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LE COURRIER ACTUARIEL Au cœur du débat actuariel en Afrique Banque, Finance et Assurance Stratégie, Prospective et Décisionnel n° 1 – trimestriel – janvier 2014 EDITORIAL MICRO-ASSURANCE ET MICROFINANCE : L’Actuariat en tant qu’outil de quantification des risques demeurera élitiste. Cet élitisme n’est pas dicté par le corporatisme mais par de compétences exigeantes qui en font une barrière à l’entrée nécessairement très haute. Ainsi, aussi loin que l’on remonte dans l’histoire de ce métier, les actuaires ont été recherchés. En 2013, l’actuaire figure en N°1 du TOP 10 des meilleurs métiers au monde. L’actuaire aujourd’hui ne limite d’ailleurs plus son expertise à la maîtrise des risques actuariels (souscription, rachat…). Celle-ci couvre aussi les risques financiers (portefeuille bancaire ou assurantiel). Chez DAXIAL, nous avons réuni ces compétences afin de mettre dans les mains de nos lecteurs l’expertise actuarielle la plus sûre et ce dans les standards internationaux. Dans ce premier numéro, LE COURRIER ACTUARIEL met l’accent sur la microfinance dans sa double dimension assurantielle et bancaire. En Afrique subsaharienne, si la microfinance dans sa dimension bancaire existe depuis deux décennies, elle reste embryonnaire dans sa dimension assurantielle. Seul l’Afrique du Sud dispose aujourd’hui d’une réglementation de la micro-assurance. Sous l’impulsion du Bureau International du Travail, divers programmes de micro-assurance ont vu le jour au cours des dernières années (Ethiopie, 2008 ; Zambie, 2010 ; les 8 Etats de l’UEMOA et les 6 Etats de la CEMAC réunis sous la bannière CIMA en 2011 pour les mutuelles sante…). Pour accompagner l’éclosion de la micro-assurance, le cadre réglementaire de l’assurance a été adapté. Nous y reviendrons, pour ce qui est de la CIMA, dans un prochain numéro. Ce premier numéro s’est aussi attaché à identifier les défis que devra relever la micro-assurance en Afrique ainsi que les enjeux actuariels. Enfin, l’actuariat étant indissociable des données, un de nos experts montre comment les organiser dans la recherche d’efficience au titre de la microfinance. Auguste MPACKO PRISO, PhD et Actuaire Sommaire LE CADRE REGLEMENTAIRE Auguste MPACKO PRISO, PhD et Actuaire qualifié IAF Faut-il réglementer la microfinance ? Ne pourrait-on pas se contenter d’un code de bonne conduite ? Sinon, quid de l’autorégulation du secteur ? La légitimité de la réglementation et la supervision des Etablissements de Microfinance (EMF) Si les questions supra sont légitimes, la réponse est incontestablement à chaque fois négative. Cette réponse n’est pas dictée par la morale, qu’elle soit religieuse ou laïque. Elle a simplement un fondement économique. La microfinance en Afrique participe de la modernisation de nos structures économiques et même d’une certaine manière, de nos sociétés. Il est d’ailleurs étrange de voir que le monde réuni autour de l’ONU a multiplié les droits en tout genre et a oublié un droit aussi élémentaire et fondamental que l’accès au compte. N’est-ce pas là un droit de base ? Est-il possible de vivre dans le monde moderne sans accès à l’épargne, au crédit et/ou à l’assurance ? Puisque la réponse est négative, doit-on continuer à considérer ces produits comme un luxe ? De ce point de vue, la microfinance n’est en rien différente de la finance traditionnelle. Or, le propre de la finance est d’être une activité qui nécessite un important capital, mais un capital d’une extrême fragilité. Ce capital, c’est la confiance. Pour que ce capital demeure, voire qu’il se fructifie, il faut que le système respecte à chaque instant ses engagements. C’est ce qu’il faut mettre en place pour la microfinance. Réglementation de la microfinance en Afrique de l’Ouest Nous nous intéressons aux pays de l’UMOA (Union Monétaire Ouest Africaine). L’arsenal réglementaire tourne autour des lois PARMEC 1 et 2. La première loi PARMEC ou loi portant sur la réglementation des institutions mutualistes et/ou les coopératives d’épargne et de crédit a été adoptée en 1993 et transposée progressivement dans les droits nationaux des pays membres. Ses objectifs étaient : protéger les épargnants, sécuriser les opérations, rechercher une autonomie des systèmes financiers décentralisés et intégrer la finance informelle dans le cadre légal. La loi PARMEC 2 a été adoptée en 2007 avec l’ambition de corriger les lacunes de la loi PARMEC 1 mais aussi d’intégrer les standards internationaux sur la réglementation et la supervision. Parmi les changements importants figurent le fait qu’une simple déclaration au Ministère de l’Economie et des Finances ne suffit plus pour avoir une existence légale mais aussi l’instauration de ratios prudentiels comme l’instauration d’une réserve légale, la nécessité de couvrir les emplois à long terme par les ressources stables, le contrôle des conflits d’intérêt, la limitation des risques de l’institution au double du montant des dépôts, le contrôle de la concentration des risques et la fixation du ratio de liquidité à 80%. La loi PARMEC 2 s’accompagne d’une supervision à deux niveaux, régional et national. Micro-assurance et microfinance : le cadre réglementaire ……………………………………………………………………………… 1 Micro-assurance : défis et enjeux actuariels …………… 2 Microfinance : analyse et stratégies efficientes ……………………………………………………………………………… 3 Microfinance et micro-assurance : exemples de structures d’envergure en Afrique …………………………………………… 4 Actuaire : métier d’avenir et opportunité pour l’Afrique ……………………………………………………………………………… 4 Réglementation de la microfinance en Afrique Centrale Dans la zone CEMAC, la réglementation de la microfinance est l’extension de la Convention du 17 janvier 1992 portant harmonisation de la Réglementation Bancaire. Elle s’appuie sur un certain nombre d’instructions et de réglementations (COBAC EMF 2002/02 à 2002/21). La réglementation classe les activités d’épargne et de crédit en trois niveaux. Les EMF de premier niveau collectent de l’épargne auprès de leurs membres et la prêtent à d’autres membres. La deuxième catégorie concerne les EMF qui collectent l’épargne et peuvent accorder des prêts aux tiers. Les EMF de troisième catégorie ne collectent pas de l’épargne mais accordent des prêts à des tiers. 1/4 MICRO-ASSURANCE : Quelle performance des institutions de micro-assurance ? DEFIS, ENJEUX ET OPPORTUNITES ACTUARIELS Toute institution de micro-assurance, de part sa vocation, est attendue sur deux dimensions de performance liée, sociale et économique : Performance sociale : ou impact social de l’activité micro-assurance. Elle s’apprécie à l’aune de la capacité des produits conçus à vaincre ou réduire la vulnérabilité des populations à faibles revenus auxquels ceuxci sont destinés. C’est l’efficacité des produits face aux risques des gens. Ahoua ASSOUAN, PhD et Actuaire qualifié IAF La micro-assurance regorge de multiples opportunités actuarielles. À travers quatre thèmes classiques de l’assurance, à savoir Souscription, Inventaire, Solvabilité et ALM, nous saisissons la portée de la microassurance, ses défis et ses enjeux, pour les actuaires, en Afrique. Performance économique : c’est la capacité de l’institution à tenir ses engagements. Elle passe par une gestion saine et transparente d’avoirs des sociétaires ainsi qu’une très bonne maîtrise des aspects techniques et financiers des opérations d’assurances et surtout de micro-assurance. Souscription, maîtrise de données : Souscription renvoie pêleSolvabilité, à tous prix : Quoi que fasse le micro-assureur mêle à demande, offre, risque, produit ou tarif. Le défi, c’est comment modéliser le risque et offrir des produits qui répondent aux attentes des clients dans un environnement doublement contraint : manque de données et/ou qualité douteuse de celles-ci et faible niveau de revenus des prétendants à l’assurance. En effet, l’assureur ne sait pas créer de produits sans données. S’il connait bien l’ingénierie de la mutualisation, sa limite dans le cadre de la micro-assurance résulte d’une absence de données tarifaires, source première d’opportunité. Les deux premiers métiers de l’assurance que sont le technique (conception de produits) et le juridique (élaboration de contrats) sont ici inopérants. Constituer et fiabiliser les données représentent pour le micro-assureur, et pour l’actuaire aussi, un enjeu de taille pour mutualiser les risques et réduire les tarifs. (institution de micro-assurance ou assureur privé), sa solvabilité, à savoir sa capacité à tenir ses engagements vis-à-vis des assurés, importera. Aussi, le régisseur, la CIMA pour les pays d’Afrique Subsahariens, édicte des normes prudentielles qui échoient aux porteurs de risques, selon la nature de ceux-ci (assurance non-vie et vie). La question se pose de savoir jusqu’à quel niveau le micro-assureur est tenu. Car solvabilité implique mobilisation de fonds propres en couverture des engagements pris. Or l’argent du micro-assureur est rare. Quel doit être donc le niveau d’une mobilisation optimale des fonds propres ? Comment définir un seuil raisonné de fonds propres ? Au sens où celui-ci permettrait de respecter les exigences CIMA sans aggraver inéluctablement les tarifs pratiqués. Car, tout naturellement, qu’il s’agisse de structures à but non lucratif ou d’assureurs privés, le montant stocké ne doit pas inhiber les opportunités de développement et l’exigence de rémunération d’actionnaires. Conséquence, divers calculs de sensibilité doivent alors être opérés et leur précision constamment validée, dans des contextes toujours en évolution. Il s’agit donc, ici encore, de vastes chantiers techniques qui échoient à l’actuaire : quand l’argent manque, les analyses de prospective au titre de la solvabilité sont un véritable gage d’assurance. Inventaire, à coût raisonné : Le rôle de l’activité d’inventaire est primordial : suivre, piloter et contrôler les engagements pris envers les assurés. Mais aussi, établir les comptes techniques et produire les états réglementaires et statistiques sont de son ressort. De même alimenter les divers services Solvabilité, ALM (ou Gestion Actif/Passif ou GAP) et Comptabilité est au cœur de sa mission. L’inventaire est le garant des flux de provisions, d’intérêt technique, de participation aux bénéfices, etc., qui sont incorporés dans les comptes. La micro-assurance dans une optique professionnelle ne peut y échapper. Toutefois ici, l’argent manque ! Et parce que l’argent manque, tout centime de franc vaut de l’or. Le défi actuariel sera alors d’innover, voire d’inventer et remodeler la chaîne de valeur classique d’inventaire pour réduire le coût. Il s’agit de piloter les engagements pris à prix raisonnés, de sorte que la charge d’inventaire n’aggrave pas la charge pure du risque. Pour cela, des arbitrages de processus sont donc nécessaires, mais réalisés de façon optimisée pour ne pas vider de sa substance l’inventaire : cet enjeu d’équilibrage nécessite le travail d’un actuaire-expert. ALM, bouffée d’oxygène : Tout tarif de micro-assurance est contraint. En outre, la CIMA veille au respect des engagements pris au travers d’exigences de solvabilité. Se profile toutefois la nécessité de faire fructifier passifs et fonds propres (quand bien même leur endossement aux actifs reste encadré, les supports éligibles et parts allouées sont réglementés). Mais, les diverses stratégies et les compositions des portefeuilles d’actifs sont très dynamiques par essence. De même, la structure des contrats, leurs horizons et toutes leurs options cachées (participation aux bénéfices, rachats, etc.), varient. Dès lors, les réalisations et les pilotages prospectifs de l’activité de gestion d’actifs et de passifs (ALM) sont primordiaux. L’allocation stratégique de placements limite les risques financiers et accroît les chances de paiements des prestations assurées. L’actuaire sera ici aussi sollicité, et sa compétence technique ALM aidera, naturellement, à renforcer la performance cible. C’est le pilotage prudentiel de l’ALM. Micro-assurance : définition, histoire et modèles La micro-assurance est un plan financier qui utilise la mise en commun des risques afin de fournir des compensations aux individus ou à des groupes qui sont touchés défavorablement par un risque particulier ou par un événement. Les personnes qui sont affectées par un événement négatif profitent des contributions d’autres individus. Le préfixe « micro » dénote la subdivision des produits d’assurance qui sont censés être avantageux et abordables par des individus ou des groupes à faible revenu (Brown, Green et Lindquist, 2000). L’offre d’assurance aux ménages pauvres n’est pas un concept nouveau. Les associations de crédits, les coopératives et les organisations informelles avaient en effet offert l’assurance aux pauvres pendant des décennies et même plus longtemps encore. En outre, le secteur commercial d’assurance est une source importante de connaissances et de compétences. Aussi, bien qu’il subsiste un potentiel pour l’innovation dans l’offre de la micro-assurance, les acteurs de ce secteur sont tous conscients d’utiliser davantage possibles les leçons et les expériences historiques. Cinq conditions classiques de succès d’une micro-assurance : 1. 2. 3. 4. À ce jour, trois modèles institutionnels différents opèrent en micro-assurance : le modèle assureur de service complet (cas d’un assureur commercial), le modèle d’associé-agent (séparation de la conception du produit de son marketing et de sa distribution) et le modèle de l’assurance basée sur la communauté (les assurés eux-mêmes sont à la fois les propriétaires et les gestionnaires). 5. Les produits doivent être disponibles uniquement que pour les risques spécifiques (couverture uniquement des risques particuliers, etc.). Le nombre d’assurés doit être suffisant pour la mutualisation des risques ; car une taille faible d’assurés peut créer une forte volatilité. Une absence de covariance : l’événement redouté doit toucher un nombre limité de personnes à la fois (risques moraux et antisélection). Le portefeuille de la micro-assurance doit inclure des cas de risques bas et hauts pour que le risque moyen de se produire dans la mise en commun soit similaire à la moyenne dans la population générale. La probabilité de perte doit être mesurable : difficulté d’estimer les actifs et de fixer les indemnités, probabilité de fausses déclarations élevée, etc.). 2/4 MICROFINANCE : ANALYSE ET STRATEGIES EFFICIENTES Désiré SEU, Mathematics PhD et Actuaire Des études récentes dirigées par la Banque Mondiale révèlent qu’en moyenne une personne sur cinq vit avec moins de 1 dollar par jour. Ce triste constat est plus sévère en Afrique subsaharienne où 50% de la population vit avec 1,25 dollar par jour. Cette même étude révèle qu’en 2010, dans cette région du monde, 414 millions de personnes sont en situation d'extrême pauvreté, soit plus d’un tiers des cas recensés dans le monde. Face à ce constat de difficultés économiques, les banques concourent peu à la l’amélioration de cette situation socio-économique, puisque non seulement le taux de bancarisation en Afrique Subsaharienne est de moins de 7% mais elles prêtent rarement. L’importance des services financiers n’étant plus à démontrer, les bailleurs de fonds ont mis en place le microcrédit pour les populations pauvres. Des expérimentations de micro-assurance ont lieu ici et là pour la même cible. Même s’il reste encore des aspects à parfaire, la microfinance connaît aujourd’hui dans les pays Subsahariens un essor spectaculaire à tel point qu’elle arrive à apporter des services financiers diversifiés à des dizaines de millions de clients qui n'y avaient pas accès il y a quelques temps (instruments d'épargne, services de transfert de fonds et d'assurance, …). Quelques principes clés de la microfinance : Par essence, la microfinance ambitionne de fournir aux populations démunies une gamme de services financiers au-delà du seul microcrédit. Elle s’attaque en priorité à la lutte contre la pauvreté. Pour être pérenne, elle doit assurer la viabilité financière des opérations pour pouvoir couvrir les populations à faible revenu. Ce qui passe par la création d’institutions financières locales fortes. Les pouvoirs publics doivent garantir la sécurité des opérations de microfinance. Pour gagner la confiance des clients, les activités financières doivent être transparentes et l’information publiée par les institutions de microfinance crédible. Quelques bonnes pratiques de transparence : Faire de la transparence une valeur clé de l’organisation. La transparence dans la gouvernance doit être ou devenir une réalité pour les dirigeants, administrateurs et élus. Ils doivent avoir un comportement exemplaire pour inspirer leurs équipes. Honnêteté et compétence doivent être leurs valeurs cardinales. Construire des bons indicateurs de performance. Il s’agit des indicateurs financiers, qui quantifient l’activité et mesurent la performance financière (résultats et ratios financiers), ainsi que les indicateurs de performance sociale qui évaluent comment l’IMF réalise sa mission, ses objectifs sociaux et sa responsabilité sociale (cf. Box précédent). Produire des informations utiles et fiables. Le système d’information de gestion (SIG) doit garantir l’exactitude des données recueillies et saisies, et préserver leur intégrité lors de leur transmission et transformation (cf. Box suivant). C’est là que le Business intelligence (BI) ou le décisionnel jouera son rôle. Consolider le contrôle interne permettant de minimiser les risques, via la vérification de l’efficacité des opérations, de la fiabilité et exhaustivité des informations, et la conformité des opérations aux lois et réglementations en vigueur. Renforcer l’audit interne et organiser l’audit externe, ce dernier étant mené par des personnes externes à l’institution. Organiser un rating, synthèse d’une évaluation précise (fiable et à jour du niveau de risque/des performances des institutions), menée par une entité externe et indépendante. Transformer les données en information, par une analyse permettant de dégager les messages clés sur la performance de l’institution et diffuser l’information. Un historique de la microfinance à partir de 1970 Années 1970 : Développement des mutuelles d’épargne et de crédit dans les pays en développement après l’échec des banques de développement rural financées par l’aide internationale et les États dans les années 1950. Mise en place de programmes expérimentaux de microcrédits consentis à des groupes de femmes démunies. 1989 : En France, Maria Nowak crée l’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie). 2005 : Les Nations-Unies déclarent 2005 Année internationale du microcrédit, sous le slogan « Mettre en place des secteurs financiers participatifs pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement ». 2006 : Le Professeur Muhammad Yunus et la Grameen Bank, qu’il a fondée en 1976, reçoivent conjointement le prix Nobel de la paix. 2009-2012 : Suite à plusieurs crises localisées, plusieurs initiatives sont lancées pour renforcer la supervision, la transparence et la performance des institutions de microfinance. Quelques axes d’améliorations : Contre toute attente, les institutions financières plus soucieuses de leur progression fulgurante ont tendance à tourner le dos aux populations à faible revenu et à ne se concentrer que sur la finance. Ainsi, il est opportun que les institutions de microfinance pratiquent leur métier à proximité de leur vraie cible, les plus démunis. Être au service de la population démunie quelle que soit le lieu d’intervention. Telle doit être est la devise de la microfinance. Mais cette devise serait vaine si les institutions n’intègrent pas en leur sein les autochtones qui connaissent mieux leurs besoins ainsi que leurs secteurs d’interventions prioritaires, à condition qu’ils observent scrupuleusement les valeurs à l’origine de la microfinance. Étant donné que les institutions de microfinance détiennent une masse très importante de données, il serait primordial qu’elles les exploitent à bon escient. Elles peuvent ainsi recourir aux outils décisionnels, d’une part pour comprendre le comportement des clients et, d’autre part, pour pouvoir prendre des décisions pertinentes et idoines qui s’imposent dans des délais très courts. 3/4 « Actuaire : métier d’avenir et opportunité pour l’Afrique » MICROFINANCE ET MICRO-ASSURANCE : EXEMPLES DE STRUCTURES D’ENVERGURE EN AFRIQUE Ange ZORO BI, ISE, Actuariat & Finance Bien que tous s’accordent sur l’importance et le potentiel marché que représenterait la microfinance et la micro-assurance en Afrique, force est de constater le peu d’engouement qu’ont encore les entrepreneurs pour ce marché. Le secteur de la microfinance en Afrique est ainsi structuré autour de deux types d’institutions, à savoir les institutions mutualistes ou coopératives d’épargne et de crédit et les institutions non mutualistes (ONG et Société Anonyme). Les structures mutualistes ou coopératives d’épargne et de crédit regroupent la quasi-totalité des institutions de microfinance du marché. Nous présentons ici l’exemple de trois structures d’envergure opérant sur le marché africain. UNACOOPEC-CI : Union Nationale des Coopératives d’Epargne et de Crédit de Côte d’Ivoire, né en 1976, sous l'initiative de l'Office National pour la Promotion Rurale (ONPR), par la création de la première entité de base le 28 janvier 1976 à Kouto. Au 15 septembre 2011, le Réseau comptait 69 caisses et points de services agréés, 881.535 membres et avait un encours de dépôts de l’ordre de 80 283 768 985 FCFA, avec un encours de crédit de 17 078 383 280 FCFA. En termes de parts de marché, ce réseau, l’un des plus importants de l’Afrique de l’Ouest, concentre à lui seul 80 % de la clientèle des IMF de Côte d’Ivoire, 90 % des dépôts et 80 % des crédits. ADVANS : Depuis l'ouverture de la première institution en 2007 au Cameroun, le réseau s'est successivement étendu au Ghana, en RDC, en Tanzanie, en Côte d’Ivoire et au Nigeria. À travers le monde, le groupe Advans compte 3 250 employés, et sert 375 000 clients dont 325 000 emprunteurs. MicroCred : MicroCred est une société d’investissement créée par PlaNet Finance et des investisseurs partenaires : la Société Financière Internationale (SFI), la Société Générale et AXA Belgium. L’institution est présente à Madagascar, au Nigeria, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Mali… et totalise environ 75 000 clients actifs. La majeure partie des structures de microfinance commercialisent à leurs clients des produits de micro-assurance pour le compte de sociétés d’assurances classiques. L’actuaire est spécialiste du chiffrage et de l’évaluation. Il intervient, entre autres, dans le montage de produits financiers et d’assurances : il définit leurs conditions de rentabilité et de pérennité et suit, aussi, leur évolution via des études d’adéquation et d’anticipation. Il est donc au cœur des études stratégiques d’actif/passif et de solvabilité des industries d’assurance, de banque et de finance. L’aide à la décision qu’il propose permet de tirer pleinement profit d’opportunités d’affaires liées aux analyses de risques. Or, justement, risque et opportunité sont deux états structurellement indissociables et reflets du champ économique de l’Afrique : les opportunités des plus belles affaires côtoient les risques des plus belles pertes. Qu’on soit clair : cette loi n’est pas spécifique à l’Afrique. Mais, les structures économiques et financières y sont encore très jeunes, pour des demandes fortes et bien trop multiformes. Fréquence et coût, deux notions très chères à l’actuaire y sont alors à conceptualiser, à construire et à opérer. Pour ça, il faut des experts locaux qui savent décrypter la demande et y adapter l’offre car, ici, le micro et l’informel constituent la vraie richesse à saisir. La réelle contrepartie est pourtant la fiabilisation préalable des données : autant ces dernières manquent avec une grande acuité, autant elles doivent absolument être maîtrisées... Témoignage d’un Actuaire-Expert opérant en Afrique L’assurance telle que pratiquée chez nous a évolué pendant longtemps en marge des problèmes sociaux qui ravagent les revenus de nos populations et les maintiennent dans la précarité absolue et l’insécurité financière. Le développement récent de la micro-assurance a favorisé la correction de cette erreur qui a voulu que les primes soient fonction de la capacité au détriment de la quantité d’une part, et que les prestations soient de qualité et non de nécessité d’autre part. Mon intérêt pour la branche santé remonte à mes débuts où un ancien professeur m’avait instruit que tout groupe se constituait à partir d’une combinaison aléatoire d’individus et qu’à ce titre, les couvertures santé pouvaient être proposées à des particuliers. Tout produit fortement mutualisé détermine rapidement les composantes endogènes de son équilibre. Mais les évidences peuvent se heurter aux pratiques commerciales, aux règles de souscription et à des rigidités techniques notamment les ratios d’équilibre à 65%. Les acteurs ont récemment assoupli les règles sans favoriser le développement à cause de l’unicité de paiement des primes. Les Etats semblent s’intéresser à la protection sociale de leurs citoyens même si parfois la communication devance les préalables de personnel, de formation et d’infrastructure. La bonne santé jaillira manifestement de la convergence des approches du privé et du public vers un système inclusif et participatif. Serge POKOU, PDG de STANE International, Côte d’Ivoire - Mali LE COURRIER ACTUARIEL est une production de DAXIAL, Cabinet de conseil en stratégie et prospective actuarielle, global risk management et en informatique décisionnelle. DAXIAL assiste les industries de la banque, de la finance et de l’assurance. Nos experts œuvrent également pour le compte des institutionnelles publiques et privées, les organismes non gouvernementaux, et accompagnent les entreprises. DAXIAL opère uniquement en Afrique, subsaharienne notamment. Microcare : se lance, en 2001, en Ouganda, dans l’assurance santé, à l’époque sous la forme d’une organisation sans but lucratif. Elle développe ensuite ses opérations et devient une compagnie d’assurance santé commerciale en 2005. Web : www.daxial.com - Mél : [email protected] Au total, c’est dire combien le marché Africain reste très ouvert à divers autres innovations en microfinance et en micro-assurance. Capital social : 1.000.000 FCFA - CI-ABJ-2013-B-6911 01 BP 1174 Abidjan 01 - Tél. : (+225) 22 35 44 08 4/4