Facteurs limitant l`accès aux universités privées en Côte d`Ivoire

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Facteurs limitant l`accès aux universités privées en Côte d`Ivoire
JOURNEES DE LA RECHERCHE EN
EDUCATION DE CÔTE D’IVOIRE
(JRECI) 2009
134
Abou FOFANA
© EDUCI/ROCARE. Afr educ dev issues,N°2, 2010, Special JRECI 2006 & 2009, pp.135-150
Facteurs limitant l’accès aux universités privées en Côte d’Ivoire
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1. FACTEURS LIMITANT L’ACCES AUX
UNIVERSITES PRIVEES EN COTE D’IVOIRE
GOIN BI Zamblé Théodore1, [email protected]
N’DEDE Bosoma Florence2, [email protected]
RESUME
Depuis trois décennies, les universités publiques ivoiriennes sont en
proie à une crise multiforme qui affecte profondément leur fonctionnement.
Cependant, il y a une dizaine d’année, des universités privées ont
commencé à investir le champ de la formation postsecondaire.
L’objectif de cet article, est d’identifier et d’analyser les causes du
faible taux de fréquentation dans les universités privées. A cet effet, une
enquête réalisée auprès de trois cent cinquante (350) étudiants dans treize
(13) universités privées ivoiriennes, a permis de dégager deux causes
essentielles expliquant la faiblesse des effectifs. Il s’agit du choix limités de
filières de formation et surtout à des coûts scolarisations inaccessibles à la
majorité de la population. Seulement une frange infime de la population
peut scolariser leurs enfants dans ces universités.
Les parents dont les enfants fréquentent ces universités ont généralement
un niveau d’étude de l’enseignement supérieur. Ils appartiennent dans la
grande majorité la classe sociale la plus aisée du pays. Ce qui faire penser
que les universités privées sont faites pour les personnes nanties.
Mots-clés : Universités privées, filière de formation, coût de
scolarisation, Côte d’Ivoire.
CONTEXTE ET PROBLÉMATIQUE
L’enseignement supérieur est le pilier essentiel pour le développement
humain. La Banque Mondiale (2003) définit l’enseignement supérieur
comme le point culminant de la pyramide classique du système éducatif
dans le monde entier. Pour l’UNESCO (1998), sans établissements
d’Enseignement Supérieur et de recherche adéquats, permettant de
constituer une masse critique d’individus qualifiés et éduqués, aucun pays
ne peut assurer un authentique développement endogène et durable et
1 Doctorant en Sciences Sociales du Développement, option éducation, Université de
cocody
2 Doctorante en Sciences Sociales du Développement, option éducation, Université de
cocody
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les pays en développement, les pays moins avancés en particulier, ne
peuvent espérer réduire l’écart qui les sépare des pays industriellement
développés.
En Afrique, la période des indépendances a été marquée par la
nécessité de former un nombre important de fonctionnaires pour remplacer
les colons dans les administrations. Alors dans cette politique de formation
l’Etat était le principal bailleur de l’Enseignement Supérieur.
A partir des années 1980, s’accentue dans l’environnement sociétal
des universités africaines, l’histoire du déclin économique, des tensions
politiques, des guerres civiles, des traumatismes de la sécheresse, des
famines, de la dégradation écologique, et l’imposition des programmes
d’ajustement structurel, toute une conjoncture de crise-instabilité politique,
baisse de la production économique et agricole, rareté des investissements
étrangers, chômages et pauvreté extrême qui cristallise le phénomène
des «universités de la crise» (Essane, 2001).
Depuis ces années, les universités Africaines traversent une crise
qui relève de dysfonctionnements majeurs. De façon générale, depuis
ces années, les capacités des gouvernements africains à financer
les services publics ont fortement diminué. L’enseignement supérieur
public souffre en conséquence, de la réduction du budget destiné à
l’éducation. Le resserrement des contraintes budgétaires, consécutif à la
baisse des recettes fiscales et aux politiques économiques structurelles
mises en œuvre dès les années 1990 a placé les institutions publiques
d’enseignement supérieur devant un défi sans précédent : améliorer la
qualité de l’enseignement supérieur face à un flux de plus en plus important
d’étudiants alors même que les allocations budgétaires diminuent.
Cette politique a pour conséquence la détérioration des infrastructures
académiques, des laboratoires, du matériel d’enseignement et des taux
d’encadrement des étudiants et en dernière analyse à la réduction de la
qualité de l’enseignement supérieur.
Face à l’incapacité de l’Etat à accueillir le flux important d’étudiants
chaque année dans ses structures, des instituts d’enseignement supérieur
privé vont investir le champ de la formation post baccalauréat. En Côte
d’Ivoire l’avènement des institutions d’enseignement privées s’est fait
suivant deux phases : les grandes écoles privées puis les universités
privées. L’émergence des universités privées est un fait relativement
récent et ce secteur en pleine construction.
L’Unesco dans son document cadre «l’enseignement supérieur et la
mondialisation », fait remarquer que la diminution des fonds publiques
et les thèses économiques dominantes ont tendance à affaiblir le rôle
et les pouvoirs publics dans les questions intéressant l’enseignement
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supérieur, alors que le rôle et la contribution du secteur privé se sont
considérablement développer. Ce facteur contribue à renforcer le marché
de l’enseignement supérieur aux niveaux tant national que mondial.
Jandhyala B. G. Tilak (2005), présente la privatisation comme le nouveau
mantra quotidien. Selon lui : « plus concrètement, les gouvernements de
nombreux pays ont semble-t-il adoptés la philosophie néolibérale voulant
que soient appliquées à tous les domaines les règles du marché, et de fait ils
encouragent la croissance des établissements d’enseignement supérieur
privés, qui sont pour la plupart des établissements d’enseignement à but
lucratif ».
N.V VARGHESE3 montre que l’enseignement supérieur est en train de
d’émerger comme une entreprise commerciale et un secteur lucratifs. Les
établissements d’enseignement supérieur se livrent à une concurrence
féroce pour attirer les étudiants étrangers et pour ouvrir, hors de leur
pays des campus, source de revenus et de profits. Le développement
rapide de ce secteur est un bon indicateur de son attrait économique et
le commerce des services d’éducation commence à être politiquement
et socialement recevable.
Les universités privées complètent les universités publiques dans
la formation des futures élites du pays. La naissance des universités
privées accroit l’offre de formation. Le rôle de ces universités est donc de
contribuer au décloisonnement des universités publiques. Elles doivent en
conséquence engendrer des innovations dans le système. En effet, Fulbert
Géro AMOUSSOUGA (2005), après un examen de l’expérience des pays
fait apparaître entre autres réformes, le développement d’établissements
universitaires privés. Il pense que l’émergence de ces établissements
peut constituer un moyen de participation efficace du secteur privé au
financement du coût de la formation. On peut donc ainsi desserrer la
contrainte financière et améliorer la qualité de l’enseignement supérieur,
en mobilisant une fraction plus importante des fonds auprès des étudiants
eux-mêmes, lesquels peuvent escompter des revenus nettement plus
élevés, leur vie durant, grâce aux études supérieures qu’ils auront faites,
et dont les familles ont souvent largement les moyens de contribuer au
coût de leur éducation.
Fulbert Géro AMOUSSOUGA (op. cit.) va plus loin dans son analyse,
en soutenant que les établissements privés de l’enseignement supérieur
peuvent répondre avec efficacité et souplesse à l’évolution de la demande
et offrent de nombreuses possibilités d’éducation sans coûter grandchose aux pouvoirs publics. Ces établissements privés complètent
3 L’AGCS et le commerce transfrontalier des services d’éducation
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les établissements publics et constituent aussi un moyen de maintenir
dans une limite raisonnable les coûts liés à l’augmentation des effectifs
d’étudiants, d’accroître la diversité des programmes de formation et d’élargir
la participation sociale à l’enseignement supérieur. Les établissements
privés sont donc perçus comme un élément important de certains des
meilleurs systèmes d’enseignement supérieur dont disposent les pays
en développement. Ils peuvent répondre efficacement et avec souplesse
à l’évolution des besoins des étudiants et des conditions de travail du
marché. En outre, l’enseignement supérieur privé augmente les possibilités
d’étude avec un minimum de dépenses publiques directes. L’Unesco (op.
cit.) dit que d’autres acteurs de l’éducation soulignent les avantages du
commerce d’enseignement supérieur. Ils estiment qu’une plus grande
concurrence sur le marché est un stimulant qui pousse les institutions
traditionnelles à innover et à mettre en place des réseaux spécialisés.
De plus, l’offre commerciale de service par de nouveaux prestataires à
la recherche du profit et les établissements d’enseignement supérieur
classiques peut élargir les possibilités d’accès à l’enseignement supérieur.
Ils reconnaissent que préserver la qualité de l’enseignement supérieur,
assurer un accès équitable à cet enseignement et protéger les apprenants
tout en leur donnant des moyens d’action sont en passe de devenir les
priorités essentielles face au développement de la commercialisation et
des échanges de services d’enseignement supérieur. En Angleterre, des
quasi marchés ont été volontairement créés avec l’idée que d’avantage
de compétition devrait mener à d’avantage de qualité4.
Depuis une décennie en Côte d’Ivoire, on observe, que des universités
privées ont fait leur apparition dans le paysage universitaire. Aujourd’hui,
l’offre d’enseignement universitaire privé, a une croissance plus importante
que celle publique. Le nombre d’établissements privés est largement
supérieur à celui des universités publiques (26 universités privées contre
3 universités publiques). Malgré cette émergence rapide des universités
privées, le taux de croissance des effectifs y reste encore très faible. En
effet, les effectifs des étudiants dans les universités privées représentent
une part minime des effectifs de l’enseignement supérieur en Côte d’Ivoire.
Elles accueillent une très faible population estudiantine qui s’évalue à
3,08%5 des étudiants fréquentant l’ensemble des universités (publiques
et privées). Au niveau des effectifs on remarque que la population est
inégalement repartie dans les universités privées6. D’abord, on constate
4 ibidem
5 Goin Bi Z., N’Dédé B. (2008), Qualité et Innovation dans l’enseignement supérieur : Cas
des universités privées en Côte d’Ivoire. http://www.rocare.org/grants/2007/Qualité et
innovation.pdf
6 Voir annexe 1
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que 9 universités sur 13 ont un effectif inférieur à 100 étudiants. Dans cette
catégorie il faut souligner que 5 d’entre elles ont moins de 30 étudiants.
Ensuite 2 universités sur 13 ont quant à elles un effectif compris entre
109 et 129 étudiants. Enfin 1 seule université compte 308 étudiants tandis
que la plus peuplée compte 1549. Par conséquent elles n’ont pas encore
une influence significative sur l’ensemble du système. Pourquoi malgré
le nombre important d’universités privées, les taux de fréquentation dans
ces institutions restent faibles ?
OBJECTIF DE L’ÉTUDE
L’objectif de cet article est d’identifier et d’analyser les facteurs limitant
l’accès aux universités privées en Côte d’Ivoire. Les objectifs spécifiques
sont :
• Identifier les offres de formations dans les universités privées en
Côte d’ivoire ;
• Evaluer les coûts de scolarisation dans les universités privées en
Côte d’ivoire ;
• Déterminer les caractéristiques sociales des étudiants fréquentant
les universités privées en Côte d’ivoire.
MÉTHODOLOGIE
Site de l’étude
Cette étude a été réalisée dans les universités privées localisées à
Abidjan capitale économique de la Côte d’ivoire. Ce choix se justifie parce
que la quasi-totalité des universités privées s’y trouve, soit vingt – deux
(22) sur vingt-six (26).
Population d’étude et échantillonnage
• Population d’étude
La population concernée par cette se compose étude était
composée:
- De la Direction de l’Enseignement Supérieur Privé,
- Des responsables administratifs et/ou académiques7,
- Des étudiants des universités privées.
7 Les responsables universités cumulent les fonctions administratives et académiques.
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• Echantillonnage
• Au niveau des universités privées
Toutes les vingt-deux (22) universités de la ville d’Abidjan ont
été visées par notre étude. Cependant faces aux refus certains
responsables d’universités d’accepter que les enquêtes se fassent
au sein de leur établissement seulement treize (13) sur les vingtdeux (22) ont pu être enquêtées.
• Au niveau des étudiants
La technique utilisée est celle de l’échantillonnage accidentel.
Cette technique a été retenue parce que nous n’avions pas
connaissance exacte des différents effectifs. Nous avons donc
appliqué le questionnaire aux étudiants trouvés sur place lors de
notre passage dans les 13 universités privées.
• Au niveau de la Direction de l’enseignement supérieur privé
(DESPRIV)
Le responsable en charge des universités privées au sein de la
DESPRIV a été rencontré dans le cadre de cette étude.
Techniques d’enquête
Pour cette étude des techniques d’enquête qualitative et d’enquête
quantitative ont été utilisées.
• l’enquête qualitative
Deux techniques d’enquêtes ont été utilisées, il s’agit de l’entretien
semi directif et de l’observation directe.
• L’observation directe : cette méthode nous a permis de voir
directement les infrastructures des universités privées, les effectifs,
les équipements et les installations.
• L’entretien semi directif : Une première série d’entretiens avec
les responsables des universités privées. Ces entretiens avaient
pour but de nous éclairer sur les questions relatives aux frais de
scolarisation, aux effectifs, aux filières ouvertes, aux modes de
financement dans les universités privées. Une seconde série a été
réalisée avec le responsable en charge des universités privées au
sein de la Direction de l’enseignement supérieur privée en vue de
savoir les conditions d’ouverture des universités privées.
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• l’enquête quantitative
L’enquête quantitative est été réalisée par le bais d’un questionnaire
adressé essentiellement aux étudiants des universités privées. Le but
de ce questionnaire était de recueillir les données socioéconomiques de
leurs parents ou tuteur.
Tableau I: Les outils de collectes des données ayant été appliqués
dans les universités privées
Techniques d’enquêtes
Universités Privées
Ussas Celaf Cerap-iddh Ismant Uc-asm Uiss-hb Umeci Uclm Uns Fupa Groupe bak Ist-ci ucao TOTAL
Entretien semi
directif
X
x
X
X
X
X
X
X
X
Questionnaires
x
X
X
x
X
x
x
x
x
x
x
X
12
X
10
Tableau II: Répartition des étudiants enquêtés par filières et niveau
d’étude
Deug 1 Deug 2
Sciences
économiques
Droit
Communication
Sciences de
l’éducation
Sans réponse
Total
Dut 1 Licence Maitrise DESS pdr Total
40
43
8
3
11
10
12
2
35
-
-
66
1
41
-
16
-
3
21
-
23
3
3
60
3
102
8
93
55
%
115
32,86
176
3
50,29
0,86
-
50
14,29
26
6
350
1,71
100
6
6
Traitement des données
Les données quantitatives ont été traitées à l’aide du logiciel SPSS
(11.0) en vue de vérifier les relations entre les variables mises en jeu pour
l’étude. Quand aux l’analyse qualitative a été essentiellement une analyse
de contenu des entretiens.
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02
8
93
55
26
6
142
350
100
Abou FOFANA
RÉSULTATS
Caractéristique sociales des enquêtés
Identification des enquêtés
L’identification des enquêtés montre qu’on a une quasi égalité au
niveau du genre. En ce qui concerne la nationalité 80,9% sont des
ivoiriens. A plus de 90%, ils sont inscrits au premier et au second cycle.
Concernant l’établissement d’origine 80,6% des enquêtés proviennent
d’établissements privés. Cela laisse entrevoir que les parents qui inscrivent
leurs enfants dans les universités privés ont pour la plus part la culture
de la scolarisation payante.
Tableau III : Identification des enquêtés en fonction de leur sexe,
nationalité, niveau d’étude, établissement d’origine
Variables
SEXE
Nationalité
Niveau d’étude
Etablissement
d’origine
Indicateurs
Masculin
Féminin
Total
Ivoirienne
Afrique CEDEAO
Afrique Hors
CEDEAO
Autres
Pas de réponse
Total
1er Cycle
2e Cycle
3e cycle
Pas de réponse
Total
Public
Privé
Pas de réponse
Total
Nombres
172
178
350
283
33
%
49,1
51,9
100
80,9
9,4
22
6,3
5
7
350
170
148
26
6
350
56
282
12
350
1,4
2
100
48,5
42,3
7,4
1,7
100
16,0
80,6
3,4
100
Source : données d’enquête
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Lieu de résidence et moyen de transport
72% des étudiants enquêtés habitent la commune résidentielle de
Cocody où sont localisées 18 des 22 établissements universitaires
privés de la ville d’Abidjan. Les moyens de transport les plus
utilisés par les étudiants sont les taxis communaux (Woro-Woro),
suivie par les voitures personnelles à 16,57%.
Tableau IV : Lieu de résidence et moyen de transport des étudiants
Cocody
Yopougon
Abobo
Plateau
Adjamé
Attécoubé
Treichville
Marcory
Koumassi
Port-bouet
Bingerville
Ayama
19
Véhicule
personnel
44
à
pieds
39
sans
réponse
1
3
3
3
1
-
9
1
-
-
Bus
Gbaka1
Woro-woro2
Taxi
4
5
140
2
19
2
Total
%
252
72,00
-
36
7
2
10,29
2,00
0,57
2,29
1
1
1
3
2
2
-
-
-
8
-
1
-
-
-
-
-
1
0,29
-
-
3
-
-
-
-
3
0,86
1
-
1
1
1
2
-
-
-
4
3
1,14
0,86
2
-
3
-
-
-
-
5
1,43
-
1
-
-
-
-
-
1
0,29
1
-
-
-
-
-
-
-
1
Sans réponse
Total
8
22
11
41
3
159
3
29
1
58
39
1
2
27
350
%
6,29
11,71
45,43
8,29
16,57
11,14
0,57
100,00
0,29
7,71
100,00
Source : données d’enquête
Coût de la formation
On observe que les coûts moyens de formation excèdent 1 000 000 F
Cfa. Cependant ce tableau reflète seulement des moyennes. Car les coûts
réels varient du simple au double voire plus, d’une université à l’autre.
Concernant le deug par exemple les cours oscillent entre 1 280 000 F
Cfa et 8 640 000 F Cfa.
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Tableau V : les coûts moyens de la formation par cycle dans les
universités privées
Diplômes
Coût Moyen
DEUG
DUT
LICENCE
LICENCE PROFESSIONNELLE
MAITRISE
MASTERS
DESS
DEA
2 272 615
1 700 000
1 280 455
1 325 000
1 299 545
2 037 500
1 645 000
1 533 333
Source : données d’enquête
Filières de formation dans les universités privées
Filières demandées à l’ouverture
Les filières demandées à l’ouverture relèvent essentiellement des
sciences sociales, des lettres, des technologies de l’information et de la
communication (TIC). Parmi elle l’Economie et le Droit sont en tête avec
respectivement 88,46% et 62,23% de la demande des établissements.
Figure 1 : Le nombre de filières ouvertes par université
Source : données d’enquête
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Filières effectivement ouvertes
Les enseignements des universités s’articulent essentiellement autour
de deux filières. 8 universités sur 11 ont 2 filières ouvertes parmi elles 7
ne font que du Droit et de l’Economie. 3 universités sur 11 ont chacune
une filière.
Tableau VI : Nombre de filières ouvertes par université
Nombre de facultés ouvertes
1
2
Total
Nombre d’université
3
8
13
%
2727
72,73
100
Source : données d’enquête
Financement des études
Acteurs du financement
Les études dans les universités privées sont à 46% financées par les
pères des étudiants. Les mères, l’association père et mère, les bourses,
financent pour chaque catégorie les études à hauteur de 15,1%.
Tableau VII : Les personnes responsables de financement des études
des étudiants
Père
Mère
Tuteur
Père et mère
Bourses
Autres
Sans
Total
Total
161
53
12
53
53
15
3
350
%
46
15,1
3,4
15,1
15,1
4,3
0,9
100
Source : données d’enquête
Niveau d’étude des acteurs du financement
La grande majorité (père, mère, père et mère, tuteur) de ceux qui
financent la scolarité des étudiants dans les universités privées ont un
niveau d’étude d’enseignement supérieur (Bac +). Cela se vérifie dans
les différentes catégories susmentionnées, Pères 88,82%, Mère 66,4%,
l’association père et mère 83,03% et 58,33 chez les tuteurs. Les parents
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qui scolarisent leurs enfants dans les universités privées sont pour
la plupart des cadres supérieurs dans l’administration (32,57%), des
ingénieurs et des enseignants et des cadres supérieurs de la santé8.
Tableau VIII : Niveau d’étude des personnes responsables du
financement des études des étudiants
Analphabète Primaire Secondaire Supérieur
Nombre
Père
%
Nombre
Mère
%
Père et Mère Nombre
%
Nombre
Tuteur
%
Source : données d’enquête
5
3,11
4,00
7,55
2
0,38
1
8,33
0
0
0
0
3
5,66
1
8,33
11
6,83
6
11,32
4
7,55
1
8,33
143
88,82
35
66,04
44
83,03
7
58,33
Pdr
Total
2
1,24
8
15,09
0
0
2
16,67
161
100
53
100
53
100
12
100
ANALYSE DES RÉSULTATS
Filières et coûts de formation
Des choix de formation limités
Les universités privées en Côte d’Ivoire articulent leur formation
essentiellement autour de deux filières: Sciences économiques et Droit.
Généralement, ces universités ont une ou deux facultés ouvertes. Quand
c’est une seule faculté ouverte, elles font soit du droit ou les sciences
économiques. Dans le cas où deux facultés sont ouvertes, quelque
exception près, elles dispensent des cours de droits et d’économie.
Cette situation réduit les choix de formation dans les universités privées
ivoiriennes. Certaines personnes désireuses de faire des études autres que
le Droit et l’Economiques, se voient obliger d’avoir recours aux universités
publiques ou d’aller à l’étranger. Ce choix limité de filière de formation, pour
être un élément explicatif des faibles effectifs dans les universités privées.
Cependant, le nombre limité de filières n’en est pas la seule explication.
Puisque dans les universités publiques, les facultés de Droit et d’Economie
sont toujours surpeuplées. Cela sous-entend que, en dépit du nombre limité
d’offre de formation (en termes de filières), les universités privées accueillent
de petits effectifs en Droit et en Economie.
8
Voir annexe 2
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Facteurs limitant l’accès aux universités privées en Côte d’Ivoire
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Des coûts de scolarité inaccessibles pour les
populations
Les coûts de la formation dans les universités privées sont largement
supérieurs à ceux des universités publiques. Contrairement aux universités
publiques, les universités privées ne bénéficient pas de subvention de
l’Etat. Elles fonctionnent essentiellement sur des fonds propres. Ces fonds
émanent principalement des frais d’inscription et de scolarité payés par les
étudiants (cf. tableau 3). Les coûts en rigueur montrent que la formation
dans les universités est excessivement onéreuse. Quand on sait, d’après le
PNUD (2004) que le taux de pauvreté général en Côte d’ivoire est estimé
à 50,4%. On déduit aisément que les universités privées sont fermées à
une très grande franche de la population.
Même si la volonté est manifeste chez certains parents, le nombre
d’enfants à scolariser, constitue un épineux problème. Les moyens
financiers ne sont pas à mesure de satisfaire tous les désirs de fréquentions
dans les universités privées. Les bourses d’étude ne représentent que
15,1% des sources de financement des étudiants dans les universités
privées. En général, les étudiants boursiers sont des religieux désireux
de poursuivre leurs études et les bourses émanent plus souvent de leurs
congrégations d’origines. L’Etat qui a déjà du mal à assurer les bourses
dans les universités publiques, ne saurait en aucun cas prêt à s‘engager
dans une telle entreprise en ce qui concerne les universités privées.
Les frais de scolarité deviennent alors une prérogative essentiellement
familiale. 79,6% des frais sont payés par les familles à savoir le père, la
mère, le tuteur ou une association du père et de la mère.
Des universités pour personnes nanties
Le niveau d’étude des parents
Les parents qui envoient leurs enfants dans les universités privées
ont généralement le niveau d’étude de l’enseignement supérieur. Les
pères sont majoritairement les premières personnes responsables du
financement des études de leurs enfants dans les universités privées.
Sur 161 pères, 143 soit 88,82 % ont un niveau supérieur.
Le niveau d’étude supérieur des parents les rend plus sensibles à la
nécessité d’assurer une bonne formation universitaire à leurs enfants.
Plus conscients des avantages liés à la formation et aux diplômes
universitaires, ils sont plus enclins à opter pour des formations de qualité
pour leurs enfants. En sus de la qualité, ils ont besoin d’un cadre propice
à l’épanouissement, où les risques de perturbations sont moindres
contrairement aux universités publiques. L’obtention des diplômes dans
les établissements privés offre plus de chance dans les perspectives de
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recherche d’emploi. Cela est dû essentiellement au fait de la dégradation
de l’image des étudiants et à la dévalorisation des diplômes des universités
publiques. C’est donc un souci, que leurs enfants conservent au moins
les acquis sociaux familiaux ou les améliorent, qui militent fortement en
faveur des inscriptions dans les universités privées.
Profession des parents
La majeure partie des étudiants des universités provient d’origine
sociale aisée. Les diverses professions qu’exercent leurs parents sont une
illustration parfaite de leur appartenance sociale. Ils sont très souvent :
Avocats, Magistrats, Notaires, Huissiers, Ingénieurs, Chefs d’entreprises,
Gros Commerçants, Cadres de l’Administration et du Privé, Médecins,
Pharmaciens, Architectes, Professeurs d’université, Professeurs dans le
secondaire, Officiers Supérieurs de l’Armée, de la Douane, de la Police
et de la Gendarmerie, Banquiers et Assureurs, etc.
On voit bien à quel point la profession des parents est un facteur
déterminant pour l’accès aux universités privées. La démarcation est
nette entre les personnes socialement aisées et les autres. On pourrait
dire que les universités privées sont pour le moment un choix de formation
réservé à une strate bien précise de la population. En effet, en plus de la
profession des parents, d’autres signes peuvent compléter notre analyse
précédente et surtout la renforcer. Il s’agit de deux variables, indicatives
des revenus et du rang social de parents. Ces variables sont : le lieu de
résidence et les moyens de transport.
72% des étudiants enquêtés habitent la commune chic de Cocody.
Commune résidentielle, cet espace est connu pour la richesse de ses
habitants et l’architecture de ses maisons. Les classes les plus aisées de la
société ivoirienne, autant que la plupart des expatriés et des diplomates en
font leur résidence de choix. On remarque que seulement 6,9% des étudiants
des universités privées utilisent le bus comme moyen de transport. Quand
on sait que le bus est le moyen de transport des populations à revenus
moyens ou faibles, on comprend alors que les étudiants des universités
privées ne les utilisent presque pas. Ils viennent le plus souvent en taxis
communaux, ce qui représente environ 30 000 f/Cfa par mois soit plus de
la bourse mensuelle d’un étudiant du premier cycle dans les universités
publiques (environ 20 000f/Cfa par mois). En plus, les universités privées
sont presque toutes dans la commune de Cocody.
Après les ‘‘ woro – woro9’’ les étudiants se rendent au cours en voiture
personnelle (accompagnés par leur parent, un chauffeur ou eux-mêmes
9 Taxi communal
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Facteurs limitant l’accès aux universités privées en Côte d’Ivoire
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au volant) soit 16,51%. L’utilisation de voiture personnelle pour se rendre
à l’université dénote d’un luxe probant et d’une aisance avérée.
CONCLUSION
Les universités privées ne sont pas encore en mesure d’apporter une
réponse efficace à la crise des universités publiques en Côte d’Ivoire.
En effet, les universités privées attirent très peu d’étudiants. Cela est
essentiellement dû au nombre limité de filières de formation et surtout
aux frais d’écolages trop élevés pour la grande partie de la population.
De ce fait elles apparaissent comme des universités pour personnes
financièrement nanties qui cherchent à fuir les perturbations dans les
universités publiques.
Elles sont trop dépendantes des frais de scolarités payés par leurs
étudiants, ce qui engendre des positions financières très délicates. Elles
doivent faire des arbitrages entre divers types de dépenses, les unes
aussi importantes que les autres. Le corollaire de cet état de fait, est les
universités privées n’arrivent pas à amorcer un bon décollage.
La réduction des frais d’écolage et la diversification des filières de
formation s’imposent. La réduction des frais permettra d’attirer vers
elles des étudiants ayant des parents à revenus modestes. En sus, des
économies d’échelles pourront être réalisées, cela garantirait au mieux
une autonomie financière. La diversification des filières, va élargir l’éventail
des possibilités de formation. Les étudiants désireux de faire des études
dans des branches autres que le Droit ou l’Economie, pourraient eux aussi
avoir accès aux universités privées.
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