Fauré - Requiem
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Fauré - Requiem
Gabriel Fauré (1845-1924) Requiem C’est à l’occasion de l'enterrement de l’architecte Joseph-Michel Le Soufaché, un paroissien de l'église de La Madeleine, à Paris, que Fauré compose son Requiem. L'orchestre est alors fort modeste, réunissant altos, violoncelles, contrebasses, harpe, timbales et orgue, ainsi qu'un violon solo dans le Sanctus. La création a lieu le 16 janvier 1888. A cette date, la distribution vocale ne comporte pas de baryton. En effet, l'Offertoire (Hostias) et le Libera me ne seront composés qu’en 1889 et 1891. Le Libera me sera l’arrangement d'une partition pour orgue, datée de 1877. L'orchestration de l'œuvre est au cœur même de la problématique du Requiem. Jusqu'en 1893, Fauré hésite quant à l'équilibre instrumental. En 1892, à l'occasion de la création du Libera me, trompettes et cors complètent les effectifs et, l'année suivante, les bassons s’ajoutent dans une version remaniée. Hamelle, l'éditeur du compositeur réclame une orchestration plus importante, certain que la partition se vendra mieux ainsi. En 1900, on donne une nouvelle mouture dont on ne sait si Fauré en est véritablement le compositeur. Selon son habitude, il aurait confié la plus grande partie du travail à l'un de ses élèves, en l’occurrence, Jean Roger-Ducasse (1873-1954). Au fil du temps, les interprètes gonflent les effectifs jusqu'à des proportions étonnantes. A l'Exposition Universelle de 1900, par exemple, 250 choristes entonnent le Requiem. Que sont devenus la trentaine d'enfants, les quatre basses et quatre ténors qui accompagnèrent Joseph-Michel Le Soufaché dans sa dernière demeure ? La version que nous entendons est celle de 1893. « Elle préserve la dimension religieuse et le caractère intimiste de la partition originale. Elle est intéressante sur le plan des sonorités et des couleurs » nous confie Gildas Pungier. Rappelons que Gabriel Fauré éprouvait une profonde aversion pour le Requiem d’Hector Berlioz (1803-1809), méprisant les effets dramatiques et le caractère monumental de la partition de son illustre aîné. A l’origine, il souhaitait une œuvre accompagnant la prière, en complète opposition aux fresques sonores gigantesques du XIXe siècle, marquées par une conception opératique sinon spectaculaire. Il est révélateur que l’œuvre se referme sur le message d’une délivrance heureuse, In Paradisum et que l’écriture édulcore la plupart des contrastes violents. En évoquant son Requiem, Fauré eut cette formule qui résume parfaitement l’esprit de la partition : « Il est aussi doux que moi ». L’Introït et Kyrie s’ouvre par un unisson à l’orchestre, la résonance des accords de plus en plus forts exaltant la douceur des voix tout d’abord murmurées, puis exprimant avec force le Requiem Aeternam. Ténors et sopranos conduisent au Kyrie. L’Offertoire est construit à la manière d’un canon entre les ténors et les altos. Dans cette partie, la plus longue de l’œuvre, l’écriture harmonique si raffinée paraît ondoyante. Le baryton offre sa supplique. Le chœur reprend et conclut sur l’Amen. Les arpèges composent l’accompagnement des voix alternées des femmes et des hommes du Sanctus. Les voix expriment comme l’écho d’une béatitude qui se transforme bientôt en d’éclatants Hosanna. La soprano introduit la quatrième partie, Pie Jesu. Fauré s’est inspiré de la technique du plain-chant. L’harmonie moderne accentue le caractère mystérieux d’une prière pour le repos des âmes. La douceur des teintes pastel prépare l’Agnus Dei. Le thème introductif du Requiem est repris. L’atmosphère lyrique se charge de modulations savantes. Le Libera me est l’unique mouvement au souffle dramatique de la partition. La pulsation d’une basse obstinée laisse éclater le chant du baryton. Chant pudique au début, puis chargé d’une impérieuse demande, de crainte tremblante. L’amertume de l’expression s’appuie sur le Dies irae du chœur. La pulsation reprend avec toute la puissance des instruments. La résignation s’impose enfin. Ce sont les sopranos qui ouvrent la dernière partie, In Paradisum. Le chœur des anges se joint à l’élévation des défunts qui entrent dans le repos éternel. A LIRE Gabriel Fauré, Correspondance, suivie de Lettres à Madame H. par Jean-Michel Nectoux (Ed. Fayard, 2015)