Haiku du festival par Danyel Borner

Transcription

Haiku du festival par Danyel Borner
SOUVENIRS DU FESTIVAL
DANYEL BORNER, AMBIANCE
"J'attrape jamais rien"
dit-elle en l'embrassant le porteur de thé
Transparences un balcon sur le Rhône
pour les haïjin
Forêt de mains
à l'arrivée des sushis douceur du saké
La mauvaise fourche
pour le point de rendez-vous sentiers d'automne
Tiges de bambou
le soir du dernier jour un cygne trompette
Dernier métro être le plus vieux du wagon
chaque soir
BIKKO, AMBIANCE
sifflements soyeux
d'air sur la carrosserie
~ route de Lyon
cinquième étage ~
après-rasage et encens
montent de la rue
trois poules d'eau
sous l'ardoise-haïku
~ un banc à l'ombre
parmi les haïkus
ils révisent les chiffres
~ Alzheimer
nu sur le lit
vent frais dans mes poils
~ une sirène
tram de nuit ~
ne pas oublier d'ôter
le badge Bikko !
ombre et soleil ~
seuls immobiles sur elle
ses tatouages
petit matin ~
de la chemise d'hier
l'odeur métallique
matin d'automne ~
le reflet des péniches
bouge à peine
sous les fenêtres
circulation engorgée
~ le fleuve coule
je goûte sa joue
elle goûte mon saucisson
~ bouchon Lyonnais
vol de migrateurs ~
un klaxon impératif
brise l'instant
RAHMATOU SANGOTTE, JARDIN
VICTOR ET JOCE
soleil
sur le cerisier mort à l'ombre le chat
*****
sur le temple
la licorne
indique le levant
*****
encagé
le médaillon
des amants
*****
sur le mur
l'ombre
intégrée au tableau
*****
dans l'ombre
le médaillon
d'or
*****
soleil sur le tableau
jeux d'ombres
*****
le mur de béton
et la montagne mêmes courbes
*****
près du buis
le chat
plus plat que le banc
*****
derrière le cerisier
l'ombre
du cerisier
*****
dans le jardin
étoiles
et pommier
*****
dans le mur de béton
se découpe
l'entrée du paradis
*****
dans le jardin
des étoiles
funéraires
*****
soleil à l'entrée du jardin
un suaire
*****
stèles en étoiles
dans le jardin
de paradis
*****
au sud
le mur
attend les mots
*****
sur le mur sud
l'escalier
et son ombre
*****
un arbre
puis deux puis trois ...
puis la vigne
isabel ASÚNSOLO, TRABOULES
digicode - sésame
une flèche et deux crochets
... on déboule !
on est très discrets
- trans ambulare trans ses cheveux si fins
cœur de traboule elle trône, icône
devant l'ascenseur
pas fait exprès !
vous tous la mauvaise voie
son sourire...
rampes en fer forgé
d'étage en étage chercher
la variation
ancien carmel
ex-squat
cours rayonnante
"à meneaux, meneaux"
sa bouche se fait menue
- jolie trabouleuse
massés dessous
les yeux convergent . . .
dôme rose et bleu
Le haut du pavé
je tiens le haut du pavé
trabouleuse perchée
les familles nobles
si discrètes de leur richesses
(elle n'en dit pas plus)
en haut de la tour
chacune à une fenêtre
pour le photographe
peu d'explications
phrases inachevées
guide parfaite
Hollandais mûr
mû par les épaules nues
de la trabouleuse
rue du bœuf couillu
juchées sur l'escabeau
elle et sa perceuse
passerelle, soleil
les trabouleuses guident
les trabouleurs
quartier Saint-Jean
la perceuse transperce
les trabouleurs
égrenés sur les marches
les trabouleurs partagent
une grappe
place Fernand Rey
Serge s'interroge sur les noms
propres et le haïku
descendant les marches
du passage des Voraces
petit enfant blond
rue Lorette
un air de Monte Pucciano
...
cri de joie
Rahma aperçoit le dôme...
d'un chat !
tour à tour
un air d'Anvers, un air de Toscane
au Vieux Lyon
pressée si pressée
étonnée d'être si vite
arrivée...
charmante courette
s'adossant soudain...
l'envers du béton
fin de traboule
un rectangle irrégulier
de ciel bleu
rue Juiverie
derrière ce rideau oui...
un jour, un jour...
revoyant le jour
"les traboules c'est romanesque"
elle dit merci
JOSETTE PELLET
attendre en vain
devant porte close –
pisser sur le paillasson ?
octobre très doux –
de ses collines aux fleuves
Lyon flemme et flamboie
y entrer au rez
en émerger au 5ème –
traboule ascension
refuge des canuts
cachette pour les Résistants –
fumoirs et flirtoirs
colline de Fourvière
et colline de Croix-Rousse –
prier ou bosser
au quartier Saint-Jean
le réfectoire des chanoines –
quand c'est qu'on mange ?
entre Rhône frontière
et Saône navigable
Lyon dans un cocon
au Bouchon Saint-Jean
cervelle de canut
et Côte du Rhône
tour terre de Sienne –
à la fenêtre un haïjin
nous photographie
sous le toit des plantes
dans leurs pots de terre –
seules au soleil
deux rues deux entrées
entre deux la traboule –
côté bourges côté plèbe
chercher les sirènes
dans la cour du gouverneur –
deux ados se marrent
odeurs de tajine
d'amandes et de narguilé –
varier les plaisirs
ruelle Punaise
ex-égout à ciel ouvert –
on s'extasie
Place Gerson –
sous les paulownias
un tapis de soie
automne indien –
un temps idéal
pour clochards célestes
au creux des collines
escaliers portes cochères –
clochards au soleil
« merci ! » crie-t-il
longtemps après mon départ –
pain et sourires
Cours des Voraces –
canuts contre baïonnettes
le sang a coulé
horde d'ados
déboulant des traboules –
seule fille la prof
devant la Montée
des Carmes-déchaussés –
rester en bas
traboule fermée
repli rue des Capucins –
les mystères de Lyon
pisser dans un seau
ou l'évier de la cuisine –
(pas) bon pour l'ego
les connaître par cœur
même sans prier –
Jardins du Rosaire
à Lyon le dimanche
rares sont les bouchons ouverts –
« Appelez-moi Rose »
cris de manif ça gêne pour l' arrêt du bus ?
pas avant le matin !
bras dénudés
embrassant la lune
tattoos d'enfant
cher ami tu ne te vois jamais comme ça
avec l'œil d'un oiseau ?
la fillette
entre deux grosses têtes
près d'une éclipse
le jaune au milieu
et les ombres bougent
toutes autour
isa est eva
mais tous les arbres
ne sont pas des pommiers
quelle application
tous les cheveux de la lune
sont noirs cirés !
ROB FLIPSE
visite au coiffeur
cela prend trois semaines
pour me retrouver
qu'on les cueille tous
avant que le colibri entre
aux nez des femmes
tout tourne autour
d'une ombre sur la lune
la toison de qui ?
par la fenêtre
entre l'argent du temps
qui vite fait vieillir
bruit dans la nuit
ce n'est pas une souris
je racle la gorge
si on peut ouvrir
le corsage du temps perdu
un gros livre -
cris de manif un tramway plein de jeunes
pour la boîte de nuit
les spectres sortent
de la bouteille vide
des mandats choyés
les vieux mariés
se promènent en tout lieu
surtout dans le dos
je pleure presque
de ne plus pouvoir regarder
dans ses yeux marrons
les haikus sont semés
et maintenant attendre
le soleil d'été
qui doit choisir
que les trois beautés elles-mêmes
les hommes ébahis
alea jacta qu'est-ce qu'on fait
que de joindre les mains
lumière et joie
trouver un petit haïku
perdu par terre
tut tut tut ...
qui pourrait me voir comme ça ?
seulement moi !
qui fait pipi
que le chien des poètes
sur le pied des poètes
une fresque du ciel
de l'autre coté du temps
dans un miroir noir
tour de judith gautier
fille de théophile gauthier
le chef de file
flottant dans le bleu
c'est toujours ton visage
qui ne veut pas tourner
SERGE TOME
hall de gare -quelques pigeons attendent
des miettes
automne trop chaud -déjà les feuilles mortes
sur les enfants
arène aux lions -un chat noir
au soleil
quelle soif !
au fond du thermos
seulement l'odeur du thé
Opéra -les héros de tragédie
éclairés en rouge
pays noir -la couleur blanche
de l'usine d'oxygène
ROB FLIPSE/MADOKA
au blanc visage
de la madoka naturelle
le noir des yeux
l'oba tombe
pan par pan par terre
la bouche béante
du visage blanchi
on oublie les doubles mentons
en train de venir
fille d'automne
la montagne de mocca
je la traverse
dans son corsage
pour cueillir la perle noire
faut toutes les compter
entre sa robe
et le rebord des souliers
l'espace blanc
BRIGITTE BRIATTE/JARDIN
Pompon à l'affût
d'un oiseau sur une tête,
que de rires !
au fond du jardin
dans des tubes de fer
la mer
des cosmos blancs
près d'un mur gris,
des tomates aussi
une barque chavire
sur la mémoire océane,
amour perdu
des oiseaux d'or
ombrent le mur gris,
pas un bruit
dans un champ d'étoiles
des pommes bleues ou blanches
- qui est le jardinier ?
JEAN ANTONINI
Enclos du jardin
l’ombre de la licorne dans l’herbe
violet des asters
NEKOJITA
héron dans le pré
au-dessus des carpes
son sosie de bois
hanami d’octobre
sous le cerisier
le printemps est mort
sur le pommier
les pommes en terre
de l’artiste
brève collation
les langues de chat
que je décline
à l’exposition de Ion :
baguettes vides
le maki-sushi tombe
à mes pieds
Dans Lyon :
montée des Cazaux
les descendants plus alertes
soleil d’automne
Robert GILLOUIN
traboule fermée
interphone magiquefraîcheur soudaine
pont Bonaparte
prière à gauche travail à droite
habitudes chamboulées
galeries suspendues
puits de lumièresun vélo bleu
galeries suspendues
puits de lumièreslocal à poubelles
face à la tour rose
du temps pour l'admirationmerci Merete
colline de Fourvière
ciel d'été en septembre
sortie de traboule
rue saint Jean
une glace partagéegourmande passante
ce soir la petite cuillère
blanche au fond de mon sac noir
on se frotte les mains
les bras et les douleurs
à la lumière du jour
sortant de l'ombre
une voix cassée qui en flûte
se transforme
est-ce le diable
qui nous attaque avec l'axe
d'un feu sombre
je les ai vus
sortant un instant tes bois
d'êtres vivants
les lunettes sont faites
pour marcher la nuit sans lune
comme les baguettes
et dire à Somalie
d'apprendre la démocratie
- courir le marathon
ROB FLIPSE
senryusha de lyon - extra
pour cause de rêves
la mer derrière les lunettes de soleil
cachée
un personnage
change le masque de l'autre
en personnage
lisez bien
il n'y est pas écrit
ce qui est écrit
en soie de chine
se mettre le nez dedans
l'or de la lune
pour toute chose
une dent qui danse
un mot qui enfante
cris de manif
un tramway plein de jeunes
pour le club de nuit
deux émeraudes
et le désir d'être entier
jetés par la fenêtre
rivière langoureuse
les voitures et un héron
survolent le pont