L`Afrique, « nouvelle frontière » pour le

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L`Afrique, « nouvelle frontière » pour le
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Franck Giaoui
L’Afrique, « nouvelle
frontière » pour le
développement
économique de
l’Europe ?
Trop longtemps victime des idées héritées du passé, l’Afrique montre aujourd’hui
un nouveau visage et prouve qu’elle mérite désormais une place de choix dans
la stratégie d’investissement de toute entreprise internationale. Plusieurs pays
africains ont radicalement modernisé leur tissu économique depuis une vingtaine d’années. L’éclairage de Franck S. Giaoui, fondateur et associé-gérant de
Hera Finance.
Un réservoir de croissance méconnu
Le PIB africain est passé de 461 milliards de
dollars en 1970 à 1.669 milliards de dollars en
2010 ; soit une croissance proche de celle de
l’Asie. Les économies se développent rapidement grâce à quatre secteurs très concurrentiels : la construction, les télécoms, la finance
et le commerce international. Ces secteurs
complètent les secteurs traditionnels qui se
modernisent : l’agriculture associée aux industries agroalimentaires, l’extraction-transformation des matières premières et le tourisme.
On estime que dans une dizaine d’années la
classe moyenne représentera environ 300 millions de personnes en Afrique, soit sa taille
actuelle en Chine.
Des belles opportunités dans une
demi douzaine de secteurs et une
dizaine de pays
Malgré la crise économique, la croissance africaine reste très supérieure à celle des économies
développées ; en 2010 elle était de 4,5% contre
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1,8% dans la zone euro. Dans les nouvelles technologies, sur la période 2008-2013, la croissance
annuelle moyenne y sera comparable à celle de
l’Asie, selon Gartner Group.
Sur le marché de la téléphonie mobile, les souscriptions ont été multipliées par trois au Maroc,
par douze en Tunisie et par cinquante-huit en
Algérie, depuis dix ans ! Le nombre d’internautes
a doublé en cinq ans. La percée fulgurante de la
téléphonie mobile entraine celle de la publicité.
Selon Zenith Optimedia, le marché publicitaire
en Afrique et au Moyen Orient a doublé entre
2006 et 2012. Sur ce marché, l’Egypte a bénéficié
de la première croissance mondiale avec +364%
en 2009 et l’Afrique du Sud figurera à la 16ème
place mondiale avec 5,6 milliards de dollars en
2012 ; le Nigeria suivra.
Des obstacles réels mais
franchissables, pour les
entreprises européennes
D’abord, malgré les efforts affichés par les gouvernements et les progrès démocratiques réels
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FONDATEUR ET ASSOCIÉ-GÉRANT DE HERA FINANCE
Né en Tunisie, Franck S. Giaoui a
vécu et travaillé près de vingt ans en
Afrique.
Après une première expérience
opérationnelle, il a évolué pendant dix
ans dans deux grands cabinets de
conseil en stratégie à Paris, Londres,
Milan et Boston. A cette occasion, il
s’est notamment spécialisé dans les
fusions & acquisitions internationales.
Depuis fin 1996, date à laquelle il
fonde Hera Finance, il a initié et
réalisé de nombreuses opérations de
haut de bilan et a mené plusieurs
dans plusieurs pays, notamment en Afrique du
Nord, la corruption est toujours présente avec
son corollaire, l’insécurité. De plus, si la proximité culturelle du continent vis-à-vis de l’Europe est un facteur positif, la connaissance du
tissu relationnel local reste cruciale. Pour ces
deux raisons, il est prudent de procéder par
acquisitions, joint-ventures ou partenariats
avec des acteurs bien implantés localement.
Ainsi, Unilever a développé un partenariat
public-privé en Afrique du Sud, où il travaille
avec les organismes gouvernementaux à la
production durable de paprika.
Ensuite il est important de vérifier la législation
en matière d’investissements étrangers et de
contrôle des changes. Ainsi, si la Tunisie s’oriente
vers une libéralisation du « private equity », en
Algérie depuis 2009, un investisseur étranger ne
peut détenir que 49 % du capital d’une société
de projet et la loi établit un droit de préemption
pour l’État algérien en cas de cession des actifs
détenus. Cela n’a pas découragé le groupe Bel
qui, en ouvrant une usine à Alger, a vu son marché augmenter de 50%.
La qualité de la main d’œuvre est aussi primordiale : l’Afrique Centrale subsaharienne
accuse encore un déficit en matière de main
d’œuvre qualifiée et d’encadrement. Une
solution consiste à délocaliser l’encadrement
sous forme d’expatriés formateurs des collaborateurs locaux - solution adoptée par exem-
retournements en tant que manager
de transition ou administrateur de
sociétés.
Franck S. Giaoui est également
cofondateur du fonds de capital
risque Apollo Invest, fondateur de
l’association Divercity@ESSEC et
ancien professeur visitant de finance
à l’ESSEC. Il a publié une
cinquantaine d’articles dans la presse
économique ainsi que « L’Automobile
Sans Concession », un essai qui fait
référence, aux Editions
d’Organisation.
ple par les chinois – ou, mieux encore, de
former des cadres africains.
Les infrastructures de transports, encore hétérogènes, rendent difficile l’acheminement des
biens physiques. Deux réponses peuvent être
apportées : localiser les unités de production
en zone urbaine ou péri urbaine ; choisir des
secteurs peu sensibles au transport (télécoms,
finance, médias ou logiciels). Ce n’est toutefois
pas un hasard si les pays les plus en pointe dans
la construction des infrastructures de transport
sont aussi ceux qui exportent le plus en Afrique : Chine, Japon, Allemagne…
Enfin et surtout, il est indispensable d’adapter
l’offre à l’usage et au pouvoir d’achat locaux.
Pour cela, il faut réduire la complexité des
produits techniques qui doivent être :
fabriqués avec le minimum de pièces,
simples à assembler, à utiliser et surtout à
maintenir,
« packagés » avec un service de remplacement
qui en garantit l’usage en cas de panne.
IBM vend des logiciels dix dollars par mois et
par utilisateur ; l’idée est de compenser les petits
prix et le faible niveau de dépense mensuelle
des consommateurs par un fort volume de vente
et des coûts de commercialisation réduits.
Pour toutes ces raisons, il est recommandé aux
dirigeants désireux d’investir en Afrique de se
faire accompagner pour :
identifier les meilleures cibles d’acquisition
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Il est grand temps
que les entrepreneurs
européens actualisent
leurs idées sur l’Afrique
ou de partenariat et négocier avec elles ;
recruter et former l’équipe d’encadrement
locale ou assurer le management de transition ;
être activement représenté au conseil d’administration des sociétés dans lesquelles ils
prennent une participation.
Une longue liste de « success
stories »
Les « success stories » sont déjà nombreuses en
Afrique, qu’elles soient issues de partenariats
avec les multinationales, ou purement entrepreneuriales.
Dans les télécoms : Zain, opérateur de téléphonie mobile koweïtien fondé en 1973, a été
racheté par l’indien Bharti Airtel en 2010. Portant sur 40 millions de clients africains, la transaction s’est élevée à plus de 10 milliards de
dollars, soit 2,6 milliards de plus value pour les
actionnaires de Zain.
Dans la finance : L'Afrique est le continent où
le paiement par téléphone mobile rencontre le
plus de succès. M-PESA, filiale de Vodafone, est
un porte-monnaie électronique implanté en
Afrique de l’Est. En mars 2009, M-PESA comptait déjà 6,8 millions d'utilisateurs enregistrés
au Kenya.
Dans l’agro-alimentaire : Cevital, groupe
algérien fondé en 1998 par Issad Rebrab, pèse
aujourd’hui près de 2 milliards de dollars de
chiffres d’affaires et emploie 12 000 personnes. Il se place ainsi au troisième rang du
secteur en Afrique, juste derrière deux géants
sud africains.
Les multinationales ne sont pas en reste. Ainsi
Nestlé, installé depuis 1927 en Afrique y réalise
un chiffre d’affaires de 2,6 milliard d’euros,
possède 26 usines et emploie 14 000 personnes.
En 2010, le groupe a lancé un programme
d’investissements de 893 millions d’euros, sur
trois ans, avec pour objectif de produire localement. De son coté, Danone renforce sa présence dans la zone Afrique du Nord - Moyen
Orient, où il réalise un chiffre d’affaires de 1
milliard d’euros.
Dans les matières premières : Sam Jonah,
originaire du Ghana, commence comme
manœuvre dans une mine d’Ashanti Goldfields. Grace à une bourse, il obtient un diplôme
de troisième cycle en économie, en GrandeBretagne. Puis, il retourne travailler pour
Ashanti et devient en 1986 le premier Noir
africain à diriger la société depuis sa création.
Suite au rachat, par la firme sud-africaine
AngloGold en 2004, Sam Jonah fonde Jonah
Capital, un fond d’investissements.
De nombreuses opportunités
Il est grand temps que les entrepreneurs européens actualisent leurs idées sur l’Afrique. Les
exemples d’entreprises ayant brillamment
réussi ne manquent pas, et elles ne sont pas
uniquement chinoises ou indiennes. De nombreuses opportunités s’offriront à ceux qui
sauront, les premiers, choisir les partenaires
adaptés. Les marchés africains, aussi riches
que dynamiques, sauront stimuler la croissance de leurs affaires et la motivation de leurs
équipes.
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HERA FINANCE
Fondée et dirigée par Franck S. Giaoui
depuis fin 1996, Hera Finance est une
entreprise indépendante de M&A. En
quinze ans, elle a transformé 80% de
ses mandats en transactions, pour
moitié “cross-border”, pour une valeur
cumulée dépassant les 500 millions
d’euros en cash.
Hera Finance concentre son activité
autour des opérations de haut de
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bilan : cessions, fusions- acquisitions,
financements ; accompagnement
stratégique ; management de transition
; administration de société.
La différenciation de Hera Finance
repose sur trois principes fondateurs :
une relation de proximité et de
confiance avec les clients ; un
entrepreneur au parcours international
personnellement engagé dans toutes
les interventions ; une créativité
permettant de déboucler des
opérations souvent très complexes.
Hera Finance intervient auprès
d’actionnaires et dirigeants ambitieux
dans des contextes à fort enjeu quel
que soit le type de clients: grands
groupes internationaux, entreprises
familiales, gouvernements et fonds
d’investissements.