Title Histoire Naturelle, Civile, et Ecclesiastique de l`Empire du

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Title Histoire Naturelle, Civile, et Ecclesiastique de l`Empire du
\n
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Histoire Naturelle, Civile, et Ecclesiastique de
l'Empire du Japon Histoire Naturelle, Civile, et
Ecclesiastique de l'Empire du Japon Vol.3
Kämpfer, Engelbert
Citation
Date
1732
Type
Others
Rights
publisher
KANAGAWA University Repository
ît n
ISO
Il i S TOI
Mort de
A peu près dans lè m!me temps 1l0ÙS
Ii
l'un des nouvelle de Jedo, dé la mort de Kinmotlilma, auGouvcdr. para\raklt Gouv~rncur dè Naga'l.aki: le mime qui
;~~=faIti. tla~s l'année 1680, lorfquc le Dofreur Cleyer étoit
.
Dlfeaeur de notre commerce, fit exécuter a rndit
dix Japonnois pbilr avoir frautié la douane: quel.
sues uns furent decapiter., d'autres attache7. à tihe
ë.ràix. Il fit cela de fa feule autorité, fabs phrtet
l'aff~ire dèvant le Conftil d'Etat à Jedo. faris en at~
tendre les ordres; & pout cette râifon il fut defri·
tué de fa charge, & condamné à denlcurer àux ar·
rêts dans fa propre maifdn. où il mbtmit.
Lé 7 de Septembre on celebra la fête de la Lun~,
corn me les Japonnois l'appellent, & la lumiere éIè
!a Lune felon les Chinois. Le peuple én cètte oc·
cafton fe divertit à roder dans la nuit à la clarté dé
la Lune, quelques-uns prennebt le plaifir de fe proo
mener dans léurs bateaux où ils tirent à l'avirmi.
On a fort peu d'égard à Naga7.aki à cette fête, à
èaufè de la garde rigoureufe que l'on fait dans cettè
ville pour empecher la contrebande, & des rechtr~
~hes e~a.aes que l'on fait chez. les habitans, div~
lès fOlS dans la nuit.
... L~"9 de Sel'tembr~ .q,u~lqties-unesd~ ~os. inar:~
cliaDdlfes furent expofees· en vue; & le ddlemè,oll
tint le pl"éinier Cambao 0\1 JOUi' de vehte.
Decou';
Lé 1 r de Septèmbre quatre fraudeurs de douane
~ertd des furent amèn ê7.· prifonniers à N àgi'l.aki. & lè pr":'
';:do~s nUer d'Oaobre qu~trè aatres furent pHs ~ menèt
De. & ce de même par le~ pêcheurs dé baleine.
qui fe pat: .Le 1. d'Oél:?bre. l~ ~ateati qui appartenoit à ces
ie daos prlfonD1ers fut amene a Nagazaki avec quatre de
~:. al- leurs complices. deux defquds s'ouvrirènt le ventre: cependant leurs corps furent fale7. & apportez
dans la ville. Cette même nuit une autre perfon.
ne intere~ée dans cette aflàire de contrebande fe
donna la mort en s'ouvrant le· ventre; un autre s'é·
vada malgré le foin qu'on avoit eu de fermer lès
portes de la rue, &. les recherches exaétcs qu'on fit
pour le' reprendre.·
Le 4 d'Oétobre un autre des complices s'enfuit.
ëtImes
r
~
v.
~u JApON. LIV.
·111
un. wus- Interprete ::tui a.voit prêté de l'argent
J'Our fraudet la douane s ouvrlt le ventre' leur Chef
qui .fu~ .pris auai ~c ~ordit la lan~ue de' rage, ~
pour n être pas obhge de decouvnr fes complices.
Q.tibi, qu'onyeût mis d.~n~ le~ fers, & qu'on fe fût
a~ure dè IUI.~~tant *Ju li etolt poflible, Il trouva le
tnoyen de mettre fa robe en picces & d'en faire uno
efpece de corde pour s'étrangler. On trouva un livre fur un des prifonniers, où étoient écrites les
fommes recipr~ques des. ventes & des emplettes.
.avec les ~oms de~ comph~es, & combien d'argent
chacun deux avolt avance. Cela decouvrit tout le
f~cret de.l'~/f:lire, & fit connoitre plufieurs des hibltans qUt etdlent coupahles; 00 fit pour cette raifon des rechercnes exaétes ctiez tous les habitans
&: après le depart des Jonques dn fit une revue ri:
go.ureufe de tb~s le~ h~bitans de chaque rue, trois
tOiS chaque nUit; troIs perfonnes furent arrêtées à
Naga'l.akl. & ~ifes à la quefiion. LorCque les Jonques de ~a ChlOe. font fur leur depart, & quelque
te~s apres ~ on fal= une revue exaéte chaquè nuit.
apres qu; les ,portes de~ rues font fermées, pour voir
fi 9u.e1qu un s eO:. a~fe~te., que l'o.l~ ~eut fuppofer av.oir
{UIVI les ChinaiS, c eO: fa coutume de ces derOiers
de s'arreter quelque tems fur les cÔtes pour attendre les .fraudeurs de douane. Il efi: furprenàot que
les ha~~tans de Nagaz.aki s'expoCent fi frequemment.
k qu Ils courent un hazard fi effroyable pour ga_
gner u~e bag~telle. Ils favent que s'ils font decou..
~ert~ J Ils d?lvent s'attendre à un ~tlpplice ca,I'ital.
u a mOl:lnr de leurs propres malOS, pour evite-r
èe tomber entre celles QU bourreau. On peut s'étonner auai que \les Chinois eux-mêmes veuillent
fterdre .du temps a attendre fur les eûtes tandis que
e~ habltans de Tfukufiu Karatz, fur lefquels on ne
fait pas des recherches fi r' oureures ont beaucoup
plus d'occafi~s de tàire 1 ommerc~ de la contrebande ave.c eux.
1 Le 6 d'Oétobre un autre des complices trouva
es ~oyens de s'échaper; on ferma d'abord les portc~ <les rues, &. tous les J aponnois qui étoient alors
dan.,
G ..
&
ISI
H.I S TOI R TI
dans notre lUe eurent ordre de fe rendre ineeS.
ilmment dans leurs maifons. Un des Ottona fut
privé de fan emploi, ~ ~is ,~n ~rrêt da,n~ fa. mai.
jOn. à eaufè que ce!ll1 q.UI s etait evade eto1tfOlll
{il garde
& habitant de fà rue. Plus de cent
hom mes' de chàcune des rues d:où perfonne ne
s'était abfcnté, fure.nt commandez po~~ aller dans
les montagnes à la recherche des fugltlfs.
Le feptieme d'Oétobre deux ou ts:ois habita~s de
Naga!àki furent en~ore decouver~s par les pnfo~
~iers, & mis en pnfon.
\
\
Cette affaire fi embarrafi'ante" ou pres de eent
perfonnes de Nagafaki fe trouvoient envelopées.
fans compte.r leurs parens & les étrangers, dODU
tant d'occupation au Gouverneur, que notre Cam.
ban ou vente de nos marchandiiès. qui aurait dû
fe faire dix jours plûtÔt, fut renvoyée à l'on2.Ïeme d'Oétobre. On n'avait pu parler au Gouver·
neur pendant les qu,inl.~ jour~ .precedens, & ft.s
domel1iques même n of01ent lUI adrefi'cr, la p~
le que pour des caufes trèli prefi'antes. .
TrembleLe 1+ d'Oélobrc: qui était un Sam~dl. de ~
ment de matin. nous Centimes deux chocs vlolens . d ~
tulc.
tremblement de terre. qui durerent une demi ml·
nute chacun. Le cboc fut fi fenfi\>le, m~me d~
le port. que le pilote d~ l'~n de nos navlr.es. qw
était alors à bord. fut Jette hors de fon bt.. La
chiens 8t les corbeaux firent un grand brUit fur
le rivage, étant éveillez par la violence de: ce trcmblemcllt.
,
Le 2. 1 d'OéOObre un Kuli ou portefaix fut prll
à la porte comme il s'en allait de notre We, ~
l'on trouva du .Camph~e fu.r lui. Sur ~~lOi, M~.
Reinfs, de qUI le pn[onIller avoua qu 1.1 1avolt
acheté. fut: d'abord conduit dev~nt le: Matre de la
ville. Le Kuli même le marchand qui avoi~ ven·
du le camphre, 8t
hôte furent arrêtes pat
leur Ottona felon les ordres du Gouverneur, 6:
mis dans le fers.
,
Le u d'Oétobre 8t quelques jours 3y,rès. toUS
110S navires furent viGtc1. l'un après 'autre eu
pre~
DU'
J A l"ON~
L IV~ V.
l1r
l'refence des deux Interpretes;' on y cherchait di·
yerres chofes, entre autres .le Sill 'rID/atitt Dlt~1I111
du' Profefi'eur Sylvius" qui, avait été demandé par
l'Empereu~ <lans- notre derniere audie~ce, com.me
une panac~e excellente ou remede uDlverfel pour,
Clon[erver la fanté 8t prolonger la' vie.
Le ~+ d'Oétobre trois fraudeurs de'douane'fu'"
rent amenel. prifonnieu de Fifen à Naga{aki, ils,
avoient été, pris fur le fait comme ils achetaient
des marchandifes des- Chinois-; deux d'entre' eux
trouverent le moyen' de sIéchaper, fuI' quoi notre
Kuli ou porteur, 8t quelques :lIltres de nos domeS"tiques. eurent ordre d'abord de quitter leur ouvrage, & de courir, ap-rès les fug~tifs; le troiiiemc
s'ouvrit'le ventre;,
Le même jour ~+ d'Oél'obre, le Gouverneur,
envoya fon Secretaire lit un Benjos pour infiruirc'
notre, Relldent de la fentence qu'il ayoit prononcée dans l'af&ire du Camphre, qui était que l'honTme ql,1i l~-avoit acheté & le' marchand pour qui
il avait été acheté, auraient la tête tranehée. De
Secretaire & le Benjos avoient' ordre encore de
prier notfe Refident d4rrêter, Mr~ Reinfs, qui a.
,oit vendu le Camphre, & de. le mettre à bord
d'un de' nos vai1r~ux pour l'envoyer à' Batavia.
pour le mettre entre ,les mains de la juftrcc. On
donnoit à entendre' en même.tems', que'puifqu~'
l'lufieurs de leurs gens avaient peTdh la vie P9ur',
ce crime, ils feraient obligez enfin de prendre de
DouveHes mefures. Et en cas que' Mr. Rcinfs, ou
quelque autre coupable du- même crime, nepas puni exemplairement par la fupreme- Cour de
judicature' de Batavia. ils f~ feroient juHi e à l'a'.
venir eux -mêmes.
Il ne [e' fit rien lè premier dê Novembre ';
(l'étoit le dernier jour d'une fête appcllée K unitz.
qui' eft celcbrée dans' tout le Japon- & qni commence le ~7 d'Qétobre.
Le cinquieme de Novembre il vint· dés 'Meffleurs à Delima; il éraient envoyez par le Gouver~
neur: les ,deux Dirc:étc:urs' de notre commerce.
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DU
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Capit~ines des navires t êt en general tous tci
H~ll~d~ls depuis ,le plus grand juiqu'au plus petit
'lUI etol~nt alors a Defi ma • furent affigne7. pour
~o.mparOltre devant eux. lis reprefentereDt aUI
DJl'e~eurs de notre Comptoir dans un l~ng &'gra.
v.e dlfcours. que fachant combien leurs loix étoient
J'1~oureuCes c~:mt;~ la contrebande. êt combien de
fOIs ~lle aVait ete funcile à leurs gens. on s'at.
tendolt .que nous y ferions plus de conftderatiOQ
à l'avc~l1r que nous n'en avions fait par le paffé:
alors les deux Japonnois. qui avoient fraudé deux
Catti de Camphre. furent amene'L devant eux &
condamnés à avoir la tête tranchée: fur quoi les
deux Direél:eurs de notre comrtlerce furent requis
dans les plus forts termes d'ufer à l'avenir de tou.
te leur. autorité êt de tobte leur attention. pour
preveDlr de {emblables accidens; leur fignifiant
:avec cela. q,ue ft nos Direéteurs n'accordoient pas une
cie~an~e ,il raiConnable. ils feroient oblige'L de fii.
I"e fubu a nos gens le même châtiment que plu~eu~s de~ leurs avoient déja fubi.
Le fixleme de Novembre le Jacht Bosvind
leva l'ancre. St à l'aide de la marée il alla jufqu'l'
'apenberg.
Le feptieme de No~embre il fut fuivi par ~
lacht Wyk op Zée. Et le 8 après midi par ~
~)l~ot Wallenbourg. ayant à fon bord le precedent
p~.:;:.çur Mr. Butenheim qui s'en. retournait à ~
tav.:ta;. ~r"
: ~ dixieme de Novembre au matin nous reçu·
·mes avis t à l'ordinaire. des fentinelles qui fon! au
.haut des montàgnes. qu'ils avoient perdu de vue
t<!us nos ~vires. Le même jour les japonnoi!
Y1D~ent vlfiter nos chambres; parce, difoient-il"
. qu'l'1s prenoient }?Iaifir à les voir. 1:e même jour
entre neuf 8t diX heures du foir. un nouveao
.tremblement de terre fe fit fentir tout d'un coup
d'u~e maniere violente: il ne dura pas tant que
CelUI du 14 d'Oétobre, mais le choc fut plus grand,
~ rO~flit 'iuelq~es. vitres dans ma chambre i. il
tut fU1Vl aprei mInUit d'un autre choc ~oinsvlo-.
lc:s
lellt,
J APO N.
L IV. V.
r5S
lent; le temps étant toujours ferein & calme: ce
jècond choc fut fuivi par trois autres. & ceux-ci
par deux de plus qui furent fi peu conGderables
qu'on el1t peine à les appercevoir.
Le 13 de Novembre Mr. Dieck mourut, 8t fut
tnterré honorablement le 14 au côté occidental d'Inafià. ou Inatlà ~o Jamma: nous accompagnames
le corps avec trois grands. & deux petits Prows ou
bateaux.
•
Le ~o de Novembre je profitai de l'occaGon d'écrire a mon bon ami le Jàvant Doéteur Cleyer •
par une Jonque Chinoife qui étoit prête à mettre
à la voile pour Batavia.
Le premier de Decembre nous envoyames diverles fortes d'étoffes à la maifon du GouverneUr, afin
qu'il choifit lui· même celles qu'il croyoit qui feroient plus du gout de l'Empereur.
Le fecond de Decembre nous fumes occupez à
faire l'inventaire des marchandifes. & autres effets
du defunt Mr. Dieck.
Le 1 de Decembre Tfino Cami. nommé aupara- Arrivée
l'ant Genfaimon, Gouverneur de Naga{àki, arriva de de Tiino
]edo. Plufieurs Benjos lui vinrent au dev~nt à Naga- Cami.
faki: ils avaient été envoyez par les Princes de Firanda. d'Omura, d'Amakufa. de Simabara, de
Karatz. 8t d'autres Daimio voilins. pour attendre
fan arrivée. 8t par refpeél: pour l'Empereur, lui faire compliment fur fon' heureux retour. S'il arrive
par hazard qu'un de ces Princes falTe fan compliment lui-même, il donne la prefi"cance au Gouverneur pendant quelque temps, quoi que d'un rang
inferieur; & ce1a feulement par refpeét pour l'Empereur. de la fanté duquel il s'informe. D'abord
que les complimens reciprot1ftes font finis. le Princ~ reprend fon ..ang. Ces derniers jours pafi"ez les
YlDgt Jonques Chinoifes qui avoi nt refté dans le
port, en fortirent pour faire chacune fon voyage.
. ~e 9 de Decembre qui étoit un dimanc.l:e, les
t~~IS <?ouverneurs de Nagafaki vinrent nous faire une
!l11to a Defima, comme c'cft la coutume une rois
.'
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l'an ~
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H r S TOr R E
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l'an: ils en font une autre aux Chinois:
Le Iode Decembre Tlioo Cami, notre grand
2dverfaire, nous donna après fon retour les premiel:~S marques de fa haine, & ~e fa mauvaiFe 'volon-'
te; car Il envoya de bort mat ID nous avertu de nous
tenir prêts pour voir l'execution de deux hommes
condamnés à la mort, à caufe de nous; à caure.
comme j'ai dit ci-detrus, qu'ils avoient acheté en
feeret du Camphre d'un Hollandois. (On"" Jonaé
û-JejJùs un, relation J, cett, txICution. ) 11
m>-avoit été dit par Jofei"man êt Senbe, deux
nos lhterpretes, qee Sedaje un autre de nos
Interpretes étoit la feule caule de l~execution de ces
'deux pau vres malheureux i à caufe que la fomme
n'excedant pas dix Thails, ils n'aurait pas dû porter
la caure devant le Gouverneur, d'autant mieux que
les autres Interpretes n'en avoîent aucune connoir.
fance. Nous limes outre cela une autre demarchc:,
pour l'eur muver a vie; nous d'oonames ,'le jour qui
preceda celui de l'ex.ecution. un écrit au Gouverneur, ou nous lui reprefentians que fe Camphre n'avoit pas été acheté. mais derobé dans notre 1fie.
Juge impitoyable ne- voulut point prêter l'oreille à
nos remontrances. Les Juges. dans ce pays-là. ge.
neralement parlant. font peu portez. à la compat=
fIOn. Les criminels font jug~z fans retardement.
& le fait étant prouvé, ce qui eft la feule chofe à
~uoi ils s'attadlent. ~s criminels font punis felon
1i.loi a ·cc ~ derni'ere ièrveri'té..
.
Sn~rîté
A,
d
4!un des
.n peu prèS ans le même temps Siubofama, un
Gouvcr- des Gouverneurs de li! ville) fit couper la tête à un
Dews de de fes propres d()meftiques quiétoit Benjos', feule~
Na&afaki. ment parce qu'il é~ ivre. &. querellcux. Un autre Benjos. qui' voufiit interced~r E..Our lui, 8t ~rier
le Gouverneur de ne pas le puml avec tant de feverité. fut mis aux fers pour recompenfe de ià pei'ne: on dit que- de p1reilles executiQOS font fort fre~.
quentes dans leur domell:.ique.
S'ondepart Le vingtieme de Decembre à dix heures du ma~lUJ.elW. tin Siubofama par~it pour aller à Jedo. quoiqu'il
pl~ ~!eD fort z ,e'pen~~~t ~a civilité qu'on reod ' auX
G ou.-
ce
Ce
JAPO N. Lt'v:
V. 157'
Gouyerneurs en pareil cas demandoit que les Officiers de la villc, & de notre We) l'accompagna{:feut hors de Nagafaki. Deux Kuli eurent ordre
d'atteofre fon arrivée pendant toute la Duit, près
d'UDe ririere fur la route d'Hàfài: 'le froid étoit
fi rigoureux. que l'un d'eux en mourut, &. l'au~
tre titt dangercufement malade.
Le &8 de Decembre vingt-huit criminels furent ExecutiolJ
executez r;:r avoir fraude la douane, treize fu- ddes frdau-.
. 1es autres., d
'
eurs c
rent attac
a\ 1a cr~)1x,
ecapll.ez.
Au douane.
sombre de ceux qUI furent' crucifiez etOlent k~
corps morts de cinq, qui pour prevenir la honte
d'un fupplice public s'étaient defaits eux-mêmes.
en s'ouvrant le ventre. Il y en avoit beaucoup
d'autres qui languiifoient en prifon, & 'lui devoient
s'attendre à un pareil traitement.
Le .8 Janvier 1691, nous eumes avisd'Oiàcca
que des quatre Ifraudeurs de douane qui' s'étoient
évadez, il Y en avoit trois de pris par les tens
que Ttino Cami a~oit envoyez à la decouverte:
ils les trouverent buvant & fe rejouifTant enfem·
ble.Il étoità craindre qu'il n'y en eûtbeauceupd'au'
tres de decouverts par la decJaration de ces derniers.
Le 19 de Janvier dans la nuit) un forgeron
qui vellOit d'un Mariam ou maifon de debauche,
bletTa trois per{onnes qu'il trouva dans la rue: heureu[ement les blefTures ne furent pa·s mortelles.
On dit qu'il n'eft pas rare que les gens reçoivent
de ces fortes d'eftafilades dans les rues de Naga~
faki pendant la nu-it.
Le 10 de Janvier nous apprimcs que le Prince
d:lmagada avoit été depouiHe par l'Empereur de
cinq Mangokf de fon revenu. ~elques milliers
de ft:s fujers avaient été forccz de s'enfuir. ne
pouvant fupporter la pefanteur des taxes & les rigoureu[es exaétions que fon Secretaire leur avait
im,pofées: celui-ci étoit un jeune homme qui avo~r cet emploi depuis peu de temps; il lui fut
Ôte ~ donné à fon predecefTeur, en attendant que
les CID'l Mangokf fuirent affignez à quelque au~
!Ie 'pCf1onne par l'Eolpereur.
G 7
Le
;t'jS
H l 'S ~ 0 1 lt ~
,._
Le premier de Fevner 8t les Jour~ CUlVaUl
.ous fumes occupez à faire les p~eparat1fs necefiàires pour un nouveau ~oyagc a ~a Cour. O~
choiCtt les prefens pour 1E,mpereur. cela..ut falt
par les Gouverneurs de la ._vIl~e: ,on çhargc:a, lit
l'on envoya notre, bateau a. Slmonofeckl" 0&
nomma les Officiers deftine70 pour. at~cr '!ec 0011$
à la Cour, 8t on leur donna les, lnftruéüons ne·
~cifaires.
~~..t+~
••t •••+•••ttt.
CHA PIT R. E Xl V.
NotreIeconJ VD}iJg' 4 lA CouY.
I)eplt't de N0US partimes de Defima po~r faire notrè
Dcûma
fecond voyage à la Cour, le ~ de Mars 1~,&
pour allCt a huit heures du matin. Saflàmorlfa?~ao. qUI e-
f
Jcdo.
toit Joriki, fut avec nous én q1J a!lte de <:Ail'
mandant en chef, 8t le Dofen, S!madaskelmOll
en qualité de fon Commis. Il e.tolent accompa~
, . ez par ~üx me~ers de la Ville de Nagalaki.
E.daje étoit le premIer Interprete, avec un Com·
mis ou fous-Interprete'. Nos Interpretes 8t no,
amis de Nagilfaki nous firent l'honneur de nous,
accompagner hors- de la ville jufqu'au Temple
nommé Tenfi. fitué au, côté oriental de la ville
de Sakarababa, 8t detrervi par des Jam~ab?s. ~
DOUS y regalerent fort civilement. Il. etait deJ&
.nx heures du matin, lorfque nous qUlttames cc
'1'emple pout' continuer notre route. Nous fumes
portez avec des Cangos jufqu',à Fooge fur baut
d'une montagne de ce nom, a caufe que les che'
mins étaient rudes Be mont~eu.x~ De F oge
ROUS allames au village de Flml pres duquel eft
.Aba, grand village h~bit~ 1?ar des pêcheurs. Nous
primes des chevaux a Flml, 8t nous allames au
village de Jaga.mi où nous dinames. Nou$' fum~
,egalez. de !l~u.v~u Par. qj.lelques-uns de nos anl~
1:
DU
J APON~
Llv.
V~
J-~~
qui vo~lurent nous faire compagnie jufqu'à cet endroit; ds nouS donnerent du Soccana Be du Sacki:,
après ainer ils prirent congé de nous, tort furpris cie ce 'lue contre notre coutume nous ne répondions
pas a leurs civi1itez; nous fimes peu de cas de leurs
aillades de travers, & nous contmuames gayement
notre voyage. Nous allames p:tr le village de Koga
à un autre nommé Ifafaja. Après avoir paifé fur
trois ponts, aff'ez près d'Hàfaja, nous regardames
avec admiration le Côté d'une montagne qui panche
1i fort qu'on ne fauroit s'empêcher de craindre qu'il
De s'en detache à tout moment des roches fur les
pafIàns. Nous arrivames à Ifafaja après fept heures du fair: nous nous y arrêtames peu de temps,
lit après un leger fouper, fur les huit heures, nous
entrames dans deux barques qui appartenaient au
Prince de Fifen: elles étaient là pour nous attendre,
avec une autre pour tranfporter notre bagage, & un
petit bateau pour alier d'une b:lrque à une autre.
Nous fimes la plus grande partie de notre traverfée
en ramant jufqu'à T akafakki où nous arrivames a- paffige dè
vant minuit; nous jettames l'ancre & nous nous ~a. babe de
, arrêtames pour voi~_ fi ~e v,e~t ferait. favorable ~our UDa ilIi
~o~re ~a{fage,' car s Il eut ete contraire nous :tunons
ete obligez d y debarquer 8t de continuer notre voyage par terre. Cette baye ell: appellée par les 1-follandois Bogt van Ari ma, la même qui dl: devenue fi
fumeufe dans l'Hiftoire du Japon par la revolte des
Chretiens qui demeuroient en ces quartiers, & pour
la guerre effi-oyable qu'on leur fit il Y a près de cent
~s. Elle a I?éu de profondeur près de Takafakki :
.
amû les navires & les bateau}' qui y font à l'ancre I?efcr:r;
attendent la marée pour en fortir; c'eft ce que nous ~~~e be ~
limes, & nous' mimes à la voile.
ay ,
Le troifieme de Mars de bon matin nous arriva- R"
d
IVlerc 0
mes a'l'em bouc hure d
e la"
flVlere de Jangawa, elle ]anagawa,
~e decharge dans la baye d'Arima à trois quarts de
lieue, en comptant fes tours & detonrs, du pont &:
de la porte du Château, dont]a Tour fait un fort
bel effet à un quart de lieue de difiance. Nous ne
pumes venir à bout d'obliger les Mefiieurs que l'on
ivoit
t
'Ida
H t S TOI R l! .
DU JAPON. Llv. V.
avoit envoyez pour nous accompagner dans notrèpaffage de' la baye. ni les bateliers non plus. dt
prendre quoi que- ce-foit de nous, par reconnoif.
rance pour' la peine qu'Hs s'etaient donnée, & pour:
leur honnêteté; quoi qu'outre cela ils nous euffeut
bien regalez. le matin avec des mets à la manie1'e du pays. &: du Sacki. Ils i'en excu[erent flil'
(ie qu'ils avoient reçu des ordres exprès d'en ufe:.
ainli, du Lieutenant- du Prince de Fiièn qui pm.
dant fon abfence a la conduite des affiiires de cet.
te Principauté'; le Prince n'étant pas encore retour\fille de né de J'edo. Nous trouvames à .l'embouchure de
Janagawaô la riviere de Janagawa. un' bateau de recreatiOil
tout prêt pour nous paffer à la ville du mêm~
nom: elle n'a rien de remarquable qu'un Château
& une Tour:' la ville ne confifte qu'en quelques
rues iri'egulieres, habitées par des pêcheurs. Nous
y dinames, &: après diner nous fumes- premierement à un- petit village qui cil exaéiement fur
les limites du territoire de Janagawa où il confi.
ne avec celui' de Kururna. De là nous paffames par
divers petits hameaux difperfez. çà &: là. &: nous
entrames dans. une plaine coupée par plufieurs ca·
naux par où nous alla-mes au villag~ de Jokomi.
fo. de là à celui' de Tokoromatz que quelquesuns appellent Ofijmmatz, d'où nous fumes à SijJt.
lambas: ce font deux villages affe~ confiderables.
A Sijkkambas' nous traver1àmes dans de petits
laateaux une large- riviere qui- defceud du côté dc'
Sanga. On' pallà nos chevaux de même fins les·
decharger, ce gui nous mit en état de'continuer
notre chemin fans perdre de temps. Nops palfarnct·
d.ans differens v·illages qui font difperfez fur la
route, Be nous al1ames de cette maniere à Dar.
{enfi grand bourg, d'où nous fumes au lieu dc'
Kongo ou Kurmei Kongomatz, autre bourg corrfiderable: de lB la ville de Kurume. où nous ar.lllrume. rivames à cinq heures du foir. Kurume a un
fort beau Château avec des murs, des foffez, da
portes magnifiques, &: des ponts·levis. Nous fu"
mes accompagne? a,ec b:aucoup d'honneur daU5
notr~
I~i
aotre patlige ~ le territoire de Kurume. par fix
d~putez du Selg.neur de c~te petite Principauté-~
clDq. defquels pment, conge de nous le lendemain
matl~, fe ~ettant ~ genoux d'une maniere fort
fOIJmlfe. mals le fixlerne avoit ordre de demeurer, lie de nous conduire tout à fait jufqu'aux
confins des Etats du Prince. Dans la nuit la: porte . de la rue lie ,celle de derriere de notre hôtellerie furent fermee~ Be fortement verrouille'es p
d"
our
.
~ou~ garantIr, ~us It-on, des voleurs. Ce fut
!nutllement <Iue JC pris la liberté de reprefenter
a nos conduéteurs J que c'étoit le -plus grand affront que l:on pût nous faire, de nous garder &:
de nous veIller, en forte qu'ils feroient accroire
au l~lOnde que now étions des criminels, des Portugals, ou des Prêtes amenez prifonniers à la
~our, lie. non J?3S ~s perfonnes libres, amis de
l Emp~reur, qUI alhons de notre pure &: franche
vwonte pour être. ad~is à fi prefenee. Nous ne
pU~es rien obtenll" Dl 'entreprendre qui fût contr~1re aux ordres rigoureux donnez par notre pre~Ier I~ter'prete, . qui dans toutes les occafions fc
~c1ar~lt 1ennemI mortel de notre nation. Cette
Ville n a qu'un petit nombre de rues, mais elles
font longues & regulieres, coupées à angles droits.
Le nombre des maifons peut aller à mille; plufleurs font d~couvertes & abandonnées, &: reffembl~nt plutôt a des huttes qu'à des maifons. C'étOIt une c~ofe digne de remarq.ue, qu'en traverfant cette nIJe J nous ne trouvames perfonne dans
~ rue de notre.l?afiàg:, tous les habitans étoient
ans leurs malions a genoux derriere des paravents '. o~ d
.
.
.es 'Ja 1ou{
les:"
malS les ru.es qui coupoient
~elle'cI etolent bordées d'une foule de fpeétateurs.
fllgenoux des deux côtez, & gardant un profond
1 ence.
Dans toute notre route fur ce territoirc
tous ceux que nous rencoDtrions avoient ordre de
~os conduéteurs de fe tirer du chemin de defceore de leurs chevaux s'ils étoient à cheval de fc
mettre à. ge~oux & tête nue, j ufqu'à cc q~e tout
notre tram eut pafféA
1
L~
161
H
rs
or 0
1 R l!
Le 4- de Mats nouS p~rtimes de Ku.rume. aTi~
)a pointe du jolJr, k lâdfant le C~~1D qu~ V3 a
Fits-ju, vi~ux Château q~e ndbs aVlo.ns une lieue i
notre dtoitè, nous fumes pa(fer a,!ec nos ~~e~aul
& notre bagage. fur la !ivitte. ~aplde de ~iJan~
1igawa, SC naus .allames ~IJ village de MIJ~nodfi.
dont la rivier.e a emprunte fon'nom. De la nbus
marchâmes ab· travers .d'~'n ,village for~ long, dont
les mllifons font fort dlfper1ees. 8t hab!tées POU! la
plupart par des labou$Cui'S; nôlJs atr\lva~.es amfi
aux bornes du territoire de Kurume, la 0\:1 Il confi·
ne àvec un petit pays qu.i appaFtien~ ~ la ~d~ronne.
L'homme qui ~ous av~lt accomp~gnê Jufqu.es là
par ordre expres du Selgt'ié~.r de ~ur~me, .prlt [bn
cdngé à genoux d'une rnamere fort 10umtfe. ,Le
pays entre cette ville ~ Janàgawa eft, fort f~rt11e:
il abdl1de fur-t0ut en ns, les champs et·ant coupet
pir des callilUX que l'dn. tire des ri~~eres. Nous fi·
mes la plus gtande partie du che~l~ far des chauffées élévéés fu·r les bords de la rlVJere, ~ le long
de CèS Cl1naux: mais la petite éténdue de ~ys ~
BOUS' enfià<inés cnCuité étoit un terrein fort med..
t!t~•. mlft-é€ageut 8t. pleiu .de t~urbes., .~o~s âlll·
.ta trlf\lite â Maatzg1fa~J" Village d e~Vlron ,If0
maiftlns. De là à Maatzfaki. autre vIllage, ~
'tfllVerfamts ~n petit hatnau, 8t un~ riviere. qUI,~lt
la bbrne de ce pëtit territoite. qUI appartient a ~
Couronne, & qui confine nee les Etat.s de T1ikufC1l,
()ü de Fakatta: ce fut ici que nous tournames pout
j~indrè le grànd chemin qui va d'Akitfuki ~ T.f1kungo. Le premier endroit où nous fu.mes etolt If!bitz,petit village d'où nous nous rendlm.es au bourg
de Jamaijo ,où un des Princes de l'Emplrede retour
cie la Cour avoit paifé la nuit. Ce fut la caufe pour·
q?oi nous tro~vames !es che~ins propres ~ p1a:
IlIS.
Nous dl11al11es a JamalJo, ~ ~ous partlme.
3prè~ diner dails des Cangos, precedez par deux
melTagers d~ Prince de .~~lku[en: Nous fumes pr1i
1nierement a TogenothelJ:l, petit hameau, de
2U viUage d'UttIjno où nous quittames nos Cango s
deu;
Pour prendre des chevaux frai-s. Nous cutnesBra&.-
av
DU J A P0 N. t
1 v.
V., ':I~'
'!raafi'ems (c'eft un poi1fon dont les Taponnois fo~
beaucoup de cas) dans une h6tellerie de ce lieu, lit
obus fùmc:s regalet. avec beaucoup d'honnêteté par
oes Dames qui ilo~s dortnere~t du Sak~i. Nous al1a~
lites enfuite au vdlage d'Olmatz, pres duquél eft
Temple; de là patTant la riviere que flOUS aviori~
toujour eue à notre droite, nous fumes au grand
village de Nagàwa, d'où nous allames au villàge ~e
Mamida, enfuite au bourg de Tentomatz ,8t au VILlage d'Akimatz. Après quoi nous pa1fames fur un
pont de bois d'où nous nous rendimes aux faux bourgs.
de la ville de Mamidfukaautrement nomméeItzka.
où nous pa1fames la nuit.
Le j de Mars nous nous mimes en chemin
aux flambeaux, à quatre heures du matin; aprè~
une heure de marche nous arrivames au village de
Kawabukura. deux heures apr~ à 'celui de KootaIti, ou Bambou;de là.après avoir ~aifé une rivieré.
au village d' Aka~.. Une heure apres nous ~raverfa­
mes une autre flVlere, 8t nous fumes au vlllage de
Saiai, de là à Nagatta, lieu de la rcfidence d'Ilijno
fils du Prince de Tfikufeil.
Nous remarquames
~u'il n'y avait point de Tours, conimeà tous les autres lieùx où refident les Princes qui en ont ordinairement. De là rious paifames à Kujano1fe, gto*
bourg où les habitans nous parutent fort l'loirs Bt
mal propres, à caufe peut-être qu'ils brûlent du
éharban de terre. Le .pays depuis les montagnéi
dl: Fiamit~, jufqu'ct:t cet endroit, nous parut parfaitémellt beau &: fertile, mais enfuitc il devient mediocrement bon 8t montagneux. Nous marchamcs
cètte journée ,la plupart du temps, fur des chauifées
élevées fur les bords d'une riviere. Nous dinames
à Kujanoife ~ 8t après diner nous allames au village
de Tfeijanofaru, de là à lfijfaki où le chemin va en
montant d'une maniere afféz fenfible. de là encore
au village de Koofiakf. enfuite à celui de Ujenofar.
d'où nous nous rendimes au gros bourg de Kurofakki où nous laflàmes nos chevaux pour prendre
des Cangos. L'on en trouve de prêts à to~te heurei le temps étoit p:uvieux, ~ les chemms fort
boueux
un
--._- - - - - -
-------
164
~kwa.
HIS TOI 'R E
boueux & inegaux. Nous allames ainfi au vilTapi
de Nandoki,enfuite à'celui,de Kimman., de là au faulbourg. & au Temple de Fijomi par,ou nous cntramet
dans la ville de Kokura. Nous fumes felon la coûtume
ugalez par notre hÔte avec des vivres à la Japonnoi.
fe, & nous y fejourllames jurqu'à onze heures du
foir, pendant leque~ tems le Bugjo fit ~s depêchet
pour Nagafaki. De$ que la maree devInt. favorable
pour notre trajet, nous partimes de Kokura danJ
deux bateaux,. tic nous paifames à Simonofeki le
6 de Mars à deux heures du. matin. Peu après nous
allames dans l'hôtèllerie. -L.e dejeuné étoit p.rêt,
mais nous ne voulumes- tien prendr~. Notre au"
tre bateau n'arriva à Sfmonofeki. qu~à fix .. heurcs
du matin, parce qu'ils n'avoient pas autant de rar
meurs que nous. Nous ~mes à bord ~e notre~'
qué le même jour, malS nous ne m~m~s pas a ~
voile tant à caufe' que le vent nom etolt contrai·
re, que pour neus conformer à un ancien. ufilge.
Le 7 de Mars le vent étant à l'OueR:, par conre.
. quent favorable, mais fdon les Japonnois !rop fort,
il nous tinrent à l'ancre un jour de plus: ds l?ret~
doient que le pe~it bateau qui devoit nous fUlvre etoit trop foibl~ pour fup.portu le. choc des vagues
d'une. mer. comme: ils le croyoieot, fi orageu!è ~ fi
.iolente. Le jour étoit froid, 8t il tombait de la nel~
Le vent continuant à être favorable iufqu'a~ hUI~
de Mars. nous mimes à la. voile le même Jour a
~uatre heures du matia; le temps é~oit ferein !t
la lune éclairoit. A la vue de l'Hle Flmefima por·
tant ELl· Sud-En,. nous av.ions le pays 8t le vill~
d'Iwaja à notre bas bord. Les hautes montagnes
entre. Fimeiima, tic Busjen., étoient alors couver·
tes de ncig~, de m~me que celles de Nagatt3 quc
nous avions à notre bas bord. En regardant entrC
ces montagnes nous voyions la peine mer l?0rtaot
Sud-Eil: 8<: Sud-En par Rft, lorfque nous arnvames
à Fimefima qui eil: fitué à trois ou quatre lieues du
Jays de Iwaja. Nous paifames enfuite près de$
deux HIes voifines nommées Kantju, portant Nord~
:& -à. une. lieue. ~ demie de diflance de Muko. q~
DUJAPON.LJv.V.
t6S
d\ à ,8 lieues de Simonofeki. A midi nous pafiàmes les detroits de: Caminofeki: ·nous avions l'HIc
de Jokofirna à ·Rotre avant, l'HIc & la montagne
de Sembo à notre bas bord, & notre route à
Genjuri à DOtre fuibord. à une demi lieue de
diLlance. A tr6is heures & demie, nous avions
Ull village 8t une pet'ite baye à notre gauche. Be
l'Ille d'Intima à -la droite. Une demi lieue 'plus
leio nous pafiimes l'Ille de Tfuwano Marofima.
d~ là après une route de deux lieues, l'lUe & le
havre de T[uwo, &. une demi lieue plus loin le
village de Nuwa où nous jettames l'ancre au coucher du foleil, ayant fait ce jour·là en tout quarante-fert lieues de Mer.
Le 9 de Mars nous mimes -encore à la voile de
),on matin, mais le vent étant tombé d'abord
nous avançames lentement. & allant à la bouline tout le long du jour. nous ne pu mes poi nt
aller au delà de Mitarei, où nous jettames l'ancre à quatre -heures du fair, de con1erve avec plus
de trente autres barques: deux entre autres avec
de jeunes filles de joye à bord. qu'on offroit aux
paflàgers, les faifant paller d'un navire à l'autre.
Le JO de Mars nous mimes à la voile à la poin'te du jour, 8t le vent l'lOUS étant fort favorable
nous biflàmes les détroits de Fanaguri à notre bas
.
bord, & nous dirigeames notre firibord autour de
Khuriffima, qui cft la relidence d'un letit Prince Khurifi.
dont les Etats font comparez de néu IOes l'oili. ma.
nes, entre une petite étendue de pays qu'il a près
cc Firelima dans le continent de la Province d'Aki. Quoique le lieu de fa relidence foit petit, les
maifons nous parurent propres & jolies. Deux
lieues plus loin Sud- Eil:, 110US eumes à notre droite la ville. & le Château d'Imabara, lieu de la refidence d'un fils du Prince de Kijnokuni. Le
Château en particulier nous parut un grand bâtiment, avec une magnifique Tour. Nous fimes
route à l'Efi, & nous pallàmes entre diver{es Illes;
avant le coucher du iôleil nous arrivames à Sij- simotfiaI
motfui ) perite ville de -t00 maifons au mOIns.
bâ...
HIS TOI R J!
'I6~
b4ti~ le 19.ng ~~ tivage ~V.(c ppe Illur~ilIe de pitt..
d~ ~~HlJ: I=P O:Qjs ÀHfer~Rs' endroits: ée fpnt
rs:
. D~
J AP.oN.
Lrv.
v.
6
arnvames a Fimedfi' nous
l(
J 7
à Muri qui n'en eâ
" re,.olum~s de retourner
nous y jettames l'ancreqUa' a c!n q lieues marInes:.
t
.J'
F'lmed JI. eft une villé
,rOiS
' ml,
heures apres
ul.
" une Tour magnifique avec, un graQd Chât~u FimecIG.;
po~t ni de bon anchrag; lm~s d~J1~ D'a point d~
plein de roches.
• e on etant bas, ~
.
Le If de Mars nous d
'
Je port de 'Muru le tem e?leurames a l'ancre dans
Le If ,pous ~imes ,PIs e,ta?jt orageux.
'
- 'heures
' après amid'
a VOl e de bu
' f!c
a'deux.'
, . n matIn,
dans le havre de Fion
1 ~QUS )ettames l'ancre
1its bateaux, & [ur 19~,· ou nous primes de pe1r
.port d'Ofacca. Notree hOô nous eptrames dans lé
te nou'
'
avec p1ufieurs bateaux de
~ Vlpt au devant Retour 1
fept heures du fiol'r'
recreatlo.n, entre fix & o~cca.
",
, pour nous fi
l'lVlere Ju[ques dans 1 '11
aIre remonter la
turne.
a VI e, comme c'eft la cou-
t~l!-~ ,~4t.a.nt~e pQr~i~n~ ~e la ~iIle, ch~~une go\l~
y.crD~ pl!r 4P jonlq. .J..a lpo!1t!,gpe au p~ed de
lique1\e e!l; fi~u~e I~, vtlte Jo 4D rAng d'arbres de
M!l~Z, p'ljl~tez f4r [qn fomOl,~t., c~ que l'pn voit
~Htr a4~ (oln~1es jles colli~e~ 8c ~es ~ontag1lCl
~~ I{l~~ ,v9i(I~es.. Cel~ Àonoe ~n p'oi~t 4e v~
(qf.t cyge4x, la qme ~q; ces m~pt~nes p3J:oit de
19in c<mu\1e ,QQrAé,e ~'Qge fra,Jlge.
"
~
de h:1~r~ l~ Q1~r ~'éJa~t qlll'\ée tou~ d'lIo,
C04P., PQ Çf~igl1i~ 4Q !l04Kel orage: ce fut la' rai~
fqn ,pog[qup.i D.0Y~ J\b~i~mes 1~ plât. ~ ramaffa.'
mes la voil~; cependant QQPS parti~es avant le i~
~r ~u fo!~l1, 8c QQus &mes ce que nous pu~cs à
(oree qe ~~mes; mais un terrible ~rage s'eJevant
e~ fqrt peu <te ~ernps pjlr un vent d'Ouea-Sud.
OueJl, Q.ous fumes oqligez qe jetter fix ancres ,'é.
t~nt a~ez éloignez dj: la b~ye où nous a\lriol1.l
Le r 6 nous nous repofa
cl
•
bien queux fait d'aller. Tout cela fe tit p~r l'or·
tre Voyage.
mes es fatigues de noqre pl~in 4e rnaljgnité de notre premier Interp;~
Le J 7 de Mars nous eu
te, qui voulut nous priver du plaiLir de voir la
Gouverneur. Outre la fa mes notre audience du
ville. 8c ce1Qi d'~II~r qç conferve avec les autrei
1e s
traverlèr ~eux autres ck
gard~s" on nous fit :ud~cnce
b1:rqlfes. Le j04r fuivant lorfq4e je lui rep,refcn:
due,ç diver[es armes p am res ou etoient pen- veUmGou tal le d~nger a4quel il ~ous avoit expole?- par'
l'
.
ar exemple ' l '
eur
a premlere vingt petits
fi
,1 Y avolt dans d'OlàlXao
(Q~ c~pf1ce 8t fa malice, 8c qu'on s'en 1èroit pria
Ile~ de cuivre jaune' ~ou que~hs avec des plati~p'lqu~qlent à lui fi quelque malheur nous étoit
nOires & bleues; des
es ~ec ~s de Bambou,C
ar!iv~ , . il rép.QQdit à c!=la, que ce qu'il en avolt
&. d'autres infuumens ,oetes a temr de la poudre
f31t C;tqlt afin 'que nqus fuffions plutôt prêts à met·
fi plufieurs graQds ar/our c~rger; comme a~t~e ~ 1a 1!pile dès que l'orage auroit ceiré.
Ipngueur de d .
s vernI1Tez, chacun de la
~ u de M~rs l'orage s'ét~nt appaifé, 8t le vent
d .,
eux nates' avec
'
,c CUir qui y étoient at~achez' une paire de gands
étant tQm~ qe forte qu'il en reftoit a!fez pour
titrant de tJ;ou1fes
, , ' u'.l nombre afforfAyorifer qotre route, nous mimes à la voile; ~
à trois peures après midi nous jettames l'ancre Dans la [econde cha~:b~~~esy plel~es de fleches.
nombre de ces nl ê nles
aVOlt deux fois le
d~ns . le pavre de Muru, ayant fait ce jou:--là fD
d
armes Ap'
,
U
un
peu
de
tem
s
d.1n·
r~s aVOIr atten~out 1+lieues marins:s. Le havre de Muru étoit en
nous fumes conduit; d
sune petIre chambre.
ce temps-l.i p eip de barques, 8t de bateaux: j'en
ns
Gouverneur fe rendit pe: u~e gran~e [aIle qù le
çomptai plus ~e J fO.
rement a1fez loin
,~pres, & s affit premieLe 1 J de Mars nous mimes à la voile avec UlI
cha. & s'at1ït à
d~als
bIentôt après il s'appro~it vent frais, qui ce!fa peu après prefque
Après les
r
1 ance .de .deux nates de nous,
pœem~Qt. 11 étqit deja midi pa~ !~I'[que JlOU~ ~jvileJnentCd~~~~lens ali°~d,lDalres il s'informa fort
.
af,
..
re qu te, & de notre âge: il
1.
t
b
en:
1;
m
'168
HIS T (). 1 R.
n
me parla. d'une incommOO~té,fi,ngulie~e ,do~t une
perfonne de fa famille avolt ete travalllee li ;~~.
voit deja près de dix ans, me demanda~t. il Je
voudrois en entreprendre la cure; fur qU<;>1 J~ demandai à voir le patient: il me repondit que le
mal étoit dans une partie fecrete d.e fon ~or'pS.
~ me pria en même temps. de lU1 ~refcme ~n
regime, 8c des remedes, .le m,leu~ que Je ~ourrols,
felon la defcription qu't1 ,m a~o~t d(l~l1~ee ~e la
maladie, ce que je fis 1'apres mld~ du rt\~~e JOur.
Le refi:e du temps de notre audle~ce,fe. paifa. à
examiner nos chapeaux, à nou~ faue .ecrue. peindre 8c chanter. On nous pria auOI de dal}fer,
& de leur montrer davantage de nos coutumcs.
de noS ceremonies; mais nous .le refufa~es. ,Cc
.Gouverneur étoit de haute t~I11~, .le te~nt pale,
âgé d'environ cinqua~[c ans: 11 etOlt cpr1eux, lit
s'informoit de tout; 11 parla de notre m3'nte.re,dc
nous habiller, 8c pria fort civilemen~ le Capitaine
d'ôter fon manteau .afin qu'il pût m1eux cooilderer fA perfonne.
L'autr~ Gouverneur etoit allé à la Cour. Nous
- fumes pourtant obligez de. nous \aller pre[en~cr
chez lui; nous fimes comphmcnt a fon Inten~ant
qui nous reçut à la falle des gardes: la m~l~
,du Gouverneur étoit au haut bout d'ue rue etrolte. Nous laHfames à cinqua.~te .pas .de la rue nOS
-Cangos, lit nous montames a pied Jufques chn
.le Gouverneur , quoi qu'il plût affez fort. Nous
retournames au logis à midi, 8c nous employames
l'après diner à empaqueter notre bagage.
Le 1'13 de Mars nous parti mes d'Ofacca. avant
la pointe du jour; nous ne pumes pa~ fUivre le
cliemin ordinaire que l'on racommodolt. lit qu.e
l'on avoit fermé. Nous marchames fur des dl'
gues- & des chauffées environ deux lieues. LeprC'
mier lieu où ~ous palf~mes étoit le Temp~~ ~:
Mondirato, enfuite au Village de Nuda, de la
,village de Tfjtziwanagar~, à la .droite duquel ell:~~·.
lui. e Kaffingai, environ a une heue. d~ n~tre hôci'fUl
rü, Delàau village de Tomobuts, V1S-~~V1S duqu ~
DU
J APO·N.
L
IV.
V. 169
li gauche 8c à l'autre côté de la riviere eA: le village Symanagara; eofuite au village de Kimma, qui
eft vis-à-vis du gr?ond village de Sarrafii, dont les
habita~s font la ~Iupart blanchi~eurs; ils lav~nt &
blanchlffent le linge fur les oords de la nviere.
De là contint,lant notre chemin nous arrivames au
village d'Akaga~a, el1~ui~e à c~lui de Nagi qui eft
fort grand: apres CdUI-Cl au Village d'! maütz, ou
le chemin le plus court 8c le plus frequenté venant
d'Qfacca aboutit à la chauŒ~e [ur laquelle nOUi avions marché, 8c fur laquelle nous conrinuames
notre chemin. Nous arrivames au village d'Ogire, après avoir premierement pafi~ par deux autres villages, un defquels eft coupe en deux par la
riviere; de là- à celui .de Sadda à la droite duquel
eft le fameux Temple de Tenfin, où il y a une magnifique porte de pierre <)ui melle à une cour
fpacieuie ~ppellée Sa.~da ~enfi!,: De l~. nous fumes au Village de SIJmmmottuJa ou SIJmmi, de
là a celui de Degutz, enllIite à une ville du même nom, où nous vi~es un Temple appelle Ikosju.
Enfuite au village Firacatta, fitué au pied d'une
haute mantagne, ou nous dinames. Après diner
nous continuames notre chemin & nous paffame"
aux villages de Naagi~, de Stuke, de Finoje, &:
de Kudsjuwa. vis-à-vis duquel ck l'autre côté de
la riviere , cA: le village de JamaIàkki, lltué au pied
d'une montagne, renommée à caufe de deuJC Monaneres contiderables tituez fur fon fommet. Peu
après nous fumes à la ville de JOOo, [ur la droite
de laquelle 8c le grand chemin eft la ville de Jawatta, & un peu plus loin un nombre affe'z COllfiJerabJe de maifons bien bâties, & d'autres édifices, fur le penchant d'une montagne delicieufe
fur laquelle efi: un fameux Temple de Fatzman.
Nous vimes là plufieurs Prêtres, & d'autres gens
~Uan5 & venans, du même endroit.
Depuis là
J.ufqu'à Miaco il y a une chaine continuelle de colhnes & de montagnes qui s'étend même au delà
e cette deroiere viile. Après avoir traver[é le,
auxbourgs de Jod.o, 8; un pont [oûtenu par trenrom. 1II,
H
te
1
170
HIS T O' 1 R E
te arch~ de bois, nous entrames ·dans la ville, qui
cft -reguliere & bien bâtie: elle a un bon Châti:au
a-vec un moulin à eau du côté de la riviere. Au
côté oppofé de, la ville nous allames à un ~utre
fauxbourg, & a un fameux Temple de Benfaltetlj
de là à Fufimi. Paifant enfuite par un Temple
~'InMi où il y avoit une grande foule de peuple 1 à
caufe que c'étoit un jour de fête, nous arrivames
fur le foir à notre Hôtellerie a M iaco. Elle n'cft
pas loi.n du Tem~le de So~guatz! de !a feae dc
:)iud~sJu. Nous hmes [av,?lr le fOir .me.me, no~rc
arrivee au Prefident du Tnbunal de Juihce a Mia·
co, &. aux Gouverneurs de la même ville.
Audience
Le 19 de Mars à dix heures du matin 110US fu·
GU Prefi- mes conduits à leur audience: nous allames predenr du mierement au Palais du Prefident de jufrice. Nous
tribunal
de jufiice laiifames nos Cangos à vingt .pas à côté du Palais.
à .Mial:O. Il a une grande avant-cour que nous travedàmes:
notre chemin étoit bordé par vingt foldatS'armez
de longs bâtons qu'ils pre[entoient; chacun .avoit
deux fàhres. A l'entrée du Palais il y avoit une
garde particulier~ de fi" foldats affis dans unc ~
tite chambre qUI efr fur la gauche: nous la trave·
fames pour aller dans la grande falle des gardes, oh
nous trouvames plus de quarante Officiers &. (O.
dats avec deux Secretaires, tous affis en bon ordre.
Nous fumes enfuite menez dans .J'antichambre où
nous fimes nos complimens à l'Intendant de ~
maifon, & nous luideclarames qu'étant en chemin
fOur aller à Kubofàva, nous ?e voulio~s pas ~an­
~uer de rendre nos refpeéts a [on maltre, fUlV3nl
.la coutume, au nom de nos maitres de Jacatra, '&
.de lui .prerenter avec foumiffion une petite mal'
que de notre ju(le reconnoiifance pour [es boni
offices. Le prefent conufroit en vin couvert,
quelques pieces d'étoffe étalées dans la grande fr
L
le des gardes, felon la coutume du pays. Sur ce
les prefens furent examinez encore une fois pli
notre premier Interprete; & après quelq
temps qui [e pafT"a en complimens de part
..
a
d'autre, on nous tendit la reponCe, qui
~,
.
-
po~
tOit
DU JAPON.
Llv. V.
17 1
toit, que le PreJldent étoit fort aire de notre
arrirée •.qu'il accept~t nos peefen"
& qu'il
nous altolt donner audIence. Après cela les preli:ns turent portez. par !ès domelliques à la fàlle
d'audic~c~ où ils fure,!lt difpo[ez en bon ordre:
nous. fUlvlmes peu apres. & 1'011 nous pria de nous
affeolT, au milieu de la Calle, vis· à-vis d'une chambre toute ouverte, les paravents en ayant été ôtel. En at~e.nda..or, les Dan1.es parurent dans une
cha~bre v.OIIIDe de cette d.erniere, & après nous
avoir cpnh~erez_ qu.elque ·temps au travers des gril~s & de~ JalC)uhcs.. elles di~parur~nt. D'abord.
10(1 ouvnt les feneti'es du lleu ou elles avoient
été" pOlir fa..ire entrer le jout de ce côté-là: dans
cet mllant le Prefident .entra dans la chambre' il
marcha. d'un:aiJ fort redreifé, & s'allit à deux n:tes
&. de~~ de dlilan:e, [ans s'incliner: il nous dit, que
nous eLJons les blen-v.enus, & qu'il étoit fort alCe
que nous fuŒons arr'ivel. en bonne Cauté, & par
~ bea~ temps: cela nous ayant été, interpreté ,
nous lUI rendlme-s graces, & lui dim.es la raiCon
pourquoi nous ,étions venus; nous le priames d'accepter norr.e petit piefent & de nous accorder les
~alrepo.rt~ n.e~efraire~. Sa reponfe fut, que nos pretèl)s tUt etOlent fort agreables, & qu'il donneroit les
ordres pour flOUS faire expedier inceif.lmment nos
paffeports. Sur cela il nous demanda nos noms &:
~Jotre âge, &. auroit fort iouhaité d'entrer dans uIl~ c?nve~f~tio?,avec ~ous, plus longue &: plus det~lllee" fi, cu.t ete la VOIX de notre premier Interpr.ete, qUI et~)l( fi bafiè, qu'il avoit peine à [e faire
enterlilire non feulement au Prefident, mais aulli à
fan. Intendant qui était allis tout près de lui. Cette
audience fe paifa avec beaucoup d'oràre &: de bien[canee.; lorfqu'une perfonne parloit, tou t le monde
~rdOlt le filence: le Prelident étoit affis d'une m~.
~Iere redreifée; mais nous Be notre Interprete étions affis dans une poll:ure fort humble, CO\U'ban~ nos têtes, preCque jufqu'à terre. L'Intendant.
~fres nous aV'Çlir invitez à diner, Ce retira, & nous
-\un~s peu aptè$ tccouduÎts de la iiUc d'~udience à
1
----
Ha
-,-,-'-
...
l'~
J71.
H l 'S TOI R l!
J'antichambre, où l'on nous prefenta du Tabac, k
un double rang de pipes avec le refie de l'appareil
p.our fumer, qui étoit d'un ouvrage exquis & cu~
rieux. On nous prefenta auffi du Thé, comme a.
vant l'audience, avec deux grands plats de figues,
de confitures, &. d'autres chofes à lIlanger, fervies
fur des planches verniffées [elon la coutume du
pays. Tandis que nous étions ainfi regalez, l'Intendant du Prefident entra avec deux pafleports qu'il
remit à notre Capitaine: il les reçu t, avec une profonde reverence, les approchant de f<ln front pour
nearque de refpetl:; il les donna enfuite à garder au
premier Interprete: cela fait, nous bmes nos corn·
plimens à l'Intendant; &. nous primes notre congé,
L'Intendant fut avec nous au delà de la grande falle
des gardes, où il nous renouvella [es corn plimens &
prit 10n congé une feconde fois. C'étoit un grand
&: gros homme; il avoit beaucoup d'embonpoint,
avec une groffe tête: fon air étoit agreable, fon
vifàge rond avec un nez mediocre, il paroiffoit avoir à peu près trente ans; il mar~hoit avec quel-.
que difficulté, comme ~'il eût été un peu incom·
modé, d'ailleurs il faift)it voir beaucoup de ti-anchife &. de bonne humeur dans fon procedé. Je fuis
entré daus le actail en rapportant l'audience que
nous Clumes du Prefident de Miaco, parce que lors
de notre premier voyage à la Cour, nous ne pu·
mes le voir à caure qu'il étoit à la Cour lui-même,
J'ai parlé ailleurs de l'importance &. de la gran·
deur de fa c~rge.
,
~udience
De chez le Prefident nous fumes chez le fecond
.ts
Gou- G ouv.erne~r, vle~
. '11ar d d'.un cara':'lere
fi.
r..
nrncurs.
lev~re:. ~p~ndant Il prIt un aIr gracIeux, qUI ne par01ffolt pOInt
lui être du tout nature1. Nous nc perdimes poillt
de temps à l'attendre, car à peine nous eut-on fcr..i du Thé k du Tabac, que nous fumes conduits dans [on appartement où nous le rrouvames
atIis à quarre nates de l'endroit où l'on nows fit a[fcoir. Il nous dit que nOU$ étions les bien-venus, St
reçut nos complimens, ce fembloit, avec quelque
joye) lorfqu'ils lui fureI\.t repetez par fon Intc!1datl~
a
DUJAPON. Llv.V.
à caufe de la voix
17~
b~ffc
de notre Interprete. Nous
fumes reconduiti à l'antichambre t où nous primes
notre congé de l'Intend:mt, &. après avoir traverfé
la grande iàlle des gardes & la cour, nous rentrames dans nos Cangos. Cet Intendant étoit un
gros homme de 5'6 a 60 ans, d'un air agréable, &
n'étoit pas mal fait. De là nous fumes portez che~
le premier Gouverneur, qui, comme à notre audience précedente, nous fit attendre longtemps. Après
l'audienc~ qU,i fe paffa de la même manier: que
celle de 1annee precedente, avec des comphmens
~ des politeifes de part &. d'autre, fans .pourtant
ROUS rien demander fUr cc qui nous r~gardoit, nous
fumes regalez avec du Thé. du Tabac, & des confitures. 11 avoit deux Intendans dont l'air étoit fournis 8t modeO:e. ils avoient bien E:hacun cinquante ans. Après la fin de l'audience, on nous' montra un Thermometre, qui avoit été donné par un
Hollandois depuis environ trente ans. Je fus prié
d'expliquer à la. compagnie la nature de cet infirument & fon u.fàge.
.
Le 10 de Mars nous partimes de Miaco, ~
nous quittames fes fauxbourgs, après avoir paflé
fur le grand pont; de là continuant notre chemin
nous fumes au village de Finokatogge, fitué entre
dei montagnes à deux lieues d'Ootz, enfuite al.l
long &. riche viHaee de Jabuoolta qui produit dl!
Tabac d'une bonté fiôgulierc, &. de beaux Bamboucs
cn grande quantité. De là au village de Jakotfiera.
prefque contigu à JabunoO:a. A une lieue fur la
gauche de Jakotfiera, eO: le fameux MonaO:ere de
Morotamiofio, avec une magnifique porte fur le
chemin qui y mene, &. un Temple de Q.uanwon
avec la célebre Idole d'or de DMo que l'on tient
d~ns une niche à fix angles. Non loin de là eO: le
vl!lage de Iwanotfieja, d'où nous allames à celui de
ûlwaki, fitué au pied d'une haute montagne qui
el!: fur la droite. Paffant de là par beaucqup d'autres villages ~ en laiŒafit d'autres à droite &. li
gauche, nous arrivames une heure avant le coucher du Soleil à notre Hôtellerie de la ville d'Ootz.:
H3
il
:
'74
DU JAPON.
HISTOIRE
il tomba beaucoup de pluye êt de neige ce
jour-là.
Le 1 J de Mars nous partimes de notre Hôtellefie à cinq heures du matin; nous paffàmes premierement au Temple de oot7.man, enfuite aux pore'
tes de la ville & du Château de Dfiedli: après cela
à quelques autres Temples parmi lefquds il y en avoit encore un de Fatzman. Nous paflàmes de là
aux lieux fuivans, Katagiwara, Sinde, Satzna110ft, .tous vi1l~ges, Kufat? gros. bou~g; le village
de Tlbol'a qUl eft prefque contIgu a Menoke où
l'on vend la poudre amere, dont j'ai parlé dans mon
premier Journal, & d'autres remedes. Nous fumes au village ou Bourg d'Jffibe où nous dinames.
Après diner nous paffames par les villages fuivans,
Koofibukuro, Firamatz, Fari, Nadfume. Jotlinakavara', Tangava. Idfumimura, remarquable par
fa longueur, & Kitawaki. Nous fumes tnfuite i
la ville de Minakuts, & continuant notre chemin
nous traverfames les villages fui vans, Dfmfo, Ko~tto, Imafuku, Ono, Tokuwara, Moijenu !le
Matzano Omura. Nous arrivames enfuite à la ville de Tfutiijamma. à fix heures du foir: DOUS 1
c:ouchames cette nuit. On vend à Moijenu une
matiere. qu'ils appeilent Amakas: elle reffemble à
de l'argile-, eft un peu rude au toucher, &t a cnac.
ment la [enteur des gâteaux minces que l'on &it
avec de la fleur de farine ac du miel.
Le 11 de Mars nous partimes de hon matin, à
deffein de nous faire porter avec des Can~os fur les
mont2gn~s ~~ Sakano{la;A près avoir paffé les endroits
les plus dlffictles de cette montagne, nous primes des
c:hevaux frais, & marchant par une charmante vallée
nous arrivames à la ville de SekidfiCo où l'on fuit
les meill~s meches de Bambouc. Il y a aufil dans
c~Cndr?lt des ,!e,?'l'1cs magnifiques, & de bel1~s
HotelIerJe~; mal~, li n~us parut que l'on y aVOIt
peu de fom de leducatlon de leur jeuneffe. Sc~idfifo où nous dinames n'eft 'Ju'une rue de demi
l~eue de. long. Après diner nous pafl:lmes auX
heux fWlv.ans, comme la premiere fois, fur le
che-
LIV. V. '7S
cltem~n d'lsj~, à la rivie,re d.e Sekigava" enfuite
aux v:J1lages d.Ootzbara., Nofin, Nomura, a la vit..
le de ~.ameV1. ou Camme Jamma, au fauxbourg
de NatlJa~atz, au ~ilIage de Si?'t'J.latz; aux bourgs
fans, muraIlles. de Sioono & d IGJakus; aux villages. d'Odani, Koddani • Smitzdaki, Tfumatzuki..
nlura, où il y a un beau Temple; Umenagawa
ougofof!lura. Oywake, T omari. Tfinangamura:
Aka FOrl. & Fammada; & enfin fur le foir à notre Hôtellerie de Jouitz. Nous eumes en cet endroit u~e nouvelle preuve de l'amitié., & du haR
proc~de de notr~ p.r~m.ier Interpr~te. Il cria bien
fort a des Pelerms d ISJe de ne p01l1t fouiller leuFs
perfonn~s, &. leur fai.n:o. emreprifc, en approchant
trop pres de nous qUI eUons des eorps impurs.
. Le 1 3 ~e Mars nous partimes à la pointe du
Jour, &. a neuf heures du matin nous fumes à
Quano,. Nous traverfames plufieurs lieux & villages qUI font marquez dans la Carte. La force du
yent /St les pluyes continuelles firent qu'il nous fut
llHPollible d'avancer d'avantage, foit par eau, fait
par lerr~. ~ous. n~)Us arrêtame~ le refte du jour
~ la nUit fUlv-ante a Kwano, qui eft le lieu de la
refidence de Matzandairo Jersjuno Cami.
Le 14: de Mars le vent étant favorable nous pri..
m~s tro~s bateaux pour faire le trajet de Kwano à
Mla, ou nous ne. fiOles que peu ·de [ejour pour
co~penfer le ehemlll.que nou~ avions manqué à tàire
le Jour preceden.t, Nous partlln~s ~'abord après diner: Oc nous amvames f~r le fOlr a la ville d'Okafakk1 où nous foupames: d'ahord après nous nous
remî 01~ en chemin juf'Ju'à Akafakka~ où nous arriyame~ a onze heures de nuit.
Les tàtigues de ce
Jour.-la, & fur-tout le furplus du chemin d'Okafak~1 à Akafakka nous avoient fi bien ouvert l'ap~
petIt, que nous cru mes pouvoir bien fouper unIJ
fct~onde fois, ce que ~us ne manqua mes pa. de
f,ure.
Le 2.5' de Mars nous parti mes d'AbCakka à fix
~eurcs_ du matin. Lorfque nous fumes à Arrai.
IOtficlcr qui commandait la garde Imperiale.
H +
nous
ri 76
H- 1 S TOI R E
nous envoya; felon la coutume, un prefent feule~
ment de quelques racines, avec des excufes de ce
qu'il ne nous envoyoit pas du poi Ifon, à eaufe
que ce jour étoit un des jours du deuil confacré
à la memoire du défum: Empereur, auquel il
étoit defendu de tuer ou de manger quelque
chofe que ce foit qui eût eu vie. Nous ne nous
arrêta mes à Array qu'un quart d'heure, & le \(cDt
étant favorable, nous primes un bateau pour tra·
verfer éette baye, 8c nous arrivames fur le foir à
Fammamatz.
Le 2.6 de Mars nous partimes à fix heures du
matin, nous dinames à Fakaroi, d'où nous conti·
nuames notre chemin pendant un temps à cheva~
.enfuite dans des Cangos jufqu'à Simada, où nous
arrivames au clair de la Lune, à fept heures du
foir, ayant patfé heureufement, à fix heures, la
gran~e riviere d'Ojingava, & trois autres le mê·
me Jour.
Le 2. 7 de Mars nous partimes de Simada, &
nous fumes à cheval jufqu'à Okabe; enfuite dans
des Cangos jufqu'à Mariko où nous dinamei:
nous pallàmes après cela à Etsju peur nous rendre à Jeferi, où nous couchames cette nuit.
Le 2.8 de Mars nous partimes avant le jour;
nous dinames à Jofijwara, tic nous coucbames
Miffima.
.
F3Kone.
Le - 2.9. de Mars nous partimes encore avec des
Cangos de bon matin; & nous arriva mes à Fakone
par un fort vilain temps, & des chemins detefrables. Cet endroit eft humide, 8c mal-filin; les é·
tran~ers fur· tout ne fauroient y vivre, que leur
fante n'~n fouftre beaucoup. JI nous fembloit que
nous éuons fufpendus au milieu des nuages: l'air
étoit fi ~omb~e, &. fi pefant, que nous n'eumes
aucun heu d efperer que le temps- fe remît au
beau, ainli nous fumes .bligez de nous remèttrc
en chemin après diner pour aller' coucher à O,
dowara.
Le 30 de Mars nous partimes par un atfez b~au
temps qui tint tout le jour: nous arrîvames à huit
-heu-
DU JAPON. LIV.'V.
'11
Iicures du foir à Kanagava. L'Amhatfadeur de l'Empere~r au Mikaddo, !10mmé Ukiofàma, logeoit alors ~ notre HÔtellerie. de ce lieu. Le Monarque
fecuher eavoye une fOlS chaque année un Ambalfadeur avec des prefens au Monarque héréditaire.
Cet, Am~atfadeur s'en retournoit à la-Cour , & nous
~.VOlt precedez pendant une bonne partie du chemin, ce .qui ne nous donna. pas peu d'embarras, &
nous obbiea fouvent de qUitter nos Hôtelleries ordinaires, pour aller en d'autres·e.ndroîts: ce jour-là;
par exem}?le,. nous fumes oblIgez de diner dans
un mauvais Village. Il y a trois hommes à la
Cour, un defquels ordinairement eft choili p:lr
l.'Empereur pour, cette Ambalfade.
L~ 31 de ~ars nou.s partîmes à cinq heures du Retour il
matm, & apre~ nous etre un peu rafraîchis à Sina- Jedo.
ga~a" nous arnvames en~ir,on midi à notre Hôtellene a Jedo. Notre Jonkt. fe fit un point capital
~w;-to~~ a,lors d'eAtrer dans fon Norimon: il avoit
ete obl1g: auraravant d'aller à cheval, comme je
remarquai qu li fit lors de notre premier voyage à
la C~ur. Il ne faut pas douter qu'il n'eût: eu la
permllli~n des Gouverneurs de Nagafaki-d'en ufer
c<flme:l fit au fecond- voyage; il vouloit 110US
falre v~)lr, que fa perfonne n'étoit J'as d'une corrfideratton 8c d'un credit inferieurs a notre Ambaf.
fadeur, qui avoit toûjours fait fon entrée dans fon
Norimon. Dès que nous fumes, entrez dans Jedo, .les deux Gouverneurs de la ville, Tonnemon
& Slu~e, envoyerent leur J oriki, pour nous faire
complIment fur notre arrivée: notre premier lnte."prete fe fit conduire d'abord' chez les Commi{:'
fmes & chez le GouverneUJ' qui commandait abrs: c'étoit Srube; fon delfein étoit de faire ava~cer le jour de notre audience. II leur fit !aVOir notre arrivée, qu'il notifia en bonne forme.
;es Co!?miffaires 8c .le Gouverneur lui promirent
,: l~ f~lre fàvoir aux Confeillers d'Etat, & gue
l etolt poffible nous ferions admis à l'Audience
"8 d'Avril fuivant.
Le premier d'Avril noJ.lS fumes complimentez
k
H
r
fur.
178
nU JAPON.
HIS TOI R. ë
fur l1ot~e ~r.iv« de ~ part de Tfulo Cami .. & drs
C~m.ml·1J2I.res l~auL Pendant <qllelqu~s ~our
r.
fi
,.
,s
AUI'V~S ·nous umes 'OCcupez. a 1ltFer dcbl)l'$ la
prciens .poor l'Empcneur. :Il nettoyer Jcs 1l'l1roÏrs
tous les meu~les vern:iifés. St &tIl'CS dw!i:s ,.à
Cre ea bo.ut-erlles le
CG~~. &. f8lÏŒ'e Je par·
tage ,~es al:1tr~s, .preièns tquc 1I00S dc:viams iaiTe
aux ..dlver5 MlOdhes d'Etat ,&: aux auwes Grands
d~ la COl:1r~ TO.l:lt cela fnt fait >eB l}'.t1dè:mre cie
51mbofa~.
notr.e ,Bu.gjo "OU Lammandant
notre fU,ne. &: de notre ~Dter;pre1'e. .Now; 'Il'oJà·
,?es pOInt. prefenter, nos main-s pour cela; tClll!
1 QUv.r~e fut ,eJOeeute iPar des Gu,mien; Japonnais.
fclon la coutume du pars; :&: ,tout ce que:DO~
fumes t-ouc1lant cette coutume·. dl: que nous 'Pa·
yames leur peine cJQccffivemcmt :cber_
Le 7 ,~',Al{ril fur la ·nUit.. :&: :le jaur .d ~s. 11,
eut un 'llolem·orage.. x:auifé par un ,vent ,d'Oueft. .n
caufa une gr.ande gelée. & ·.repandit une fi ~r;aDdl:
.teneur du fe~ f':lI' ,les habHanJ .de rCet~ capitalt.
que c~cun ·etolt .fur {ès gardes pour s'mfuir 2Il
-plus vite; &: pour être :phis lelles lils mirent do
-culottes fur lcur.s loDgues .tobes. Nos -portemalteau,x fur~t ~érechetempa.equeter.. 8t 1es .hommes
de~tnez.a etclDdœ le feu • .6r.eotla r.cmde :tel~À
DUit. fad~U1t uo bruit effroyable - a.ve.c leurs jn·
l1rumens, Be leurs longs bâtons fufpcodus 2VtIC
.les anneauJC ·de fer.
Le 8. d'Ay,ril le 1fi16 de Tonncmon ""BOUS cnvor.a
Je~er~lel', du campliment que nous Itliavians
faIt faIre a l!occafion de l'heur.eu{e déJ.i.wance de
~ femme, qui ver1bit d'accoucher .d.1un 4ècond en·
fant, & de foo prel1)ier mâle.
. On nous apprit le même j.our. qu'il y .a.voit el\'
"I~on un an que l'EmpcFeur .avoit fait bâtir ,un
J,.11~ ou Temple en l'honneur 8t à la memoire du
PhiloCophe 8t Politique fameux de la. Chine 1
Koofi, ou Confucius, qui écr;ivit un Trnité fur
Je Gouve.rnement, ou i' Art .Je gouver-ner les peuI.l~s: ~u.e cette même année l'Em.pereur en avoit
·ta1t baur ·un awre J qu'ij :avoit viCué le jour de .no'
ym
met:
«
.r
ue
LIV. V. 179
tre arrivée. Le jour precedent l'Empereur fe trouvant en compagnie avec quelques-uns de {ès principau~ Mini1h'es, IX. Ço~fei lers d'Etat, la co~verfa­
tion etant tombée fur 1art de regner. ce Pnnce fit
un excellc:nt difcours fur ce fUJct: ce qui furprit
fort tOUS ceux qui l'écoutoient. Ce Monarque dina le même jour avec Je~ogi fame, le plus jeune
des Conièillers d'Et.t extraordinaircs. qui demeure hors du Château. On npus dit que lorfqqe
l'Empereur dine hors de fon Palais, il cf\: fervi à
table par de jrunes femmes.
.
Huit jours alJ.p~ravant nos Dome1hqucs me m~­
nerent, pour le panfer, un homme de Nagazaki, qui, à ce qu'ils me, dirent, avoit travaillé pour
nous. Comme il allolt d;lns les rUeS, un grand
chkn le failit 8t le mordit cruellemept au gras de'
la jambe; fl,lr,quoi lui. ~yan~ demandé, s'il ~e s'~­
toit pas venge du ChIen, ~l nous repondlt qu ,Il
n'~toit pas 11 fot. de coum le hazard de fa vIe
par-defTus le marché. Car, dit· il. il nous çft detend!! lOus de grandes peines de tuer aucun Coq ou
Poule Jomefliques. ~ de tuer aucun Chien. L'Enipereur a pour ces derniers animaux des égards fi
particuliers, q~e c'çft un crim.e capit~ ~'e~l tue~
un. Si un Chlen ou autre ammal pnve VIent a
mourir, les chefs de tàmille de la mai[on doiven
en informer l'Onona. c'el1l'Ofllcier qui commande en chef dans la rue; de même que lorfq~'illeur
meurt un Domell:ique.
Le 16 d'Avril fur la nuit une rue entiere fut
con fumée par le feu, au Nprd-Ell: de. notre Hôtellerie, ~ une lieue de dill:ance. Le fOlr de devant
le feu avoit paru delfiere ~ près du Chlteau au
Sud-Oueft. :
Le 18 d'Avril au matin nous fentimes un trcmb.ement de terre qui dura prè,s d'une minute.
Le 2.0 d'Avril avant la nUit nous eumes ordr
de nous preparer pour l'audience qu'on devoit nous
.
donner lc lendemain.
Le 11 d'Avril, quoi qu'ii continuât à pleu oir
bitll fort, comlUe il avoit fait l'indant 'es ~eu
HG
lO r
--=....._ _ .
'1 ~O
HIS TOI lt E
DU JAPON. L I"V. V. 'rSt
~otre au. jours Frecedens, n?us f~mes, pourtant ·obligez de
~Icnce de nous rendre au C?hateau a hUit heures du matin; et
1 Empe1C'lI.
que nous fimes a cheval, accompagnez par les Bugjos des trois Gouverneurs de Na'gazaki. Nous tra.
verfames le fecond Château, & arrivames au trei.
lierne où nous trouvamcs Siubofama, qui nous at.
tendoit dans la grande falle des armes. Nous y de.
meurames juiqu'à dix-heures & demie; pendant ce
temps-là, les membres du Confeil d'Etat fe rendi.
rent dans le Château, k nous changeames de bas
& de fouliers: de là nous fumes conduits dans le
Palais où nous attendimes jufqu'à midi. Notre Ca.
p}taine, cOll1me ils l'~ppellent, fut premieremeot
jeul rendre fes refpeas a l'Empereur felon la coutume
du pays, & lui offrir les prefcns au nom de la Corn.
pagnie. Il nous rejoignit d'abord cl l'Antichambre
& dans l'infiant nous fumes conduits à l'audienc;
par Siubofama. Nouscommençames à faire le tour
de la falle où l'Empereur avoit donné audience à
n~tre Ambaffadeur. & acc~pté les prefens qui y é.
tOtcn.t encore; paffan,t enfulte par plufieurs longues
galeries. toutes dorees & pleines d'ornemens curieux, nous arrivames dans une longue chambre
où l'on nous Adi~ d,e demeurer en at~endant que 1'00
nous prefcntat a 1Empereur. ce qUI fe feroit nOU5
dit-on? i:lce1famme?t.
Nous y trouvam'es le5
CommlŒures Imperiaux & d'autre~ Grands de
l'Empire. qui fc promenoient, & dix ou douze
jeunes Seigneurs .affis. Mais de peur que nous De
fuffions enfin fatiguez de nous allèoir 1ï fouvent,
& fi longtemps, on nous reconduifit dans une
gallerie joignante où nous puffions avoir la liberté
de, nous promener: pour cet effet .. on lai1fa des
yo:ets .ou~erts, ~fin que nous cuffions la vue dans
le Jardt~. Tand~s que nous étions dans cette gallerte,. plufic:urs Jeunes hommes de grande qualit~. ~I.nrent nous voir & nous faluer.
Les Cornml~alre~ nous ~ontrerent une bague d'or où l'on
:;IVOtt miS un :umant, avec les noms des Jetta ou
douze lignes ce!efics grave7. tout autour; ils nous
monrrerenc aUai des ..rmoiries d'Europe 1 8c gudque~
q.es autres chofes. Nous les examinions·. lit noui
allions les leur expliquer, fclon leur deCtt. lorfq~c
l'Empereur nous fit appeller. Nous fumes conduits
par une gallerie à la gauche. où nous trouvames
dix-huit Gentilshommes de la chambre de l'Empereur. affis avec leurs habits d~ ~eremonie, fous
quoi ils avoient leurs robes ordmatres. Pa1fant enfuite le long d'une file de vingt autrcs Gentilshommes affis, nous entrames dans la Calle d'audience où
nous trouvames les fix Confeillers d'Etat affis. à
notre gauche en entrant; & à notre droite d'autres
Gentilshommes dela chambre de l'Empereur d'un
pius haut rang, at1is dans la gallerie. L'Empereur &. deux Dames étaient alfls derriere les par~­
vents à grille à notre droite, & Blogofama Prehdent du C6nfeil d'Etat, vis-à-vis de nous dans un
endroit qui lui étoit particulier. Nous entramcs
fans perdre de temps, & après les rcverences a~­
coutumées , nous nous affimes dans un endro:t
qui nous avoit été marqué. Bing?~ama nous. dIt
au nom de l'Empereur, que nous etIOns les bienvenus. Il nous dit enfuite de nous redreffer fur notre feant, d'ôter nos manteaux, de lui dire nos
noms /SC notre âge, de nous tenir debout, de marcher. de tournoyer, de daufer, de chanter des
chanrons, de nous faire des complimens, de nous
fâcher. de nous inviter à diner, d'entr~r en con.verfation, de difcourir familierement, comme
fait un pere Be un fils; de montrer comme~t
deux amis, ou un mari Be une femme fe compl~
I!lement, ou prennent conge l'un de l'autre; de
jouer avec des entàns, de les porte~ fur nos bras çà
& là, &. de faire plufieurs autres chores de ~ette
nature. Outre cela on nous fit plufieurs qudbons
ferieulès & plaifautes: par exemp~e'.,on ,me dc:
manda quelle était ma profe~on, 11. J.avols gue~l
des ma adics remarquables; a qUOl Je repond1s
qu'oui, mais non pas à Nagafaki. où nous étions
renfermez. comme des priionniers. On. nous demanda quelles étoient nos maifons; fi nos mœurs
ttoient bie;l diffcrent~s des leurs~ comment nous
...
H 7.
~n:
'1
S%"
HIS TOI R :E
enterrions nO$ morts, êc dans quel temps? à
quoi -il fut repondu, que nous l~s enterrions le
même jour. Comment fe portolt notre Prince; quelle forte d'homme c'éCQÎt? fi le Gouver.
neur gc!n~.ral à Batavia lui étpÎt [uperieur, Oij
bien fur1>ordollné à [es ordr:es? fi 1)0l,lS aviQlll
des prieres, & de.s images, comme. les Portug'lÎs!
à quoi il fut repond.,u que non. SI la Hollande &
ks autres pays étrangers éwü:nt fujets aux uem.
blemens de r.efJ~, aux orages. au tonnerre, & à la
foud.re .. ç.omme le Japon? fi les maifons y pre.
naient feu •. & s il y avoit du monde t\,lé pilr Je
tt)oaerr,e dan.s les pays de l'El,Ir0,F? On nous or~nna de )jre, & de danCer [eparement. On m'or·
donna en P/lr.t1c'ldier de leur dire les I1Qms de qlle),.
.ques Cl)1pl.âtres d'Europe; fur quoi j'en nommai
~l,Ielqt;les·l,lns dts. plus difficiles à pn}l)oQc~r, dOIlf
je PI;IS .I)lJ: [ouve\illT. On fit dçs q.udbons a 1 Am.
Jbalfad~ur loucha'l,lt [es enfans, combien il en avoit,
(JueLs étoient leurs noms? on lui demanda que~
étoit la diftance de Hollande à Nagaz.aki. En mê.
me tell;1ps quelque.s volets furent ouyerts fur 4
gauche par ordre de l'Empereur. apparemment
~ur .rafraîchir la falle. On nous ordonna encpr~
d.e m.eU'Te no.5 chapeaux, de nous promener autour
de la .GUe, de nous parler l'un à l'autre, d'ôter nos
perruques. J'eus plulieurs .occafions de decouvrir l'lm~ratriçe, & j'en~el,ldis l'Empereur dirt
en Japill}neis, combien nos reguds étÇ>ient per~ans du côt~ où il étoit, & qu'atfurément nous ne
ppuvions qije [avoir, ou du moins foupçonner
fortement qu'il ét.oit là: fur quoi il fe tira de cetfe place, 8c ~lIa joindre les Dames qui écoieoc
.Iaifes vis-à-vi,s de nous. Je fus alors prié encore
une fois de m'approcher du paravent, 8c d'ôter
.ma perruque. Alors ils nous firent fauter, danfer, faire des gambades , êc marcher enfembl: i
fur cela, on demanda à l'A mbaffadeur & à mOI,
<Iue! âge. nous croy.ions qu'avoit Bing~ ~ L'AmI>affadeur repondit CInquante ans, 8c mOl Je repondis q.uarante cinq, ce qui les fit rire. lis nous fireJ~t
.
bal-
DU
J A.PO·N.
LI v. V.
·~ifer J'ua l'autre comme Wl homme
J85
haire une
femme, &c les Dames en particulier temoigocrent
par le:ur rire cornDien cela .!leu.. faiiOit plaiu;•. lis
nous prie.rent encore de leur moatrer qlolcls etalent
lcs c.om,plimens qu'on f.lifoit ordinairement en Eu~~e, aux :per{O.llOle6 inferiellres,. aux Da~s ~ aux
GI and-s, a'ux P:rioces, &. aux R-ol'S. Apres cela on
me demal~a mcore une lWtre cbanlOn, &. je
)eur en chantai 1Cikux, dont la cowpagnie te11lo.igna -êtr.e !àtisfaite. Apr.è:s ·que 00 ce farce fut
finie, 00 no.w ordonnol d'.&tcr n06 manteau, .de
llO.US approcher -du p;lt.avent'Wl :à \iln~ f,c <lepr.en-<ke notre cOJ'lgé de la même maRi.ere, ,& ;avec
)es mêmes <:er<cmonÎes, -ql:le 001,16 le prendrion:
d'LIn P·r,iflce eu d'LUl Roi de l'Eu,rope; ce l.\'Ul
éunt fait à leU.1" <:ontentem-rnt.. à ce qu'il {embl0it, nous nous 1'.etirame,s. 11 ~t'Oit pl'ès de GuatFe heures après midi lorfque GOus quittames la
.!aUe d'alildienoe , aprep qu'on nous ,e.u.t .e~ercez pe~­
dant ,de.u« heures 8c demie de la mantere que je
vien~ .àe Je .dife. N:ou-s avions été introduits, &
nous fumes reoonduits, rpar les ~eux ~mmia:aires
Imperiaux. & p.ar Siube: aous a lames 1,mmedlatement après chez Bingo. qui nous re~ut avec une
civilité .ext;f3<}f.dinaire; & fur le [oie, nous nous
rendimes enfin au logi·s.
Le u d'Avr-il no.us .allames faire une vifite a.!l
nouv.ealil Seigneur du T~.m-p1e comme ils J'app.el~
1_
• • . 61 d
r.
. r.
lent
1 qUi ,et01t
s u P'
rmCe,d e F';Jrand0: la
malL~
étoit r-emplie de ipeéhteurs. S.on Jnt~nda-nt ql,l1
.nous re~ut, ,étptt un d.e; 'plus grands f;lts que nous
-tuilions ,vu- dans 'le-pays; u;n ignorant qui ne favoÏ1 ce que c'étoit <.lue compliment: il n'avoit
même aucune idée de l.a civilité la plus commune. Ses mauvaifes manieres 8c fa grofiierere furent en quelque maniere compenfées par le procedé honnête des Dames, qui nous regalerent
.avec des confitures: l'[ntendant examina avec quelq~e attention nos chapeaux & nos éP.écs; & dit enfllte. Qu'ils chantent un peu, ce qUI ne manquera
pas de plaire à mon maître; nous ne uouvames
pas
Vifite E.:i';
te 3U ~eu­
p Hllee
ne Firande
do.
1~4HIS TOI R JI
.
pas à propos d'obeïr à des ordres donnez. de·ft
mauvaife grace. De là nous fumes au Chateau',
pour faluer les deu~ Gouverneurs. Nous remar·
quames que dans la grande place q,ui f'.lit face au
Château il y a· un bureau de Secr~t:ure,da~s lequel·.
outre les diverfes CaBres &. CablOets piems de papiers, il Y a toutes fortes d'armes attachées CIl
haut. Chez le premier Gouve!neur. on ne nous
offrit ue du Thé, & il n'y avolt pOUlt de DamC$
qui a~ftaffent à l'audience qu'il nous donna. Nous
limes encore deux vifites: les dernieres furent celles
des deux CommBraircs Imperiaex, qui nous reçurent tous deux avee beaucoup de civilité, lit noui
regalerent magnifiquement, de. fort~ que nous n'e~
mes aucune'repugnance de divertir la compagme
llcgal ~ avec une chanfon. Che1. le premier Commifiàire
la Japon- le regal étoit des chores ~uivante~: h du Thé:
aoue.
~. du Tabac, avec tout· 1appareil pour fumer:
3. du [yrop philofophiquc '. ou blanc. +. un· m~r:
eeau du Steenbraaifem, p011fon fort rare, bOUilli
dans une fauffe bife, ou tirant fur le noir: f. un
autre plat de poiifon apprêté avec de la fleur ~e
feves &. des épices: 6. des gâteaux d'œuf~. rDis
en rond: 7. du poiifon frit qui nous fut fervl,dans
de grandes brochettes de Bambous:, 8. ?es eco~
ces de limon avec du fuc;re. Apres q.u ~n av~1t
fervi chacun de ces' plats. on nous fal~01t boue
une taife de Sacki, auai bort, ou le meilleur q~e
j'euffe bu; on nous fit boire encore d~ns de. petl!'
verres d'eau de vie, deux coups d un VlD fait
de prunes; c'eft une liqueur fort agreabl:; enfi,n
tout le regal étoit également ben &.. dlverfifie~
feulement nous n'eumes aucun mets fait avec du
ris. A la fin on nous fervi~ encor~. un~ taife d.c
Thé, &. nous primes ainG notre conge apres y avoIr
demeuré une heure lit demie.
.
Chez le recond Commiifaire nous fumes regalez
de Thé &. de Tabac, avec:: les chores fuivantes: 1.
tleux longues tranches de Mangue trempées daos
une fauffe, ou brouet noir, avec du gingembre:
~. d(s a:ufsdurs; 3. qu~re poHfons otdina!res frits ~
.
---
fem·Jo
DU JAPON.
LIV. V. 18f
fervis avec des brochettes de Bambous: .,.. des poitrines de Carpe [alées da~s .une fauife noire: f. de~x
petites tranches d'oye roues. &. chaudes, fervIes
dans des plats de terre non verniffez. Nous bumes
abondamment d'un bon breuvage pendant ce tempslà, lit le Chirurgien du Commiffaire chargé de
DOUS r.egaler ne manquoit pas d'en prendre fa bon.ne part. Vis-à-vis de nous deriere.un far~vent, 8t
à la diftance de deux nates lit demie, et01t aais UR'
Gentilhomme qui nous étoit inconnu; il paroiffoit
auai de temps en temps des Dames du même côté;. mais la plus grande foule des femmes étoit fur
la gauche dans une' gallerie. L'audience ayant fini,
nous allamel. tout oroit chez nous, une heure' 8t
demie avant la nuit.
Le 2. J d?Avril nous reçumes· les remercimens
des perfonnes q~e nous avions vifitées le jour pre,edent, Be l'après midi nous eumes ordre de nous
preparer à notre audience de congé que nous devions avoir le lendemain. Nous n'allames pas ce
jour-là faire la reverence aux Gouverneurs felon la
coutume, parce que c'étoit un jour de deuil PQur
la mort de Jejas, Pere de l'Empereur aujourd'hui
regnant; auquel jour ce feroit manquer de refpeél:
à l'Empereur. liue de regaler qui que ce toit.
L'Empereur 'defuh"t cif'enterré à Gotio: c'eft un·
Temple derriere Afago • environ à deux lieues denotre Hôtellerie. Le lieu de la fepulturedes ancêtres·
de I~Empereur eft à Nikko, à trois journées de Jedo. Mon domeftique, jeune homme fort inftruit
dans les affaires de fon pays, me dit que le Templeoù Jejas cft enterré eft couvert d'Obanis d'or au
lieu de tuiles, & que fon ~ombeau .eft renfe~mé
avec des. poteaux noirs. Il VlOt me vIÎ1ter ce Jour
même, à caufe qu'il nous étoit envoyé par un
b~~me de qualité, nos valets n'ayant pas la permillion de nous voir pendant tout le temps que
nous fommes dans Jedo.
Le 1+ d'Avril nous fumes à la Cour, à cheval, a
fept heures du matin, accompagnez comme aupara.vaut par trois Joriki des Gouverneurs de Naga1Jakr..
NOll$
186
HIS TOI R E,
Nous demeurames dans le Fiakninhan ou garde
de cent hommes, jufqu'à ce que nous fumes con.
dl.üts dans le Palais par l'ordre des Gouvern.eurs, 8t
des Commilfaires. Après avoir a.tten~u. qne demie
heure dans l'antichambre, nQtre Ca.pl~lUe fut apo
l'e1lé. devant les CQnfeillers d'Etat, qui ordonncrcnt
a l'un. des CQmmifiàires de lire les ordres qui llli
font donnez. ordinairement; ce qu'ils font tO.ur a
tour. Les otdres portoic;ot entre autres cbores,
prinçip.lement, que nous. n'i.nquieterions. aucuns
tlavires ni bate"ux des Chlools QU des Llquean~i
que no~s nè porterions au }:!POIl à bord de no!
vaifreaux auc.!!n portugais QU. Prêtre; & que fu.~ çea
c;.Qndition~ on nQYS a.cçQrdQ.lt yn co.mmerc-e· hlue.
Ces ordres étant lus, on fit pre.f~ut à 1'A01balfadcur
Q~ tl'e.me robes étal~s fyr trQis; planche3 q1ü étoirnt
l~, chacun~ un peu plIAS longQe que deux nattl;
& upe letU'e de fQr~l,J.lle (:Ql,'l1me ils l'appellent, qlli
cft. une rnarql,le de l~ proteéliQn tàVQrah1e de l'EPI'
pereYf: fur ql\oi l'Amba{bdeur (e. p~Qaerna ql!.atr.
fgi~. ~ pour marq\!er fon re[pc;&.tl ~~t ~n des ~I!lt
qça ro\>ç~ fur fll tête. Il QOU' re)Q,gnlt, maIS la
rQQef ~vec les pl~nçhe~ furent po..rtécshofS du C~.
ieau au Fiakninban où elles furent empaqumes.
Après que le Capitaine fut revenu. le GQuv~nrlll
DQUS pria de nous arrêter pour le dîner qUI noUi
ièroit fervi de la part de l'Empereur. Ayant d~
attendu environ demie heure nous fumes condUltI
dans ,UDe autre chambre, où deu~ garço~s,dont.~
tête étoit bien raCée, avec leurs habtts de ce.remon.le.
nous reçurent; nous les primes pour deux des pnn.
cipaux Officiers de la cuifine de l'E~~ereur.
.
Celui qui a l'intendan~e de !a cUlhne ea appe~~
o [obaboos ; il eft affis pres de 1 &:~pereu.r lors ,qu il
dine. &. goute de tous les plats qu ~n lu~ [ert a t~·
bIc. Les Interpretes &. les Japonnols qUI nous [Ul'
vent ordinairement, furent menez dans une autre
chambre pour y diner en particulie~. A pei~e nou~
fumes nous allis, que plu/'ieurs Jeunes SeIgneur.
entrerent dans la chambre pour nous voir, 8< pour
difcaW'ir avec nous. Une petite table faite de cou·
.
peaul
DU JAPON. LIV. V.
18 7
de bois de Matz, alfemblez avec des chevil:
chacun de nous, fur quOi
on 'nous [ervit cinq gâteaux blancs appeliez Amakas tout chauds. ils etoient au ffi durs que de ~a colle/& deux pains creux de d~ux empans de cIrconference, faits de fleur de fanne &. de fucre, .avec des
aines de S~r"mum Illbum, dont on .les a~Ol.t par~e­
Une petite coupe ~e porcelalOe etOlt ml[e
près du pain avec de petIts morce~lIx de fa~mo~
trempé dans du jùs noir, qui n'étoit pas .tou~.a faIt
fi fort, mais un peu plus doux, que celUI qu tls appellent Soje. Il y avoit prè~ de ~a coup~ de,ux coUP
teaux de bois, ou deux peuts batons farts a la ~na.
niere des Chinois &. des Japonnois. Nous ,gout~.
mes un peu de tous ces plats par honnètete: ~als
nous avions eu foin de nous munir d'un bon de~eu­
né avant de fortir le matin: outre cela, nous aVIOns
été régalez dans la falle des gardes avec d~s Mangues
frais, &' des gâteaux bruns &. doux, taIt. avec d.u
{ucre & de la fine farine de feves. On nous pria
fort civilement de manger dav~ntage, & ~'or~ nou:
demanda 1i nous voulions boue du Thé, a 9U01
ayant répondu que volontiers. l'Officier. d~ culfin~
dont j'ai parlé plus haut, elt fit porter. Mats qua?~
1Ol15 en .cumes gouté, nous trouvâmes que ce n etoit guere autre chofe que de l'eau chaude, outre
que les talfes verniffées en. noir. où l'on. nous le fer'Ît, & qu'ils appellent ~1[eratJes, av?~ent ~ne.f0rt
chetive apparence. TandIS que nous etlons a dmer,
les [peétateurs s'amuiOient à faire la rev~e de nos
chapeailx, de nos épées, de nos h~b1ts ~ de
tout ce qui étoit autour de nous. Apres le dlOcr.
qui ne répondoit point du tout à la majeflé &. à la
maguificence d'un fi puiffant Monarque tel que
l'Empereur du Japon, & que l'on auroi~ pu no~s
fervir chez. le plus petit particulier qUI n'aur~lt
pu nous reaaler plus mal, nOlis fumes recondult'
à l'anticha~bre. Après y avoir attendu un peu
plus d'une heure, nous fumes menez par le Gouverneur, nous traverfames divers paffages Be pl1~~
rie" que nous ne nous fouvenion. pas d avol{'
X
~ fut dreffée devant un
{ez.
YU
188
DU JAPON. LIV. V.
HIS TOI R'I!
vu auparavant, ôt nous arrivames ainfi à la méme
!aIle où nous avions eu notre derniere audience, &
à la gallerie Joignante où il nous fut permis de
nous promener en attendant. Des volets fe trou.
vant alors ouverts, qui avoient été fermez pendant
notre dernîçre audience. & quelques autres cham.
bres étant ouvertes, la difpoJition de la cour, &
de la fille d'audience. fut fi fort changée par-là
qu'elles paroiifoient eotieremcnt differentes de ~
que nous les avions vues auparavant. Nous remar.
quames qu'il n'y avait prefque pas une chambre.
Ems qu'il y eût quelque Gentilhomme ou autre
perfonne affis. Il y avait dans une grande cham.
bre. & ~ans deux gaIleries qui y c::onduifuient, plu·
fleurs ordres de l'Empereur attachez en haut:. iII
étaient écrits fur de grandes planches·, chacune avait cinq rangs de caraéleres. & chaque rang n'a.
voit que cinq lettres. Nous ne ~es avions pas vus
à notre premiere audience; peut-être à caufe qu'ils
n'y étaient pas encore attachez. ou qu'on nous
avait conduits par un autre claemin. Tandis ql.'C
DOUS attendions dans cette chambre que l'on nous
appellât. ce que nous fimes une demie heure, ua
Prêtre âgé de tr.ente ans ou environ. habillé d'uœ
étoffe de foye blanche & bleue avec un fac de •
même couleur, Sc affeébntunairhonteux & ....
delle. s'informa de nos noms Sc de notre âge. œ
. q~i avoit été deja fait par la plupart des fpeélatcun
qui étaient là prefc:ns·; nous vimes encore un autre
Prêtre habillé d'une étoffe de foye couleur d'orange.
~ais il s'arIlêta dans la gallerie Sc n'entra pas'dallS
la chambre. Tandis que nous étions à attendre,
on porta dans· les appartemens trois baffins à la·
ver q,ui nous parurent d'argent: peu après. les
mêmes baffins Sc une table verniifée en noir avec
plufieurs/ autres plats Sc affietcs furent rem~r'
tel., d'où nous jugeames que l'on avoit dine là·
dedans. Sur cela nous fumes d'abord conduits
dans une gallerie qui était à côté des apparte;
mens de l'Empereur, & après y avoir demeure
fort peu. de temps. un des' Confeillers d'Eliot
extra·
189
extraordinaires. Be les deux Commiifaires. vinrent pour no~s int~oduire, Be nous faire aflèoir près
du paravent a gnlle, dans le meme endroit où
nous avions été Jors de not,re audience precedente.
Les deux Commifiàir-es n'entrerent paine dans la
falle d'audience: l'Empereur s'affit derriere le paravent du milieu à un endroit un peu élevé fur le
plancher de la chambre; Bingo s'affit au milieu
contre un paravent de papier. 8c les trois Con[eillers d'Etat ordinaires &: quatre extraordinaires s'allirent dans leurs places ordinaires. Derriere le paravent à grille, qui étoit là notre droite,
nous ne pumes appercevoir qu'un Prêtre qui s'y
cachoit. L'endroit, où lors de notre premiere audience les Gobobali étoient affis, étoit vuide,
mais il y en avoit quelques-uns dans la gallerie:
vingt-cinq étaient -affis derriere nous en un feul
rang, 8c dix-huit de plus dans le même rang: ils
étoient hors de la vue de l'Empereur quoi qu'ils
fuflènt là à p.ortée pour attendre fes ordres. L'autre côté de la {aIle était bordé du même nombre de gens, & dans le même ordre. Après que
l'audience eut commencé. il en vint davantage, de forte que toutes les avenues étoient paifablement remplies de monde. Nous fimes nos
reverences premiercment à la maniere du Japon i
mais peu après on nous ordonna de nous approcher des paravents , & de le faire à la maniere
d'Europe. Les revercnces faites, on me dit de
c~anter une chanfon : j'en choitis une que j'avais
falle autrdois pour une Dame pour qui j'avois
une eflime particulierc, & comme fur la fin j'élevoi~ fa beauté 8c fes autres excellentes qualirez au
deflus de la valeur de cent mille millions de pieces d'or ou d'argent, on me àemanda par ordre de
l'Empereur ce que cela fignifioit; fur 'quoi je répondis que ce n'étoit qu'un defir 1incere de ma part
~ue le ciel accordât à l'Empereur. à fa famille, &
a fa Cour, des millions de me[ures de fanté, de
profperité, 8c de bonheur. On nous corn manda alors.
comme dans le$ audiences precedentes, d'Ôter
.
aos
---~-- - -
----
'19 0
HIS TOI R
n
nos manteaux, de marcher 'autour de la-chambre; ce
'Am'--fiàdeur fit auffi, &. de montrer comment
q~ l
~
l'
.
dans les rencontres nouS coml' Imentons nos a~lIsl
nos parens" ou d Une
enons congé d'eux, de d'fi
nous
pr.Ir..
d 'lOJures l'UR
,
conl ment nouS nous
manrelle.
, , 1 Ions es
d' d:' .1.
à l'autre; commentnous,vuldlOnsnos, l~eren.....~ fit
rentrions en amitié. Apres cela, on d,lt a ,un Prette
d'entr~r: ilavoitun ulcere re~ent[ur,l osd unedefCl
- arribes, c'était peu de chofe, 1'1 YaVOlt fe~lem~ntun
J d')', fl mnlél'cion tout autour. Il Y aVOlt mis Une
peu ln a
'E"
rande emplâtre avec du drap d ~rope: l eu,s or·
gd re d
' t a'ter le nouX
e lUl
r '8t
,de dire, ' mon
' aVIs fur
fon état: l'ayantfait, je jugeai qu; c eto1t unco~.
,
UN' ·11. plein de fan te , &. .que fon ln·
pere vlgoure
A' \]1.
"
'te'
Ile naroig"oit
faire, cratndre
aucune
commÇ) d 1
['
'
mauvaife 1i.lite: que cela guei.1rolt e~ Y. tenant
feulement un emplâtre. Je lUI don~a1 a.vt~ pour,
tant d e ne pOl
, 'nt trop s'accour-umer
" a la blere dc
'Sadd, conje&urant par cen~ blefiur~, ce que JC
faifois encore mieux à [on vlfa~e, & ~ fon nez.ru·
bicond, qu'il étoit fort adonne a boue; ce q\:J1·fit
rire l'Empereur Be toute la -Caur. On appella ~Io!l
ce qu~ Bingo
des Chirurgiens de"1l'Empereur;
cl
"
liteux
luÎ-même,
parce qu i s et-Olent
tou t pr es . dans
l'intcrieur des appal'temens de l"Emper.eur; Ils P~'
Turent d'abord &. -vinrent autour du .paravcnt, .'
.'eto1en
, t t ou s dellx rafez 'Be habillez
" comme ' des Pre.
tres, Un d'eu'x étoi-t bo-rg~; 1autr~ n ~VOIt ,gueres
meilleure mine: d'a-illeurs ils para1{fole,~t ~~r~ en
affez bonne fauté. Lorfque j'arpr.j.s qu II~ fto1eë.
Chirur iens de l'Empereur, je leur donnaI a ~re'
feance ,g &. je leur laifiai tâter mon poux}es premiers,
cafuite je tâtai le leur, &. je les trouval tous deuxen
bonne fanté. Le pren'lier me parut d'u,n teJ?p~n'
ment froid, & qui avoit befoin d'un-petit traltd~:,
de vie pour mettre{cs efprits en mouveme~t '. ~,
ter la circulation de fon fang: L.e fecond etolt ïl~~
confiitution plus chaude, &; etolt fouvent tr~val ~fe
douleurs de tête, ce que je pouvais coonOl~re :~;~
ment par fan air. Ils entrere~t ·en converf~tton ede-
.moi fur des mati~cs de Medee-Ule~, ~e premier J]l1l1~\
DU
J AP 0
N.
LI V. V.
f9t
manda li I~s abfcès étaient d~ngereux ou non; en quel
temps & pour quelles mal2.dles,nous ordonnions la 1ài~née? 'Ille ?!quoit ,aulIid'avoirquelqu~connoi!1ànce
de nos cm platres d Europe,&lorfqu'tl en nommait
quelques-ufis qu'il ne pouvoir pas bien prononcer,
je loi en repetois les noms en mauvais Japonnois.
Notre jargon, moitié Latin, moitié Japonnois, avoit un accent fi bizarre, que l'Empereur demanda
quel langage parloit le Hollandois? On lui repondit
9ue c'etait ~u Japonnois corrompu. Cette farce
etam achevee, on porta une table avec de petits
couperets de bois, ou petits bâtons pOUT chacun
de nous. On les pb~a precifémem devant la troi.
lierne nate : fur chaque table on porta les mets
fuivans. à la maniere du Japon.
t. Deux petits pains creux, avec de la graine de
Sefame parfemée det:fus.
1. Un morceau de [ucre blanc rafiné comme s'il
eût été ra ré:
" Cinq Karnoki con'fits: ce font des noyaux de
l'arbre Kai qui reITemblent affez à nos amanâes.
4-. Unc tranche quarrée &; platte d'un gâteau.
Deux gâteaux faits.de fleur de farine &; de
lnle!, en forme d'entonnoir; ils étaient bis. & épai~, mais un peu durs; ils ont d'un c0té l'empreinte d :u,n foldl ou ~'un~ r?fe, &; ~e l'a~t:e celie 9~ DaIn Tfiap. c eft-a·d1re les Armolrles du
'Bam, -qui font la feuille &; la fleur d'un grand arbre apellé Kiri. La fleur relfemble affel à celle du
Gl?ut~ron, & la feuille approche de celle du Digitahs: 11 y en a plulieurs fur la même queue.
6. Deux tranches quarrées d'un giteau fait de fine farine de feves, Be de fucre; ce gâteau éroit
d'un rouge brun, 8t ca'{fant.
7, Deux autres tranches d'un autre gâteau de fine farine de ris, jaune & dur.
• 8: Deux tranches d'un autre gâteau dont la mie
etol,t entierement differente àe la pâte dont la
croute paroiiT'oit être.
d 9· t!n grand Mangue bouilli & rempli de farine
ehP~lS mêlée d~ 1ucre a & faite comme de la
. cnaque.
,~~~ DellX
r
T
n
J
t
HIS TOI R E
U A P 0 N. 1 ,,; V.' or 9l'
Deux petits Mangu~ de la grofi"eur ordinaire;
fait & nous pria de nous rejouir au diner qui fut
'
,
ap rêtez de la même maOlere.
fervi après qu'on nous eut porte une taffe de Thé.
~ous goûtames un peu de tout cela; & le pre.
Il était comparé des plats fuivans: du poiffon bouilmier Interprete eut ordre d'emporter tout le relle:
li dans une fort bonne fauffe, des huîtres bouillies
on lui avait apporté pour cet effet des p~a~ches
& fervies avec la coquille & du vinaigre; il nous dit
& du papier blanc. L'Id'terprete ayant pm fa
qu'il avait eu, foi~ de nous tàire. fervir des h~îtres,
charge, on nous dit de remettre nos manteaux, de
fachant que c etait le plat favon des HollandOis. Diverfes petites tranches d'oye rôtie, du poifion frit,
nous approc her du Paravent , , & de
. prendre
d
G notre
'\
con é l'un après l'autre. Ce:a falt,. eux eotl,s'
& des œufs bouillis. La liqueur que nous buvions
g
l'un defcquels était le plus Jeune Confell·
h ommes,
pendant
le repas.étoit d'u?e bonté exqulfe. Après
d 'f" d . 1
1er d'Etat extraordinaire, nous con Ullt. epu,ls a
diner, on [oublta de VOlr nos chapeau x, nos pi pes
falle d'audience jufqu'au bout de la ~alle~le , ou les
& nos montres. On les leur porta hors de la chamGentilshcwnmes du quat~ie~e &. cmq~l1eme ra~
bre, car il n'yavoit point de Dames à cette audienétaient affis: il y en avolt dlx- huit de c·
ce, ni d'Uta ou danfe par confequent. On porta deux:
ue rang: ils nous hi fièrent là ~vec les deux Com·
Cartes, une defquelles était fans les noms des pays;
qmlualres
'n:'
!Ir le Gouverneur qUl furent avec nous
elle était d'ailleurs alIèz bien deffinée, felon toute
tl'o
. ' d'
. ufc u'à l'antichambre: nous pnmes conge ,eux
apparence d'après une Carte de l'Europe. L'autre
J ar~i les complimens & les grandes a~clamat1ons
une Carte du Monde entier, faite à leur maniere Pays al:!
~es courtifans pour le favorable. accuetl. que, nous eneroitforme
ovale, & fes noms marquez avec les Kat- d là du
.
avions
e u de Sa MaJ'efié Impenale,
fc • qUI• etolt
fc au·
uk:J.nna Japonnais, qui font une forte de Caraétere. Japon vcr~
defi"us de tout ce dont qui que ce Olt p~t e van·
Je failis cette occalion pour remarquer la maniere le NorJ.
ter autant qu'ils pouvaient s'en fouven~r. No~e
dom ils repre[entent les pays qui font au Nord du
Int~rprete était fi chargé ~es viandes qu'tl portolt~
Japon i voic i corn ment ils les marquent. Au delà
u'il avait peine à nous fUlvre. Nous ne nous ar
du Japon & vis à vis des deux: grands promontoires
;êtames pas davantage dans l'antichambre: n~us en
au Nord de la Province d'Osju, était j'Ine de Jefapartîmes ,d'abord, & étant arrive 7. au trOifieme
gafima, & au delà de cette We eil un pays deulC
Château, nous remontames à cheval. ,L~ Gouver·
fois
grand comme la Chine divifé en differentes Pro· he , ou comme il eft nomme a prefent,
neur SlU
h .
vinees, un tiers de fan étendue Y'3 au·delà du cerTfufimano Cami. fe rencontra fur notre c emJ~'
cle polaire, & court à l'Eil beaucoup plus loin que
orté dans fan Norimon, qu'i.l oU,vri.t pour l~e
les Côtes les plus orientales du Japon. Ce plysa un
Puelque chofe au Jorik~. Sa fu!te etolt compof~~ grand golfe fùr le rivage oriental, vis à vis de l'AJe huit valets de pied qUl marchOJen~ dev~nt ~o~ N n
n~eri9ue; & ce golfe cfl: à peu près de forme quar~'
rimon, quatre pages qui marchaient a ~ote, u
ree;
li n'y avait qu'un paffage entre le pays dont je
Lancier ou porte-pique, un cheval de malO blanc,
parle,
& l'A merique, dans lequel il y a une petite
& trois' crocheteurs qui portaient des pacqtts
fur leur dos. Nous nous rendimes d'abord c ~ Hie; & au delà tirant au NorJ, une autre Jne 1011gue.. qui touche prelque de fes deux extremitez op'"
lui
il fit ouvrir les volets de fa chambre,
rees les deux continens, favoir celui de Jellà à
rcs'amt devant nous avec .un jeune Ge.nti!hom~~:
OueO:,
& celui de l'Amerique à l'Elh & formant
& le Secretaire du plus Jeune Commlfi"alre..
~uafi
de
cette
maniere le palfage au Nord. C'était
he nous reçut lui-même & nous fit compltme~t
fi
pe~ près de la même maniere que 1'0111 oit rcprcflir .le bon ~ccueil que l:~mpercur nous a&f:: .ente toutes les terres inconnues du Pole Antarétir~m. III!
1
que
192.
10.
0
194
HIS TOI R E
que qui y font ~arquées comme des HIes• .neche~
Tfufimano Cami, nous alla mes chez Genfelmon Si.
DO Cami, où nous fumes auffi regalez avec honneur
en prefence d'un ~rand no~bre d'étrangers.' qui,
quoi qu'inconnus a notre egard, fe donnolent un
grand air de familiarité; il Y avait entre autres les ,
freres de Siube, &: de Genfeimon, un defque1sa.oit
un fils qui avoit du mal aux jambes, &: l'autre un
frere qui avait des puftules [ur fon vifage: ce fut
fur ces deux incommoditez qu'on me demanda mon
feneiment. Les Dames étoient en foule derriere des
paravents dans une petite chamb~e é~lairée; now
cnantames &: danfàmes pour les divertir. Dans b
mai[on de Tonnemon, qui tut le dernier que nous
yifitames, tout s'y paffa comme l'année précédente,
avec la derniere mâgnificence; de forte que noui
n'eumes aucune peine de repondre à une 1i grande
honnêteté, par le di vertifièmcnt que nou~ donnamel
:à la compagnie en chantant &: en dan[ant de notre
mieux. Ce fut ainli qu'enfin 110US retournames à
l'hôtellerie un peu après le coucher du foleil, aul1i
aires de nous être delivrel. du travail de cette jour.
née, que pleins de joye d'ailleurs de la favorablere·
ception que l'on nous avait faite p~r-tout.
.
C mmeDt
L'après midi, avant gue nous tuffions au logts,
k~ Hollan- plufieurs d'entre les Confeillers d'Etat o~dinaires en·
dois re~oi- voyerent leurs robes. Q!lelques-uns les htfferent chet
yent les
nous à notre Joriki mais les autres voulurent attelJo
prefens d~s dre notre retour pour les remettre à l'A mballâdeur
Jap~s;lnou1.1ui_même: plufieurs auffi porterent un prefentpour
notre premier .rn~erprete, &: pour le fil~ de l'hôte
qui les inrrodulfolt chez nous. La receptlon de CCl
robes, !odqu'elle eft faite par l'Ambaffadeur enper·
fonne, fe fait avec les ceremonies fui vantes: dei
Kulis ou porteurs marchent devant avec les robes
<Ju'ils portent dans des cailT~s; l'un d'eux l?orte l~la.
ble ou la planche [ur laquelle les robes dOIVe!lt ~tre
étalées, avec une lettre de fortune, comme Ils 1ap'
pellent, qui ef!: un affemblage de coràons plats en·
trela{fez. enlemble par un bout, & em'clopez dansuo
papier lié autour d'un nombre impair de liens defo~~
1
DUJAPON.LIV.V.
19f
d.c papier, comme qui diroit, B. f. 7. Il, &c.
de dlfferentes couleurs; quelquetois dorez ou couleur d'arge~t.
La. p~r1onne qui doit ofli-ir les robes, & qUI eil: ordmalrement l'Intendant du Seigneur qui les cnvoye, efi introduire par notre Jori!li dans l'app_art,e~11ent de l'Ambaifadeur, en preJence
de ceux?e fa lutte,. d: n?s hôt~s, &: des Interpretes; & s a{feyant VIS a VIS de 1Amba{làdeur à une
dif!:ance raifonnable, il lui fait le compliment lùivallt.
N. N. mon maÎtre m'envoye vous feLiciter de ce que
vous a'llez, eu votre audience de Clngé, & un be""
tems, ,ce qu~ efl Medithe tbonne IIvRrJture). Vos pre[triJ l,tl ont ete fort agreables, & il fluh.lite que VOlts
_"epriez, en échRnge ce petit nom6rc de robes. Dans
le même teJ?ls il donne à l'Interprete, qui la remet
entre l~s mal11s de l'Ambaifadeur, une grande feuille
de papier fur laquelle eft écrit en grands caraéteres
le nombre des robes envoyées, &: quelquefois la couleur dont eUes (ont. Le c..:apitaine, pour temoigner
fon refpeét, tient. la feutlle de papier fur fa tête.
Tout le monde qUI ef!: dans la chambre fe tient dans
un prof?n~ file~ce, les uns affis, les autres à genoux.
L~ C~pltalne rep'ond au compliment avec une in.
cltnatlon en ces termes: Je remercie N. N. très humblement de (es foi1u pour nous procurer une audsence
prompte & favorable; je le fUN!ie de continuer encoreJes tons ,offices aux Holltz.n.dois; je le remercie llujJi
~e Jon preCIeux P~efeTJt, & JC n.e manquer~i PlIS d'en
!Y!fo rmer mes ma/tres Je BRfa"Vla. Les complimens
ctant achevez de part & d'autre, on porte du Tabac
& tout, l'appareil pour fumer, avec une ta!fede Thé.
2près cela on fait venir des liqueurs diftillées, & un~
table avec des plats d'argent pleins de confitures:
cette tab!e eil: pl~;é~ ~~vant celui qui a poné le pre~n~, !X cf!: pne CIVIlement de gouter des liqueurs
dl/hl ees a BataVia par les Hollandois, & de ne point
reg~r~('.r à la petite!fe du regal qui lui eil: pre1enté,
mais a a bonne vo~onte & à la fincerité de cœur avec. lefguelles on le lui offre. On remplit alors un
ptt:t ~er~e de vin couvert, l.]ue les Japonnois appel,CII, SlIltl: le Japonnois le prend à la façon de fon
1~
P&Js
Oll
1:
'1.96
DU
HIS TOI R I!
}>-lYS avec les deux mains, il le porte
à la bouchej
&: le boit en apparence avec beauconp de plaifir juf.
<ju'à la derniere goute, à deux ou trois gorgées: en.
fuite tenant le verre [ur le Tabac ou fur l'eipace qui
dl: entre deux nates, pour l'effuyer, & frottant le
fond du verre en dehors avec le pouce ou avec un
n10rceau de papier, il le donne à l'Ambaifadeur qui
lui fait raifon avec le même vin, & de la même ma.
niere. Il boit encore à la famé de l'Ambaifadeur,
& rend le verre avec les mêmes cérémonies au Jori.
ki, qui boit à une autre perfonne, & aioli àlaron.
de. On hoit de cette maniere plulieurs fortes deli·
queurs jufqu'à ce que chacun en ait gouté, & les ait
prônées comme des Mi[eraties. Pour finir, l~ ver·
re cil: donné à l' Ambàffadeur, qui n'en boit qu'une
goute, & fait remporter les liqueurs. Dans le mê·
me tems, l'hôte plie les confitures dans du papier 1
qu'il lie avec des liens de [oye, & les donne à un des
valets. Le Gentilhomme prend [on congé avec des
remercimens qu'il tàit pour les civiJitez qu'il are·
,sues, & fur-tout pour les excellentes liqueurs de
:Mi[eratie, qu'on lui a fait boire. L'Ambatfadeur le
. prie derechef d'affurer fan maître de la fincerité de
{es refpeéts, & de [es aétions de graces, pour fa fa·
veur, &: [es bons offices: le Joriki fait encore un
compliment pour lui-même J à peu près dans lemê·
me efprit; alors le Gentilhomme eil: conduit hors
de la chambre, où a~ec des complimens Je part &
d'autre, & avec une profonde reverence J il prend
fon congé une [econde fois.
Le 2. j d'Avril nous reçumes dix belllls robes dela
part de Bingo; cinq auffi belle~ qu'on en pût voir,
d'un tiffu à fleurs, envoyées par le jeune Prince de
Firando, qui venoit d'être fait un des Seigneurs du
Temple à la place de celui qui eil: maintenant Prefi·
dent du tribunal de Juftice à Miaco: une paire de
robes chétives envoyées par lefecond Gouverneur de
Miaco, qui a l'inrpeétion [ur toutes les affaires criminelles, & fur les executions qui [e font dans la
capitale. L'autre Gouverneur nous cn avoit envoyé
le même nombre le jour précédent; elles étoient
a\ll1Î
J A PO N.
L IV. V.
197
auffi amples que mauvaifes. Lt' nombre des robe.
que nou.s reçumes étoit celui-ci, trente de l'Empereur '..dIX cl; Bengo, aut~nt. de c~ac'u n des quatre
Confelders d Etat ex traordlOaires. Cinq de chacun des
trois Seigneurs du Temple:. deux de chacun des
deux Go~ verneurs d~ Jedo: en wu t 113. Treize de
~e1es qUI foot.donnees parl'Empc.t.:l.:rap aniLnnent
li la Compagl1le: tout le reile eft ~ l'AmbaJfadeur
T~u.te cette afiàirc fut expediec: à deux heures aprè~
mIdi.
.
Le,16 d'AvriÎ fe paira à ~mpaquetter notre bagage, a louer un nom bre fu fh[an t de Kulis ou crocheteur~, &. quinze .chevaux pour notre voyage
Le
matin du meme Jour nous lentimes un tremblement
de terre) dont les chocs furent violens, mais l'intervalle e~ était, affez long, de [one qu'on aurait pu
compter J ~fqu'~ q~aran:e depuis un choc jurgu'à l'autre. Apres mmult, tl fe fit [eotir de nouveau avec plus de violence,
-
+ttt~*+**~*+*~*+~~++*+
CHA PIT REX V.
Notre fecond Voyage de Jedo à
agazaki.
E. 17 d'Avril 31frès la pointe du jour, nous par~' D('part
. tunes pour nous en retourner tic Jcdo à J aga - de Jedo.
zakI, & vers les neuf heures du matin, nous nous
trouvames au bout de cette grande capitale; où l'on
plantel:spoteaux, pour les dec ara.tions de l'Er.1pereur, & pour les ordonnances publique.. De là nous
fumes aux faux bo~r.gs de ~in3gawa, traverfez par
une ailez grande nVIere qUI [e jette tout aupr' s dans
la ~aye de Je 0, après en avoir reçu une autre plus
retlte .. Un peu pl~s avant, non loin de la place où
on faIt les .executlOns '0 font les côtes & Je village de
Surunomor~, renomme pour la f"chc dcs huitr i
que nous Vlmes en grande quanti té fur le ri l'acre.
dO pifant auprès. A l'entrée de cc vilbge ru~ la
1'01 te dl: un fameux Temple de F:1tzman, oll l'on
L
1 .~
btrar
198
HIS TOI R TI
ga:de la pier~e Sufun?t'l.. C'eft une pierre de taille;
noire & polle, placee dans une petite tablette de
Bambous, élevée environ deux pifds fur le rel. de
chauffée, au milieu du Temple. Au haut du mê.
Ille Temple à côté on avoit attaché un iàbre & des
reprefentations de chevaux, afec des ornemens de
p~pier .d~coupé en forme ~e chaines: nous ne pumes
bien ddhnguer quels en etaient les autres orne mens.
A une heure après midi, nous arrivames à Kawau.
ki, où nous dinames; nous fumet après cela 'à Ka·
nagava à quatre heures du fair. NOU$ nous yarrê.
tâI?es par,.Ie ,ca.pri~e de nos Interpretes, qui préten.
dOlent qu tl etolt lmpoffible d'aller plus loin, à cau·
fe 9ue toute~. les hÔt.elleries étaient retenues pour le
PrlOce de KI)nokunl & pour les gens de fa fuite.
Le 2~ d' Av~il nous parti mes de Kanagawa à cinq
Ileures ~u matin, & nous fumes au lon~ village de
Fodogal .ou Semmatz, conteriant quatre ou cinq
cens malfons: nous paframes pour y aller fur un
p~nt dont la riviere, qui était grande, était rem·
l'he de bateaux & de barques chargez de bois.
~e Semmat'l. nous allames au village de Kafiuwo,
ou nous. ~etna~quames ~u';11a droite & à la ~uchc
du chemm, 11 Y avolt des pierres quarrées, llc
des Idoles deffus. dont elles étoient les piédef~ux. Nous trouvames immediatement après le
Village de Fotzka, d'environ Joo maiCvns: il dl
{"ur les bords d'une grande riviere, que l'on patrc
fur un beau pont de bois. Nous fumes enCuite au
village d~ ~arafiku & au bourg de Fudfi(ava, fitué
fur un~ flVlere du ~me nom, qui a un beau pont
de bolS. !,fous vlmcs au même endroit des Ido]~s ~e pierre, comme au village de Kafiuwo, qui
etolent aux deux cÔtez du chemin, Nous étions
encore à Fudftfava, lorfque le Prince de Kijnokuni
y palf:1. Nous comptames quatre-vingts chevaux
de ~aJn" & plus .de Cl?quante Norimons qui corn·
pofole~t fon t~al~: il y avoit' encore plus de
cent piques ordmalTes, trente- fix piques avec des
tou,ffes de plumes, & des queues de cheval, trente a quarante hommes qui PQrtoient des arcs 8c
des
DU JAPON. L,v.
v.
199
, des fleches, fàns compter ceux qui étoient dans
les maiious. & que nous ne pumes point voir. Il
y avoit plus de trente caillès ou grands coffres avec les Tfiaps ou Armoiries de l'Empereur, &;
autres 1 en or. Du bourg de Fudfifava, nous a11ames au village de Jotfuja, à une extremité duquel
nous remarquames fur le chemin une Idole appellée Fudo. affife, avec des cheveux rouges ou couleur de cuivre, Sc une longue robe. Elle a:oit
quelque chofe que nous ne connoillions pas {ur
une épaule. une flamme rouge derriere, le pied
droit appuyé fur la pierre qui fert de piédeltal.
& le gauche pendant. Elle tenoit à fa' main droite
quelle appuyoit; fur fon genou. un croc, & un coutelas ou fabre; Sc à la main gauche quelle tenoit élevée, une double guirlande. Nous allames de là à
Jawatta, où il ya un Temple de Fat'l.man, 8c pell
après au village de Pirat'l.ka, au bout duquel cft un
pont long de +6 nates. qui mene au village de
iC.oorei, au côté oppofé de la riviere. Nous traverCames ce village pour nous rendre à celui d'Oifo, où nous dinames, après quoi nous marcha mes
entre un bois à notre gauche, & des champs fertiles & agreables à notre drGite, pour aller au vIllage de Koifo. d'où nous fumes aux lieux fuivans;
le village de Sijvomi, celui de MedCawa, où il ya
deux ponts, l'un de près de dix nates de longueur,
l'autre de cinquante à foixante ; les deux village.
de Mejongawa, fitue'l. fur les côtes; celui de Kodfiu qui a un pont de dix-huit oates de longueur,
Le beau village de Sakava, celui de Sanofara, &;
en6n le village d'Odowara, lieu de la relidence
de CangoCama un des ConCeilliers d'Etat. Cette
vil e eil: entourée. de foffe'l., de murs, & a des porte~. avec un beau Château où le Seigneur fait fon
feJ?ur. Je comptai fept à huit-cens mai [ons· de-pUIS l'entrée de la ville jufl\u'à notre hôtellerie, 011
nous paflàmes la nuit.
Le 2.C) d'Avril nous parti mes dans des Can'gos ~
la, pointe du jour, 8c nous palfames auX lieuX
fwvans. le village de Katama, celui d'Iriuda où il:
If
'1.
200
DO JAPON.
HIS TOr R E
y a un fameux Temple appel1é Tfio taï Si av-
lln~ gr~nde
infcription en caraéteres d'or' fUr ~
Thotor.lfan ou la porte. Le village de Jamafaki
non lOin duquel nous pa1Tames fur un pont &
!10~s fu;rnes aux deux villages de Jemotto: on ~oit
a.l entre~ un T~mple de Sorinfi ou Forinu, vis.à.
VIS du VIllage ou eft le Temple, à la droite en mon.
tant. De l'autre côté de la riviere, il Y. a des vil.
lages, & .des pains chauds. Nous pa1Tames enfui.
t~ dans les village& de Kawabatta, Hatta, Kafinok.l, M~to, Fakone, St. Fakone Gongin. Ce der.
nIer yIllage, comme Je l'ai remarqué dans mon
premIer, Journal, cft renommé à caufe du voilina.
~e de dIvers petits Temples, où l'on vend des in.
dulg~nces P?ur le fo~la:gement des enfans morts
que 1on crOIt confinez dans un lac voiun comme
dans leur Purgatoire. A onze heures no~s entra.
es dans la ville même de' Fakone, où nous di.
nam~s: ,on nous y dit que le lac fur lequel la ville
ell: ittuee Fe forma par un tre.mblement de terre.
Nous partI mes de là à midi, & nous palTames
aux Villages de Jamanaka, Sa1Tavara, Midfija'.
Skabara. Fatznegafarra, & Kawaragai où il 1
a un pont de vingt nates de longueur , 'que nous
pa1Tames. pour aller à la ville de Miffima, conte·
nant environ 6;0 maifons fans compter celles des
fau~bourgs. 11. y a une grande place longue de
trol.s-cens pas, & large de cent, dans laquelle il y
avolt un Temple qui fut brulé il n'y a pas longt~mps; ce~te pla~e étoit enrourée d'une muraille St
d arbr,es:. 1 endroI~ du Temple où étoit placée 1'1.
dole etolt entoure d'une baluil:rade de Bambous, [ur
les ~arreal1x de laquelle étoient fufpendus divers
paple~s: Au haut bout, il Y avoit un petit Tem·
pie. bat! dans ~n bofq.uet, près duquel il y avoit une
~a~fon de bOlS, nOIre. Il y avoit tout près un
VIVier de peu de profondeur, où l'on nourrilToit
des anguilles privées & d'autres poi1Tons. De Mirfima. nous traverfames pluueurs villages prefque
contigus lc;s uns aux autres. & nous fu.mes à ce-
n:
-
l~
LIV.
V.
2.01
lui de N:mga au bout duqu~l il y a un Temple de
Fatzman, &: un autre Temple qui n'en eft pas éloigné, avec un pont de trente-cinq à quarante nates
de longueur., De là paffant ~ans plufieurs. autres
vi lages que Je ne nomme palOt, nous arnvames
environ à iix heures du foir à notre hôtellerie dans
la ville de Numadfu: quelques-uns de notre fuite
furent fans perdre de tems voir la grande marmite de
chaire de Joritomo.
Le 30 d',\vril nous partimes de Mit1ima de bon·
matin, ~ nous allames d'abord au Temple de F:J.tz·
man. Le mème jour gue nuus avions eu un orage li vIOlent a ]edo, qui étoit le 0 d'.'\ vril. é feu.
prit au voiiinage Je: ce Temple & conluma un
grand nombre de nuifons, dont nous vimes
Guelques-unes de rebâties, mais bit:n ùa.·antage
qui étoient en cendres. De là palEwr par divers
villages conliderables, Farra, Jofijwara, Ful;kava, & autres, nous dinames à Kambara. Après
diner nous allames un peu a pied julqu'a ce que
nous eullions paffé la montagne; nous trouvames
fur norre chemin les villages de Kanfava, Juji. 1madfikka, Okitz, &: autres; & à cinq heures &:
demie du foir nous arrivames à celui ete jeferi
où nous couchames. A une lieue de Jdèri on
nous montra un Temple dont la fituation etoit ex:..
trèmement agreable & avoit un air romandque;.
il eO: fur une montagne, on y monte par un bel ef- T m 1
calier de foixante marches. Une caièade tombe rem:rq~:'
de la montagne dans un grand baffin ou vivier en- bie.
touré d'arbres; la montagne eft nue & efcarpée en
certains endroits, en d'autres on y a planté des ar.bres. Nous viOles le même jour un Echinus blanc,.
ou heri1Ton. de mer, fort beau, avec des picquans.
courbez. On expofe en vente à Jeferi de- fort
beaux paniers, & d'autres ouvrages de cette naru·
re, qui y font portez vrai{emblablement d'Abikava.,
00 S-yriga.
~e premier de Mar nous l'animes de Jeferi à la
~omtç du jou~ pour éviter. la l'luye, qu'un ma:i-
--
l $.
mes
~o::
»rsT'OIR:t
Dier' de Jeda avoit prétendu préd'Ïrc qui tombe.
toit ee même jour. Nous fumes portet. avec des
Cangos depuis Abika~a ,. qu'on. appelle aufii Etsjll
& Syriga, fuivis pat des d'rains de Bikuni ou RcJi~
gieufcs mendiantes, Be. de }.ammabos, ou P'rêtrts de,
montagne. Il y a.voit fur une butte à notre droite:
un. p~tit Temple de bois avec une Idole de pierre,
qUl etoit celle de Dfifofobat'l. ou Utzno, Dfifo: on,
voyoit affel. pres. de là un autre Temple appellé Fanna Sorri Dtifo.. Nous rencontrames, peu après un.
J:ful'e <te nombre con1iderable de' Jammabos de Quanwon,
~a.D.:q.ui quétoient, 8c faifoient retentir lllurs, clochettes.
~~.
J'eus l'occafion de voir l'Idole de QUaB won, entre
res mains d'un Prêtre qui était fur le chemin à demander la charité; il faifoit fonner la dochette de
mêIre gue les Jammabos. Cette Idole étoit dorée&. ci(elée, elle avoit un grand nombre de bras, deux
defqucls étaient élevez fur fa, tête ;. ces deux bras
é.toient plus longs 8c plus gros que les autres; & fur
€hacun il y avoit un enfant. L'Idole avoit encore
huit petits. enfans placez, autour de la têt~, fix desq.uels formoicmt une efpece de couronne, lit les deux
autrClS Ull peu, plus grands que· les autres étoient fur
Ie: front, l'un affis 8c l'autre debout. 11 ca proha,
ble- que cette Idole repreCente les apparitions d'A·
mida, qui vint au, monde pour le bicrn du geore
humain. en. -differens tems, 8t fous plulleurs
formes. Nous, dinames à Okake,. &. nous y ap·
primes un fort trine évenement qui s'y étoit
pifé le 8 d~ Avril, jour dont nous aYons parlé
,lus haut; le feu. s'étant mis au' village en plein
!Our. 8t le vent fouftlant avec iropetuofité, tem·
brafemcnt devint très furieux. fur quoi les babi·
21ans_ F,etournant des champs" les uns trouverellt
!kW'" entans aél:uellement bruIe'li • les autres hors
d'état d'être [ecourus: ce funene fpe&lcle toucba
ii furt les. pere$ & meres, que plpfieurs d'entre
tux de' dci?tpoil' fe jetterent dans les flammes. ;\
~atre heures. après. m.idi nou~ ~ri~ame$ à l'anaJ'
~ aQUs.
pafiàmes.la. DW~.
J
DU A P'-O N. L IV. V.. 'tàt
de Mai nous .parrim~s dans des Cangos à.
q!Ja tre heures du m~tln. Pres du~ village de Siu.
deo" 8c fur le cbemlD, on nous montra une pierre
r~nde, dont la ,groffeur étoit auai· grande que la
circonference a un, grand: chapeau.; on l'appelle Ja..
nakan~· Mat'lino. I~ 1 à càu~e, difent-ils. q~e ce fut
une plece de boiS changee en pierre. EUe étoit.
fort .dure.. 8t. fi l~u~de. qu'un, homme v.igoureux.
aUfOlt eu peine a 1enlever. Nous arrivames peu
après à la ville de Nitzfàka., fituée fur une mon.
tagne. Non loin de cette ville en un Temple de
Fatzman, 8c. un cbamp appellé Jomega Ta.. ou
Je champ de fIS. d'une belle fille, à la memoire de
laq~elle il y a un monument de pierre au ~u mi,.
lieu. Ce champ n'eft pas fort grand; St l'on dit
qJle cette fill~ ay.ant eu. ordre de fan impitoyable
mere de foulT dans un Jour une piece de terre de
la longueur & de la largeur d'une rue, elle mourut fur le champ au mêm~ en~roit où l'on à placé
le monument. Il y a affez pres de cet endroit. à
la gauche fur les montagnes, des carrieres d'al.
bâtre. Nour dinâmes à Midske. 8c nous fume.
portez de l~ à Fammamatz où nous arrivâ.mes à
cioq heures d4 fair.
Le troifieme de Mai nous partimes de Famm1.
matz à, cinq, heures du matin. Nous primes ua
bateau, 1 MaJIfaka, .& nous fu mes paffez dans trois
quarts d'heure à Array. où nous nous arrêta.·
tames un peu en attendant que nos chevaux fuffent
prêts. Il ne laitlà pas de nous en couter un Itze.·
bo, (c'eO: environ 1f che1ins d'Angleterre): cet ar~eot fervit à regal~ botre Bugjo 8c nos Tnterpretes :
ils furent bien' el'vi" tandis qu'ils nous lai fièrent
jeûner. Etant partis d'Array, nous pafiâmes près
de plufieurs collines embellies par les fleurs iUe
carnat & pourpre de Ifubaki • les plus belles qu'on
R~t. voir ~ elies y viennent en abondance.
OU3
dloames a Futag:lva, nous fume~ enfuite au villa.
ge de Mijumeno Tleija, & traverfmt de là le
~uxbourg de Jolida qui contient I~O maifons.
1 6
no~~
Le
2;.
204
HIS TOI R B
nous entrâmes dans la ville qui en a environ 6~~'
avec un grand Château orné depluGeurs Tours élé~
vées. Après avoir traverfé la ville. nous entrâmes
au fauxbourg oppofé. de 1+0 maifons: il s'étend
jufqu'au grand pont de Jofidamatz foutenu par 316
arches. De là nous paffames par les villages de
lJootfija. de Koo. de Goju. &: quelques autres; &
nous fumes a cinq heures du foir à notre hôtellerie
.d'Akafaka.
: Le 4 de Mai. qui etolt un dimanche, nous fu.
Ees appeliez à àeux heures du matin par notre
impatient Kfodago: nous partîmes demie- heure
2près, par un beau clair de lune. NOliS traverfames
Jes villages de N3gafawa, de Fofoodft ou Fofoofi,
où il y a un fameux Temple &: une Univedité; Ja.
manaka, Fulikava. Kamba{aki, Seoda, & Gfira,
enfuite la ville d'Okafaki- d.'environ 700- maifons;
La ville .. &: le Château, font bâtis fuI' une colli.
Ile au pied de quelques- montagn«!s·; le Château e~
feparé de la ville par des murs, &: de larges- fofièz,
fur lefquels il y un pon t de 2.08 oates· de- long: la
ville.. &: le premier fauxbourg. où les momagnes
1iniffent en· une plaîne qui s'étend ju[qu~à·la mer,
()nt pluueurs maifons bien bâties, grandes &: corn·
modes. D'Okafaki nous· paffames- par les- vinages.
cl'Utoo. Ojama, &: Uffita r &: nous- dînâmes
au bourg de Turijn. Nous en partimes à midi t
& nous traverfames les villages dl 1mogava:. Ario,
Naruma ... &. Kaffadira. d~où l'on nous montra· dans
l'éloigne:ment Mufafifijl'o.- Nous· arrivames au~
faux bourgs de la viHe de Mia:. à.I'entrée de cette villo
il. y a Temple remarquable pal'ri:i:lgroffeur crxtraordiD~lre de l'IdO'!e de boii-'qui Y' dl: renfermée. Elle rem··
plit Je Temple entier. &. a la- main gauche couchée
iùr le genou- gauche. &: la droite fur. le genou droir~u'elle tient un peu plus élevé que le gauche. },I y i'
un· autre. Temple dans l~ même ville avec une IJole
pareille" ?1ai~ le Temple dont je- viens de pa. 1er eft
plus- p~r~lc~lt~rement dl{bn~ué' par (on alltil]uiré,.
.j'ine ete. bau. comme il. diiÇn.t- par le- funeux Ar,.,
chi,
DU
1AP ON.
Llv. V~
-lOS
chiteéte Fidano· Jako, avec un art fi fingulier, que
toutes fes parties jointes enfemble fe fupponenr
mutuellement,. fans être appuyées par des piliers
comme dans les autre's Temples. Je ne repeterai point id ce qui a été deja dit dans Je CShapitre
treizieme de ce Livre au 11 d'Avril, du Temple
Afra, ou Atzta, qui eft dans la même ville. Notre hôtellerie à Mia eil: fort bonne, &: a fur le der..
riere une belle baffe-cour avec 'un jardin.
.
Le 5' de Mai nous. primes des bateaux à cinq
heures 8t demie: lé temps était beau, & le vent
favorable: après avoir paGe par Nagafim~ ou l'tOe
de Naga, nous arrivames à dix heures du matin à
la ville de ce nom, où nous eu mes un bon diner.
Le Château de Nagatima eil: bâri fur le rivage
& n'a point de Tour. Nous p~rtimes de Nagafima
à onze heures; & entre :tutres endroits nous traver[ames les villages fui vans , Jafnada, Fonda, Jawatta, Fazemura, Fadlitonka. Oiwake, &: Ongofo: dans quelques-uO' de <;es lieux on vend du
Mangue. Environ cinq heures du fair nous arrivames à notre hôtellerie du bourg lüjakas, où nous
paffames la nuit.
".
Le 6 de Mai nous partîmes à quatre heures du
matin. Les principallx endroits que nous traverfames furent les villages de Sjoono, K.umigawara~'
Tomida, Odamura. Seikinfi, Waddamura; la ville de Simmatz, ou plutôt le f:;.uxbourg de la ville
de NJbi Jamatz, que j'ai nommée Kammi )amma, dans mon premier journal fous le -[ + d'A vril;
le village de Noliri, le bourg de Seki. où l'on vend
des torches ou meches de Bambous prefque dans
toutes les mai (ons ; & au voili03ge duquel eil: un
'l'emple d'AmiJa, & un autre de Dti(oo, avec un
balTin de pierre plein d'eau au devant, afin que les
adorateurs y lavent leurs mains; le bourg de Sawa,
ou Sawabcno Kinolla, nom :né quelquefois aulli
Sakano:ira où nous dimm s le vilbge de Jamana·
ka qui a un Mia, ou ChJp~.Jc; celui de Tfudi
jamma 1 où nous trouvames un grand nombre de
! 7.
pele-
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-
- - - - - - - -........
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HIS T 0
lt E
pelerins d'Isje: divers autres villages encore que je
ne nomme point, lit la ville de Minak.utz où. nous
couchames cette nuit..
.'
Le 7 de Mai nous partimes de Minakuts àla
pointe· du jour, nous paffames par les villag~s de
Kitawaki, Idfumimura, Nadfume, Fari., Koofi.
bUTo, le bourg d'Iffibe, le village de Takanomu.
ra, celui de Menoke, où l'on prepare lit l'on vend.
la poudre amere que certaines pcrfonnes prennent
au lieu de Thé, lit le village de Tibara. Nous fu:
mes à dix heures du. matin. à la< petite \tille de Ku.
1àts, où nous din·ames. Nous paffames enfuite par
les villages de Satznanofi., Okanotfieja, Sinde, Seta, lit la ville de Dfiedfi, pour nous rendre à celle
d'Ootz, où nous fumes obligez de nous arrêter par
la fantaHie de nos Interpretes, qui ne voulurent pas
avancer d'avantage après, quoi .qu'il.fût à peinc
deux heures après midi.
Le 8 de Mai nous partimes de Ootzdebon·matin·:
nous.pafiàmesau villag~ ou bourg 4'Odani, au·x v.illages de J~otfieja 8t de Jabunoll:aprefque contigus ,~
ROUl. no~s trOl,l.v~rnes peu après à un village, fitué au
pied de la moniagne de Finoo. Il y avoit près de cc
village une pierre dreffée , fur laquelle étoient gravez.
les mots. Namandabuds: vis-à-vis de la pierre étoient deux malfaiteurs fur la croix. Tout au. dcvant, 8t derriere la. pierre, dans un· certain. éloignC!'
I!1cnt hors de la vue de~ perfonnes executées, étoit
affis. un Prêtre fur un tapis vieux & chetif. avec
ièpt tablettes deva~t lui fichées en terre. Le nom'
de la perfonne morte étoit écrit fur cliacune de ces·
tablettes., 8t deffus· il y avoit une banniere fufpendue avec les mots Namandabuds. Le Prêtre avoit
la. tête couv:erte d'un grand bonnet d'Eté verniffé •.
& une planc~e devant lui fur laquelle étoit une cloche renverfée qu'il frappoit de temps en. temps avec un marteau en chantant. Narnanda. Il avoit
auffi, près de lui 1,lne grande cuve d~eau, &. fur une
planche quelques papiers. écrits fufpendus vers l'eau.
avec ·des branches de Skimmi, tout auprès. Le
Prêtre prenQit de temps en temps des branches de'
.
_.
. -' --. -Skim,
DU
J AP'ON.
Ltv. V..
107
5kiromi , les· attachoit au bou~ d'un. bâton, les.
trempoit dans l'eau" &; en arrofo1t les tablettes dont
je viens de parler, pour donner du rafraic~i~eme~t
aux amcs des pcrfonnes dont les noms· etolent e(fits deffus. Le leéteur. s'imagine ~ifement q?C
tult de peine ne fe prenolt pas pour rIen. Les fu·
perftitieui Ja~onnois. donnoient liberal~m~~t ~:s
Kasjes. au Pretre, apparemment afin qu il pnat
ur leurs ames: le dr,6le pourtant avoit une phytnomie de v.aurien, qui auroit dû faire croire qu'il
avoit grand befoin de prieres po~r tui-?lême. . D~
(et endroi.t nous fumes peu apres a KIO, enfulte a
Jama, Sijnokio, 8t fur le chemin. qui mene au
Temple de Kurodanna., qu'on. laiffe fur la droit~,
Sc celui de Giwon, fur la gauche un peu plus lolU.
Après cela' nous paŒunes fur. le fan:eux pon: de
Sanfionofas, Be enfin nous arrlvamas a notre hatelkrie de M iaco., une heure après le coucher du folei!. Retour~.
Le 9 de. Mai notre Ambaffadeur re~ut un P!efent Miaco.
cle cinq robes. de la part du- Prefident du tribunal
de juftice à Miaco. Les deux Gou~erneurs .de la
même ville lui envoy~re~t ~hacun c~nq Schults ~n
Maniere de preCent: Ils etOient envelope'l. ~e papier
Sc mis au milieu d'une planche, de la mamere dont
on en ufe quand on s'envoye des prefens l'un à l'autre, dans le pars. Sur la même planche ét~ient
(inq lettres pliées, chacune avec une adreffe ddferente, 8t un Schuit d'argen.t de~ans, à c~cune.
Le même jour on nous prdenta. a ~cheter dlV'~rfes.
marchandifes· Be ouvrag~s. de la fahr.tque de Mlaco.
Cela nous étoit porté dans notre chambre par nos
.domeftiques Japonnois, à caufe q~'il n'eft pas per.
mis aux marchands de nous vOir. Nous fumes
même obligez deux fois de renvoyer ce que nous·
.euions d"acheter, à caufe de-quelques petItes Ido.·
les de bois qu~une rigour~fe re.ch~rche fit decouvrir, quoi qu'elles fe fufle~t ghffces p~~ megarde
parmi le refte de· la mercene-. Nous etlGlns redenbles de tout cet embarras à nos Interpretes, dont
les foins vigilans ne nous permettaient pas d'ache·
~~ q~oi que ~~ !tl~ qui ~ût !e ~oindre rappor\:~
203
HIS TOI R t
-ne les Idoles du pays: outre que les marchaoJ
dires que nous ach~tames à Mia~o nous ~o~toiellt
prefqu'autant qu'clics no~s aur01en~ coute a ~di,
ma, y ayant des perfonnees nommees pour regler
.les prix; ce qu'iLs font toû-jours à. notre deuvanta.
j1;e, autant qu'ils le peuvent.
.
Le Iode Mai nous repartimes de Miaco après
un petit déjeuner de mets à la Japonnoire, pourle.
quel notre' hôtefre eut un Cobang. fclon une vici~
le coutume. Ce.jour étant deftiné pour viliter les
Templ~s fomptuf:ux &: les autI:es édifices facrel
de Miaco, nous trouvames des Cangos 'lui noul
attendoient à la porte. Nous allames en premier
lieu au fameux Monaaere de Tfuwoin-.. où l'Em,
pereur loge lorsqu'il vient à Miaco vi{iter Je Dairi"
il appartient à la ièae de Siodo, dontles fe&teurs
adorent Nama Adai, &: que l'on dit avoir été foo.
dée il y a plus de 800 an~. La premiere cho[e que
nous y vîmes étoit le grand Palais où l'Empereur
eli logé: on y garde le poitrait du célebre Empe.
reur Genjogin, dans une petite Chapelle. Le rc~
pea &: la veneration que les Ja~onnois o~t j'our fa
memoire, approche beaucoup d un culte dl VlD St de
}'adoratio8: à la gauche, derriere un jardin deli,
cieux, eft un chemin par où l'on monte à un petit Temple bâti fur une éminencCf: l'on y conferve
les os &: les cendres de cet Empereur. D'abord
que nous entrames aux appartemcns du derriere, le
Osjo, ou Prieur du Monaftere fut a.verti de notn
arrivée. La maifon du Prieur cft agreablement fi·
tuée, précifément fur le bord d'une colline efcarpéc
plantée d'arbres &: de buifrons ,. d'une maniere irre.,
guliere, 8t pourta.nt agreable. Il. defcendit au Pa.
lais, fuivi de plufieurs jeunes garçops bien vêtus, un
èefquels était rafé & habillé comme un Moine, lit
dix autres jeunes Moin~s rarez. C'était un vieil·
lard d'un air agreable. d'un bOA temperament,
&: qui paroilfoit fe bien poner: ii ét6it vêtu d'u·
ne robe couleur de via ette. où d'un pourpre obfcur, avec une touffe , telle qu'on en porte à la
çour, de l~ même çow.ew-, ~ u.ne bou.de POil! les
.
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DU JAPON. Llv. V.
109
aumônes qu'il portoit à la ~~in " richement brodée
cn or. Il fe tint un peu elOJgne pour nous regarder &: donna ordre à des Moines de nous régaler
d'u~c taffe de Thé: nous repondimes à fan honnêteté par un ltzebo que nous. lui. donnan.'es en:
vdope de papier. En fartant 11 lalifa dernere IUl
un bon nombre de Moines affis qui formoient u~
ne double haye dans la chambre: il s'alflt au b~ut
de cette file i derriere un paravent, pour nous faIre
voir apparemment la pompe &: la fplcndeur avec
laque le il vit. ~itta,nt ce Pahis no~s fumes fur
une terraffe peu elevee fur le terre1O: eUe n?us
mena à un grand Temple voi{jn. foutenu,par cI~q
fois fix .gros piliers de bois, ou pour ~leux 91re
fcpt fois huit, en comprenant ceux qUI fouuen ..
Dent la gallerie qui fait le to~r du T:mple en d.ehors. Au milieu du Temple 11 y aVOIt ,une petite
Chapelle verniifée, magnifiquement or~ee avec des
Namandas & d'autres orne mens exqUis. Il y avoit aux deux côtez d'autres Chapelles avec des 1do es. Le Temple étoit auift grand qu'une Eglife
d'Europe. Les oates étaient levées d:-deffus le
plancher &: mires à l'écart dans un Calo. &: les
lampes bruloient continuellement devant les Idoles. Nous ne crumes pas qu'il valût, ~a pein: ~e
voir tous les autres Temples &: mations qUI etoient dans le voifioage. On nous fit monter pour·
tant à quatre· cens pas de là fur une butte pour G d
r.
{fc'
ran e
voir une grande Gum. ou cloche; eII e lurpa Olt cloche.
beaucoup en hauteur &: en circonference ce!le de
la feconde grandeur qui
à MoFc~u, mais elle
étoit mal faIte j les bords d'en· bas etaient tournez;
en dedans, au contraire de la forme dèS cloches
d'Europe, par où le fon en était en quelq~e, maniere étoufté au dedans. Comme nous'y euons.
un homme la frappa pour nous divertir avec. u.n
gros bâton de bois j il me femble qu'on en falfolt
peu d'ufage;' car le bàton était tout neuf &: attaché à la cloche. Elle étoit 'd'ail!eurs brute &: mal
fondue; fon épaiireur étoit d'un Siakf, ~omU1e
an nous dit. Elle avoit fcize Siakfs ~ hUit pOU.·
ea
--
.
- --
~-
--~
ç
~
---_._---
2. IO
DUJAPON. LIV.V.
HIS TOI R E
ces de hauteur, vingt-huit Siakfs &: huit POuces
de circonference.
Un Sia:~f ell: comporé de dix
Sums; un demi Siakf s'appelle un Gofum, ce qui
eft un peu moins que notre. em ?an, Glui eft au plu.
ce qu'un homme peut attemdre de l'extremité de
[on pouce .& de [on indice étendus; quatre Siakfs
font au Japon un Etofiro, de forte qu'un Ikiq
ou la longueur d'une nate , qui ell: autant qu'ullC
braŒe parmi nous, eft à l'égard des Japonnois.
deux Siakfs &: trois Sum ou pouces. Les Moines
qui avoient ordre de nous accompagner, nous me.
ncrent à l'autre porte du Monarlere où nous primes notre congé. De là nous fumes à un autre
magnifique bâ.timent, foûtenu par quatre, ou fd.
7.e piliers; avec deux maifons, une à chaque côté,
où il y 3 un efcalier qui mene au bâtiment dont je
parle. En defcendant de l'autre côté de ce bâtiment par trois efcaliers, l'un de 2.0 marches, l'au.
tre de deux, &. le troifieme de trois. dont les deux
dernieres étoient de pierre, nous all~mes à une au·
tre colline qui fait face à la ville, & qui eft couverte de Temples. Nous limes aller nos Norimons
à vuide devant nous, &: allant à pied pendant un
demi quart d'heure au travers d'un bois agreable,
t?~s arrivames à une place quarrée da~s, laquelle
Temple etott un Temple de Giwon, accomp~gne de plus
de GiW0D. de vingt petites Mia où Chapelles, avec des lampes, &. des placs remplis de viandes fur une table
qui était placée au devant àes Chapelles. Vis·à·
vis du Temple prks de l'entrée de la cour on voyait affis les Canufi. avec leurs habits d'Eg ifc
blancs, &: des bonnets roides de vernis: nos Inter·
pretes nous demanderent des Putjes pour les leur
donner. En fortant de cette Cour, nous pa!fames
par un fuperbe Tori ou porte de Temple, &: nouS
cntrames dans une Tue pleine de lieux de debau·
che. Les hôœs de ces mauvais lieux n'ont pas la
permiffion de tenir chacun plus de d~ux filles, cie
peur qu'ils ne s'enrichiffent trop dans ce commer·
ce. Le prix de la plus belle eft de trois Maas
par nuit, pour une beauté mediocre deux M22S.
.
~
2.It
~ un Maas pour la plus chetive. Tournant de cet-
erue à gauche pour entrer dans une autre, nous.
~ume5 dans un petit Temple appellé Kurumad~.•
udait face fur la rue avec le meme rang des mal{ons. 0:1115 ce Temple fur la droite était un petit
autel fur lequel on offroit de l'encens à Amida &.
à d'autres de leurs Divinitez; &: vis·à· vis, à quelque pas de diftance, il Y avoit un autre autel plus
grand avec des lampes allumées. Nous remarqualIles qu'à un coin fur la gauche derriere une grande grille de bois, il Y avait une lanterne à fix angb, couverte d'une gaze noire. On peut la faire
tourner comme une roue. &: l'on dit qu'elle eft
d'on grand ufàge. pour l~ deco~vert.e des chofes
inconnues, &: de celles qUI font avenIr. On DOU.
dit aullî qu'il y avait, dans la même lantern.e" un
erand livre fur leurs Dieux &: fur leur Reltglon.
dont ils ne pouvoieot ou ne vouloient nous rien
dire du contenu, en detail; il voulaient feulement
GOus faire accroire que c'étoit une. chofe f~rpre­
~nte & miraculeufe.
Notre BugJo etant lOtreduit par l'hôte dans le Tem pie, je iàifis l'occafion
de le Cuivre tandis que les autres s'an:êtoient da~s
brue. De K.urumado nous allames a une magmque Tour bâ,tie fur le penchant ~e la. mo~tagne-:
clle à cinq etages de haut, &: cmq .gallerles qUI
en font le tour. Nous fumes en[ulte au grand
Temple des Kiomids qui cft bâti auffi fur le penchant de la montagne: fa fasade eft foûtenue par
de longs piliers de bois. Je n'obfèrvai rien de remarquable dar.s ce Temple, &: dans deux autre~
qui Cont au voifinage, que ce que j'en ai marq~e
dans le Journal de notre premier V oyage. lis e.toient pleins d'Idoles, &: d'l~ages; entre a~tres tl
yavoit un combat reprefente fur unç muraIlle, &:
la fille d'Ofacca à une autre; avec plufieurs autres
chofes de cette nature, pour amufer ,les fp~étateur~.
Au haut de la colline, au-deŒus de l eau. II Y avolt
Un autre petit Temple avec plufieurs Idoles, en:
tre autr s la rcprefentation d'une vieille f:mme: ~
8'y manquoit rien d'ailleuri de ce qUl pouvait
ren·
o

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