l'administration pénitentiaire, cela a été
commun qui a pris dans les années 1970 la relève de l'ancien
comme une révélation, je ne comprenais pas, je ne savais pas,
site. Accueillir le public dans ces conditions, avec des procéet je me suis depuis lors passionnée pour le sujet. Je suis née
dures de sécurité forcément élevées, est une véritable gageure,
dans la Roumanie communiste, et j'ai réalisé après la révoluqui ne se réalise à l'heure actuelle qu'au compte-goutte. Mais,
tion à quel point c'était humiliant d'avoir vécu tout cela. C'est
comme le souligne Dinu Zamfirescu, "il faut que les jeunes
un peu comme pour les personnes qui ont été abusées et qui
d'aujourd'hui prennent conscience de ce qu'est un régime totafinissent par croire qu'elles l'ont mérité… Je me sentais comlitaire, qu'ils voient quelles étaient nos conditions de vie. Si
plexée d'être Roumaine. En découvrant Jilava, j'ai appris que
l'on peut dire de vie…".
Béatrice Aguettant (Regard)
53
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
Le tourisme roumain entre
Tourisme
Une histoire
Avec le potentiel qu'elle recèle, la Roumanie devrait attirer au moins dix fois plus de touristes…
ne serait-ce que pour en accueillir autant que la Hongrie, laquelle dispose pourtant de beaucoup
moins d'atouts. Professionnel, Teofil Ivanciuc est aux première loges pour en juger. Avec Adela, sa
femme, guide au Mémorial de Sighetu Marmatiei, il tient une fermette dans le Maramures qui en
fait une maison d'hôte très appréciée. Guide et journaliste, il dresse un constat désabusé de la politique touristique menée dans son pays depuis un quart de siècle, plus exactement de son absence,
tout en dressant un tableau des nombreux arguments qu'il peut faire valoir.
S
54
i, pour construire une autoroute, on procède auparavant à des études de faisabilité et rentabilité avant
d'engager les travaux, dans le tourisme, en
Roumanie, on dépense des sommes folles en promotion sans
savoir s'il existe un marché potentiel, alors qu'on n'est même
pas capable d'avoir des toilettes décentes et des centres d'information efficaces. Il suffit d'aller constater le degré de propreté
de celles qui se trouvent à proximité des sites recommandées
par les guides ou classés au patrimoine de l'humanité par
l'UNESCO! Au moins, pourrait-on espérer qu'il existe des
sites internet performants, attractifs, en plusieurs langues…
Non, la mode - en profitant des fonds européens - est d'ouvrir des officines, qui ne durent pas plus de deux-trois ans…
où les autorités placent par piston, des incompétents, enfants,
relations, etc… disposant d'un vague diplôme de tourisme,
sans la moindre expérience.
"Eternelle et fascinante Roumanie"…
six millions de dollars envolés
Dès le lendemain de la
"Révolution", le gouvernement, par
une ignorance crasse de l'importance du secteur, a limité le tourisme à
un portefeuille ministériel sans
attribution précise ou l'a fait dépendre d'un secrétariat d'Etat rattaché
au ministère du commerce ou de
celui des transports ou encore du
développement. Sans jamais mesurer son importance et lui donner les
moyens de déployer son potentiel
économique, humain, stratégique
pour l'avenir du pays. Ainsi, a-t-on vu se succéder à sa direction, mais sans jamais qu'une ligne directrice ne soit définie,
Mihai Lupoi, Constantin Fota, Dan Matei Agathon (huit ans
ministre), Akos Birtalan, Sorin Frunzaverde, Gheorghe Dobre,
Radu Mihai Berceanu, Ovidiu Silaghi, Elena Udrea, Cristian
Petrescu, Eduard Hellvig et Maria Grapini… sans parler de
tous les secrétaires d'Etat. La seule continuité s'est retrouvée
dans leur incompétence !
A partir de 1995, la Roumanie s'est lancée dans de multiples tentatives de promotion touristique à l'étranger, mélangeant amateurisme, inconséquence… et balkanisme politique.
Une maison de fous avec le concours de la presse, des "spécialistes", "analystes", qui, le plus souvent, mélangeaient sans en
comprendre le sens les définitions de logo, slogan, image du
pays, symboles touristiques avec les poncifs et stéréotypes.
Ainsi fut lancé le luxueux album Eternelle et fascinante
Roumanie, destinée à la promouvoir dans 144 pays.
L'opération d'un coût de 6 millions de dollars s'est terminée
par un échec retentissant, 4000 ouvrages étant finalement
imprimés sur les 100 000 commandés et payés, donnant lieu à
un procès interminable impliquant un homme d'affaires franco-roumain Adrian Costea et le PSD d'Iliescu.
Les palmiers d'Agathon et Dracula Park
En 2000, le "génial" Dan Matei Agathon revenait aux
commandes du tourisme roumain, bien décidé à concrétiser sa
marotte: transformer le littoral de la Mer noire en paradis tropical, sans tenir compte de sa spécificité : saison courte, faune,
flore, paysages et plages limités, infrastructures obsolètes.
Venus à grand frais de l'étranger, les "palmiers d'Agathon",
bordant la promenade de Mamaia, ne passeront pas l'hiver, terrassés par le gel.
Pas découragé, le ministre mettait en route une autre de ses brillantes idées: attirer un million de touristes par an, notamment des
Allemands, Américain et Anglosaxons qui raffolent du personnage,
en se servant de l'image de Dracula.
Prévu dans une zone protégée de
Sighisoara, le premier Dracula Park
déclencha un tel charivari international qu'il fallut lui trouver un autre
site. Ce fut Snagov, près de
Bucarest. Environ 15 000 petits
épargnants naïfs engloutirent leurs économies dans un projet
qui ne vit jamais le jour et fait toujours l'objet d'un procès.
Finalement, Dan Agathon touchait juste : la Roumanie est
un pays où on ne s'ennuie jamais et, comme le suggérait
l'Organisation Mondiale du Tourisme qui déplorait le manque
d'image forte du pays, une nième campagne internationale de
promotion était lancée sous le label "Roumanie, toujours surprenante".
Deux millions de dollars engloutis qui n'auront pas plus
d'effet que les 1,6 million d'euros consacrés aux cinq clips centrés à nouveau sur Dracula et tournés en 2006 par le ministère
sur le thème "Roumanie, terre de légendes" (Romania, tara de
basm)… qui ne furent jamais diffusés. En roumain "a se face
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Dracula et les toilettes publiques
à dormir debout
de basm" se traduit par "être le dindon de la farce" ou la riséede tous, et "basmul cu cocosul rosu"… histoire à dormir
debout.
Les délires d'Elena Udrea
Tout au contraire, l'émission "No reservations" de la chaine "Travel Channel", l'une des plus importantes consacrée au
tourisme dans le monde fit un véritable tabac, en 2006. Convié
par le ministre de l'époque, Silaghi, Anthony Bourdain, son
réalisateur fut contraint d'assister à une "soirée vampire" dans
un hôtel spécifique de Poiana Brasov. S'en échappant, il fut
conduit à bord d'une Dacia 1300 dans le nord du pays, flanqué
d'un guide russe, toujours entre deux vins. 70 millions de téléspectateurs ont visionné ce désastre à travers la planète.
Vint l'époque de la pulpeuse Elena Udrea, qui réussit la
performance de dépenser à elle seule cinq, dix fois, sinon plus
de fonds que toutes les années antérieures réunies. Les spots
TV pour CNN et Euronews ont coûté la bagatelle de 5
millions d'euros. 130 millions d'euros ont été engagés dans le
financement de stations de skis, dont le domaine empiète parfois sur des zones protégées.
Malgré çà, les Carpates orientales roumaines disposent de
moins de pistes et d'installations qu'à elle seule la station
ukrainienne de Bukovel. La ministre claironne haut sur les
toits qu'à Poina Brasov, avec ses 24 km de piste, les skieurs
peuvent se croire en Autriche… où une station moyenne
dispose d'un domaine de 100 km. Nombre de Roumains ne s'y
trompent d'ailleurs pas, prenant le chemin des Alpes.
900 millions d’euros
pour réchaufer les eaux thermales
Jamais à court d'idées, Elena Udrea s'était aussi mis en
tête de transformer Bucarest en station balnéo-climatique, des
sources d'eau thermales existant au nord de la capitale. Cette
trouvaille ainsi que quelques autres, vendues par des campagnes publicitaires d'un coût de 1,5 million d'euros sous les slogans "Romania, land of choice" "Roumanie, pays de choix " et
"Explore the Carpathian Garden " ("Explorez le Jardin des
Carpates")… a vite été abandonnée quand on s'est aperçu qu'il
faudrait investir 900 millions d'euros, seulement pour réchauffer les eaux. Dans ses derniers temps comme ministre, la protégée de Traian Basescu avait en tête d'associer Dracula et
Ceausescu dans un circuit initiatique à la Roumanie éternelle.
Ce projet n'a pu être mené à bien mais en quatre ans, Elena
Udrea aura réussi à dépenser 28 millions d'euros !
A la queue… derrière l'Albanie !
Toutes ces initiatives ont-elles eu un résultat? Selon
l'Organisation Mondiale du Tourisme, la Roumanie a accueilli
1,5 million de touristes étrangers en 2011 (83 millions en
France), se classant au 70ème rang dans le monde.
Elena Udrea...
a été une
ministre
controversée.
Pratiquement,
en quinze ans
depuis 1995
(760 000 touristes alors),
leur chiffre a
tout
juste
doublé.
Au cours
de la même
période, en
Bulgarie, leur nombre est passé de 2,8 millions à 6,3 millions.
La Hongrie en accueille aujourd'hui dix millions, dont les seules dépenses d'hébergement ont grimpé de 3 à 7 milliards d'euros. En Roumanie, ce dernier poste rapporte tant bien que mal
un milliard d'euros, comme l'Ile Maurice ou l'Irak, beaucoup
moins que l'Uruguay, la Colombie ou le Cambodge… et même
que l'Albanie. Le pays occupe aussi la dernière place en
Europe pour la proportion d'étrangers accueillis par rapport
aux touristes nationaux.
Programme pour les touristes
du Kazakhstan, de Corée du Sud ou de Dubaï
Maria Grapini, la nouvelle ministre du tourisme a décidé
au début de faire table rase du passé "udréesque", mais elle est
vite revenue aux recettes traditionnelles du temps du communisme des années 70 remise au goût du jour de Dracula
(Ceausescu avait fait construire un hôtel pour les touristes
américains), le delta du Danube et les stations balnéo-climatiques, aux vertus consacrées comme les bains de jouvence
Gérovital et de boue contre les rhumatismes.
Un programme palpitant qu'elle veut vendre aux visiteurs
venus du Kazakhstan, de Corée du Sud ou de Dubaï, c'est à
dire les quelques dizaines de milliers de touristes asiatiques
qui viennent en Roumanie, annuellement, alors que le tourisme européen, tout proche, présente un potentiel autrement
important, attiré par les églises en bois du Maramures, les
monastères peints de Bucovine, les paysages majestueux des
Carpates, la vie champêtre des villages.
Car la Roumanie est pleine de trésors qui ne demandent
qu'à être découverts et le sont parfois déjà grâce à quelques
petits opérateurs, roumains ou étrangers, qui mettent en valeur
le tourisme d'aventure, géologique, l'écotourisme, etc., comme
sait le faire le Costa Rica, en Amérique centrale, cité partout
en exemple. La Transylvanie, le delta du Danube, le nord du
pays regorgent de possibilités.
Pourquoi vouloir s'acharner à concurrencer la Hongrie et
ses stations thermales bien supérieures aux roumaines, le
domaine skiable incomparable autrichien? Même Dracula a
des rivaux en Scandinavie, Pologne, Italie. Et d'ailleurs des
études de marché sérieuses ont-elles été menées pour connaître le potentiel exact de touristes que ce concept peut attirer.
(suite page 56)
55
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
A savoir
(suite de la page 55)
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
En sirop ou soda, la fleur de sureau aide
au développement rural en Roumanie
Traditions
Des millions de visiteurs pourraient venir
Les hôtels ne peuvent
plus s'attribuer
leurs étoiles
56
Les hôtels et chambres d'hôtes
de Roumanie ne pourront plus s'attribuer eux-mêmes leur nombre d'étoiles comme cela était le cas jusqu'à présent. C'est l'Etat qui décidera désormais de la qualité des services offerts, selon l'Autorité nationale
pour le tourisme (ANT).
En février 2011, un décret avait
rendu possible l'autoévaluation des
unités touristiques de Roumanie en
vue de s'accorder un nombre d'étoiles correspondant à leur niveau de
confort. "Nous avons décidé de
renoncer à ce système pour augmenter la qualité des services, mais
aussi pour ne plus laisser aux propriétaires la possibilité d'interpréter
la loi de façon subjective", a expliqué le président de l'ANT, Razvan
Filipescu. Entre 2011 et 2013, pas
moins de 5947 établissements se
sont évalués ou réévalués de façon
autonome. L'ANT en a déjà vérifié
près de 3000 et se propose de
contrôler les 3000 restants d'ici à la
fin de l'année.
Coup de jeune
pour Caru' cu Bere
La célèbre taverne du Vieux
Bucarest, Caru' cu Bere, située
Strada Stravropoleos et mentionnée
dans tous les guides de voyage,
entre en rénovation, ses propriétaires engageant des travaux, principalement de façade qui était dans un
état dramatique, pour 1,5 million
d'euros. Le service continue pendant toute cette période.
2000 clients se pressent chaque
jour dans ce qui est devenu une
usine à touristes, surtout étrangers,
de 500 places, ayant perdu tout son
charme, offrant une nourriture piteuse mais permettant de réaliser un
chiffre d'affaires annuel de 6,5
millions d'euros.
Pourquoi s'acharner à faire venir des chasseurs pour tuer les ours, des 4x4 pour
défoncer les chemins forestiers au lieu de privilégier tous ces amateurs de calme, de
beauté, randonneurs à pied, en VTT, appareils photos en bandoulière ? Ils sont des
millions en Angleterre, France, Belgique, Suisse, Allemagne… à la recherche d'authenticité, s'émerveillant devant les forteresses saxonnes, les villages magyars secueisc, les
église rupestres du Salaj, les grottes du Bihor, les pittoresques foires aux animaux du
Banat, les marchés aux pastèques d'Olténie, les prairies fleuries de la vallée du Danube,
les synagogues peintes et les cimetières juifs de Moldavie, les petits trains de bûcherons
des montagnes, les vieux bacs sur le Mures et le Somes, les hameaux où survivent des
traditions populaires centenaires, fêtes et cérémonies. La chaleur, l'hospitalité, la gentillesse des paysans roumains sont proverbiaux en Europe, appréciés de tous les visiteurs. Voilà la meilleure publicité, celle que la Roumanie doit promouvoir et qui rapportera bien plus que des séjours clés en main sur la Mer Noire ou des musées de plein air
avec des maisons en bois déménagées ou reconstituées, avec des figurants en costume,
au concept dépassé depuis 30 ans, que plus personne ne visite!
Le ministre du tourisme doit changer de cap !
D'après l'indice de Travel and Tourism Competitiveness pour 2013, la Roumanie
est descendue à la 68ème place dans le monde des pays attractifs, sur 140 qui ont fait
l'objet de l'enquête. Elle était 63ème en 2011. La Hongrie est 39ème, la Pologne 42ème,
la Bulgarie 50ème. Pourquoi ce classement médiocre, alors que ses ressources culturelles la placent au 41ème rang, l'infrastructure touristique au 34ème et le prix de l'hôtellerie au 20ème?
Il est incompréhensible que ses ressources
naturelles la gratifient seulement d'une 88ème place
et la qualité de l'environnement d'une 107ème,
alors qu'elle est le pays du
continent à avoir le plus
d'animaux sauvages. Ce
classement, qui ne concerne pas seulement le tourisme mais l'état du pays en
général, est injuste à bien
des égards et même franchement stupide (122ème pour l'accueil réservé aux étrangers par la population), en
assimilant par certains côtés la Roumanie à des dictatures africaines ou asiatiques.
Il révèle cependant une carence fondamentale : la Roumanie ne sait pas communiquer, ni se vendre ! La faute en revient aux autorités et en premier lieu au ministère des
Affaires étrangères. D'ailleurs, en ce qui concerne l'efficacité du marketing gouvernementale en matière de tourisme… la Roumanie figure en 123ème position. Alors, l'état
des routes expliquerait-elle à elle seule la désaffection des touristes ? Le Kenya en
reçoit autant et a six fois moins de routes goudronnées. Pour les convaincre de venir, la
Roumanie a besoin en priorité de centres d'information efficaces, de véritables professionnels dans toutes les branches de l'industrie touristique… et de toilettes décentes !
Mais aussi que les opérateurs soient rassurés par des politiques durables, des objectifs
cohérents, une bureaucratie qui ne soit plus envahissante et une fiscalité acceptable.
Bien sûr, les équipements doivent vite suivre, notamment dans le transport, une
impérieuse politique de communication et promotion également être mise en place. Et
le ministre du tourisme changer de cap si on veut que les choses marchent enfin bien!
Teofil Ivanciuc (traduit par Henri Gillet)
D
e mai à juin, la Roumanie se couvre de fleurs blanches de sureau. Utilisées pour une boisson locale
très prisée, la socata, elles entrent aussi dans la
composition de sodas vendus en Grande-Bretagne ou au
Japon, un stimulant bienvenu pour l'économie rurale. La socata roumaine a
même inspiré le géant Coca Cola pour
une de ses boissons. Journée de récolte
près du village de Saschiz, en
Transylvanie, une région louée par le
prince Charles pour sa flore et son agriculture traditionnelle: des centaines de
saisonniers cueillent avec précaution, à
la main, des grappes de fleurs de sureau
sauvage avant de les livrer à une petite
entreprise spécialisée dans la production
de sirops, confitures et chutneys, la
Transylvania Food Company (TFC).
"L'année dernière, nous en avons
Médias
L
collecté 27 tonnes", explique à l'AFP Jim Turnbull, son directeur. Les fleurs s'abîmant vite, elles sont transformées en jus
ensuite exporté vers la Grande-Bretagne pour servir de base à
des sirops et sodas fabriqués par la société Bottlegreen drinks.
Ils sont commercialisés en GrandeBretagne, au Canada, en Australie, à
Hong Kong ou au Japon.
La société TFC, fondée en 2010, est
maintenant le deuxième employeur
privé de ce village de 2000 habitants
avec 5 salariés à plein temps. Elle a été
construite grâce à un financement initial
d'environ 350 000 euros assuré par des
investisseurs roumains, américains et
australien. L'idée est de soutenir l'économie chancelante de cette région en utilisant les activités agricoles traditionnelles. 1300 saisonniers travaillent à la
récolte des fleurs de sureau.
Les médias dépendants de la publicité
Un cordon ombilical malheureusement indispensable
a publicité a toujours été
considérée comme une source
de revenus saine par les
médias roumains. Bien qu'elle continue
d'influencer les contenus éditoriaux.
A l'instar de la majorité des médias
du monde entier, la publicité est une source de financement vitale en Roumanie.
"Mais curieusement, cette dépendance
est une chose relativement positive", note
l'ancien journaliste Iulian Comanescu.
"La publicité assure des revenus transparents en opposition aux financements
politiques occultes qui engendrent l'apparition de médias dits d'informations
mais qui colportent en réalité des opinions". On estime par exemple que le
gouvernement Nastase (2000 - 2004) a
dépensé 65 millions d'euros dans des
contrats de publicité avec des journaux à
petit tirage proches du pouvoir. "Il y a eu
des pratiques identiques sous le gouvernement Boc", précise Iulian Comanescu.
Dans ce contexte, la publicité "privée" est donc vue comme une ressource
financière plutôt "propre". Mais elle n'est
toutefois pas exempte d'inconvénients.
Les rapports entre les annonceurs et les
médias n'ont jamais été tout à fait équitables. Ioana Avadani, directrice du Centre
pour un journalisme indépendant, estime
que cette relation est même "brutale", et
toujours en défaveur des médias.
"Il y a quelques années, les contrats
stipulaient noir sur blanc l'interdiction de
critiquer l'annonceur dans les colonnes
du journal, ou durant les émissions de
télévision, souligne-t-elle. Au début des
années 2000, ce genre de clauses a été
retiré mais les pratiques sont restées". Le
coup de fil au rédacteur en chef pour
qu'un commentaire un peu trop virulent
soit retiré est monnaie courante. Et ce
réflexe n'est pas propre aux sociétés sans
scrupules. "Tout le monde le fait. Même
pour des choses bénignes comme d'éventuelles critiques d'un concert financé par
telle ou telle compagnie".
Moins de reportages
Mais que faire quand un contrat avec
un grand annonceur permet d'assurer les
salaires des journalistes ? "Les médias
qui vivent exclusivement de la publicité
sont des sismographes de l'économie,
affirme le rédacteur en chef du site d'informations
hotnews.ro,
Christian
Pantazi. Ils enregistrent toutes les variations du marché de la publicité".
Autrement dit, la baisse des revenus
publicitaires signifie pour les rédactions
des réductions drastiques dans leurs
dépenses. On choisit alors de couvrir l'actualité chaude plutôt que de réaliser des
reportages de terrain ou de longues
enquêtes, trop coûteuses. "Les quotidiens
régionaux ne se permettent plus du tout
ce genre de format et c'est vraiment dommage, nous ne savons plus ce qu'il se
passe en dehors de Bucarest, surtout
dans les villes moyennes", ajoute
Christian Pantazi.
La presse locale est en effet dans un
état désastreux. Les budgets alloués pour
la publicité dans les quotidiens régionaux
ont toujours été bien plus faibles que
ceux des quotidiens nationaux. Et la crise
n'a fait qu'accentuer cet écart.
A la télévision, le constat est identique. Le format reportage n'existe quasiment plus alors que les émissions de
débat n'ont jamais été aussi nombreuses.
"Il suffit de quelques centaines d'euros
pour mettre en scène une heure de débat,
alors que l'on parle de milliers d'euros
pour produire une émission bien au
point", note Iulian Comanescu. A cela
s'ajoute souvent des intérêts politiques à
peine dissimulés et une dose de scandale
qui fait toujours recette. Mais là non plus,
la Roumanie est loin d'être une exception.
Jonas Mercier (Regard)
57
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Blagues
Humour
Moderne
Un touriste interpelle un villageois
dans les monts Apuseni :
-Vous n'avez pas le courant électrique ici? On ne trouve vraiment rien
chez vous! Moi qui voulais ramener du
fromage de brebis… Vous n'avez pas au
moins une adresse où je peux en trouver?
-Mais si, c'est simple. Vous faites:
http://www.branzadeoaie.ro/.
Tout a un prix
Lucian Bute, le champion du monde
de boxe se fait dévaliser en pleine rue. Le
Roumain porte plainte pour vol de son
portefeuille. Le policier, incrédule, lui
demande pourquoi il n'a pas donné une
raclée à son agresseur:
-Pour mille euros? demande le
champion.
Confidence
58
Voyant sa dernière heure venir,
Rasela se confie à son mari:
-Je dois te confier un secret… Notre
fils n'est pas de toi.
-Mais de qui donc alors ?
-De l'étudiant qui nous louait une
chambre.
-Mais comment t'as pu faire çà ?
-Je l'ai payé.
-Mais avec quel argent ?
-Je l'ai pris dans ta poche.
-Ben alors qu'est-ce que tu racontes ?
Tu vois bien qu'il est de moi !
Prudent
Un client entre précipitamment chez
le coiffeur :
-Y-a combien de gens avant moi ?
-Une dizaine.
Il ressort tout aussi vite et revient
deux heures plus tard :
-Et maintenant ?
-Cinq.
De retour au bout d'une heure :
-C'est bon maintenant ?
-Désolé, je ferme.
-Bon, je repasserai demain matin !
Se tournant vers son dernier client, le
coiffeur s'interroge :
-Il est fou ce gars là. Mais d'où est-ce
qu'il sort ?!!!
-De chez ta femme.
Au jour le jour
-Si j'avais su que tu étais sans le sou,
jamais je ne me serais mariée !
-Mais pourtant, je t'avais bien dit que
tu étais la seule chose que j'avais au
monde…
Boire un verre vin chaque jour est
bon pour la santé… Aujourd'hui, j'ai fait
beaucoup de bonnes choses pour ma
santé !
Les femmes sont comme des fruits.
Elles ont de formes, des goûts, des couleurs différentes, de l'une à l'autre. Les
problèmes viennent quand tu te mets à
aimer la salade de fruits !
Ion annonce à Maria qu'il va faire un
tour à la plage :
-Mais pourquoi tu ne portes pas ton
alliance ?
-Mon alliance… par cette chaleur là?
T'es pas folle !
(en nouveaux lei, RON**)
Euro
Franc suisse
Dollar
Forint hongrois
= 4,43 RON
(1 RON = 0,23 €)
= 3,59 RON
= 3,31 RON
= 0,01 RON
(1 € = 298 forints)
*Au 26/08/2013 ** 1 RON = 10 000 anciens lei
Les NOUVELLES
de ROUMANIE
Numéro 79, sept-oct. 2013
La dent dure
A Bucarest, en 1969, un touriste de
l'Europe de l'Ouest invite un ami roumain
dans un restaurant pratiquement réservé
aux étrangers. Il commande des sarmale
et, une fois servi, commence à discuter
avec son ami qui se cantonne dans les
généralités oiseuses. Soudain, le touriste
recrache le sarma qu'il s'apprêtait à avaler.
-J'ai failli me casser les dents, s'exclame-t-il, cette boulette est dure comme
du fer.
- Tout à fait normal, c'est le micro !
Lettre d'information bimestrielle sur
abonnement éditée par ADICA
(Association pour le Développement
International, la Culture et l’Amitié)
association loi 1901
Siège social, rédaction :
8 Chemin de la Sécherie
44 300 Nantes, France
Tel. : 02 40 49 79 94
E-mail : [email protected]
Directeur de la publication
Henri Gillet
Rédactrice en chef
Dolores Sîrbu-Ghiran
Un camarade trop délicat
Politesse
Un passager éternue dans le tramway.
-Qui a éternué? crie un agent de la
Securitate, facilement reconnaissable.
Le silence se fait.
-J'ai demandé qui a éternué ? répètet-il sur un ton sans réplique.
Tout le monde tourne la tête.
-Personne ne veut dire qui a éternué?
insiste-t-il, menaçant.
Chacun s'est recroquevillé sur luimême. Le sécuriste sort alors son pistolet
et tire deux cours en l'air. Une vieille
dame lève alors timidement la main et
avoue:
-C'est moi Monsieur…
-A vos souhaits Madame ! Et se tournant vers le reste du Tramway:
-Vous ne savez pas ce qu'est la politesse ?!
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Forte femme
-Alors, qu'est-ce que fait ton mari ?
-Ce que je lui dis.
ABONNEMENT
CHANGE*
Rêves
Ceausescu réunit ses compatriotes
devant le Palais du peuple
-Camarades… qui est la maman des
Roumains ?
-La camarade Elena! crie la foule
-Camarades… qui est le papa des
Roumains ?
-Le camarade Nicolae! crie la foule
-Camarades, quel est le plus grand
rêve du peuple roumain ?
-Devenir orphelin!
Infos pratiques
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Dans un pays occidental, lors d'un
meeting organisé par le parti communiste, un orateur harangue une foule principalement composée de chômeurs. Il
décrit le paradis socialiste à venir, où tout
le monde aura du travail, de quoi se vêtir
et de quoi manger. Un assistant l'interrompt :
-Qu'est-ce qu'on aura à manger?
-Mais de tout, du bœuf, du veau, du
mouton, du poulet, du lapin...
-Je n'aime pas le lapin.
-Tu en mangeras quand même.
Ont participé à ce numéro :
Yves Lelong, Teo Ivanciuc,
Laurent Couderc, Mirel Bran,
Julia Beurq, Jonas Mercier,
Marianne Rigaux, François Gaillard,
Béatrice Aguettant, Diana Dumitru,
Marie Laluque, Mariama Diallo,
Anne Solesne Tavernier,
Madalina Alexe, Isabelle Régnier,
Jean-Jacques Larrochelle
Autres sources: agences de presse et
presse roumaines, françaises,
lepetitjournal.com, télévisions
roumaines, Roumanie.com, Le
Courrier des Balkans, sites internet.
-Quelle diférence, il y a entre le froid
de dehors et celui de chez toi ?
-Dehors, il est gratuit !
Nom:…………………………………………………………………………
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Paiement
Au bon vieux temps
En Roumanie, on ne fabrique plus de
lit. Pas besoin: les ennemis de classe ne
dorment pas, le Parti veille et les travailleurs travaillent sans relâche…
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1117 G 80172; ISSN 1624-4699
Dépôt légal: à parution
Prochain numéro: nov. 2013
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
Stefan Kovacs a redonné
leur honneur aux Bleus
V
60
oici quarante ans, la venue d'un entraîneur Roumain d'origine
magyare à la tête du football français allait changer profondément son destin, ouvrant la voie qui conduira les Bleus au titre de
champion d'Europe en 1984 et à la consécration suprême, la couronne mondiale en 1998.
Qui se souvient aujourd'hui de Stefan Kovacs (ci-dessus en compagnie de Michel Hidlago), de son accent inimitable, de son
optimisme communicatif, qui faisaient oublier les défaites? Sous la gouaille proverbiale du sélectionneur natif de Timisoara se
cachaient un professionnalisme et un sérieux qui lui avaient permis de maintenir la prédominance du prestigieux Ajax d'Amsterdam
de Johan Cruyff sur le football européen, après avoir opéré comme joueur ou entraîneur dans sa ville natale, à Cluj, Oradea, Turnu
Severin et avant de finir sa carrière comme sélectionneur de l'équipe nationale roumaine et entraîneur de l'AS Monaco.
Quand Stefan Kovacs débarque à Paris, en octobre 1993, pour prendre les commandes de l'équipe de France, il est le deuxième étranger à ce poste après l'Anglais George Kimpton durant le mondial de 1934. Le Roumain arrive à la tête d'une équipe moribonde. A la dérive depuis les années 60, le football français espère retrouver une place dans l'échiquier mondial en faisant venir
l'entraîneur du moment. Très francophile, comme de nombreux Roumains, Stefan Kovacs souhaite ardemment relever son niveau
et qualifier les Bleus pour le prochain championnat d'Europe qui aura lieu en 1976 en
Yougoslavie.
Mais rien n'est simple, son contrat ne porte que sur un an, et est le fruit de négociations
laborieuses, à rebondissements, entre la Fédération Française de Football, le gouvernement
français et le régime de Ceausescu qui utilise son ressortissant comme monnaie d'échange
dans des négociations commerciales et politiques tendues en cours.
A Paris, la décrépitude de l'équipe de France est devenue une préoccupation nationale on a les problèmes qu'on peut ! - et la signature du Roumain est attendue avec une vive
impatience. Tout l'état-major de la Fédération Française a fait le déplacement à Amsterdam
pour l'obtenir, alors que les diplomates du quai d'Orsay s'activent à Bucarest. Finalement
Matignon peut claironner qu'il a mené à bien l'opération. Contrepartie: le nouveau sélectionneur devra reverser 200 dollars par mois sur ses émoluments à son gouvernement !
Une idylle mouvementée entre la France et le sélectionneur roumain
C'est alors le début d'une idylle mouvementée entre un football français qui ne sait plus
à qui s'en remettre pour trouver son salut et le technicien roumain qui rêve de conquérir la
France comme l'ont fait l'écrivain Ionesco ou avant lui l'actrice Elvire Popesco. Après une
première victoire inaugurale contre les Grecs, la sélection française alterne le bon et moins bon avant d'entamer les phases éliminatoires pour le championnat d'Europe en septembre 1974. Finalement, les Tricolores, après une défaite devant la RDA, n'arriveront pas à se qualifier et Kovacs retournera dans son pays au bout de deux ans. Le renouvellement de son contrat en 1974 avait
atteint des sommets, Bucarest faisant à nouveau monter les enchères.
Cependant, épilogue heureux, on annonce le 8 août cette année là dans l'Equipe que Stefan Kovacs a été autorisé par le président Nicolae Ceaucescu à travailler une année supplémentaire en France, pour le plus grand soulagement des supporters des
Tricolores. On peut entendre Pierre Mazeaud, secrétaire d'Etat à la Jeunesse et aux Sports, confier au micro de Thierry Roland pour
France Inter: "Je veux dire que le gouvernement français peut être fier d'avoir mené à bien cette opération", alors que le Premier
ministre en personne, Jacques Chirac évoque, sur les ondes de Radio Monte-Carlo, sa satisfaction d'être parvenu à conserver
Stefan Kovacs en France "sans compensation pour la Roumanie" (comme pour les otages du Mali !).
Si durant ses deux années en tant que sélectionneur, Stefan Kovacs n'obtiendra aucun résultat notable, les observateurs s'accordent néanmoins à dire que sa venue a été riche en apports pour les bleus et qu'il a été un des grands artisans des progrès des joueurs
français tant dans les domaines physique et tactique que dans leur approche psychologique des rencontres de haut niveau. Il aura
également le flair de faire débuter très rapidement Dominique Rocheteau en équipe de France, totalement inconnu jusque là et de
mettre sur orbite la bande à Platini. Surtout, il dotera la France d'une politique de formation des joueurs de haut niveau, qui faisait
totalement défaut jusque là, concrétisée par la création du centre de Clairefontaine, inspiré des centres de formation roumains. Son
adjoint Michel Hidalgo poursuivra le travail avec succès, puisqu'il s'achèvera sur la victoire à l'Euro 1984, précédant le triomphe
d'Aimé Jacquet et Zidane en 1998.
Stefan Kovacs est mort, pauvre, à Cluj, le 11 mai 1995, à 75 ans. Lorsque, en pleine séance du conseil des ministres, le
Président Chirac a appris son décès, il a arrêté les discussions pour marquer une minute de silence en hommage à celui qu'il considérait comme "le fondateur du football moderne français".
(Lire aussi en page 36)

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